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Observation (CEACR) - adopted 2022, published 111st ILC session (2023)

Worst Forms of Child Labour Convention, 1999 (No. 182) - Central African Republic (Ratification: 2000)

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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2022. Elle prend également note de la discussion détaillée qui s’est tenue à la 110e session de la Commission de l’application des normes de la Conférence (Commission de la Conférence) en juin 2022, concernant l’application par la République centrafricaine de la convention, ainsi que du rapport du gouvernement.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 110e session, mai-juin 2022)

Article 3 a) de la convention. Toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues. Recrutement forcé d’enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés. La commission note que la Commission de la Conférence, bien que consciente de la complexité de la situation régnant dans le pays, a vivement déploré la situation dans laquelle des enfants sont recrutés et utilisés par les forces et groupes armés en tant que combattants et pour des rôles d’appui. La Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux, toutes les mesures nécessaires afin d’obtenir la démobilisation complète et immédiate de tous les enfants et de mettre fin, en droit comme dans la pratique, au recrutement forcé d’enfants dans les forces armées et les groupes armés. À cet égard, elle a également prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que des enquêtes approfondies et des poursuites vigoureuses soient engagées à l’encontre de tous auteurs de telles violations, y compris des membres des forces armées et de groupes armés, et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées en droit et dans la pratique. La commission note aussi que, dans ses observations, la CSI soutient les conclusions de la Commission de la Conférence et fait notamment rappeler que le rapport du Secrétaire général de l’ONU sur les enfants et les conflits armés a recensé, en mai 2021, plus de 580 cas d’enfants recrutés et utilisés par des groupes armés et par les forces armées, constituant une aggravation alarmante de ce phénomène.
La commission note que, selon le rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés du 23 juin 2022, l’ONU a confirmé que 329 enfants (262 garçons, 67 filles), dont certains n’avaient pas plus de 7 ans, avaient été recrutés et utilisés par des groupes armés (293), y compris pour les utiliser comme combattants (84 enfants). Au total, 36 enfants ont été utilisés par des membres du personnel de sécurité (28), les Forces armées centrafricaines (5), les Forces armées centrafricaines/Forces de sécurité intérieure (2) et les Forces armées centrafricaines/membres du personnel de sécurité (1) pour collecter des renseignements, tenir des points de contrôle et faire diverses courses. La plupart des violations (189) se sont produites dans la préfecture de la Haute-Kotto. En outre, huit garçons ont été placés en détention par les autorités nationales au motif de leur association présumée avec des groupes armés. Deux d’entre eux sont toujours détenus et l’ONU continue de plaider pour leur libération. La commission prend aussi note des informations détaillées contenues dans ce rapport portant sur les centaines de cas de meurtres, viols et autres violences sexuelles et enlèvements commis contre des enfants, ainsi que d’attaques perpétrées contre des écoles et hôpitaux (A/7/871-S/2022/493, paragr. 26-34).
La commission note l’indication du gouvernement dans son rapport selon laquelle les efforts continuent d’être fournis à travers le Comité stratégique désarmement, démobilisation, réinsertion, rapatriement; réforme du secteur de sécurité; réconciliation nationale (DDRR/RSS/RN), présidé par le Président de la République, ainsi que la Stratégie nationale de réforme du secteur de la défense et de la sécurité 2017-2021, qui a permis de renforcer la capacité technique des forces de défense. La commission note en outre que, selon les informations écrites communiquées par le gouvernement à la Commission de la Conférence, ainsi que les informations contenues dans le rapport de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine du 22 août 2022, des mesures sont prises en ce qui concerne la poursuite des auteurs des infractions concernant la violation des droits humains, y compris les pires formes de travail des enfants. Ces efforts incluent non seulement la tenue de sessions criminelles régulières depuis fin 2015, mais aussi l’opérationnalisation de la Cour pénale spéciale, qui a entamé son premier procès en avril 2022 dans un cas de poursuite pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité à l’encontre de membres de groupes rebelles (A/HRC/51/59, paragr. 65 et suivants). Cependant, toujours selon ce rapport, bien que la lutte contre l’impunité s’inscrive au rang des priorités gouvernementales, de nombreux incidents n’ont pas fait l’objet d’investigations de la part de l’État; l’Expert indépendant déclare que la volonté politique en la matière devrait être traduite par des actes efficaces (A/HRC/51/59, paragr. 83-84).
Tout en prenant note des mesures prises par le gouvernement, et reconnaissant la situation difficile qui prévaut dans le pays, la commission se voit dans l’obligation de déplorer une nouvelle fois le recrutement et l’utilisation persistantes d’enfants dans le conflit armé en République centrafricaine, d’autant plus qu’elles entraînent d’autres graves violations des droits de l’enfant, telles que des enlèvements, des meurtres, des violences sexuelles et des attaques visant des écoles et des hôpitaux. La commission prie donc instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts pour mettre un terme, dans la pratique, au recrutement forcé d’enfants de moins de 18 ans par les forces armées et les groupes armés dans le pays. En outre, la commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures immédiates et efficaces pour faire en sorte que toutes les personnes, y compris les membres des forces armées régulières, qui recrutent des enfants de moins de 18 ans aux fins de leur utilisation dans les conflits armés, fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites vigoureuses et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives leur soient infligées dans la pratique, notamment dans le cadre des juridictions nationales et de la Cour pénale spéciale. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer des informations sur le nombre d’enquêtes menées, de poursuites engagées et de condamnations imposées à l’encontre de telles personnes. Elle le prie également de fournir copie du Code de protection de l’enfant.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéa a). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants. Accès à l’éducation de base gratuite. La commission note que la Commission de la Conférence a pris note avec une vive préoccupation de la situation d’enfants, en particulier des filles, qui sont privés d’éducation en raison de l’impact de la crise politique et sécuritaire qui prévaut dans le pays. La Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement d’intensifier ses efforts afin d’améliorer le fonctionnement du système d’enseignement et faciliter l’accès à une éducation de base de qualité et gratuite à tous les enfants, en particulier aux filles et dans les zones affectées par le conflit.
La commission note en outre que, dans ses observations, la CSI note également avec grande préoccupation l’impact qu’a la crise politique et sécuritaire sur la situation des enfants, en particulier des filles, qui sont privés d’éducation. La CSI rappelle que le taux de scolarisation reste extrêmement faible dans le pays et que le taux d’abandon scolaire entre l’enseignement primaire et secondaire est très élevé. Cette situation s’explique notamment par la fermeture partielle ou totale de plusieurs écoles du fait du conflit armé, en particulier dans l’arrière-pays, les groupes armés pillant, attaquant et occupant des établissements scolaires dans le cadre du conflit. La CSI estime donc que la République centrafricaine a encore des efforts considérables à fournir afin de se conformer à ses obligations sous l’article 7 a) et c), de la convention, visant à assurer l’accès à l’éducation de base gratuite pour tous les enfants.
À cet égard, le gouvernement indique dans son rapport que le droit à l’éducation pour tous fait partie de ses priorités et que des efforts ont été consentis pour réhabiliter des infrastructures scolaires, même dans les zones les plus touchées par les conflits, et renforcer les capacités du personnel enseignant. Le gouvernement indique qu’il a validé, en mai 2020, le Plan sectoriel de l’éducation pour la période 2020-2029, lequel fait ressortir le diagnostic sur l’accès à l’éducation, l’impact des conflits récents sur l’accès à l’éducation, la réforme de la gouvernance et le financement du système éducatif.
Tout en notant avec profonde préoccupation le grand nombre d’enfants privés d’éducation en raison du climat d’insécurité qui règne dans le pays, la commission tient à rappeler que l’éducation joue un rôle clé pour prévenir l’engagement des enfants dans les pires formes de travail des enfants, y compris leur recrutement dans les conflits armés. La commission prie donc instamment le gouvernement de redoubler d’efforts pour améliorer le fonctionnement du système éducatif dans le pays et faciliter l’accès à l’éducation de base gratuite pour tous les enfants, y compris les filles, et dans les zones affectées par le conflit. À cet égard, elle prie le gouvernement de fournir des informations sur l’impact des mesures concrètes prises en la matière, dans le cadre du Plan Sectoriel de l’Éducation pour la période 20202029 ou de toute autre projet, sur les taux de scolarisation, d’achèvement et d’abandon scolaires aux niveaux primaire et secondaire.
Alinéa b). Aide directe pour soustraire les enfants des pires formes de travail et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Enfants recrutés de force pour être utilisés dans des conflits armés. La Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts pour la prévention, l’éloignement, la réadaptation et l’intégration sociale des enfants recrutés pour être utilisés dans un conflit armé, y compris par des programmes de sensibilisation et de réintégration.
À ce propos, la CSI note avec préoccupation, dans ses observations, que les enfants qui ont été enrôlés de force sont une deuxième fois victimes de la crise politique et sécuritaire qui prévaut dans le pays, de par l’insuffisance des moyens alloués à leur réadaptation et à leur réinsertion dans la société. La CSI souligne que les programmes de réinsertion doivent être renforcés afin de garantir une démobilisation effective et durable des enfants et que la réadaptation des ex-enfants soldats constitue un défi majeur dans le pays. La CSI constate que, si les engagements politiques existent depuis longtemps en République centrafricaine, le délai pour mettre ces engagements effectivement en œuvre est largement dépassé, et que de nombreux problèmes continuent à se poser en pratique en ce qui concerne la réadaptation et intégration sociale des ex-enfants soldats.
À ce propos, la commission note l’indication du gouvernement selon laquelle plusieurs personnes, y compris des enfants issus des groupes armés, ont été démobilisées et réinsérées dans le circuit économique et social. Le gouvernement souligne que, depuis 2014 et avec l’appui de l’UNICEF et d’autres partenaires, plus de 15 500 enfants ont été libérés, dont 30 pour cent des filles, et dont plusieurs ont suivi des formations au Haut-Commissariat à la Jeunesse pionnière. En outre, la commission note, selon les informations contenues dans le rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés du 23 juin 2022, que des plans interministériels ont été élaborés à l’appui de la mise en œuvre du Code de protection de l’enfance (A/7/871-S/2022/493, paragr. 35). Selon l’UNICEF, la mise en œuvre de ce Code permet d’assurer une protection effective des enfants, y compris contre les graves violations de leurs droits, et de renforcer le mécanisme de suivi et de signalement, de favoriser la libération et la réintégration des enfants des forces et groupes armés et de fournir des soins médicaux et psychosociaux aux enfants touchés par les conflits.
Effectivement, le gouvernement indique qu’en collaboration avec l’UNICEF, il recherche des moyens pour assurer aux 2 000 enfants touchés par la violence, l’exploitation et les abus qui ont été libérés par les groupes armés en 2021, leur réintégration dans leurs familles/communautés ou leur mise en place dans des services alternatifs. À cet égard, la commission note que, selon le rapport de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine du 22 août 2022, malgré le financement de projets relatifs à la réinsertion économique, y compris des enfants, ayant quitté les groupes armés, ce défi reste à relever (A/HRC/51/59, paragr. 10). La commission prie donc à nouveau instamment le gouvernement de redoubler d’efforts afin d’assurer le retrait de tous les enfants recrutés pour être utilisés dans le conflit armé, ainsi que leur réadaptation et leur intégration sociale. Elle prie également à nouveau instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin que tous les enfants retirés des groupes armés et forces armées bénéficient de programmes de réinsertion, y compris dans le cadre de sa coopération avec l’UNICEF. Elle prie le gouvernement de continuer de fournir des informations à cet égard, y compris le nombre d’enfants qui ont bénéficié d’une réadaptation et intégration sociale.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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