National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission rappelle que la question de la persistance de l’esclavage en Mauritanie est discutée depuis de nombreuses années et plus récemment en 2003 à la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail.
1. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport du 28 septembre 2004 ainsi que du rapport de la mission de contacts directs qui s’est déroulée du 9 au 13 mai 2004. La commission note également les commentaires sur l’application de la convention, communiqués par la Confédération mondiale du travail (CMT) le 30 août et le 2 septembre 2004 et transmis au gouvernement respectivement le 1er et le 13 septembre 2004, ainsi que les commentaires communiqués par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) le 1er septembre 2004 et transmis au gouvernement le 14 septembre.
Eradication dans la pratique des séquelles de l’esclavage. 2. Depuis de nombreuses années, la commission examine la question relative aux personnes, descendants d’anciens esclaves, qui, selon les commentaires reçus des organisations de travailleurs sur l’application de la convention, seraient soumises à des conditions de travail relevant de la convention dans la mesure où elles sont obligées de travailler pour une personne qui revendique le droit de pouvoir imposer ce travail en sa qualité de «maître». La commission prend note de l’adoption du nouveau Code du travail, entré en vigueur le 6 juillet 2004 selon les indications du gouvernement. L’article 5 du nouveau Code prévoit l’interdiction générale du travail forcé, défini comme un travail ou un service exigé d’une personne sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel cette personne ne s’est pas offerte de son plein gré. La commission note avec intérêt que cette nouvelle disposition étend l’interdiction du travail forcéà toute relation de travail, même si elle ne résulte pas d’un contrat de travail.
Persistance du phénomène. 3. Dans sa précédente observation, la commission avait relevé que les allégations graves et concordantes de certaines organisations syndicales qui font état de la persistance de pratiques de travail forcé, séquelles de l’esclavage juridiquement aboli, n’étaient pas reconnues par le gouvernement. La commission note à cet égard qu’aux termes du rapport de la mission de contacts directs «la pratique du travail forcé est tout à fait exceptionnelle pour les autorités gouvernementales de la Mauritanie, somme toute pas plus développée que dans certaines métropoles du monde industrialisé» et pour le Conseil national du patronat mauritanien (CNPM) et l’Union des travailleurs de Mauritanie, «ces pratiques sont inexistantes». Elle note également que, selon le rapport du gouvernement de septembre 2004, la question de l’esclavage en Mauritanie est traitée dans le cadre d’une campagne fallacieuse et repose sur des allégations fantaisistes.
4. La commission note néanmoins d’après le rapport de la mission de contacts directs que, selon la Confédération générale des travailleurs de Mauritanie (CGTM), «les discours ou les textes ne sont pas suivis d’effet» et, selon la Confédération libre des travailleurs de Mauritanie (CLTM), «les situations de travail forcé existent sur une large échelle en Mauritanie». La commission prend également note du rapport de l’organisation SOS esclaves 2004, joint aux commentaires de la Confédération mondiale du travail (CMT) et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). Pour la CMT et la CISL, le travail forcé continue d’exister en Mauritanie et les nombreux témoignages contenus dans le document de SOS esclaves illustrent cette réalité. Selon le rapport de SOS esclaves, «les pratiques de l’esclavage sont encore très courantes en Mauritanie, en dépit des textes de son abolition; le personnel de l’Etat, par sa socialisation conservatrice, reste peu sensible au caractère scandaleux de l’esclavage et il y a collusion entre les «maîtres» et le système judiciaire». Les informations contenues dans ce rapport exhaustif, communiqué au gouvernement, font état de nombreux cas dans lesquels les victimes sont identifiées nommément et leur situation est décrite en détail. La commission note que dans sa réponse aux précédents commentaires le gouvernement indique que ces allégations sont d’ordre général «reflétant le point de vue d’un syndicat, la CLTM, qui utilise ce thème à des fins politiciennes». La commission espère que le gouvernement fournira des informations détaillées dans son prochain rapport, sur les investigations menées sur les cas spécifiquement présentés dans le rapport de SOS esclaves et les solutions qui auront été apportées.
Article 25 de la convention. Sanctions. 5. La commission observe que les infractions à l’interdiction générale du travail forcé, prévue désormais dans l’article 5 du Code du travail ci-dessus mentionné, sont passibles de sanctions pénales prévues par la loi no 2003-025 du 17 juillet 2003 portant répression de la traite des personnes. Elle observe que pour ce qui est des sanctions à cette disposition il faut se référer à la loi sur la traite. A cet égard, la commission se réfère aux inquiétudes exprimées dans le rapport de la mission de contacts directs à propos de la combinaison de textes «peu lisibles sur le plan interne et comportant des risques de mauvaise application de la loi par l’appareil judiciaire». En effet, l’interdiction générale du travail forcé se trouve dans le Code du travail et les sanctions dans une loi spécifique réprimant un autre délit.
6. La commission observe également qu’aucune référence n’est faite à la situation spécifique des personnes se trouvant dans la maison des anciens maîtres et qui seraient privées de leur liberté de circuler ou de leur liberté d’aller travailler ailleurs. Comme indiqué dans le rapport de la mission de contacts directs «l’importance d’un exercice effectif de leur droit de recours par les victimes de travail forcé est déterminant, notamment dans des situations ambiguës où la qualification du travail forcé n’est possible que lorsqu’une personne veut faire reconnaître son droit au libre choix contre les pressions ou les menaces du «patron» qui l’accueillait ou dont elle dépendait». Elle note aussi que selon le même rapport «les autorités gouvernementales, notamment le ministre de la Justice et le commissaire aux droits de l’homme, ont insisté sur leur volonté de traiter sans complaisance les cas qui leur seraient soumis». La commission note les informations relatives aux deux cas de travail forcé que le commissariat aux droits de l’homme a eus à traiter. Par ailleurs, le rapport de la mission de contacts directs se réfère à l’action du gouvernement sur le plan de la stratégie économique et sociale de lutte contre la pauvreté et sa contribution au traitement des séquelles de l’esclavage et à la prévention d’éventuelles pratiques de travail forcé. La commission encourage le gouvernement à lancer, avec l’assistance du BIT, une campagne d’information et de sensibilisation en faveur de l’ensemble de la population, y compris les personnes les plus susceptibles d’être victimes de travail forcé.
7. La commission espère que ce premier pas dans l’adoption de sanctions pénales efficaces et strictement appliquées, exigées par la convention, mènera à l’adoption de dispositions prévoyant dans le même texte l’interdiction du travail forcé et les sanctions applicables. Dans cette attente, la commission demande au gouvernement de communiquer des informations sur les juridictions compétentes pour recevoir les recours et les sanctions qui auront été imposées en vertu de l’article 5 du Code du travail et de la loi sur la traite, notamment sur le nombre de recours déposés et copie des décisions judiciaires.
Application de la législation interdisant le travail forcé. 8. La commission note que le rapport de la mission de contacts directs se réfère à l’absence d’un mécanisme de mise en œuvre de la législation du travail, et en particulier aux très faibles moyens dont dispose l’inspection du travail. En outre, elle constate que toutes les parties ont, au cours de la mission, reconnu l’importance du dialogue social dans la recherche d’une meilleure application des droits des travailleurs dans le pays, y compris la ratification et l’application de la convention (nº 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. La commission encourage le gouvernement à continuer à considérer cette hypothèse et, si nécessaire, à demander l’assistance technique du Bureau.
Article 2, paragraphe 2 d). 9. Suite aux commentaires formulés sur la loi no 70-029 sur la réquisition de personnes pour assurer le fonctionnement des services considérés comme indispensables pour la satisfaction d’un besoin essentiel du pays ou de la population, la commission note avec intérêt l’adoption de l’arrêté no 566 MIPT/MFPE/2004 du 6 juin 2004 qui fixe la liste complète des établissements ou services considérés comme essentiels. A cet égard, la commission renvoie aux commentaires qu’elle formule sous la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
10. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle un projet de loi - portant abrogation de l’ordonnance no 62-101 du 26 avril 1962 délégant aux chefs de circonscription certaines mesures nécessaires à la sécurité de l’Etat et au maintien de l’ordre public - a été approuvé. La commission espère que le gouvernement pourra prochainement faire état de l’adoption de la loi elle-même.