ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Definitive Report - Report No 241, November 1985

Case No 1172 (Canada) - Complaint date: 15-NOV-82 - Closed

Display in: English - Spanish

  1. 97. La plainte (cas no 1172) que le Congrès du travail du Canada (CTC) a présentée au nom d'organisations qui lui sont affiliées, le Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE), le Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario (OPSEA) et le Syndicat canadien des employés publics (CUPE) figure dans une communication en date du 15 novembre 1982. Le CTC a fourni des informations supplémentaires dans des communications en date du 15 décembre 1982, du 16 février et du 28 octobre 1983 et du 10 janvier 1984. La Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) a présenté sa plainte au nom de la Fédération des enseignants du Canada et de la Fédération des enseignants de l'Ontario, qui lui sont affiliées, dans une lettre en date du 8 février 1983 et des informations supplémentaires dans une communication en date du 7 mars 1983. Le Syndicat international des salariés des services (SISS) a présenté sa plainte dans une lettre datée du 6 avril 1984. Le gouvernement a adressé ses observations dans des communications en date des 25 avril 1983, 7 juin et 16 octobre 1984.
  2. 98. La Confédération des associations des enseignants universitaires de l'Alberta (CAFA) a présenté une plainte (cas no 1234) pour violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Canada/Alberta dans une communication en date du 19 septembre 1983. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 21 février 1984.
  3. 99. Le Congrès du travail du Canada (CTC) a présenté, dans une communication du 1er novembre 1983, une plainte (cas no 1247) pour violation des droits syndicaux dans l'Alberta au nom du Syndicat des salariés provinciaux de l'Alberta (AUPE), qui fait partie du Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE), deuxième affilié du CTC par ordre d'importance. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 3 mai 1984.
  4. 100. Dans une communication du 3 février 1984, le Congrès du travail du Canada (CTC) a déposé une plainte (cas no 1260) pour violation des droits syndicaux à Terre-Neuve, au nom de l'Association du personnel des services publics de Terre-Neuve (NAPE), qui est l'une des branches du Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE), lui-même affilié au CTC. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication du 29 mai 1984.
  5. 101. A sa réunion de novembre 1984 (Voir 236e rapport, paragr. 7, approuvé par le Conseil d'administration à sa 228 session, novembre 1984), le Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration a décidé d'ajourner son examen des cas concernant l'Ontario, l'Alberta et Terre-Neuve, étant d'avis qu'avant d'arriver à des conclusions dans ces cas il serait indispensable d'obtenir des renseignements supplémentaires, tout particulièrement par le biais d'une mission d'étude et d'information, qui pourraient faciliter l'éclaircissement d'aspects de la législation et de la pratique en cause. Le comité a donc prié le gouvernement de donner son assentiment à cette procédure.
  6. 102. Dans une lettre en date du 1er février 1985, le gouvernement a fait savoir qu'après des consultations avec les divers gouvernements provinciaux intéressés il n'avait pas d'objection à l'accomplissement de cette mission.
  7. 103. Au paragraphe 10 de son 238e rapport (approuvé par le Conseil d'administration à sa 229e session, février-mars 1985), le comité a expliqué que la mission d'étude et d'information se situerait dans le cadre de son examen des cas. Il a souligné que sa proposition d'envoi d'une telle mission venait de ce qu'il souhaitait arriver à des conclusions en connaissant et en comprenant le mieux possible les questions complexes en cause. Il s'est déclaré convaincu que ses travaux seraient grandement facilités par une appréciation sur place de l'application pratique quotidienne, dans la situation nationale ou locale, de la législation qui fait l'objet des plaintes.
  8. 104. Des dispositions ont donc été prises pour qu'une mission d'étude et d'information ait lieu au Canada - notamment dans les provinces de l'Ontario, de l'Alberta et de Terre-Neuve - du 12 au 25 septembre 1985. Le Directeur général du BIT a nommé Sir John Wood, CBE, LLM, en tant que son représentant pour effectuer la mission, et celui-ci a été accompagné, pendant la mission, par M. William R. Simpson, chef du Service de la liberté syndicale du Département des normes internationales du travail, et par Mme Jane Hodges, fonctionnaire du Service de la liberté syndicale. Le rapport du représentant du Directeur général est reproduit en annexe au présent document.
  9. 105. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
  10. 106. Le comité souhaite tout d'abord exprimer ses chaleureux remerciements à Sir John Wood pour s'être acquitté de cette mission d'étude et d'information en tant que représentant du Directeur général. C'est grâce à son rapport détaillé sur tous les cas examinés que le comité a pu formuler ses conclusions en se fondant sur une connaissance plus complète et une meilleure compréhension des questions complexes relatives à ces cas. Selon le comité, le rapport du représentant du Directeur général démontre clairement l'utilité de missions de ce genre, surtout dans les cas difficiles où, malgré la volumineuse documentation soumise par les parties, des discussions sur place peuvent beaucoup contribuer à faire la lumière sur les problèmes qui se posent.
  11. 107. Le comité souhaite exprimer aussi ses remerciements au gouvernement du Canada et aux gouvernements des provinces de l'Alberta, de l'Ontario et de Terre-Neuve pour le concours qu'ils ont prêté à la mission. Il remercie aussi les représentants du Congrès du travail du Canada, du Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux et des nombreux autres syndicats internationaux, nationaux ou provinciaux qui ont aidé le représentant du Directeur général à s'acquitter de son mandat.
  12. 108. Comme les plaintes et les réponses des divers gouvernements ainsi que les renseignements obtenus au cours de la mission sont pleinement analysés dans le rapport du représentant du Directeur général, il ne reste plus au comité qu'à formuler ses conclusions au sujet des cas qu'il a maintenant examinés de façon approfondie.

A. Conclusions du comité au sujet du cas no 1172/Ontario

A. Conclusions du comité au sujet du cas no 1172/Ontario
  1. 109. Le comité a pris note de tous les renseignements que contenaient les diverses plaintes présentées dans ce cas, de la réponse fournie par le gouvernement de la province de l'Ontario et des renseignements détaillés que le représentant du Directeur général a obtenus au cours de la mission d'étude et d'information.
  2. 110. Les allégations dans ce cas concernent l'adoption, en 1982, de la loi concernant les restrictions en matière de rémunérations face à l'inflation (loi no 179), entrée en vigueur le 21 septembre de cette même année. Cette loi n'est plus appliquée depuis septembre 1983, puisqu'elle a été remplacée, le 10 octobre 1983, par un autre texte dénommé loi sur la révision des prix et des rémunérations dans le secteur public (loi no 111). Il n'a pas été présenté de plainte officielle au sujet de cette dernière loi. Toutefois, comme elle est d'un intérêt direct pour les questions soulevées dans la plainte et que c'est la mesure la plus récente que le gouvernement ait prise en ce qui concerne la négociation collective dans le secteur public - ainsi que le représentant du Directeur général l'a souligné dans son rapport -, le comité juge approprié de donner son avis sur ce texte qui, relève-t-il, devait également venir à expiration à la fin septembre 1985. Le comité observe aussi qu'au cours de sa mission le représentant du Directeur général a pu recueillir l'opinion tant des syndicats que du gouvernement sur la teneur de la loi no 111 et ses effets.
  3. 111. La loi no 179 avait été adoptée pour faire face, d'après le gouvernement, à une situation d'urgence appelant des mesures pour juguler l'inflation croissante. Elle prévoyait des restrictions à la négociation collective pour les fonctionnaires provinciaux et les agents des institutions provinciales semi-publiques. Ses dispositions avaient pour effet de proroger de 12 mois les régimes de rémunération qui étaient en cours de négociation ou devaient venir à expiration durant la période allant du 1er octobre 1982 au 30 septembre 1983.
  4. 112. Les plaignants avaient allégué que, s'ils avaient bien été consultés au sujet des mesures que le gouvernement allait prendre, il n'avait été tenu aucun compte de leurs observations et de leur opinion. Selon eux, la situation économique de l'époque ne justifiait pas la prise de mesures législatives d'urgence pour restreindre les revenus dans la fonction publique.
  5. 113. Au sujet de ce premier point, le comité note, d'après le rapport du représentant du Directeur général, que la gravité ou même l'existence des problèmes économiques invoqués a donné matière à un débat animé, mais que, en particulier dans le présent cas, le gouvernement était convaincu que la situation économique de la province requérait des dispositions d'urgence. Quelle que fût la situation, il existait, selon lui, des problèmes économiques évidents, auxquels il avait décidé de s'attaquer au moyen d'une législation restreignant les rémunérations dans le secteur public. Il n'appartient pas au comité de discuter les arguments économiques sur lesquels se fondait cette opinion non plus que les mesures prises par le gouvernement.
  6. 114. Il incombe en revanche au comité de donner son avis sur le point de savoir si, en prenant ces mesures, le gouvernement a dépassé ce que le comité lui-même a jugé être les limites qui peuvent être acceptées, provisoirement, à la libre négociation collective.
  7. 115. En premier lieu, l'effet immédiat de la législation (loi no 179) était de limiter les augmentations de salaires dans la fonction publique à 5 pour cent (dans certains cas, 9 pour cent), pour une période qui ne dépassait pas un an. A cet égard, le comité rappelle qu'il a reconnu que les mesures de stabilisation visant à limiter le droit de négociation collective sont acceptables à la condition toutefois qu'elles ne constituent qu'une mesure d'exception, limitée à l'indispensable, qu'elles n'excèdent pas une période raisonnable et qu'elles s'accompagnent de garanties appropriées tendant à protéger le niveau de vie des travailleurs. Le comité estime, sur la base de tous les renseignements dont il dispose maintenant, que, dans le présent cas, tous ces critères étaient remplis, ou du moins que le gouvernement a fait des efforts sérieux pour les respecter.
  8. 116. La loi no 179 avait aussi pour effet immédiat de réduire les augmentations négociées dans le cadre des régimes de rémunération avant son entrée en vigueur, lorsque ces augmentations dépassaient celles prévues par la loi. Tout en reconnaissant que, pour prendre des mesures de restrictions salariales, il est nécessaire de choisir le moment de façon à obtenir le maximum d'effet sur la situation économique, le comité estime que l'interruption de contrats préalablement négociés n'est pas en conformité avec les principes de la libre négociation collective, parce que ces contrats doivent être respectés.
  9. 117. En ce qui concerne les allégations initiales des plaignants selon lesquelles la loi no 179 non seulement imposait des restrictions financières, mais aussi interrompait toute activité syndicale, suspendant notamment le droit de négocier sur les questions non pécuniaires et le droit de changer d'agents négociateurs, le comité note que, d'un point de vue strictement juridique, ces arguments ont été jugés dépourvus de fondement par la Cour d'appel de l'Ontario dans le cas Broadway Manor. Cette décision a toutefois été rendue trop tard pour être d'une quelconque utilité pratique aux parties au cours de la période de contrôle et il est clair que, malgré l'arrêt de la cour, les problèmes qui se sont posés à ce sujet ont été la cause de bien des difficultés et de tensions. Il est clair que la négociation sur les questions autres que pécuniaires a été entravée au cours de la période d'application de la législation de façon à ne pas aller à l'encontre du contrôle financier que celle-ci visait à mettre en oeuvre. Il est clair aussi que le gouvernement avait bien l'intention d'empêcher tout changement d'agents négociateurs au cours de la période de restriction, cela, selon le représentant du Directeur général, de façon á garantir des relations professionnelles aussi calmes que possible au cours de cette période. Le comité estime que, lorsqu'un gouvernement prend des mesures de restrictions salariales tendant à imposer un contrôle financier, il devrait avoir soin de faire en sorte que la négociation collective sur les questions n'ayant pas d'implications monétaires puisse se dérouler, et que les syndicats et leurs membres puissent exercer pleinement leurs activités syndicales normales.
  10. 118. Le comité note aussi que les syndicats ont invoqué de solides arguments pour démontrer que les mécanismes réguliers des relations professionnelles avaient souffert de l'adoption de la loi no 179 puis de la loi no 111. La norme imposée par la loi no 179 constituait en fait un substitut à l'arbitrage. Les syndicats font valoir que, en vertu des dispositions de la loi 111, la liberté de négocier ainsi que la liberté de recourir à des arbitres sont gravement réduites du fait de la nécessité de tenir compte de la capacité de payer de l'employeur ainsi que de la politique budgétaire du gouvernement. Des questions ont aussi été soulevées au sujet de l'indépendance des arbitres.
  11. 119. Le comité observe que la loi no 111 a été adoptée pour remplacer la loi no 179 et qu'elle supprimait plusieurs restrictions à la négociation salariale que cette dernière visait à couvrir. Il semble clair toutefois que - encore que de façon beaucoup moins rigide - la loi no 111 représentait la poursuite d'une politique de restriction par l'introduction de notions telles que "la capacité de payer de l'employeur" et "la politique budgétaire du gouvernement" comme critères à prendre en considération en vue de règlements salariaux. Il y a eu une controverse nourrie, même parmi les arbitres, sur le point de savoir si ces critères influaient réellement sur la négociation et les sentences arbitrales ou si, en fait, ils étaient pris en considération à n'importe quelle époque.
  12. 120. Le comité souligne, à cet égard, que les restrictions au droit de grève dans la fonction publique ou les services essentiels devraient être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides. Il souligne aussi que l'indépendance et l'impartialité du système d'arbitrage sont de la plus haute importance. Or, si, comme dans le cas présent, les arbitres sont nommés directement par un gouvernement qui énonce par la voie législative certains critères qu'ils seront tenus de suivre pour rendre leurs sentences, la confiance dans le système s'en trouvera inévitablement réduite.
  13. 121. Selon le comité, l'arrivée à expiration de la loi no 111 rend maintenant possible un retour à une situation normale dans laquelle la négociation collective pourra se dérouler librement avec la possibilité de recourir, le cas échéant, à l'arbitrage. Il pourrait être remédié, au moins en partie, à la défiance des syndicats et aux autres effets négatifs résiduels de la récente législation de restriction salariale qui affectent les relations professionnelles si le gouvernement se préoccupait, en consultation avec les syndicats, de faire en sorte que le système d'arbitrage, y compris le choix des arbitres, puisse jouir de nouveau d'une confiance aussi pleine que possible de la part des parties.
    • Recommandations du comité
  14. 122. Le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier les conclusions suivantes:
    • a) Le comité estime d'une manière générale que la loi concernant les restrictions en matière de rémunérations face à l'inflation (loi no 179) n'allait pas au-delà de ce qu'il a estimé précédement être les limites normalement acceptables qui peuvent être mises, provisoirement, à la négociation collective.
    • b) Le comité estime toutefois que l'interruption par la loi no 179 de contrats préalablement négociés n'est pas en conformité avec les principes de la libre négociation collective, parce que ces contrats doivent être respectés.
    • c) Le comité souhaite souligner que, lorsqu'un gouvernement prend des mesures de restrictions salariales tendant à imposer un contrôle financier, il devrait avoir soin de faire en sorte que la négociation collective sur les questions qui n'ont pas d'implications monétaires puisse se poursuivre et que les syndicats et leurs membres puissent exercer pleinement leurs activités syndicales normales.
    • d) Le comité souligne que les restrictions au droit de grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels devraient être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, rapides et impartiales.
    • e) Le comité exprime l'espoir que, puisque la législation qui faisait l'objet de la plainte est maintenant arrivée à expiration, le gouvernement, en consultation avec les syndicats, s'efforcera de surmonter les effets négatifs résiduels qu'elle pourrait avoir sur les relations professionnelles; plus particulièrement, le comité espère que le système d'arbitrage et les procédures de choix des arbitres seront révisés de façon à ce qu'ils puissent jouir de nouveau d'une confiance aussi pleine que possible de la part de toutes les parties.

B. Conclusions du comité au sujet du cas no 1234/Alberta

B. Conclusions du comité au sujet du cas no 1234/Alberta
  1. 123. Le comité note que ce cas concerne des allégations selon lesquelles la loi sur les universités dénie la liberté syndicale aux membres de leur personnel enseignant en habilitant les employeurs (les conseils des gouverneurs) à désigner les catégories de salariés qui peuvent faire partie des associations du personnel universitaire. Les plaignants font état de l'effet négatif que ces modifications ont eu sur la composition des effectifs de l'association du personnel de l'Université d'Athabasca.
  2. 124. Le comité observe que cette situation découle de l'effet combiné de deux dispositions de la loi, l'article 21.2 2), qui définit l'"association du personnel universitaire" (academic staff association) comme un organisme comprenant les "membres du personnel universitaire" (academic staff members), et l'article 17 1) d.1), qui habilite les conseils des gouverneurs à désigner les "membres du personnel universitaire". Bien que, dans sa réponse écrite, le gouvernement souligne que le milieu universitaire requiert une conception particulière de la relation employeur-salarié, puisque le personnel enseignant participe à tous les niveaux de la gestion de l'université, il reconnaît qu'à l'Université d'Athabasca, l'employeur - après avoir consulté l'association des professeurs - a modifié sa désignation restrictive des "membres du personnel universitaire".
  3. 125. Il ressort du rapport du représentant du Directeur général que c'est seulement à l'Université d'Athabasca que l'usage que l'employeur a fait de son pouvoir de désignation a posé des problèmes. Dans les trois autres universités de la province, la désignation des "membres du personnel universitaire" s'est effectuée sans difficulté, en consultation avec les associations des professeurs. En outre, il apparaît que les circonstances particulières propres à l'Université d'Athabasca (le fait qu'il s'agit d'une "université ouverte", récemment transférée de la capitale de la province à une ville du nord de l'Alberta) pourraient avoir entraîné des malentendus en ce qui concerne la désignation restrictive du personnel enseignant par l'employeur à ce moment-là. Quoi qu'il en soit, le comité note que cette désignation est maintenant chose acquise, à la satisfaction des deux parties, dans les quatre universités de la province.
  4. 126. Il n'en demeure pas moins que d'aucuns craignent que, dans l'avenir, les désignations puissent s'effectuer de telle sorte que des membres du corps enseignant ou des membres du personnel administratif ou du personnel de planification n'exerçant pas de fonctions de direction soient exclus des associations du personnel qui ont pour mission de protéger et de défendre les intérêts de ces catégories de travailleurs. A supposer qu'ils soient désignés comme ne faisant pas partie du personnel enseignant, ces travailleurs - qui sont expressément exclus du champ d'application de la loi sur les relations professionnelles et de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique - n'auraient pas la possibilité de constituer une association pour défendre leurs intérêts, ni de s'affilier à une telle association. Dans ces conditions, le comité appelle l'attention du gouvernement sur les dispositions de l'article 2 de la convention no 87, ratifiée par le Canada, qui garantissent à tous les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte, le droit de constituer les organisations de leur choix ainsi que celui de s'affilier à ces organisations. Il ne semble pas au comité que les circonstances particulières dans lesquelles les décisions doivent être prises dans les universités de l'Alberta justifient que l'on soumette ce droit à une quelconque limite en investissant l'organisme employeur de larges pouvoirs en matière de désignation. Le comité rappelle qu'il est déjà parvenu à la même conclusion par le passé lorsqu'il a examiné les cas relatifs au gouvernement provincial de l'Alberta auxquels les plaignants font référence dans leur plainte écrite.
  5. 127. En conséquence, le comité estime que, pour assurer le plein respect du principe que pose l'article 2 de la convention no 87, des mesures devraient être prises pour abroger l'article 17 1) d.1) de la loi et adopter un système indépendant de désignation lorsque les parties n'arrivent pas à se mettre d'accord (par exemple, ainsi qu'il a été suggéré au cours de la mission d'étude et d'information, une procédure d'arbitrage par un tiers). Le comité insiste sur ce dernier point car, si le rapport du représentant du Directeur général indique que des consultations entre les parties ont abouti à des désignations satisfaisantes, le gouvernement provincial a souligné, au cours de la mission, qu'il ne pouvait envisager d'apporter aucune modification importante à sa politique en ce qui concerne la loi sur les universités. Le comité estime qu'un mécanisme indépendant devrait être disponible, au besoin, pour aider à désigner les "membres du personnel enseignant" aux fins de l'affiliation à une association du personnel universitaire. Un mécanisme comme celui dont il est question dans le rapport du représentant du Directeur général pourrait contribuer à rassurer les plaignants qui craignent qu'il soit fait un usage abusif de l'article 17 1) d. 1) de la loi.
    • Recommandation du comité
  6. 128. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier de demander au gouvernement de prendre des mesures pour abroger la disposition de la loi sur les universités qui habilite l'organisme employeur à déterminer ceux qui peuvent faire partie des associations du personnel universitaire. Le comité recommande aussi d'envisager la possibilité d'adopter un système indépendant qui puisse servir, au besoin, à désigner les membres du personnel universitaire, qu'il s'agisse d'un système d'arbitrage par une tierce partie ou d'un mécanisme informel du type de celui que mentionne le rapport du représentant du Directeur général.

C. Conclusions du comité au sujet du cas no 1247/Alberta

C. Conclusions du comité au sujet du cas no 1247/Alberta
  1. 129. Le comité note que le présent cas concerne des allégations selon lesquelles les modifications (contenues dans la loi no 44) qui ont été apportées en 1983 à la loi sur les relations professionnelles et à la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique de l'Alberta, d'une part limitent la liberté syndicale en excluant de nombreux salariés des unités de négociations, et d'autre part empiètent sur le droit des organisations de travailleurs d'organiser leurs activités en toute liberté en restreignant la négociation collective et en soumettant le système d'arbitrage, jusque-là impartial, à la politique budgétaire du gouvernement.
  2. 130. Le comité note tout d'abord que, bien qu'il n'en soit pas fait état dans la plainte écrite, l'article 93 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, qui interdit la grève aux agents de l'administration provinciale, a été porté à l'attention de la mission d'étude et d'information. Le comité considère qu'il importe d'examiner cet article, car c'est dans le contexte de ses dispositions qu'il faut considérer les allégations des plaignants. Selon l'AUPE, les principales raisons que le gouvernement a invoquées pour justifier cette interdiction totale des grèves dans la fonction publique provinciale tiennent à ce que les salariés en question étaient si étroitement liés à ceux qui fournissent des services essentiels qu'il était raisonnable de les traiter de la même façon, et qu'il n'est pas possible d'obtenir ces services ailleurs. L'AUPE a souligné que l'article 93 ne s'applique pas aux fonctionnaires qu'emploient les municipalités ou les conseils scolaires, et il a déclaré au représentant du Directeur général que rien ne démontrait qu'il existât un lien étroit entre agents essentiels et non essentiels, de telle sorte qu'une grève de ces derniers fût de nature à empêcher la fourniture des services essentiels. Rien ne démontrait non plus qu'il fût impossible d'obtenir ailleurs les services assurés par les agents en question.
  3. 131. Le comité rappelle qu'il a été appelé à examiner la question de l'interdiction de la grève dans un cas précédent mettant en cause le gouvernement du Canada/Alberta. (Voir cas no 893, examiné le plus récemment dans le 204e rapport, paragr. 121 à 134, approuvé par le Conseil d'administration à sa 214e session (novembre 1980)). Dans ce cas, le comité a rappelé que le recours à la grève, reconnu comme découlant de l'article 3 de la convention, est un des moyens essentiels dont les travailleurs disposent pour défendre leurs intérêts professionnels. Il a aussi rappelé que, si des limites doivent être mises au recours à la grève par la voie législative, il convient de distinguer entre les entreprises publiques qui sont réellement essentielles, c'est-à-dire qui fournissent des services dont l'interruption mettrait en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne dans tout ou partie de la population, et celles qui ne sont pas essentielles au sens strict du terme. Sur la recommandation du comité, le Conseil d'administration a attiré l'attention du gouvernement sur ce principe et lui a suggéré d'envisager une modification de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique de façon à limiter l'interdiction de la grève aux services qui sont essentiels au sens strict du terme. Dans le présent cas, le comité souhaite attirer de nouveau l'attention sur ses précédentes conclusions au sujet de l'article 93 de la loi.
  4. 132. A propos de cette question des restrictions au droit de grève, il convient de noter qu'aux termes d'une allégation écrite précise une modification à l'article 117.1 de la loi sur les relations professionnelles, contenue dans la loi no 44, interdit la grève à tous les salariés des hôpitaux. Le comité note que cette exclusion globale vaut pour les aides de cuisine, les portiers, les jardiniers, etc., mais que le gouvernement a déclaré au représentant du Directeur général que l'article 117.1 n'avait de répercussions que pour de petits groupes et que, en tout état de cause, la question avait été portée devant la Cour d'appel de l'Alberta et la Cour suprême du Canada. Comme cette disposition n'est pas assez précise en ce qui concerne l'importante qualification d'"agent essentiel", le comité renvoie au principe rappelé dans le paragraphe précédent au sujet des circonstances dans lesquelles le recours à la grève peut être interdit. Il demande au gouvernement de réexaminer l'article 117.1 de façon que l'interdiction du droit de grève soit limitée aux services qui sont essentiels au sens strict du terme.
  5. 133. En ce qui concerne les dispositions qui excluent de la négociation collective les agents préposés au contrôle des paiements et aux auditions et ceux qui exercent des fonctions en substance semblables, ainsi qu'aux agents du Bureau de l'Assemblée législative, du Bureau électoral de l'Auditeur général et du Bureau du Conciliateur (Ombudsman) (art. 21 1) g) et h) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique), le comité note que, selon la réponse écrite du gouvernement, la situation précédente n'a pas été modifiée mais "affinée". Il note aussi, d'après les renseignements que contient le rapport du représentant du Directeur général, que ces modifications apportées à l'article 21 1) de la loi revenaient à réformer par la voie législative plusieurs décisions du Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique. En outre, au cours de la mission d'étude et d'information, l'AUPE s'est déclaré préoccupé d'une modification apportée en 1985 à l'article 21 1) l) de la loi qui autorise l'exclusion "pour toute autre raison". Bien que les différends relatifs aux exclusions au titre du paragraphe 1) de l'article 21 puissent être portés devant le Conseil en vue d'une décision au titre du paragraphe 2), l'AUPE se défiait de la vaste portée des exclusions possibles; ses représentants ont déclaré qu'en pratique plus de 400 salariés s'étaient vu refuser l'accès à la négociation collective du fait de ces modifications apportées à l'article 21. En revanche, le gouvernement a déclaré à la mission que seuls étaient touchés 260 salariés, qui tous exerçaient essentiellement des fonctions de direction ou s'occupaient de la politique du personnel.
  6. 134. Vu la volumineuse documentation qui a été fournie à la mission quant au fait que les attributions de certains de ces salariés ne consistent pas en fonctions de direction, le comité souhaite appeler l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel seuls les fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat (c'est-à-dire qui sont employés à des titres divers dans les ministères ou autres organismes gouvernementaux comparables), et non les autres personnes employées par le gouvernement, par les entreprises publiques ou par des institutions publiques autonomes, peuvent être exclus du champ d'application des dispositions garantissant le droit de négociation collective. D'après ce critère, le comité ne saurait accepter que tous les agents publics actuellement énumérés à l'article 21 1) de la loi soient privés de la possibilité d'être représentés aux fins de la négociation collective. En conséquence, il prie le gouvernement de réexaminer ledit article à la lumière de ce principe.
  7. 135. Bien qu'il n'en soit pas fait état dans la plainte écrite, de nombreux renseignements ont été fournis à la mission au sujet de l'article 48 2) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, qui limite les questions pouvant être soumises à l'arbitrage. D'après l'AUPE, s'il est vrai que le conseil peut trancher les différends portant sur le point de savoir si certains sujets sont exclus de l'arbitrage, les syndicats ont perdu toute confiance en lui à cause des ses récentes décisions dans ce domaine qui, toujours selon l'AUPE, considèrent toutes les questions comme relevant de la prérogative de direction de l'employeur et, de ce fait, ne se prêtant pas à l'arbitrage. En outre, l'AUPE a soutenu que le conseil retardait ou empêchait souvent la soumission à l'arbitrage de l'ensemble d'un conflit relatif à la négociation. Le comité prend note des informations sur la question contenues dans le rapport du représentant du Directeur général car elles font partie du contexte dans lequel il faut replacer la deuxième allégation essentielle formulée dans le présent cas, à savoir que la loi no 44 a endommagé, sinon détruit, le système d'arbitrage. Plus précisément, le syndicat soutient que le système d'arbitrage a été affaibli par le recours à un organisme de procédure (le Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique) pour sélectionner les questions pouvant donner matière à un arbitrage. Le comité note aussi les exemples, donnés à la mission, de questions dont le conseil a jugé qu'elles ne se prêtaient pas à être soumises à l'arbitrage (par exemple, la durée du travail, certains congés, les transferts, les promotions, etc.). Le comité a souligné que les restrictions imposées au droit de grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels devraient s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides à chaque étape desquelles les parties devraient pouvoir participer et dans lesquelles les décisions, une fois rendues, aient force obligatoire pour les deux parties. Le comité estime aussi que le système actuel, dans lequel le Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique peut empêcher que des questions qui font l'objet d'un différend soient soumises à l'arbitrage, n'est pas pleinement conforme aux principes de l'OIT et qu'il a entraîné de grandes tensions entre les parties ainsi qu'une perte de confiance dans le mécanisme d'arbitrage de la part des syndicats.
  8. 136. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle l'énumération des facteurs - parmi lesquels la politique budgétaire du gouvernement - dont les arbitres doivent tenir compte pour rendre leurs sentences (art. 117.8 de la loi sur les relations professionnelles et art. 55 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique) représente une ingérence dans l'arbitrage lui-même, le comité prend note de la réponse écrite du gouvernement qui fait valoir que les lois en question ne font qu'énumérer divers facteurs sans indiquer l'importance que les conseils d'arbitrage devraient leur donner. Le comité observe, d'après le rapport du représentant du Directeur général, qu'en pratique les conseils d'arbitrage n'accordaient pas une importance prédominante à la politique budgétaire du gouvernement et, dans certains cas, jugeaient le critère dépourvu d'utilité. Néanmoins, les plaignants craignent encore des abus possibles. C'est cette défiance qui oblige le comité à rappeler une fois de plus le principe selon lequel des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides devraient être disponibles lorsque le droit de grève est soumis à des restrictions dans la fonction publique ou dans les services essentiels.
  9. 137. Dans le présent cas, il apparaît au comité que l'indépendance des conseils d'arbitrage institués afin de donner une compensation aux agents publics pour la perte de leur droit de grève (conseils qui sont composés d'un représentant de chacune des parties au différend et d'un président désigné conjointement par lesdits représentants) n'est pas mise en cause par le fait que la législation énumère les facteurs dont il doit être tenu compte.
  10. 138. En ce qui concerne les huit autres modifications à la loi sur les relations de travail contenues dans la loi no 44 (dont une est reprise de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique), le comité note que, d'après le rapport du représentant du Directeur général, nombre d'entre elles n'ont pas soulevé de problèmes en pratique et que certaines n'ont même pas été utilisées. En particulier, le comité ne voit pas de menace pour la liberté syndicale dans les articles suivants:
    • - L'article 1 w.1), qui introduit une nouvelle conception de l'"organisation syndicale". (Cet article n'a jamais été adopté.)
    • - L'article 74 1), aux termes duquel un représentant dûment autorisé aux fins de la négociation collective doit résider en Alberta. (Cet article pourrait présenter des inconvénients mineurs pour le syndicat mais il vise en fait manifestement à éviter des retards dans la conclusion du règlement définitif et la signature des conventions. Il ne porte pas atteinte au droit d'un syndicat de se faire aider dans la négociation par des personnes résidant hors de la province.)
    • - L'article 87, qui n'autorise qu'un seul vote, supervisé par le conseil, au sujet de la grève ou du lock-out. (Cet article limite certaines tactiques des syndicats mais n'empêche pas ceux-ci de procéder à un sondage auprès de leurs membres pour déterminer leur position avant de demander un vote.)
    • - L'article 49 1), qui prévoit un moratoire de 90 jours avant qu'il soit possible de demander une nouvelle ordonnance d'accréditation. (Cet article affecte lui aussi les tactiques syndicales mais il vise manifestement à dissiper l'incertitude quant à la force réelle d'un syndicat dans l'unité de négociation et à éviter l'abus des procédures d'accréditation.)
    • - L'article 132, qui autorise à demander au conseil de rendre une décision en ce qui concerne les droits du successeur. (Cet article ne fait que réglementer et accélérer la pratique antérieure normale et n'est pas déraisonnable.)
    • - L'article 102.2, qui autorise à appliquer aux salariés en question les recommandations d'une commission d'enquête sur les différends. (Cet article peut soulever la question de savoir quel rôle revient à l'organe exécutif d'un syndicat mais il ne prive pas les travailleurs, individuellement, de leurs droits syndicaux.)
  11. 139. En revanche, le comité souhaite exprimer une certaine préoccupation au sujet de deux autres modifications apportées à la loi sur les relations professionnelles:
    • - Les articles 105 et 106, qui interdisent de menacer d'une grève illégale, pourraient empêcher les organisations de travailleurs d'avoir la latitude d'organiser leurs activités en toute liberté et exposer les responsables syndicaux à certains risques, étant donné la définition très large du mot "grève" donnée par la loi. Le gouvernement a déclaré au représentant du Directeur général que l'article 105 n'avait pas été utilisé et qu'il appartiendrait au conseil de mettre en lumière toute difficulté éventuellement soulevée par sa rédaction s'il avait un jour à l'appliquer. Le comité estime que, comme le représentant du Directeur général l'a suggéré, l'incertitude et l'imprécision de la définition du mot "grève" dans le texte pourraient soulever des difficultés pour les syndicalistes s'ils engagent une action de bonne foi et que, par la suite, cette action est déclarée illégale. Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures en vue de clarifier la situation en consultation avec les syndicats et, au besoin, de modifier en conséquence l'article en question.
    • - L'article 117.94 (de même que l'article 92.2 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique), qui autorise l'employeur à suspendre les déductions des cotisations syndicales sur les salaires si une grève illégale avait lieu. (Cet article n'a pas été utilisé.) La portée exacte de cette disposition est toutefois incertaine en ce sens qu'il n'est pas clairement précisé si la suspension s'appliquerait à l'ensemble de l'unité de négociation ou seulement aux travailleurs qui auraient participé à la grève illégale. Des discussions devraient avoir lieu avec les syndicats en vue de préciser la portée exacte de cette disposition dans la pratique.
      • Recommandations du comité
    • 140. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier les conclusions suivantes:
      • a) Le comité considère que les dispositions de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique et de la loi sur les relations professionnelles qui interdisent la grève à une vaste gamme de fonctionnaires provinciaux et de travailleurs des hôpitaux dépassent les limites qu'il est acceptable d'imposer au droit de grève reconnu comme découlant de l'article 3 de la convention no 87. Le comité demande au gouvernement de réexaminer les dispositions en question en vue de restreindre l'interdiction des grèves aux services qui sont essentiels au sens strict du terme.
      • b) En ce qui concerne le vaste éventail d'agents publics qui sont exclus de la négociation collective en vertu de l'article 21 1) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, le comité souhaite appeler l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel seuls les fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat peuvent faire l'objet d'une telle exclusion. Il prie le gouvernement de revoir ledit article à la lumière de ce principe.
      • c) Bien qu'il n'estime pas que les principes de la liberté syndicale soient remis en question par le fait de mentionner la politique budgétaire du gouvernement comme un facteur que les arbitres doivent prendre en considération, le comité note avec une certaine préoccupation que le Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique est habilité (par l'article 48 2) de la loi) à déterminer, parmi toutes les questions entrant en jeu dans un différend collectif, quelles sont celles qui peuvent être soumises à l'arbitrage. Le comité espère que les dispositions de cette sorte qui ont amoindri la confiance du syndicat dans le système d'arbitrage - lequel a pour raison d'être de compenser le fait que les agents en question ne jouissent pas du droit de grève - seront réexaminées en consultation avec les parties et que les modifications nécessaires seront apportées pour que les arbitres puissent connaître de toutes les questions intervenant dans un différend.
      • d) Le comité ne voit pas de menace pour la liberté syndicale dans les diverses modifications à la loi sur les relations professionnelles contenues dans la loi no 44 et qui sont évoquées au paragraphe 138, à savoir les articles 74 1), 87, 49 1), 132 et 102.2.
      • e) En ce qui concerne les articles 105 et 106 de la loi sur les relations professionnelles, tels que modifiés, qui interdisent de menacer d'une grève illégale, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures en vue de préciser la portée exacte de ces dispositions en consultation avec le syndicat et, au besoin, de les modifier en conséquence. f) En ce qui concerne l'article 117.94 de la loi sur les relations professionnelles et l'article 92 2) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, qui permettent de supprimer les déductions de cotisations syndicales sur les salaires en cas de grève illégale, le comité recommande que des discussions aient lieu avec les syndicats en vue de préciser la portée de cette disposition dans la pratique.

D. Conclusions du comité au sujet du cas no 1260/Terre-Neuve

D. Conclusions du comité au sujet du cas no 1260/Terre-Neuve
  1. 141. Le comité prend note de tous les renseignements détaillés que les plaignants ont fournis dans ce cas, des renseignements également détaillés que le gouvernement a transmis et des informations qui figurent dans le rapport du représentant du Directeur général.
  2. 142. Les plaignants avaient essentiellement allégué que la loi sur la fonction publique (négociation collective) - la loi no 59 -, entrée en vigueur le 1er septembre 1983, était en contradiction avec les normes internationales en matière de liberté syndicale sur trois points en particulier: la définition de "l'employé" donnée par l'article 2 1) i) de la loi, la désignation des "employés essentiels" contenue dans l'article 10, et les limites imposées à l'exercice du droit de grève par les articles 10, 23 et 24.
  3. 143. Avant d'examiner ces divers points, le comité prend note des renseignements dont il dispose maintenant au sujet de l'adoption de la loi en question. Il ne peut que déplorer que, malgré des relations qui semblaient bonnes entre le syndicat plaignant et le gouvernement, le syndicat n'ait pas été suffisamment consulté avant l'adoption de la loi no 59. Cet état de choses s'explique dans une certaine mesure par l'attitude des deux parties. Le gouvernement avait ce que, eu égard à son expérience, il jugeait être de solides raisons de faire modifier la législation en vigueur, tandis que le syndicat était opposé à ce projet. Il en est résulté un texte qui, de l'avis du syndicat, autorise des soupçons quant aux motifs réels pour lesquels le gouvernement a voulu le voir adopter. Ce texte, au demeurant, à supposer que des consultations suffisantes aient eu lieu, aurait peut-être bien revêtu une forme différente, ce qui aurait évité les tensions et les soupçons qui existent à l'évidence entre le syndicat et le gouvernement. Le comité note en particulier qu'en 1985, deux ans seulement après sa promulgation, d'importantes modifications ont été apportées à la loi no 59.
  4. 144. Le comité souligne l'importance qu'il convient d'attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux. Il exprime le ferme espoir que, eu égard aux problèmes qu'ont causés les procédures utilisées pour adopter la loi no 59, le gouvernement et le syndicat procéderont de façon systématique à de véritables discussion s et négociations en vue de résoudre les problèmes qui se sont posés dans le présent cas.
  5. 145. En ce qui concerne l'article 2 1) i) xii) de la loi no 59 (définition du mot "employés"), le syndicat s'inquiétait surtout de ce que les personnes employées dans le cadre d'un programme de création d'emplois que le cms gouvernement provincial administrait avec ses propres fonds et/ou des fonds fédéraux fussent exclues de cette définition. Selon les plaignants, non seulement les dispositions incriminées empêchaient ces personnes de s'affilier à un syndicat, mais la présence de cette main-d'oeuvre non syndiquée sur les lieux de travail où le syndicat avait des membres constituait un obstacle à la négociation collective et une menace pour l'efficacité du syndicat, par exemple en cas de grève.
  6. 146. A ce sujet, le comité note qu'il semblait y avoir un large malentendu entre les parties quant au nombre exact de personnes touchées par cette disposition. Quoi qu'il en soit, le comité ne peut accepter que des personnes participant à un programme de création d'emplois soient entièrement privées du droit d'appartenir au syndicat de leur choix. Il estime que l'extension de leur droit d'organisation n'interférerait pas nécessairement avec le bon fonctionnement du programme et qu'en outre elle diminuerait la crainte du syndicat de voir des travailleurs syndiqués remplacés par des travailleurs engagés dans le cadre du programme.
  7. 147. Sont aussi exclus de la définition du mot "employés" les travailleurs chargés de conseiller l'employeur en matière d'élaboration ou d'administration des politiques ou des programmes (art. 2 1) ii) xv)). Le comité note que le Conseil des relations professionnelles, de caractère tripartite, semble avoir par le passé usé de ses pouvoirs de décider des catégories de main-d'oeuvre à exclure d'une unité de négociation de façon assez restrictive. Il estime que cette disposition n'est pas contraire aux principes de la liberté syndicale.
  8. 148. Eu égard aux problèmes et au climat de suspicions auxquels les dispositions précitées de la loi no 59 ont donné naissance, le comité prie instamment le gouvernement de réexaminer la question des exclusions en pleine consultation avec le syndicat.
  9. 149. Le comité note que les employés des services publics de Terre-Neuve disposent du droit de grève sous réserve de certaines restrictions en ce qui concerne, notamment, les employés réputés essentiels. Les employés essentiels sont définis dans la loi principale comme "les employés dont les attributions sont totalement ou partiellement des attributions, à un moment quelconque ou pendant une période quelconque, indispensables pour la santé, la sûreté ou la sécurité publiques" (art. 10.1).
  10. 150. A cet égard, le comité souhaite tout d'abord rappeler que la grève peut être limitée ou interdite pour les fonctionnaires qui agissent en tant qu'agents de la puissance publique ou qui participent à des services dont l'interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans tout ou partie de la population. Ces limites ou interdictions devraient toutefois être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides. En outre, le comité observe que, du fait des modifications qui ont été apportées à la loi en 1985, un nombre important d'unités de négociation ont été exclues de l'application de son article 10. Le gouvernement est aussi convenu par écrit avec le syndicat qu'aucune personne ne serait désignée comme exerçant une fonction essentielle dans une dizaine d'unités de négociation.
  11. 151. Le problème à Terre-Neuve est que, bien que la grève soit possible même dans des services tels que les institutions de soins de santé, elle risque d'être inefficace par suite de la procédure de désignation d'un certain nombre de "employés essentiels". En outre, si le nombre de travailleurs ainsi désignés par le Conseil des relations professionnelles est inférieur à 50 pour cent de l'ensemble des employés en cause, il peut arriver qu'il ne soit pas possible de demander le recours à l'arbitrage. En d'autres termes, il semble dans ces conditions que les restrictions imposées aux syndicats dans le déroulement d'une grève efficace ne sont pas convenablement compensées par un libre accès à la procédure d'arbitrage.
  12. 152. Le comité estime que, si la méthode utilisée pour désigner les employés essentiels n'est pas incompatible avec les principes de la liberté syndicale, le gouvernement devrait néanmoins revoir la disposition pertinente de façon à faciliter l'accès à un arbitrage indépendant en cas de différend.
  13. 153. D'autres modifications apportées à la loi principale par la loi no 59 et qui avaient une incidence sur le droit de grève ont aussi été critiquées par le syndicat. Abrogeant l'article 10 de la loi principale, l'article 2 de la loi 59 l'avait remplacé par des dispositions empêchant un agent négociateur de voter la grève ou de faire grève jusqu'à ce que les parties soient parvenues à un accord ou que le conseil ait déterminé combien l'unité en question comptait d'employés essentiels. En outre, en vertu des modifications apportées aux articles 23 et 24 de la loi, il était obligatoire, non seulement de donner un préavis de grève de sept jours, mais aussi d'indiquer la date à laquelle la grève débuterait. Si la grève ne commençait pas à la date indiquée dans le préavis, il fallait attendre un mois avant de pouvoir déposer un nouveau préavis, qui devait être aussi de sept jours, avec indication de la nouvelle date à laquelle il était prévu que la grève commençât. Ces modifications empêchaient aussi les grèves tournantes dans les institutions de soins de santé.
  14. 154. En ce qui concerne ces modifications et les allégations formulées, le comité n'estime pas que les modalités ainsi imposées constituent pour les syndicats un obstacle indu à l'exercice du droit de grève et dépassent de ce fait ce qui est acceptable conformément aux normes et aux principes internationaux en matière de liberté syndicale. Le comité note aussi, en particulier, que la nouvelle modification adoptée en juillet 1985, à savoir le délai d'un mois dont il est question plus haut, ne s'applique maintenant qu'au secteur hospitalier. Il note toutefois, d'après le rapport du représentant du Directeur général, que les syndicats voient dans ces limites une ingérence du gouvernement dans leur tactique de grève et, en particulier, considèrent que l'obligation de préavis pourrait servir à retarder les grèves par des négociations de dernière minute. Le comité observe que rien ne prouve que ces craintes soient fondées, particulièrement à la lumière de la déclaration du gouvernement d'où il ressort que les parties peuvent toujours se mettre d'accord sur un allongement, d'une journée, du préavis de sept jours si cela est nécessaire. C'est encore une question que, selon lui, les parties pourraient discuter ensemble en vue de dissiper les doutes et les suspicions qui subsistent quant à la façon dont la loi sera appliquée.
    • Recommandations du comité
  15. 155. Le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier les conclusions suivantes:
    • a) Le comité souligne l'importance qu'il convient d'attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu avec les syndicats sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux; il regrette que le syndicat plaignant n'ait pas été suffisamment consulté avant la promulgation de la loi no 59.
    • b) Le comité estime que les personnes qui participent aux programmes de création d'emplois ne devraient pas être privées du droit d'appartenir au syndicat de leur choix; il prie instamment le gouvernement de revoir la question de l'exclusion de cette catégorie de travailleurs en pleine consultation avec le syndicat.
    • c) Le comité souligne que les restrictions en matière de grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels devraient être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides, à chaque étape desquelles les parties devraient pouvoir prendre part et dans lesquelles les décisions aient dans tous les cas force obligatoire pour les deux parties.
    • d) Le comité demande au gouvernement de revoir les dispositions de la loi relatives à la désignation des employés essentiels en vue de faciliter l'accès à un arbitrage indépendant en cas de différend.
    • e) Le comité n'estime pas que les modalités d'exercice de la grève imposées par les articles 23 et 24 de la loi no 59, tels que modifiés, soient incompatibles avec les principes de la liberté syndicale.
    • f) Le comité exprime le ferme espoir que, eu égard aux problèmes auxquels la promulgation de la loi no 59 a donné naissance, le gouvernement et le syndicat procéderont de façon systématique à de véritables discussions et négociations en vue de résoudre les problèmes qui subsistent au sujet de l'application pratique de cette loi.

ANNEXE RAPPORT SUR UNE MISSION D'ETUDE ET

ANNEXE RAPPORT SUR UNE MISSION D'ETUDE ET
  1. D'INFORMATION EFFECTUEE AU CANADA
  2. PAR SIR JOHN WOOD, CBE, LLM, REPRESENTANT DU
  3. DIRECTEUR GENERAL DU BUREAU
  4. INTERNATIONAL DU TRAVAIL,CONCERNANT LES CAS
  5. CI-APRES DONT EST SAISI LE
  6. COMITE DE LA LIBERTE SYNDICALE DU CONSEIL
  7. D'ADMINISTRATION: ONTARIO (CAS NO
  8. 1172), ALBERTA (CAS NOS 1234 et 1247) ET
  9. TERRE-NEUVE (CAS NO 1260)
  10. Table des matières
  11. Paragraphes
  12. I. Introduction ........................................ 1-7
  13. II. Observations générales .............................. 8-21
  14. a) Pressions économiques et politiques ........... 9-10
  15. b) Secteur public ................................ 11-13
  16. c) Mécanisme de la négociation collective ........ 14-15
  17. d) Législation ................................... 16-21
  18. III. Cas de l'Alberta - no 1247 .......................... 22-84
  19. A. Introduction ...................................... 2
  20. B. Problèmes en cause ................................ 23
  21. i) Exclusion de certains salariés des négociations
  22. collectives
  23. ................ 24-25
  24. ii) Système d'arbitrage ......................... 26-28
  25. iii) Autres questions ............................ 29-45
  26. C. Informations reçues pendant la mission ............ 46-75
  27. a) Négociation collective et arbitrage ........... 48-56
  28. b) Salariés exclus ............................... 57-58
  29. c) Droit de grève ................................ 59-67
  30. d) Autres questions .............................. 68-75
  31. D. Remarques finales ................................. 76
  32. Négociation collective et arbitrage ............... 77-78
  33. Questions particulières ............................79-80
  34. Considérations générales .......................... 81-84
  35. IV. Cas de l'Alberta - no 1234 .......................... 85-96
  36. A. Introduction ...................................... 85
  37. B. Problèmes en cause ................................ 86-92
  38. C. Informations reçues pendant la mission ............ 93-94
  39. D. Remarques finales ................................. 95-96
  40. V. Cas de l'Ontario - no 1172 .......................... 97-157
  41. A. Introduction ...................................... 97
  42. B. Problèmes en cause ................................ 98-119
  43. C. Informations reçues pendant la mission ............ 120-143
  44. D. Remarques finales ................................. 144-157
  45. VI. Cas de Terre-Neuve - no 1260 ........................ 158-218
  46. A. Introduction ...................................... 158
  47. B. Problèmes en cause ................................ 159
  48. a) Définition de l'"employé public" .............. 161-165
  49. b) Désignation des "employés publics exerçant
  50. exerçant des fonctions essentielles" .......... 166-173
  51. c) Limitation du droit de grève .................. 174-177
  52. C. Informations reçues pendant la mission ............ 178-179
  53. a) Consultation .................................. 180-181
  54. b) Définition de l'"employé public"............... 182-185
  55. c) Questions concernant le droit de grève ........ 186-208
  56. D. Remarques finales ................................... 209-218
  57. VII. Observations finales ................................ 219-232
  58. 1. Lutte contre l'inflation ........................ 222-223
  59. 2. Consultation .................................... 224-225
  60. 3. Fonctionnaires - négociation et droit de grève .. 226
  61. a) Négociation collective ........................ 227-228
  62. b) Système indépendant de règlement des conflits .
  63. 229-232
  64. Page
  65. ANNEXE ...................................................... 103
  66. I. Introduction
  67. 1. A sa réunion de novembre 1984, le Comité de la liberté
  68. syndicale du
  69. Conseil d'administration a décidé d'ajourner son examen des
  70. cas concernant
  71. l'Ontario, l'Alberta et Terre-Neuve, estimant qu'avant d'arriver à
  72. des
  73. conclusions dans ces cas il serait nécessaire de procéder à
  74. une instruction
  75. complémentaire, notamment par l'intermédiaire d'une mission
  76. d'étude et
  77. d'information, qui aurait pour objectif d'éclaircir les aspects de
  78. la loi et
  79. de la pratique dans les affaires en cause. Le comité avait donc
  80. prié le
  81. gouvernement d'indiquer s'il consentait à cette procédure.
  82. 2. Dans une lettre du 1er février 1985, le gouvernement a
  83. fait savoir
  84. qu'après des consultations avec les divers gouvernements
  85. provinciaux
  86. intéressés il n'avait pas d'objection à la réalisation de cette
  87. mission.
  88. 3. Le comité avait expliqué que la mission d'étude et
  89. d'information se
  90. situerait dans le cadre de son examen des cas. Il avait
  91. souligné que sa
  92. proposition d'envoi d'une telle mission correspondait à son
  93. désir d'aboutir à
  94. des conclusions avec une connaissance et une
  95. compréhension aussi complète que
  96. possible des problèmes complexes en cause. Il s'était déclaré
  97. convaincu que sa
  98. tâche serait grandement facilitée par une appréciation sur
  99. place de
  100. l'application pratique quotidienne, dans la situation locale, de
  101. la
  102. législation qui faisait l'objet des plaintes.
  103. 4. Des dispositions ont donc été prises pour qu'une mission
  104. d'étude et
  105. d'information ait lieu au Canada - notamment dans les
  106. provinces de l'Ontario,
  107. de l'Alberta et de Terre-Neuve - du 12 au 25 septembre 1985.
  108. Le Directeur
  109. général du BIT m'a nommé en tant que son représentant pour
  110. effectuer la
  111. mission, et j'ai été accompagné, pendant la mission, par M.
  112. William R.
  113. Simpson, chef du Service de la liberté syndicale du
  114. Département des normes
  115. internationales du travail, et par Mme Jane Hodges,
  116. fonctionnaire du Service
  117. de la liberté syndicale.
  118. 5. Grâce à l'efficacité des fonctionnaires du ministère
  119. canadien du Travail
  120. chargés de ces questions et à celle des responsables du
  121. Congrès du travail du
  122. Canada, il a été possible d'établir un programme de réunions
  123. avec les
  124. représentants du gouvernement fédéral et des gouvernements
  125. provinciaux en
  126. cause, ainsi qu'avec les divers syndicats nationaux et
  127. provinciaux qui avaient
  128. joué un rôle dans la présentation des plaintes (pour la liste des
  129. noms, voir
  130. Annexe). C'est également grâce aux services qui m'ont été
  131. fournis par les
  132. gouvernements et les syndicats des provinces de l'Ontario, de
  133. l'Alberta et de
  134. Terre-Neuve qu'il m'a été possible de m'acquitter avec succès
  135. du mandat qui
  136. m'avait été confié.
  137. 6. Avant de partir pour le Canada, j'avais eu la possibilité
  138. d'examiner les
  139. plaintes qui avaient été présentées dans ces cas, les diverses
  140. réponses des
  141. gouvernements respectifs et la masse de documentation et de
  142. textes législatifs
  143. qui avaient accompagné les nombreuses communications
  144. adressées au BIT. En
  145. établissant le présent rapport, il m'a semblé approprié, en
  146. premier lieu,
  147. d'exposer de façon assez détaillée les principales questions
  148. soulevées par le
  149. plaignants dans leurs allégations écrites, ainsi que les
  150. arguments avancés par
  151. les gouvernements respectifs pour infirmer ces allégations.
  152. Sont ensuite
  153. exposées les informations que j'ai été en mesure de recueillir
  154. pendant la
  155. mission au sujet de ces questions. Je me suis ainsi efforcé de
  156. fournir au
  157. Comité de la liberté syndicale un rapport donnant un tableau
  158. aussi complet que
  159. possible de la situation, depuis l'époque de la présentation des
  160. plaintes
  161. jusqu'à l'heure actuelle. En présentant mon rapport de cette
  162. manière, j'espère
  163. avoir aidé le comité à parvenir à ses conclusions dans ces
  164. cas.
  165. 7. Je tiens à souligner qu'à aucun moment je n'ai eu
  166. l'intention ni le
  167. désir - et cela ne faisait d'ailleurs pas partie de mon mandat -
  168. de formuler
  169. de quelconques conclusions sur les diverses questions que j'ai
  170. été appelé à
  171. examiner. Cette responsabilité est exclusivement du ressort du
  172. Comité de la
  173. liberté syndicale lui-même. Je me suis toutefois acquitté de
  174. cette mission en
  175. ayant présents à l'esprit les normes et principes internationaux
  176. concernant la
  177. liberté syndicale dont l'application avait été mise en cause par
  178. les
  179. organisations plaignantes, et je n'ai pas hésité, dans le présent
  180. rapport, à
  181. exposer certaines opinions ou impressions personnelles que j'ai
  182. pu avoir
  183. concernant la violation éventuelle d'obligations internationales
  184. ou concernant
  185. des mesures correctives qui pourraient être prises si les normes
  186. et principes
  187. de l'OIT ne semblaient pas être parfaitement appliqués. Ce
  188. faisant, mon
  189. intention n'a pas été de préjuger les conclusions du comité qui
  190. accordera sans
  191. doute à ces opinions ou impressions le poids qu'il estimera
  192. approprié et
  193. correct.
  194. II. Observations générales
  195. 8. Il n'est nul besoin de souligner que les diverses plaintes
  196. ont été
  197. soulevées dans trois des provinces d'un Etat fédéral. La
  198. structure et les
  199. complexités de cette organisation constitutionnelle sont bien
  200. connues du
  201. comité. Chaque problème en cause doit être évalué dans le
  202. contexte de chaque
  203. province, mais il est intéressant de noter que les problèmes ont
  204. des aspects
  205. communs. Les parties sont loin de l'ignorer. En fait, du côté
  206. des syndicats,
  207. l'influence des centrales syndicales conduit inévitablement à
  208. prêter attention
  209. aux similitudes générales des problèmes en cause. Il n'est
  210. peut-être pas sans
  211. intérêt d'appeler l'attention sur quelques-uns de ces points
  212. généraux. Le but
  213. n'est pas de détourner l'attention de l'obligation de traiter
  214. chaque cas
  215. indépendamment mais d'illustrer plus clairement les problèmes
  216. fondamentaux.
  217. a) Pressions économiques et politiques
  218. 9. La législation sur laquelle portent la plupart des plaintes
  219. représente
  220. un effort du gouvernement concerné pour résoudre les
  221. problèmes économiques
  222. tels qu'ils sont perçus. Ces problèmes ont provoqué une
  223. réaction politique
  224. qui, à son tour, concrétise les objets et la portée de la
  225. législation qui
  226. s'ensuit. Tel est très nettement le cas de la loi no 44 dans
  227. l'Alberta et de
  228. la loi no 179 dans l'Ontario. La loi no 59 de Terre-Neuve ne
  229. vise pas aussi
  230. manifestement les problèmes économiques, mais les mesures
  231. prises semblent
  232. découler, ne serait-ce qu'indirectement, de telles
  233. considérations.
  234. 10. Il y a bien entendu une discussion animée quant à
  235. l'acuité et même à
  236. l'existence des problèmes économiques. Quelle que soit
  237. l'opinion en la
  238. matière, il est évident que les gouvernements concernés
  239. étaient certains que
  240. les problèmes économiques exigeaient une action urgente
  241. communément dénommée
  242. lutte contre l'inflation. C'est l'impact de ces mesures législatives
  243. sur
  244. l'application de principes de l'OIT tels que ceux que
  245. consacrent les
  246. conventions nos 87 et 98 qui est au coeur de ces plaintes. Le
  247. débat sur la
  248. validité des jugements économiques se situe ailleurs.
  249. b) Secteur public
  250. 11. Les plaintes sont formulées par des syndicats de la
  251. fonction publique
  252. et concernent l'impact de mesures législatives sur les
  253. procédures de
  254. négociation collective dans le secteur public. Un facteur, dans
  255. l'esprit des
  256. organisations plaignantes, est qu'il y a manque d'impartialité
  257. dans le
  258. traitement du secteur public par opposition au secteur privé.
  259. Ces comparaisons
  260. ne sont pas toujours faciles à faire et, de toute manière, se
  261. situent en
  262. dehors du domaine des préoccupations du comité.
  263. Néanmoins, il s'agit là d'un
  264. sentiment qu'il convient de noter.
  265. 12. Une difficulté cruciale ressort à l'évidence. La
  266. négociation collective
  267. implique que deux parties, l'employeur et le syndicat, règlent
  268. leur
  269. préoccupation mutuelle par voie de discussion et de
  270. négociation. Lorsque
  271. l'employeur est le gouvernement, il y a une difficulté
  272. supplémentaire. Le
  273. gouvernement a la vaste tâche de gérer l'économie et cela
  274. implique souvent, en
  275. particulier, qu'il doit s'efforcer d'influer, par des arguments
  276. budgétaires et
  277. économiques, sur le niveau des règlements auxquels aboutit la
  278. négociation
  279. collective. Il est extrêmement difficile, pour le gouvernement,
  280. de séparer ces
  281. deux rôles afin que la négociation dans le secteur public soit la
  282. même que
  283. dans le secteur privé.
  284. 13. On s'efforce généralement d'opérer cette séparation en
  285. instituant un
  286. ensemble judicieux de structures de négociation dans le
  287. secteur public.
  288. Celles-ci peuvent alors fonctionner de la manière normale et la
  289. préoccupation
  290. majeure du gouvernement, qui n'est pas nécessairement la
  291. même en ce qui
  292. concerne l'emploi public par opposition à l'emploi privé, mais
  293. l'est en
  294. général, peut être imposée en dehors du mécanisme de la
  295. négociation
  296. collective, par exemple par la voie législative.
  297. c) Mécanisme de la négociation collective
  298. 14. Il est difficile, voire dangereux, de généraliser au sujet de
  299. la
  300. structure de la négociation collective qui est établie
  301. séparément par chaque
  302. province, ainsi que par le gouvernement fédéral. De toute
  303. évidence, il y a
  304. tant de variantes qu'elles ne peuvent pas être
  305. convenablement évaluées dans
  306. une brève étude. Examiner le mécanisme officiel à base légale
  307. ne donne pas
  308. nécessairement une image exacte de ce qui se passe
  309. effectivement dans la
  310. pratique. Il est encore plus difficile d'évaluer l'aptitude des
  311. structures à
  312. faire face aux pressions qui s'exerceront inévitablement sur
  313. elles à la suite,
  314. par exemple, d'une récession ou d'une augmentation du
  315. chômage.
  316. 15. La négociation collective au Canada a été instituée dans
  317. les années
  318. soixante au plan national comme au niveau provincial et n'a
  319. donc pas une
  320. longue histoire. On peut distinguer trois aspects différents des
  321. relations
  322. employeur-salarié. La consultation est le processus le plus
  323. difficile à
  324. évaluer car elle est souvent largement officieuse. Il s'ensuit
  325. que l'étude des
  326. processus officiels ne pourra peut-être pas indiquer l'ampleur
  327. des
  328. consultations dans la pratique. Il est probable que la
  329. négociation proprement
  330. dite suit d'assez près les règles fixées dans la loi qui l'a établie
  331. et les
  332. pratiques dont les parties sont convenues au fil des ans. Enfin,
  333. de par sa
  334. nature insaisissable, il est difficile de décrire l'impact du pouvoir
  335. de
  336. légiférer. Le recours à la loi repose, bien entendu, dans les
  337. mains de l'une
  338. des parties, l'employeur. Les diverses manières dont la loi est
  339. utilisée
  340. entraînent des difficultés et semblent conduire à d'éventuels
  341. malentendus et
  342. rancoeurs.
  343. d) Législation
  344. 16. Les plaintes dont est saisi le comité ont pour origine des
  345. textes
  346. législatifs spécifiques ainsi que leur interprétation et leur
  347. application dans
  348. la pratique. La partie suivante du présent rapport passera en
  349. revue, de façon
  350. plus détaillée, les griefs spécifiques suscités par certains
  351. aspects de la loi
  352. no 59 à Terre-Neuve, de la loi no 44 dans l'Alberta et de la loi
  353. no 179 dans
  354. l'Ontario.
  355. 17. Au stade actuel, il est nécessaire de mentionner un point
  356. plus général.
  357. Il semble important de faire une distinction entre les objets de
  358. la
  359. législation gouvernementale et son impact. Dans le contexte
  360. de la présente
  361. étude, il est apparu que deux caractéristiques de la législation
  362. devraient
  363. être soigneusement examinées.
  364. 18. La portée de la législation varie. Elle peut être
  365. permanente ou
  366. temporaire. Elle peut toucher l'emploi de manière générale ou
  367. s'appliquer à
  368. des rapports de négociation spécifiques. La genèse de la
  369. législation peut être
  370. la réglementation de l'économie, d'une part, ou le contrôle de
  371. la structure
  372. des procédures de négociation, d'autre part. Fréquemment, les
  373. deux fils sont
  374. enchevêtrés et les objets de la législation, difficiles à séparer.
  375. 19. Il semble, en second lieu, qu'il soit possible d'intervenir
  376. plus
  377. directement dans le processus de la négociation collective. On
  378. peut tenter
  379. d'influer sur le résultat d'une négociation particulière en
  380. recourant à l'une
  381. des formes du processus législatif. Alors que le processus dont
  382. il est
  383. question au paragraphe précédent peut être considéré comme
  384. une intervention
  385. stratégique, ce que l'on décrit ici a plutôt un caractère
  386. tactique.
  387. 20. Les normes que le Comité de la liberté syndicale a réussi
  388. à garantir
  389. s'appliquent, bien entendu, avec une égale rigueur à l'action,
  390. quel que soit
  391. leur caractère. Du point de vue des syndicats concernés, il est
  392. peut-être
  393. difficile d'apprécier ces distinctions, car toutes les actions du
  394. type qui
  395. conduit à une plainte se caractérisent manifestement par leur
  396. effet nuisible
  397. tel qu'on le perçoit. Les préoccupations qu'a exprimées ce
  398. comité par le passé
  399. indiquent toutefois que les principes énoncés influent sur les
  400. délibérations
  401. de l'OIT. Une législation d'urgence, appliquée impartialement à
  402. l'ensemble des
  403. négociations collectives pour faire face à une crise
  404. économique telle qu'elle
  405. est perçue, est foncièrement différente d'une législation visant
  406. un secteur
  407. particulier de l'emploi ou une certaine procédure de
  408. négociation collective.
  409. Ici, le processus de la négociation collective, il faut le relever,
  410. couvre la
  411. totalité des mesures mises à la disposition des intéressés, y
  412. compris, il est
  413. important de le souligner, tout accès donné à un système
  414. d'arbitrage
  415. indépendant.
  416. 21. On s'efforcera, dans la section suivante, d'aider le comité
  417. par des
  418. indications formulées compte tenu de ces distinctions
  419. analytiques.
  420. III. Cas de l'Alberta: no 1247
  421. A. Introduction
  422. 22. Dans ce cas, le Congrès du travail du Canada (CTC) a
  423. présenté, dans une
  424. communication en date du 1er novembre 1983, une plainte
  425. pour violations des
  426. droits syndicaux. Cette plainte était présentée au nom du
  427. Syndicat des
  428. salariés provinciaux de l'Alberta (AUPE), qui fait partie du
  429. Syndicat national
  430. du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE),
  431. deuxième affilié du CTC
  432. par ordre d'importance. Le gouvernement a transmis ses
  433. observations dans une
  434. communication en date du 3 mai 1984.
  435. B. Problèmes en cause
  436. 23. Dans sa lettre du 1er novembre 1983, le CTC a allégué
  437. que de nouvelles
  438. dispositions législatives de l'Alberta étaient contraires aux
  439. conventions nos
  440. 87, 98 et 151. Le 1er juin 1983, une loi portant modification de
  441. divers textes
  442. de la législation du travail (la loi modifiant la réglementation du
  443. travail,
  444. connue sous le nom de loi no 44) avait été proclamée. Selon
  445. le CTC, la loi no
  446. 44 visait à porter atteinte en particulier aux travailleurs du
  447. secteur public
  448. de l'Alberta. L'un des amendements refusait le droit de grève à
  449. des milliers
  450. d'agents publics, notamment aux travailleurs hospitaliers, et un
  451. autre
  452. enlevait toute impartialité au système d'arbitrage qui avait été
  453. conçu pour
  454. octroyer aux travailleurs du secteur public une compensation
  455. pour la perte de
  456. leur droit de grève.
  457. i) Exclusion de certains salariés des négociations collectives
  458. 24. L'organisation plaignante a mentionné expressément le
  459. nouvel article 21
  460. 1) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
  461. publique, qui
  462. a la teneur suivante:
  463. Les personnes occupées par un employeur dans une position
  464. classée aux termes
  465. de la loi sur la fonction publique en tant que fonctionnaires
  466. chargés du
  467. budget, analystes de systèmes, contrôleurs aux comptes,
  468. juges chargés
  469. d'appliquer la loi sur les condamnations sommaires ou les
  470. personnes
  471. accomplissant pour le compte d'un employeur des tâches qui,
  472. pour l'essentiel,
  473. sont semblables à celles d'une personne occupant l'une de
  474. ces positions, (et)
  475. dans un des organes suivants: bureau de l'assemblée
  476. législative, bureau du
  477. contrôleur général aux comptes, bureau du responsable
  478. supérieur des affaires
  479. électorales ou bureau du conciliateur ("ombudsman"), ou
  480. celles qui, de l'avis
  481. du Conseil des relations professionnelles dans la fonction
  482. publique, ne
  483. devraient pas être incluses dans une unité de négociation
  484. collective en raison
  485. des charges ou des responsabilités qu'elles ont vis-à-vis de
  486. leur employeur,
  487. ou pour toute autre raison, ne pourront pas faire partie d'une
  488. unité de
  489. négociation ou de toute autre unité à des fins de négociation
  490. collective.
  491. Selon l'organisation plaignante, cet amendement avait infirmé
  492. une série de
  493. décisions du Conseil des relations professionnelles dans la
  494. fonction publique,
  495. dont l'une, que le gouvernement avait essayé en vain de faire
  496. annuler par les
  497. tribunaux, déclarait que le gouvernement n'était pas en droit
  498. d'exclure
  499. certains groupes de salariés du droit de négocier
  500. collectivement et d'être
  501. représentés par un syndicat.
  502. 25. Sur ce point, le gouvernement a expliqué, dans sa
  503. communication du 3
  504. mai 1984, que les amendements législatifs concernant l'article
  505. 21, alinéas g)
  506. et h), de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
  507. publique
  508. ne représentaient pas un changement important des
  509. dispositions initiales
  510. contenues dans ces alinéas; l'exclusion des salariés exerçant
  511. des fonctions d
  512. direction ou des fonctions confidentielles, de ceux qui
  513. interviennent dans la
  514. mise en oeuvre des programmes de politique du personnel, ou
  515. qui sont impliqués
  516. dans la fonction de négociation collective ou qui interviennent
  517. dans le
  518. fonctionnement du système de contrôle financier de l'Etat, ou
  519. dans les
  520. activités du conciliateur ("ombudsman"), des tribunaux et de
  521. l'assemblée
  522. législative, n'avait pas été modifiée mais avait été précisée
  523. plus avant de
  524. manière à refléter l'évolution constante de la structure des
  525. pouvoirs publics
  526. et de la nature de l'emploi dans ces cas-là.
  527. ii) Système d'arbitrage
  528. 26. L'organisation plaignante a déclaré que les modifications
  529. apportées à
  530. l'article 117.8 de la loi sur les relations professionnelles et à
  531. l'article 55
  532. de la loi sur la fonction publique qui figuraient dans la loi no 44
  533. démontraient le peu de confiance qu'avait le gouvernement
  534. dans l'impartialité
  535. des arbitres qui avaient fixé les salaires et les conditions de
  536. travail de bon
  537. nombre d'agents du secteur public de l'Alberta les mois
  538. précédents. Selon
  539. l'organisation plaignante, au lieu de soumettre à un réexamen
  540. critique les
  541. thèses soutenues par les représentants gouvernementaux
  542. devant les arbitres et
  543. au lieu d'assumer directement la responsabilité politique d'un
  544. contrôle des
  545. salaires, le gouvernement avait entravé la liberté des arbitres
  546. et imposé un
  547. système informel de contrôle. Les modifications, identiques
  548. pour les deux
  549. textes, ont la teneur suivante:
  550. Afin de garantir que les salaires et les avantages sociaux sont
  551. équitables
  552. et raisonnables tant pour les salariés que pour l'employeur et
  553. répondent à
  554. l'intérêt du public, le Conseil d'arbitrage obligatoire: a)
  555. considérera, pour
  556. la période pendant laquelle sa sentence sera applicable, les
  557. éléments
  558. suivants: les salaires et les avantages sociaux offerts dans les
  559. emplois des
  560. secteurs privé et public qui sont réservés aux membres d'un
  561. syndicat ou qui ne
  562. le sont pas; la continuité et la stabilité de l'emploi dans les
  563. secteurs privé
  564. et public, notamment les niveaux d'emploi, les cas de mise à
  565. pied, les cas de
  566. chômage partiel et les possibilités d'emploi; toute politique
  567. fiscale de
  568. l'Etat qui peut être, de temps en temps, annoncée par le
  569. Trésorier provincial
  570. aux fins de cette loi; b) pourra considérer, pour la période
  571. pendant laquelle
  572. la sentence sera applicable, les éléments suivants: les
  573. conditions d'emploi
  574. dans des professions semblables exercées ailleurs que chez
  575. l'employeur, tout
  576. en prenant en considération n'importe quelle variation
  577. géographique,
  578. industrielle ou autre qu'il estime pertinente; la nécessité de
  579. maintenir des
  580. rapports appropriés, sur le plan des conditions d'emploi, entre
  581. les différents
  582. niveaux de classification au sein d'une profession et entre les
  583. différentes
  584. professions exercées dans le cadre des activités de
  585. l'employeur; la nécessité
  586. d'établir des conditions d'emploi équitables et raisonnables par
  587. rapport aux
  588. qualifications exigées, au travail accompli, aux responsabilités
  589. assumées et à
  590. la nature des services rendus; tout autre facteur qu'il estime
  591. pertinent dans
  592. le domaine faisant l'objet du conflit.
  593. 27. Selon l'organisation plaignante, la disposition ci-dessus
  594. exigeait de
  595. l'arbitre qu'il tienne compte de la politique fiscale du
  596. gouvernement et,
  597. partant, était une tentative d'imposer un système de
  598. modération salariale
  599. informelle. L'organisation plaignante a rappelé que, dans bien
  600. des cas ayant
  601. trait aux droits des salariés dans la fonction publique et dans
  602. les services
  603. essentiels, où le droit de grève a été supprimé et remplacé par
  604. un système
  605. d'arbitrage, le Comité de la liberté syndicale avait souligné
  606. l'importance
  607. attachée à l'impartialité. Elle a affirmé qu'il était déshonorant
  608. pour le
  609. gouvernement de supprimer le droit de grève dans ce secteur,
  610. puis d'imposer un
  611. système d'arbitrage obligatoire dont était exclu même un
  612. semblant
  613. d'impartialité.
  614. 28. A l'allégation selon laquelle l'article 117.8 de la loi sur les
  615. relations professionnelles et l'article 55 de la loi sur les relations
  616. professionnelles dans la fonction publique restreignaient de
  617. façon
  618. déraisonnable le pouvoir discrétionnaire des conseils
  619. d'arbitrage et, ce
  620. faisant, aboutissaient à une forme déguisée de contrôle des
  621. salaires, le
  622. gouvernement a répondu que les modifications concernant la
  623. nature des facteurs
  624. devant être considérés par un conseil n'imposaient pas,
  625. contrairement aux
  626. allégations, de restrictions. Les critères jugés pertinents dans la
  627. prise de
  628. décisions étaient simplement énumérés et comprenaient les
  629. salaires et les
  630. avantages sociaux accordés ailleurs sur le marché provincial
  631. de l'emploi ainsi
  632. que les politiques fiscales du gouvernement. Le gouvernement
  633. a déclaré que le
  634. texte législatif ne précisait pas comment la prise en compte de
  635. ces facteurs
  636. devait intervenir dans le processus de prise des décisions. La
  637. pertinence
  638. mouvante des critères dans le temps était reconnue dans la
  639. mesure où le
  640. conseil pouvait prendre en compte "tout autre facteur" et lui
  641. accorder
  642. l'importance relative qu'il estimait appropriée. Le résultat global
  643. de tous
  644. les facteurs énumérés était d'accorder au conseil le droit de
  645. décider sans
  646. entrave du taux de pondération qu'il accorderait à tel ou tel
  647. critère
  648. particulier. Selon le gouvernement, la liste des facteurs avait
  649. un caractère
  650. indicatif plus que constitutif.
  651. iii) Autres questions
  652. 29. L'organisation plaignante a allégué en outre que bon
  653. nombre des
  654. modifications que comportait la loi no 44 étaient conçues pour
  655. saper le
  656. pouvoir de négocier des syndicats et, partant, pour entraver la
  657. négociation
  658. collective librement menée. Elle a cité en particulier l'article 74
  659. 1) de la
  660. loi sur les relations professionnelles, selon lequel les syndicats
  661. étaient
  662. tenus de désigner exclusivement des personnes résidant dans
  663. l'Alberta en tant
  664. que détenteurs du pouvoir de négocier collectivement, de
  665. conclure et de signer
  666. une convention collective. Cet article a la teneur suivante:
  667. Dès qu'un employeur, une organisation d'employeurs, un
  668. syndicat ou une
  669. organisation syndicale a envoyé ou reçu une sommation
  670. d'entamer une
  671. négociation collective, l'employeur ou l'organisation syndicale
  672. désignera une
  673. personne résidant dans l'Alberta et la dotera du pouvoir de
  674. négocier
  675. collectivement, de conclure et de signer une convention
  676. collective en son nom.
  677. Selon l'organisation plaignante, cette exigence entraverait
  678. gravement le
  679. fonctionnement des petits syndicats locaux qui, pour conduire
  680. les négociations
  681. collectives, comptaient sur le concours de spécialistes
  682. étrangers à la
  683. province mais associés aux fédérations nationales ou
  684. internationales.
  685. 30. En réponse à cette allégation, le gouvernement a fait
  686. observer que
  687. l'article 74 de la loi sur les relations professionnelles avait été
  688. modifié
  689. pour faire obligation aux parties à la négociation collective de
  690. "désigner une
  691. personne résidant dans l'Alberta". Le gouvernement a expliqué
  692. que, lorsque les
  693. sections syndicales locales faisaient partie d'une organisation
  694. syndicale
  695. nationale, il avait été difficile dans le passé d'avoir accès à
  696. une personne
  697. dotée du pouvoir de signer et de conclure une convention
  698. collective. Aux
  699. termes des modifications apportées à l'article 74, un petit
  700. syndicat local
  701. pouvait encore recourir à des agents spécialisés extérieurs à la
  702. province et
  703. associés à un réseau national ou international dans le cadre
  704. du comité de
  705. négociation et en faire ses principaux porte-parole, mais une
  706. personne
  707. résidant dans la province devait être dotée du pouvoir requis
  708. afin de
  709. faciliter la conduite de la négociation, notamment la conclusion
  710. d'une
  711. convention collective.
  712. 31. L'organisation plaignante s'est référée à l'article 87 de la
  713. loi sur
  714. les relations professionnelles qui prévoyait qu'un différend ne
  715. pouvait donner
  716. lieu qu'à un seul scrutin sur le déclenchement d'une grève ou
  717. d'un lock-out.
  718. Cet article a la teneur suivante:
  719. Pendant la période de négociation, un agent de négociation
  720. ou une
  721. organisation d'employeurs peut demander au conseil de
  722. surveiller un scrutin
  723. sur le déclenchement d'une grève ou d'un lock-out. Il ne peut
  724. y avoir qu'un
  725. seul vote concernant une grève ou un lock-out pour un
  726. différend déterminé.
  727. Selon l'organisation plaignante, cette disposition empêche les
  728. syndicats et
  729. les associations d'employeurs d'interroger leurs membres dans
  730. diverses
  731. circonstances sur l'opportunité de déclencher une grève ou un
  732. lock-out; le
  733. vote sur une grève ou sur un lock-out ne deviendrait plus
  734. qu'une simple
  735. formalité observée au début de la négociation collective.
  736. L'organisation
  737. plaignante a déclaré qu'il n'y avait aucune bonne raison
  738. d'empêcher les
  739. membres d'une unité de négociation de changer d'idée quant
  740. à l'opportunité de
  741. déclarer une grève à mesure que la situation évolue.
  742. 32. Pour ce qui est de l'article 87 de la loi sur les relations
  743. professionnelles, le gouvernement a déclaré qu'une grève ou
  744. un lock-out était
  745. le début d'une épreuve de force économique et qu'en
  746. conséquence de tels votes
  747. étaient effectués sous la surveillance du Conseil des relations
  748. professionnelles de l'Alberta. Les modifications apportées à
  749. l'article 87
  750. n'empêchaient pas un syndicat d'organiser son propre scrutin
  751. ni de se
  752. renseigner auprès de ses membres sur l'opportunité d'une
  753. grève dans un
  754. ensemble de circonstances données. Un tel vote, organisé par
  755. le syndicat,
  756. relevait de l'administration interne du syndicat et, en
  757. conséquence, la
  758. disposition législative considérée n'affectait pas un vote privé,
  759. organisé au
  760. sein du syndicat. Le gouvernement a expliqué qu'un tel vote
  761. ou un tel sondage
  762. des opinions ne saurait se substituer à un scrutin organisé
  763. sous la
  764. surveillance du Conseil des relations professionnelles - qui est
  765. indispensable
  766. pour qu'une grève soit licite. De plus, a poursuivi le
  767. gouvernement, si la
  768. décision d'entamer une grève ou de déclarer le lock-out
  769. l'emportait dans ce
  770. scrutin, cela signifiait que l'une ou l'autre des parties avait
  771. choisi l'arène
  772. économique pour résoudre le différend. Cette disposition
  773. législative reflétait
  774. l'idée selon laquelle les membres ont le droit de décréter une
  775. grève, mais ne
  776. devraient le faire que lorsque celle-ci semble être le seul
  777. moyen de résoudre
  778. le différend. L'autre possibilité serait d'ouvrir la porte à une
  779. série de
  780. votes sur l'opportunité d'une grève.
  781. 33. Selon l'organisation plaignante, l'article 102.2 2) de la loi
  782. sur les
  783. relations professionnelles, dans sa teneur modifiée par la loi no
  784. 44,
  785. conférait au ministre du Travail le droit d'exiger des membres
  786. d'une unité de
  787. négociation visée par les recommandations d'une commission
  788. d'enquête chargée
  789. d'un conflit du travail qu'ils mettent au vote l'acceptation ou le
  790. rejet
  791. desdites recommandations. Cet article a la teneur suivante:
  792. Si une partie à un différend ne fait pas parvenir au Conseil
  793. (des relations
  794. professionnelles) son acceptation des recommandations du
  795. ministre soumises par
  796. une commission d'enquête chargée du conflit du travail dans
  797. les dix jours qui
  798. suivent la date à laquelle elle a reçu le texte desdites
  799. recommandations ...,
  800. le Conseil des relations professionnelles] surveillera le
  801. déroulement d'un
  802. vote sur l'acceptation ou le rejet desdites recommandations
  803. par les salariés
  804. ou par les employeurs concernés par le différend et
  805. représentés par la partie
  806. en question. Selon l'organisation plaignante, ce pouvoir
  807. constituait une
  808. ingérence indue dans les affaires intérieures d'un syndicat qui
  809. avait le droit
  810. et l'obligation de sonder l'opinion de ses propres membres sur
  811. l'admissibilité
  812. d'une proposition de règlement déterminée; l'organisation
  813. plaignante a estimé
  814. que les activités relevant du domaine des relations
  815. professionnelles devraient
  816. être du ressort des parties et non pas de celui du ministre du
  817. Travail.
  818. 34. Pour ce qui est de l'article 102.2 2), le gouvernement a
  819. déclaré que
  820. les modifications apportées à cet article avaient été inspirées
  821. par des
  822. situations qui s'étaient présentées récemment et dans
  823. lesquelles un syndicat
  824. avait refusé de régler un différend, malgré le voeu de la
  825. majorité des
  826. salariés de l'unité qui voulaient que le différend fût résolu à
  827. certaines
  828. conditions. Selon le gouvernement, cette disposition législative
  829. garantissait
  830. que les voeux de la majorité des salariés de l'unité pussent
  831. s'exprimer au
  832. sujet de l'acceptation d'une sentence du conseil.
  833. 35. L'organisation plaignante a allégué que les articles 105 et
  834. 106 de la
  835. loi sur les relations professionnelles créaient un délit nouveau
  836. et dangereux
  837. en interdisant aux personnes qui agissent au nom de syndicats
  838. ou d'employeurs
  839. de menacer de grève ou de lock-out dans des circonstances
  840. où une telle action
  841. ne serait pas autorisée aux termes de la loi. Ces articles ont la
  842. teneur
  843. suivante:
  844. Article 105 3). Nul salarié, agent négociateur ou personne
  845. agissant au nom
  846. de l'agent négociateur ne menacera de participer à une grève
  847. ou de provoquer
  848. une grève à moins que la grève ne soit autorisée par la loi.
  849. Article 106 3). Aucun employeur ne menacera de décréter un
  850. lock-out, à moins
  851. que le lock-out ne soit autorisé par la loi. L'organisation
  852. plaignante a fait
  853. observer que la question de l'illégalité d'une grève ou d'un
  854. lock-out était
  855. complexe et que les parties ne devraient pas en conséquence
  856. se voir interdire
  857. de parler de cette action. L'organisation plaignante s'est
  858. demandée s'il était
  859. dans l'intention du gouvernement de sanctionner, en vertu de
  860. l'article 105 1),
  861. les salariés qui refuseraient, par exemple, d'accomplir un travail
  862. qu'ils
  863. estimeraient non conforme aux normes de sécurité.
  864. 36. Pour ce qui est de l'inclusion de "menaces" de grève ou
  865. de lock-out
  866. dans le texte des articles 105 et 106 de la loi sur les relations
  867. professionnelles, le gouvernement a déclaré qu'une grève ou
  868. un lock-out
  869. n'était pas autorisé lorsqu'il n'avait pas été satisfait aux
  870. conditions
  871. préalables, telles qu'elles ressortent de la loi. Néanmoins, si
  872. une grève ou
  873. un lock-out, avec sa suite de conséquences graves pour les
  874. salariés et les
  875. employeurs, ne pouvait avoir lieu que lorsque certaines
  876. conditions avaient été
  877. remplies, alors ni le syndicat, ni les salariés, ni les personnes
  878. agissant au
  879. nom du syndicat, ni l'employeur ne devraient pouvoir menacer
  880. de recourir à un
  881. acte illégal pour atteindre d'autres objectifs, par exemple,
  882. menacer d'entamer
  883. une grève pour imposer une modification d'une convention
  884. collective pendant sa
  885. durée d'application contre le gré de l'autre partie. De toute
  886. façon, le
  887. gouvernement a fait observer que ces dispositions faisaient
  888. l'objet d'un
  889. réexamen, essentiellement à cause de difficultés qui existaient
  890. du point de
  891. vue de la preuve. Le gouvernement a ajouté que cet article ne
  892. visait pas à
  893. sanctionner les travailleurs refusant d'accomplir des tâches
  894. dans des
  895. conditions qu'ils estimaient être non conformes aux normes de
  896. sécurité. Les
  897. questions relatives au travail non conforme aux normes de
  898. sécurité étaient
  899. traitées intégralement dans les textes législatifs relatifs à la
  900. sécurité et à
  901. l'hygiène. D'après le gouvernement, l'élément essentiel d'une
  902. grève était
  903. qu'elle est un refus concerté opposé par deux salariés ou plus
  904. en vue de
  905. contraindre un employeur à accepter certaines conditions
  906. d'emploi; le Conseil
  907. des relations professionnelles n'avait jamais interprété la
  908. définition d'une
  909. grève comme englobant un refus de travailler lorsque les
  910. conditions ne sont
  911. pas conformes aux normes de sécurité.
  912. 37. L'organisation plaignante a allégué que plusieurs
  913. dispositions de la loi
  914. no 44 étaient conçues pour aggraver les difficultés auxquelles
  915. sont confrontés
  916. les syndicats désireux d'obtenir et de conserver l'accréditation
  917. leur donnant
  918. le droit de représenter les travailleurs dans les négociations
  919. collectives.
  920. Elle s'est référée, en particulier, à l'article 49 1) de la loi sur les
  921. relations professionnelles qui a la teneur suivante:
  922. Nonobstant toute disposition contraire figurant dans la
  923. présente loi, en cas
  924. de refus par le conseil ou de retrait par le demandeur d'une
  925. accréditation en
  926. qualité d'agent négociateur, ou en cas de déclaration de
  927. non-renouvellement de
  928. l'accréditation d'un agent négociateur ou de refus
  929. d'enregistrement d'une
  930. organisation d'employeurs ou de l'annulation de
  931. l'enregistrement d'une
  932. organisation d'employeurs, le demandeur ne pourra, sans
  933. l'agrément du conseil,
  934. présenter une nouvelle demande identique ou semblable pour
  935. l'essentiel à la
  936. précédente qu'à l'expiration d'un délai de 90 jours à compter
  937. de la date du
  938. retrait de la demande ou du refus. Selon l'organisation
  939. plaignante, cet
  940. article empêcherait les syndicats de retirer leur demande
  941. d'accréditation
  942. lorsqu'ils se rendent compte qu'ils n'ont pas un appui
  943. majoritaire, puis de la
  944. présenter à nouveau une fois la majorité obtenue. Le seul effet
  945. de cette
  946. modification serait de rendre les campagnes de recrutement
  947. plus difficiles et,
  948. en conséquence, plus coûteuses.
  949. 38. Le gouvernement a expliqué que les modifications
  950. apportées à l'article
  951. 49 de la loi sur les relations professionnelles exigeaient du
  952. requérant
  953. demandant une accréditation qu'il obtienne l'autorisation du
  954. conseil s'il
  955. désirait renouveler sa requête avant l'expiration d'un délai de
  956. 90 jours à
  957. partir de la date à laquelle une requête précédente avait été
  958. retirée ou
  959. rejetée. Il a déclaré que ces modifications avaient été édictées
  960. à cause des
  961. incidences administratives que la réitération de requêtes sans
  962. résultat
  963. pouvait avoir sur l'employeur, sur les salariés et sur le Conseil
  964. des
  965. relations professionnelles lui-même.
  966. 39. L'organisation plaignante s'est référée également à
  967. l'article 132 de la
  968. loi sur les relations professionnelles qui traitait des questions
  969. d'accréditation à la suite de la vente ou de la cession d'une
  970. affaire.
  971. L'organisation plaignante a déclaré qu'avant cette modification
  972. une
  973. accréditation syndicale conservait toute sa validité nonobstant
  974. la vente ou la
  975. cession de l'affaire de l'employeur - et que la précédente
  976. situation visait à
  977. empêcher l'employeur de vendre ou de transférer son affaire à
  978. une personne qui
  979. lui est alliée afin de se défaire d'un syndicat accrédité. Selon
  980. l'organisation plaignante, la nouvelle situation (dans laquelle le
  981. Conseil des
  982. relations du travail peut, sur demande de l'employeur, du
  983. syndicat ou de toute
  984. personne concernée, déterminer quels droits, privilèges ou
  985. obligations ont été
  986. acquis ou retenus) accordait la possibilité aux employeurs
  987. devenus successeurs
  988. de contrecarrer les voeux des salariés qui pourraient souhaiter
  989. continuer
  990. d'être représentés aux fins de la négociation collective par
  991. leurs agents de
  992. négociation précédemment accrédités.
  993. 40. En ce qui concerne les modifications apportées à l'article
  994. 132, le
  995. gouvernement a déclaré qu'elles étaient conçues pour éviter
  996. des résultats
  997. incongrus. Avant l'adoption de ces changements, lorsque le
  998. Conseil des
  999. relations professionnelles concluait qu'il y avait eu vente,
  1000. concession ou
  1001. transfert d'une affaire ou d'une partie d'une affaire, l'acquéreur
  1002. était
  1003. automatiquement lié par l'accréditation et par la convention
  1004. collective
  1005. auxquelles le vendeur avait souscrit. Le gouvernement a
  1006. déclaré que la
  1007. modification visait toujours le même résultat; néanmoins, si une
  1008. question
  1009. était soulevée au titre de cet article, le Conseil des relations
  1010. professionnelles aurait la possibilité de déclarer que les
  1011. accréditations, les
  1012. conventions collectives ou les procédures liaient l'acquéreur
  1013. alors que,
  1014. précédemment, il en avait l'obligation. La nouvelle disposition
  1015. accordait au
  1016. Conseil des relations professionnelles la possibilité de résoudre
  1017. des conflits
  1018. en lui permettant de modifier l'accréditation ou la convention
  1019. collective en
  1020. cause, voire de la révoquer. Le gouvernement a souligné que
  1021. le pouvoir accordé
  1022. au conseil n'était que facultatif et ne pouvait être employé que
  1023. pour résoudre
  1024. les conflits.
  1025. 41. L'organisation plaignante a allégué, en outre, que le
  1026. nouvel article 1
  1027. w.1) de la loi modifiant les statuts du travail, en instaurant la
  1028. notion
  1029. d'"organisation syndicale", allait créer une situation dans
  1030. laquelle
  1031. l'organisation nationale ou provinciale qui avait le pouvoir de
  1032. négocier au
  1033. nom des syndicats locaux serait passible des peines prévues
  1034. dans la loi pour
  1035. les syndicats. Le gouvernement a fait observer que les
  1036. modifications qu'il
  1037. avait été proposé d'apporter à l'article 1 w.1) n'avaient jamais
  1038. été adoptées
  1039. et qu'elles ne faisaient pas partie de la loi sur les relations
  1040. professionnelles.
  1041. 42. Enfin, l'organisation plaignante s'est référée à l'article
  1042. 117.94 de la
  1043. loi sur les relations professionnelles - identique au nouvel
  1044. article 92.2 de
  1045. la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique
  1046. - comme
  1047. étant l'exemple le plus grave de législation antisyndicale
  1048. contenu dans la loi
  1049. no 44. Selon l'organisation plaignante, le but de cet article était
  1050. clairement
  1051. de paralyser financièrement le syndicat si ses membres
  1052. faisaient grève. Cet
  1053. article a la teneur suivante:
  1054. 1) En cas de grève de salariés couverts par la présente
  1055. section (à savoir
  1056. les salariés du secteur public qui ne jouissent pas du droit de
  1057. grève),
  1058. l'employeur, nonobstant toute convention collective ou toute
  1059. autre disposition
  1060. de la présente loi, pourra prévenir l'agent négociateur
  1061. représentant ces
  1062. salariés de son intention de suspendre la retenue à la source
  1063. ou le versement
  1064. des cotisations syndicales, des cotisations spéciales ou autres
  1065. droits qu'un
  1066. salarié doit payer à l'agent négociateur.
  1067. 2) Un tel préavis d'intention devra indiquer quelle est l'unité
  1068. de
  1069. négociation ou la partie d'unité de négociation pour laquelle
  1070. l'employeur a
  1071. l'intention de suspendre la retenue à la source ou le versement
  1072. des
  1073. cotisations syndicales ou autres droits et la durée de cette
  1074. suspension qui
  1075. doit être comprise entre un et six mois.
  1076. 3) Un agent négociateur affecté par ce préavis peut saisir le
  1077. conseil dans
  1078. les 72 heures ouvrables ... pour déterminer si une grève a été
  1079. déclenchée ou
  1080. non.
  1081. 43. En ce qui concerne l'article 117.94 de la loi sur les
  1082. relations
  1083. professionnelles et l'article 92.2 de la loi sur les relations
  1084. professionnelles dans la fonction publique, dans leur teneur
  1085. modifiée par la
  1086. loi no 44, le gouvernement a déclaré que, tant que le syndicat
  1087. n'avait pas
  1088. commis d'acte illégal, le versement des cotisations syndicales
  1089. se poursuivait.
  1090. Il a ajouté que, si l'employeur notifiait au syndicat que les
  1091. cotisations
  1092. syndicales seraient retenues, le syndicat avait la possibilité
  1093. d'engager un
  1094. recours rapide et peu coûteux devant le conseil quasi
  1095. judidiciaire compétent.
  1096. Celui-ci déciderait si les retenues à la source ou les
  1097. versements devaient
  1098. être interrompus en statuant sur la légalité ou non de
  1099. l'interruption par le
  1100. syndicat des activités de l'employeur. Il existait des voies de
  1101. recours
  1102. adéquates et appropriées pour protéger les intérêts de toutes
  1103. les parties.
  1104. 44. Pour ce qui est de la suppression du droit de grève des
  1105. travailleurs du
  1106. secteur hospitalier contenue à l'article 117.1 de la loi sur les
  1107. relations
  1108. professionnelles, l'organisation plaignante a allégué que tous
  1109. les
  1110. travailleurs, y compris les aides cuisinières, les nettoyeurs, les
  1111. jardiniers,
  1112. les infirmières, les techniciens et les employés sont couverts
  1113. par cet
  1114. article.
  1115. 45. Le gouvernement a exposé sa position concernant les
  1116. normes
  1117. internationales pertinentes en la matière et a précisé qu'à son
  1118. avis le droit
  1119. d'association était protégé, mais que des objectifs syndicaux
  1120. spécifiques et
  1121. des mécanismes déterminés de règlement des différends ne
  1122. l'étaient pas. Il a
  1123. fait observer que le caractère évolutif des relations
  1124. professionnelles
  1125. empêchait de s'engager à respecter une méthode universelle
  1126. et unique de
  1127. réglement des différends. Les objectifs de la syndicalisation,
  1128. dans le cadre
  1129. des relations professionnelles, à savoir, surtout, la protection
  1130. des intérêts
  1131. des travailleurs, pouvaient être et étaient atteints sans recours
  1132. au mécanisme
  1133. de la grève. D'après le gouvernement, la négociation
  1134. collective dans le
  1135. secteur public devait être abordée dans le cadre élargi du
  1136. processus de
  1137. gouvernement lui-même dont elle n'était qu'une composante.
  1138. Pour que le système
  1139. de négociation collective soit compatible avec le processus de
  1140. gouvernement,
  1141. il fallait que ceux qui le conçoivent tiennent compte d'un
  1142. certain nombre de
  1143. caractéristiques extrêmement importantes de ce dernier. Or,
  1144. dans le processus
  1145. de gouvernement canadien, on prenait les décisions par voie
  1146. de compromis et en
  1147. réponse aux pressions exercées; les groupes d'intérêt qui
  1148. pesaient sur la
  1149. répartition des ressources rares agissaient dans le cadre d'un
  1150. processus
  1151. politique et devaient en conséquence être assujettis aux
  1152. contraintes qui sont
  1153. normalement associées à une telle participation; pour maintenir
  1154. l'équilibre
  1155. essentiel et délicat dans le cadre de ce processus, tout
  1156. particulièrement en
  1157. ce qui concerne la prise de décisions administratives
  1158. essentielles, en dehors
  1159. de la révision et de l'évaluation normales associées aux
  1160. élections, on ne
  1161. pouvait admettre qu'un groupe d'intérêts puisse
  1162. unilatéralement placer les
  1163. autres parties dans une situation défavorable. Le
  1164. gouvernement a également
  1165. souligné que, si les salariés de la fonction publique se
  1166. trouvaient bien
  1167. souvent et à plusieurs égards, de par la nature de leurs
  1168. activités, dans une
  1169. situation qui n'était semblable à aucun autre travail, il n'en
  1170. restait pas
  1171. moins, en contrepartie, que la situation de leur employeur était
  1172. elle aussi
  1173. exceptionnelle, puisque le gouvernement voyait son action
  1174. continuellement
  1175. soumise à une évaluation critique minutieuse. Enfin, a déclaré
  1176. le
  1177. gouvernement, le fait de conserver au personnel des services
  1178. de santé le droit
  1179. de refuser de travailler reviendrait à lui accorder un avantage
  1180. et une
  1181. priorité inacceptables par rapport aux autres personnes dont
  1182. les besoins
  1183. légitimes de soins de santé devaient être satisfaits par le
  1184. système - pour
  1185. lequel il n'y avait pas de solution de remplacement acceptable
  1186. - et, en tant
  1187. que tel, compromettrait le processus de prise des décisions
  1188. concernant la
  1189. prestation de soins médicaux. Des modifications n'avaient été
  1190. apportées à
  1191. cette situation que dans la mesure où une solution autre que le
  1192. refus de
  1193. travailler avait été fournie, et le gouvernement a estimé qu'il y
  1194. avait là un
  1195. compromis réel, grâce auquel les intérêts des salariés
  1196. pourraient être
  1197. convenablement représentés dans une structure qui respectait
  1198. les normes
  1199. internationales.
  1200. C. Informations reçues pendant la mission
  1201. 46. Au cours de la mission, j'ai eu l'occasion de discuter des
  1202. divers
  1203. problèmes que comporte ce cas; premièrement, à Ottawa,
  1204. avec les représentants
  1205. du Congrès du travail du Canada (CTC) et ceux du Syndicat
  1206. national du
  1207. personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE) et,
  1208. deuxièmement, à Edmonton,
  1209. avec les représentants du Syndicat des salariés provinciaux
  1210. de l'Alberta
  1211. (AUPE) et de ses divisions constitutives. Des discussions ont
  1212. également eu
  1213. lieu avec le sous-ministre adjoint du Travail et de hauts
  1214. fonctionnaires du
  1215. gouvernement provincial. Outre les déclarations qui ont été
  1216. faites oralement
  1217. par les parties, une volumineuse documentation m'a été
  1218. communiquée à l'appui
  1219. des arguments présentés.
  1220. 47. Il ressort de toutes ces discussions que les trois grands
  1221. problèmes qui
  1222. préoccupaient les syndicats à la suite de la promulgation de la
  1223. loi no 44, qui
  1224. modifiait à la fois la loi de 1980 sur les relations
  1225. professionnelles dans la
  1226. fonction publique et la loi sur les relations professionnelles,
  1227. étaient la
  1228. réduction des droits de négociation collective des salariés du
  1229. secteur public
  1230. et le fonctionnement des procédures d'arbitrage, les nouvelles
  1231. restrictions
  1232. que la loi no 44 apportait au droit de grève des fonctionnaires
  1233. et l'exclusion
  1234. de certains salariés d'une unité de négociation. Plusieurs
  1235. autres questions,
  1236. qui faisaient aussi partie de la plainte, ont également été
  1237. examinées de façon
  1238. détaillée et seront traitées plus loin.
  1239. a) Négociation collective et arbitrage
  1240. 48. Les syndicats soutenaient que la présentation de la loi
  1241. no 44 tendait
  1242. clairement et délibérément à restreindre encore les droits de
  1243. négociation
  1244. collective du personnel du gouvernement provincial. En outre,
  1245. la loi no 44
  1246. avait eu pour résultat d'ôter toute crédibilité à l'équité et à
  1247. l'impartialité
  1248. du système d'arbitrage, seul mécanisme de règlement des
  1249. conflits dont
  1250. disposait cette catégorie de travailleurs.
  1251. 49. De nombreux renseignements ont été obtenus en ce qui
  1252. concerne la manière
  1253. dont la négociation collective se déroule entre le Syndicat des
  1254. salariés
  1255. provinciaux de l'Alberta, en tant qu'agent négociateur
  1256. accrédité représentant
  1257. 12 catégories distinctes de salariés (environ 38.000
  1258. personnes), et la
  1259. Couronne du chef de l'Alberta, en tant qu'employeur. Aux
  1260. termes de l'article
  1261. 50 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
  1262. publique, en
  1263. cas de conflit, si le Conseil des relations professionnelles dans
  1264. la fonction
  1265. publique est convaincu que les parties au conflit n'ont pas fait
  1266. des efforts
  1267. raisonnables pour conclure une convention collective, ce
  1268. conseil peut demander
  1269. aux parties de poursuivre la négociation collective. L'article 51
  1270. 1) c) de la
  1271. loi autorise le conseil à constituer un conseil d'arbitrage s'il est
  1272. convaincu, non seulement que d'autres points devraient être
  1273. soumis à
  1274. arbitrage, mais aussi que le moment est venu de soumettre la
  1275. question à un
  1276. conseil d'arbitrage.
  1277. 50. A l'époque de la mission, il avait été conclu des
  1278. conventions
  1279. collectives pour huit des douze catégories de l'AUPE; les
  1280. quatre groupes pour
  1281. lesquels l'accord n'avait pas été possible étaient les infirmières,
  1282. le
  1283. personnel des services économiques, les travailleurs sociaux
  1284. et les
  1285. enseignants.
  1286. 51. Le principal négociateur de l'AUPE a expliqué que la loi
  1287. no 44 avait
  1288. été promulguée par suite du mécontentement qu'avaient
  1289. causé au gouvernement
  1290. les sentences rendues en 1983 par 12 conseils d'arbitrage
  1291. distincts. Ces
  1292. arbitrages avaient été précédés d'une décision du Conseil des
  1293. relations
  1294. professionnelles dans la fonction publique selon laquelle les
  1295. salariés
  1296. n'avaient pas négocié de bonne foi. La série actuelle de
  1297. négociations, entamée
  1298. en janvier 1984 pour la période 1984-85, s'était déroulée dans
  1299. un climat
  1300. nouveau, créé par la promulgation de la loi no 44, et les
  1301. salariés avaient
  1302. fait preuve d'agressivité à la table de négociation. L'échec des
  1303. négociations
  1304. a conduit le syndicat à présenter une demande d'arbitrage en
  1305. avril 1984, mais
  1306. cette demande a été rejetée par le conseil. En juillet 1984,
  1307. après l'échec de
  1308. la médiation, le conseil a renvoyé la convention principale, ou
  1309. convention clé
  1310. à l'arbitrage.
  1311. 52. Des éléments de preuve ont également été présentés au
  1312. sujet du processus
  1313. de négociation qui, affirmaient les syndicats, était
  1314. décourageant et faisait
  1315. perdre du temps. Le Conseil des relations professionnelles
  1316. dans la fonction
  1317. publique servait souvent à retarder ou à empêcher la
  1318. soumission des cas à
  1319. l'arbitrage. Dans un cas concernant environ 14.000 agents
  1320. administratifs et
  1321. employés de bureau, les négociations avaient débuté en
  1322. janvier 1984; le
  1323. conseil, à non moins de trois reprises, avait rejeté une
  1324. demande d'arbitrage
  1325. au motif qu'elle était "inopportune et inappropriée". Il s'ensuivit
  1326. une
  1327. requête au tribunal qui, en mars 1985, confirma le pouvoir
  1328. discrétionnaire
  1329. qu'avait le conseil de constituer un conseil d'arbitrage et
  1330. déclara que, dans
  1331. le cas présent, la décision du conseil n'était pas
  1332. "manifestement
  1333. déraisonnable". Ce n'est qu'après 18 mois ou plus que
  1334. l'arbitrage fut obtenu
  1335. et la question de la rétroactivité des majorations salariales a,
  1336. comme l'ont
  1337. souligné les syndicats, dû faire l'objet d'une négociation.
  1338. 53. Plus spécifiquement, en ce qui concerne le processus
  1339. d'arbitrage, les
  1340. syndicats se sont montrés très préoccupés par l'application
  1341. pratique de
  1342. l'article 5.48 2) de la loi sur les relations professionnelles dans
  1343. la
  1344. fonction publique, qui limite le nombre des questions
  1345. susceptibles d'être
  1346. soumises à l'arbitrage. Le Conseil des relations professionnelles
  1347. dans la
  1348. fonction publique est compétent pour décider si une
  1349. réclamation particulière
  1350. fait partie des questions ne relevant pas de l'arbitrage qui sont
  1351. énumérées
  1352. dans cet article. De l'avis des syndicats, cette disposition
  1353. donnait à
  1354. l'employeur le droit unilatéral de fixer les conditions d'emploi. Ils
  1355. ont
  1356. affirmé que toutes les questions couvertes par cette disposition
  1357. devraient
  1358. relever de la négociation et de l'arbitrage puisqu'elles ne
  1359. concernaient pas
  1360. totalement des questions de prérogative de la direction.
  1361. 54. Parmi les exemples de questions qui, en vertu de l'article
  1362. 5.48,
  1363. n'avaient pas été jugées relever de l'arbitrage figuraient le droit
  1364. qu'a
  1365. l'employeur de donner à l'extérieur les travaux de l'unité de
  1366. négociation, les
  1367. questions de durée du travail et de travail par équipes,
  1368. certaines périodes de
  1369. congé et le calcul des heures supplémentaires (art. 48 2a)); les
  1370. questions
  1371. d'évaluation des emplois, l'établissement de définitions des
  1372. tâches, les
  1373. questions d'égalité de rémunération pour un travail de valeur
  1374. égale (article
  1375. 48 2b)); la sélection, le transfert, la promotion, la formation, la
  1376. formation
  1377. effective à la sécurité dans le maniement du matériel, etc.
  1378. (article 48 2c)).
  1379. Dans un cas récent (décembre 1984), le Conseil des relations
  1380. professionnelles
  1381. dans la fonction publique avait décidé que la proposition d'un
  1382. syndicat visant
  1383. à protéger les postes des salariés licenciés en exigeant de
  1384. l'employeur qu'il
  1385. donne préavis des licenciements prévus ne relevait pas de
  1386. l'arbitrage parce
  1387. qu'elle limitait la liberté de décision de l'employeur. En
  1388. conséquence, les
  1389. syndicats ont allégué que ces exemples prouvaient que le
  1390. conseil donnait une
  1391. large interprétation de l'article 48 2) afin de protéger la
  1392. prérogative
  1393. directoriale de l'employeur.
  1394. 55. En outre, les syndicats ont allégué que, même lorsque
  1395. les points
  1396. contestés étaient soumis à l'arbitrage, la liberté de décision des
  1397. arbitres
  1398. était restreinte puisqu'ils étaient tenus de prendre certaines
  1399. questions en
  1400. considération. Ces critères figurent à l'article 55 de la loi et
  1401. obligent, en
  1402. particulier, les arbitres à tenir spécialement compte des
  1403. déclarations de
  1404. politique fiscale du gouvernement. De l'avis du syndicat, ces
  1405. dispositions ont
  1406. été adoptées en 1983, par réaction à la série de sentences
  1407. arbitrales que le
  1408. gouvernement avait critiquées comme étant trop généreuses.
  1409. Des déclarations
  1410. récentes du gouvernement en matière de politique fiscale ont
  1411. été fournies à la
  1412. mission. Selon les syndicats, les arbitres étaient tenus de
  1413. faciliter la
  1414. politique fiscale du gouvernement et, en conséquence, les
  1415. résultats de
  1416. l'arbitrage reflétaient cette politique. En d'autres termes, ce
  1417. contrôle de
  1418. l'élaboration des décisions arbitrales signifiait qu'en fait le
  1419. gouvernement
  1420. obtenait, par la voie législative, des résultats pour lui-même en
  1421. tant
  1422. qu'employeur. Les arbitres étaient ainsi empêchés d'exercer le
  1423. degré
  1424. d'indépendance qui était indispensable pour remplacer, de
  1425. façon satisfaisante
  1426. la négociation collective.
  1427. 56. A cet égard, un certain nombre de sentences arbitrales
  1428. récentes ont été
  1429. fournies à la mission. Il ressort de ces sentences que les
  1430. conseils
  1431. d'arbitrage en cause ont tenu soigneusement compte des
  1432. dispositions de
  1433. l'article 55 a) et b) et ont longuement examiné les rôles
  1434. contradictoires du
  1435. gouvernement chargé de déterminer la politique fiscale de la
  1436. province à
  1437. l'égard des travailleurs et d'agir en tant qu'employeur. Dans
  1438. certains cas, le
  1439. conseil n'a en fait pas jugé nécessaire de tenir compte des
  1440. dispositions
  1441. facultatives qui figurent à l'article 55 b) de la loi. Dans un autre
  1442. cas, au
  1443. mois de mai 1984, le conseil d'arbitrage a déclaré que les
  1444. orientations de
  1445. politique budgétaire du gouvernement n'étaient pas utiles
  1446. puisque, entre
  1447. autres choses, elles ne prescrivaient pas expressément le
  1448. montant exact de
  1449. l'augmentation à accorder.
  1450. b) Salariés exclus
  1451. 57. La mission a également entendu des témoignages
  1452. concernant l'exclusion,
  1453. en vertu de l'article 21 1) de la loi, de certaines catégories de
  1454. salariés
  1455. d'une unité de négociation à des fins de négociation
  1456. collective. Les récentes
  1457. modifications introduites par la loi no 44 avaient élargi la
  1458. gamme des
  1459. personnes auxquelles était dénié le droit d'entamer des
  1460. négociations
  1461. collectives. Certaines de ces catégories bénéficiaient
  1462. auparavant de ce droit.
  1463. Il convient de rappeler que l'article 21 dispose, en substance,
  1464. que les
  1465. personnes occupées, qui ont ou exercent des responsabilités
  1466. ou des fonctions
  1467. de direction ou qui s'occupent avant tout de l'administration
  1468. des politiques
  1469. ou des programmes en matière de personnel, ne pourront pas
  1470. faire partie d'une
  1471. unité de négociation.
  1472. 58. De l'avis des syndicats, l'exclusion de ces salariés n'était
  1473. pas
  1474. justifiée et la modification introduite par la loi no 44 avait privé
  1475. du droit
  1476. de négocier collectivement un certain nombre de groupes de
  1477. salariés auxquels
  1478. le Conseil des relations professionnelles dans la fonction
  1479. publique avait
  1480. octroyé ce droit dans le cadre de la loi précédente. Le
  1481. gouvernement s'est
  1482. servi de son pouvoir de propositions législatives pour réformer
  1483. une série de
  1484. décisions du conseil. Par exemple, le conseil avait statué,
  1485. dans un cas, que
  1486. les salariés des programmes d'hygiène et de sécurité du travail
  1487. et des
  1488. programmes et activités de développement administratif se
  1489. situaient en dehors
  1490. des "politiques ou programmes de personnel" définis à l'article
  1491. 21 1) b) de la
  1492. loi. Dans sa décision, le conseil avait déclaré que le terme
  1493. "personnel", au
  1494. sens de cet article, couvrait les politiques ou programmes
  1495. concernant le
  1496. recrutement des candidats, l'embauchage, la nomination et la
  1497. promotion des
  1498. salariés ou la classification, l'évaluation, la discipline ou le
  1499. renvoi des
  1500. salariés. Les syndicats ont présenté d'autres exemples de cas
  1501. dans lesquels
  1502. les modifications apportées par la loi no 44 déniaient le droit de
  1503. faire
  1504. partie d'une unité de négociation à des groupes de travailleurs
  1505. ou à certains
  1506. fonctionnaires auxquels ce droit avait été reconnu par le
  1507. conseil. Selon les
  1508. syndicats, le droit de négocier collectivement avait été refusé
  1509. à plus de 400
  1510. personnes par les modifications apportées à l'article 21.
  1511. c) Le droit de grève
  1512. 59. La mission a également entendu des déclarations des
  1513. syndicats relatives
  1514. au refus général du droit de grève que l'article 93 de la loi sur
  1515. les
  1516. relations professionnelles dans la fonction publique imposait
  1517. aux salariés
  1518. concernés par cette loi. Selon les syndicats, le gouvernement
  1519. s'était efforcé
  1520. de justifier ce refus en déclarant que, bien que tous les salariés
  1521. concernés
  1522. ne fournissent pas de services essentiels, ils étaient liés si
  1523. étroitement à
  1524. ceux qui les fournissaient qu'il était raisonnable de les traiter de
  1525. la même
  1526. manière; qu'il n'y avait aucun moyen de remplacement de ces
  1527. services; que ces
  1528. salariés étaient en mesure, du fait de leur situation, d'exercer
  1529. une plus
  1530. grande pression sur le gouvernement que d'autres citoyens.
  1531. 60. Les syndicats ont affirmé qu'il n'y avait pas de preuve de
  1532. l'existence
  1533. de liens étroits entre les personnes exerçant des fonctions
  1534. essentielles et
  1535. celles qui n'en exerçaient pas et, ce qui est plus important, que
  1536. le refus de
  1537. travailler opposé par des personnes n'exerçant pas de
  1538. fonctions essentielles
  1539. ne nuirait pas à la fourniture des services essentiels. Il n'y avait
  1540. pas
  1541. davantage de preuve qu'il n'y avait aucun autre moyen de
  1542. remplacement des
  1543. services fournis par les salariés en question. En outre, ont
  1544. déclaré les
  1545. syndicats, le même raisonnement n'avait pas été suivi dans le
  1546. secteur privé,
  1547. dans des cas où on ne disposait d'aucun moyen de
  1548. remplacement pour bien des
  1549. services.
  1550. 61. Lors de réunions avec les représentants du
  1551. gouvernement provincial de
  1552. l'Alberta, les problèmes qui avaient été portés à l'attention du
  1553. BIT et
  1554. discutés avec la mission ont été expliqués en détail. Les
  1555. représentants du
  1556. gouvernement ont déclaré à la mission que le secteur privé
  1557. avait réagi de
  1558. façon constructive au grave ralentissement de l'économie et
  1559. que les
  1560. allégations des syndicats du secteur public, selon lesquelles
  1561. un traitement
  1562. particulièrement défavorable leur aurait été réservé, n'avaient
  1563. été présentées
  1564. que par cette catégorie de travailleurs.
  1565. 62. En ce qui concerne le processus de négociation
  1566. collective, les
  1567. représentants du gouvernement ont expliqué que les deux
  1568. parties disposaient du
  1569. droit de veto sur les questions soumises à l'arbitrage. Les
  1570. questions que le
  1571. Conseil des relations professionnelles avait exclues de la
  1572. convention clé
  1573. conclue avec l'AUPE pour lesquelles l'arbitrage avait été
  1574. demandé concernaient
  1575. exclusivement les droits de la direction. Le gouvernement a
  1576. toutefois admis
  1577. que la définition des droits de la direction était une question
  1578. complexe.
  1579. 63. A cet égard, j'ai suggéré aux représentants du
  1580. gouvernement que le
  1581. Conseil des relations professionnelles, en refusant de
  1582. considérer que
  1583. certaines questions spécifiques pouvaient être soumises à
  1584. arbitrage, arbitrait
  1585. lui-même ces questions. Lorsque l'arbitrage est fondamental
  1586. dans une situation
  1587. où la grève n'a pas été déclenchée, il semble anormal que l'on
  1588. puisse voir le
  1589. conseil, qui est un organe procédural, agir lui-même en qualité
  1590. d'arbitre pour
  1591. certaines questions. Cette façon d'agir ne pouvait que détruire
  1592. la confiance
  1593. des syndicats dans le conseil. J'ai indiqué en outre qu'il
  1594. semblait que
  1595. l'utilisation par le gouvernement de son pouvoir législatif pour
  1596. traiter de la
  1597. négociation collective avait également conduit les syndicats à
  1598. perdre
  1599. confiance dans le système de négociation.
  1600. 64. En ce qui concerne l'arbitrage lui-même, les
  1601. représentants du
  1602. gouvernement ont indiqué que, sur la base de l'expérience
  1603. limitée que le
  1604. gouvernement avait acquise de l'arbitrage des conflits
  1605. d'intérêts, il n'y
  1606. avait eu aucune preuve d'abus de la disposition (art. 55 de la
  1607. loi) qui
  1608. demande aux arbitres de tenir compte de la politique fiscale de
  1609. la province.
  1610. Il n'y avait aucun moyen de savoir qu'elle était l'attention que
  1611. les arbitres
  1612. prêtaient à cet article mais, de toute manière, la politique
  1613. fiscale donnait
  1614. toute latitude aux arbitres. Des exemples de la politique fiscale
  1615. du
  1616. gouvernement ont été donnés à la mission.
  1617. 65. En ce qui concerne les exclusions au titre de l'article 21
  1618. 1) de la loi
  1619. dans sa teneur modifiée, le gouvernement a expliqué que 260
  1620. salariés en tout
  1621. étaient touchés par la modification. Ces salariés s'occupaient
  1622. principalement
  1623. de questions de politique du personnel et une douzaine
  1624. seulement, occupés dans
  1625. le domaine de la sécurité et de l'hygiène, avaient été exclus de
  1626. l'unité de
  1627. négociation.
  1628. 66. En ce qui concerne le déni du droit de grève, j'ai informé
  1629. le
  1630. gouvernement de manière générale que le Comité de la liberté
  1631. syndicale
  1632. exprimerait vraisemblablement quelques préoccupations au
  1633. sujet des
  1634. dispositions de la législation en la matière, à la lumière de sa
  1635. jurisprudence. Les représentants du gouvernement en ont pris
  1636. note et m'ont
  1637. informé que la Cour était actuellement saisie de certaines
  1638. questions
  1639. concernant le droit de grève des salariés du secteur public.
  1640. 67. J'ai également attiré l'attention du gouvernement sur la
  1641. question qui
  1642. préoccupe également les syndicats, de l'absence d'une
  1643. consultation préalable
  1644. des syndicats sur la législation relative à des questions qui les
  1645. touchent,
  1646. eux ou leurs affiliés. En réponse, le représentant du
  1647. gouvernement m'a informé
  1648. que toute omission de la consultation en la matière serait due à
  1649. l'urgence de
  1650. la situation et non à une décision systématique de ne pas
  1651. consulter. Même si
  1652. les questions étaient urgentes, il y aurait des auditions
  1653. publiques au
  1654. Parlement mais, normalement, une loi est le résultat de
  1655. discussions prolongées
  1656. et constructives avec toutes les parties qui seraient touchées.
  1657. d) Autres questions
  1658. 68. Pendant les discussions avec l'AUPE, j'ai été informé
  1659. que, bien que
  1660. cette organisation ait craint de prime abord que le recours à
  1661. des négociateurs
  1662. expérimentés étrangers à la province soit peut-être limité par
  1663. l'article 74
  1664. 1), cette disposition dans sa teneur actuelle ne constituait pas
  1665. un problème.
  1666. Les représentants du gouvernement provincial ont expliqué
  1667. que cette
  1668. disposition avait été introduite uniquement pour résoudre les
  1669. difficultés
  1670. d'ordre pratique qui s'étaient posées dans le passé lorsqu'il
  1671. n'avait pas été
  1672. possible d'entrer en contact avec les négociateurs extérieurs à
  1673. la province
  1674. pendant les négociations ou, au moment même du règlement,
  1675. pour la signature
  1676. d'une convention. Etant donné que l'article 74 ne semblait pas
  1677. poser de graves
  1678. problèmes dans la pratique, j'ai exprimé l'espoir que les parties
  1679. pourraient
  1680. débattre de la question si, à l'avenir, des problèmes se
  1681. posaient à cet égard.
  1682. 69. Il a été expliqué à la mission que l'article 87 de la loi sur
  1683. les
  1684. relations professionnelles (autorisant une seule grève ou un
  1685. seul lock-out
  1686. dans un conflit) avait été introduit par réaction à une grève
  1687. déclenchée en
  1688. 1982 par le personnel infirmier du Banff Mineral Springs
  1689. Hospital pendant
  1690. laquelle l'un des syndicats concernés avait contesté les
  1691. résultats d'un vote
  1692. relatif à la grève. Le gouvernement a également souligné
  1693. qu'aux termes de
  1694. cette disposition les syndicats pouvaient se réunir et discuter
  1695. d'une grève
  1696. éventuelle aussi souvent qu'ils le souhaitaient, mais qu'ils ne
  1697. pouvaient
  1698. demander qu'un seul scrutin sur la grève organisée sous la
  1699. surveillance du
  1700. Conseil des relations professionnelles. Les deux parties sont
  1701. convenues que la
  1702. situation actuelle ne semblait pas poser de problèmes dans la
  1703. pratique.
  1704. 70. Il a été expliqué à la mission, au sujet de l'article 102.2 2)
  1705. (prévoyant un vote de contrôle, par le Conseil des relations
  1706. professionnelles,
  1707. de l'acceptation pour les salariés d'un réglement du conflit),
  1708. que la
  1709. Commission des conflits du travail était une sorte d'organe de
  1710. médiation
  1711. obligatoire, instituée pour examiner des conflits déterminés. Cet
  1712. article
  1713. portait sur la question de savoir si les dirigeants syndicaux
  1714. pouvaient
  1715. accepter ou refuser les sentences arbitrales ou si les membres
  1716. du syndicat, à
  1717. titre individuel, devaient voter à ce propos. Cet article n'avait
  1718. d'ailleurs
  1719. pas encore été utilisé.
  1720. 71. Pendant les discussions avec les représentants
  1721. syndicaux, il a été
  1722. clairement expliqué à la mission que l'article 105 3), faisant un
  1723. délit de la
  1724. simple menace d'une grève illicite, avait eu pour effet
  1725. d'amplifier leurs
  1726. craintes concernant le but véritable de la loi no 44. Ces
  1727. représentants ont
  1728. souligné que le danger que présentait cette disposition était
  1729. accru par le
  1730. fait que la législation avait donné une large définition de la
  1731. grève. D'un
  1732. autre côté, le gouvernement a souligné que de nombreuses
  1733. décisions du Conseil
  1734. des relations professionnelles avaient précisé la définition des
  1735. grèves. Il a
  1736. également fait ressortir que cette disposition découlait du
  1737. principe de la
  1738. négociation collective équitable, en ce sens que la menace
  1739. d'une action
  1740. illicite ne contribuait pas à la solution d'un problème de
  1741. négociation
  1742. particulier ou aux négociations en général. J'ai fait remarquer
  1743. que toute
  1744. "personne agissant au nom de l'agent négociateur" était
  1745. également couverte du
  1746. fait de la large portée de cette disposition. Le gouvernement a
  1747. expliqué que
  1748. l'article 105 3) n'avait pas été utilisé et qu'il appartiendrait au
  1749. Conseil
  1750. des relations professionnelles, lorsqu'il aurait à se prononcer
  1751. sur
  1752. l'application de cette disposition, de mettre en évidence tout
  1753. problème de
  1754. rédaction concernant la position des agents syndicaux.
  1755. 72. En ce qui concerne l'allégation relative à l'article 49 de la
  1756. loi sur
  1757. les relations professionnelles (introduisant un délai de 90 jours
  1758. avant de
  1759. pouvoir disposer d'une autre demande d'accréditation), il a été
  1760. expliqué à la
  1761. mission qu'aux termes de la loi sur les relations professionnelles
  1762. le Conseil
  1763. des relations professionnelles était autorisé à accorder une
  1764. accréditation
  1765. pour la négociation collective dans trois situations:
  1766. premièrement, lorsqu'il
  1767. a la certitude qu'une majorité des salariés d'une unité ont payé
  1768. leur
  1769. cotisation à un syndicat qu'ils ont choisi comme agent
  1770. négociateur;
  1771. deuxièmement, lorsqu'il a la certitude qu'une majorité des
  1772. salariés d'une
  1773. unité de négociation ont demandé à s'affilier au syndicat et ont
  1774. payé une
  1775. cotisation, pas plus de 90 jours avant la date de la demande
  1776. d'accréditation,
  1777. et, troisièmement, après un vote. Avant l'introduction de la
  1778. modification, le
  1779. délai n'était que de 30 jours pour les salariés qui avaient payé
  1780. une
  1781. cotisation. Les représentants syndicaux ont estimé que la
  1782. prolongation du
  1783. délai était un exemple de plus de l'intention véritable de la loi
  1784. no 44. Le
  1785. gouvernement a expliqué que l'article 49 visait les situations où
  1786. les
  1787. syndicats ne menaient pas une campagne permanente de
  1788. recrutement aux fins
  1789. d'accréditation en matière de négociation collective. Cette
  1790. modification a été
  1791. introduite pour qu'il n'y ait plus aucune incertitude au sujet de
  1792. la force
  1793. véritable d'un syndicat dans une unité de négociation et pour
  1794. éviter que l'on
  1795. n'abuse de la procédure d'accréditation afin, par exemple,
  1796. d'empêcher d'autres
  1797. syndicats d'organiser des campagnes de recrutement dans la
  1798. même unité de
  1799. négociation. Le gouvernement a indiqué que, depuis
  1800. l'adoption de cet
  1801. amendement, il n'y avait pas eu de preuve de ses effets sur
  1802. l'aptitude d'un
  1803. syndicat à recruter et à demander l'accréditation. Comme les
  1804. statuts d'un
  1805. syndicat fixeraient le laps de temps au bout duquel prendrait fin
  1806. l'affiliation des candidats ayant payé la cotisation, tout
  1807. problème de
  1808. procédure que l'article 49 serait susceptible de poser aux
  1809. syndicats pourrait
  1810. probablement être tranché par une simple modification de leurs
  1811. statuts. En
  1812. outre, il a été précisé que le Conseil des relations
  1813. professionnelles avait
  1814. tout pouvoir pour organiser un vote, même si la majorité (51
  1815. pour cent) des
  1816. salariés de l'unité de négociation avaient fait connaître leur
  1817. choix d'un
  1818. syndicat comme agent négociateur.
  1819. 73. Les représentants syndicaux m'ont dit que la modification
  1820. apportée à
  1821. l'article 132 concernant les droits du successeur n'avait pas de
  1822. raison d'être
  1823. en matière de relations professionnelles. Le gouvernement a
  1824. expliqué que cette
  1825. modification avait été adoptée à la suite d'une décision
  1826. judiciaire qui avait
  1827. donné une interprétation trop large de la disposition
  1828. précédente, permettant
  1829. ainsi aux droits du successeur de lier les salariés à d'"autres
  1830. activités
  1831. connexes"; la situation en matière de droits du successeur est
  1832. maintenant
  1833. classée dans la loi, et le Conseil des relations professionnelles
  1834. a seulement
  1835. le pouvoir discrétionnaire, et non l'obligation, de déterminer
  1836. quels droits,
  1837. privilèges et obligations ont été retenus lorsqu'une question se
  1838. pose dans le
  1839. cadre de cette disposition.
  1840. 74. Il ressort d'informations obtenues pendant la mission au
  1841. sujet de
  1842. l'article 117.94 de la loi sur les relations professionnelles et de
  1843. l'article
  1844. 92.2 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
  1845. publique
  1846. concernant le retrait de la retenue à la source des cotisations
  1847. syndicales que
  1848. les allégations initiales de l'organisation plaignante
  1849. concernaient un projet
  1850. de disposition qui ne mentionnait pas le préavis et le droit de
  1851. recours au
  1852. conseil approprié. Les représentants syndicaux ont reconnu
  1853. que les articles
  1854. 117.94 et 92.2, dans leur teneur actuelle, ne posaient pas de
  1855. problème
  1856. puisqu'ils n'avaient pas été utilisés. Le gouvernement a
  1857. souligné le caractère
  1858. équitable du préavis, du recours et du délai fixés par le présent
  1859. article;
  1860. néanmoins, il a reconnu que l'employeur avait la possibilité de
  1861. suspendre les
  1862. retenues à la source sur tous les salaires dans une situation où
  1863. un seul
  1864. salarié aurait refusé de s'acquitter de ses services. Il a estimé
  1865. qu'en de
  1866. pareils cas le conseil approprié aurait à décider s'il y a eu, ou
  1867. non, grève
  1868. illicite et, dans la négative, à ordonner à l'employeur de ne pas
  1869. suspendre le
  1870. système des retenues à la source.
  1871. 75. Pendant les discussions relatives à la suppression du
  1872. droit de grève des
  1873. travailleurs du secteur hospitalier (art. 117.1 de la loi sur les
  1874. relations
  1875. professionnelles), les représentants de l'AUPE ont exprimé leur
  1876. préoccupation
  1877. face au caractère indiscriminant de l'article 117.1 dans la
  1878. mesure où le
  1879. personnel des services non essentiels était aussi couvert par
  1880. l'interdiction
  1881. de la grève. Dans un contexte plus général, ce point a été
  1882. examiné ci-dessus
  1883. de façon assez détaillée. Les employés de l'hôpital ont
  1884. présenté des éléments
  1885. de preuve pour démontrer que leur description de tâches et
  1886. leurs attributions
  1887. ne différaient pas des travaux de bureau effectués en dehors
  1888. du système
  1889. hospitalier et ne pouvaient donc pas être considérées comme
  1890. essentielles. Le
  1891. gouvernement a souligné qu'il y avait beaucoup d'incertitude,
  1892. au niveau
  1893. national comme au plan international, sur la notion de "service
  1894. essentiel". Il
  1895. a été expliqué que le gouvernement de la province avait
  1896. décidé d'éclaircir la
  1897. situation par la voie législative plutôt que par le biais de
  1898. décisions du
  1899. Conseil des relations professionnelles ou de décisions
  1900. arbitrales. Le
  1901. gouvernement a souligné que l'article 117.1 n'avait touché
  1902. que de petits
  1903. groupes de salariés. Après qu'il fut indiqué au gouvernement
  1904. que, dans
  1905. certains cas spécifiques, les organes internationaux avaient
  1906. donné une
  1907. définition très claire du concept de services essentiels, la
  1908. question d'un
  1909. abus éventuel a été soulevée. Le gouvernement a expliqué
  1910. que cette question
  1911. avait été portée devant les tribunaux dans deux juridictions, à
  1912. savoir le
  1913. recours contre une décision d'une cour d'appel de l'Alberta
  1914. devant la Cour
  1915. suprême du Canada (contestant la loi no 44, motif pris qu'elle
  1916. enfreint la
  1917. Charte canadienne des droits et libertés - la cause sera
  1918. entendue en octobre
  1919. 1985) et un recours de l'AUPE devant la cour d'appel de
  1920. l'Alberta, qui a été
  1921. ajourné en attendant la décision susmentionnée de la Cour
  1922. suprême.
  1923. D. Remarques finales
  1924. 76. Les plaintes déposées contre le gouvernement de
  1925. l'Alberta se divisent
  1926. en deux groupes. Un certain nombre d'entre elles semblaient
  1927. indiquer que des
  1928. modifications législatives récentes, en particulier la loi no 44,
  1929. avaient
  1930. changé le processus de la négociation collective et de la
  1931. soumission à
  1932. l'arbitrage. Cela était-il allégué, enfreignant manifestement les
  1933. principes de
  1934. l'OIT applicables à une structure où la limitation du droit de
  1935. grève est
  1936. compensée par le libre accès à l'arbitrage obligatoire. D'autres
  1937. portaient sur
  1938. des points de détail distincts. Il était suggéré que ceux-ci, pris
  1939. dans leur
  1940. ensemble, opposaient de sérieux obstacles à la liberté
  1941. syndicale et à la libre
  1942. négociation collective. Pris ensemble, ces deux groupes de
  1943. plaintes étaient
  1944. intensément ressentis et sincèrement considérés comme
  1945. formant une politique
  1946. cohérente visant à affaiblir le syndicat de la fonction publique.
  1947. J'ai le
  1948. sentiment qu'il serait utile, pour le Comité de la liberté
  1949. syndicale, que je
  1950. résume la position telle que je l'ai vue en traitant chacun des
  1951. groupes
  1952. séparément, puis en évaluant la situation globale.
  1953. Négociation collective et arbitrage
  1954. 77. La loi no 44, qui a apporté plusieurs modifications à la
  1955. structure de
  1956. la négociation, et la pratique récente ont fait naître le
  1957. sentiment que des
  1958. limitations importantes avaient été imposées et qu'un préjudice
  1959. avait été
  1960. causé. Dans son fonctionnement actuel, le système soulève
  1961. les problèmes
  1962. ci-après sur lesquels l'attention du comité est spécialement
  1963. attirée:
  1964. a) Le système refuse le droit de grève aux agents de la
  1965. fonction publique
  1966. qui sont couverts par la loi. Il offre en contrepartie l'accès à
  1967. l'arbitrage
  1968. obligatoire.
  1969. b) L'accès à l'arbitrage est limité par une clause de
  1970. compétence (art. 48
  1971. 2)). Cette clause est en fait l'équivalent de la clause relative
  1972. aux droits de
  1973. la direction habituellement contenue dans une convention
  1974. collective. Deux
  1975. questions ont été soulevées: i) la rédaction de la loi permet à
  1976. l'organe qui
  1977. prononcera le jugement d'avoir une large conception des
  1978. droits de la
  1979. direction. Si tel est le cas, le syndicat opposera un solide
  1980. argument, étant
  1981. donné que l'exercice de ces droits soulèvera certainement, à
  1982. bien des
  1983. occasions, la question dont le syndicat estime avec raison
  1984. qu'elle relève de
  1985. la négociation; ii) avec les méthodes de procédure adoptées,
  1986. la question de la
  1987. compétence relève du Conseil des relations professionnelles
  1988. dans la fonction
  1989. publique. Cela a pour effet d'enlever à l'arbitre, saisi des
  1990. problèmes
  1991. causés par la rupture des négociations, certaines des
  1992. questions contestées.
  1993. Les syndicats semblent être gênés par cette dualité. L'étude
  1994. des sentences
  1995. arbitrales indique que l'application de ces dispositions a donné
  1996. des résultats
  1997. qui diminuent considérablement la compétence de l'arbitre. Il
  1998. semble que le
  1999. système qui, on l'a vu, vise à compenser la perte du droit de
  2000. grève
  2001. restreigne le nombre des questions censées relever de
  2002. l'arbitrage. C'est là un
  2003. point qui doit être examiné attentivement.
  2004. c) L'adjonction, dans les règles statutaires applicables à la
  2005. tâche de
  2006. l'arbitre qu'énumère l'article 55, de l'obligation de considérer
  2007. "toute
  2008. politique fiscale de l'Etat qui peut être, de temps en temps,
  2009. annoncée par le
  2010. Trésorier provincial": il semble, d'après ce qui m'a été dit, que
  2011. c'est
  2012. l'impact potentiel de cette clause que l'on craint. Il est difficile
  2013. de voir
  2014. l'effet de cette disposition prise en son sens apparent dans la
  2015. pratique de
  2016. l'arbitrage. On ne peut pas sérieusement prétendre que l'arbitre
  2017. ne
  2018. considérerait pas ladite politique fiscale s'il ne recevait pas
  2019. cette
  2020. directive. Les dangers sont toutefois là: i) l'arbitre, conscient
  2021. de la
  2022. précarité de sa profession, peut donner la prééminence à cette
  2023. disposition.
  2024. Certes, il convient de dire qu'en réalité c'est là un danger bien
  2025. théorique,
  2026. mais ce problème existe, que la position soit statutaire ou non;
  2027. ii) le
  2028. gouvernement peut annoncer sa politique fiscale sous la
  2029. forme, par exemple,
  2030. d'une norme applicable aux majorations salariales. Cela, sans
  2031. aucun doute,
  2032. augmenterait l'impact de la considération particulière ici
  2033. examinée. Cela
  2034. porterait gravement atteinte à la liberté de l'arbitre. De fait, on
  2035. s'apercevrait qu'elle modifie le concept d'arbitrage
  2036. indépendant. Une telle
  2037. intervention devrait être directement, et non indirectement,
  2038. statutaire. Les
  2039. politiques fiscales qui m'ont été montrées ne recèlent aucun
  2040. signe d'une
  2041. telle ingérence. Elles énoncent clairement et succinctement
  2042. des facteurs
  2043. économiques généraux dont le gouvernement se préoccupe.
  2044. On ne peut pas dire
  2045. des sentences étudiées quelles démontrent un abus
  2046. quelconque de cet article
  2047. visant à détruire l'indépendance.
  2048. d) Les exclusions des garanties prévues par la loi ont été
  2049. récemment
  2050. élargies. Cela augmente le nombre des fonctionnaires qui ne
  2051. sont pas protégés
  2052. par le système. Les faits sont clairement exposés dans les
  2053. éléments de preuve
  2054. apportés par les parties et résumés ci-dessus. Les effectifs
  2055. couverts par la
  2056. loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique
  2057. ne sont pas
  2058. excessifs. Il serait possible de débattre de la validité, au regard
  2059. des normes
  2060. de l'OIT, de quelques catégories, mais il n'y a pas de
  2061. négligence flagrante
  2062. à l'égard des principes en cause.
  2063. 78. Il convient toutefois d'examiner l'exclusion des
  2064. travailleurs des
  2065. établissements de soins des structures de négociation
  2066. parallèles garanties par
  2067. la loi sur les relations professionnelles. Cette exclusion est très
  2068. large et
  2069. attache trop peu d'importance aux qualifications requises pour
  2070. être considéré
  2071. comme un "employé essentiel". Elle est si large qu'elle justifie
  2072. véritablement
  2073. les préoccupations des plaignants.
  2074. Questions particulières
  2075. 79. Ces questions ont été exposées ci-dessus de façon
  2076. détaillée et les
  2077. opinions des parties ont été indiquées. Il est possible de les
  2078. grouper
  2079. partiellement. Quatre questions portent sur les modifications
  2080. statutaires
  2081. apportées aux structures légales. Sans aucun doute, ces
  2082. modifications rendent
  2083. la position des syndicats moins favorable, d'où la raison des
  2084. plaintes. Elles
  2085. ne semblent pas toutefois mettre d'importantes entraves aux
  2086. droits syndicaux.
  2087. Le comité sera en mesure de les juger d'après les opinions
  2088. exprimées; j'ai
  2089. trouvé peu de choses à ajouter:
  2090. a) l'article 74.1 de la loi sur les relations professionnelles
  2091. exige qu'un
  2092. représentant dûment autorisé à mener les négociations
  2093. collectives réside dans
  2094. l'Alberta. Il a été précisé que la loi n'interdit pas aux syndicats
  2095. de
  2096. rechercher pour les négociations l'aide de personnes qui
  2097. résident à
  2098. l'extérieur de la province;
  2099. b) l'article 87.2 de la loi sur les relations professionnelles
  2100. autorise
  2101. une seule grève ou un seul lock-out. Cela restreint certaines
  2102. tactiques
  2103. syndicales antérieurement permises, mais n'empêche pas de
  2104. sonder suffisamment
  2105. les membres pour déterminer la position avant de demander un
  2106. scrutin;
  2107. c) l'article 49 de la loi sur les relations professionnelles, en
  2108. cas de
  2109. rejet d'une accréditation à l'issue d'un vote, où il est prévu
  2110. maintenant un
  2111. moratoire de 90 jours. Cela porte atteinte à la pratique
  2112. courante qui est
  2113. d'inscrire des membres pour une courte période (30 jours). Il
  2114. est certain que
  2115. cela entraînera un changement de tactique;
  2116. d) l'article 132 de la loi sur les relations professionnelles,
  2117. lorsqu'une
  2118. affaire ou une entreprise change de main, prévoyait le transfert
  2119. automatique
  2120. au nouvel employeur des droits et obligations en matière de
  2121. négociation
  2122. collective. L'article 132 autorise maintenant le conseil à
  2123. intervenir. Comme
  2124. il est probable qu'il ne le fera que lorsqu'on prévoit des
  2125. difficultés, il
  2126. semble que cette disposition réglemente et accélère
  2127. simplement la pratique
  2128. normale. Rien n'a indiqué que cette disposition serait utilisée
  2129. pour modifier
  2130. les motifs précédents d'intervention;
  2131. e) l'article 1 w.1) de la loi sur les relations professionnelles n'a
  2132. jamais
  2133. été promulgué.
  2134. 80. Trois questions appellent des commentaires distincts:
  2135. a) Article 102.2 - Loi sur les relations professionnelles Cette
  2136. disposition confère le droit de faire voter les travailleurs
  2137. concernés sur les
  2138. recommandations d'une commission d'enquête chargée d'un
  2139. conflit du travail
  2140. dans les dix jours qui suivent la publication de ces
  2141. recommandations. Demander
  2142. ce vote est considéré comme le déni du droit des
  2143. responsables syndicaux de
  2144. gérer les affaires de leur propre syndicat. Toutefois, cela ne
  2145. prive pas les
  2146. travailleurs pris individuellement de leurs droits.
  2147. b) Article 105 et article 106 - Loi sur les relations
  2148. professionnelles Le
  2149. délit de menace de grève illicite qui est créé par ces
  2150. dispositions demande un
  2151. examen attentif. Il semble mettre quelque peu en danger les
  2152. salariés et les
  2153. responsables syndicaux. Deux problèmes se posent: i) la
  2154. définition d'une grève
  2155. n'est aucunement certaine et précise. Dans bien des cas, il
  2156. est possible que
  2157. la question ne puisse être tranchée que par un tribunal. Un
  2158. salarié ou
  2159. responsable syndical ou bien se voit fortement entravé dans
  2160. sa ligne de
  2161. conduite (par peur de commettre une infraction eventuelle
  2162. mais non certaine),
  2163. ou bien agit de bonne foi, persuadé que la grève est licite, et
  2164. s'aperçoit par
  2165. la suite qu'elle ne l'est pas. Il semble être essentiel qu'un
  2166. individu qui n'a
  2167. pas de culpabilité subjective (c'est-à-dire la connaissance ou
  2168. la conviction
  2169. que l'acte est illégal) devrait être protégé; ii) la question du droit
  2170. qu'a
  2171. telle ou telle personne d'agir au nom du syndicat peut
  2172. également se poser. Ici
  2173. encore, il convient d'espérer que des éclaircissements seront
  2174. apportés pour
  2175. éviter toute incertitude.
  2176. c) Article 117.94 - Loi sur les relations professionnelles;
  2177. article 92.2 -
  2178. Loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique.
  2179. Aux termes
  2180. de ces dispositions, lorsqu'une grève illicite est déclenchée,
  2181. l'employeur
  2182. peut suspendre la déduction, sur la rémunération des salariés,
  2183. des cotisations
  2184. syndicales et leur versement au syndicat. C'est là un exemple
  2185. de la crainte
  2186. que les dispositions puissent être utilisées inéquitablement. La
  2187. loi semble
  2188. autoriser le blocage de toutes les cotisations dans l'unité à la
  2189. suite de
  2190. l'action d'une seule personne. Il nous a été dit qu'une telle
  2191. réaction était
  2192. extrêmement improbable, sauf dans le cas de travailleurs
  2193. "pivots" tout
  2194. spécialement choisis. Ici encore, il importe de noter qu'il peut y
  2195. avoir des
  2196. situations dans lesquelles le syndicat lui-même s'efforce
  2197. d'empêcher la grève
  2198. illicite ou d'y mettre fin. Prendre des mesures de représailles
  2199. dans ces
  2200. conditions ne semblerait pas être équitable. Là encore, il s'agit
  2201. d'une
  2202. question qui, une fois exposée, peut être réglée en
  2203. éclaircissant la portée
  2204. exacte de la disposition.
  2205. Considérations générales
  2206. 81. Consultation: Les plaintes portent sur une période
  2207. pendant laquelle les
  2208. attitudes du gouvernement et du syndicat de la fonction
  2209. publique étaient
  2210. diamétralement opposées. La consultation courante sur des
  2211. questions telles que
  2212. l'hygiène et la sécurité semble s'être poursuivie sans
  2213. changement. Toutefois,
  2214. le gouvernement étant déterminé à agir rapidement à la suite
  2215. du ralentissement
  2216. marqué de l'activité économique, la consultation sur les
  2217. modifications
  2218. introduites par la loi no 44 s'est presque totalement réduite à
  2219. une audition
  2220. publique devant une commission du Parlement. Comme la loi
  2221. touchait des
  2222. procédures dans lesquelles le gouvernement et le syndicat
  2223. agissaient de
  2224. concert, il est regrettable qu'on n'ait pas accordé plus de
  2225. temps à la
  2226. consultation. Il semblerait que, maintenant que les pressions
  2227. économiques se
  2228. sont atténuées, le processus de consultation puisse être
  2229. rétabli. Cela
  2230. permettra à tout le moins de faire disparaître les malentendus
  2231. avant que des
  2232. modifications ne soient promulguées.
  2233. 82. Attitudes: Il est apparu clairement que le syndicat était
  2234. convaincu
  2235. qu'il avait été choisi spécialement pour subir une attaque
  2236. concertée contre sa
  2237. position et ses droits. Les mesures prises par le gouvernement,
  2238. dans leur
  2239. intention évidente - limiter les augmentations pécuniaires -, et
  2240. les diverses
  2241. modifications considérées sous le jour le plus défavorable ont
  2242. conduit à la
  2243. formation de cette conviction. Il n'est pas facile de déterminer
  2244. si ces
  2245. craintes et l'interprétation la plus rude des modifications
  2246. législatives
  2247. reflètent les intentions. J'ai vu peu de preuves objectives à
  2248. l'appui de cette
  2249. opinion pessimiste, bien que j'admette que la crainte était
  2250. véritable.
  2251. 83. Il convient de mentionner deux aspects du problème
  2252. fondamental:
  2253. 1. Il est important et assez raisonnable d'examiner les
  2254. questions soulevées
  2255. en ce qui concerne la crainte des manières dont la loi peut
  2256. être utilisée pour
  2257. empêcher le syndicat de s'acquitter de son rôle de
  2258. négociation. Il est apparu
  2259. que bon nombre de ces questions pourraient être résolues par
  2260. entente interne,
  2261. obtenue par exemple par un échange de lettres.
  2262. 2. Le deuxième aspect est un peu plus complexe. Les
  2263. procédures semblent
  2264. avoir modifié l'indépendance telle qu'elle était perçue du
  2265. Conseil des
  2266. relations professionnelles dans la fonction publique et du
  2267. processus
  2268. d'arbitrage. Les raisons en sont exposées au début de la
  2269. présente section. Il
  2270. est essentiel que l'on se préoccupe de faire en sorte que
  2271. l'indépendance de
  2272. l'arbitrage soit maintenue et que l'on puisse constater qu'il en
  2273. est fait
  2274. grand cas.
  2275. 84. Il est souhaitable et même possible de créer de
  2276. meilleures relations
  2277. entre les parties maintenant que la situation économique est
  2278. moins alarmante
  2279. et que les syndicats comme le gouvernement sont plus
  2280. conscients de leurs
  2281. responsabilités et obligations respectives. Il ne sera pas facile
  2282. d'établir
  2283. rapidement la confiance mutuelle mais, si l'on étudie
  2284. conjointement les
  2285. problèmes qui m'ont été exposés, il devrait être possible
  2286. d'arriver à de
  2287. meilleures relations. Les deux parties ont manifestement tout
  2288. intérêt à
  2289. déployer des efforts dans ce sens et à supprimer les craintes
  2290. actuelles d'une
  2291. inobservation des principes de l'OIT.
  2292. IV. Cas de l'Alberta: no 1234
  2293. A. Introduction
  2294. 85. Dans une communication du 19 septembre 1983, la
  2295. Confédération des
  2296. associations des enseignants universitaires de l'Alberta
  2297. (Confederation of
  2298. Alberta Faculty Associations - CAFA) a présenté une plainte
  2299. alléguant des
  2300. violations des droits syndicaux dans l'Alberta. Le
  2301. gouvernement de l'Alberta a
  2302. transmis ses observations dans une communication du 21
  2303. février 1984.
  2304. B. Problèmes en cause
  2305. 86. Dans sa communication du 19 septembre 1983, la CAFA
  2306. a allégué qu'une
  2307. modification apportée en novembre 1981 à la loi sur les
  2308. universités privait le
  2309. personnel enseignant des universités de la province de
  2310. l'Alberta des droits
  2311. conférés par la convention no 87, qui avait été ratifiée par le
  2312. Canada.
  2313. L'organisation plaignante expliquait qu'un nouvel article 17 1)
  2314. d.1) donnait
  2315. au conseil des gouverneurs de chaque établissement
  2316. universitaire le pouvoir de
  2317. désigner les salariés qui seraient membres de l'association du
  2318. personnel
  2319. académique de l'établissement et donc qui pourraient
  2320. appartenir à
  2321. l'association du personnel de la faculté de chaque université.
  2322. Cet article a
  2323. la teneur suivante:
  2324. Après consultation de l'association du personnel
  2325. enseignant, (le conseil
  2326. des gouverneurs a le pouvoir) de prendre une ou plusieurs des
  2327. décisions
  2328. suivantes: i) désigner les catégories de salariés qui font partie
  2329. du personnel
  2330. enseignant de l'université; ii) désigner tel ou tel salarié comme
  2331. étant membre
  2332. du personnel enseignant de l'université; iii) modifier les
  2333. désignations faites
  2334. en vertu des points i) et ii) ci-dessus.
  2335. Selon l'organisation plaignante, cet article accordait à
  2336. l'employeur le
  2337. droit de déterminer les personnes qui devraient faire partie de
  2338. l'association
  2339. du personnel enseignant de l'université, ce qui est en
  2340. contradiction avec
  2341. l'article 2 de la convention no 87.
  2342. 87. La CAFA a expliqué que sa plainte était semblable aux
  2343. plaintes
  2344. précédentes qui avaient été présentées par diverses
  2345. associations canadiennes
  2346. de travailleurs contre le gouvernement et, en particulier, à la
  2347. plainte
  2348. présentée en 1977 par le Congrès du travail du Canada et
  2349. l'Association
  2350. canadienne des professeurs d'université (cas no 893, que le
  2351. comité a examiné
  2352. pour la dernière fois de façon approfondie dans son 194e
  2353. rapport, paragraphes
  2354. 92 à 118) et à la plainte présentée en 1981 par l'Association
  2355. du corps
  2356. enseignant des collèges de l'Alberta (cas no 1055, examiné
  2357. par le comité dans
  2358. son 214e rapport, paragraphes 332 à 350).
  2359. 88. La CAFA a fait observer qu'elle avait attendu, pour
  2360. présenter à l'OIT
  2361. une plainte concernant la loi de 1981 portant modification de
  2362. la loi sur les
  2363. universités, de voir ce qui se produirait en fait lors de la
  2364. première
  2365. désignation par un conseil des gouverneurs des membres du
  2366. personnel enseignant
  2367. universitaire et, partant, des membres d'une association aux
  2368. termes de la
  2369. nouvelle loi. Elle a cité un exemple de désignation de ce
  2370. genre: le Conseil de
  2371. l'Université d'Athabasca a fait savoir qu'il avait l'intention de
  2372. désigner en
  2373. tant que "membres du personnel enseignant universitaire"
  2374. moins d'un tiers des
  2375. personnes qui avaient antérieurement été membres de
  2376. l'Association du personnel
  2377. enseignant de l'Université d'Athabasca en déclarant
  2378. arbitrairement quelles
  2379. seraient les personnes à en exclure au motif qu'elles
  2380. s'occupaient de
  2381. l'administration supérieure ou que leurs activités ne
  2382. correspondaient pas à la
  2383. définition du terme "universitaire" adoptée par le conseil. Selon
  2384. l'organisation plaignante, l'Association du personnel
  2385. enseignant de
  2386. l'Université d'Athabasca était parvenue à convaincre le
  2387. conseil de
  2388. l'établissement que les définitions qu'il avait initialement
  2389. adoptées ne se
  2390. justifiaient pas et, par la suite, un accord sur la désignation
  2391. avait été
  2392. conclu. Néanmoins, selon l'organisation plaignante, étant
  2393. donné que la loi
  2394. accordait toujours au conseil des gouverneurs le droit de
  2395. révoquer à son gré
  2396. une désignation, sous réserve d'une consultation préalable, ce
  2397. texte
  2398. continuait de menacer la liberté syndicale.
  2399. 89. Dans sa communication du 21 février 1984, le
  2400. gouvernement a expliqué que
  2401. la création et la structure des universités de l'Alberta
  2402. répondaient au
  2403. principe de la liberté universitaire - le droit pour chaque
  2404. membre du corps
  2405. enseignant de l'université d'étudier, de poursuivre des
  2406. recherches et de
  2407. communiquer des idées en toute liberté. Le gouvernement a
  2408. ajouté que le
  2409. principe de la liberté universitaire devait être protégé par des
  2410. structures
  2411. institutionnelles appropriées et que le rôle des enseignants
  2412. dans la gestion
  2413. des universités était reconnu depuis longtemps.
  2414. 90. Selon le gouvernement, par suite de la complexité des
  2415. fonctions
  2416. professorales et administratives exercées par ces
  2417. établissements, il avait été
  2418. reconnu que la gestion universitaire incombait conjointement
  2419. aux divers
  2420. éléments importants de la communauté universitaire, y compris
  2421. les professeurs,
  2422. les gestionnaires, les conseils d'administration et les étudiants.
  2423. En
  2424. particulier, les professeurs devaient jouer un rôle majeur dans
  2425. la
  2426. détermination des programmes d'étude, des matières et des
  2427. méthodes
  2428. pédagogiques, de la recherche, des exigences à respecter
  2429. pour la délivrance
  2430. des diplômes, ainsi que dans le recrutement, la titularisation et
  2431. le
  2432. licenciement des enseignants, étant donné que les
  2433. professeurs étaient les
  2434. seuls à avoir la compétence requise pour juger de ces
  2435. questions. Le
  2436. gouvernement a cité à titre d'exemple la structure de
  2437. l'Université de
  2438. l'Alberta, où les membres du personnel enseignant jouaient un
  2439. rôle important
  2440. dans l'administration et dans la détermination de la politique
  2441. globale de
  2442. l'établissement; "les membres du personnel" sont définis dans
  2443. la convention
  2444. collective de l'association des professeurs comme étant toutes
  2445. les personnes
  2446. qui ont été nommées pour occuper à temps complet des
  2447. postes d'enseignement et
  2448. de recherche, ce qui comprend tous les professeurs et
  2449. administrateurs
  2450. supérieurs, tels que le président, le vice-président et les
  2451. doyens. Le conseil
  2452. des gouverneurs, dans cette université, comprend notamment
  2453. le président de
  2454. l'université et deux membres du personnel enseignant. Le
  2455. Conseil général des
  2456. facultés, qui est chargé des questions d'enseignement de
  2457. l'université, sous
  2458. réserve des pouvoirs de celle-ci, comprend notamment le
  2459. président, le
  2460. vice-président, les doyens de toutes les facultés, les directeurs
  2461. de chaque
  2462. école ou institut, le bibliothécaire en chef, le secrétaire général
  2463. et les
  2464. membres élus de toutes les facultés et de tous les instituts ou
  2465. écoles. Le
  2466. gouvernement a expliqué que toutes ces personnes faisaient
  2467. partie du
  2468. "personnel universitaire" mais que, parallèlement, elles étaient
  2469. des membres
  2470. actifs et influents de l'organisme même qui intervient en tant
  2471. qu'instrument
  2472. du conseil de l'université pour la gestion interne, ce qui
  2473. comprend les
  2474. questions de titularisation, de rémunération et de promotion
  2475. ainsi que les
  2476. recours et les questions disciplinaires.
  2477. 91. Le gouvernement a donc conclu que, dans le milieu
  2478. universitaire, les
  2479. distinctions traditionnelles entre employeurs et salariés ou entre
  2480. gestionnaires et non gestionnaires ne s'appliquaient pas. Tous
  2481. les groupes
  2482. d'intérêts qui exercent leurs activités dans le cadre de
  2483. l'établissement
  2484. interviennent dans sa gestion, notamment dans la désignation
  2485. du "personnel
  2486. universitaire", puisque le personnel est fortement représenté
  2487. au sein du
  2488. conseil des gouverneurs. Le gouvernement a souligné que la
  2489. loi portant
  2490. modification de la loi sur les universités s'efforçait de créer un
  2491. cadre dans
  2492. lequel le dialogue pouvait s'instaurer au sujet de questions de
  2493. conditions de
  2494. travail plus traditionnelles, tout en reconnaissant la nature
  2495. spécifique des
  2496. universités. En particulier, la loi a désigné le conseil des
  2497. gouverneurs comme
  2498. étant l'autorité définitive et, en second lieu, la loi a exigé une
  2499. "consultation", ce que le gouvernement a interprété comme
  2500. étant une
  2501. consultation au plein sens du terme permettant aux personnes
  2502. intéressées de
  2503. bénéficier raisonnablement, largement et suffisamment de
  2504. l'occasion d'exprimer
  2505. leur avis.
  2506. 92. Se référant à l'exemple cité par l'organisation plaignante,
  2507. le
  2508. gouvernement a expliqué qu'au début de 1983 le conseil des
  2509. gouverneurs de
  2510. l'Université d'Athabasca avait déclaré son intention de
  2511. désigner en tant que
  2512. "membres du personnel universitaire" moins d'un tiers des
  2513. personnes qui
  2514. avaient antérieurement fait partie de l'Association du personnel
  2515. enseignant de
  2516. l'Université d'Athabasca. Le conseil des gouverneurs avait
  2517. estimé que bon
  2518. nombre des membres du personnel exerçaient des fonctions
  2519. de gestion supérieure
  2520. et que, cela étant, leurs activités n'entraient pas dans le cadre
  2521. de sa
  2522. définition du terme "universitaire"; à la suite de consultations
  2523. entre le
  2524. conseil des gouverneurs et l'Association du personnel
  2525. enseignant, la portée
  2526. des désignations avait été modifiée et, en conséquence,
  2527. nombre des personnes
  2528. concernées - dont la désignation avait changé - avaient été
  2529. désignées de
  2530. nouveau comme étant "membres du personnel universitaire".
  2531. Selon le
  2532. gouvernement, cet exemple prouvait l'efficacité de la
  2533. consultation telle
  2534. qu'elle était exigée par la loi portant modification de la loi sur
  2535. les
  2536. universités, étant donné, tout particulièrement, que le conseil
  2537. des
  2538. gouverneurs avait reconnu que la fragmentation du personnel
  2539. enseignant en
  2540. petites unités de négociation ne présentait pas d'avantage
  2541. pour l'université.
  2542. C. Informations reçues pendant la mission
  2543. 93. Pendant les discussions avec les représentants de la
  2544. CAFA, deux points
  2545. ont été soulignés. Premièrement, le syndicat s'efforçait de
  2546. mener des
  2547. consultations de bonne foi avec les employeurs (les conseils
  2548. de gouverneurs)
  2549. pour essayer de remédier au caractère restrictif de l'article 17
  2550. 1) d.1); de
  2551. telles consultations informelles avaient en fait donné des
  2552. résultats dans la
  2553. situation de l'Université d'Athabasca dont il est question dans
  2554. la plainte qui
  2555. a été déposée. Deuxièmement, la CAFA a souligné qu'elle se
  2556. préoccupait du fait
  2557. qu'il n'y avait aucun droit de recours contre une désignation de
  2558. personnel
  2559. universitaire effectuée par le conseil des gouverneurs en vertu
  2560. de l'article
  2561. 17 1) d.1). La CAFA a considéré qu'une solution possible pour
  2562. sortir de cette
  2563. situation pourrait consister à inclure des dispositions dans la loi
  2564. prévoyant
  2565. l'arbitrage d'une tierce personne sur la question des
  2566. désignations, comme il
  2567. en existe en cas de blocage des négociations collectives. J'ai
  2568. noté que
  2569. c'était là une utile suggestion puisque, dans la plupart des cas,
  2570. les
  2571. définitions des tâches indiquaient quels étaient les membres du
  2572. personnel
  2573. universitaire qui se consacraient à l'enseignement et à la
  2574. recherche et quels
  2575. étaient ceux qui étaient occupés à des tâches de gestion.
  2576. 94. Le gouvernement a souligné que la situation à l'Université
  2577. d'Athabasca
  2578. avait été particulièrement tendue du fait qu'à l'époque de la
  2579. plainte
  2580. l'université venait juste d'être transférée d'Edmonton à la ville,
  2581. située plus
  2582. au nord d'Athabasca (qui avait donné son nom à l'université)
  2583. pour poursuivre
  2584. ses programmes d'"université ouverte". Selon le
  2585. gouvernement, aucune des trois
  2586. autres universités de l'Alberta n'avait connu de problème; les
  2587. employeurs de
  2588. l'Université de l'Alberta (à Edmonton) avaient en fait été surpris
  2589. à propos de
  2590. cette plainte parce qu'ils n'avaient aucune difficulté à négocier
  2591. avec leur
  2592. conseil de gouverneurs la question du personnel universitaire.
  2593. Néanmoins, le
  2594. gouvernement a reconnu que la loi ne prenait pas en
  2595. considération les
  2596. différences radicales que présentent les quatre universités de
  2597. la province.
  2598. J'ai fait remarquer que, bien que la législation ne suscite
  2599. actuellement aucun
  2600. problème, la CAFA souhaitait qu'un mécanisme d'un genre ou
  2601. d'un autre assure
  2602. une protection contre des situations comme celles qui s'étaient
  2603. produites à
  2604. l'Université d'Athabasca. A cela, le gouvernement a répondu
  2605. que, les autres
  2606. universités ayant réussi à parvenir aux désignations, on ne
  2607. pouvait envisager
  2608. aucune modification importante de la politique suivie. J'ai
  2609. indiqué qu'un
  2610. moyen informel tel qu'une lettre d'entente suffirait peut-être.
  2611. D. Remarques finales
  2612. 95. La question ici est simple. Le pouvoir qui est donné à
  2613. l'employeur de
  2614. désigner le personnel académique permettrait d'exercer un
  2615. contrôle important
  2616. sur la nature et la taille de l'unité de négociation. Dans les
  2617. universités, où
  2618. règnent la participation et la consultation, les relations
  2619. professionnelles
  2620. sont de nature individuelle. Les rapports étaient excellents,
  2621. mais le pouvoir
  2622. de désignation a entraîné un grave problème à l'Université
  2623. d'Athabasca qui,
  2624. parce qu'elle se concentre sur le "télé-enseignement" -
  2625. c'est-à-dire un
  2626. enseignement destiné à des étudiants qui ne sont pas sur le
  2627. campus -, a une
  2628. structure de personnel particulière. Ce problème a été résolu
  2629. de façon
  2630. satisfaisante, mais une faiblesse de la loi a mis l'association du
  2631. personnel
  2632. sur le qui-vive.
  2633. 96. Il est certain que le pouvoir unilatéral d'opérer les
  2634. désignations
  2635. place potentiellement le syndicat dans une situation très
  2636. défavorable. Tout ce
  2637. qui est demandé, c'est l'accès à l'arbitrage indépendant pour
  2638. les désignations
  2639. contestées. Cela semble être une sauvegarde nécessaire pour
  2640. protéger
  2641. l'intégrité de l'unité de négociation. Il semble très improbable
  2642. que ce
  2643. mécanisme soit souvent utilisé car les relations paraissent
  2644. bonnes. On
  2645. pourrait donc envisager d'introduire la simple sauvegarde que
  2646. demande le
  2647. syndicat.
  2648. V. Cas de l'Ontario - no 1172
  2649. A. Introduction
  2650. 97. La plainte que le Congrès du travail du Canada (CTC)
  2651. avait présentée au
  2652. nom de plusieurs des organisations - le Syndicat national du
  2653. personnel des
  2654. gouvernements provinciaux (NUPGE), le Syndicat des
  2655. employés de la fonction
  2656. publique de l'Ontario (OPSEU) et le Syndicat canadien des
  2657. employés publics
  2658. (CUPE) - qui lui sont affiliées figurait dans une communication
  2659. en date du 15
  2660. novembre 1982. Le CTC a fourni des informations
  2661. supplémentaires dans des
  2662. communications des 15 décembre 1982, 16 février et 28
  2663. octobre 1983 et 10
  2664. janvier 1984. La Confédération mondiale des organisations de
  2665. la profession
  2666. enseignante (CMOPE) a présenté sa plainte au nom des
  2667. organisations qui lui
  2668. sont affiliées - la Fédération des enseignants du Canada et la
  2669. Fédération des
  2670. enseignants de l'Ontario - dans une lettre du 8 février 1983 et
  2671. des
  2672. informations supplémentaires dans une communication du 7
  2673. mars 1983. Le
  2674. Syndicat international des salariés des services (SISS) a
  2675. présenté sa plainte
  2676. dans une lettre du 6 avril 1984. Le gouvernement a adressé
  2677. ses observations
  2678. dans des communications des 25 avril 1983, 7 juin et 16
  2679. octobre 1984.
  2680. B. Problèmes en cause
  2681. 98. Dans ses communications initiales, le CTC a fait valoir
  2682. qu'un nouveau
  2683. texte législatif adopté par l'Ontario "la loi concernant les
  2684. restrictions en
  2685. matière de rémunération dans le secteur public de l'Ontario et
  2686. le contrôle des
  2687. facteurs inflationnistes dans l'économie de la province"
  2688. (connue sous le nom
  2689. de loi no 179) enfreignait les articles 3 et 4 de la convention no
  2690. 87 et
  2691. l'article 4 de la convention no 98. Cette loi, entrée en vigueur
  2692. vers la fin
  2693. de 1982, était applicable aux salariés de la fonction publique
  2694. de l'Ontario,
  2695. de toutes les municipalités de l'Ontario, des corporations, des
  2696. commissions,
  2697. des conseils et des organismes municipaux et provinciaux de
  2698. l'Ontario, y
  2699. compris les universités, les écoles secondaires, les hôpitaux et
  2700. les conseils
  2701. de santé. En particulier, le CTC a allégué que la loi supprimait
  2702. le droit
  2703. qu'avaient les travailleurs visés de s'organiser et de négocier
  2704. collectivement
  2705. parce qu'elle permettait au gouvernement provincial de
  2706. prolonger
  2707. arbitrairement la durée d'application des conventions
  2708. collectives de douze
  2709. mois et, pendant cette période, de fixer unilatéralement les
  2710. augmentations
  2711. salariales des travailleurs. De plus, selon le CTC, le Conseil de
  2712. restriction
  2713. de l'inflation, créé aux termes de la loi, s'était vu accorder de
  2714. très grands
  2715. pouvoirs lui permettant de résoudre les différends sans en
  2716. référer aux
  2717. syndicats ni aux salariés intéressés.
  2718. 99. La CMOPE, dans sa communication du 8 février 1983, a
  2719. déclaré que la loi
  2720. no 179 constituait une ingérence injustifiable dans l'exercice
  2721. du droit de
  2722. négociation. Elle a fait observer que ce texte passait outre à la
  2723. procédure
  2724. normale de négociation collective prévue dans diverses lois
  2725. provinciales
  2726. précises en limitant les salaires du personnel du secteur public,
  2727. y compris
  2728. les enseignants, car il prenait effet "par dérogation à toute
  2729. autre loi, à
  2730. l'exception de la loi canadienne de 1981 sur les droits de la
  2731. personne ...".
  2732. La CMOPE a déclaré en outre que l'Ontario n'était pas touché
  2733. par un état
  2734. d'urgence national suffisamment grave pour justifier cette
  2735. restriction
  2736. importante au droit fondamental de négocier collectivement,
  2737. l'engagement que
  2738. le gouvernement avait pris de réduire l'inflation ne constituant
  2739. pas une
  2740. raison suffisante pour prendre cette mesure de suspension par
  2741. voie
  2742. législative.
  2743. 100. Selon les informations supplémentaires fournies par le
  2744. CTC en date du
  2745. 16 février 1983, la loi avait, en fait, été promulguée le 15
  2746. décembre 1982
  2747. avec effet rétroactif au 21 septembre 1982 et s'appliquait aussi
  2748. à des
  2749. sociétés privées du secteur parapublic qui étaient liées par
  2750. contrat au
  2751. gouvernement provincial ou financées par lui, notamment les
  2752. maisons de repos,
  2753. les services d'ambulances, les entreprises de ramassage des
  2754. ordures ménagères,
  2755. ainsi qu'à certaines organisations de bienfaisance privées et à
  2756. des organismes
  2757. non gouvernementaux tels que le Musée de l'Ontario et le
  2758. Jardin botanique
  2759. (art. 6). L'organisation plaignante a déclaré que le lieutenant-
  2760. gouverneur-en-conseil était en outre habilité à étendre la
  2761. portée de la loi
  2762. par voie réglementaire, sans débat législatif (art. 25).
  2763. 101. Le CTC a expliqué comme suit ce qu'il reprochait à la loi
  2764. no 179: elle
  2765. imposait une majoration salariale de 5 pour cent aux salariés
  2766. intéressés
  2767. pendant une période minimale d'un an (dénommée "l'année de
  2768. contrôle"), quels
  2769. que soient le taux de l'inflation et les accords conclus dans le
  2770. secteur privé
  2771. au sujet des salaires et des avantages accessoires (art. 12);
  2772. elle
  2773. "amoindrissait" ou confisquait, sans compensation, les droits
  2774. contractuels
  2775. dont bénéficiaient les salariés en vertu de conventions
  2776. collectives dont la
  2777. durée d'application s'étendait au-delà du 1er octobre 1983 et
  2778. elle limitait
  2779. les majorations de salaire et les primes pouvant être accordées
  2780. à ces salariés
  2781. en vertu desdites conventions collectives (art. 8, 9, 10, 11 et
  2782. 12); elle
  2783. supprimait le droit de faire grève ou de recourir à un arbitrage
  2784. ayant force
  2785. obligatoire dans le cas où le recours à ces mesures serait lié à
  2786. des
  2787. revendications visant à obtenir des avantages en espèces
  2788. dépassant ceux que la
  2789. loi avait fixés (art. 13); elle semblait permettre aux parties à une
  2790. convention collective de modifier les dispositions non
  2791. pécuniaires prévues par
  2792. la convention, sans toutefois offrir les moyens d'obtenir une
  2793. telle
  2794. modification, étant donné que le droit de grève et le droit de
  2795. recourir à un
  2796. arbitrage ayant force obligatoire étaient supprimés (art. 15); elle
  2797. empêchait
  2798. les syndicats de négocier un premier accord avec un
  2799. employeur lorsque
  2800. l'accréditation de l'unité de négociation était postérieure au 21
  2801. septembre
  2802. 1982, puisque les salariés n'avaient le droit de faire grève ou
  2803. de recourir à
  2804. un arbitrage ayant force obligatoire qu'en liaison avec des
  2805. questions non
  2806. pécuniaires (art. 13, en liaison avec le règlement no 57 de
  2807. l'Ontario, du 21
  2808. janvier 1983, pris en application de la loi et aux termes duquel
  2809. les premiers
  2810. accords conclus après le 21 septembre devaient respecter la
  2811. majoration
  2812. salariale de 5 pour cent fixée par la loi); elle imposait une
  2813. discrimination à
  2814. l'encontre du personnel du secteur public, puisqu'elle
  2815. l'assujettissait aux
  2816. restrictions sumentionnées et que celles-ci n'étaient pas
  2817. applicables aux
  2818. travailleurs du secteur privé. L'organisation plaignante a fait
  2819. observer en
  2820. outre que, même si les parties à une convention collective
  2821. s'étaient mises
  2822. d'accord pour augmenter les salaires ou les primes dans des
  2823. proportions
  2824. dépassant celles que la loi permettait, le Conseil de restriction
  2825. de
  2826. l'inflation - composé de fonctionnaires désignés du
  2827. gouvernement de l'Ontario
  2828. - avait le pouvoir de rendre une ordonnance empêchant les
  2829. parties de mettre en
  2830. oeuvre la convention qu'elles avaient signée (art. 21 de la loi).
  2831. De plus, les
  2832. ordonnances dudit conseil pouvaient être enregistrées auprès
  2833. de la Cour
  2834. suprême de l'Ontario, de telle sorte qu'elles acquéraient force
  2835. de jugement,
  2836. ce qui permettait aux pouvoirs publics d'en obtenir l'application
  2837. par
  2838. n'importe quel moyen judiciaire d'exécution, y compris
  2839. l'emprisonnement et les
  2840. amendes.
  2841. 102. Selon le CTC, les restrictions à la négociation collective
  2842. énumérées
  2843. ci-dessus enfreignaient l'article 4 de la convention no 98 et
  2844. l'article 7 de
  2845. la convention no 151, tandis que l'absence de mécanismes de
  2846. règlement des
  2847. différends enfreignait l'article 8 de la convention no 151. De
  2848. plus, le CTC
  2849. estimait qu'il y avait violation de l'article 3 de la convention no
  2850. 87 du fait
  2851. de la modification qui avait été apportée par voie législative
  2852. aux conditions
  2853. de travail pendant une certaine période et de la suppression
  2854. de la possibilité
  2855. pour les syndicats d'agir par voie de négociation. Le CTC a fait
  2856. observer
  2857. qu'en vertu de l'article 2 d) de la Charte canadienne des droits
  2858. et des
  2859. libertés, qui a été incorporée dans la Constitution fédérale en
  2860. 1981, toutes
  2861. les personnes jouissaient du droit d'organisation au Canada;
  2862. compte tenu du
  2863. nouveau texte législatif promulgué, les fonctionnaires et autres
  2864. personnes
  2865. entrant dans le champ d'application de la loi de l'Ontario
  2866. étaient maintenant
  2867. privés du droit d'organisation.
  2868. 103. Dans sa communication en date du 7 mars 1983, la
  2869. CMOPE a rappelé qu'en
  2870. vertu de la loi de l'Ontario de 1975 concernant les
  2871. négociations collectives
  2872. entre conseils scolaires et enseignants, une procédure de
  2873. négociation
  2874. collective avait été mise en place en vertu de laquelle - si les
  2875. négociations
  2876. initiales entre les enseignants et les conseils qui les
  2877. employaient échouaient
  2878. - les mesures ci-après pouvaient être prises: enquête initiale;
  2879. médiation;
  2880. recours volontaire à un arbitrage ayant force obligatoire; choix
  2881. d'offres
  2882. finales; grève ou lock-out. Selon l'organisation plaignante, la
  2883. négociation
  2884. collective librement menée en vertu de cette procédure n'avait
  2885. pas provoqué de
  2886. pressions salariales inflationnistes; en fait, depuis 1970 et à
  2887. chaque
  2888. trimestre, le taux d'augmentation des salaires des enseignants
  2889. n'avait pas
  2890. suivi le taux de l'inflation, ce qui avait abouti à une diminution
  2891. cumulative
  2892. du pouvoir d'achat de plus de 7 pour cent.
  2893. 104. En outre, la CMOPE a énuméré comme suit ses
  2894. principaux griefs à l'égard
  2895. du nouveau texte de loi: dans les cas où les négociations
  2896. relatives à la
  2897. période contractuelle 1981-82 se poursuivaient, la loi no 179 a
  2898. mis un terme
  2899. aux négociations, a déclaré que la convention précédente
  2900. restait en vigueur
  2901. jusqu'au premier jour anniversaire tombant après le 1er octobre
  2902. 1982 (période
  2903. dite "de transition") et a imposé une majoration salariale
  2904. maximale de 9 pour
  2905. cent. Les conventions collectives déjà en vigueur et arrivant à
  2906. échéance avant
  2907. le 30 septembre 1983 étaient réputées être prorogées pendant
  2908. une période de 12
  2909. mois ("année de contrôle"), avec une majoration salariale de 5
  2910. pour cent.
  2911. Selon la CMOPE, la loi no 179 interdisait aussi le versement
  2912. d'une prime au
  2913. mérite, d'une augmentation liée au service, de primes
  2914. d'ancienneté ou
  2915. d'allocations récompensant un salarié ayant achevé avec
  2916. succès un programme de
  2917. formation ou un cours d'instruction, que le versement de ces
  2918. sommes fût prévu
  2919. dans les conventions collectives ou non, pour autant qu'un tel
  2920. versement
  2921. puisse avoir pour effet de porter la rémunération totale à un
  2922. niveau supérieur
  2923. à 35.000 dollars par an. Cette prorogation, par voie législative,
  2924. des
  2925. conventions collectives supprimait la possibilité de négocier
  2926. même des
  2927. questions non pécuniaires telles que les conditions de travail
  2928. et, comme les
  2929. grèves étaient interdites pendant la durée d'application d'une
  2930. convention, la
  2931. loi no 179 revenait en fait à un déni du droit de grève; ainsi, les
  2932. salariés
  2933. visés n'avaient plus aucun moyen d'apporter une modification
  2934. quelconque à
  2935. leurs conditions de travail.
  2936. 105. Enfin, la CMOPE a mis en cause la composition et les
  2937. procédures du
  2938. Conseil de restriction de l'inflation qui avait été créé en vertu
  2939. de la loi no
  2940. 179 - et en particulier l'absence de recours contre ses
  2941. décisions -, ainsi que
  2942. les vastes pouvoirs conférés au
  2943. lieutenant-gouverneur-en-conseil. La CMOPE a
  2944. déclaré que, lorsque le droit de grève était supprimé, il était
  2945. impératif de
  2946. le remplacer par un mécanisme adéquat de règlement des
  2947. différends - or la loi
  2948. no 179 laissait les salariés touchés sans mécanisme de ce
  2949. genre.
  2950. 106. Dans sa communication du 28 octobre 1983, le CTC
  2951. s'est référé à une
  2952. décision récente de la Cour suprême de l'Ontario (cas
  2953. Broadway Manor) et à la
  2954. déclaration publique par le gouvernement de son intention de
  2955. prolonger la
  2956. durée de son programme de contrôle par la voie législative
  2957. jusqu'au début de
  2958. novembre 1983. La décision judiciaire du 24 octobre 1983
  2959. déclarait nul et non
  2960. avenu l'article 13 b) de la loi no 179 au motif qu'il portait
  2961. atteinte au
  2962. droit d'organisation - comportant le droit de changer d'agent
  2963. négociateur, le
  2964. droit de négociation collective et le droit de grève - qui était
  2965. garanti par
  2966. la Constitution du Canada. Seul cet article du texte législatif
  2967. était
  2968. considéré comme inconstitutionnel car il portait atteinte à la
  2969. négociation
  2970. collective sur les questions autres que la rémunération, ce qui,
  2971. selon la
  2972. Cour, ne pouvait pas se justifier comme étant raisonnablement
  2973. nécessaire pour
  2974. contrôler les augmentations de salaire. Le 10 janvier 1984, le
  2975. CTC a envoyé
  2976. des documents se rapportant au remplacement de la loi no
  2977. 179 par un nouveau
  2978. projet de loi connu sous le nom de projet no 111 qui, s'il était
  2979. adopté,
  2980. prendrait effet au 1er octobre 1983.
  2981. 107. Le 6 avril 1984, le Syndicat international des salariés
  2982. des services a
  2983. présenté son dossier au sujet de la loi no 179, répétant les
  2984. griefs contre la
  2985. loi mentionnés plus haut (elle supprimait le droit de changer
  2986. d'agent
  2987. négociateur, le droit de négocier collectivement sur les
  2988. questions non
  2989. pécuniaires comme sur les questions pécuniaires et le droit de
  2990. faire grève ou
  2991. de recourir à l'arbitrage d'intérêts pour un secteur public
  2992. largement défini),
  2993. et ajoutant que ce texte législatif n'était pas conforme aux
  2994. dispositions de
  2995. la convention no 154.
  2996. 108. Rappelant l'importance de l'indépendance et de
  2997. l'autonomie des parties
  2998. à la négociation collective et le principe de la négociation
  2999. volontaire des
  3000. conventions collectives, reconnus par le Comité de la liberté
  3001. syndicale comme
  3002. étant des éléments fondamentaux de la convention no 98, le
  3003. SISS a soutenu que
  3004. la loi no 179, en empiétant sur les dispositions en vigueur de
  3005. conventions
  3006. collectives librement négociées, constituait une ingérence non
  3007. nécessaire et
  3008. inacceptable dans les résultats de négociations collectives
  3009. libres et
  3010. enfreignait les dispositions de la convention no 154. Il a cité
  3011. l'exemple des
  3012. employés de l'hôpital Sensenbrenner auxquels une commission
  3013. d'arbitrage
  3014. d'intérêts composée de trois personnes avait accordé, au
  3015. cours de l'été 1982,
  3016. une augmentation salariale globale de 11 pour cent et dont
  3017. certains - étant
  3018. parmi les travailleurs les plus mal payés du secteur hospitalier -
  3019. s'étaient
  3020. vu accorder, par sentence arbitrale également, une
  3021. augmentation supplémentaire
  3022. en octobre 1982. Le Conseil de restriction de l'inflation a
  3023. décidé, le 2
  3024. novembre 1983, que les augmentations de salaire spéciales
  3025. prévues par la
  3026. deuxième sentence étaient nulles et non avenues dans la
  3027. mesure où elles
  3028. dépassaient les 5 pour cent prescrits par la loi et il a ordonné
  3029. que les 72
  3030. employés concernés remboursent à l'hôpital la portion des
  3031. salaires perçus qui
  3032. dépassait l'augmentation prescrite. En janvier 1984, le conseil
  3033. a refusé de
  3034. faire droit à une demande du SISS tendant à ce qu'il
  3035. recommande, au titre de
  3036. l'article 17 5) de la loi, que les employés de l'hôpital
  3037. Sensenbrenner
  3038. bénéficient d'une dérogation à l'application de celle-ci. Selon
  3039. le SISS,
  3040. aucune dérogation n'a été accordée aux travailleurs au titre de
  3041. ces
  3042. dispositions de la loi et aucune recommandation n'a été
  3043. formulée en ce sens.
  3044. 109. Enfin, le SISS a critiqué les déclarations du
  3045. gouvernement selon
  3046. lesquelles les conditions d'emploi autres que la rémunération
  3047. n'étaient pas
  3048. modifiées par la loi no 179, qu'il était possible d'établir les
  3049. éléments non
  3050. pécuniaires d'un régime de rémunération en vertu de l'article
  3051. 15 de ladite
  3052. loi, que l'exercice du droit de choisir un agent négociateur était
  3053. seulement
  3054. ajourné d'un an au plus et, ce qui était le plus important
  3055. d'après
  3056. l'organisation plaignante, que, si le champ d'application de la
  3057. négociation
  3058. collective avait été réduit temporairement, il englobait encore
  3059. les dosages
  3060. entre les salaires et les avantages accessoires et la
  3061. détermination des
  3062. conditions d'emploi à caractère non pécuniaire. Le SISS a
  3063. allégué que cette
  3064. dernière justification était totalement inexistante et dépourvue
  3065. de fondement,
  3066. étant donné surtout que la loi suspendait l'obligation de
  3067. négocier de bonne
  3068. foi comme cela était prévu par la loi sur les relations du travail.
  3069. 110. Répondant aux plaintes dans sa communication du 25
  3070. avril 1983, le
  3071. gouvernement a déclaré qu'en adoptant le nouveau texte de
  3072. loi il avait fait
  3073. face à ses responsabilités et adopté une mesure indispensable
  3074. à laquelle il ne
  3075. s'était résolu qu'après avoir étudié une large gamme de
  3076. formules de
  3077. restriction envisageables pour surmonter la pire récession qui
  3078. ait sévi depuis
  3079. la grande crise des années trente. Selon le gouvernement, en
  3080. 1981 et pendant
  3081. la première moitié de 1982, les majorations salariales, dans le
  3082. secteur
  3083. public, avaient été plus élevées que celles qu'avaient
  3084. octroyées les accords
  3085. conclus dans le secteur privé de l'Ontario, et on était fondé à
  3086. penser que les
  3087. prix du secteur public - prix fixés ou directement autorisés par
  3088. des
  3089. ministères de tutelle ou des organismes publics - jouaient un
  3090. rôle majeur dans
  3091. la perpétuation de l'inflation.
  3092. 111. Le gouvernement a fait observer que le programme de
  3093. limitation de la
  3094. rémunération prévoyait une restriction temporaire (dans la
  3095. plupart des cas
  3096. d'un an seulement) des majorations salariales, fixées à 5 ou à 9
  3097. pour cent, et
  3098. permettait la modification, par accord mutuel, des conditions
  3099. de travail
  3100. autres que la rémunération (art. 15 de la loi). Il a déclaré que
  3101. l'article 12
  3102. tenait expressément compte des travailleurs ayant un faible
  3103. revenu et a
  3104. souligné que le lieutenant-gouverneur-en-conseil pouvait, en
  3105. vertu de
  3106. l'article 25, accorder des dérogations à l'application de la loi à
  3107. des régimes
  3108. de rémunération. Selon le gouvernement, l'article 14 permettait
  3109. au Conseil de
  3110. restriction de l'inflation d'autoriser des dosages entre salaires et
  3111. avantages
  3112. accessoires et une liste d'exemples de compensations de ce
  3113. genre était donnée.
  3114. 112. En ce qui concerne l'allégation d'infraction à la
  3115. convention no 87, le
  3116. gouvernement a souligné qu'en fait la loi mise en cause
  3117. favorisait, d'une
  3118. certaine manière, les organisations de travailleurs, puisque les
  3119. travailleurs
  3120. protégés par une convention collective avaient
  3121. automatiquement droit à une
  3122. majoration salariale de 5 pour cent, alors que d'autres salariés
  3123. pouvaient
  3124. recevoir moins (art. 12 1) d)). Pour les travailleurs déjà
  3125. représentés qui
  3126. désiraient changer de représentants accrédités, le
  3127. gouvernement a reconnu que
  3128. la prorogation des conventions collectives en vertu de la loi
  3129. retarderait ce
  3130. changement d'un an au maximum mais a fait observer que,
  3131. dans le cadre du
  3132. système normal de négociation collective, une telle
  3133. modification était de
  3134. toute façon subordonnée au respect d'un délai - fixé, par
  3135. exemple, de 90 à 12
  3136. jours par la loi sur les relations du travail. En ce qui concerne
  3137. les
  3138. restrictions qui auraient été apportées à la liberté d'action des
  3139. syndicats,
  3140. le gouvernement a déclaré que cette allégation était fausse:
  3141. s'il était vrai
  3142. que la portée des négociations avait été temporairement
  3143. réduite, le système de
  3144. négociation collective restait en place et les syndicats avaient
  3145. toute
  3146. latitude pour organiser leurs activités, seuls le droit de grève et
  3147. celui de
  3148. recourir à un arbitrage ayant force obligatoire avaient été
  3149. provisoirement
  3150. suspendus. Un exemple de cette liberté d'action était celui de
  3151. groupes qui
  3152. avaient été accrédités en qualité d'agents négociateurs avant
  3153. le 21 septembre
  3154. 1982 mais qui n'avaient pas encore conclu leur première
  3155. convention collective.
  3156. En vertu du règlement no 57/83 pris en application de la loi,
  3157. ces groupes
  3158. pouvaient recourir à tous les moyens prévus dans la procédure
  3159. normale de
  3160. négociation collective - y compris à la grève - pour aboutir à
  3161. leur première
  3162. convention collective, à condition toutefois que celle-ci prévoit
  3163. une
  3164. majoration salariale de 5 pour cent pour une période de 12
  3165. mois commençant
  3166. entre le 1er octobre 1982 et le 1er octobre 1983 et que les
  3167. dispositions de
  3168. l'ensemble de la convention soient comparables, pour
  3169. l'essentiel, à celles qui
  3170. s'appliquaient aux salariés relevant de marchés de l'emploi
  3171. connexes.
  3172. 113. En ce qui concerne l'infraction alléguée aux
  3173. conventions nos 98 et
  3174. 151, le gouvernement a déclaré que la loi n'interrompait pas le
  3175. fonctionnement
  3176. du mécanisme de négociation volontaire mais se bornait à
  3177. prolonger les
  3178. conventions collectives, avec des dispositions précises
  3179. concernant les
  3180. majorations salariales, pour la période fixée. Le gouvernement
  3181. a souligné que
  3182. les conditions non pécuniaires pouvaient être modifiées par
  3183. accord mutuel et
  3184. que les parties pouvaient convenir de recourir à des
  3185. médiateurs et à des
  3186. arbitres à cet effet. Selon le gouvernement, il y avait eu un
  3187. assez grand
  3188. nombre de cas où la négociation collective avait abouti à
  3189. l'octroi de la
  3190. totalité des 9 pour cent pour la période de 12 mois précédant
  3191. l'année de
  3192. contrôle en application de l'article 10 de la loi. En ce qui
  3193. concerne les
  3194. restrictions apportées aux procédures de règlement des
  3195. différends, le
  3196. gouvernement a déclaré que l'article 14 de la loi permettait au
  3197. Conseil de
  3198. restriction de l'inflation d'arbitrer, en rendant des décisions qui
  3199. étaient
  3200. obligatoires pour les parties et aussi en indiquant ses motifs,
  3201. bien que la
  3202. loi ne lui fît pas obligation de le faire. De plus, le gouvernement
  3203. a fait
  3204. observer qu'en vertu des articles 17 et 25 de la loi, des
  3205. groupes de salariés
  3206. pouvaient être exclus de l'application de la partie II de la loi; il
  3207. a reconnu
  3208. que ces dispositions n'avaient pas encore été utilisées.
  3209. 114. Dans sa communication du 7 juin 1984, le
  3210. gouvernement s'est référé au
  3211. recours présenté contre la décision du tribunal des appels de
  3212. la Cour suprême
  3213. de l'Ontario, en date du 24 octobre 1983, aux termes de
  3214. laquelle l'article 13
  3215. b) de la loi sur la restriction de l'inflation était nul et non avenu.
  3216. Le
  3217. gouvernement avait joint à sa communication des extraits du
  3218. compte rendu
  3219. officiel des débats parlementaires où figuraient des
  3220. déclarations du Procureur
  3221. général de l'Ontario qui correspondaient à la préoccupation du
  3222. gouvernement au
  3223. sujet des "implications de la très large interprétation donnée
  3224. par le tribunal
  3225. à la liberté d'organisation".
  3226. 115. Dans sa communication du 16 octobre 1984, le
  3227. gouvernement s'est référé
  3228. à nouveau à la crise économique de 1981 qui avait conduit
  3229. toutes les provinces
  3230. canadiennes, à l'exception du Manitoba, à adopter des
  3231. programmes de
  3232. restriction dans le secteur public. Selon le gouvernement, 71
  3233. pour cent de
  3234. toutes les conventions et 69 pour cent de tous les salariés
  3235. relevant de la loi
  3236. sur la restriction de l'inflation n'avaient été soumis à des
  3237. contrôles que
  3238. pendant 12 mois. Le gouvernement a également présenté des
  3239. statistiques
  3240. indiquant qu'après l'adoption de la loi il y avait eu une
  3241. diminution
  3242. spectaculaire du taux d'inflation.
  3243. 116. En ce qui concerne la négociation des questions non
  3244. pécuniaires en
  3245. vertu de l'article 15 de la loi, le gouvernement a souligné que
  3246. le ministère
  3247. du Travail de l'Ontario avait continué à offrir et à fournir des
  3248. services de
  3249. médiation aux parties couvertes par la loi qui décidaient, d'un
  3250. commun accord,
  3251. de négocier les questions n'ayant pas trait à la rémunération,
  3252. et que des
  3253. négociations avaient effectivement eu lieu sur des points tels
  3254. que les
  3255. procédures de présentation des réclamations, le nombre
  3256. d'élèves par enseignant
  3257. et la sécurité de l'emploi. Le Conseil de restriction de l'inflation
  3258. avait
  3259. rendu 655 décisions et ordonnances entre le 1er décembre
  3260. 1982 et décembre
  3261. 1983, et un certain nombre d'entre elles découlaient de
  3262. questions qui
  3263. s'étaient posées au cours de la négociation. Le gouvernement
  3264. a affirmé que
  3265. cette médiation était conforme aux exigences de la convention
  3266. no 151.
  3267. 117. Le gouvernement a également souligné que le pouvoir
  3268. qu'avait le
  3269. lieutenant-gouverneur, en vertu de la loi, de mettre fin à
  3270. l'application des
  3271. contrôles pour n'importe quel régime de rémunération avait été
  3272. exercé en ce
  3273. qui concerne certains plans de retraite du personnel municipal
  3274. (règlement no
  3275. 92/83) et pour exclure certains handicapés, des personnes
  3276. non couvertes par la
  3277. législation sur le salaire minimum et des personnes qui
  3278. recevaient moins de 50
  3279. pour cent de leurs indemnités d'un employeur gouvernemental
  3280. (règlements nos
  3281. 819/82 et 844/82). En outre, la loi disposait que le Conseil de
  3282. restriction de
  3283. l'inflation devait enquêter sur les augmentations de prix dans
  3284. les services
  3285. gouvernementaux appelés "services administrés" que lui
  3286. désignait le ministre.
  3287. Par exemple, en 1982, le conseil avait examiné une
  3288. augmentation de prix pour
  3289. Northern and Central Gas qui avait été approuvée par la
  3290. Commission de
  3291. l'énergie de l'Ontario; le conseil a conclu que l'augmentation
  3292. de prix n'était
  3293. pas conforme aux critères du ministre, et le prix proposé a été
  3294. ultérieurement
  3295. diminué afin de satisfaire à ces critères. L'article 29 de la loi
  3296. autorisait
  3297. également le lieutenant-gouverneur à refuser, modifier ou
  3298. retarder une
  3299. augmentation de prix, et la Commission ministérielle des prix
  3300. administrés a
  3301. maintenu une augmentation de 5 pour cent seulement dans
  3302. plus de la moitié des
  3303. cas qui lui avaient été soumis, par exemple pour les frais
  3304. d'assistance
  3305. juridique, les prix de la bière, les tarifs des autocars scolaires,
  3306. les droits
  3307. de scolarité pour les étudiants canadiens, les billets d'entrée
  3308. dans les parcs
  3309. provinciaux, les permis de pêche pour les résidents et les taxes
  3310. téléphoniques
  3311. de la Northern Telephone Ltd. C'est ainsi que 92 pour cent
  3312. des prix
  3313. administrés n'avaient pas dépassé l'augmentation de 5 pour
  3314. cent qui avait été
  3315. fixée comme objectif.
  3316. 118. Le gouvernement a expliqué que le texte législatif qui
  3317. remplaçait la
  3318. loi no 179 à compter d'octobre 1983 - la loi portant examen
  3319. des prix et des
  3320. rémunérations dans le secteur public (connue sous le nom de
  3321. loi no 111) -
  3322. assurait la négociation collective complète des questions tant
  3323. salariales que
  3324. non salariales et autorisait les procédures normales de grève
  3325. ou d'arbitrage
  3326. lorsque les parties ne parvenaient pas à conclure une
  3327. convention collective.
  3328. 119. Enfin, le gouvernement s'est référé aux allégations du
  3329. SISS et a
  3330. déclaré qu'à aucun moment pendant l'application de la loi sur
  3331. la restriction
  3332. de l'inflation le droit des salariés de constituer des
  3333. organisations de leur
  3334. choix, de s'y affilier et de participer pleinement à leurs activités
  3335. n'avait
  3336. été supprimé. Seules des situations telles que celles qui
  3337. s'étaient produites
  3338. dans le cas Broadway Manor porté devant la Cour suprême
  3339. avaient été touchées
  3340. par la loi; dans ce cas, seule l'accréditation avait été retardée
  3341. et, selon le
  3342. droit de l'Ontario, l'accréditation n'était pas une condition
  3343. préalable pour
  3344. la constitution licite d'un "nouveau" syndicat ou la participation
  3345. licite à ce
  3346. syndicat. Le gouvernement a déclaré que son recours devant
  3347. la Cour d'appel de
  3348. l'Ontario contre la décision de première instance dans le cas
  3349. de Broadway
  3350. Manor avait été examiné le 4 juin 1984, mais que la décision
  3351. n'avait pas
  3352. encore été rendue. Quant à la situation dans l'hôpital
  3353. Sensenbrenner, le
  3354. gouvernement a nié que le Conseil de restriction de l'inflation
  3355. ait ordonné le
  3356. remboursement des paiements qui avaient dépassé la limite
  3357. prescrite; le
  3358. conseil avait simplement renvoyé la question aux parties.
  3359. C. Informations reçues pendant la mission
  3360. 120. A Toronto, j'ai eu l'occasion de rencontrer des
  3361. représentants des
  3362. organisations suivantes: le Syndicat international des salariés
  3363. des services
  3364. (local 204), le Syndicat des employés de la fonction publique
  3365. de l'Ontario, le
  3366. Syndicat canadien des employés publics et la Fédération des
  3367. enseignants de
  3368. l'Ontario. Ces entrevues ont été suivies d'une réunion avec un
  3369. certain nombre
  3370. de hauts fonctionnaires gouvernementaux représentant la
  3371. province de l'Ontario.
  3372. Au cours de mes réunions avec les organisations syndicales,
  3373. j'ai reçu des
  3374. informations sous la forme de présentations orales et de
  3375. déclarations par
  3376. écrit. Le gouvernement provincial m'a fait également remettre
  3377. des déclarations
  3378. par écrit et des documents.
  3379. 121. Lors de mes premières rencontres à Ottawa avec le
  3380. Congrès du travail du
  3381. Canada, les problèmes dont il est question dans la plainte
  3382. résultant de
  3383. l'entrée en vigueur, le 21 septembre 1982, de la loi sur la
  3384. restriction de
  3385. l'inflation (loi no 179) ont été mentionnés.
  3386. 122. Etant donné que les arguments avancés par tous les
  3387. syndicats étaient
  3388. pour l'essentiel virtuellement identiques en ce qui concerne ce
  3389. qu'ils
  3390. jugeaient être une violation de leurs droits syndicaux entraînée
  3391. par la
  3392. promulgation de la loi no 179 et, dans une certaine mesure,
  3393. par la
  3394. promulgation ultérieure, le 10 octobre 1983, de la loi portant
  3395. examen des prix
  3396. et des rémunérations dans le secteur public (loi no 111), il
  3397. suffira ici de
  3398. résumer ces arguments et les informations fournies à l'appui.
  3399. 123. Je dois indiquer ici que j'ai fait remarquer à toutes les
  3400. parties
  3401. qu'aucune allégation officielle concernant la loi no 111 n'avait
  3402. été présentée
  3403. au BIT et qu'à strictement parler cette loi se situait en dehors
  3404. de mon
  3405. mandat. Toutefois, comme la loi no 111 est d'un intérêt direct
  3406. pour les
  3407. problèmes exposés dans les plaintes officielles et qu'elle
  3408. représente la
  3409. dernière action du gouvernement en matière de négociation
  3410. collective dans le
  3411. secteur public, j'ai estimé qu'il était approprié de rapporter les
  3412. vues des
  3413. syndicats aussi bien que celles du gouvernement sur ce texte
  3414. législatif
  3415. ultérieur et sur l'effet qu'il a exercé sur la négociation dans le
  3416. secteur
  3417. public. En fait, à l'époque de la mission, la loi no 111, qui avait
  3418. elle-même
  3419. un caractère temporaire, devait expirer.
  3420. 124. Le grief principal de tous les syndicats était que la
  3421. promulgation de
  3422. la loi no 179 en septembre 1982 n'avait pas seulement mis fin
  3423. aux négociations
  3424. collectives, et même aux activités syndicales, pendant près de
  3425. deux ans, mais
  3426. avait également empêché l'entrée en vigueur de conventions
  3427. collectives
  3428. librement conclues avant cette promulgation. De façon
  3429. générale, les
  3430. conventions venant à expiration le 10 octobre 1981 ou après
  3431. cette date étaient
  3432. prolongées de douze mois, à condition que l'augmentation des
  3433. rémunérations ne
  3434. soit pas supérieure à 9 pour cent. Ces conventions à leur
  3435. expiration et toute
  3436. autre convention étaient censées comprendre une disposition
  3437. augmentant les
  3438. taux de rémunération de 5 pour cent pour les douze mois
  3439. suivants. Les
  3440. syndicats ont soutenu qu'il était douteux que la situation
  3441. économique du pays,
  3442. et plus précisément de la province, justifiât ces mesures et
  3443. que, même s'il y
  3444. avait des difficultés économiques, rien ne justifiait ce qui
  3445. équivalait à une
  3446. interdiction virtuelle des activités syndicales pendant tout le
  3447. temps où la
  3448. loi devait demeurer en vigueur. De fait, étant donné que les
  3449. négociations
  3450. collectives étaient exclues, même sur des questions non
  3451. pécuniaires, il ne
  3452. pouvait pas y avoir de recours à l'arbitrage qui était la
  3453. contrepartie admise
  3454. de la suppression du droit de grève dans la fonction publique.
  3455. 125. Le Syndicat international des salariés des services
  3456. (SISS), dont la
  3457. majorité des 33.000 membres était occupée dans le secteur
  3458. des hôpitaux et des
  3459. maisons de repos, a déclaré qu'il avait toujours admis que le
  3460. droit de grève
  3461. soit remplacé par le droit de recourir à l'arbitrage indépendant
  3462. et ayant
  3463. force obligatoire d'une tierce partie. La loi no 179 et,
  3464. ultérieurement, la
  3465. loi no 111 ont démontré que le gouvernement n'était en faveur
  3466. ni du droit de
  3467. grève ni de l'arbitrage véritablement indépendant et impartial.
  3468. Des arguments
  3469. semblables ont été avancés par le Syndicat des employés de
  3470. la fonction
  3471. publique de l'Ontario (OPSEU), représentant 80.000 membres,
  3472. qui a ajouté que
  3473. la limite de 5 pour cent imposée aux augmentations de salaire
  3474. avait élargi le
  3475. fossé entre les bas salaires et les salaires élevés. Environ
  3476. 15.000 de leurs
  3477. membres occupés à temps partiel, pour lesquels de longues
  3478. négociations avaient
  3479. conduit à une convention d'une durée de deux ans prévoyant
  3480. une augmentation de
  3481. 9 pour cent et de 11 pour cent, s'étaient vu refuser
  3482. l'augmentation de 11 pour
  3483. cent quand la loi no 179 avait été promulguée. D'autres
  3484. catégories de
  3485. travailleurs avaient été touchées d'une manière analogue.
  3486. L'OPSEU a également
  3487. présenté des témoins qui ont décrit les conséquences de la loi
  3488. no 179 pour les
  3489. travailleurs des laboratoires et le personnel de soutien des
  3490. universités
  3491. communales (environ 5.000) auxquels avait été garantie,
  3492. pendant les
  3493. négociations de 1981, une augmentation de 20 pour cent de
  3494. leur salaire au
  3495. cours des trois années suivantes. Toutes ces catégories
  3496. avaient pâti du
  3497. contrôle des salaires imposé par la loi no 179.
  3498. 126. Le CUPE a souligné que la loi no 179 n'imposait pas
  3499. seulement des
  3500. restrictions aux rémunérations mais supprimait aussi le droit de
  3501. négocier
  3502. effectivement avec les employeurs au sujet des clauses non
  3503. pécuniaires d'une
  3504. convention collective. Les représentants de ce syndicat ont
  3505. ajouté que cela
  3506. avait été critiqué par la Cour d'appel de l'Ontario (cas
  3507. Broadway Manor) dans
  3508. une décision, rendue le 22 octobre 1984, qui avait d'ailleurs
  3509. peu d'intérêt
  3510. pratique puisque la loi no 179 avait alors été remplacée par
  3511. une autre loi
  3512. (loi no 111). Le CUPE a également souligné que, pendant que
  3513. la loi no 179
  3514. était en vigueur, les travailleurs régis par la loi sur les relations
  3515. professionnelles avaient été effectivement privés du droit de
  3516. grève. En outre,
  3517. la possibilité de recourir à l'arbitrage avait été effectivement
  3518. supprimée
  3519. pour les travailleurs régis par les dispositions ou bien de la loi
  3520. sur
  3521. l'arbitrage des conflits du travail dans les hôpitaux ou bien de
  3522. la loi sur la
  3523. négociation collective des salariés de la Couronne.
  3524. 127. Le CUPE a également expliqué que, par suite de la loi
  3525. no 179, il avait
  3526. affirmé à l'origine que le droit d'organisation avait été violé,
  3527. puisque les
  3528. travailleurs ne pouvaient pas changer d'agent négociateur
  3529. pendant la période
  3530. de contrôle. C'était là une autre question qui a été tranchée
  3531. par la Cour
  3532. d'appel de l'Ontario dans le cas Broadway Manor. La cour a
  3533. statué que la loi
  3534. no 179 avait pour effet non pas de prolonger les conventions
  3535. collectives
  3536. mêmes, mais seulement de prolonger les stipulations de ces
  3537. conventions. La loi
  3538. no 179 ne restreignait donc pas le droit de changer d'agent
  3539. négociateur.
  3540. Toutefois, comme indiqué ci-dessus, la décision dans le cas
  3541. Broadway Manor n'a
  3542. été rendue qu'à l'expiration de la loi no 179.
  3543. 128. Le CUPE a donné un certain nombre d'exemples d'une
  3544. centaine de
  3545. conventions conclues avant la promulgation de la loi no 179
  3546. qui avaient été
  3547. "amoindries" par la loi et a expliqué que bon nombre de
  3548. travailleurs recevant
  3549. un bas salaire avaient été touchés par cette mesure. Ce
  3550. syndicat a également
  3551. indiqué que, dans le secteur hospitalier, il y avait toujours eu
  3552. un étroit
  3553. rapport salarial entre les travailleurs représentés par le CUPE et
  3554. ceux que
  3555. représentait le SISS. Toutefois, le personnel de l'hôpital affilié
  3556. au SISS,
  3557. qui effectue exactement les mêmes tâches que le personnel
  3558. affilié au CUPE, a
  3559. obtenu une augmentation de 11 pour cent dans un contrat
  3560. d'une durée d'une
  3561. année, soumis à l'arbitrage juste avant l'entrée en vigueur de
  3562. la loi no 179,
  3563. alors que le personnel affilié au CUPE n'a pas reçu plus de 9
  3564. pour cent la
  3565. première année de sa convention, conformément aux
  3566. dispositions de la loi no
  3567. 179. Ainsi donc, le personnel affilié au CUPE a été traité
  3568. défavorablement par
  3569. rapport au personnel affilié au SISS, tout simplement parce
  3570. qu'il se trouvait
  3571. que les conventions collectives prenaient fin à des dates
  3572. différentes.
  3573. 129. La Fédération des enseignants de l'Ontario, qui
  3574. représente plus de 104.
  3575. 000 enseignants des écoles primaires et secondaires
  3576. publiques de l'Ontario,
  3577. s'est également plainte que la loi no 179 et, ultérieurement, la
  3578. loi no 111
  3579. avaient eu pour effet de l'emporter sur le processus de
  3580. négociation institué
  3581. en vertu de la loi de 1975 concernant les négociations
  3582. collectives entre
  3583. conseils scolaires et enseignants, modifiée en 1983. A son
  3584. avis, il n'existait
  3585. pas dans l'Ontario d'état d'urgence économique justifiant la
  3586. promulgation de
  3587. la loi no 179. En outre, le droit de grève dont disposent les
  3588. enseignants de
  3589. l'Ontario a été suspendu pendant la période de contrôle des
  3590. salaires imposée
  3591. par la loi. La fédération a fourni des informations détaillées
  3592. indiquant les
  3593. effets de la loi no 179 sur les salaires des enseignants de la
  3594. province.
  3595. 130. La loi de 1983 portant examen des prix et des
  3596. rémunérations dans le
  3597. secteur public (connue sous le nom de loi no 111), qui a
  3598. remplacé la loi no
  3599. 179, n'a pas, au dire des syndicats, rétabli la libre négociation
  3600. collective
  3601. mais a imposé, de manière plus subtile, une nouvelle période
  3602. de restriction
  3603. aux négociations collectives. En fait, la loi no 111 disposait
  3604. que, pendant
  3605. une "période de restriction" de douze mois, le Conseil de
  3606. restriction de
  3607. l'inflation avait le pouvoir de fixer et de contrôler toutes les
  3608. modifications
  3609. de la rémunération dans le même secteur public, au sens
  3610. large, que la loi no
  3611. 179, afin de déterminer si les modifications de la rémunération
  3612. étaient
  3613. conformes à la politique fiscale de la province telle que le
  3614. trésorier de
  3615. l'Ontario l'avait définie. Le trésorier avait annoncé que les
  3616. augmentations de
  3617. la rémunération moyenne devraient être de 5 pour cent au
  3618. maximum pendant cette
  3619. période de restriction. En outre, le gouvernement avait
  3620. annoncé que les
  3621. subventions gouvernementales et les transferts aux institutions
  3622. financées par
  3623. les fonds publics que couvrait la loi no 111, ainsi que les
  3624. indemnités versées
  3625. à ses propres fonctionnaires, permettraient d'augmenter la
  3626. rémunération
  3627. moyenne de 5 pour cent au maximum. Il était possible
  3628. d'accorder des
  3629. augmentations de la rémunération supérieures à 5 pour cent,
  3630. mais le Conseil de
  3631. restriction de l'inflation, le gouvernement et les personnalités
  3632. dirigeantes
  3633. des municipalités n'avaient pas caché que toute tentative de
  3634. dépasser les 5
  3635. pour cent aurait pour résultat de diminuer les paiements de la
  3636. province.
  3637. 131. En présentant ces commentaires au sujet de la loi no
  3638. 111, le CUPE comme
  3639. le SISS ont également rappelé que l'article 10 de la loi
  3640. disposait que les
  3641. arbitres devaient tenir compte de "la capacité de paiement de
  3642. l'employeur ...,
  3643. compte tenu de la politique fiscale existante de la province".
  3644. Selon les
  3645. syndicats, le gouvernement, en se servant de cette
  3646. disposition, pouvait
  3647. déterminer unilatéralement le financement des institutions du
  3648. secteur public
  3649. et le fait que la capacité de paiement de l'employeur reposant
  3650. sur lui
  3651. signifiait dans les faits que le gouvernement pouvait aussi fixer
  3652. unilatéralement les taux de salaire. Cela sapait également toute
  3653. prétention de
  3654. l'indépendance et de l'impartialité du processus d'arbitrage. La
  3655. Fédération
  3656. des enseignants du Canada a présenté des commentaires
  3657. analogues au sujet de la
  3658. loi no 111.
  3659. 132. En outre, tous les syndicats ont mentionné le fait qu'un
  3660. certain nombre
  3661. d'arbitres d'intérêts de renom avaient rejeté le critère de la
  3662. "capacité de
  3663. paiement" pour la détermination des salaires du secteur public.
  3664. On a présenté
  3665. des déclarations d'arbitres de premier plan où ceux-ci
  3666. mentionnaient le
  3667. "climat d'intimidation" que créait la loi et des déclarations
  3668. publiques du
  3669. trésorier aux termes desquelles, si la politique économique du
  3670. gouvernement
  3671. n'était pas suivie, des textes législatifs restrictifs de longue
  3672. durée
  3673. seraient présentés.
  3674. 133. Avec les représentants du gouvernement de la province
  3675. de l'Ontario,
  3676. j'ai soulevé tous les problèmes sur lesquels mon attention avait
  3677. été attirée
  3678. pendant mes réunions avec les divers syndicats du secteur
  3679. public. Les
  3680. représentants du gouvernement ont affirmé que des raisons
  3681. impérieuses
  3682. d'intérêt économique, aux plans national et provincial, avaient
  3683. conduit le
  3684. gouvernement à conclure qu'il devait exercer un contrôle sur
  3685. les salaires dans
  3686. le secteur public. Ils ont expliqué qu'en 1982 l'Ontario
  3687. connaissait la
  3688. récession, une inflation à deux chiffres (de 11 à 12 pour cent),
  3689. une perte de
  3690. compétitivité au plan international et des licenciements dans le
  3691. secteur privé
  3692. (environ 164.000 licenciements dans la seule province de
  3693. l'Ontario). Les
  3694. restrictions imposées aux salaires du secteur public par la loi
  3695. no 179
  3696. constituaient une mesure exceptionnelle. La loi ne visait pas à
  3697. restructurer
  3698. la législation du travail dans la province et ne devait pas
  3699. davantage être
  3700. permanente. La loi no 179 imposait un contrôle sur les salaires
  3701. pendant douze
  3702. mois seulement pour la majorité des salariés, et 31 pour cent
  3703. seulement des
  3704. salariés touchés étaient soumis à la période de transition qui
  3705. pouvait
  3706. prolonger le contrôle des salaires pendant deux ans. Aucun
  3707. salarié n'était
  3708. maintenant affecté par la loi no 179.
  3709. 134. Le texte législatif ultérieur (la loi de 1983 portant examen
  3710. des prix
  3711. et des rémunérations dans le secteur public - loi no 111) fixait
  3712. un critère
  3713. applicable pendant un an aux augmentations de salaire du
  3714. secteur public. Dans
  3715. le cas des salariés du secteur public dont les conventions
  3716. étaient déterminées
  3717. par un arbitrage d'intérêts, le nouveau texte législatif
  3718. demandait aux
  3719. arbitres d'intérêts d'évaluer le coût de toute modification
  3720. apportée aux
  3721. clauses des conventions collectives et de prendre en
  3722. considération la capacité
  3723. de paiement de l'employeur. Dans le cas des salariés du
  3724. secteur public qui
  3725. négociaient des conventions (y compris ceux qui avaient le
  3726. droit de se mettre
  3727. en grève), la loi demandait que soient fournies des informations
  3728. sur tout
  3729. changement apporté au régime de rémunération. Si un arbitre
  3730. décidait ou si les
  3731. parties convenaient d'augmentations de salaire supérieures à
  3732. 5 pour cent, la
  3733. loi ne contenait pas de mécanisme permettant d'annuler les
  3734. augmentations de
  3735. salaire décidées ou négociées. Les représentants du
  3736. gouvernement ont ajouté
  3737. que, depuis que la loi no 111 était caduque, aucune loi sur la
  3738. restriction des
  3739. salaires n'était en vigueur actuellement dans l'Ontario.
  3740. 135. Les représentants du gouvernement ont expliqué en
  3741. outre qu'au moment
  3742. de l'examen de la situation économique en 1982 plusieurs
  3743. actions possibles
  3744. avaient été envisagées, y compris un programme national de
  3745. contrôle des
  3746. salaires et des prix. Comme il n'avait pas été possible d'arriver
  3747. sur ce point
  3748. à un consensus avec les autres provinces et comme des
  3749. difficultés se posaient
  3750. en raison de la nature même de la province de l'Ontario en ce
  3751. qui concerne un
  3752. programme éventuel applicable aux travailleurs du secteur
  3753. public et du secteur
  3754. privé, il avait été décidé d'adopter un programme de contrôle
  3755. des prix et des
  3756. salaires dans le seul secteur public.
  3757. 136. Le gouvernement a souligné qu'on avait prévu des
  3758. sauvegardes pour
  3759. protéger le niveau de vie des travailleurs. Outre le contrôle des
  3760. prix, le
  3761. taux d'inflation avait été abaissé (à moins de 11 pour cent
  3762. pendant le
  3763. troisième trimestre de 1982). Depuis l'introduction de la loi no
  3764. 179,
  3765. l'inflation avait continué à décroître, et elle n'était que de 3,6
  3766. pour cent
  3767. au premier trimestre de 1985. La sécurité de l'emploi et le
  3768. volume de l'emploi
  3769. ont également été maintenus dans le secteur public à une
  3770. époque où le secteur
  3771. privé connaissait de nombreux licenciements. Les salariés
  3772. couverts par la loi
  3773. bénéficiaient aussi de la garantie d'augmentations équitables
  3774. et raisonnables.
  3775. A ce sujet, le gouvernement a fourni des informations
  3776. statistiques indiquant
  3777. que les augmentations accordées en vertu de la loi étaient
  3778. comparables aux
  3779. augmentations salariales du secteur privé et leur étaient en fait
  3780. supérieures
  3781. depuis le quatrième trimestre de 1983. La loi no 179 contenait
  3782. également des
  3783. clauses d'augmentations minimales en faveur des salariés à
  3784. faible revenu et
  3785. des ajustements de salaire. Elle autorisait également les
  3786. syndicats
  3787. nouvellement accrédités, c'est-à-dire ceux qui l'avaient été
  3788. avant la
  3789. promulgation de la loi no 179, à négocier librement des
  3790. augmentations de
  3791. rémunération pour la période de leurs premières conventions
  3792. qui menait à la
  3793. période de contrôle. La loi maintenait aussi la possibilité de
  3794. modifier, par
  3795. accord mutuel, les questions non pécuniaires d'une
  3796. convention collective,
  3797. comme l'a démontré par la suite la décision en ce sens de la
  3798. Cour d'appel de
  3799. l'Ontario dans le cas Broadway Manor.
  3800. 137. Se référant à la plainte du SISS selon laquelle la loi no
  3801. 179 avait
  3802. suspendu le droit de changer d'agent négociateur, le droit de
  3803. négocier
  3804. collectivement au sujet des questions non pécuniaires et le
  3805. droit de grève ou
  3806. de recourir à l'arbitrage d'intérêts, les représentants du
  3807. gouvernement ont
  3808. mentionné la décision de la cour d'appel, dans le cas
  3809. Broadway Manor, qui
  3810. établissait que les allégations du syndicat étaient erronées. La
  3811. cour avait
  3812. toutefois exprimé des doutes sur la question de savoir si les
  3813. salariés
  3814. pouvaient déclencher une grève ou recourir à l'arbitrage sans
  3815. rendre
  3816. effectivement de décision sur ce point.
  3817. 138. Le gouvernement a ajouté que de très nombreuses
  3818. consultations avaient
  3819. eu lieu avant la promulgation de la loi no 179 et qu'il s'était
  3820. dégagé un
  3821. large consensus politique en faveur de son adoption. Le
  3822. gouvernement avait été
  3823. satisfait des résultats de la loi no 179 et l'avait remplacée par la
  3824. loi no
  3825. 111 qui n'était pas une mesure exceptionnelle prise en période
  3826. de crise. La
  3827. loi no 111 était conçue comme un pas de plus vers une
  3828. situation normale et le
  3829. rétablissement des négociations collectives dans le secteur
  3830. public. Si le
  3831. Conseil de restriction de l'inflation était maintenu, c'était
  3832. uniquement pour
  3833. qu'il puisse participer au règlement des litiges en cours.
  3834. 139. En ce qui concerne l'obligation pour les arbitres
  3835. d'intérêts, aux
  3836. termes de la loi no 111, de tenir compte de la politique fiscale
  3837. de la
  3838. province et de la capacité de paiement de l'employeur, les
  3839. représentants du
  3840. gouvernement ont souligné que les sommes transférées aux
  3841. institutions
  3842. publiques avaient toujours été fixées par le gouvernement. Aux
  3843. termes de la
  3844. loi no 111, les montants étaient clairement indiqués. Dans les
  3845. cas où la norme
  3846. des 5 pour cent serait dépassée par les arbitres ou par les
  3847. besoins d'une
  3848. institution publique, on pourrait trouver les moyens de fournir
  3849. des fonds
  3850. supplémentaires.
  3851. 140. En ce qui concerne la préoccupation des syndicats,
  3852. pour lesquels le
  3853. gouvernement semblait s'être constamment efforcé de trouver
  3854. des moyens de
  3855. réduire la flexibilité et d'exercer des pressions sur les arbitres,
  3856. ce qui
  3857. érodait le système d'arbitrage et diminuait la confiance en ce
  3858. système, les
  3859. représentants du gouvernement ont souligné que la loi no 111
  3860. demandait
  3861. simplement aux arbitres de garder présents à l'esprit certains
  3862. critères.
  3863. Nombre d'entre eux ne se sentaient pas liés par ces critères et
  3864. il avait été
  3865. rendu, en 1984-85, quelque 200 sentences qui, dans leur
  3866. majorité, dépassaient
  3867. les règlements négociés. En vertu de la loi sur les relations
  3868. professionnelles, il avait été constitué une liste d'arbitres pour
  3869. régler les
  3870. litiges nés de doléances, et c'était généralement sur cette liste
  3871. que les
  3872. arbitres étaient choisis pour régler les litiges nés de questions
  3873. d'intérêts.
  3874. Le gouvernement a admis que les informations dont il disposait
  3875. sur les accords
  3876. salariaux dans certains secteurs (par exemple, dans les
  3877. municipalités) étaient
  3878. insuffisantes, mais il a indiqué qu'il s'efforçait de résoudre ce
  3879. problème.
  3880. 141. Au sujet des "annulations", le gouvernement a admis
  3881. que cette mesure
  3882. avait été jugée très dure, mais il a déclaré à nouveau qu'elles
  3883. avaient été
  3884. dictées par une nécessité économique. Le gouvernement a
  3885. également souligné
  3886. qu'à sa connaissance, hormis un ou deux cas, l'absence de
  3887. négociation sur les
  3888. questions non pécuniaires n'avait pas été un problème
  3889. important.
  3890. 142. Le gouvernement a également admis que la loi no 179
  3891. pourrait exercer
  3892. des effets à long terme, par exemple sur les programmes
  3893. d'évaluation des
  3894. emplois et de classification des tâches, mais le rétablissement
  3895. des
  3896. négociations collectives devait résoudre toute anomalie
  3897. restante. Il était
  3898. également certain que, dans certains cas, les employeurs
  3899. avaient tiré avantage
  3900. de la loi en refusant de payer les augmentations de salaire
  3901. négociées. C'était
  3902. là, toutefois, une question qui relevait des tribunaux et sur
  3903. laquelle le
  3904. gouvernement avait peu d'emprise.
  3905. 143. Se référant à nouveau à la décision rendue dans le cas
  3906. Broadway Manor
  3907. et au problème du changement d'agent négociateur pendant
  3908. la période de
  3909. contrôle d'une année instituée par la loi no 179, le
  3910. gouvernement a expliqué
  3911. qu'il avait examiné cette question avant l'adoption de la loi.
  3912. Etant donné
  3913. qu'il était inapproprié de changer d'agent négociateur pendant
  3914. cette période,
  3915. puisque le syndicat entrant ne serait pas en mesure de
  3916. négocier, le
  3917. gouvernement avait examiné cette question avec les
  3918. syndicats, qui avaient
  3919. réagi au problème de façon mitigée. De toute manière, selon le
  3920. gouvernement,
  3921. étant donné que les syndicats de la fonction publique étaient
  3922. solidement
  3923. établis, il était peu vraisemblable qu'un concurrent se présente
  3924. pendant la
  3925. période de contrôle. Le gouvernement a rappelé que les
  3926. syndicats nouvellement
  3927. accrédités n'étaient pas touchés par ce qui était, comme
  3928. l'avait prouvé
  3929. ultérieurement la décision rendue dans le cas Broadway
  3930. Manor, un faux
  3931. problème.
  3932. D. Remarques finales
  3933. 144. Un trait évident de la présente plainte tient à ce qu'elle
  3934. concerne
  3935. les dispositions et les effets de la loi de 1982 sur la restriction
  3936. de
  3937. l'inflation (loi no 179), qui n'est plus en vigueur. En fait, cette loi
  3938. a été
  3939. suivie de la loi no 111 qui, elle-même, devait expirer à la fin de
  3940. septembre
  3941. 1985. A l'heure actuelle, aucun autre texte de loi n'a été
  3942. proposé dans ce
  3943. domaine. Il importe néanmoins d'évaluer la loi no 179 au
  3944. regard des normes de
  3945. l'OIT. Bien que ce texte ne soit plus en vigueur, exception faite
  3946. de certaines
  3947. questions résiduelles auxquelles il s'applique encore pour des
  3948. raisons
  3949. techniques, les opinions divergent toujours fortement dans la
  3950. province quant à
  3951. sa nature et à ses effets. En outre, il a été suggéré que
  3952. certaines pratiques
  3953. introduites par cette loi se perpétueront du fait d'une action
  3954. administrative
  3955. informelle. Ce point doit lui aussi être examiné.
  3956. 145. La loi no 179 a été promulguée pour stopper l'inflation.
  3957. Elle a eu
  3958. pour effet d'imposer un contrôle des salaires assez strict dans
  3959. le secteur
  3960. public. Ce contrôle se fondait sur une "année de contrôle" et
  3961. une majoration
  3962. salariale limitée à 5 pour cent et s'assortissait de contrôles
  3963. moins sévères
  3964. admettant un plafond de 9 pour cent pour les majorations
  3965. salariales.
  3966. L'ensemble du contrôle pouvait toucher une unité de
  3967. négociation pendant une
  3968. période de deux ans. Il a été suggéré que le gouvernement
  3969. n'avait pas réussi à
  3970. établir qu'il y avait effectivement crise économique. La
  3971. compréhension du
  3972. problème et les recherches à son sujet avaient été
  3973. insuffisantes. Il a été
  3974. également dit que les augmentations salariales auraient
  3975. diminué année après
  3976. année sans recours à la législation. Ces deux convictions sont
  3977. évidemment des
  3978. questions d'opinion. Les données fondamentales ne sont pas
  3979. sérieusement
  3980. contestées. Il y a une différence d'interprétation manifeste
  3981. entre les
  3982. syndicats qui ont présenté ces arguments et le gouvernement.
  3983. Il a été suggéré
  3984. que de telles divergences d'opinion devraient être résolues par
  3985. un mécanisme
  3986. indépendant tel que les tribunaux. Il est difficile de voir la
  3987. nécessité en
  3988. principe d'une telle entrave à l'exercice de la volonté politique.
  3989. Les
  3990. occasions ne manquent pas de mettre les questions dont il
  3991. s'agit à l'épreuve
  3992. publique du débat politique.
  3993. 146. Etant donné que le secteur public était choisi tout
  3994. spécialement pour
  3995. l'introduction d'un contrôle spécial dans l'hypothèse que les
  3996. salaires du
  3997. secteur privé suivraient la tendance ainsi établie, il est
  3998. essentiel de
  3999. réserver tout le temps voulu à la consultation. Si on omettait de
  4000. le faire,
  4001. cela pourrait indiquer que l'action était en fait précipitée et
  4002. menée de parti
  4003. pris. Il n'y a pas eu de plainte alléguant l'absence de
  4004. consultation. Ce qui
  4005. est dit, c'est que les opinions des syndicats n'ont pas eu d'effet
  4006. sensible
  4007. sur l'attitude et les actions du gouvernement. C'est là tout autre
  4008. chose.
  4009. 147. Jusqu'à maintenant, les présentes remarques portent
  4010. sur les aspects
  4011. politiques de la préoccupation qui a été exprimée. Toutefois,
  4012. les actions
  4013. soulèvent certainement des considérations pratiques et
  4014. juridiques. Ce qui est
  4015. le plus évident c'est l'impact que la loi a exercé sur les
  4016. conventions
  4017. collectives existantes. Celles-ci ont subi, dans bien des cas,
  4018. des
  4019. modifications, du fait en particulier que la loi n'autorisait qu'une
  4020. augmentation salariale inférieure. Un juriste dirait qu'il s'agit
  4021. d'un retrait
  4022. de droits.
  4023. 148. Il est difficile d'éviter ce résultat lorsqu'on impose un
  4024. régime de
  4025. restriction destiné à avoir des effets rapides. Le gouvernement
  4026. était
  4027. conscient du problème et avait décidé d'appliquer ce qu'il
  4028. considérait comme
  4029. une "justice rudimentaire". En réalité, on s'était efforcé
  4030. d'atténuer
  4031. certaines des conséquences. le plus important était d'accorder
  4032. une certaine
  4033. protection à la première convention, c'est-à-dire la première
  4034. convention
  4035. conclue après qu'un syndicat avait obtenu les droits de
  4036. négociation. Ces
  4037. conventions comportent souvent de notables améliorations
  4038. des conditions de
  4039. travail. Cela a été reconnu par la loi et l'impact de la norme des
  4040. 5 pour cent
  4041. a été retardé pour que la première convention puisse exercer
  4042. ses effets.
  4043. 149. Malgré cette préoccupation, la loi semble avoir eu sur la
  4044. libre
  4045. négociation collective un impact plus considérable que ce qui
  4046. était voulu ou
  4047. prévu. Trois aspects de cet impact semblent être tout
  4048. particulièrement
  4049. importants: l'"effet de refroidissement" sur les négociations
  4050. collectives en
  4051. général, le préjudice causé aux politiques que poursuivaient
  4052. les syndicats
  4053. contrat après contrat et le mécanisme de l'accréditation
  4054. pendant la période
  4055. dite "ouverte".
  4056. 150. Bien que la loi n'ait été applicable qu'aux questions
  4057. pécuniaires, elle
  4058. semble avoir exercé un effet sur les questions non couvertes
  4059. par la loi que
  4060. les parties étaient libres de négocier. Cela était en partie
  4061. d'autant plus
  4062. vraisemblable qu'il y avait eu anticipation de la conversion des
  4063. négociations
  4064. aux questions non pécuniaires. On avait pris quelques
  4065. mesures pour empêcher
  4066. que cela ne soit utilisé pour saper le contrôle financier projeté.
  4067. Il n'est
  4068. guère possible de douter que certaines questions en ont
  4069. souffert, les
  4070. questions d'hygiène et de sécurité se présentant aussitôt à
  4071. l'esprit. Le
  4072. problème peut maintenant être considéré à la lumière de
  4073. l'expérience; il sera
  4074. possible de s'y attaquer si la nécessité s'en présente à l'avenir.
  4075. Il convient
  4076. de s'attacher tout particulièrement à l'accessibilité des
  4077. mécanismes de
  4078. solution des conflits afin que des relations normales puissent
  4079. se poursuivre
  4080. et ne soient entravées que par les restrictions minimales
  4081. qu'exige la
  4082. réalisation des objets des mesures d'urgence.
  4083. 151. Les objectifs généraux que les syndicats du secteur
  4084. public
  4085. s'efforçaient d'atteindre et qui ont dû passer au second plan
  4086. sont, par
  4087. exemple, l'amélioration des bas salaires et l'égalité pour les
  4088. femmes. Ces
  4089. deux objectifs sont légitimes, et même louables. Il est certain
  4090. que la loi no
  4091. 179 ne facilitait pas leur réalisation. Le plus manifeste c'est
  4092. l'utilisation
  4093. d'une norme pour les augmentations de salaire exprimée en
  4094. pourcentage de
  4095. préférence à une augmentation uniforme. Le gouvernement
  4096. admet que cette
  4097. conséquence s'est produite et fait remarquer que certaines
  4098. mesures avaient été
  4099. prises pour atténuer ce résultat. Certaines des dispositions
  4100. visaient
  4101. effectivement à accorder des avantages spéciaux à ceux qui
  4102. avaient de bas
  4103. salaires; les plus importants ont été, dans une certaine mesure,
  4104. limités.
  4105. Avait-on ou non fait assez - c'est là un point contesté. Il
  4106. semble que l'on
  4107. admette la nécessité de tenir compte de ces considérations
  4108. lors de
  4109. l'élaboration d'un texte législatif. Cela semble être un point
  4110. important.
  4111. 152. Le troisième exemple du vaste impact de la loi concerne
  4112. la "fermeture"
  4113. de la période "ouverte" qui caractérise le système canadien
  4114. de relations
  4115. professionnelles. La loi était censée fermer la période
  4116. "ouverte" de l'année
  4117. de contrôle. On a pensé que cela enlevait aux syndicats le
  4118. droit d'obtenir
  4119. l'accréditation. La question a été portée devant les tribunaux.
  4120. Ici encore, il
  4121. est certain que l'objet de la disposition était d'avoir des
  4122. relations
  4123. professionnelles aussi paisibles que possible pendant la
  4124. période de
  4125. restriction. La question soulevée est de savoir si cette action
  4126. était commode
  4127. et utile plutôt que nécessaire. Il faudrait connaître de façon
  4128. détaillée ce
  4129. qu'ont été les effets précis pendant que la loi no 179 était en
  4130. vigueur mais,
  4131. à première vue, la limitation semble viser à éviter des troubles
  4132. plutôt qu'à
  4133. obtenir un élément essentiel du plan de limitation.
  4134. 153. Au sujet du cas Broadway Manor, deux commentaires
  4135. seront peut-être
  4136. utiles. La décision a été qu'en fait la période "ouverte" n'était
  4137. pas fermée -
  4138. une distinction était faite entre les conditions qui étaient
  4139. maintenues et la
  4140. convention collective qui ne l'était pas. La décision dépendait
  4141. évidemment du
  4142. libellé exact des dispositions de la loi no 179. En cela, elle
  4143. présente peu
  4144. d'intérêt, mais elle suscite de plus larges considérations. Le
  4145. cas démontre
  4146. l'importance d'une discussion préalable de toutes les
  4147. conséquences possibles
  4148. du texte législatif qui est proposé, c'est-à-dire l'importance de la
  4149. consultation. Ce qui est décidé alors sera appliqué. D'un autre
  4150. côté, recourir
  4151. aux tribunaux pour éclaircir ou interpréter le texte législatif
  4152. permet
  4153. peut-être d'apporter des modifications, mais celles-ci se
  4154. révéleront presque
  4155. toujours inapplicables puisqu'il est improbable que la décision
  4156. soit rendue
  4157. pendant l'existence de la loi qui est de courte durée. La
  4158. consultation, pas
  4159. seulement sur les grandes questions - comme la promulgation
  4160. d'une disposition
  4161. -, peut conduire simplement à une réaffirmation de la politique
  4162. proposée mais,
  4163. si elle porte aussi sur les conséquences pratiques - ce qui en
  4164. fait va
  4165. probablement se produire - risque de conduire à des
  4166. modifications sensibles.
  4167. 154. L'une des considérations les plus claires et les plus
  4168. importantes que
  4169. les divers syndicats nous ont présentées était l'impact qu'a
  4170. exercé la loi sur
  4171. le mécanisme normal des relations professionnelles. Divers
  4172. exemples ont été
  4173. donnés. Le sentiment était que l'employeur, lorsque sa
  4174. capacité financière de
  4175. satisfaire les revendications syndicales était sévèrement limitée
  4176. par la
  4177. politique fiscale du gouvernement, était dans l'impossibilité de
  4178. négocier en
  4179. toute liberté. Sa flexibilité pouvait avoir une portée plus ou
  4180. moins grande,
  4181. mais son attitude était considérablement modifiée. Il y en avait
  4182. des signes
  4183. dans certains des exemples présentés, mais les informations
  4184. étaient trop
  4185. insuffisantes pour que l'on puisse apprécier avec quelque
  4186. certitude la
  4187. situation dans la province de l'Ontario.
  4188. 155. Les problèmes que la législation et la pratique qui en est
  4189. résultée ont
  4190. entraînés pour l'élément important du système - l'arbitrage
  4191. indépendant - sont
  4192. beaucoup plus clairs et ont été exposés avec beaucoup plus
  4193. de force. Cependant
  4194. la période où la loi no 179 a exercé ses effets sur la
  4195. négociation collective,
  4196. des normes ont, bien entendu, remplacé effectivement
  4197. l'arbitrage. Depuis lors,
  4198. en vertu de la loi no 111, l'idée d'une norme ou d'une
  4199. augmentation maximum
  4200. souhaitable formulée par le gouvernement s'est perpétuée. Les
  4201. arbitres
  4202. reçoivent des indications très précises de l'opinion du
  4203. gouvernement, et on
  4204. s'attend qu'ils en tiennent compte. Il y a une grande
  4205. divergence de vues au
  4206. sujet des effets de cette pratique qui semble appelée à se
  4207. poursuivre. Il doit
  4208. être vrai que les arbitres pensent toujours à la situation
  4209. économique dans
  4210. laquelle ils vont rendre leur sentence. Bon nombre d'arbitres
  4211. indépendants
  4212. sont des universitaires, mais peu d'entre eux vivent dans une
  4213. tour d'ivoire,
  4214. comme on le suppose habituellement, au point de ne pas avoir
  4215. clairement
  4216. conscience de ces facteurs. Au cas, très invraisemblable, où
  4217. ils ne
  4218. l'auraient pas, les parties ne manqueront pas de soulever la
  4219. question dans
  4220. leurs déclarations. D'un autre côté, publier une norme peut
  4221. exercer un certain
  4222. effet sur l'arbitre. Là encore, la présentation de cas particuliers
  4223. n'apporte
  4224. aucune clarté car, malheureusement, il n'est pas possible de
  4225. présumer que,
  4226. lorsqu'un arbitre déclare qu'il a "tenu compte" de tel ou tel
  4227. chiffre, il
  4228. donne à comprendre qu'il a été grandement influencé par ce
  4229. chiffre ou ne l'a
  4230. pas été. Dans de nombreux cas, l'arbitre a manifesté du
  4231. scepticisme. Par
  4232. contre, il semble que plusieurs arbitres aient refusé d'agir parce
  4233. qu'ils
  4234. estimaient que leur liberté d'action était entravée.
  4235. 156. L'indépendance du système d'arbitrage est de la plus
  4236. haute importance.
  4237. C'est la caractéristique du système appliqué dans le secteur
  4238. public qui
  4239. s'efforce de compenser la non-existence du droit de grève.
  4240. C'est là une
  4241. équation dont ceux qui viennent témoigner n'admettent pas
  4242. tous qu'elle est
  4243. juste ou convenable, mais cette question ne se pose pas ici.
  4244. Ce qui est
  4245. important, c'est que, lorsque ce système est appliqué,
  4246. l'arbitrage doit être
  4247. indépendant. La confiance dans l'arbitrage est facilement
  4248. détruite, si bien
  4249. que tout doit être fait pour ne laisser planer aucun doute sur
  4250. son
  4251. indépendance. Il ne s'agit pas de tester ou de contrôler sa
  4252. validité. Il est
  4253. indispensable de voir si l'on peut prendre des mesures
  4254. appropriées pour
  4255. renforcer l'indépendance. Un argument significatif qui a été
  4256. avancé concerne
  4257. la nomination des arbitres. Si la chose est possible, cette
  4258. nomination devrait
  4259. être effectuée par un organe ne dépendant pas du
  4260. gouvernement, un conseil des
  4261. relations professionnelles, un tribunal, etc., selon les structures
  4262. particulières. C'est là une question qui demanderait à être
  4263. sérieusement
  4264. examinée par les autorités provinciales.
  4265. 157. Enfin, il convient de noter que la façon dont ces
  4266. remarques seront
  4267. interprétées dépend, pour une large part, du maintien ou non
  4268. de la restriction
  4269. de l'inflation obtenue en exerçant une pression sur le secteur
  4270. public en
  4271. particulier. On a déjà noté que la loi no 111 ne semble pas
  4272. avoir de
  4273. successeur. Si la politique du gouvernement demeure la
  4274. même, si tant est qu'il
  4275. en soit ainsi, elle se poursuivra au moyen de mesures
  4276. administratives et
  4277. pratiques. Au vu de l'expérience, ces mesures peuvent jouer
  4278. un rôle important
  4279. dans la politique du gouvernement. Si tel est le cas, étant
  4280. donné que la
  4281. méthode adoptée est de caractère informel, il sera essentiel de
  4282. se préoccuper
  4283. encore plus de faire en sorte qu'il ne soit pas porté préjudice
  4284. aux structures
  4285. des relations professionnelles, tout particulièrement au droit de
  4286. demander
  4287. l'accréditation, de négocier collectivement et de bénéficier
  4288. d'un arbitrage
  4289. véritablement indépendant. Les appréhensions des syndicats
  4290. semblent devancer
  4291. les faits - et on le comprend. La conscience de ces craintes et
  4292. la discussion
  4293. des problèmes devraient contribuer à éviter de porter tort sans
  4294. le vouloir aux
  4295. sauvegardes d'importance vitale qu'assure la législation
  4296. actuelle de
  4297. l'Ontario.
  4298. VI. Cas de Terre-Neuve: no 1260
  4299. A. Introduction
  4300. 158. L'origine de ce cas remonte à une plainte présentée le
  4301. 9 février 1984
  4302. par le Congrès du travail du Canada au nom de l'Association
  4303. du personnel des
  4304. services publics de Terre-Neuve (NAPE), qui est une des
  4305. branches du Syndicat
  4306. national du personnel des gouvernements provinciaux
  4307. (NUPGE), lui-même affilié
  4308. au CTC. Le gouvernement a présenté ses observations en
  4309. réponse à la plainte
  4310. dans une communication du 29 mai 1984.
  4311. B. Problèmes en cause
  4312. 159. Le 19 août 1983, une loi (connue sous le nom de "loi
  4313. no 59") a été
  4314. promulguée; elle apportait des modifications à la loi de 1973
  4315. sur les
  4316. négociations collectives dans la fonction publique. Selon le
  4317. CTC, ces
  4318. modifications sont contraires aux dispositions des conventions
  4319. de l'OIT nos
  4320. 87, 98 et 151 sur trois points: la définition de l'"employé public"
  4321. contenue à
  4322. l'article 2 1) c) de la loi, la désignation des "employés publics
  4323. exerçant de
  4324. fonctions essentielles" (art. 10) et la limitation du droit de grève
  4325. (art. 10
  4326. 12), 23 et 24). Selon le CTC, la loi no 59 constituait le plus
  4327. récent d'une
  4328. série de textes antisyndicaux restrictifs promulgués pour
  4329. instituer un
  4330. contrôle des salaires dans la fonction publique et pour limiter
  4331. les
  4332. possibilités de recours au droit de grève.
  4333. 160. Le gouvernement de Terre-Neuve a expliqué que, de
  4334. 1973 (date à laquelle
  4335. la loi sur les négociations collectives dans la fonction publique
  4336. avait
  4337. accordé le droit de négociation aux fonctionnaires du
  4338. gouvernement de
  4339. Terre-Neuve) à 1983, il était apparu à l'évidence que l'article
  4340. 10 de la loi
  4341. était resté sans effet puisque, dans la quasi-totalité des cas où
  4342. cet article
  4343. avait été invoqué devant la Commission des relations du
  4344. travail, celle-ci ou
  4345. encore les tribunaux avaient jugé le cas défectueux sur tel ou
  4346. tel point.
  4347. L'article 10 devait donc être modifié de façon à prévoir la
  4348. désignation des
  4349. employés publics exerçant des fonctions essentielles dont les
  4350. services étaien
  4351. nécessaires à la santé, à la sûreté ou à la sécurité publiques.
  4352. En outre, les
  4353. syndicats continuaient à demander à la Commission des
  4354. relations du travail
  4355. d'inclure dans les unités de négociation des fonctionnaires
  4356. d'encadrement et
  4357. des fonctionnaires chargés de tâches "confidentielles" et, bien
  4358. que la
  4359. commission ait généralement refusé d'accéder à ces
  4360. demandes, il a été décidé
  4361. que la loi devrait également être modifiée pour combler une
  4362. lacune de la
  4363. législation et énoncer explicitement les exclusions. Selon le
  4364. gouvernement,
  4365. aucune modification n'avait été apportée à la législation de
  4366. base
  4367. antérieurement au projet de loi no 59. A la suite des
  4368. discussions
  4369. préliminaires engagées avec divers syndicats de la fonction
  4370. publique et en
  4371. raison des préoccupations exprimées en ce qui concernait
  4372. particulièrement
  4373. trois articles, il avait été décidé que le processus d'adoption du
  4374. projet de
  4375. loi serait mis en oeuvre. Le ministre du Travail et de la
  4376. Main-d'oeuvre avait
  4377. pris alors contact avec chacun des syndicats de la fonction
  4378. publique et avait
  4379. invité ceux-ci à présenter leurs recommandations au
  4380. gouvernement sur les
  4381. points objets de leurs préoccupations. Le gouvernement
  4382. n'avait reçu ni
  4383. propositions concrètes ni communications écrites et, en
  4384. conséquence, la loi
  4385. modificatrice avait été adoptée le 19 août 1983 et était entrée
  4386. en vigueur le
  4387. 1er septembre suivant.
  4388. a) Définition de l'"employé public"
  4389. 161. Le CTC a soutenu que la définition modifiée des mots
  4390. "employé public"
  4391. avait conduit à l'exclusion de plus de 2.000 fonctionnaires
  4392. publics de
  4393. l'affiliation à l'Association nationale du personnel des services
  4394. publics
  4395. (NAPE) et les avait empêchés d'adhérer à tout autre syndicat.
  4396. Ces
  4397. fonctionnaires comprenaient les juristes du ministère de la
  4398. Justice, le
  4399. personnel de l'Assemblée législative, les cadres moyens et les
  4400. conseillers du
  4401. ministère de la Justice et pouvaient comprendre également un
  4402. certain nombre de
  4403. fonctionnaires alors affiliés à l'organisme qui était l'agent
  4404. négociateur
  4405. représentant les fonctionnaires du gouvernement provincial,
  4406. en l'occurrence la
  4407. NAPE. Le plaignant s'est insurgé particulièrement contre le
  4408. nouvel article 2
  4409. 1) i), xii) qui interdit expressément aux personnes engagées
  4410. dans le cadre de
  4411. programmes financés par des subventions gouvernementales
  4412. et qui travaillent
  4413. pour le compte du gouvernement provincial d'adhérer à un
  4414. syndicat. Il
  4415. soupçonnait le gouvernement provincial d'avoir l'intention de
  4416. recourir à cet
  4417. alinéa pour licencier des fonctionnaires permanents et les
  4418. remplacer par des
  4419. employés non syndiqués qui effectueraient des tâches
  4420. confiées
  4421. traditionnellement à des membres de l'unité de négociation
  4422. intéressée.
  4423. 162. Dans sa réponse écrite à la plainte, le gouvernement a
  4424. déclaré qu'il
  4425. avait été nécessaire d'apporter des modifications à l'article 2
  4426. pour prévenir
  4427. les ingérences des organismes employeurs dans les activités
  4428. syndicales et pour
  4429. éviter les conflits d'intérêts mettant en cause le personnel de
  4430. direction. Il
  4431. a souligné que les exclusions prévues à l'article 2 1) i), viii) , ix),
  4432. x) et
  4433. xi) concernaient de hauts fonctionnaires, dont les fonctions
  4434. sont normalement
  4435. considérées comme ayant trait à la formulation des politiques à
  4436. suivre ou à
  4437. des tâches de direction, ou bien des employés publics dont les
  4438. responsabilités
  4439. ont un caractère hautement confidentiel telles que décrites à
  4440. l'article 1.2 de
  4441. la convention no 151. Le gouvernement a déclaré qu'aucun
  4442. de ces fonctionnaires
  4443. n'avait été membre d'une unité de négociation à la date de
  4444. promulgation de la
  4445. loi no 59 et que le syndicat intéressé n'avait jamais fait de
  4446. demande visant à
  4447. inclure dans une unité de négociation l'une quelconque de
  4448. ces catégories de
  4449. fonctionnaires. Selon le gouvernement, les exclusions prévues
  4450. à l'article 2 1)
  4451. i), xiii), xiv) et xv) visent des personnes au sujet desquelles la
  4452. Commission
  4453. des relations du travail - et non le gouvernement - décide s'il y
  4454. a lieu de
  4455. les rattacher à une unité de négociation. Ces fonctionnaires
  4456. seraient ceux
  4457. qui, de l'avis de la commission, exerçaient des fonctions de
  4458. direction ou
  4459. d'encadrement ou qui étaient employés à des tâches
  4460. confidentielles portant sur
  4461. les relations professionnelles. Dans le passé, en se fondant sur
  4462. ces critères,
  4463. la commission avait envisagé les exclusions de l'unité de
  4464. négociation d'une
  4465. manière assez restrictive.
  4466. 163. Le gouvernement a déclaré que l'article 2 1) i), xv)
  4467. autorise
  4468. l'exclusion d'employés publics qui, d'après la commission,
  4469. fournissent des
  4470. avis à l'organisme employeur concernant le développement ou
  4471. l'administration
  4472. de mesures ou de programmes, et que seuls les conseillers
  4473. techniques de niveau
  4474. supérieur devaient être exclus des unités de négociation par
  4475. cet article. Même
  4476. si ces employés publics n'étaient pas des directeurs au sens
  4477. habituel du terme
  4478. ou n'avaient pas accès à des informations confidentielles
  4479. relatives aux
  4480. relations du travail, le gouvernement a estimé qu'ils
  4481. constituaient un élément
  4482. essentiel de l'équipe dirigeante de nombreux organismes
  4483. gouvernementaux et
  4484. qu'il était donc tout à fait inopportun de les rattacher à une
  4485. unité de
  4486. négociation. Le gouvernement a souligné qu'à ce jour la
  4487. Commission des
  4488. relations du travail n'avait pris aucune décision interprétant
  4489. cette
  4490. disposition.
  4491. 164. En ce qui concerne l'article 2 1) i), xii), le gouvernement
  4492. a fait
  4493. valoir qu'il s'agissait d'une modification visant à régler une
  4494. situation
  4495. particulière au sujet de laquelle un accord écrit avait été
  4496. conclu avec le
  4497. syndicat intéressé; cette situation était celle des personnes
  4498. bénéficiant de
  4499. l'aide sociale du gouvernement provincial, destinée à les aider
  4500. à devenir
  4501. autonomes en les intégrant à la population active et en leur
  4502. permettant
  4503. d'accéder aux prestations de chômage. Le gouvernement a
  4504. fait remarquer que bon
  4505. nombre de ces personnes n'avaient ni expérience du travail ni
  4506. qualifications
  4507. professionnelles, ce qui leur interdisait pratiquement d'obtenir
  4508. un emploi en
  4509. période difficile; elles étaient placées, dans toute la province,
  4510. auprès
  4511. d'employeurs très divers - souvent dans le secteur privé - pour
  4512. leur permettre
  4513. d'acquérir qualifications ou expérience et ainsi de trouver par
  4514. la suite un
  4515. emploi; elles n'étaient pas des fonctionnaires au sens véritable
  4516. du terme
  4517. puisqu'elles n'étaient pas obligées de se présenter au travail et
  4518. que, si
  4519. effectivement elles ne se présentaient pas, elles étaient
  4520. simplement reprises
  4521. en charge par l'aide sociale; leur salaire était versé par le
  4522. gouvernement et
  4523. elles étaient employées pour une durée déterminée. Le
  4524. gouvernement a insisté
  4525. sur le fait que le syndicat avait accepté que ces personnes ne
  4526. soient pas
  4527. tenues de verser une cotisation syndicale et que les
  4528. conventions collectives
  4529. ne leur soient pas applicables. Toutefois, en mai 1983, le
  4530. syndicat avait
  4531. refusé d'honorer ses engagements, ce qui avait entraîné
  4532. l'adoption de la
  4533. modification législative dont il est question. Le gouvernement a
  4534. soutenu que
  4535. les protections syndicales normales concernant l'embauche et
  4536. les priorités de
  4537. réembauche ne pouvaient pas s'appliquer à ce type particulier
  4538. de programme; si
  4539. ces protections avaient été appliquées, le programme en aurait
  4540. été gravement
  4541. affaibli ou même rendu inopérant, et de nombreuses personnes
  4542. dans le besoin en
  4543. auraient souffert.
  4544. 165. L'argument final du gouvernement concernant la
  4545. définition du terme
  4546. "employé public" dans la loi modifiée était que les employés
  4547. publics exclus
  4548. bénéficiaient en fait de la liberté syndicale et du droit
  4549. d'organisation. Ni
  4550. la convention no 87 ni la convention no 98 n'imposent au
  4551. gouvernement
  4552. l'obligation d'accorder des droits d'accréditation aux fins de la
  4553. négociation
  4554. collective. Les employés publics exclus pouvaient s'organiser
  4555. et négocier
  4556. collectivement leurs conditions d'emploi, souvent
  4557. officieusement et souvent
  4558. officiellement, dans les cas où le gouvernement avait reconnu
  4559. volontairement
  4560. certaines associations et négociait avec elles au nom de leurs
  4561. membres;
  4562. c'était le cas, par exemple, de l'Association des chefs
  4563. d'établissements
  4564. d'enseignement de Terre-Neuve et du Labrador et de
  4565. l'Association médicale de
  4566. Terre-Neuve.
  4567. b) Désignation des "employés publics exerçant des fonctions
  4568. essentielles"
  4569. 166. En ce qui concerne la modification de l'article 10 de la
  4570. loi, qui
  4571. définit les modalités de désignation des "employés publics
  4572. exerçant des
  4573. fonctions essentielles", le plaignant a fait état des restrictions
  4574. figurant
  4575. aux paragraphes 1, 2, 3, 6, 7 et 8. Le paragraphe 1 autorise
  4576. l'organisme
  4577. employeur des employés publics faisant partie d'une unité de
  4578. négociation à
  4579. présenter à la Commission provinciale des relations du travail
  4580. une déclaration
  4581. écrite indiquant le nombre d'employés publics dont il estime
  4582. qu'ils exercent
  4583. des fonctions essentielles. Le paragraphe 2 dispose que, si
  4584. aucune objection à
  4585. cette déclaration n'est soumise à la commission, le nombre
  4586. d'employés publics
  4587. indiqué est réputé être le nombre des employés publics
  4588. exerçant des fonctions
  4589. essentielles; le paragraphe 3 dispose qu'en cas d'objection
  4590. écrite la
  4591. commission, après l'avoir examinée et après avoir donné à
  4592. l'agent négociateur
  4593. et à l'organisme employeur la possibilité de faire des
  4594. observations et de
  4595. présenter leurs arguments, fixe le nombre des employés publics
  4596. dont elle
  4597. considère qu'ils exercent des fonctions essentielles.
  4598. L'organisme employeur
  4599. dresse ensuite la liste des employés publics de l'unité qui sont
  4600. considérés
  4601. comme exerçant des fonctions essentielles (paragr. 7) et a le
  4602. droit de
  4603. modifier cette liste (paragr. 8). Selon le plaignant, le
  4604. paragraphe 1 autorise
  4605. l'organisme employeur à communiquer à la commission, en tout
  4606. temps et aussi
  4607. souvent qu'il le désire, une déclaration indiquant le nombre des
  4608. employés
  4609. publics qu'il considère comme exerçant des fonctions
  4610. essentielles. L'organism
  4611. employeur peut ainsi agir en tant que briseur de grève en
  4612. fixant, par exemple,
  4613. très bas le nombre des employés publics considérés comme
  4614. exerçant des
  4615. fonctions essentielles au début d'une grève, puis en
  4616. augmentant ce nombre à
  4617. mesure que la grève se prolonge, de façon à rendre la grève
  4618. impossible. En
  4619. outre, les dispositions combinées des paragraphes 2, 3 et 7 de
  4620. l'article 10
  4621. permettent aux organismes employeurs de décider que seuls
  4622. certains employés
  4623. publics d'une catégorie sont essentiels et que d'autres
  4624. exerçant exactement
  4625. les mêmes tâches ne le sont pas.
  4626. 167. Le plaignant a allégué en outre que la procédure de
  4627. désignation des
  4628. employés publics exerçant des fonctions essentielles instituée
  4629. par la loi no
  4630. 59 comportait un autre élément discriminatoire, à savoir que la
  4631. Commission
  4632. provinciale des relations du travail n'était plus maintenant en
  4633. mesure de
  4634. fonctionner de manière véritablement indépendante du fait
  4635. qu'en vertu de
  4636. l'article 10 3) elle ne pouvait augmenter le nombre des
  4637. employés publics
  4638. considérés comme exerçant des fonctions essentielles qui est
  4639. indiqué dan s la
  4640. déclaration de l'organisme employeur. Si, par exemple, un
  4641. organisme employeur
  4642. plaçait 49 pour cent des membres d'une unité de négociation
  4643. dans la catégorie
  4644. des employés publics considérés comme essentiels, cela avait
  4645. pour conséquence
  4646. pratique d'interdire la grève et les employés publics ne
  4647. pouvaient pas
  4648. soumettre leurs griefs à l'arbitrage prévu par la loi puisqu'une
  4649. majorité
  4650. était nécessaire.
  4651. 168. Selon le plaignant, l'article 10 12) viole, lui aussi, les
  4652. droits des
  4653. travailleurs du secteur public puisqu'il interdit de procéder à un
  4654. vote sur
  4655. une grève avant qu'un différend portant sur la détermination
  4656. des employés
  4657. publics exerçant des fonctions essentielles ait été réglé. Ainsi,
  4658. même les
  4659. sondages visant à connaître l'opinion des membres d'un
  4660. syndicat sur une grève
  4661. éventuelle sont interdits.
  4662. 169. Le plaignant a déclaré que l'aspect le plus répressif de
  4663. la
  4664. modification apportée au mode de désignation des employés
  4665. publics exerçant de
  4666. fonctions essentielles touchait au fait que ceux qui avaient été
  4667. considérés
  4668. comme exerçant des fonctions essentielles perdaient tous
  4669. leurs droits en
  4670. matière d'emploi - ils n'étaient couverts ni par une convention
  4671. collective ni
  4672. par la législation fondamentale en matière de normes du travail.
  4673. De plus,
  4674. l'article 10 11) autorise l'organisme employeur à licencier sans
  4675. préavis un
  4676. employé public considéré comme exerçant des fonctions
  4677. essentielles qui ne se
  4678. présente pas à son travail, sans garantir à cet employé public
  4679. une procédure
  4680. d'appel. Le paragraphe 11 a la teneur suivante: "Lorsqu'un
  4681. employé public
  4682. considéré comme exerçant une fonction essentielle par
  4683. l'organisme employeur n
  4684. se présente pas à son travail comme l'exige le paragraphe 10),
  4685. l'organisme
  4686. employeur procédera au licenciement immédiat de cet employé
  4687. public, à moins
  4688. que celui-ci ne puisse justifier par des motifs raisonnables, à la
  4689. satisfaction de l'organisme employeur, son absence au travail."
  4690. 170. Dans ses observations écrites relatives à la question
  4691. des employés
  4692. publics considérés comme exerçant des fonctions essentielles,
  4693. le gouvernement
  4694. a fait valoir que la loi de 1973 n'avait enlevé le droit de grève à
  4695. aucun
  4696. groupe de fonctionnaires, et qu'elle ne l'avait retiré qu'au
  4697. personnel de
  4698. toute unité de négociation que la Commission des relations du
  4699. travail pouvait
  4700. considérer comme nécessaire à la santé, à la sûreté ou à la
  4701. sécurité
  4702. publiques. Le gouvernement a déclaré que la version de 1973
  4703. de l'article 10
  4704. n'avait pas atteint son objectif, puisque les syndicats avaient
  4705. réussi à
  4706. bloquer les demandes faites par le gouvernement à la
  4707. commission en vue de la
  4708. détermination des employés publics exerçant des fonctions
  4709. essentielles. Au
  4710. début, peu de grèves s'étaient produites dans les domaines
  4711. touchant la santé,
  4712. la sûreté ou la sécurité publiques et ces grèves avaient été
  4713. assez courtes;
  4714. les services d'urgence pouvaient être assurés par les
  4715. employés publics de
  4716. direction et, dans certains cas, les syndicats avaient autorisé
  4717. des membres
  4718. des unités de négociation à travailler en cas d'urgence.
  4719. Cependant, les choses
  4720. avaient changé en 1981 lorsque les employés de laboratoire et
  4721. de radiographie
  4722. s'étaient mis en grève. Selon le gouvernement, le syndicat
  4723. avait assuré les
  4724. services d'urgence mais non les services essentiels, et les
  4725. services d'urgence
  4726. n'avaient été fournis que dans les cas où il y avait danger de
  4727. mort immédiat.
  4728. Les fonctionnaires de direction avaient pu assurer des
  4729. services
  4730. supplémentaires, de sorte que les hôpitaux avaient réussi à
  4731. fonctionner
  4732. pendant un certain temps. Mais la grève s'était poursuivie
  4733. pendant plus d'un
  4734. mois et les difficultés étaient apparues, obligeant le
  4735. gouvernement à agir par
  4736. l'adoption de la loi no 111 qui disposait qu'un tiers environ des
  4737. membres des
  4738. unités de négociation devaient assurer les services essentiels.
  4739. Cette loi a
  4740. été abrogée à compter de la date de la signature d'une
  4741. nouvelle convention
  4742. collective applicable aux employés de laboratoire et de
  4743. radiographie; en tout
  4744. état de cause, lorsque la loi no 111 avait été promulguée, le
  4745. syndicat avait
  4746. déjà mis fin à la grève. Cette situation difficile une fois réglée,
  4747. le
  4748. gouvernement avait décidé de modifier la loi de 1973 afin de
  4749. disposer d'une
  4750. méthode plus satisfaisante de désignation des employés
  4751. publics exerçant des
  4752. fonctions essentielles, désignation qui serait opérée par un
  4753. tribunal
  4754. indépendant préalablement à la grève. C'est ainsi que la loi no
  4755. 59 avait
  4756. modifié les dispositions relatives aux employés publics exerçant
  4757. des fonction
  4758. essentielles; ceux-ci auraient désormais le droit de faire grève,
  4759. mais les
  4760. services essentiels devraient être assurés. Le gouvernement a
  4761. exposé qu'aux
  4762. termes de la modification la Commission des relations du travail
  4763. fixait le
  4764. nombre des employés publics de chaque catégorie qui
  4765. devaient assurer les
  4766. services essentiels. Ce nombre était fixé selon les chiffres
  4767. soumis par
  4768. l'organisme employeur et prévoyait l'intervention de l'agent
  4769. négociateur. Une
  4770. fois que le syndicat et l'organisme employeur s'étaient mis
  4771. d'accord sur le
  4772. nombre d'employés publics à inclure ou que la commission
  4773. avait fixé ce nombre,
  4774. l'organisme employeur désignait les employés publics et
  4775. pouvait modifier ces
  4776. désignations. Cette pratique était nécessaire, a déclaré le
  4777. gouvernement, pour
  4778. permettre à l'organisme employeur de choisir les employés
  4779. publics qualifiés
  4780. pour les tâches requises (les employés publics d'une même
  4781. catégorie pouvant en
  4782. effet avoir une certaine spécialisation; ainsi en est-il des
  4783. infirmières
  4784. responsables des soins intensifs et de celles qui sont chargées
  4785. des soins
  4786. courants). Cette pratique permettait aussi à l'organisme
  4787. employeur de désigner
  4788. un employé à la place d'un collègue qui avait démissionné ou
  4789. pris sa retraite,
  4790. ou se trouvait en congé autorisé.
  4791. 171. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la
  4792. Commission des
  4793. relations du travail n'était plus à même de fonctionner de
  4794. manière
  4795. indépendante du fait qu'elle ne pouvait pas augmenter le
  4796. nombre des employés
  4797. publics exerçant des fonctions essentielles fixé par la
  4798. déclaration de
  4799. l'organisme employeur, le gouvernement a déclaré que c'était
  4800. lui-même ou un
  4801. organisme employeur, et non pas la Commission des relations
  4802. du travail, qui
  4803. devait fixer le niveau des services à assurer pour garantir que
  4804. la santé, la
  4805. sûreté ou la sécurité publiques n'étaient pas menacées. Le
  4806. gouvernement a
  4807. soutenu que, si les organismes employeurs s'efforçaient
  4808. d'obtenir
  4809. l'abaissement du nombre des employés par rapport au nombre
  4810. normalement
  4811. nécessaire pour garantir le niveau de service exigé et
  4812. l'obtenaient, il y
  4813. aurait un manquement aux obligations envers le public. Il a
  4814. souligné que,
  4815. lorsque le nombre des employés publics considérés comme
  4816. exerçant des fonction
  4817. essentielles dépassait 50 pour cent des effectifs, l'unité de
  4818. négociation
  4819. avait le droit de notifier à l'organisme employeur et à la
  4820. commission que tous
  4821. les employés publics devaient être considérés comme
  4822. exerçant des fonctions
  4823. essentielles et qu'ainsi l'agent négociateur disposait alors,
  4824. conformément à
  4825. l'article 20 de la loi, du droit de demander l'arbitrage obligatoire.
  4826. 172. Le gouvernement a exposé qu'aux termes de l'article 10
  4827. 12) les grèves
  4828. et les votes conduisant aux grèves n'étaient autorisés que
  4829. lorsque le nombre
  4830. (et non le nom) des employés publics exerçant des fonctions
  4831. essentielles avai
  4832. été décidé par les parties d'un commun accord ou fixé par la
  4833. commission.
  4834. L'organisme employeur ne pouvait retarder unilatéralement la
  4835. fixation du
  4836. nombre des employés publics exerçant des fonctions
  4837. essentielles, étant donné
  4838. qu'aux termes de l'article 10 1) le syndicat était autorisé à
  4839. demander à la
  4840. Commission des relations du travail d'ordonner à l'organisme
  4841. employeur de
  4842. faire les propositions nécessaires. Le gouvernement a insisté
  4843. sur le fait que
  4844. l'article 10 12) n'interdisait aucunement aux syndicats de
  4845. sonder leurs
  4846. membres pour connaître leur opinion sur un mouvement de
  4847. grève; cet article
  4848. disposait seulement qu'il ne peut être procédé à un vote
  4849. conduisant à une
  4850. grève, conformément à l'article 23, tant que le nombre des
  4851. employés publics
  4852. exerçant des fonctions essentielles n'a pas été fixé. Selon le
  4853. gouvernement,
  4854. cette disposition était analogue à celle qui dispose qu'un vote
  4855. sur une grève
  4856. ne peut avoir lieu tant que la procédure de conciliation n'a pas
  4857. été menée à
  4858. terme.
  4859. 173. Le gouvernement a soutenu que les employés publics
  4860. qui étaient désignés
  4861. comme exerçant des fonctions essentielles et qui étaient
  4862. présents au travail
  4863. ne perdaient pas tous leurs droits en matière d'emploi. L'article
  4864. 10 disposait
  4865. qu'ils devaient se présenter au travail comme s'il n'y avait pas
  4866. de grève, ce
  4867. qui signifiait que les dispositions de la convention collective
  4868. arrivée à
  4869. expiration continuaient à leur être applicables. Les employés
  4870. publics exerçant
  4871. des fonctions essentielles qui travaillaient durant toute la durée
  4872. d'une grève
  4873. avaient droit automatiquement à tous les avantages que les
  4874. employés publics en
  4875. grève avaient obtenus à l'issue de celle-ci. En outre, le
  4876. gouvernement a
  4877. précisé de nouveau que, si plus de 50 pour cent des membres
  4878. d'une unité de
  4879. négociation avaient été considérés comme exerçant des
  4880. fonctions essentielles,
  4881. tous les membres de cette unité bénéficiaient de la procédure
  4882. d'arbitrage
  4883. obligatoire. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle, en
  4884. raison de la
  4885. désignation des employés publics considérés comme exerçant
  4886. des fonctions
  4887. essentielles, les grèves deviendraient impossibles, le
  4888. gouvernement a déclaré
  4889. qu'il s'agissait là d'une déclaration prématurée étant donné que
  4890. la commission
  4891. n'avait encore émis aucune ordonnance. Le gouvernement a
  4892. également souligné
  4893. que les employés publics considérés comme exerçant des
  4894. fonctions essentielles
  4895. qui ne se présentaient pas au travail sans motif valable
  4896. pouvaient être
  4897. licenciés; cependant, comme la convention collective arrivée
  4898. à expiration
  4899. continuait à être applicable aux employés publics considérés
  4900. comme exerçant
  4901. des fonctions essentielles qui n'étaient pas en grève, les
  4902. dispositions
  4903. relatives aux réclamations demeuraient également en vigueur.
  4904. Les employés
  4905. publics pouvaient donc toujours être congédiés pour juste
  4906. cause, et la loi
  4907. indiquait simplement que le fait de ne pas se présenter au
  4908. travail sans motif
  4909. valable constituait une juste cause. Les mesures prises par
  4910. l'organisme
  4911. employeur et les motifs valables invoqués par l'employé public
  4912. continueraient
  4913. à être soumis à l'examen des arbitres et des tribunaux.
  4914. c) Limitations du droit de grève
  4915. 174. La troisième modification introduite par la loi no 59 qui
  4916. faisait
  4917. l'objet de la plainte concernait l'article 23, dont le nouveau
  4918. texte disposait
  4919. que les fonctionnaires qui décident de faire grève doivent
  4920. observer un préavis
  4921. légal de 38 jours (un mois et sept jours), faute de quoi la grève
  4922. est
  4923. illégale. En outre, l'article 24 de la loi avait été modifié de façon
  4924. à
  4925. interdire aux travailleurs des établissements de soins de
  4926. déclencher des
  4927. grèves tournantes. Selon le plaignant, les articles 23 et 24
  4928. dans leur teneur
  4929. nouvelle n'avaient d'autre objectif que de restreindre la liberté
  4930. d'expression
  4931. des fonctionnaires syndiqués et de limiter le droit de grève à
  4932. une forme
  4933. particulière de grève. Le plaignant soulignait que l'organisme
  4934. employeur, lors
  4935. de la rédaction de la loi, avait décidé de s'attaquer uniquement
  4936. au syndicat,
  4937. puisque cette loi ne contenait aucune disposition relative aux
  4938. mesures
  4939. inverses que pourrait prendre l'organisme employeur, tel le
  4940. lock-out.
  4941. 175. En ce qui concerne la limitation du droit de grève, le
  4942. gouvernement a
  4943. souligné qu'aux termes de la loi de 1973 le déclenchement de
  4944. toute grève était
  4945. subordonné à l'observation d'un préavis de sept jours. Cette
  4946. disposition
  4947. n'avait été modifiée que sur un point: lorsqu'une grève ne
  4948. commençait pas à la
  4949. date notifiée, un nouveau préavis ne pouvait être donné qu'un
  4950. mois après cette
  4951. date. Le gouvernement a expliqué que cette disposition avait
  4952. été introduite
  4953. pour empêcher les syndicats d'obliger les établissements à
  4954. fermer, par exemple
  4955. les hôpitaux, sans déclencher effectivement la grève.
  4956. Lorsqu'un hôpital reçoit
  4957. un préavis de grève, il doit réduire largement ses activités et
  4958. s'organiser de
  4959. manière à ne plus fournir que les services essentiels, que les
  4960. fonctionnaires
  4961. interrompent effectivement leur travail ou non. En vertu de la
  4962. nouvelle
  4963. disposition, les fonctionnaires, s'ils ne s'étaient pas mis en
  4964. grève à la date
  4965. prévue initialement, devaient permettre aux établissements de
  4966. retrouver leur
  4967. rythme de fonctionnement normal pendant une durée
  4968. raisonnable.
  4969. 176. S'agissant des grèves tournantes, le gouvernement a
  4970. déclaré qu'elles
  4971. avaient été interdites dans les établissements de soins de
  4972. façon à éviter que
  4973. des fonctionnaires de l'hôpital ne se mettent en grève sans
  4974. préavis au moment
  4975. où des personnes sont admises à l'hôpital pour y subir une
  4976. intervention
  4977. chirurgicale. Selon le gouvernement, les grèves tournantes
  4978. dans les
  4979. établissements de soins créaient un danger pour la vie des
  4980. personnes et
  4981. étaient totalement inacceptables. Le gouvernement a toutefois
  4982. fait remarquer
  4983. que ces deux dispositions applicables aux délais à respecter et
  4984. à la nature de
  4985. la grève ne touchaient ni au droit de grève ni à l'efficacité des
  4986. mouvements
  4987. entrepris; il s'agissait de limitations raisonnables, imposées
  4988. seulement pour
  4989. protéger la santé et la sécurité publiques, qui ne constituaient
  4990. pas des
  4991. violations de la liberté syndicale. Le gouvernement a estimé
  4992. que l'allégation
  4993. selon laquelle la modification de la loi ne comprenait pas
  4994. d'interdiction
  4995. parallèle du lock-out tournant était difficile à comprendre
  4996. puisque ce type
  4997. d'action ne pourrait en aucun cas être profitable pour les
  4998. établissements de
  4999. soins.
  5000. 177. En conclusion, le gouvernement a déclaré que les
  5001. modifications
  5002. examinées avaient été introduites pour protéger la santé, la
  5003. sûreté et la
  5004. sécurité publiques, et non dans un but de discrimination ou
  5005. d'ingérence dans
  5006. les activités légales des syndicats. Il a souligné que le Comité
  5007. de la liberté
  5008. syndicale avait admis que le fait de refuser aux fonctionnaires
  5009. occupant des
  5010. postes de confiance au niveau de la direction ou de
  5011. l'encadrement le droit de
  5012. se syndiquer et de participer à la négociation collective était
  5013. justifié. Le
  5014. gouvernement a soutenu que, si la modification apportée à
  5015. l'article 2 1) avait
  5016. eu pour effet d'exclure ces fonctionnaires de l'unité de
  5017. négociation, il leur
  5018. avait laissé la liberté d'adhérer aux associations qui défendent
  5019. leurs
  5020. intérêts professionnels. Il a souligné que ces associations
  5021. avaient été
  5022. reconnues par le gouvernement et que des négociations
  5023. avaient été engagées
  5024. avec elles. En ce qui concerne les autres exclusions
  5025. particulières énumérées à
  5026. l'article 2 1) i), viii) à xii), le gouvernement a déclaré qu'il n'avait
  5027. pas
  5028. de pouvoir de décision sur ces exclusions puisque les
  5029. demandes devaient être
  5030. faites auprès de la Commission des relations du travail, dont les
  5031. décisions se
  5032. fondent sur des précédents reconnus et des principes du droit
  5033. du travail
  5034. applicables aux exclusions de l'unité de négociation. Il a fait
  5035. remarquer
  5036. qu'au cours des dernières années la plupart des questions
  5037. d'inclusion ou
  5038. d'exclusion qui s'étaient posées dans l'administration
  5039. gouvernementale avaient
  5040. été réglées par accord entre le syndicat intéressé et
  5041. l'organisme employeur,
  5042. et qu'un très petit nombre seulement de cas litigieux avaient
  5043. été portés
  5044. devant la Commission des relations du travail pour décision. En
  5045. ce qui
  5046. concerne l'allégation selon laquelle la nouvelle méthode de
  5047. désignation des
  5048. employés publics exerçant des fonctions essentielles opérait
  5049. une
  5050. discrimination à l'encontre des militants syndicaux, le
  5051. gouvernement a déclaré
  5052. qu'il n'y avait eu aucune ingérence dans l'organisation
  5053. syndicale et qu'aucun
  5054. fonctionnaire n'avait dû adhérer à un syndicat ou renoncer à
  5055. son affiliation
  5056. syndicale. Selon le gouvernement, il était de l'intérêt des
  5057. organismes
  5058. employeurs que des fonctionnaires assurent les services
  5059. essentiels, et ces
  5060. organismes avaient pour politique de ne pas désigner des
  5061. dirigeants ou des
  5062. responsables syndicaux, sauf si ceux-ci étaient les seuls
  5063. membres de leur
  5064. catégorie en mesure d'effectuer le travail demandé. Le
  5065. gouvernement a affirmé
  5066. à nouveau que les modifications apportées à la loi en ce qui
  5067. concerne les
  5068. délais à observer et la nature de la grève ne constituaient pas
  5069. des ingérences
  5070. inopportunes dans les activités et les programmes syndicaux
  5071. mais posaient
  5072. simplement les conditions préalables au déclenchement de la
  5073. grève. Il a
  5074. indiqué que le syndicat était libre de sonder ses membres et de
  5075. procéder à des
  5076. scrutins pour connaître leur opinion sur une grève éventuelle;
  5077. seuls les votes
  5078. formels sur la grève débouchant effectivement sur une grève
  5079. étaient interdits
  5080. tant que les employés publics exerçant des fonctions
  5081. essentielles n'avaient
  5082. pas été désignés.
  5083. C. Informations reçues pendant la mission
  5084. 178. J'ai eu de longues discussions, au sujet des questions
  5085. soulevées dans
  5086. ce cas, avec la NAPE et les représentants du gouvernement
  5087. provincial, conduits
  5088. par le sous-ministre adjoint, sur place à Saint-Jean,
  5089. Terre-Neuve, et à
  5090. Ottawa, où les représentants du Congrés du travail du Canada
  5091. CTC et du
  5092. Syndicat national du personnel des gouvernements
  5093. provinciaux NUPGE m'ont
  5094. également parlé de la loi no 59. Une fois de plus, les
  5095. déclarations orales des
  5096. parties ont été complétées par de longues déclarations par
  5097. écrit qui m'ont été
  5098. remises à Saint-Jean.
  5099. 179. Le premier point qui est apparu pendant ces discussions
  5100. a été que
  5101. l'excellent climat de relations professionnelles qui régnait dans
  5102. la province
  5103. depuis les années cinquante était devenu conflictuel. Selon le
  5104. syndicat, du
  5105. fait en partie de la récession, du fait en partie d'une réaction
  5106. excessive au
  5107. radicalisme croissant de certains syndicats de la fonction
  5108. publique et,
  5109. peut-être, du fait que les deux parties répugnaient à demander
  5110. un arbitrage
  5111. d'intérêts, le gouvernement s'est ingéré, avec la loi no 59,
  5112. dans le processus
  5113. de négociation collective. Selon la NAPE, avant la loi no 59, la
  5114. responsabilité de la dégradation des relations professionnelles
  5115. incombait
  5116. autant aux syndicats, du fait de leur radicalisme, qu'au
  5117. gouvernement, du fait
  5118. de son paternalisme. Toutefois, on ne pouvait pas reprocher
  5119. aux syndicats la
  5120. "panique" dont avait fait preuve le gouvernement en
  5121. promulguant la loi no 59,
  5122. qui était entièrement favorable aux employeurs et ne pouvait
  5123. qu'aggraver la
  5124. dégradation des relations du travail. Les faits qui ont précédé
  5125. la
  5126. présentation du texte législatif au Parlement expliquent le
  5127. malentendu qui
  5128. oppose actuellement les parties; ce point sera mentionné plus
  5129. loin dans le
  5130. présent rapport.
  5131. a) Consultation
  5132. 180. Pendant nos discussions, le syndicat a souligné qu'il
  5133. n'avait reçu, en
  5134. fait, qu'un jour de préavis lorsque le projet de loi avait été
  5135. déposé. Il n'y
  5136. a pas eu d'audition publique sur les propositions
  5137. d'amendement et la NAPE
  5138. avait pensé que le projet de loi no 59 dans son ensemble
  5139. devait être proclamé,
  5140. alors que seules les trois questions contestées (définition du
  5141. fonctionnaire,
  5142. désignation des employés publics exerçant des fonctions
  5143. essentielles et
  5144. dispositions concernant le droit de grève) sont restées en
  5145. suspens et ont paru
  5146. plus tard au Journal officiel. La NAPE a affirmé que la loi no 59
  5147. avait
  5148. amoindri la confiance qui pouvait avoir existé antérieurement
  5149. entre les
  5150. parties et avait créé un climat d'affrontement. Selon le
  5151. syndicat, la raison
  5152. du dépôt de cette loi avait été certainement un mépris de plus
  5153. en plus grand
  5154. du gouvernement pour les syndicats et leur puissance
  5155. croissante, ainsi qu'un
  5156. manque de considération pour l'aptitude des syndicats à
  5157. représenter les
  5158. intérêts de leurs membres. La situation, avant la loi no 59, avait
  5159. été
  5160. satisfaisante, 294 contrats ayant été conclus. Le système
  5161. d'arbitrage et le
  5162. choix des arbitres sur une liste constituée par la Commission de
  5163. coopération
  5164. travailleurs-employeurs avaient également été satisfaisants.
  5165. 181. D'un autre côté, le gouvernement a expliqué que des
  5166. exemplaires des
  5167. projets d'amendement avaient été remis au syndicat très peu
  5168. de temps avant que
  5169. le Parlement en soit saisi. Les difficultés au sujet de la loi
  5170. fondamentale
  5171. sur les négociations collectives, et de l'article 10 en particulier,
  5172. avaient
  5173. été examinées à maintes reprises, par le passé, avec les
  5174. représentants de la
  5175. NAPE. Le gouvernement a retardé la proclamation des parties
  5176. contestées du
  5177. projet de loi no 59 et a informé le syndicat qu'il désirait recevoir
  5178. ses
  5179. suggestions à leur sujet. Toutefois, selon le gouvernement,
  5180. aucune déclaration
  5181. par écrit n'a été reçue; il n'a été remis au ministère du Travail
  5182. qu'un exposé
  5183. général des problèmes, enregistré sur bande magnétique. Le
  5184. gouvernement en a
  5185. déduit qu'une discussion face à face n'intéressait pas le
  5186. syndicat. Les
  5187. dispositions ont alors été proclamées et sont entrées en
  5188. vigueur le 1er
  5189. septembre 1983. Le gouvernement n'a pas pu expliquer
  5190. pourquoi le syndicat
  5191. s'était retiré à ce moment-là, tout en admettant que la raison en
  5192. avait
  5193. peut-être été la rupture des relations de coopération informelle
  5194. que les
  5195. syndicats avaient entretenues avec le gouvernement, en tant
  5196. qu'employeur, par
  5197. le passé.
  5198. b) La définition de l'employé public
  5199. 182. Selon la NAPE, par la modification de l'article 2 1) de la
  5200. loi no 59,
  5201. le gouvernement avait effectivement exclu jusqu'à 2.000
  5202. travailleurs de
  5203. l'affiliation syndicale. La NAPE s'est inquiétée de l'exclusion,
  5204. dans la
  5205. définition de l'employé public de personnes occupées au titre
  5206. d'un programme
  5207. d'emploi que le gouvernement provincial administrait avec ses
  5208. propres fonds
  5209. et/ou des fonds fédéraux (article 2 1) i) xii)). Le syndicat a
  5210. souligné que
  5211. cette exclusion de l'application de la loi ne se retrouve pas
  5212. dans le cas de
  5213. programmes analogues administrés à d'autres échelons
  5214. gouvernementaux, tels que
  5215. les conseils scolaires et les municipalités. Il a affirmé que le but
  5216. de ces
  5217. programmes était, non pas de former les chômeurs pour qu'ils
  5218. puissent
  5219. s'intégrer dans la population active, mais de transférer les états
  5220. de paie de
  5221. la province à l'Etat fédéral. Comme ces personnes ne
  5222. pouvaient pas s'affilier
  5223. à un syndicat, il était plus difficile de négocier une
  5224. augmentation des
  5225. avantages accessoires des membres du syndicat, et ce
  5226. dernier se sentait menacé
  5227. par ces travailleurs "jaunes", en cas de grève, et par la
  5228. réduction éventuelle
  5229. du temps de travail des membres du syndicat. La NAPE se
  5230. méfiait tout
  5231. particulièrement de cette disposition parce qu'elle a conclu de
  5232. nombreuses
  5233. conventions avec des employeurs non couverts par la loi
  5234. (municipalités,
  5235. Collège de pêche, hôpitaux privés) autorisant les programmes
  5236. de création
  5237. d'emplois dans des lieux de travail où elle représente les
  5238. travailleurs.
  5239. D'après les conventions dont copie m'a été remise, il
  5240. apparaissait que la
  5241. seule condition préalable que posait la NAPE pour accepter
  5242. les travailleurs
  5243. non syndiqués dans ces lieux de travail était la protection de la
  5244. sécurité de
  5245. l'emploi et des avantages accessoires de ses membres. L'autre
  5246. point de cette
  5247. disposition qui préoccupait le syndicat - elle refusait à ces
  5248. personnes le
  5249. droit de s'affilier à un syndicat - n'avait pas de rapport avec
  5250. une convention
  5251. précédente que la NAPE avait conclue avec le gouvernement
  5252. en ce qui concerne
  5253. la non-syndicalisation; cet accord ne concernait que les
  5254. personnes au bénéfice
  5255. de l'aide sociale. Selon la NAPE, lorsque le gouvernement a
  5256. commencé à
  5257. utiliser ces personnes dans les programmes, cet accord a pris
  5258. fin. Etant donné
  5259. que le syndicat était disposé à représenter ces personnes pour
  5260. les questions
  5261. sans rapport avec leurs taux de rémunération, qui étaient fixés
  5262. dans le cadre
  5263. du programme et correspondaient plus ou moins au salaire
  5264. minimum, et qu'il ne
  5265. leur demanderait pas de verser des cotisations, il estimait que
  5266. le
  5267. gouvernement aurait dû négocier leur situation avec la NAPE
  5268. au lieu de les
  5269. exclure en légiférant du champ d'application de la loi.
  5270. 183. Le gouvernement a fait remarquer que les programmes
  5271. de création
  5272. d'emploi étaient conçus pour permettre aux chômeurs
  5273. d'accumuler les vingt
  5274. semaines d'intrégration à la population active exigées pour
  5275. avoir droit aux
  5276. prestations de chômage fédérales. Lorsque le gouvernement a
  5277. été informé de la
  5278. position de la NAPE au sujet de la couverture de ces
  5279. personnes pour les
  5280. questions qui ne relevaient pas de la négociation collective, il
  5281. semble y
  5282. avoir eu un autre malentendu: le gouvernement a déclaré
  5283. qu'en 1984-85 environ
  5284. 600 personnes avaient bénéficié des programmes et n'avaient
  5285. donc pas droit aux
  5286. négociations collectives, alors que le syndicat avait affirmé
  5287. que 2.000
  5288. personnes s'étaient trouvées exclues des conventions
  5289. collectives. Etant donné
  5290. que les personnes relevant de ces programmes exceptionnels
  5291. n'occupaient que
  5292. des emplois temporaires, le gouvernement avait du mal à
  5293. comprendre pourquoi le
  5294. syndicat s'intéresserait à recruter ces personnes pour
  5295. l'affiliation en soi,
  5296. mais il n'a pas exprimé d'opposition à cette possibilité.
  5297. 184. En ce qui concerne l'exclusion figurant à l'article 2 1) i)
  5298. xv)
  5299. (personnes fournissant des avis à l'employeur en matière de
  5300. politiques ou de
  5301. programmes), la NAPE a expliqué que, dans le passé, la
  5302. pratique des
  5303. négociations et les décisions de la Commission des relations
  5304. du travail avait
  5305. toujours donné de bons résultats lorsque des conflits - qui
  5306. étaient très rares
  5307. - surgissaient au sujet de cette catégorie d'employés publics.
  5308. Elle craignait
  5309. que l'on n'abuse de cette modification pour inclure des
  5310. personnes telles que
  5311. les travailleurs sociaux ou les conseillers. Elle a fait remarquer
  5312. que la
  5313. Commission des relations du travail a refusé d'accorder des
  5314. exemptions pour le
  5315. moment, jusqu'à ce que les contestations élevées par la voie
  5316. judiciaire contre
  5317. la loi no 59 dans son ensemble soient réglées. Le
  5318. gouvernement a estimé qu'il
  5319. s'était contenté de donner une forme législative aux critères
  5320. qu'avait
  5321. appliqués la commission dans le passé, à savoir l'exclusion des
  5322. employés
  5323. chargés de la formulation des politiques à suivre, ayant des
  5324. tâches de
  5325. direction ou dont les responsabilités ont un caractère
  5326. hautement confidentiel.
  5327. Il a souligné que c'était là une exclusion spécifiquement
  5328. admise à l'article 1
  5329. de la convention no 151. J'ai fait observer que la méfiance du
  5330. syndicat avait
  5331. peut-être résulté d'un manque de communication quant au but
  5332. de cette
  5333. disposition.
  5334. 185. Pendant ces discussions au sujet de l'article 2 1), le
  5335. gouvernement a
  5336. également souligné qu'il n'y avait aucune intention cachée
  5337. derrière le
  5338. paragraphe ix) - qui exclut de la loi les "avocats et les
  5339. conseillers
  5340. législatifs - et indiqué que ces employés publics constituent
  5341. effectivement
  5342. des associations et négocient collectivement avec
  5343. l'employeur.
  5344. c) Questions concernant le droit de grève
  5345. 186. L'article 2 de la loi modificatrice de 1983 (loi no 59) a
  5346. abrogé
  5347. l'article 10 de la loi de 1973 sur les négociations collectives
  5348. dans la
  5349. fonction publique qui portait sur la désignation des employés
  5350. publics exerçant
  5351. des fonctions essentielles, c'est-à-dire "les employés dont les
  5352. attributions
  5353. sont totalement ou partiellement des attributions dont
  5354. l'exécution, à un
  5355. moment quelconque ou pendant une période spécifiée
  5356. quelconque, est ou peut
  5357. être indispensable pour la santé, la sûreté ou la sécurité
  5358. publiques". La
  5359. définition des employés publics exerçant des fonctions
  5360. essentielles était
  5361. restée la même après la modification de 1983, mais un certain
  5362. nombre de
  5363. questions se posait du fait des autres modifications apportées
  5364. à la loi de
  5365. 1973 par la loi no 59.
  5366. 187. La NAPE a allégué que les syndicats du secteur public
  5367. avaient toujours
  5368. fourni les services essentiels pour protéger la santé, la sûreté
  5369. et la
  5370. sécurité publiques. Toutefois, elle s'est dite convaincue que la
  5371. législation
  5372. était utilisée pour donner à l'employeur, le gouvernement et
  5373. l'Association des
  5374. hôpitaux de Terre-Neuve, un avantage dans les négociations
  5375. collectives. Les
  5376. représentants de la NAPE ont affirmé qu'ils étaient
  5377. parfaitement conscients de
  5378. la nécessité de dispenser les services essentiels pendant les
  5379. conflits du
  5380. travail. La loi no 59 autorisait néanmoins la Commission des
  5381. relations du
  5382. travail à être l'arbitre final pour ce qui est des services
  5383. essentiels. La
  5384. commission péchait toujours par excès de prudence lorsqu'elle
  5385. rendait des
  5386. décisions sur les services essentiels, ce qui favorisait
  5387. l'employeur. La NAPE
  5388. a prétendu que la commission ne nommait pas un plus grand
  5389. nombre d'employés
  5390. publics exerçant des fonctions essentielles que celui qui était
  5391. demandé par le
  5392. gouvernement. Il en résultait que plus de la moitié du
  5393. personnel d'une unité
  5394. de négociation ne pouvait pas être désignée comme exerçant
  5395. des fonctions
  5396. essentielles, ce qui empêchait, à son tour, le règlement d'un
  5397. différend par
  5398. voie d'arbitrage. L'intention du gouvernement était
  5399. manifestement de supprimer
  5400. le droit de grève, mais elle était aussi d'empêcher le règlement
  5401. des conflits
  5402. par voie d'arbitrage.
  5403. 188. La NAPE a soutenu qu'il était difficile pour le syndicat de
  5404. donner son
  5405. accord à la détermination des employés publics exerçant des
  5406. fonctions
  5407. essentielles, étant donné que l'employeur refusait de lui donner
  5408. des
  5409. informations sur le nombre total des travailleurs des unités de
  5410. négociation et
  5411. sur leurs catégories professionnelles.
  5412. 189. Selon la NAPE, les travailleurs des magasins de
  5413. spiritueux, qui
  5414. avaient été considérés antérieurement comme essentiels,
  5415. avaient retrouvé leur
  5416. droit de grève, alors que le statut des travailleurs hospitaliers
  5417. affectés au
  5418. service des repas n'avait pas changé. Leur droit de grève était
  5419. toujours
  5420. demeuré intact. La situation était anormale lorsque les
  5421. inspecteurs de
  5422. l'hygiène au service du gouvernement provincial étaient
  5423. considérés comme
  5424. essentiels alors que les agents qui ne travaillaient pas pour la
  5425. province mais
  5426. préparaient les repas pour un certain nombre d'hôpitaux ne
  5427. l'étaient pas.
  5428. 190. Le gouvernement, selon la NAPE, avait toujours été peu
  5429. disposé à régler
  5430. les questions relatives aux employés publics exerçant des
  5431. fonctions
  5432. essentielles par voie de négociation ou en suivant d'autres
  5433. procédures de
  5434. règlement des conflits. Ce problème s'était perpétué pendant
  5435. des années et les
  5436. tribunaux et la Commission des relations du travail avaient
  5437. établi que
  5438. l'approche du gouvernement s'était révélée peu réaliste.
  5439. 191. Si, par exemple, à la suite de négociations ou d'une
  5440. décision de la
  5441. Commission des relations du travail, 33 pour cent du personnel
  5442. de soutien de
  5443. l'hôpital étaient déclarés essentiels, cela signifierait que, sur
  5444. une unité de
  5445. négociation de 800 personnes, 265 resteraient présentes au
  5446. travail. A ce
  5447. chiffre-ci s'ajouteraient les travailleurs ayant des tâches de
  5448. gestion, les
  5449. travailleurs des unités qui ne négocieraient pas et les
  5450. travailleurs d'autres
  5451. unités de négociation. En d'autres termes, un grand hôpital,
  5452. pendant une
  5453. grève, pourrait disposer d'un plus grand nombre de travailleurs
  5454. que pendant la
  5455. période critique des congés annuels. En outre, il était habituel,
  5456. à
  5457. Terre-Neuve, de recruter d'autres travailleurs pour remplacer le
  5458. personnel en
  5459. grève. Le personnel de soutien de l'hôpital avait, par
  5460. conséquent, perdu ses
  5461. droits de négociation collective par le biais de cette procédure
  5462. qui, en
  5463. outre, leur interdisait tout autre mécanisme de règlement des
  5464. conflits.
  5465. 192. En vertu de la loi no 59, les employeurs pouvaient
  5466. choisir comme ils
  5467. l'entendaient les employés publics exerçant des fonctions
  5468. essentielles ou,
  5469. manipuler d'une autre manière les grèves en rendant difficile le
  5470. traitement
  5471. d'un conflit si une large minorité de travailleurs étaient censés
  5472. exercer des
  5473. services essentiels et recevaient l'intégralité de leur salaire et
  5474. de leurs
  5475. avantages accessoires alors que les grévistes ne recevaient
  5476. plus leur revenu
  5477. normal.
  5478. 193. Autre aspect de la question, l'employeur, selon la
  5479. NAPE, avait la
  5480. possibilité de faire déclarer essentiel un faible pourcentage de
  5481. l'unité de
  5482. négociation puis de revenir périodiquement devant la
  5483. commission pour demander
  5484. des augmentations de ce pourcentage. Une telle pratique
  5485. aurait pour effet de
  5486. briser les grèves.
  5487. 194. La NAPE a reconnu que la loi n'avait jamais été utilisée
  5488. par
  5489. l'employeur de cette manière mais a néanmoins affirmé que
  5490. ces avantages,
  5491. inscrits dans la loi, nuisaient au moral des travailleurs et au
  5492. processus de
  5493. négociation collective. La NAPE comme le gouvernement sont
  5494. convaincus qu'il
  5495. doit y avoir des niveaux au-dessous desquels les services
  5496. publics ne devraient
  5497. pas être réduits ni utilisés, que ce soit par les syndicats ou par
  5498. le
  5499. gouvernement, pour obtenir des avantages dans la
  5500. négociation collective.
  5501. 195. De l'avis de la NAPE, la question des services
  5502. essentiels devrait être
  5503. tranchée par voie de négociation entre le gouvernement et le
  5504. syndicat, ou par
  5505. un expert indépendant, ou encore par un tiers expert en la
  5506. matière. Personne
  5507. ne devrait obtenir un avantage quelconque et les services
  5508. essentiels devraient
  5509. être répartis de façon égale entre les membres de l'unité de
  5510. négociation qui
  5511. remplissent les conditions nécessaires. Comme la question des
  5512. services
  5513. essentiels annihile le droit de grève, toute unité de négociation
  5514. dans
  5515. laquelle se pose la question doit avoir à sa disposition une
  5516. autre procédure
  5517. de règlement des conflits.
  5518. 196. La NAPE a également mis en doute la nécessité des
  5519. articles 27 à 29 de
  5520. la loi qui disposent que l'état d'urgence peut être déclaré
  5521. pendant une grève
  5522. si celle-ci menace la santé ou la sécurité des personnes, ou un
  5523. groupe ou une
  5524. catégorie de personnes, ou encore la sûreté de la province.
  5525. 197. Le syndicat a mentionné un cas relatif à une grève, en
  5526. 1981, de
  5527. techniciens de laboratoire et de radiologie, qui avait été
  5528. déclenchée à la
  5529. suite de la non-acceptation par le gouvernement du rapport
  5530. d'une commission de
  5531. conciliation. Bien que la grève ait été déclarée, le syndicat
  5532. avait mis en
  5533. place un système par lequel les employés essentiels étaient à
  5534. leur poste et
  5535. avait fourni des spécialistes sur une base permanente. Une
  5536. nouvelle offre de
  5537. l'employeur avait été refusée par le syndicat. Le gouvernement
  5538. avait présenté
  5539. un texte législatif (loi no 111) qui déclarait que la moitié du
  5540. personnel de
  5541. l'unité de négociation était essentielle, mettant ainsi fin à la
  5542. grève. De
  5543. l'avis de la NAPE, le gouvernement aurait pu soumettre les
  5544. questions
  5545. contestées à l'arbitrage ou aurait pu revenir à la table de
  5546. négociation. Au
  5547. lieu de cela, en présentant ce texte législatif, il avait mis fin à la
  5548. négociation collective pour l'unité concernée. Par la suite, le
  5549. syndicat a
  5550. signé une convention collective et la loi no 111 est arrivée à
  5551. expiration.
  5552. 198. La NAPE a également affirmé que l'article 2) xii) de la loi
  5553. no 59
  5554. enlevait aux membres du syndicat le droit de voter la grève. Si
  5555. l'employeur
  5556. faisait une offre, le seul vote autorisé était celui qui conduirait à
  5557. son
  5558. acceptation, sinon il serait illicite. La désignation des employés
  5559. publics
  5560. exerçant des fonctions essentielles devrait suivre - et non
  5561. précéder - la
  5562. décision de déclencher une grève.
  5563. 199. Un autre problème était celui que posait l'article 23 de la
  5564. loi,
  5565. modifié par l'article 6 de la loi no 59. Aux termes de la loi
  5566. précédente de
  5567. 1973, les unités de négociation étaient tenues de donner un
  5568. préavis de sept
  5569. jours avant toute grève. Aux termes de la loi no 59, si le
  5570. syndicat ne
  5571. déclenchait pas la grève à la date précisée dans le préavis,
  5572. trente jours
  5573. devaient s'écouler avant qu'il soit possible de donner un
  5574. nouveau préavis de
  5575. sept jours. Là encore, selon le syndicat, il y avait tentative de
  5576. contrôler la
  5577. négociation collective à l'avantage de l'employeur.
  5578. 200. L'article 24 de la loi de 1973 avait été également
  5579. modifié par la loi
  5580. no 59 pour empêcher les grèves tournantes qui, de l'avis de la
  5581. NAPE, ne
  5582. devraient pas être interdites. Là encore, cette interdiction
  5583. permettait à
  5584. l'employeur de peser lourdement sur la stratégie de négociation
  5585. du syndicat.
  5586. En outre, avec des grèves tournantes, une partie seulement
  5587. des hôpitaux de la
  5588. province serait en grève à un moment donné.
  5589. 201. Dans ses déclarations sur la question des grèves, le
  5590. gouvernement a
  5591. expliqué que la loi de 1973 accordait le droit de grève à tous
  5592. les
  5593. travailleurs relevant de cette loi, c'est-à-dire les fonctionnaires,
  5594. le
  5595. personnel des hôpitaux et les instructeurs des écoles
  5596. professionnelles, à
  5597. l'exception de ceux qui pourraient être désignés comme
  5598. exerçant des fonctions
  5599. essentielles. Avant la loi no 59, l'employeur, au moment de
  5600. l'accréditation du
  5601. syndicat, saisissait la Commission des relations du travail d'une
  5602. demande
  5603. concernant le choix d'une liste de fonctionnaires nommément
  5604. désignés. La
  5605. quasi-totalité de ce genre de demandes avaient été
  5606. contestées par le syndicat
  5607. et jugées défectueuses d'une manière ou d'une autre par les
  5608. tribunaux qui
  5609. avaient dit eux-mêmes qu'à cet égard la loi exigeait des
  5610. modifications
  5611. substantielles. A une occasion, même, où la commission avait
  5612. nommé un groupe
  5613. d'experts chargé de la désignation, le tribunal avait déclaré
  5614. que ce groupe
  5615. n'était pas compétent pour ce faire.
  5616. 202. Cette situation peu satisfaisante a duré près de dix ans,
  5617. et ce n'est
  5618. qu'après la grève de 1981 du personnel des laboratoires et
  5619. des services de
  5620. radiographie, pendant laquelle on avait brandi la menace
  5621. d'interrompre même
  5622. les services essentiels, que des modifications ont été
  5623. introduites par la loi
  5624. no 59. En ce qui concerne la grève de 1981, le gouvernement
  5625. a ajouté que le
  5626. texte législatif ne prévoyait pas d'arbitrage et que, d'un point
  5627. de vue
  5628. économique, le gouvernement ne jugeait pas qu'il fût approprié
  5629. de soumettre
  5630. les questions à l'arbitrage. Certes, les résultats de la
  5631. conciliation avaient
  5632. été rejetés par le gouvernement, mais c'était souvent le
  5633. syndicat qui rejetait
  5634. ces résultats. De toute manière, la législation d'urgence avait
  5635. été promulguée
  5636. étant donné que la santé des malades était immédiatement et
  5637. sérieusement
  5638. menacée.
  5639. 203. La loi de 1973 s'était donc révélée inapplicable en ce
  5640. qui concerne les
  5641. services essentiels, et la loi no 59 avait introduit des
  5642. modifications de
  5643. procédure plutôt que de fond. Au lieu de demander à la
  5644. commission de désigner
  5645. nommément des employés publics, on la priait de fournir un
  5646. chiffre.
  5647. L'employeur pouvait s'adresser à la commission en tout temps
  5648. et non pas
  5649. seulement, comme auparavant, à l'époque de l'accréditation,
  5650. la plupart des
  5651. syndicats étant de toute manière volontairement reconnus.
  5652. Selon le
  5653. gouvernement, le syndicat se méprenait en alléguant que
  5654. l'employeur pouvait
  5655. présenter des demandes successives à la commission afin
  5656. d'augmenter le chiffre
  5657. indiqué et, ainsi, de briser une grève. Non seulement cela
  5658. n'entrait pas dans
  5659. les intentions de l'employeur, mais cela était également
  5660. impossible dans la
  5661. pratique puisqu'il était extrêmement difficile de convoquer la
  5662. commission à
  5663. bref délai.
  5664. 204. Selon le gouvernement, il y avait eu des rencontres
  5665. avec la NAPE pour
  5666. examiner ces problèmes, mais, malgré toutes les explications
  5667. qui lui avaient
  5668. été données, le malentendu avait persisté. Il n'existait toutefois
  5669. aucun
  5670. problème de ce genre entre l'employeur et les autres unités de
  5671. négociation,
  5672. comme le Syndicat canadien de la fonction publique, par
  5673. exemple, au sujet de
  5674. ces questions. Des accords sur la désignation des employés
  5675. publics exerçant
  5676. des fonctions essentielles avaient été conclus avec d'autres
  5677. syndicats, mais
  5678. la NAPE, qui était au courant des propositions que faisait
  5679. l'employeur, avait
  5680. demandé à la commission de ne pas poursuivre les auditions à
  5681. leur sujet. Le
  5682. gouvernement a fourni à la mission des informations détaillées
  5683. sur les
  5684. recommandations qu'il avait présentées à la commission en ce
  5685. qui concerne le
  5686. pourcentage d'employés publics exerçant des fonctions
  5687. essentielles que la
  5688. commission pourrait fixer. Depuis 1983, cependant, la NAPE
  5689. avait obstinément
  5690. refusé de participer au processus de négociation des besoins
  5691. en employés
  5692. publics exerçant des fonctions essentielles.
  5693. 205. Il importe de souligner, a poursuivi le gouvernement,
  5694. qu'en juin 1985
  5695. l'article 10 de la loi a été modifié et qu'un nombre significatif de
  5696. fonctionnaires du gouvernement appartenant à neuf unités de
  5697. négociation
  5698. déterminées ont été exclus de la désignation des besoins
  5699. essentiels. D'autres
  5700. institutions gouvernementales ou commissions avaient identifié
  5701. un besoin
  5702. minime ou inexistant et, pour l'ensemble du secteur
  5703. gouvernemental, il avait
  5704. été déterminé que 21 pour cent (17,7 pour cent, y compris les
  5705. unités de
  5706. l'article 10) des fonctionnaires exerçaient des fonctions
  5707. essentielles. Ce
  5708. groupe comprenait 100 pour cent des gardiens de prison (qui
  5709. avaient maintenant
  5710. automatiquement accès à l'arbitrage) et d'autres personnels
  5711. tels que les
  5712. équipes de lutte contre les incendies de forêt, les travailleurs
  5713. sociaux, etc.
  5714. Dans le secteur des soins de santé, le besoin était plus
  5715. important (33 pour
  5716. cent) pour qu'un niveau minimum de soins soit assuré aux
  5717. malades et aux
  5718. personnes âgées.
  5719. 206. Le gouvernement a fait remarquer qu'il y a cinq ans le
  5720. syndicat
  5721. n'aurait pas été disposé à accepter l'arbitrage en tant que
  5722. remplacement de
  5723. son droit de grève. Maintenant, c'était le gouvernement qui,
  5724. dans la situation
  5725. économique actuelle, hésitait à demander l'arbitrage. La loi no
  5726. 59, et le
  5727. gouvernement a insisté sur ce point, avait été adoptée à la
  5728. suite de décisions
  5729. judiciaires et son adoption avait été hâtée par la grève de
  5730. 1981. Maintenant,
  5731. a souligné le gouvernement, les règles étaient fixées et bien
  5732. connues, et cela
  5733. était préférable à l'adoption - comme ce fut le cas en 1981 -
  5734. d'une loi
  5735. d'urgence en cas de grève dans un service essentiel. Depuis
  5736. 1981, il n'y avait
  5737. pas eu de grève dans le secteur hospitalier.
  5738. 207. En ce qui concerne les articles 23 et 24 de la loi, dans
  5739. leur teneur
  5740. modifiée par la loi no 59, les modifications introduites en juin
  5741. 1985 avaient
  5742. abrogé l'article 23 mais maintenu les sept jours de préavis pour
  5743. les hôpitaux
  5744. et les établissements de soins. Si les travailleurs de ces
  5745. secteurs ne
  5746. déclenchaient pas la grève à la date précisée dans le préavis,
  5747. trente autres
  5748. jours devaient s'écouler avant qu'un autre préavis soit donné.
  5749. La raison de
  5750. cette disposition était la nécessité de régler le problème du
  5751. renvoi des
  5752. malades chez eux et de leur rappel à l'hôpital si la grève ne se
  5753. produit pas.
  5754. Ce système n'exclut pas des négociations de la onzième heure
  5755. et, de l'avis du
  5756. gouvernement, rien n'empêche que, par accord entre les
  5757. parties, on ne prolonge
  5758. d'un jour le préavis de sept jours si une nouvelle offre est
  5759. présentée.
  5760. 208. En ce qui concerne les grèves tournantes, le
  5761. gouvernement a expliqué
  5762. que la loi no 59 avait modifié l'article 24 de la loi pour interdire
  5763. ces
  5764. grèves uniquement dans les établissements de soins. La loi ne
  5765. concernait que
  5766. l'unité de négociation et, si une partie de cette unité pouvait
  5767. être appelée à
  5768. cesser le travail, il n'était pas question que cette partie pratique
  5769. des
  5770. grèves tournantes. Cette disposition avait été introduite pour
  5771. éviter le genre
  5772. de problème que l'on avait connu pendant la grève de 1981
  5773. du personnel des
  5774. laboratoires et des services de radiographie.
  5775. D. Remarques finales
  5776. 209. Fondamentalement, les fonctionnaires représentés par
  5777. la NAPE
  5778. conservent le droit de grève. Les mesures de lutte contre
  5779. l'inflation l'ont
  5780. emporté sur le système de négociation qui a pu être utilisé
  5781. dans son intégrité
  5782. une fois que la législation extraordinaire n'a plus été applicable.
  5783. La plainte
  5784. porte donc sur les limitations qui semblent avoir été récemment
  5785. apportées au
  5786. processus normal de la négociation.
  5787. 210. Le premier point soulevé, et il a beaucoup d'importance,
  5788. est que les
  5789. mesures introduites dans la loi no 59 n'ont jamais fait l'objet des
  5790. consultations appropriées. Pour une personne de l'extérieur qui
  5791. vient à
  5792. Terre-Neuve, il est évident que, bien que les relations
  5793. professionnelles dans
  5794. le secteur public ne soient pas à l'abri des problèmes et de
  5795. quelques
  5796. différends, le syndicat et le gouvernement entretiennent de
  5797. bons rapports.
  5798. Cela n'a pas empêché un désaccord au sujet de la loi no 59. Il
  5799. est difficile
  5800. d'indiquer avec exactitude l'importance des consultations au
  5801. sujet de la loi
  5802. no 59, puisqu'elles ne sont pas perçues de la même manière.
  5803. Les contacts
  5804. effectifs ont eu lieu dans un climat où le gouvernement, ayant
  5805. récemment
  5806. examiné les relations professionnelles, était décidé à les réviser
  5807. sur la base
  5808. de l'expérience. Le syndicat considérait que les modifications
  5809. menaçaient sa
  5810. position, mais, en fait, il estimait que cette position n'avait pas
  5811. été
  5812. convenablement évaluée et il se sentait menacé par les
  5813. dispositions de la loi,
  5814. dont certaines, à son avis, étaient loin d'être claires. Il
  5815. apparaissait à la
  5816. NAPE qu'une série d'incidents qui s'étaient produits ces
  5817. dernières années
  5818. avait entraîné une réaction plutôt extrême qui ne reflétait pas
  5819. ce à quoi on
  5820. pouvait véritablement s'attendre. La confusion et la méfiance
  5821. sous-jacentes ne
  5822. faisaient pas de doute.
  5823. 211. La loi est maintenant en vigueur depuis environ deux
  5824. ans. Il existe
  5825. encore des malentendus et des hésitations. Il convient de
  5826. noter que, tout
  5827. dernièrement, d'importantes modifications ont été apportées
  5828. par une loi
  5829. modificatrice de juin 1985. Cela souligne la nécessité de
  5830. reprendre les
  5831. consultations dans un esprit de coopération. Il est encore
  5832. possible de déceler
  5833. des divergences de vues sur la signification et l'intention de
  5834. diverses
  5835. dispositions de la loi no 59: on peut prévoir diverses difficultés
  5836. d'ordre
  5837. pratique et chacune des parties se préoccupe avant tout de la
  5838. possibilité de
  5839. réactions extrêmes de la part de l'autre. Le terrain, de ce fait,
  5840. est
  5841. certainement favorable à la consultation et il semble qu'il soit
  5842. possible
  5843. d'oeuvrer conjointement à éclaircir, uniformiser et définir plus
  5844. nettement les
  5845. règles et, ce faisant, de rétablir de meilleurs rapports de travail.
  5846. 212. L'un des points les plus graves soulevés par le syndicat
  5847. concerne la
  5848. limitation apportée aux négociations collectives par les
  5849. modifications de la
  5850. définition de l'employé public. Deux éléments sont à distinguer.
  5851. L'article 1
  5852. b) xii) exclut de la définition cruciale de l'employé ceux qui
  5853. travaillent
  5854. dans le cadre d'un programme de création d'emploi. Il y a une
  5855. certaine
  5856. confusion dans les explications qui sont données de la portée
  5857. exacte de cette
  5858. disposition. Ce qui est clair, c'est qu'elle exclut des unités de
  5859. négociation
  5860. les travailleurs auxquels est offert un placement dans le cadre
  5861. d'un programme
  5862. de création d'emplois. Cela est compréhensible, étant donné
  5863. que les
  5864. principales conditions sont régies par les termes du
  5865. programme. Toutefois,
  5866. deux préoccupations demeurent. Le syndicat demande à avoir
  5867. le droit d'être
  5868. consulté dans le cas de ceux de ces travailleurs qui sont
  5869. utilisés à des
  5870. tâches au sein de l'unité de négociation ou à des tâches en
  5871. rapport avec cette
  5872. unité. Il semble également qu'il n'y ait aucune raison de ne pas
  5873. admettre ces
  5874. travailleurs en tant que membres versant des cotisations
  5875. limitées ou
  5876. théoriques afin que le syndicat puisse leur rendre des services
  5877. autres que la
  5878. négociation. La deuxième disposition qui suscite une objection
  5879. concerne les
  5880. employés du gouvernement chargés de l'élaboration ou de
  5881. l'administration des
  5882. politiques ou des programmes au sujet desquels la Commission
  5883. des relations du
  5884. travail doit statuer. Il a été admis que cette disposition
  5885. consacrait la
  5886. pratique suivie. Que les deux parties soient d'accord sur ce
  5887. point et que,
  5888. pourtant, le syndicat soupçonne que l'on voulait introduire un
  5889. changement
  5890. montre bien que l'entente fait défaut. Seul un dialogue franc et
  5891. ouvert peut
  5892. mettre fin à des malentendus aussi apparents.
  5893. 213. Les modifications apportées par la loi no 59 à la notion
  5894. d'employés
  5895. publics exerçant des fonctions essentielles constituent un des
  5896. problèmes
  5897. complexes et essentiels de la plainte. Les unités de
  5898. négociation concernées
  5899. comprennent, par exemple, les hôpitaux ou les contrôleurs du
  5900. trafic aérien.
  5901. Bien qu'il y ait eu peu de grèves, le gouvernement a cherché à
  5902. donner dans la
  5903. loi une protection accrue aux services essentiels. Le syndicat,
  5904. dans presque
  5905. tous les cas, a offert un "personnel d'urgence". Le désaccord
  5906. porte sur ce que
  5907. devrait être la portée de cette expression, que résume bien
  5908. l'utilisation de
  5909. mots différents - "urgence" et "essentiel". Le processus de
  5910. désignation d'une
  5911. proportion de chaque unité de négociation comme étant
  5912. essentielle a été
  5913. paralysé. Les chiffres suggérés par le gouvernement ont été
  5914. arrêtés en sachant
  5915. que la Commission des relations professionnelles a le pouvoir
  5916. de décision.
  5917. Deux difficultés se posent. Le syndicat conteste certains des
  5918. chiffres qui,
  5919. semble-t-il, ont été fixés trop généreusement. Il craint que la
  5920. Commission des
  5921. relations du travail ne soit pas en mesure d'étudier la question
  5922. avec rigueur,
  5923. étant donné que la décision, qui peut affecter la sécurité et
  5924. l'hygiène, est
  5925. une lourde responsabilité. Ce problème ne devrait pas être trop
  5926. difficile à
  5927. résoudre.
  5928. 214. L'effet que la désignation exercera vraisemblablement
  5929. sur les grèves
  5930. est beaucoup plus préoccupant et il convient de se rappeler
  5931. que le droit de
  5932. grève est une caractéristique importante des rapports
  5933. examinés ici. Si plus de
  5934. 50 pour cent du personnel d'une unité est désigné comme
  5935. essentiel, alors le
  5936. droit de grève est remplacé par l'arbitrage indépendant ayant
  5937. force
  5938. obligatoire. Ni le gouvernement ni le syndicat n'aiment pas
  5939. beaucoup ce
  5940. mécanisme. Néanmoins, il est certain que, si une importante
  5941. proportion des
  5942. travailleurs sont désignés en tant qu'employés exerçant des
  5943. fonctions
  5944. essentielles, alors l'arbitrage devient plus intéressant pour le
  5945. syndicat
  5946. qu'une grève sans vigueur. Comme pour bien des points de la
  5947. plainte, ce
  5948. problème exige une étude et un compromis. Si on ne relâche
  5949. pas les règles, les
  5950. secteurs où, disons, de 33 à 50 pour cent du personnel sont
  5951. désignés comme
  5952. essentiels se trouveront entre les deux systèmes et les droits
  5953. syndicaux
  5954. seront restreints de façon inacceptable. Un autre point qui a
  5955. été soulev é est
  5956. le rapport entre la désignation des travailleurs essentiels et le
  5957. vote sur la
  5958. grève. Là encore, les vues divergent sur la manière dont le
  5959. système
  5960. fonctionnera dans la pratique. Il semble y avoir une chance
  5961. que la désignation
  5962. d'une proportion du personnel en dehors du contexte d'une
  5963. grève, c'est-à-dire
  5964. en tant que procédure normale, et de personnes prises
  5965. individuellement après
  5966. le vote sur la grève pourrait contribuer à atténuer le problème.
  5967. 215. La loi no 59 a traité de deux tactiques de grève. Toutes
  5968. deux ont pour
  5969. origine des cas isolés qui se sont produits dans le passé et les
  5970. dispositions
  5971. de la loi semblent ici encore avoir une certaine ambiguóté.
  5972. L'interdiction de
  5973. la grève pendant trente jours, lorsque la date indiquée est
  5974. passée, et
  5975. l'interdiction d'un nouveau préavis pourraient être utilisées pour
  5976. retarder
  5977. une grève en négociant à la dernière minute. Rien ne prouve
  5978. que c'est là
  5979. l'intention, et une simple modification ou même une simple
  5980. lettre d'intention
  5981. devraient faire disparaître une crainte qui est sincère. La
  5982. disposition
  5983. interdisant ce que l'on appelle les grèves tournantes semble
  5984. être une
  5985. ingérence dans le pouvoir qu'a le syndicat de déterminer sa
  5986. tactique de grève.
  5987. Là encore, la disposition suscite une crainte justifiée mais, s'il
  5988. n'en est
  5989. pas fait un mauvais usage, on ne peut pas dire qu'elle entrave
  5990. sérieusement
  5991. l'action de grève.
  5992. 216. Il est manifeste que le gouvernement, voyant la pratique
  5993. suivie par le
  5994. passé, a décidé d'empêcher des pratiques dont il estimait
  5995. qu'elles
  5996. constituaient un abus du pouvoir syndical qui causaient des
  5997. problèmes
  5998. potentiellement difficiles dans des domaines essentiels du
  5999. secteur public.
  6000. Cela a entraîné une forte réaction et une dose encore plus
  6001. forte de méfiance.
  6002. Le syndicat a suggéré, par exemple, que des dispositions qui
  6003. semblent, à
  6004. première vue, consacrer une pratique utile et habituelle (telles
  6005. que l'article
  6006. 18 qui habilite le ministre à différer le processus réglementaire
  6007. pour faire
  6008. intervenir un conciliateur ou un médiateur) peuvent servir à
  6009. différer ou à
  6010. retarder le processus. C'est là un exemple éclatant de la
  6011. nécessité de
  6012. préciser les attitudes et les intentions. Avec un nombre
  6013. relativement
  6014. restreint d'accords ou de déclarations d'intention, d'un côté
  6015. comme de
  6016. l'autre, on réussirait à faire admettre que l'intention de la loi
  6017. n'est pas
  6018. d'utiliser éventuellement ces dispositions pour léser ou pour
  6019. entraver
  6020. l'exercice approprié du pouvoir syndical.
  6021. 217. Le Comité de la liberté syndicale comprendra que les
  6022. fins de la
  6023. législation n'aient pas été éclaircies puisqu'on peut l'utiliser
  6024. dans divers
  6025. cas avec des résultats différents. Une seule interprétation
  6026. limiterait
  6027. sérieusement le droit de mener une grève efficacement en
  6028. utilisant des
  6029. critères normaux. Si cela doit être une possibilité, les
  6030. fondements du système
  6031. pourraient être en danger. Il convient de ne pas oublier ce
  6032. qu'est la formule
  6033. habituelle dans le secteur public: si le droit de grève est refusé,
  6034. l'autre
  6035. protection, dans ces cas spéciaux, est l'accès à l'arbitrage
  6036. indépendant ayant
  6037. force obligatoire. Lorsque le droit de grève existe mais est
  6038. sérieusement
  6039. entravé ou mis en danger, alors les travailleurs concernés ne
  6040. sont pas
  6041. efficacement protégés.
  6042. 218. Il importe que la signification exacte et les utilisations
  6043. possibles
  6044. des dispositions de la loi no 59 soient éclaircies. Cela conduira,
  6045. sans aucun
  6046. doute, à des ajustements - il a été agréable d'apprendre que la
  6047. loi de 1985
  6048. avait déjà, quoique unilatéralement, entamé ce processus.
  6049. Une fois que ce
  6050. processus sera achevé, il sera indispensable d'examiner si le
  6051. droit de grève,
  6052. assorti de limitations raisonnables pour protéger la santé, le
  6053. bien-être et la
  6054. sécurité des personnes, existe. Dans les cas où ce droit
  6055. n'existe pas, une
  6056. autre forme de protection sera nécessaire.
  6057. VII. Observations finales
  6058. 219. Trois des plaintes résultent d'une réaction à des textes
  6059. législatifs
  6060. récemment promulgués dans l'Alberta (cas no 1247) - la loi no
  6061. 44 -, dans
  6062. l'Ontario (cas no 1172) - la loi no 179 - et à Terre-Neuve (cas
  6063. no 1260) - la
  6064. loi no 59. La quatrième, Alberta (cas no 1234), est une affaire
  6065. beaucoup plus
  6066. limitée. Bien que le système de relations professionnelles varie
  6067. d'une
  6068. province à l'autre, et même sensiblement à certains égards, et
  6069. bien que les
  6070. trois textes législatifs adoptent des approches différentes, il y a
  6071. fondamentalement une grande similarité de principes et de
  6072. buts. Il semble donc
  6073. approprié, dans les présentes observations finales, d'attirer
  6074. l'attention du
  6075. Comité de la liberté syndicale sur les tendances profondes.
  6076. 220. Les trois lois ont été promulguées du fait que le
  6077. gouvernement devait
  6078. lutter contre l'inflation. Toutes les trois s'appliquaient au
  6079. secteur public,
  6080. c'est-à-dire au personnel directement employé par le
  6081. gouvernement, et à
  6082. d'autres personnels employés par des organes indépendants
  6083. largement
  6084. tributaires des fonds publics. Cette attention portée au secteur
  6085. public avait
  6086. deux causes premières. Le gouvernement lui-même était
  6087. l'employeur ou exerçait
  6088. une forte influence sur l'employeur et on estimait que le
  6089. contrôle du secteur
  6090. public, d'une part, était nécessaire et, d'autre part, fixerait le
  6091. niveau pour
  6092. le secteur privé. Sur ce point, la plupart des interrogations
  6093. ressortissent au
  6094. débat économique. Ce qui préoccupait les syndicats et doit
  6095. préoccuper le
  6096. comité est le préjudice que cette législation a causé aux
  6097. relations
  6098. professionnelles, notamment, bien entendu, en violation des
  6099. principes énoncés
  6100. dans les conventions de l'OIT sur la liberté syndicale
  6101. (c'est-à-dire les
  6102. conventions nos 87, 98 et 151).
  6103. 221. Plusieurs caractéristiques importantes méritent qu'on s'y
  6104. arrête. Le
  6105. système canadien de relations professionnelles a une structure
  6106. qui, à première
  6107. vue, reproduit celle qui a été mise au point aux Etats-Unis.
  6108. Autrement dit, il
  6109. est assez étroitement réglementé par la législation. Toutefois, il
  6110. existe
  6111. également une forte tradition de contacts informels grâce
  6112. auxquels les parties
  6113. ont pu conclure des accords volontaires et déterminer une
  6114. partie non sans
  6115. importance de leurs rapports. Il a été suggéré que ce
  6116. processus consultatif a
  6117. subi un préjudice. Il est certain que le recours à la législation a
  6118. donné
  6119. cette impression. Un problème important vient de ce que le
  6120. gouvernement,
  6121. lorsqu'il utilise la législation dans le secteur public, exerce
  6122. simultanément
  6123. deux fonctions. Il est le gouvernement démocratique qui agit
  6124. pour protéger
  6125. l'économie, mais il est aussi l'employeur qui modifie l'équilibre
  6126. de ses
  6127. rapports avec le syndicat. Cela ouvre largement la porte aux
  6128. confusions, aux
  6129. malentendus et à une grave altération des relations internes. Il
  6130. est facile
  6131. sur ce point de faire une erreur d'appréciation, car des
  6132. relations normales
  6133. continuent généralement à régner dans de nombreux
  6134. domaines, mais la crainte et
  6135. la méfiance étaient visibles dans chacune des trois provinces.
  6136. On peut dire,
  6137. ironiquement, que ce qui est le plus nécessaire est le
  6138. rétablissement des
  6139. processus normaux des relations professionnelles - la
  6140. consultation, la
  6141. conciliation et la compréhension mutuelle.
  6142. 1. Lutte contre l'inflation
  6143. 222. La lutte contre l'inflation est une tâche
  6144. gouvernementale importante,
  6145. mais il convient de faire une distinction entre les mesures à
  6146. court terme
  6147. visant à contrôler une situation et une structure de caractère
  6148. plus permanent.
  6149. On prend les mesures précitées parce qu'un problème
  6150. particulier menace le
  6151. système. Telle était la situation dans l'Alberta, où le
  6152. ralentissement
  6153. économique avait été brusque et grave. Elle se retrouvait,
  6154. avec un peu moins
  6155. d'intensité, dans l'Ontario et à Terre-Neuve, bien que les
  6156. problèmes
  6157. économiques de ces provinces soient évidents. Dans
  6158. l'Ontario, la législation
  6159. avait déjà cessé d'être en vigueur. Dans les trois provinces,
  6160. toutefois, ce
  6161. sont les effets durables de la législation ou, dans le cas de
  6162. l'Ontario, des
  6163. pratiques résultant de la période d'application de la loi qui
  6164. doivent être
  6165. mesurés.
  6166. 223. Dans chaque cas, il y a eu, sans aucun doute, des
  6167. effets durables. Il
  6168. s'agit ou bien de modifications apportées à la structure des
  6169. négociations
  6170. collectives ou bien d'influences exercées sur le système
  6171. indépendant de
  6172. règlement des conflits qui est la sauvegarde prédominante
  6173. dans l'Alberta et
  6174. dans l'Ontario et qui joue un rôle réduit à Terre-Neuve. C'est
  6175. l'évaluation de
  6176. ce préjudice qui est essentielle dans ces cas.
  6177. 2. Consultation
  6178. 224. Bien que le système canadien des relations
  6179. professionnelles applique
  6180. des procédures de négociation réglementées par la loi,
  6181. l'importance de la
  6182. consultation demeure. Il en est particulièrement ainsi lorsqu'un
  6183. gouvernement
  6184. dépose un projet de loi pour modifier les règles applicables à
  6185. ce système et
  6186. pour changer la position relative des parties à la négociation.
  6187. On a déjà fait
  6188. observer que cette consultation est doublement importante
  6189. lorsque le
  6190. gouvernement cherche à modifier des structures de
  6191. négociation dans lesquelles
  6192. il agit effectivement ou indirectement en tant qu'employeur. On
  6193. doit disposer
  6194. de suffisamment de temps pour la consultation. Bien
  6195. évidemment, celle-ci peut
  6196. être limité par l'urgence des mesures à prendre pour faire face
  6197. à des
  6198. problèmes économiques. Son efficacité peut être diminuée du
  6199. fait de l'attitude
  6200. qu'adoptent les syndicats concernés. Mais il va de soi que les
  6201. propositions
  6202. devraient être franchement discutées, éclaircies, et les doutes,
  6203. craintes et
  6204. malentendus réglés avant que le texte législatif ne prenne sa
  6205. forme
  6206. définitive. Sinon, la méfiance grandit et l'attention est
  6207. détournée vers de
  6208. longues contestations judiciaires, souvent inopportunes.
  6209. 225. Dans l'Alberta, le gouvernement a considéré que la
  6210. rapide dégradation
  6211. de la prospérité économique exigeait des mesures urgentes.
  6212. La consultation
  6213. semble s'être limitée à une présentation officielle d'opinions
  6214. devant le corps
  6215. législatif. Dans l'Ontario, il semble y avoir eu d'amples
  6216. possibilités de
  6217. consultation qui ne paraissent pas avoir été utilisées de façon
  6218. constructive.
  6219. A Terre-Neuve, il existe une longue et solide tradition de
  6220. consultation qui
  6221. constituait une caractéristique appréciée des relations
  6222. professionnelles.
  6223. Malheureusement, bien qu'il ait été procédé à des
  6224. consultations, il semble y
  6225. avoir eu rupture des relations habituelles, du moins
  6226. temporairement.
  6227. 3. Fonctionnaires - négociation et droit de grève
  6228. 226. Dans la plupart des provinces canadiennes, mais non à
  6229. Terre-Neuve, le
  6230. droit de grève est refusé et l'accès à l'arbitrage indépendant
  6231. ayant force
  6232. obligatoire prend sa place. Cela n'arrive à Terre-Neuve que
  6233. dans des
  6234. situations très limitées. Pour garantir l'intégrité du système, il est
  6235. essentiel que les procédures de négociation soient libres de
  6236. toute entrave et
  6237. qu'il existe un mécanisme authentiquement indépendant pour
  6238. régler les conflits
  6239. d'intérêts que la négociation ne résoud pas. La plupart des
  6240. détails des
  6241. plaintes, dans chacun des quatre cas, concernent un aspect
  6242. ou un autre de cet
  6243. équilibre crucial. Si l'équilibre est gravement atteint, mise à part
  6244. l'intervention économique à court terme en période d'urgence,
  6245. alors les
  6246. principes de l'OIT en matière de liberté syndicale sont mis en
  6247. cause.
  6248. a) Négociation collective
  6249. 227. Il n'est pas nécessaire d'attirer l'attention du comité sur
  6250. chacune
  6251. des plaintes qui concernaient des dispositions dont on estimait
  6252. qu'elles
  6253. jetaient à bas le juste équilibre des négociations collectives.
  6254. De même, il
  6255. suffit de souligner que les gouvernements estiment tous qu'il
  6256. est devenu
  6257. important, en période de crise économique, d'introduire dans le
  6258. secteur public
  6259. des facteurs de négociation correspondant aux sombres
  6260. nouvelles qu'un
  6261. employeur du secteur privé est en mesure d'apporter à la table
  6262. de négociation
  6263. lorsqu'il annonce que le profit diminue et que les carnets de
  6264. commandes se
  6265. dégarnissent.
  6266. 228. Il suffit de donner divers exemples. Dans l'Alberta, un
  6267. nombre
  6268. appréciable de modifications du système de négociation ont
  6269. été promulguées. A
  6270. Terre-Neuve, la loi a introduit d'importantes limitations aux
  6271. unités de
  6272. négociation et à la participation des membres de ces unités
  6273. aux grèves. Il
  6274. n'est pas facile d'évaluer l'étendue du préjudice, mais les
  6275. syndicats
  6276. appellent l'attention sur des dispositions flexibles qui suscitent
  6277. la crainte
  6278. d'une perte d'efficacité.
  6279. b) Système indépendant de règlement des conflits
  6280. 229. Cet aspect est d'une importance vitale pour un système
  6281. bien conçu.
  6282. Toutes les provinces ont un conseil des relations
  6283. professionnelles (ou
  6284. commission des relations du travail) qui agit en toute
  6285. indépendance en tant
  6286. que régulateur et responsable des décisions au sein du
  6287. système. Bien que
  6288. quelques soupçons de partialité aient été mentionnés, il n'y a
  6289. guère
  6290. d'éléments concrets pour les étayer. La situation de l'arbitrage
  6291. ayant force
  6292. obligatoire est plus préoccupante. Détestée parfois par les
  6293. deux parties, elle
  6294. demeure la pierre angulaire de la structure de remplacement
  6295. "pas de grèves -
  6296. règlement indépendant des conflits".
  6297. 230. Il est notoire que la profession d'arbitre est de courte
  6298. durée et que
  6299. les décisions des arbitres donnent souvent à l'une des parties
  6300. l'impression,
  6301. presque invariablement erronée, que l'arbitre n'est pas
  6302. indépendant. Il est
  6303. certain qu'en période de crise économique les pressions
  6304. augmentent. Les
  6305. gouvernements acceptent mal un système qui donne le
  6306. contrôle des décisions
  6307. financières à un tiers. Ils ont naturellement tendance à essayer
  6308. d'influencer
  6309. l'arbitre. Demander qu'il soit tenu compte de la situation
  6310. économique semble
  6311. être inévitable et raisonnable. Insister sur la conformité à une
  6312. norme met fin
  6313. à l'indépendance. Dans la pratique, la pression tend à se situer
  6314. entre ces
  6315. extrêmes. Il est essentiel que l'on prenne soin de protéger
  6316. l'indépendance de
  6317. l'arbitrage: le mode de nomination comme la durée du mandat
  6318. des arbitres
  6319. doivent être réglementés avec soin. Le système,
  6320. inévitablement, et quelle que
  6321. soit l'hésitation des parties, veut que l'on soit convaincu que
  6322. les arbitres
  6323. agissent équitablement et raisonnablement.
  6324. 231. Enfin, il convient de souligner qu'un grand nombre des
  6325. griefs qui ont
  6326. donné lieu à ces plaintes pourraient être réglés, pas facilement
  6327. il est vrai,
  6328. par voie d'accords entre les gouvernements et les syndicats.
  6329. Tant qu'elles ne
  6330. le seront pas, on aura tendance à utiliser une législation, des
  6331. pouvoirs et
  6332. des pratiques qui portent préjudice à l'équilibre essentiel que
  6333. consacrent les
  6334. conventions de l'OIT. Il ne m'appartient pas de dire jusqu'à
  6335. quel point cela
  6336. s'est produit: les informations détaillées données ci-dessus
  6337. constituent les
  6338. matériaux sur la base desquels le Comité de la liberté syndicale
  6339. arrive à ses
  6340. décisions.
  6341. 232. En concluant ce rapport, je désire exprimer au
  6342. gouvernement du Canada
  6343. et aux gouvernements des provinces de l'Alberta, de l'Ontario
  6344. et de la
  6345. Terre-Neuve ma sincère reconnaissance pour l'efficacité et la
  6346. courtoisie dont
  6347. a bénéficié ma mission et pour l'authentique esprit de
  6348. coopération dans lequel
  6349. les discussions avec les représentants des divers
  6350. gouvernements se sont
  6351. déroulées. Je désire également remercier le Congrès du travail
  6352. du Canada, le
  6353. Syndicat national du personnel des gouvernements
  6354. provinciaux, la Fédération
  6355. des enseignants du Canada et tous les syndicats provinciaux
  6356. de fonctionnaires
  6357. dont les représentants m'ont été du plus grand secours
  6358. pendant toute la
  6359. mission. Mes remerciements vont spécialement à Mme Lucille
  6360. Caron, du ministère
  6361. fédéral du Travail, à M. Brian Mallon, du Congrès du travail du
  6362. Canada, et à
  6363. M. Derek Fudge, du Syndicat national du personnel des
  6364. gouvernements
  6365. provinciaux, qui m'ont accompagné à divers stades de la
  6366. mission et dont j'ai
  6367. grandement apprécié l'aide précieuse qu'ils ont apportée pour
  6368. les dispositions
  6369. pratiques. Mes remerciements vont également à M. John R.W.
  6370. Whitehouse,
  6371. directeur du bureau de l'OIT à Ottawa qui, avec le concours
  6372. efficace de ses
  6373. collaborateurs, a facilité les arrangements d'ordre pratique.
  6374. Enfin, je tiens
  6375. à exprimer ma profonde gratitude à M. W.R. Simpson, chef du
  6376. Service de la
  6377. liberté syndicale du BIT et à Mme Jane Hodges, de ce service
  6378. également, qui
  6379. m'ont accompagné pendant ma mission au Canada. Leur
  6380. maîtrise des principes de
  6381. l'OIT, leur profonde compréhension des relations
  6382. professionnelles, s'alliant à
  6383. leur aptitude à travailler rapidement, ont été d'une importance
  6384. capitale pour
  6385. l'accomplissement de ma mission et l'achèvement du présent
  6386. rapport.
  6387. John Wood, LLM, CDE.
  6388. ANNEXE
  6389. Réunions à Ottawa (12-13 septembre 1985)
  6390. M. M. Dorais, directeur général de la politique et des relations
  6391. du ministère
  6392. du Travail du Canada, avec Mme L. Caron, M. B. de Laat, M.
  6393. A. Torobin, M. P.
  6394. Sorokan, Mme C. Racine, Mme J. Godon, M. J. Lynch, M. P.
  6395. Hewson et M. Beaupré
  6396. Bérard du ministère fédéral; du ministère du Travail et du
  6397. Département de
  6398. l'éducation de l'Alberta, respectivement. M. A. Kennedy
  6399. (sous-ministre adjoint
  6400. du Travail) et Mme C. Mead; du ministère du Travail et du
  6401. Trésor de l'Ontario,
  6402. respectivement, Mme M. Kenny et Mme J. Bass; du ministère
  6403. du Travail, du
  6404. Conseil du Trésor et du Département de la justice de
  6405. Terre-Neuve,
  6406. respectivement, M. H. Noseworthy, M. L. Powell et Mme D.
  6407. Fry. Du côté des
  6408. syndicats, Mme S. Carr, secrétaire-trésorière du Congrès du
  6409. travail du Canada
  6410. (CTC), Mr. J. Fryer, président du Syndicat national du
  6411. personnel des
  6412. gouvernements provinciaux (NUPGE) et les représentants de
  6413. leurs organisations
  6414. affiliées, M. F. March, M. J. Shields, M. M. Hedley, M. A. Kube,
  6415. M. D. Bean,
  6416. M. D. Fudge, Mme L. Nicholson, Mme N. Riche et M. F.
  6417. Moorgen. Des réunions ont
  6418. également eu lieu avec les représentants de la Fédération des
  6419. enseignants du
  6420. Canada (FCE), à savoir le président M. F. Garrity, M. S.
  6421. Mcdowell, M. R.
  6422. Barkar, Mme E. McMurphy, M. D. Yorke et Mme S. Hanley.
  6423. A Edmonton (16-17 septembre 1985)
  6424. Le sous-ministre adjoint M. A. Kennedy, Mme C. Mead, M. R.
  6425. Maybank, M. W.
  6426. Sawadsky, M. P. Whittaker et Mme D. Gares; les
  6427. représentants du Syndicat des
  6428. salariés provinciaux de l'Alberta (AUPE), à savoir le Président
  6429. M. J. Booth,
  6430. M. T. Christian, M. G. Bourgeois, M. F. McRae, M. F.
  6431. Moorgen, Mme M. Sykes, M.
  6432. S. Nymchuk, Mme P. Wocknitz et Mme K. Lilly, ainsi que
  6433. plusieurs autres
  6434. témoins, notamment M. B. Olien, M. D. Andersen, M. W.
  6435. Leeson, le professeur J.
  6436. Robb et M. D. Werlin. Des réunions ont également eu lieu
  6437. avec les
  6438. représentants de la Confédération des associations des
  6439. enseignants
  6440. universitaires de l'Alberta: le professeur R. Heron, M. G. Unger,
  6441. M. A.
  6442. Mandelbaum et le professeur M. Sandilands.
  6443. A Toronto (18-20 septembre 1985)
  6444. M. D. Gilbert, directeur du Service des politiques et Mme J.
  6445. Bass, Mme K.
  6446. Boney, Mme M. Kenny, M. R. Peebles, M. Q. Silk et M. R.
  6447. Huston; les
  6448. représentants du Syndicat international des salariés des
  6449. services (SISS), à
  6450. savoir le président M. T. Roscoe, et M. J. van Beek, avec le
  6451. conseiller
  6452. juridique, M. J. Sack, M. S. Barrette et M. Pozkranzer; le
  6453. Syndicat des
  6454. salariés de la fonction publique de l'Ontario (OPSEU), à savoir
  6455. le président,
  6456. M. J. Clancy, M. C. Paliare, M. A. Todd, Mme J. Gates, Mme
  6457. S. Vallence, M. J.
  6458. Bernard, Mme R. Lees et M. R. Martin; le Syndicat canadien
  6459. de la fonction
  6460. publique (CUPE), à savoir le président, Mme L. Nicholson, M.
  6461. L. Kovacsi, M. D.
  6462. Macleod, M. G. Williams, M. D. Foley; ainsi que la Fédération
  6463. des enseignants
  6464. de l'Ontario, à savoir le président, M. G. Matte, Mme S.
  6465. Hildreth, M. D.
  6466. McAndless, M. K. Kennedy, M. M. Buchanan, Mme M. Wilson,
  6467. M. M. Green, M. J.
  6468. Carey et M. D. Halesworth.
  6469. A Saint-Jean (23-24 septembre 1985)
  6470. Le sous-ministre adjoint M. H. Nosewprthy, Mme D. Fry, M. L.
  6471. Powell, M. A.
  6472. Andrews et M. J. O'Neill; et les représentants de l'Association
  6473. du personnel
  6474. des services publics de Terre-Neuve (NAPE), à savoir le
  6475. président, M. F.
  6476. March, M. E. Seward, Mme M. Fleming, M. P. Ivany, M. E.
  6477. Hogan, Mme E. Price,
  6478. M. D. Curtis et M. D. Harnett.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer