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- 117. Le comité a déjà examiné cette affaire en novembre 1977 et il a présenté à cette session des conclusions intérimaires qui figurent aux paragraphes 194 à 220 de son 172e rapport. Le Conseil d'administration a approuvé ce rapport en novembre 1977 également (204e session).
- 118. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
- 119. Les allégations en suspens portent sur le licenciement ou l'arrestation de dirigeants syndicaux et sur l'ingérence de la caisse de sécurité sociale dans une assemblée syndicale. Le gouvernement a envoyé de nouvelles informations par une lettre du 13 avril 1978.
A. Licenciement de dirigeants syndicaux
A. Licenciement de dirigeants syndicaux- 120. Selon l'Union nationale des employés de sécurité sociale (UNDECA), M. Carlos Manuel Acuña Castro, son secrétaire général adjoint, avait été licencié le 17 juin 1975 de son poste d'inspecteur des lois et règlements à la Caisse de sécurité sociale. Il avait été invoqué à son encontre qu'il assistait à des cours à la Faculté de droit alors que, d'après le plaignant, il s'était seulement présenté aux examens avec l'autorisation de l'employeur: la mesure prise serait la conséquence d'une plainte présentée au Conseil d'Etat (Contraloría general de la República) sur l'ingérence de la Caisse de sécurité sociale dans une assemblée générale du syndicat ainsi que de la participation de l'intéressé aux élections syndicales.
- 121. La confédération générale des travailleurs (CGT) et l'Union des employés de banque du Costa Rica (UNEBANCO) se référaient à la situation de M. Christián Sobrado Chaves, secrétaire général de l'UNEBANCO. Celui-ci aurait été licencié sans juste motif le 24 février 1977, alors que le Tribunal supérieur du travail avait refusé le congédiement; cette mesure aurait constitué en outre une violation de la sentence arbitrale en vigueur à la banque. On reprochait à l'intéressé des absences injustifiées alors que, d'après les plaignants, celui-ci s'était absenté avec l'autorisation de ses supérieurs immédiats pour se livrer à des activités liées à un conflit collectif de travail que les travailleurs de la banque avaient porté devant le juge du travail.
- 122. A propos du renvoi de M. Carlos Manuel Acuña Castro, le gouvernement faisait état d'une circulaire de la présidence de la Caisse de sécurité sociale. Selon celle-ci, on avait donné de cette affaire des versions inexactes. Le licenciement constituait une sanction prise à la suite d'une faute d'un travailleur qui ne devait pas être liée artificiellement à d'autres événements, étrangers à l'affaire. Le gouvernement précisait que, le 13 janvier 1976, le tribunal du travail de San José avait jugé en première instance que la requête présentée par l'intéressé contre la Caisse de sécurité sociale était justifiée. Le 1er avril 1976, le Tribunal supérieur du travail de San José avait confirmé ce jugement. La Caisse de sécurité sociale s'était pourvue en cassation devant la Cour suprême qui n'avait pas encore rendu son arrêt.
- 123. Le gouvernement indiquait d'autre part que la Banque du Costa Rica avait demandé, le 19 août 1976, l'autorisation de licencier M. Christián Sobrado Chaves aux tribunaux du travail qui examinaient le conflit collectif de travail déclenché par les travailleurs de la banque. Selon cette dernière, l'intéressé avait commis des actes d'indiscipline inexcusables. Les tribunaux estimèrent quant à eux le licenciement injustifié. Le 24 février 1977, M. Sobrado Chaves fut congédié pour absences injustifiées; la banque lui précisa que l'arbitrage du conflit collectif de travail était achevé et qu'elle avait pleine liberté pour appliquer le régime disciplinaire correspondant aux fautes invoquées. Le gouvernement ajoutait que l'affaire était en instance devant les autorités judiciaires car les motifs du licenciement avaient été qualifiés par les juges de controversés et susceptibles d'interprétations diverses.
- 124. En novembre 1977, le comité avait relevé que ces deux affaires avaient été portées devant les tribunaux compétents où elles étaient encore en instance. Sur ses recommandations, le Conseil d'administration avait en conséquence prié le gouvernement de transmettre les arrêts qui seraient rendus.
- 125. Le gouvernement joint à sa communication du 13 avril 1978 l'arrêt rendu par la Chambre de cassation de la Cour suprême sur le licenciement de M. Acuña Castro par la Caisse de sécurité sociale du Costa Rica. Cet arrêt, en date du 18 août 1976, confirme la décision des juridictions inférieures. Il en ressort que les magistrats ont estimé non justifiés les motifs invoqués par l'employeur pour licencier l'intéressé et ont condamné la caisse à lui verser, en tenant compte de son ancienneté dans l'entreprise, neuf mois de salaire à titre d'indemnité. Ces magistrats ont toutefois jugé que M. Acuña Castro n'avait pas, de surcroît, prouvé le caractère antisyndical de son congédiement et n'avait pas droit à un dédommagement de ce chef.
- 126. Par ailleurs, déclare le gouvernement, une action a été engagée devant le juge du travail de San José contre la Banque du Costa Rica dans le cas de M. Sobrado Chaves. Le procès, entamé le 28 avril 1977, n'est pas terminé.
- 127. Le comité note l'arrêt rendu par la Cour suprême à l'égard de la première des personnes citées par les plaignants. A ce propos, il a signalé à plusieurs reprises qu'il peut être difficile sinon impossible à un travailleur d'établir le caractère antisyndical de la mesure prise à son égard. En l'espèce, les tribunaux saisis de l'affaire ont jugé que M. Acuña Castro, secrétaire général adjoint de l'Union nationale des employés de sécurité sociale, avait été licencié sans juste motif. Dans ces conditions, le comité estime souhaitable que le gouvernement réexamine cette affaire et envisage la possibilité de réintégrer l'intéressé dans ses fonctions.
- 128. Par ailleurs, le comité doit le relever, bien que l'arrêt précité de la Cour suprême date du 18 août 1976, le gouvernement n'en avait pas fait état dans ses communications précédentes (en date du 2 mai 1977). Le comité ne peut que regretter ce fait. Il veut croire que ce dernier communiquera, dès qu'il sera rendu, une copie du jugement prononcé dans le cas de M. Sobrado Chaves. A ce dernier propos, le comité constate que l'intéressé a été licencié il y a plus d'un an et que la procédure judiciaire engagée n'est pas encore terminée. Il désire rappeler l'importance qu'il attache à l'application d'une procédure rapide pour examiner des cas allégués de congédiements en raison d'activités syndicales.
B. Arrestation de dirigeants syndicaux
B. Arrestation de dirigeants syndicaux- 129. La CGT alléguait également que M. Luis Fernando Alfaro Zuñiga, secrétaire général de l'Association syndicale des employés de l'Institut costaricien d'électricité, avait d'abord été destitué de son emploi. Par la suite, en raison d'un arrêt de travail décidé par l'assemblée générale du syndicat du 20 au 26 juillet 1976, il fut accusé par le ministère public d'incitation à la grève et d'autres charges. Il fut maintenu en prison, la liberté sous caution lui ayant été refusée.
- 130. Quant à M. Mario Devandas Brenes, secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs des services publics (FENATRAP), ajoutait le plaignant, il fut destitué de son emploi à l'Institut national du logement et de l'urbanisme (où il était aussi secrétaire général du syndicat). Par la suite, lors d'une grève déclenchée par les travailleurs de l'institut, il fut accusé des mêmes charges que M. Alfaro Zuñiga et détenu dans les mêmes conditions. L'un et l'autre sont incarcérés à la prison publique de Heredia avec des délinquants de droit commun.
- 131. Le gouvernement avait répondu que M. Luis Fernando Alfaro Zuñiga avait prononcé des discours subversifs lors de la grève organisée le 19 juillet 1976 à l'Institut costaricien d'électricité. Le Procureur général de la République l'avait poursuivi devant la justice municipale de Tibás pour émeute, incitation à l'arrêt collectif des services et atteinte à l'ordre constitutionnel. Le procès n'était pas encore achevé.
- 132. Quant à M. Mario Devandas Brenes, poursuivait le gouvernement, il était accusé par le ministère public des mêmes charges que M. Alfaro Zuñiga et poursuivi également devant la justice municipale de Tibás.
- 133. Le comité avait noté ces informations. Il avait cependant constaté que les faits incriminés remontaient à juillet 1976 et que les intéressés n'avaient pas encore été jugés. En outre, il n'était pas possible de déterminer de façon certaine si les intéressés étaient encore détenus. Le comité avait rappelé l'importance qu'il attache à ce que dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou de droit commun considérés par le gouvernement comme étrangers à leurs activités syndicales, les intéressés soient jugés promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Sur ses recommandations, le Conseil d'administration avait attiré l'attention sur ce principe et prié le gouvernement de fournir le texte des jugements qui seraient rendus dans ces affaires.
- 134. Le gouvernement déclare dans sa lettre du 13 avril 1978 que les deux dirigeants syndicaux précités font l'objet d'une procédure pénale devant le Tribunal supérieur de San José. Celui-ci leur a accordé le bénéfice de la liberté sous caution (d'un montant de 50.000 colons pour chacun).
- 135. Il ressort des informations disponibles que les poursuites ont été engagées contre ces deux responsables syndicaux pour faits de grève dans des services publics. Ceux-ci sont toutefois en liberté sous caution. Le comité a déclaré à plus d'une reprise que la reconnaissance de la liberté syndicale aux fonctionnaires n'équivaut pas à leur accorder le droit de grève.
- 136. Cependant, le droit de grève étant un moyen important dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour défendre et promouvoir leurs intérêts professionnels, une interdiction de la grève ou des restrictions sévères à l'exercice de celle-ci dans la fonction publique ou les services essentiels devraient, a-t-il ajouté notamment dans plusieurs affaires relatives au Costa Rica, s'accompagner de garanties adéquates afin de protéger pleinement les travailleurs. Il a mentionné spécialement parmi ces garanties des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et rapides, aux diverses étapes desquelles les parties concernées devraient pouvoir participer; les sentences arbitrales devraient toujours être obligatoires pour les deux parties, exécutées rapidement et de façon complète. En l'occurrence, l'article 368 du Code du travail interdit la grève dans les services publics, et les différends susceptibles de surgir entre employeurs et travailleurs de ce secteur doivent obligatoirement être portés pour règlement devant les tribunaux du travail.
- 137. Toutefois, dans une des affaires précitées relatives au Costa Rica, le plaignant affirmait qu'en vertu de la loi spéciale portant création de l'Institut costaricien d'électricité, cet organisme n'est pas tenu de se soumettre à un arbitrage obligatoire. Le gouvernement n'apportait pas d'informations sur ce point. Le comité avait estimé que, si cette allégation était exacte, les travailleurs de cette institution seraient privés à la fois du droit de grève et des garanties de compensation pour sauvegarder leurs intérêts professionnels. Aussi le comité estime-t-il nécessaire, dans le cas présent, que le gouvernement précise si l'article 368 précité était applicable aux conflits collectifs de travail survenus à l'Institut costaricien d'électricité ainsi qu'à l'Institut national du logement et de l'urbanisme.
C. Ingérence de la Caisse de sécurité sociale dans une assemblée syndicale
C. Ingérence de la Caisse de sécurité sociale dans une assemblée syndicale- 138. L'Union nationale des employés de sécurité sociale alléguait enfin que la Caisse de sécurité sociale du Costa Rica se serait ingérée dans le déroulement d'assemblées générales du syndicat et aurait en particulier, par diverses manoeuvres, cherché à imposer certaines personnes à la direction syndicale et à éliminer le nouveau comité exécutif qui avait été légalement élu.
- 139. Le gouvernement n'avait fourni aucun commentaire à cet égard. En novembre 1977, le comité avait rappelé que les droits de réunion et d'élection au sein des organisations syndicales, sans ingérence des employeurs et des pouvoirs publics, constituent une garantie essentielle du libre exercice des droits syndicaux. D'ailleurs, selon l'article 2 de la convention no 98, les organisations de travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes d'ingérence des organisations d'employeurs (soit directement, soit par leurs agents ou membres) dans leur formation, leur fonctionnement et leur administration. Sont notamment assimilées à des actes d'ingérence les mesures tendant à soutenir des organisations de travailleurs par des moyens financiers ou autrement dans le dessein de placer celles-ci sous le contrôle d'un employeur (ou d'une organisation d'employeurs). Le Conseil d'administration avait prié le gouvernement de communiquer ses observations sur cet aspect du cas.
- 140. Ce dernier n'a toujours pas fourni de commentaires à ce propos.
- 141. Le comité regrette que le gouvernement se soit encore abstenu de répondre à ces allégations portant sur des faits qui remontent à trois ans. Dans un cas antérieur relatif au Costa Rica, il avait signalé qu'en ratifiant la convention no 98, le gouvernement s'était engagé à respecter les normes contenues à l'article 2 de cet instrument et qu'il devait veiller à ce que la législation nationale offre aux organisations professionnelles les moyens de faire respecter les droits garantis par ledit article 2. Le comité avait par la suite constaté que la législation costaricienne ne contenait pas de dispositions spéciales pour protéger les organisations de travailleurs contre les actes d'ingérence des employeurs ou de leurs organisations. Selon l'article 15 du code du travail, les cas non prévus par ce code, par les règlements d'application ou par les lois complémentaires ou connexes sont résolus conformément aux principes généraux de droit du travail, à l'équité et aux usages locaux; à défaut, sont applicables d'abord les dispositions contenues dans les conventions et recommandations de l'OIT en tant qu'elles ne sont pas contraires aux lois du pays et ensuite les principes et lois de droit commun. Le comité avait encore relevé que la convention no 98, du fait de sa ratification par le Costa Rica, avait été incorporée à la législation nationale. Il avait donc estimé souhaitable que le gouvernement étudie la possibilité d'adopter des dispositions nettes et précises visant à protéger de manière efficace les organisations de travailleurs contre les actes d'ingérence des employeurs ou de leurs organisations.
- 142. Le comité considère que ces conclusions sont également applicables dans le cas présent. Il ressort en effet d'une observation formulée en 1977 par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qu'un projet de loi sur les relations collectives du travail contenant des dispositions sur la protection des organisations de travailleurs contre les actes d'ingérence a été soumis à l'Assemblée législative. Toutefois, ce projet n'a pas encore été adopté.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 143. Dans ces conditions, et pour ce qui est de l'affaire dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
- a) au sujet du licenciement de deux dirigeants syndicaux, de demander au gouvernement, pour les raisons exposées au paragraphe 127, d'envisager la possibilité de réintégrer M. Acuña Castro dans ses fonctions et de le prier également de transmettre, dès qu'il sera rendu, le jugement, avec ses attendus, prononcé à l'égard de M. Sobrado Chaves;
- b) au sujet de l'arrestation de deux autres dirigeants syndicaux:
- i) de rappeler les considérations et principes exposés aux paragraphes 135 et 136 à propos de la grève dans les services publics;
- ii) de prier le gouvernement, pour les raisons exprimées aux paragraphes 136 et 137, d'indiquer si la procédure de règlement pacifique des différends prévue à l'article 368 du Code du travail est applicable aux conflits survenus à l'Institut costaricien d'électricité ainsi qu'à l'Institut national du logement et de l'urbanisme;
- iii) de noter que MM. Alfaro Zuñiga et Devandas Brenes sont en liberté sous caution et de demander au gouvernement de transmettre les textes des jugements avec leurs attendus qui seront prononcés à leur égard;
- c) au sujet de l'ingérence de la Caisse de sécurité sociale dans une assemblée syndicale, d'insister auprès du gouvernement, pour les raisons exprimées aux paragraphes 141 et 142, pour qu'il adopte aussitôt que possible les dispositions en projet sur la protection des organisations de travailleurs contre les actes d'ingérence des employeurs ou de leurs organisations;
- d) de noter ce rapport intérimaire.