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- 525. Ces plaintes figuraient dans un télégramme et une lettre en date, respectivement, du 26 et du 30 juin 1967, de la Confédération internationale des syndicats chrétiens, et dans une lettre en date du 27 juin 1967, de la Confédération latino-américaine syndicale chrétienne. Toutes ces communications ont été adressées directement à l'O.I.T. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication en date du 14 août 1967.
- 526. La Colombie n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 527. Les plaignants allèguent que certains actes commis par la police sur les instructions du gouvernement du département d'Antioquia, notamment à l'égard de l'Association des instituteurs d'Antioquia et de ses membres, constituent une violation des droits syndicaux. Ils déclarent que cinq organisations syndicales, dont l'Association des instituteurs d'Antioquia, soutiennent dans le département une grève générale en vue de faire aboutir certaines revendications en faveur de leurs membres. Les plaignants allèguent que l'Association des instituteurs, qui réclame le paiement d'augmentations de salaires, a été victime de violents actes de répression de la part du gouvernement du département. Ils se réfèrent, en particulier, à la suppression d'une réunion syndicale; à des mesures d'intervention au siège du Syndicat des instituteurs et à la fermeture de ce siège; au fait qu'on s'est introduit au siège de l'Action syndicale d'Antioquia (A.S.A.) et qu'il a été encerclé par des troupes d'assaut de la police militaire, enfin, à l'arrestation de MM. Agudelo, Carbajal, Herrera, Cano et Rivera, tous militants syndicaux. M. Agudelo, déclare-t-on, est une personnalité syndicale réputée, membre du Comité exécutif de la Confédération latino-américaine syndicale chrétienne. Il est allégué qu'il est menacé d'une condamnation à trente jours d'emprisonnement qui, en vertu de la législation sur l'état de siège, lui ferait perdre son travail et ses fonctions de dirigeant syndical, et pourrait même provoquer son expulsion du pays.
- 528. Dans sa communication en date du 14 août 1967, le gouvernement déclare, tout d'abord, que les instituteurs, en Colombie, sont, en fait et par définition, des employés des services publics auxquels la loi n'accorde pas le droit de présenter des cahiers de revendications, de conclure des conventions collectives, de déclarer ou de faire la grève. Ainsi, déclare le gouvernement, les instituteurs en cause ne se trouvaient pas dans l'exercice de leurs droits au moment où ils étaient en grève
- 529. En outre, poursuit le gouvernement, ces grévistes ne se sont pas conformés à l'article 446 du Code du travail, qui dispose que les grèves doivent être ordonnées et pacifiques. Le gouvernement déclare que les instituteurs, à l'instigation de certains de leurs dirigeants, ont cherché à provoquer des désordres, des émeutes de rue et ont ainsi enfreint les dispositions légales. Le gouvernement fait valoir que c'est au moment où les désordres et les infractions commençaient à porter atteinte aux droits des autres citoyens que la police est intervenue et a arrêté MM. Agudelo, Carbajal et Cano, qui dirigeaient le mouvement de grève. Cette intervention a été faite conformément à l'article 33 du décret 2351 de 1965, qui charge la police de veiller à ce que les grèves se déroulent pacifiquement et dans la légalité et lui donne le pouvoir, dans l'exécution de cette tâche, de prendre les mesures nécessaires pour que les grévistes n'aillent pas au-delà de leurs objectifs légaux et pour prévenir tout désordre ou délit. A la suite de cette intervention, déclare le gouvernement, les désordres ont cessé, ainsi que l'arrêt du travail illégal des instituteurs, et la situation à cet égard est maintenant tout à fait normale.
- 530. Le gouvernement indique que la détention des personnes arrêtées a duré huit jours.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 531. Le Comité a toujours appliqué le principe selon lequel les allégations relatives au droit de grève n'échappent pas à sa compétence, dans la mesure où elles mettent en cause l'exercice des droits syndicaux, et a fait remarquer à plusieurs occasions que le droit de grève est généralement reconnu aux travailleurs et à leurs organisations comme moyen légitime de défense des intérêts professionnels. A cet égard, le Comité a insisté sur l'importance qu'il attache, dans les cas où les grèves dans les services essentiels ou la fonction publique sont interdites ou sujettes à des restrictions, à ce que des garanties adéquates soient accordées pour sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs, ainsi privés d'un moyen essentiel de défendre leurs intérêts professionnels. Il a relevé que les restrictions devraient s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer et que les sentences d'arbitrage devraient avoir force obligatoire pour les deux parties. Le Comité a déclaré à ce propos que ces principes ne s'appliquent pas à l'interdiction absolue de la grève, mais à ses restrictions dans les services essentiels ou la fonction publique, auxquels cas des garanties adéquates devraient être prévues pour sauvegarder les intérêts des travailleurs.
- 532. Tout en prenant note de l'information contenue dans les observations du gouvernement au sujet du déroulement désordonné de la grève, le Comité relève que celle-ci était illégale dès le début et passible donc d'une intervention de la police avant même que des désordres ne se produisent. Considérant donc que les observations formulées au paragraphe précédent s'appliquent au cas présent, le Comité désire attirer l'attention du gouvernement sur celles-ci et il recommande également au Conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration attache à ces considérations.
- 533. En ce qui concerne l'arrestation de MM. Agudelo, Carbajal et Cano, le Comité prend note que ces personnes ont été emprisonnées pour avoir provoqué des désordres et qu'elles ne se trouvent plus en détention. C'est pourquoi il estime que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
- 534. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que les allégations concernant les arrestations mentionnées dans le paragraphe précédent n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi.
- 535. En ce qui concerne les allégations concernant des mesures d'intervention au siège du Syndicat des instituteurs et la fermeture de ce siège, ainsi que celles qui portent sur l'investissement du siège de l'A.S.A. et sur l'arrestation de MM. Herrera et Rivera, comme le gouvernement n'a pas encore communiqué ses remarques à ce sujet, le Comité recommande au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir lui faire parvenir ses observations à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 536. Dans ces conditions, en ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de décider que, pour les raisons indiquées au paragraphe 533 ci-dessus, les allégations concernant l'arrestation et la détention de MM. Agudelo, Carbajal et Cano n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
- b) d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration attache aux considérations formulées au paragraphe 531 ci-dessus, notamment en ce qui concerne la reconnaissance générale du droit des travailleurs et de leurs organisations à déclarer la grève et, lorsque les grèves sont interdites dans les services essentiels ou la fonction publique, à l'établissement de garanties adéquates pour sauvegarder les intérêts des travailleurs intéressés;
- c) de prier le gouvernement de bien vouloir lui faire parvenir ses observations sur les allégations mentionnées au paragraphe 535 ci-dessus;
- d) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité fera de nouveau rapport au Conseil d'administration lorsqu'il aura reçu les observations demandées au gouvernement à l'alinéa c) ci-dessus.
- Genève, 9 novembre 1967. Roberto AGO, président.