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- 97. La plainte (cas no 1172) que le Congrès du travail du Canada (CTC) a présentée au nom d'organisations qui lui sont affiliées, le Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE), le Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario (OPSEA) et le Syndicat canadien des employés publics (CUPE) figure dans une communication en date du 15 novembre 1982. Le CTC a fourni des informations supplémentaires dans des communications en date du 15 décembre 1982, du 16 février et du 28 octobre 1983 et du 10 janvier 1984. La Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) a présenté sa plainte au nom de la Fédération des enseignants du Canada et de la Fédération des enseignants de l'Ontario, qui lui sont affiliées, dans une lettre en date du 8 février 1983 et des informations supplémentaires dans une communication en date du 7 mars 1983. Le Syndicat international des salariés des services (SISS) a présenté sa plainte dans une lettre datée du 6 avril 1984. Le gouvernement a adressé ses observations dans des communications en date des 25 avril 1983, 7 juin et 16 octobre 1984.
- 98. La Confédération des associations des enseignants universitaires de l'Alberta (CAFA) a présenté une plainte (cas no 1234) pour violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Canada/Alberta dans une communication en date du 19 septembre 1983. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 21 février 1984.
- 99. Le Congrès du travail du Canada (CTC) a présenté, dans une communication du 1er novembre 1983, une plainte (cas no 1247) pour violation des droits syndicaux dans l'Alberta au nom du Syndicat des salariés provinciaux de l'Alberta (AUPE), qui fait partie du Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE), deuxième affilié du CTC par ordre d'importance. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 3 mai 1984.
- 100. Dans une communication du 3 février 1984, le Congrès du travail du Canada (CTC) a déposé une plainte (cas no 1260) pour violation des droits syndicaux à Terre-Neuve, au nom de l'Association du personnel des services publics de Terre-Neuve (NAPE), qui est l'une des branches du Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE), lui-même affilié au CTC. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication du 29 mai 1984.
- 101. A sa réunion de novembre 1984 (Voir 236e rapport, paragr. 7, approuvé par le Conseil d'administration à sa 228 session, novembre 1984), le Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration a décidé d'ajourner son examen des cas concernant l'Ontario, l'Alberta et Terre-Neuve, étant d'avis qu'avant d'arriver à des conclusions dans ces cas il serait indispensable d'obtenir des renseignements supplémentaires, tout particulièrement par le biais d'une mission d'étude et d'information, qui pourraient faciliter l'éclaircissement d'aspects de la législation et de la pratique en cause. Le comité a donc prié le gouvernement de donner son assentiment à cette procédure.
- 102. Dans une lettre en date du 1er février 1985, le gouvernement a fait savoir qu'après des consultations avec les divers gouvernements provinciaux intéressés il n'avait pas d'objection à l'accomplissement de cette mission.
- 103. Au paragraphe 10 de son 238e rapport (approuvé par le Conseil d'administration à sa 229e session, février-mars 1985), le comité a expliqué que la mission d'étude et d'information se situerait dans le cadre de son examen des cas. Il a souligné que sa proposition d'envoi d'une telle mission venait de ce qu'il souhaitait arriver à des conclusions en connaissant et en comprenant le mieux possible les questions complexes en cause. Il s'est déclaré convaincu que ses travaux seraient grandement facilités par une appréciation sur place de l'application pratique quotidienne, dans la situation nationale ou locale, de la législation qui fait l'objet des plaintes.
- 104. Des dispositions ont donc été prises pour qu'une mission d'étude et d'information ait lieu au Canada - notamment dans les provinces de l'Ontario, de l'Alberta et de Terre-Neuve - du 12 au 25 septembre 1985. Le Directeur général du BIT a nommé Sir John Wood, CBE, LLM, en tant que son représentant pour effectuer la mission, et celui-ci a été accompagné, pendant la mission, par M. William R. Simpson, chef du Service de la liberté syndicale du Département des normes internationales du travail, et par Mme Jane Hodges, fonctionnaire du Service de la liberté syndicale. Le rapport du représentant du Directeur général est reproduit en annexe au présent document.
- 105. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
- 106. Le comité souhaite tout d'abord exprimer ses chaleureux remerciements à Sir John Wood pour s'être acquitté de cette mission d'étude et d'information en tant que représentant du Directeur général. C'est grâce à son rapport détaillé sur tous les cas examinés que le comité a pu formuler ses conclusions en se fondant sur une connaissance plus complète et une meilleure compréhension des questions complexes relatives à ces cas. Selon le comité, le rapport du représentant du Directeur général démontre clairement l'utilité de missions de ce genre, surtout dans les cas difficiles où, malgré la volumineuse documentation soumise par les parties, des discussions sur place peuvent beaucoup contribuer à faire la lumière sur les problèmes qui se posent.
- 107. Le comité souhaite exprimer aussi ses remerciements au gouvernement du Canada et aux gouvernements des provinces de l'Alberta, de l'Ontario et de Terre-Neuve pour le concours qu'ils ont prêté à la mission. Il remercie aussi les représentants du Congrès du travail du Canada, du Syndicat national du personnel des gouvernements provinciaux et des nombreux autres syndicats internationaux, nationaux ou provinciaux qui ont aidé le représentant du Directeur général à s'acquitter de son mandat.
- 108. Comme les plaintes et les réponses des divers gouvernements ainsi que les renseignements obtenus au cours de la mission sont pleinement analysés dans le rapport du représentant du Directeur général, il ne reste plus au comité qu'à formuler ses conclusions au sujet des cas qu'il a maintenant examinés de façon approfondie.
A. Conclusions du comité au sujet du cas no 1172/Ontario
A. Conclusions du comité au sujet du cas no 1172/Ontario
- 109. Le comité a pris note de tous les renseignements que contenaient les diverses plaintes présentées dans ce cas, de la réponse fournie par le gouvernement de la province de l'Ontario et des renseignements détaillés que le représentant du Directeur général a obtenus au cours de la mission d'étude et d'information.
- 110. Les allégations dans ce cas concernent l'adoption, en 1982, de la loi concernant les restrictions en matière de rémunérations face à l'inflation (loi no 179), entrée en vigueur le 21 septembre de cette même année. Cette loi n'est plus appliquée depuis septembre 1983, puisqu'elle a été remplacée, le 10 octobre 1983, par un autre texte dénommé loi sur la révision des prix et des rémunérations dans le secteur public (loi no 111). Il n'a pas été présenté de plainte officielle au sujet de cette dernière loi. Toutefois, comme elle est d'un intérêt direct pour les questions soulevées dans la plainte et que c'est la mesure la plus récente que le gouvernement ait prise en ce qui concerne la négociation collective dans le secteur public - ainsi que le représentant du Directeur général l'a souligné dans son rapport -, le comité juge approprié de donner son avis sur ce texte qui, relève-t-il, devait également venir à expiration à la fin septembre 1985. Le comité observe aussi qu'au cours de sa mission le représentant du Directeur général a pu recueillir l'opinion tant des syndicats que du gouvernement sur la teneur de la loi no 111 et ses effets.
- 111. La loi no 179 avait été adoptée pour faire face, d'après le gouvernement, à une situation d'urgence appelant des mesures pour juguler l'inflation croissante. Elle prévoyait des restrictions à la négociation collective pour les fonctionnaires provinciaux et les agents des institutions provinciales semi-publiques. Ses dispositions avaient pour effet de proroger de 12 mois les régimes de rémunération qui étaient en cours de négociation ou devaient venir à expiration durant la période allant du 1er octobre 1982 au 30 septembre 1983.
- 112. Les plaignants avaient allégué que, s'ils avaient bien été consultés au sujet des mesures que le gouvernement allait prendre, il n'avait été tenu aucun compte de leurs observations et de leur opinion. Selon eux, la situation économique de l'époque ne justifiait pas la prise de mesures législatives d'urgence pour restreindre les revenus dans la fonction publique.
- 113. Au sujet de ce premier point, le comité note, d'après le rapport du représentant du Directeur général, que la gravité ou même l'existence des problèmes économiques invoqués a donné matière à un débat animé, mais que, en particulier dans le présent cas, le gouvernement était convaincu que la situation économique de la province requérait des dispositions d'urgence. Quelle que fût la situation, il existait, selon lui, des problèmes économiques évidents, auxquels il avait décidé de s'attaquer au moyen d'une législation restreignant les rémunérations dans le secteur public. Il n'appartient pas au comité de discuter les arguments économiques sur lesquels se fondait cette opinion non plus que les mesures prises par le gouvernement.
- 114. Il incombe en revanche au comité de donner son avis sur le point de savoir si, en prenant ces mesures, le gouvernement a dépassé ce que le comité lui-même a jugé être les limites qui peuvent être acceptées, provisoirement, à la libre négociation collective.
- 115. En premier lieu, l'effet immédiat de la législation (loi no 179) était de limiter les augmentations de salaires dans la fonction publique à 5 pour cent (dans certains cas, 9 pour cent), pour une période qui ne dépassait pas un an. A cet égard, le comité rappelle qu'il a reconnu que les mesures de stabilisation visant à limiter le droit de négociation collective sont acceptables à la condition toutefois qu'elles ne constituent qu'une mesure d'exception, limitée à l'indispensable, qu'elles n'excèdent pas une période raisonnable et qu'elles s'accompagnent de garanties appropriées tendant à protéger le niveau de vie des travailleurs. Le comité estime, sur la base de tous les renseignements dont il dispose maintenant, que, dans le présent cas, tous ces critères étaient remplis, ou du moins que le gouvernement a fait des efforts sérieux pour les respecter.
- 116. La loi no 179 avait aussi pour effet immédiat de réduire les augmentations négociées dans le cadre des régimes de rémunération avant son entrée en vigueur, lorsque ces augmentations dépassaient celles prévues par la loi. Tout en reconnaissant que, pour prendre des mesures de restrictions salariales, il est nécessaire de choisir le moment de façon à obtenir le maximum d'effet sur la situation économique, le comité estime que l'interruption de contrats préalablement négociés n'est pas en conformité avec les principes de la libre négociation collective, parce que ces contrats doivent être respectés.
- 117. En ce qui concerne les allégations initiales des plaignants selon lesquelles la loi no 179 non seulement imposait des restrictions financières, mais aussi interrompait toute activité syndicale, suspendant notamment le droit de négocier sur les questions non pécuniaires et le droit de changer d'agents négociateurs, le comité note que, d'un point de vue strictement juridique, ces arguments ont été jugés dépourvus de fondement par la Cour d'appel de l'Ontario dans le cas Broadway Manor. Cette décision a toutefois été rendue trop tard pour être d'une quelconque utilité pratique aux parties au cours de la période de contrôle et il est clair que, malgré l'arrêt de la cour, les problèmes qui se sont posés à ce sujet ont été la cause de bien des difficultés et de tensions. Il est clair que la négociation sur les questions autres que pécuniaires a été entravée au cours de la période d'application de la législation de façon à ne pas aller à l'encontre du contrôle financier que celle-ci visait à mettre en oeuvre. Il est clair aussi que le gouvernement avait bien l'intention d'empêcher tout changement d'agents négociateurs au cours de la période de restriction, cela, selon le représentant du Directeur général, de façon á garantir des relations professionnelles aussi calmes que possible au cours de cette période. Le comité estime que, lorsqu'un gouvernement prend des mesures de restrictions salariales tendant à imposer un contrôle financier, il devrait avoir soin de faire en sorte que la négociation collective sur les questions n'ayant pas d'implications monétaires puisse se dérouler, et que les syndicats et leurs membres puissent exercer pleinement leurs activités syndicales normales.
- 118. Le comité note aussi que les syndicats ont invoqué de solides arguments pour démontrer que les mécanismes réguliers des relations professionnelles avaient souffert de l'adoption de la loi no 179 puis de la loi no 111. La norme imposée par la loi no 179 constituait en fait un substitut à l'arbitrage. Les syndicats font valoir que, en vertu des dispositions de la loi 111, la liberté de négocier ainsi que la liberté de recourir à des arbitres sont gravement réduites du fait de la nécessité de tenir compte de la capacité de payer de l'employeur ainsi que de la politique budgétaire du gouvernement. Des questions ont aussi été soulevées au sujet de l'indépendance des arbitres.
- 119. Le comité observe que la loi no 111 a été adoptée pour remplacer la loi no 179 et qu'elle supprimait plusieurs restrictions à la négociation salariale que cette dernière visait à couvrir. Il semble clair toutefois que - encore que de façon beaucoup moins rigide - la loi no 111 représentait la poursuite d'une politique de restriction par l'introduction de notions telles que "la capacité de payer de l'employeur" et "la politique budgétaire du gouvernement" comme critères à prendre en considération en vue de règlements salariaux. Il y a eu une controverse nourrie, même parmi les arbitres, sur le point de savoir si ces critères influaient réellement sur la négociation et les sentences arbitrales ou si, en fait, ils étaient pris en considération à n'importe quelle époque.
- 120. Le comité souligne, à cet égard, que les restrictions au droit de grève dans la fonction publique ou les services essentiels devraient être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides. Il souligne aussi que l'indépendance et l'impartialité du système d'arbitrage sont de la plus haute importance. Or, si, comme dans le cas présent, les arbitres sont nommés directement par un gouvernement qui énonce par la voie législative certains critères qu'ils seront tenus de suivre pour rendre leurs sentences, la confiance dans le système s'en trouvera inévitablement réduite.
- 121. Selon le comité, l'arrivée à expiration de la loi no 111 rend maintenant possible un retour à une situation normale dans laquelle la négociation collective pourra se dérouler librement avec la possibilité de recourir, le cas échéant, à l'arbitrage. Il pourrait être remédié, au moins en partie, à la défiance des syndicats et aux autres effets négatifs résiduels de la récente législation de restriction salariale qui affectent les relations professionnelles si le gouvernement se préoccupait, en consultation avec les syndicats, de faire en sorte que le système d'arbitrage, y compris le choix des arbitres, puisse jouir de nouveau d'une confiance aussi pleine que possible de la part des parties.
- Recommandations du comité
- 122. Le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier les conclusions suivantes:
- a) Le comité estime d'une manière générale que la loi concernant les restrictions en matière de rémunérations face à l'inflation (loi no 179) n'allait pas au-delà de ce qu'il a estimé précédement être les limites normalement acceptables qui peuvent être mises, provisoirement, à la négociation collective.
- b) Le comité estime toutefois que l'interruption par la loi no 179 de contrats préalablement négociés n'est pas en conformité avec les principes de la libre négociation collective, parce que ces contrats doivent être respectés.
- c) Le comité souhaite souligner que, lorsqu'un gouvernement prend des mesures de restrictions salariales tendant à imposer un contrôle financier, il devrait avoir soin de faire en sorte que la négociation collective sur les questions qui n'ont pas d'implications monétaires puisse se poursuivre et que les syndicats et leurs membres puissent exercer pleinement leurs activités syndicales normales.
- d) Le comité souligne que les restrictions au droit de grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels devraient être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, rapides et impartiales.
- e) Le comité exprime l'espoir que, puisque la législation qui faisait l'objet de la plainte est maintenant arrivée à expiration, le gouvernement, en consultation avec les syndicats, s'efforcera de surmonter les effets négatifs résiduels qu'elle pourrait avoir sur les relations professionnelles; plus particulièrement, le comité espère que le système d'arbitrage et les procédures de choix des arbitres seront révisés de façon à ce qu'ils puissent jouir de nouveau d'une confiance aussi pleine que possible de la part de toutes les parties.
B. Conclusions du comité au sujet du cas no 1234/Alberta
B. Conclusions du comité au sujet du cas no 1234/Alberta
- 123. Le comité note que ce cas concerne des allégations selon lesquelles la loi sur les universités dénie la liberté syndicale aux membres de leur personnel enseignant en habilitant les employeurs (les conseils des gouverneurs) à désigner les catégories de salariés qui peuvent faire partie des associations du personnel universitaire. Les plaignants font état de l'effet négatif que ces modifications ont eu sur la composition des effectifs de l'association du personnel de l'Université d'Athabasca.
- 124. Le comité observe que cette situation découle de l'effet combiné de deux dispositions de la loi, l'article 21.2 2), qui définit l'"association du personnel universitaire" (academic staff association) comme un organisme comprenant les "membres du personnel universitaire" (academic staff members), et l'article 17 1) d.1), qui habilite les conseils des gouverneurs à désigner les "membres du personnel universitaire". Bien que, dans sa réponse écrite, le gouvernement souligne que le milieu universitaire requiert une conception particulière de la relation employeur-salarié, puisque le personnel enseignant participe à tous les niveaux de la gestion de l'université, il reconnaît qu'à l'Université d'Athabasca, l'employeur - après avoir consulté l'association des professeurs - a modifié sa désignation restrictive des "membres du personnel universitaire".
- 125. Il ressort du rapport du représentant du Directeur général que c'est seulement à l'Université d'Athabasca que l'usage que l'employeur a fait de son pouvoir de désignation a posé des problèmes. Dans les trois autres universités de la province, la désignation des "membres du personnel universitaire" s'est effectuée sans difficulté, en consultation avec les associations des professeurs. En outre, il apparaît que les circonstances particulières propres à l'Université d'Athabasca (le fait qu'il s'agit d'une "université ouverte", récemment transférée de la capitale de la province à une ville du nord de l'Alberta) pourraient avoir entraîné des malentendus en ce qui concerne la désignation restrictive du personnel enseignant par l'employeur à ce moment-là. Quoi qu'il en soit, le comité note que cette désignation est maintenant chose acquise, à la satisfaction des deux parties, dans les quatre universités de la province.
- 126. Il n'en demeure pas moins que d'aucuns craignent que, dans l'avenir, les désignations puissent s'effectuer de telle sorte que des membres du corps enseignant ou des membres du personnel administratif ou du personnel de planification n'exerçant pas de fonctions de direction soient exclus des associations du personnel qui ont pour mission de protéger et de défendre les intérêts de ces catégories de travailleurs. A supposer qu'ils soient désignés comme ne faisant pas partie du personnel enseignant, ces travailleurs - qui sont expressément exclus du champ d'application de la loi sur les relations professionnelles et de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique - n'auraient pas la possibilité de constituer une association pour défendre leurs intérêts, ni de s'affilier à une telle association. Dans ces conditions, le comité appelle l'attention du gouvernement sur les dispositions de l'article 2 de la convention no 87, ratifiée par le Canada, qui garantissent à tous les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte, le droit de constituer les organisations de leur choix ainsi que celui de s'affilier à ces organisations. Il ne semble pas au comité que les circonstances particulières dans lesquelles les décisions doivent être prises dans les universités de l'Alberta justifient que l'on soumette ce droit à une quelconque limite en investissant l'organisme employeur de larges pouvoirs en matière de désignation. Le comité rappelle qu'il est déjà parvenu à la même conclusion par le passé lorsqu'il a examiné les cas relatifs au gouvernement provincial de l'Alberta auxquels les plaignants font référence dans leur plainte écrite.
- 127. En conséquence, le comité estime que, pour assurer le plein respect du principe que pose l'article 2 de la convention no 87, des mesures devraient être prises pour abroger l'article 17 1) d.1) de la loi et adopter un système indépendant de désignation lorsque les parties n'arrivent pas à se mettre d'accord (par exemple, ainsi qu'il a été suggéré au cours de la mission d'étude et d'information, une procédure d'arbitrage par un tiers). Le comité insiste sur ce dernier point car, si le rapport du représentant du Directeur général indique que des consultations entre les parties ont abouti à des désignations satisfaisantes, le gouvernement provincial a souligné, au cours de la mission, qu'il ne pouvait envisager d'apporter aucune modification importante à sa politique en ce qui concerne la loi sur les universités. Le comité estime qu'un mécanisme indépendant devrait être disponible, au besoin, pour aider à désigner les "membres du personnel enseignant" aux fins de l'affiliation à une association du personnel universitaire. Un mécanisme comme celui dont il est question dans le rapport du représentant du Directeur général pourrait contribuer à rassurer les plaignants qui craignent qu'il soit fait un usage abusif de l'article 17 1) d. 1) de la loi.
- 128. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier de demander au gouvernement de prendre des mesures pour abroger la disposition de la loi sur les universités qui habilite l'organisme employeur à déterminer ceux qui peuvent faire partie des associations du personnel universitaire. Le comité recommande aussi d'envisager la possibilité d'adopter un système indépendant qui puisse servir, au besoin, à désigner les membres du personnel universitaire, qu'il s'agisse d'un système d'arbitrage par une tierce partie ou d'un mécanisme informel du type de celui que mentionne le rapport du représentant du Directeur général.
C. Conclusions du comité au sujet du cas no 1247/Alberta
C. Conclusions du comité au sujet du cas no 1247/Alberta
- 129. Le comité note que le présent cas concerne des allégations selon lesquelles les modifications (contenues dans la loi no 44) qui ont été apportées en 1983 à la loi sur les relations professionnelles et à la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique de l'Alberta, d'une part limitent la liberté syndicale en excluant de nombreux salariés des unités de négociations, et d'autre part empiètent sur le droit des organisations de travailleurs d'organiser leurs activités en toute liberté en restreignant la négociation collective et en soumettant le système d'arbitrage, jusque-là impartial, à la politique budgétaire du gouvernement.
- 130. Le comité note tout d'abord que, bien qu'il n'en soit pas fait état dans la plainte écrite, l'article 93 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, qui interdit la grève aux agents de l'administration provinciale, a été porté à l'attention de la mission d'étude et d'information. Le comité considère qu'il importe d'examiner cet article, car c'est dans le contexte de ses dispositions qu'il faut considérer les allégations des plaignants. Selon l'AUPE, les principales raisons que le gouvernement a invoquées pour justifier cette interdiction totale des grèves dans la fonction publique provinciale tiennent à ce que les salariés en question étaient si étroitement liés à ceux qui fournissent des services essentiels qu'il était raisonnable de les traiter de la même façon, et qu'il n'est pas possible d'obtenir ces services ailleurs. L'AUPE a souligné que l'article 93 ne s'applique pas aux fonctionnaires qu'emploient les municipalités ou les conseils scolaires, et il a déclaré au représentant du Directeur général que rien ne démontrait qu'il existât un lien étroit entre agents essentiels et non essentiels, de telle sorte qu'une grève de ces derniers fût de nature à empêcher la fourniture des services essentiels. Rien ne démontrait non plus qu'il fût impossible d'obtenir ailleurs les services assurés par les agents en question.
- 131. Le comité rappelle qu'il a été appelé à examiner la question de l'interdiction de la grève dans un cas précédent mettant en cause le gouvernement du Canada/Alberta. (Voir cas no 893, examiné le plus récemment dans le 204e rapport, paragr. 121 à 134, approuvé par le Conseil d'administration à sa 214e session (novembre 1980)). Dans ce cas, le comité a rappelé que le recours à la grève, reconnu comme découlant de l'article 3 de la convention, est un des moyens essentiels dont les travailleurs disposent pour défendre leurs intérêts professionnels. Il a aussi rappelé que, si des limites doivent être mises au recours à la grève par la voie législative, il convient de distinguer entre les entreprises publiques qui sont réellement essentielles, c'est-à-dire qui fournissent des services dont l'interruption mettrait en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne dans tout ou partie de la population, et celles qui ne sont pas essentielles au sens strict du terme. Sur la recommandation du comité, le Conseil d'administration a attiré l'attention du gouvernement sur ce principe et lui a suggéré d'envisager une modification de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique de façon à limiter l'interdiction de la grève aux services qui sont essentiels au sens strict du terme. Dans le présent cas, le comité souhaite attirer de nouveau l'attention sur ses précédentes conclusions au sujet de l'article 93 de la loi.
- 132. A propos de cette question des restrictions au droit de grève, il convient de noter qu'aux termes d'une allégation écrite précise une modification à l'article 117.1 de la loi sur les relations professionnelles, contenue dans la loi no 44, interdit la grève à tous les salariés des hôpitaux. Le comité note que cette exclusion globale vaut pour les aides de cuisine, les portiers, les jardiniers, etc., mais que le gouvernement a déclaré au représentant du Directeur général que l'article 117.1 n'avait de répercussions que pour de petits groupes et que, en tout état de cause, la question avait été portée devant la Cour d'appel de l'Alberta et la Cour suprême du Canada. Comme cette disposition n'est pas assez précise en ce qui concerne l'importante qualification d'"agent essentiel", le comité renvoie au principe rappelé dans le paragraphe précédent au sujet des circonstances dans lesquelles le recours à la grève peut être interdit. Il demande au gouvernement de réexaminer l'article 117.1 de façon que l'interdiction du droit de grève soit limitée aux services qui sont essentiels au sens strict du terme.
- 133. En ce qui concerne les dispositions qui excluent de la négociation collective les agents préposés au contrôle des paiements et aux auditions et ceux qui exercent des fonctions en substance semblables, ainsi qu'aux agents du Bureau de l'Assemblée législative, du Bureau électoral de l'Auditeur général et du Bureau du Conciliateur (Ombudsman) (art. 21 1) g) et h) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique), le comité note que, selon la réponse écrite du gouvernement, la situation précédente n'a pas été modifiée mais "affinée". Il note aussi, d'après les renseignements que contient le rapport du représentant du Directeur général, que ces modifications apportées à l'article 21 1) de la loi revenaient à réformer par la voie législative plusieurs décisions du Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique. En outre, au cours de la mission d'étude et d'information, l'AUPE s'est déclaré préoccupé d'une modification apportée en 1985 à l'article 21 1) l) de la loi qui autorise l'exclusion "pour toute autre raison". Bien que les différends relatifs aux exclusions au titre du paragraphe 1) de l'article 21 puissent être portés devant le Conseil en vue d'une décision au titre du paragraphe 2), l'AUPE se défiait de la vaste portée des exclusions possibles; ses représentants ont déclaré qu'en pratique plus de 400 salariés s'étaient vu refuser l'accès à la négociation collective du fait de ces modifications apportées à l'article 21. En revanche, le gouvernement a déclaré à la mission que seuls étaient touchés 260 salariés, qui tous exerçaient essentiellement des fonctions de direction ou s'occupaient de la politique du personnel.
- 134. Vu la volumineuse documentation qui a été fournie à la mission quant au fait que les attributions de certains de ces salariés ne consistent pas en fonctions de direction, le comité souhaite appeler l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel seuls les fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat (c'est-à-dire qui sont employés à des titres divers dans les ministères ou autres organismes gouvernementaux comparables), et non les autres personnes employées par le gouvernement, par les entreprises publiques ou par des institutions publiques autonomes, peuvent être exclus du champ d'application des dispositions garantissant le droit de négociation collective. D'après ce critère, le comité ne saurait accepter que tous les agents publics actuellement énumérés à l'article 21 1) de la loi soient privés de la possibilité d'être représentés aux fins de la négociation collective. En conséquence, il prie le gouvernement de réexaminer ledit article à la lumière de ce principe.
- 135. Bien qu'il n'en soit pas fait état dans la plainte écrite, de nombreux renseignements ont été fournis à la mission au sujet de l'article 48 2) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, qui limite les questions pouvant être soumises à l'arbitrage. D'après l'AUPE, s'il est vrai que le conseil peut trancher les différends portant sur le point de savoir si certains sujets sont exclus de l'arbitrage, les syndicats ont perdu toute confiance en lui à cause des ses récentes décisions dans ce domaine qui, toujours selon l'AUPE, considèrent toutes les questions comme relevant de la prérogative de direction de l'employeur et, de ce fait, ne se prêtant pas à l'arbitrage. En outre, l'AUPE a soutenu que le conseil retardait ou empêchait souvent la soumission à l'arbitrage de l'ensemble d'un conflit relatif à la négociation. Le comité prend note des informations sur la question contenues dans le rapport du représentant du Directeur général car elles font partie du contexte dans lequel il faut replacer la deuxième allégation essentielle formulée dans le présent cas, à savoir que la loi no 44 a endommagé, sinon détruit, le système d'arbitrage. Plus précisément, le syndicat soutient que le système d'arbitrage a été affaibli par le recours à un organisme de procédure (le Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique) pour sélectionner les questions pouvant donner matière à un arbitrage. Le comité note aussi les exemples, donnés à la mission, de questions dont le conseil a jugé qu'elles ne se prêtaient pas à être soumises à l'arbitrage (par exemple, la durée du travail, certains congés, les transferts, les promotions, etc.). Le comité a souligné que les restrictions imposées au droit de grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels devraient s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides à chaque étape desquelles les parties devraient pouvoir participer et dans lesquelles les décisions, une fois rendues, aient force obligatoire pour les deux parties. Le comité estime aussi que le système actuel, dans lequel le Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique peut empêcher que des questions qui font l'objet d'un différend soient soumises à l'arbitrage, n'est pas pleinement conforme aux principes de l'OIT et qu'il a entraîné de grandes tensions entre les parties ainsi qu'une perte de confiance dans le mécanisme d'arbitrage de la part des syndicats.
- 136. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle l'énumération des facteurs - parmi lesquels la politique budgétaire du gouvernement - dont les arbitres doivent tenir compte pour rendre leurs sentences (art. 117.8 de la loi sur les relations professionnelles et art. 55 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique) représente une ingérence dans l'arbitrage lui-même, le comité prend note de la réponse écrite du gouvernement qui fait valoir que les lois en question ne font qu'énumérer divers facteurs sans indiquer l'importance que les conseils d'arbitrage devraient leur donner. Le comité observe, d'après le rapport du représentant du Directeur général, qu'en pratique les conseils d'arbitrage n'accordaient pas une importance prédominante à la politique budgétaire du gouvernement et, dans certains cas, jugeaient le critère dépourvu d'utilité. Néanmoins, les plaignants craignent encore des abus possibles. C'est cette défiance qui oblige le comité à rappeler une fois de plus le principe selon lequel des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides devraient être disponibles lorsque le droit de grève est soumis à des restrictions dans la fonction publique ou dans les services essentiels.
- 137. Dans le présent cas, il apparaît au comité que l'indépendance des conseils d'arbitrage institués afin de donner une compensation aux agents publics pour la perte de leur droit de grève (conseils qui sont composés d'un représentant de chacune des parties au différend et d'un président désigné conjointement par lesdits représentants) n'est pas mise en cause par le fait que la législation énumère les facteurs dont il doit être tenu compte.
- 138. En ce qui concerne les huit autres modifications à la loi sur les relations de travail contenues dans la loi no 44 (dont une est reprise de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique), le comité note que, d'après le rapport du représentant du Directeur général, nombre d'entre elles n'ont pas soulevé de problèmes en pratique et que certaines n'ont même pas été utilisées. En particulier, le comité ne voit pas de menace pour la liberté syndicale dans les articles suivants:
- - L'article 1 w.1), qui introduit une nouvelle conception de l'"organisation syndicale". (Cet article n'a jamais été adopté.)
- - L'article 74 1), aux termes duquel un représentant dûment autorisé aux fins de la négociation collective doit résider en Alberta. (Cet article pourrait présenter des inconvénients mineurs pour le syndicat mais il vise en fait manifestement à éviter des retards dans la conclusion du règlement définitif et la signature des conventions. Il ne porte pas atteinte au droit d'un syndicat de se faire aider dans la négociation par des personnes résidant hors de la province.)
- - L'article 87, qui n'autorise qu'un seul vote, supervisé par le conseil, au sujet de la grève ou du lock-out. (Cet article limite certaines tactiques des syndicats mais n'empêche pas ceux-ci de procéder à un sondage auprès de leurs membres pour déterminer leur position avant de demander un vote.)
- - L'article 49 1), qui prévoit un moratoire de 90 jours avant qu'il soit possible de demander une nouvelle ordonnance d'accréditation. (Cet article affecte lui aussi les tactiques syndicales mais il vise manifestement à dissiper l'incertitude quant à la force réelle d'un syndicat dans l'unité de négociation et à éviter l'abus des procédures d'accréditation.)
- - L'article 132, qui autorise à demander au conseil de rendre une décision en ce qui concerne les droits du successeur. (Cet article ne fait que réglementer et accélérer la pratique antérieure normale et n'est pas déraisonnable.)
- - L'article 102.2, qui autorise à appliquer aux salariés en question les recommandations d'une commission d'enquête sur les différends. (Cet article peut soulever la question de savoir quel rôle revient à l'organe exécutif d'un syndicat mais il ne prive pas les travailleurs, individuellement, de leurs droits syndicaux.)
- 139. En revanche, le comité souhaite exprimer une certaine préoccupation au sujet de deux autres modifications apportées à la loi sur les relations professionnelles:
- - Les articles 105 et 106, qui interdisent de menacer d'une grève illégale, pourraient empêcher les organisations de travailleurs d'avoir la latitude d'organiser leurs activités en toute liberté et exposer les responsables syndicaux à certains risques, étant donné la définition très large du mot "grève" donnée par la loi. Le gouvernement a déclaré au représentant du Directeur général que l'article 105 n'avait pas été utilisé et qu'il appartiendrait au conseil de mettre en lumière toute difficulté éventuellement soulevée par sa rédaction s'il avait un jour à l'appliquer. Le comité estime que, comme le représentant du Directeur général l'a suggéré, l'incertitude et l'imprécision de la définition du mot "grève" dans le texte pourraient soulever des difficultés pour les syndicalistes s'ils engagent une action de bonne foi et que, par la suite, cette action est déclarée illégale. Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures en vue de clarifier la situation en consultation avec les syndicats et, au besoin, de modifier en conséquence l'article en question.
- - L'article 117.94 (de même que l'article 92.2 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique), qui autorise l'employeur à suspendre les déductions des cotisations syndicales sur les salaires si une grève illégale avait lieu. (Cet article n'a pas été utilisé.) La portée exacte de cette disposition est toutefois incertaine en ce sens qu'il n'est pas clairement précisé si la suspension s'appliquerait à l'ensemble de l'unité de négociation ou seulement aux travailleurs qui auraient participé à la grève illégale. Des discussions devraient avoir lieu avec les syndicats en vue de préciser la portée exacte de cette disposition dans la pratique.
- Recommandations du comité
- 140. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier les conclusions suivantes:
- a) Le comité considère que les dispositions de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique et de la loi sur les relations professionnelles qui interdisent la grève à une vaste gamme de fonctionnaires provinciaux et de travailleurs des hôpitaux dépassent les limites qu'il est acceptable d'imposer au droit de grève reconnu comme découlant de l'article 3 de la convention no 87. Le comité demande au gouvernement de réexaminer les dispositions en question en vue de restreindre l'interdiction des grèves aux services qui sont essentiels au sens strict du terme.
- b) En ce qui concerne le vaste éventail d'agents publics qui sont exclus de la négociation collective en vertu de l'article 21 1) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, le comité souhaite appeler l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel seuls les fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat peuvent faire l'objet d'une telle exclusion. Il prie le gouvernement de revoir ledit article à la lumière de ce principe.
- c) Bien qu'il n'estime pas que les principes de la liberté syndicale soient remis en question par le fait de mentionner la politique budgétaire du gouvernement comme un facteur que les arbitres doivent prendre en considération, le comité note avec une certaine préoccupation que le Conseil des relations professionnelles dans la fonction publique est habilité (par l'article 48 2) de la loi) à déterminer, parmi toutes les questions entrant en jeu dans un différend collectif, quelles sont celles qui peuvent être soumises à l'arbitrage. Le comité espère que les dispositions de cette sorte qui ont amoindri la confiance du syndicat dans le système d'arbitrage - lequel a pour raison d'être de compenser le fait que les agents en question ne jouissent pas du droit de grève - seront réexaminées en consultation avec les parties et que les modifications nécessaires seront apportées pour que les arbitres puissent connaître de toutes les questions intervenant dans un différend.
- d) Le comité ne voit pas de menace pour la liberté syndicale dans les diverses modifications à la loi sur les relations professionnelles contenues dans la loi no 44 et qui sont évoquées au paragraphe 138, à savoir les articles 74 1), 87, 49 1), 132 et 102.2.
- e) En ce qui concerne les articles 105 et 106 de la loi sur les relations professionnelles, tels que modifiés, qui interdisent de menacer d'une grève illégale, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures en vue de préciser la portée exacte de ces dispositions en consultation avec le syndicat et, au besoin, de les modifier en conséquence. f) En ce qui concerne l'article 117.94 de la loi sur les relations professionnelles et l'article 92 2) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique, qui permettent de supprimer les déductions de cotisations syndicales sur les salaires en cas de grève illégale, le comité recommande que des discussions aient lieu avec les syndicats en vue de préciser la portée de cette disposition dans la pratique.
D. Conclusions du comité au sujet du cas no 1260/Terre-Neuve
D. Conclusions du comité au sujet du cas no 1260/Terre-Neuve
- 141. Le comité prend note de tous les renseignements détaillés que les plaignants ont fournis dans ce cas, des renseignements également détaillés que le gouvernement a transmis et des informations qui figurent dans le rapport du représentant du Directeur général.
- 142. Les plaignants avaient essentiellement allégué que la loi sur la fonction publique (négociation collective) - la loi no 59 -, entrée en vigueur le 1er septembre 1983, était en contradiction avec les normes internationales en matière de liberté syndicale sur trois points en particulier: la définition de "l'employé" donnée par l'article 2 1) i) de la loi, la désignation des "employés essentiels" contenue dans l'article 10, et les limites imposées à l'exercice du droit de grève par les articles 10, 23 et 24.
- 143. Avant d'examiner ces divers points, le comité prend note des renseignements dont il dispose maintenant au sujet de l'adoption de la loi en question. Il ne peut que déplorer que, malgré des relations qui semblaient bonnes entre le syndicat plaignant et le gouvernement, le syndicat n'ait pas été suffisamment consulté avant l'adoption de la loi no 59. Cet état de choses s'explique dans une certaine mesure par l'attitude des deux parties. Le gouvernement avait ce que, eu égard à son expérience, il jugeait être de solides raisons de faire modifier la législation en vigueur, tandis que le syndicat était opposé à ce projet. Il en est résulté un texte qui, de l'avis du syndicat, autorise des soupçons quant aux motifs réels pour lesquels le gouvernement a voulu le voir adopter. Ce texte, au demeurant, à supposer que des consultations suffisantes aient eu lieu, aurait peut-être bien revêtu une forme différente, ce qui aurait évité les tensions et les soupçons qui existent à l'évidence entre le syndicat et le gouvernement. Le comité note en particulier qu'en 1985, deux ans seulement après sa promulgation, d'importantes modifications ont été apportées à la loi no 59.
- 144. Le comité souligne l'importance qu'il convient d'attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux. Il exprime le ferme espoir que, eu égard aux problèmes qu'ont causés les procédures utilisées pour adopter la loi no 59, le gouvernement et le syndicat procéderont de façon systématique à de véritables discussion s et négociations en vue de résoudre les problèmes qui se sont posés dans le présent cas.
- 145. En ce qui concerne l'article 2 1) i) xii) de la loi no 59 (définition du mot "employés"), le syndicat s'inquiétait surtout de ce que les personnes employées dans le cadre d'un programme de création d'emplois que le cms gouvernement provincial administrait avec ses propres fonds et/ou des fonds fédéraux fussent exclues de cette définition. Selon les plaignants, non seulement les dispositions incriminées empêchaient ces personnes de s'affilier à un syndicat, mais la présence de cette main-d'oeuvre non syndiquée sur les lieux de travail où le syndicat avait des membres constituait un obstacle à la négociation collective et une menace pour l'efficacité du syndicat, par exemple en cas de grève.
- 146. A ce sujet, le comité note qu'il semblait y avoir un large malentendu entre les parties quant au nombre exact de personnes touchées par cette disposition. Quoi qu'il en soit, le comité ne peut accepter que des personnes participant à un programme de création d'emplois soient entièrement privées du droit d'appartenir au syndicat de leur choix. Il estime que l'extension de leur droit d'organisation n'interférerait pas nécessairement avec le bon fonctionnement du programme et qu'en outre elle diminuerait la crainte du syndicat de voir des travailleurs syndiqués remplacés par des travailleurs engagés dans le cadre du programme.
- 147. Sont aussi exclus de la définition du mot "employés" les travailleurs chargés de conseiller l'employeur en matière d'élaboration ou d'administration des politiques ou des programmes (art. 2 1) ii) xv)). Le comité note que le Conseil des relations professionnelles, de caractère tripartite, semble avoir par le passé usé de ses pouvoirs de décider des catégories de main-d'oeuvre à exclure d'une unité de négociation de façon assez restrictive. Il estime que cette disposition n'est pas contraire aux principes de la liberté syndicale.
- 148. Eu égard aux problèmes et au climat de suspicions auxquels les dispositions précitées de la loi no 59 ont donné naissance, le comité prie instamment le gouvernement de réexaminer la question des exclusions en pleine consultation avec le syndicat.
- 149. Le comité note que les employés des services publics de Terre-Neuve disposent du droit de grève sous réserve de certaines restrictions en ce qui concerne, notamment, les employés réputés essentiels. Les employés essentiels sont définis dans la loi principale comme "les employés dont les attributions sont totalement ou partiellement des attributions, à un moment quelconque ou pendant une période quelconque, indispensables pour la santé, la sûreté ou la sécurité publiques" (art. 10.1).
- 150. A cet égard, le comité souhaite tout d'abord rappeler que la grève peut être limitée ou interdite pour les fonctionnaires qui agissent en tant qu'agents de la puissance publique ou qui participent à des services dont l'interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans tout ou partie de la population. Ces limites ou interdictions devraient toutefois être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides. En outre, le comité observe que, du fait des modifications qui ont été apportées à la loi en 1985, un nombre important d'unités de négociation ont été exclues de l'application de son article 10. Le gouvernement est aussi convenu par écrit avec le syndicat qu'aucune personne ne serait désignée comme exerçant une fonction essentielle dans une dizaine d'unités de négociation.
- 151. Le problème à Terre-Neuve est que, bien que la grève soit possible même dans des services tels que les institutions de soins de santé, elle risque d'être inefficace par suite de la procédure de désignation d'un certain nombre de "employés essentiels". En outre, si le nombre de travailleurs ainsi désignés par le Conseil des relations professionnelles est inférieur à 50 pour cent de l'ensemble des employés en cause, il peut arriver qu'il ne soit pas possible de demander le recours à l'arbitrage. En d'autres termes, il semble dans ces conditions que les restrictions imposées aux syndicats dans le déroulement d'une grève efficace ne sont pas convenablement compensées par un libre accès à la procédure d'arbitrage.
- 152. Le comité estime que, si la méthode utilisée pour désigner les employés essentiels n'est pas incompatible avec les principes de la liberté syndicale, le gouvernement devrait néanmoins revoir la disposition pertinente de façon à faciliter l'accès à un arbitrage indépendant en cas de différend.
- 153. D'autres modifications apportées à la loi principale par la loi no 59 et qui avaient une incidence sur le droit de grève ont aussi été critiquées par le syndicat. Abrogeant l'article 10 de la loi principale, l'article 2 de la loi 59 l'avait remplacé par des dispositions empêchant un agent négociateur de voter la grève ou de faire grève jusqu'à ce que les parties soient parvenues à un accord ou que le conseil ait déterminé combien l'unité en question comptait d'employés essentiels. En outre, en vertu des modifications apportées aux articles 23 et 24 de la loi, il était obligatoire, non seulement de donner un préavis de grève de sept jours, mais aussi d'indiquer la date à laquelle la grève débuterait. Si la grève ne commençait pas à la date indiquée dans le préavis, il fallait attendre un mois avant de pouvoir déposer un nouveau préavis, qui devait être aussi de sept jours, avec indication de la nouvelle date à laquelle il était prévu que la grève commençât. Ces modifications empêchaient aussi les grèves tournantes dans les institutions de soins de santé.
- 154. En ce qui concerne ces modifications et les allégations formulées, le comité n'estime pas que les modalités ainsi imposées constituent pour les syndicats un obstacle indu à l'exercice du droit de grève et dépassent de ce fait ce qui est acceptable conformément aux normes et aux principes internationaux en matière de liberté syndicale. Le comité note aussi, en particulier, que la nouvelle modification adoptée en juillet 1985, à savoir le délai d'un mois dont il est question plus haut, ne s'applique maintenant qu'au secteur hospitalier. Il note toutefois, d'après le rapport du représentant du Directeur général, que les syndicats voient dans ces limites une ingérence du gouvernement dans leur tactique de grève et, en particulier, considèrent que l'obligation de préavis pourrait servir à retarder les grèves par des négociations de dernière minute. Le comité observe que rien ne prouve que ces craintes soient fondées, particulièrement à la lumière de la déclaration du gouvernement d'où il ressort que les parties peuvent toujours se mettre d'accord sur un allongement, d'une journée, du préavis de sept jours si cela est nécessaire. C'est encore une question que, selon lui, les parties pourraient discuter ensemble en vue de dissiper les doutes et les suspicions qui subsistent quant à la façon dont la loi sera appliquée.
- Recommandations du comité
- 155. Le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver la présente partie du rapport, et en particulier les conclusions suivantes:
- a) Le comité souligne l'importance qu'il convient d'attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu avec les syndicats sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux; il regrette que le syndicat plaignant n'ait pas été suffisamment consulté avant la promulgation de la loi no 59.
- b) Le comité estime que les personnes qui participent aux programmes de création d'emplois ne devraient pas être privées du droit d'appartenir au syndicat de leur choix; il prie instamment le gouvernement de revoir la question de l'exclusion de cette catégorie de travailleurs en pleine consultation avec le syndicat.
- c) Le comité souligne que les restrictions en matière de grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels devraient être compensées par des procédures de conciliation et d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides, à chaque étape desquelles les parties devraient pouvoir prendre part et dans lesquelles les décisions aient dans tous les cas force obligatoire pour les deux parties.
- d) Le comité demande au gouvernement de revoir les dispositions de la loi relatives à la désignation des employés essentiels en vue de faciliter l'accès à un arbitrage indépendant en cas de différend.
- e) Le comité n'estime pas que les modalités d'exercice de la grève imposées par les articles 23 et 24 de la loi no 59, tels que modifiés, soient incompatibles avec les principes de la liberté syndicale.
- f) Le comité exprime le ferme espoir que, eu égard aux problèmes auxquels la promulgation de la loi no 59 a donné naissance, le gouvernement et le syndicat procéderont de façon systématique à de véritables discussions et négociations en vue de résoudre les problèmes qui subsistent au sujet de l'application pratique de cette loi.
ANNEXE RAPPORT SUR UNE MISSION D'ETUDE ET
ANNEXE RAPPORT SUR UNE MISSION D'ETUDE ET - D'INFORMATION EFFECTUEE AU CANADA
- PAR SIR JOHN WOOD, CBE, LLM, REPRESENTANT DU
- DIRECTEUR GENERAL DU BUREAU
- INTERNATIONAL DU TRAVAIL,CONCERNANT LES CAS
- CI-APRES DONT EST SAISI LE
- COMITE DE LA LIBERTE SYNDICALE DU CONSEIL
- D'ADMINISTRATION: ONTARIO (CAS NO
- 1172), ALBERTA (CAS NOS 1234 et 1247) ET
- TERRE-NEUVE (CAS NO 1260)
- Table des matières
- Paragraphes
- I. Introduction ........................................ 1-7
- II. Observations générales .............................. 8-21
- a) Pressions économiques et politiques ........... 9-10
- b) Secteur public ................................ 11-13
- c) Mécanisme de la négociation collective ........ 14-15
- d) Législation ................................... 16-21
- III. Cas de l'Alberta - no 1247 .......................... 22-84
- A. Introduction ...................................... 2
- B. Problèmes en cause ................................ 23
- i) Exclusion de certains salariés des négociations
- collectives
- ................ 24-25
- ii) Système d'arbitrage ......................... 26-28
- iii) Autres questions ............................ 29-45
- C. Informations reçues pendant la mission ............ 46-75
- a) Négociation collective et arbitrage ........... 48-56
- b) Salariés exclus ............................... 57-58
- c) Droit de grève ................................ 59-67
- d) Autres questions .............................. 68-75
- D. Remarques finales ................................. 76
- Négociation collective et arbitrage ............... 77-78
- Questions particulières ............................79-80
- Considérations générales .......................... 81-84
- IV. Cas de l'Alberta - no 1234 .......................... 85-96
- A. Introduction ...................................... 85
- B. Problèmes en cause ................................ 86-92
- C. Informations reçues pendant la mission ............ 93-94
- D. Remarques finales ................................. 95-96
- V. Cas de l'Ontario - no 1172 .......................... 97-157
- A. Introduction ...................................... 97
- B. Problèmes en cause ................................ 98-119
- C. Informations reçues pendant la mission ............ 120-143
- D. Remarques finales ................................. 144-157
- VI. Cas de Terre-Neuve - no 1260 ........................ 158-218
- A. Introduction ...................................... 158
- B. Problèmes en cause ................................ 159
- a) Définition de l'"employé public" .............. 161-165
- b) Désignation des "employés publics exerçant
- exerçant des fonctions essentielles" .......... 166-173
- c) Limitation du droit de grève .................. 174-177
- C. Informations reçues pendant la mission ............ 178-179
- a) Consultation .................................. 180-181
- b) Définition de l'"employé public"............... 182-185
- c) Questions concernant le droit de grève ........ 186-208
- D. Remarques finales ................................... 209-218
- VII. Observations finales ................................ 219-232
- 1. Lutte contre l'inflation ........................ 222-223
- 2. Consultation .................................... 224-225
- 3. Fonctionnaires - négociation et droit de grève .. 226
- a) Négociation collective ........................ 227-228
- b) Système indépendant de règlement des conflits .
- 229-232
- Page
- ANNEXE ...................................................... 103
- I. Introduction
- 1. A sa réunion de novembre 1984, le Comité de la liberté
- syndicale du
- Conseil d'administration a décidé d'ajourner son examen des
- cas concernant
- l'Ontario, l'Alberta et Terre-Neuve, estimant qu'avant d'arriver à
- des
- conclusions dans ces cas il serait nécessaire de procéder à
- une instruction
- complémentaire, notamment par l'intermédiaire d'une mission
- d'étude et
- d'information, qui aurait pour objectif d'éclaircir les aspects de
- la loi et
- de la pratique dans les affaires en cause. Le comité avait donc
- prié le
- gouvernement d'indiquer s'il consentait à cette procédure.
- 2. Dans une lettre du 1er février 1985, le gouvernement a
- fait savoir
- qu'après des consultations avec les divers gouvernements
- provinciaux
- intéressés il n'avait pas d'objection à la réalisation de cette
- mission.
- 3. Le comité avait expliqué que la mission d'étude et
- d'information se
- situerait dans le cadre de son examen des cas. Il avait
- souligné que sa
- proposition d'envoi d'une telle mission correspondait à son
- désir d'aboutir à
- des conclusions avec une connaissance et une
- compréhension aussi complète que
- possible des problèmes complexes en cause. Il s'était déclaré
- convaincu que sa
- tâche serait grandement facilitée par une appréciation sur
- place de
- l'application pratique quotidienne, dans la situation locale, de
- la
- législation qui faisait l'objet des plaintes.
- 4. Des dispositions ont donc été prises pour qu'une mission
- d'étude et
- d'information ait lieu au Canada - notamment dans les
- provinces de l'Ontario,
- de l'Alberta et de Terre-Neuve - du 12 au 25 septembre 1985.
- Le Directeur
- général du BIT m'a nommé en tant que son représentant pour
- effectuer la
- mission, et j'ai été accompagné, pendant la mission, par M.
- William R.
- Simpson, chef du Service de la liberté syndicale du
- Département des normes
- internationales du travail, et par Mme Jane Hodges,
- fonctionnaire du Service
- de la liberté syndicale.
- 5. Grâce à l'efficacité des fonctionnaires du ministère
- canadien du Travail
- chargés de ces questions et à celle des responsables du
- Congrès du travail du
- Canada, il a été possible d'établir un programme de réunions
- avec les
- représentants du gouvernement fédéral et des gouvernements
- provinciaux en
- cause, ainsi qu'avec les divers syndicats nationaux et
- provinciaux qui avaient
- joué un rôle dans la présentation des plaintes (pour la liste des
- noms, voir
- Annexe). C'est également grâce aux services qui m'ont été
- fournis par les
- gouvernements et les syndicats des provinces de l'Ontario, de
- l'Alberta et de
- Terre-Neuve qu'il m'a été possible de m'acquitter avec succès
- du mandat qui
- m'avait été confié.
- 6. Avant de partir pour le Canada, j'avais eu la possibilité
- d'examiner les
- plaintes qui avaient été présentées dans ces cas, les diverses
- réponses des
- gouvernements respectifs et la masse de documentation et de
- textes législatifs
- qui avaient accompagné les nombreuses communications
- adressées au BIT. En
- établissant le présent rapport, il m'a semblé approprié, en
- premier lieu,
- d'exposer de façon assez détaillée les principales questions
- soulevées par le
- plaignants dans leurs allégations écrites, ainsi que les
- arguments avancés par
- les gouvernements respectifs pour infirmer ces allégations.
- Sont ensuite
- exposées les informations que j'ai été en mesure de recueillir
- pendant la
- mission au sujet de ces questions. Je me suis ainsi efforcé de
- fournir au
- Comité de la liberté syndicale un rapport donnant un tableau
- aussi complet que
- possible de la situation, depuis l'époque de la présentation des
- plaintes
- jusqu'à l'heure actuelle. En présentant mon rapport de cette
- manière, j'espère
- avoir aidé le comité à parvenir à ses conclusions dans ces
- cas.
- 7. Je tiens à souligner qu'à aucun moment je n'ai eu
- l'intention ni le
- désir - et cela ne faisait d'ailleurs pas partie de mon mandat -
- de formuler
- de quelconques conclusions sur les diverses questions que j'ai
- été appelé à
- examiner. Cette responsabilité est exclusivement du ressort du
- Comité de la
- liberté syndicale lui-même. Je me suis toutefois acquitté de
- cette mission en
- ayant présents à l'esprit les normes et principes internationaux
- concernant la
- liberté syndicale dont l'application avait été mise en cause par
- les
- organisations plaignantes, et je n'ai pas hésité, dans le présent
- rapport, à
- exposer certaines opinions ou impressions personnelles que j'ai
- pu avoir
- concernant la violation éventuelle d'obligations internationales
- ou concernant
- des mesures correctives qui pourraient être prises si les normes
- et principes
- de l'OIT ne semblaient pas être parfaitement appliqués. Ce
- faisant, mon
- intention n'a pas été de préjuger les conclusions du comité qui
- accordera sans
- doute à ces opinions ou impressions le poids qu'il estimera
- approprié et
- correct.
- II. Observations générales
- 8. Il n'est nul besoin de souligner que les diverses plaintes
- ont été
- soulevées dans trois des provinces d'un Etat fédéral. La
- structure et les
- complexités de cette organisation constitutionnelle sont bien
- connues du
- comité. Chaque problème en cause doit être évalué dans le
- contexte de chaque
- province, mais il est intéressant de noter que les problèmes ont
- des aspects
- communs. Les parties sont loin de l'ignorer. En fait, du côté
- des syndicats,
- l'influence des centrales syndicales conduit inévitablement à
- prêter attention
- aux similitudes générales des problèmes en cause. Il n'est
- peut-être pas sans
- intérêt d'appeler l'attention sur quelques-uns de ces points
- généraux. Le but
- n'est pas de détourner l'attention de l'obligation de traiter
- chaque cas
- indépendamment mais d'illustrer plus clairement les problèmes
- fondamentaux.
- a) Pressions économiques et politiques
- 9. La législation sur laquelle portent la plupart des plaintes
- représente
- un effort du gouvernement concerné pour résoudre les
- problèmes économiques
- tels qu'ils sont perçus. Ces problèmes ont provoqué une
- réaction politique
- qui, à son tour, concrétise les objets et la portée de la
- législation qui
- s'ensuit. Tel est très nettement le cas de la loi no 44 dans
- l'Alberta et de
- la loi no 179 dans l'Ontario. La loi no 59 de Terre-Neuve ne
- vise pas aussi
- manifestement les problèmes économiques, mais les mesures
- prises semblent
- découler, ne serait-ce qu'indirectement, de telles
- considérations.
- 10. Il y a bien entendu une discussion animée quant à
- l'acuité et même à
- l'existence des problèmes économiques. Quelle que soit
- l'opinion en la
- matière, il est évident que les gouvernements concernés
- étaient certains que
- les problèmes économiques exigeaient une action urgente
- communément dénommée
- lutte contre l'inflation. C'est l'impact de ces mesures législatives
- sur
- l'application de principes de l'OIT tels que ceux que
- consacrent les
- conventions nos 87 et 98 qui est au coeur de ces plaintes. Le
- débat sur la
- validité des jugements économiques se situe ailleurs.
- b) Secteur public
- 11. Les plaintes sont formulées par des syndicats de la
- fonction publique
- et concernent l'impact de mesures législatives sur les
- procédures de
- négociation collective dans le secteur public. Un facteur, dans
- l'esprit des
- organisations plaignantes, est qu'il y a manque d'impartialité
- dans le
- traitement du secteur public par opposition au secteur privé.
- Ces comparaisons
- ne sont pas toujours faciles à faire et, de toute manière, se
- situent en
- dehors du domaine des préoccupations du comité.
- Néanmoins, il s'agit là d'un
- sentiment qu'il convient de noter.
- 12. Une difficulté cruciale ressort à l'évidence. La
- négociation collective
- implique que deux parties, l'employeur et le syndicat, règlent
- leur
- préoccupation mutuelle par voie de discussion et de
- négociation. Lorsque
- l'employeur est le gouvernement, il y a une difficulté
- supplémentaire. Le
- gouvernement a la vaste tâche de gérer l'économie et cela
- implique souvent, en
- particulier, qu'il doit s'efforcer d'influer, par des arguments
- budgétaires et
- économiques, sur le niveau des règlements auxquels aboutit la
- négociation
- collective. Il est extrêmement difficile, pour le gouvernement,
- de séparer ces
- deux rôles afin que la négociation dans le secteur public soit la
- même que
- dans le secteur privé.
- 13. On s'efforce généralement d'opérer cette séparation en
- instituant un
- ensemble judicieux de structures de négociation dans le
- secteur public.
- Celles-ci peuvent alors fonctionner de la manière normale et la
- préoccupation
- majeure du gouvernement, qui n'est pas nécessairement la
- même en ce qui
- concerne l'emploi public par opposition à l'emploi privé, mais
- l'est en
- général, peut être imposée en dehors du mécanisme de la
- négociation
- collective, par exemple par la voie législative.
- c) Mécanisme de la négociation collective
- 14. Il est difficile, voire dangereux, de généraliser au sujet de
- la
- structure de la négociation collective qui est établie
- séparément par chaque
- province, ainsi que par le gouvernement fédéral. De toute
- évidence, il y a
- tant de variantes qu'elles ne peuvent pas être
- convenablement évaluées dans
- une brève étude. Examiner le mécanisme officiel à base légale
- ne donne pas
- nécessairement une image exacte de ce qui se passe
- effectivement dans la
- pratique. Il est encore plus difficile d'évaluer l'aptitude des
- structures à
- faire face aux pressions qui s'exerceront inévitablement sur
- elles à la suite,
- par exemple, d'une récession ou d'une augmentation du
- chômage.
- 15. La négociation collective au Canada a été instituée dans
- les années
- soixante au plan national comme au niveau provincial et n'a
- donc pas une
- longue histoire. On peut distinguer trois aspects différents des
- relations
- employeur-salarié. La consultation est le processus le plus
- difficile à
- évaluer car elle est souvent largement officieuse. Il s'ensuit
- que l'étude des
- processus officiels ne pourra peut-être pas indiquer l'ampleur
- des
- consultations dans la pratique. Il est probable que la
- négociation proprement
- dite suit d'assez près les règles fixées dans la loi qui l'a établie
- et les
- pratiques dont les parties sont convenues au fil des ans. Enfin,
- de par sa
- nature insaisissable, il est difficile de décrire l'impact du pouvoir
- de
- légiférer. Le recours à la loi repose, bien entendu, dans les
- mains de l'une
- des parties, l'employeur. Les diverses manières dont la loi est
- utilisée
- entraînent des difficultés et semblent conduire à d'éventuels
- malentendus et
- rancoeurs.
- d) Législation
- 16. Les plaintes dont est saisi le comité ont pour origine des
- textes
- législatifs spécifiques ainsi que leur interprétation et leur
- application dans
- la pratique. La partie suivante du présent rapport passera en
- revue, de façon
- plus détaillée, les griefs spécifiques suscités par certains
- aspects de la loi
- no 59 à Terre-Neuve, de la loi no 44 dans l'Alberta et de la loi
- no 179 dans
- l'Ontario.
- 17. Au stade actuel, il est nécessaire de mentionner un point
- plus général.
- Il semble important de faire une distinction entre les objets de
- la
- législation gouvernementale et son impact. Dans le contexte
- de la présente
- étude, il est apparu que deux caractéristiques de la législation
- devraient
- être soigneusement examinées.
- 18. La portée de la législation varie. Elle peut être
- permanente ou
- temporaire. Elle peut toucher l'emploi de manière générale ou
- s'appliquer à
- des rapports de négociation spécifiques. La genèse de la
- législation peut être
- la réglementation de l'économie, d'une part, ou le contrôle de
- la structure
- des procédures de négociation, d'autre part. Fréquemment, les
- deux fils sont
- enchevêtrés et les objets de la législation, difficiles à séparer.
- 19. Il semble, en second lieu, qu'il soit possible d'intervenir
- plus
- directement dans le processus de la négociation collective. On
- peut tenter
- d'influer sur le résultat d'une négociation particulière en
- recourant à l'une
- des formes du processus législatif. Alors que le processus dont
- il est
- question au paragraphe précédent peut être considéré comme
- une intervention
- stratégique, ce que l'on décrit ici a plutôt un caractère
- tactique.
- 20. Les normes que le Comité de la liberté syndicale a réussi
- à garantir
- s'appliquent, bien entendu, avec une égale rigueur à l'action,
- quel que soit
- leur caractère. Du point de vue des syndicats concernés, il est
- peut-être
- difficile d'apprécier ces distinctions, car toutes les actions du
- type qui
- conduit à une plainte se caractérisent manifestement par leur
- effet nuisible
- tel qu'on le perçoit. Les préoccupations qu'a exprimées ce
- comité par le passé
- indiquent toutefois que les principes énoncés influent sur les
- délibérations
- de l'OIT. Une législation d'urgence, appliquée impartialement à
- l'ensemble des
- négociations collectives pour faire face à une crise
- économique telle qu'elle
- est perçue, est foncièrement différente d'une législation visant
- un secteur
- particulier de l'emploi ou une certaine procédure de
- négociation collective.
- Ici, le processus de la négociation collective, il faut le relever,
- couvre la
- totalité des mesures mises à la disposition des intéressés, y
- compris, il est
- important de le souligner, tout accès donné à un système
- d'arbitrage
- indépendant.
- 21. On s'efforcera, dans la section suivante, d'aider le comité
- par des
- indications formulées compte tenu de ces distinctions
- analytiques.
- III. Cas de l'Alberta: no 1247
- A. Introduction
- 22. Dans ce cas, le Congrès du travail du Canada (CTC) a
- présenté, dans une
- communication en date du 1er novembre 1983, une plainte
- pour violations des
- droits syndicaux. Cette plainte était présentée au nom du
- Syndicat des
- salariés provinciaux de l'Alberta (AUPE), qui fait partie du
- Syndicat national
- du personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE),
- deuxième affilié du CTC
- par ordre d'importance. Le gouvernement a transmis ses
- observations dans une
- communication en date du 3 mai 1984.
- B. Problèmes en cause
- 23. Dans sa lettre du 1er novembre 1983, le CTC a allégué
- que de nouvelles
- dispositions législatives de l'Alberta étaient contraires aux
- conventions nos
- 87, 98 et 151. Le 1er juin 1983, une loi portant modification de
- divers textes
- de la législation du travail (la loi modifiant la réglementation du
- travail,
- connue sous le nom de loi no 44) avait été proclamée. Selon
- le CTC, la loi no
- 44 visait à porter atteinte en particulier aux travailleurs du
- secteur public
- de l'Alberta. L'un des amendements refusait le droit de grève à
- des milliers
- d'agents publics, notamment aux travailleurs hospitaliers, et un
- autre
- enlevait toute impartialité au système d'arbitrage qui avait été
- conçu pour
- octroyer aux travailleurs du secteur public une compensation
- pour la perte de
- leur droit de grève.
- i) Exclusion de certains salariés des négociations collectives
- 24. L'organisation plaignante a mentionné expressément le
- nouvel article 21
- 1) de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
- publique, qui
- a la teneur suivante:
- Les personnes occupées par un employeur dans une position
- classée aux termes
- de la loi sur la fonction publique en tant que fonctionnaires
- chargés du
- budget, analystes de systèmes, contrôleurs aux comptes,
- juges chargés
- d'appliquer la loi sur les condamnations sommaires ou les
- personnes
- accomplissant pour le compte d'un employeur des tâches qui,
- pour l'essentiel,
- sont semblables à celles d'une personne occupant l'une de
- ces positions, (et)
- dans un des organes suivants: bureau de l'assemblée
- législative, bureau du
- contrôleur général aux comptes, bureau du responsable
- supérieur des affaires
- électorales ou bureau du conciliateur ("ombudsman"), ou
- celles qui, de l'avis
- du Conseil des relations professionnelles dans la fonction
- publique, ne
- devraient pas être incluses dans une unité de négociation
- collective en raison
- des charges ou des responsabilités qu'elles ont vis-à-vis de
- leur employeur,
- ou pour toute autre raison, ne pourront pas faire partie d'une
- unité de
- négociation ou de toute autre unité à des fins de négociation
- collective.
- Selon l'organisation plaignante, cet amendement avait infirmé
- une série de
- décisions du Conseil des relations professionnelles dans la
- fonction publique,
- dont l'une, que le gouvernement avait essayé en vain de faire
- annuler par les
- tribunaux, déclarait que le gouvernement n'était pas en droit
- d'exclure
- certains groupes de salariés du droit de négocier
- collectivement et d'être
- représentés par un syndicat.
- 25. Sur ce point, le gouvernement a expliqué, dans sa
- communication du 3
- mai 1984, que les amendements législatifs concernant l'article
- 21, alinéas g)
- et h), de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
- publique
- ne représentaient pas un changement important des
- dispositions initiales
- contenues dans ces alinéas; l'exclusion des salariés exerçant
- des fonctions d
- direction ou des fonctions confidentielles, de ceux qui
- interviennent dans la
- mise en oeuvre des programmes de politique du personnel, ou
- qui sont impliqués
- dans la fonction de négociation collective ou qui interviennent
- dans le
- fonctionnement du système de contrôle financier de l'Etat, ou
- dans les
- activités du conciliateur ("ombudsman"), des tribunaux et de
- l'assemblée
- législative, n'avait pas été modifiée mais avait été précisée
- plus avant de
- manière à refléter l'évolution constante de la structure des
- pouvoirs publics
- et de la nature de l'emploi dans ces cas-là.
- ii) Système d'arbitrage
- 26. L'organisation plaignante a déclaré que les modifications
- apportées à
- l'article 117.8 de la loi sur les relations professionnelles et à
- l'article 55
- de la loi sur la fonction publique qui figuraient dans la loi no 44
- démontraient le peu de confiance qu'avait le gouvernement
- dans l'impartialité
- des arbitres qui avaient fixé les salaires et les conditions de
- travail de bon
- nombre d'agents du secteur public de l'Alberta les mois
- précédents. Selon
- l'organisation plaignante, au lieu de soumettre à un réexamen
- critique les
- thèses soutenues par les représentants gouvernementaux
- devant les arbitres et
- au lieu d'assumer directement la responsabilité politique d'un
- contrôle des
- salaires, le gouvernement avait entravé la liberté des arbitres
- et imposé un
- système informel de contrôle. Les modifications, identiques
- pour les deux
- textes, ont la teneur suivante:
- Afin de garantir que les salaires et les avantages sociaux sont
- équitables
- et raisonnables tant pour les salariés que pour l'employeur et
- répondent à
- l'intérêt du public, le Conseil d'arbitrage obligatoire: a)
- considérera, pour
- la période pendant laquelle sa sentence sera applicable, les
- éléments
- suivants: les salaires et les avantages sociaux offerts dans les
- emplois des
- secteurs privé et public qui sont réservés aux membres d'un
- syndicat ou qui ne
- le sont pas; la continuité et la stabilité de l'emploi dans les
- secteurs privé
- et public, notamment les niveaux d'emploi, les cas de mise à
- pied, les cas de
- chômage partiel et les possibilités d'emploi; toute politique
- fiscale de
- l'Etat qui peut être, de temps en temps, annoncée par le
- Trésorier provincial
- aux fins de cette loi; b) pourra considérer, pour la période
- pendant laquelle
- la sentence sera applicable, les éléments suivants: les
- conditions d'emploi
- dans des professions semblables exercées ailleurs que chez
- l'employeur, tout
- en prenant en considération n'importe quelle variation
- géographique,
- industrielle ou autre qu'il estime pertinente; la nécessité de
- maintenir des
- rapports appropriés, sur le plan des conditions d'emploi, entre
- les différents
- niveaux de classification au sein d'une profession et entre les
- différentes
- professions exercées dans le cadre des activités de
- l'employeur; la nécessité
- d'établir des conditions d'emploi équitables et raisonnables par
- rapport aux
- qualifications exigées, au travail accompli, aux responsabilités
- assumées et à
- la nature des services rendus; tout autre facteur qu'il estime
- pertinent dans
- le domaine faisant l'objet du conflit.
- 27. Selon l'organisation plaignante, la disposition ci-dessus
- exigeait de
- l'arbitre qu'il tienne compte de la politique fiscale du
- gouvernement et,
- partant, était une tentative d'imposer un système de
- modération salariale
- informelle. L'organisation plaignante a rappelé que, dans bien
- des cas ayant
- trait aux droits des salariés dans la fonction publique et dans
- les services
- essentiels, où le droit de grève a été supprimé et remplacé par
- un système
- d'arbitrage, le Comité de la liberté syndicale avait souligné
- l'importance
- attachée à l'impartialité. Elle a affirmé qu'il était déshonorant
- pour le
- gouvernement de supprimer le droit de grève dans ce secteur,
- puis d'imposer un
- système d'arbitrage obligatoire dont était exclu même un
- semblant
- d'impartialité.
- 28. A l'allégation selon laquelle l'article 117.8 de la loi sur les
- relations professionnelles et l'article 55 de la loi sur les relations
- professionnelles dans la fonction publique restreignaient de
- façon
- déraisonnable le pouvoir discrétionnaire des conseils
- d'arbitrage et, ce
- faisant, aboutissaient à une forme déguisée de contrôle des
- salaires, le
- gouvernement a répondu que les modifications concernant la
- nature des facteurs
- devant être considérés par un conseil n'imposaient pas,
- contrairement aux
- allégations, de restrictions. Les critères jugés pertinents dans la
- prise de
- décisions étaient simplement énumérés et comprenaient les
- salaires et les
- avantages sociaux accordés ailleurs sur le marché provincial
- de l'emploi ainsi
- que les politiques fiscales du gouvernement. Le gouvernement
- a déclaré que le
- texte législatif ne précisait pas comment la prise en compte de
- ces facteurs
- devait intervenir dans le processus de prise des décisions. La
- pertinence
- mouvante des critères dans le temps était reconnue dans la
- mesure où le
- conseil pouvait prendre en compte "tout autre facteur" et lui
- accorder
- l'importance relative qu'il estimait appropriée. Le résultat global
- de tous
- les facteurs énumérés était d'accorder au conseil le droit de
- décider sans
- entrave du taux de pondération qu'il accorderait à tel ou tel
- critère
- particulier. Selon le gouvernement, la liste des facteurs avait
- un caractère
- indicatif plus que constitutif.
- iii) Autres questions
- 29. L'organisation plaignante a allégué en outre que bon
- nombre des
- modifications que comportait la loi no 44 étaient conçues pour
- saper le
- pouvoir de négocier des syndicats et, partant, pour entraver la
- négociation
- collective librement menée. Elle a cité en particulier l'article 74
- 1) de la
- loi sur les relations professionnelles, selon lequel les syndicats
- étaient
- tenus de désigner exclusivement des personnes résidant dans
- l'Alberta en tant
- que détenteurs du pouvoir de négocier collectivement, de
- conclure et de signer
- une convention collective. Cet article a la teneur suivante:
- Dès qu'un employeur, une organisation d'employeurs, un
- syndicat ou une
- organisation syndicale a envoyé ou reçu une sommation
- d'entamer une
- négociation collective, l'employeur ou l'organisation syndicale
- désignera une
- personne résidant dans l'Alberta et la dotera du pouvoir de
- négocier
- collectivement, de conclure et de signer une convention
- collective en son nom.
- Selon l'organisation plaignante, cette exigence entraverait
- gravement le
- fonctionnement des petits syndicats locaux qui, pour conduire
- les négociations
- collectives, comptaient sur le concours de spécialistes
- étrangers à la
- province mais associés aux fédérations nationales ou
- internationales.
- 30. En réponse à cette allégation, le gouvernement a fait
- observer que
- l'article 74 de la loi sur les relations professionnelles avait été
- modifié
- pour faire obligation aux parties à la négociation collective de
- "désigner une
- personne résidant dans l'Alberta". Le gouvernement a expliqué
- que, lorsque les
- sections syndicales locales faisaient partie d'une organisation
- syndicale
- nationale, il avait été difficile dans le passé d'avoir accès à
- une personne
- dotée du pouvoir de signer et de conclure une convention
- collective. Aux
- termes des modifications apportées à l'article 74, un petit
- syndicat local
- pouvait encore recourir à des agents spécialisés extérieurs à la
- province et
- associés à un réseau national ou international dans le cadre
- du comité de
- négociation et en faire ses principaux porte-parole, mais une
- personne
- résidant dans la province devait être dotée du pouvoir requis
- afin de
- faciliter la conduite de la négociation, notamment la conclusion
- d'une
- convention collective.
- 31. L'organisation plaignante s'est référée à l'article 87 de la
- loi sur
- les relations professionnelles qui prévoyait qu'un différend ne
- pouvait donner
- lieu qu'à un seul scrutin sur le déclenchement d'une grève ou
- d'un lock-out.
- Cet article a la teneur suivante:
- Pendant la période de négociation, un agent de négociation
- ou une
- organisation d'employeurs peut demander au conseil de
- surveiller un scrutin
- sur le déclenchement d'une grève ou d'un lock-out. Il ne peut
- y avoir qu'un
- seul vote concernant une grève ou un lock-out pour un
- différend déterminé.
- Selon l'organisation plaignante, cette disposition empêche les
- syndicats et
- les associations d'employeurs d'interroger leurs membres dans
- diverses
- circonstances sur l'opportunité de déclencher une grève ou un
- lock-out; le
- vote sur une grève ou sur un lock-out ne deviendrait plus
- qu'une simple
- formalité observée au début de la négociation collective.
- L'organisation
- plaignante a déclaré qu'il n'y avait aucune bonne raison
- d'empêcher les
- membres d'une unité de négociation de changer d'idée quant
- à l'opportunité de
- déclarer une grève à mesure que la situation évolue.
- 32. Pour ce qui est de l'article 87 de la loi sur les relations
- professionnelles, le gouvernement a déclaré qu'une grève ou
- un lock-out était
- le début d'une épreuve de force économique et qu'en
- conséquence de tels votes
- étaient effectués sous la surveillance du Conseil des relations
- professionnelles de l'Alberta. Les modifications apportées à
- l'article 87
- n'empêchaient pas un syndicat d'organiser son propre scrutin
- ni de se
- renseigner auprès de ses membres sur l'opportunité d'une
- grève dans un
- ensemble de circonstances données. Un tel vote, organisé par
- le syndicat,
- relevait de l'administration interne du syndicat et, en
- conséquence, la
- disposition législative considérée n'affectait pas un vote privé,
- organisé au
- sein du syndicat. Le gouvernement a expliqué qu'un tel vote
- ou un tel sondage
- des opinions ne saurait se substituer à un scrutin organisé
- sous la
- surveillance du Conseil des relations professionnelles - qui est
- indispensable
- pour qu'une grève soit licite. De plus, a poursuivi le
- gouvernement, si la
- décision d'entamer une grève ou de déclarer le lock-out
- l'emportait dans ce
- scrutin, cela signifiait que l'une ou l'autre des parties avait
- choisi l'arène
- économique pour résoudre le différend. Cette disposition
- législative reflétait
- l'idée selon laquelle les membres ont le droit de décréter une
- grève, mais ne
- devraient le faire que lorsque celle-ci semble être le seul
- moyen de résoudre
- le différend. L'autre possibilité serait d'ouvrir la porte à une
- série de
- votes sur l'opportunité d'une grève.
- 33. Selon l'organisation plaignante, l'article 102.2 2) de la loi
- sur les
- relations professionnelles, dans sa teneur modifiée par la loi no
- 44,
- conférait au ministre du Travail le droit d'exiger des membres
- d'une unité de
- négociation visée par les recommandations d'une commission
- d'enquête chargée
- d'un conflit du travail qu'ils mettent au vote l'acceptation ou le
- rejet
- desdites recommandations. Cet article a la teneur suivante:
- Si une partie à un différend ne fait pas parvenir au Conseil
- (des relations
- professionnelles) son acceptation des recommandations du
- ministre soumises par
- une commission d'enquête chargée du conflit du travail dans
- les dix jours qui
- suivent la date à laquelle elle a reçu le texte desdites
- recommandations ...,
- le Conseil des relations professionnelles] surveillera le
- déroulement d'un
- vote sur l'acceptation ou le rejet desdites recommandations
- par les salariés
- ou par les employeurs concernés par le différend et
- représentés par la partie
- en question. Selon l'organisation plaignante, ce pouvoir
- constituait une
- ingérence indue dans les affaires intérieures d'un syndicat qui
- avait le droit
- et l'obligation de sonder l'opinion de ses propres membres sur
- l'admissibilité
- d'une proposition de règlement déterminée; l'organisation
- plaignante a estimé
- que les activités relevant du domaine des relations
- professionnelles devraient
- être du ressort des parties et non pas de celui du ministre du
- Travail.
- 34. Pour ce qui est de l'article 102.2 2), le gouvernement a
- déclaré que
- les modifications apportées à cet article avaient été inspirées
- par des
- situations qui s'étaient présentées récemment et dans
- lesquelles un syndicat
- avait refusé de régler un différend, malgré le voeu de la
- majorité des
- salariés de l'unité qui voulaient que le différend fût résolu à
- certaines
- conditions. Selon le gouvernement, cette disposition législative
- garantissait
- que les voeux de la majorité des salariés de l'unité pussent
- s'exprimer au
- sujet de l'acceptation d'une sentence du conseil.
- 35. L'organisation plaignante a allégué que les articles 105 et
- 106 de la
- loi sur les relations professionnelles créaient un délit nouveau
- et dangereux
- en interdisant aux personnes qui agissent au nom de syndicats
- ou d'employeurs
- de menacer de grève ou de lock-out dans des circonstances
- où une telle action
- ne serait pas autorisée aux termes de la loi. Ces articles ont la
- teneur
- suivante:
- Article 105 3). Nul salarié, agent négociateur ou personne
- agissant au nom
- de l'agent négociateur ne menacera de participer à une grève
- ou de provoquer
- une grève à moins que la grève ne soit autorisée par la loi.
- Article 106 3). Aucun employeur ne menacera de décréter un
- lock-out, à moins
- que le lock-out ne soit autorisé par la loi. L'organisation
- plaignante a fait
- observer que la question de l'illégalité d'une grève ou d'un
- lock-out était
- complexe et que les parties ne devraient pas en conséquence
- se voir interdire
- de parler de cette action. L'organisation plaignante s'est
- demandée s'il était
- dans l'intention du gouvernement de sanctionner, en vertu de
- l'article 105 1),
- les salariés qui refuseraient, par exemple, d'accomplir un travail
- qu'ils
- estimeraient non conforme aux normes de sécurité.
- 36. Pour ce qui est de l'inclusion de "menaces" de grève ou
- de lock-out
- dans le texte des articles 105 et 106 de la loi sur les relations
- professionnelles, le gouvernement a déclaré qu'une grève ou
- un lock-out
- n'était pas autorisé lorsqu'il n'avait pas été satisfait aux
- conditions
- préalables, telles qu'elles ressortent de la loi. Néanmoins, si
- une grève ou
- un lock-out, avec sa suite de conséquences graves pour les
- salariés et les
- employeurs, ne pouvait avoir lieu que lorsque certaines
- conditions avaient été
- remplies, alors ni le syndicat, ni les salariés, ni les personnes
- agissant au
- nom du syndicat, ni l'employeur ne devraient pouvoir menacer
- de recourir à un
- acte illégal pour atteindre d'autres objectifs, par exemple,
- menacer d'entamer
- une grève pour imposer une modification d'une convention
- collective pendant sa
- durée d'application contre le gré de l'autre partie. De toute
- façon, le
- gouvernement a fait observer que ces dispositions faisaient
- l'objet d'un
- réexamen, essentiellement à cause de difficultés qui existaient
- du point de
- vue de la preuve. Le gouvernement a ajouté que cet article ne
- visait pas à
- sanctionner les travailleurs refusant d'accomplir des tâches
- dans des
- conditions qu'ils estimaient être non conformes aux normes de
- sécurité. Les
- questions relatives au travail non conforme aux normes de
- sécurité étaient
- traitées intégralement dans les textes législatifs relatifs à la
- sécurité et à
- l'hygiène. D'après le gouvernement, l'élément essentiel d'une
- grève était
- qu'elle est un refus concerté opposé par deux salariés ou plus
- en vue de
- contraindre un employeur à accepter certaines conditions
- d'emploi; le Conseil
- des relations professionnelles n'avait jamais interprété la
- définition d'une
- grève comme englobant un refus de travailler lorsque les
- conditions ne sont
- pas conformes aux normes de sécurité.
- 37. L'organisation plaignante a allégué que plusieurs
- dispositions de la loi
- no 44 étaient conçues pour aggraver les difficultés auxquelles
- sont confrontés
- les syndicats désireux d'obtenir et de conserver l'accréditation
- leur donnant
- le droit de représenter les travailleurs dans les négociations
- collectives.
- Elle s'est référée, en particulier, à l'article 49 1) de la loi sur les
- relations professionnelles qui a la teneur suivante:
- Nonobstant toute disposition contraire figurant dans la
- présente loi, en cas
- de refus par le conseil ou de retrait par le demandeur d'une
- accréditation en
- qualité d'agent négociateur, ou en cas de déclaration de
- non-renouvellement de
- l'accréditation d'un agent négociateur ou de refus
- d'enregistrement d'une
- organisation d'employeurs ou de l'annulation de
- l'enregistrement d'une
- organisation d'employeurs, le demandeur ne pourra, sans
- l'agrément du conseil,
- présenter une nouvelle demande identique ou semblable pour
- l'essentiel à la
- précédente qu'à l'expiration d'un délai de 90 jours à compter
- de la date du
- retrait de la demande ou du refus. Selon l'organisation
- plaignante, cet
- article empêcherait les syndicats de retirer leur demande
- d'accréditation
- lorsqu'ils se rendent compte qu'ils n'ont pas un appui
- majoritaire, puis de la
- présenter à nouveau une fois la majorité obtenue. Le seul effet
- de cette
- modification serait de rendre les campagnes de recrutement
- plus difficiles et,
- en conséquence, plus coûteuses.
- 38. Le gouvernement a expliqué que les modifications
- apportées à l'article
- 49 de la loi sur les relations professionnelles exigeaient du
- requérant
- demandant une accréditation qu'il obtienne l'autorisation du
- conseil s'il
- désirait renouveler sa requête avant l'expiration d'un délai de
- 90 jours à
- partir de la date à laquelle une requête précédente avait été
- retirée ou
- rejetée. Il a déclaré que ces modifications avaient été édictées
- à cause des
- incidences administratives que la réitération de requêtes sans
- résultat
- pouvait avoir sur l'employeur, sur les salariés et sur le Conseil
- des
- relations professionnelles lui-même.
- 39. L'organisation plaignante s'est référée également à
- l'article 132 de la
- loi sur les relations professionnelles qui traitait des questions
- d'accréditation à la suite de la vente ou de la cession d'une
- affaire.
- L'organisation plaignante a déclaré qu'avant cette modification
- une
- accréditation syndicale conservait toute sa validité nonobstant
- la vente ou la
- cession de l'affaire de l'employeur - et que la précédente
- situation visait à
- empêcher l'employeur de vendre ou de transférer son affaire à
- une personne qui
- lui est alliée afin de se défaire d'un syndicat accrédité. Selon
- l'organisation plaignante, la nouvelle situation (dans laquelle le
- Conseil des
- relations du travail peut, sur demande de l'employeur, du
- syndicat ou de toute
- personne concernée, déterminer quels droits, privilèges ou
- obligations ont été
- acquis ou retenus) accordait la possibilité aux employeurs
- devenus successeurs
- de contrecarrer les voeux des salariés qui pourraient souhaiter
- continuer
- d'être représentés aux fins de la négociation collective par
- leurs agents de
- négociation précédemment accrédités.
- 40. En ce qui concerne les modifications apportées à l'article
- 132, le
- gouvernement a déclaré qu'elles étaient conçues pour éviter
- des résultats
- incongrus. Avant l'adoption de ces changements, lorsque le
- Conseil des
- relations professionnelles concluait qu'il y avait eu vente,
- concession ou
- transfert d'une affaire ou d'une partie d'une affaire, l'acquéreur
- était
- automatiquement lié par l'accréditation et par la convention
- collective
- auxquelles le vendeur avait souscrit. Le gouvernement a
- déclaré que la
- modification visait toujours le même résultat; néanmoins, si une
- question
- était soulevée au titre de cet article, le Conseil des relations
- professionnelles aurait la possibilité de déclarer que les
- accréditations, les
- conventions collectives ou les procédures liaient l'acquéreur
- alors que,
- précédemment, il en avait l'obligation. La nouvelle disposition
- accordait au
- Conseil des relations professionnelles la possibilité de résoudre
- des conflits
- en lui permettant de modifier l'accréditation ou la convention
- collective en
- cause, voire de la révoquer. Le gouvernement a souligné que
- le pouvoir accordé
- au conseil n'était que facultatif et ne pouvait être employé que
- pour résoudre
- les conflits.
- 41. L'organisation plaignante a allégué, en outre, que le
- nouvel article 1
- w.1) de la loi modifiant les statuts du travail, en instaurant la
- notion
- d'"organisation syndicale", allait créer une situation dans
- laquelle
- l'organisation nationale ou provinciale qui avait le pouvoir de
- négocier au
- nom des syndicats locaux serait passible des peines prévues
- dans la loi pour
- les syndicats. Le gouvernement a fait observer que les
- modifications qu'il
- avait été proposé d'apporter à l'article 1 w.1) n'avaient jamais
- été adoptées
- et qu'elles ne faisaient pas partie de la loi sur les relations
- professionnelles.
- 42. Enfin, l'organisation plaignante s'est référée à l'article
- 117.94 de la
- loi sur les relations professionnelles - identique au nouvel
- article 92.2 de
- la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique
- - comme
- étant l'exemple le plus grave de législation antisyndicale
- contenu dans la loi
- no 44. Selon l'organisation plaignante, le but de cet article était
- clairement
- de paralyser financièrement le syndicat si ses membres
- faisaient grève. Cet
- article a la teneur suivante:
- 1) En cas de grève de salariés couverts par la présente
- section (à savoir
- les salariés du secteur public qui ne jouissent pas du droit de
- grève),
- l'employeur, nonobstant toute convention collective ou toute
- autre disposition
- de la présente loi, pourra prévenir l'agent négociateur
- représentant ces
- salariés de son intention de suspendre la retenue à la source
- ou le versement
- des cotisations syndicales, des cotisations spéciales ou autres
- droits qu'un
- salarié doit payer à l'agent négociateur.
- 2) Un tel préavis d'intention devra indiquer quelle est l'unité
- de
- négociation ou la partie d'unité de négociation pour laquelle
- l'employeur a
- l'intention de suspendre la retenue à la source ou le versement
- des
- cotisations syndicales ou autres droits et la durée de cette
- suspension qui
- doit être comprise entre un et six mois.
- 3) Un agent négociateur affecté par ce préavis peut saisir le
- conseil dans
- les 72 heures ouvrables ... pour déterminer si une grève a été
- déclenchée ou
- non.
- 43. En ce qui concerne l'article 117.94 de la loi sur les
- relations
- professionnelles et l'article 92.2 de la loi sur les relations
- professionnelles dans la fonction publique, dans leur teneur
- modifiée par la
- loi no 44, le gouvernement a déclaré que, tant que le syndicat
- n'avait pas
- commis d'acte illégal, le versement des cotisations syndicales
- se poursuivait.
- Il a ajouté que, si l'employeur notifiait au syndicat que les
- cotisations
- syndicales seraient retenues, le syndicat avait la possibilité
- d'engager un
- recours rapide et peu coûteux devant le conseil quasi
- judidiciaire compétent.
- Celui-ci déciderait si les retenues à la source ou les
- versements devaient
- être interrompus en statuant sur la légalité ou non de
- l'interruption par le
- syndicat des activités de l'employeur. Il existait des voies de
- recours
- adéquates et appropriées pour protéger les intérêts de toutes
- les parties.
- 44. Pour ce qui est de la suppression du droit de grève des
- travailleurs du
- secteur hospitalier contenue à l'article 117.1 de la loi sur les
- relations
- professionnelles, l'organisation plaignante a allégué que tous
- les
- travailleurs, y compris les aides cuisinières, les nettoyeurs, les
- jardiniers,
- les infirmières, les techniciens et les employés sont couverts
- par cet
- article.
- 45. Le gouvernement a exposé sa position concernant les
- normes
- internationales pertinentes en la matière et a précisé qu'à son
- avis le droit
- d'association était protégé, mais que des objectifs syndicaux
- spécifiques et
- des mécanismes déterminés de règlement des différends ne
- l'étaient pas. Il a
- fait observer que le caractère évolutif des relations
- professionnelles
- empêchait de s'engager à respecter une méthode universelle
- et unique de
- réglement des différends. Les objectifs de la syndicalisation,
- dans le cadre
- des relations professionnelles, à savoir, surtout, la protection
- des intérêts
- des travailleurs, pouvaient être et étaient atteints sans recours
- au mécanisme
- de la grève. D'après le gouvernement, la négociation
- collective dans le
- secteur public devait être abordée dans le cadre élargi du
- processus de
- gouvernement lui-même dont elle n'était qu'une composante.
- Pour que le système
- de négociation collective soit compatible avec le processus de
- gouvernement,
- il fallait que ceux qui le conçoivent tiennent compte d'un
- certain nombre de
- caractéristiques extrêmement importantes de ce dernier. Or,
- dans le processus
- de gouvernement canadien, on prenait les décisions par voie
- de compromis et en
- réponse aux pressions exercées; les groupes d'intérêt qui
- pesaient sur la
- répartition des ressources rares agissaient dans le cadre d'un
- processus
- politique et devaient en conséquence être assujettis aux
- contraintes qui sont
- normalement associées à une telle participation; pour maintenir
- l'équilibre
- essentiel et délicat dans le cadre de ce processus, tout
- particulièrement en
- ce qui concerne la prise de décisions administratives
- essentielles, en dehors
- de la révision et de l'évaluation normales associées aux
- élections, on ne
- pouvait admettre qu'un groupe d'intérêts puisse
- unilatéralement placer les
- autres parties dans une situation défavorable. Le
- gouvernement a également
- souligné que, si les salariés de la fonction publique se
- trouvaient bien
- souvent et à plusieurs égards, de par la nature de leurs
- activités, dans une
- situation qui n'était semblable à aucun autre travail, il n'en
- restait pas
- moins, en contrepartie, que la situation de leur employeur était
- elle aussi
- exceptionnelle, puisque le gouvernement voyait son action
- continuellement
- soumise à une évaluation critique minutieuse. Enfin, a déclaré
- le
- gouvernement, le fait de conserver au personnel des services
- de santé le droit
- de refuser de travailler reviendrait à lui accorder un avantage
- et une
- priorité inacceptables par rapport aux autres personnes dont
- les besoins
- légitimes de soins de santé devaient être satisfaits par le
- système - pour
- lequel il n'y avait pas de solution de remplacement acceptable
- - et, en tant
- que tel, compromettrait le processus de prise des décisions
- concernant la
- prestation de soins médicaux. Des modifications n'avaient été
- apportées à
- cette situation que dans la mesure où une solution autre que le
- refus de
- travailler avait été fournie, et le gouvernement a estimé qu'il y
- avait là un
- compromis réel, grâce auquel les intérêts des salariés
- pourraient être
- convenablement représentés dans une structure qui respectait
- les normes
- internationales.
- C. Informations reçues pendant la mission
- 46. Au cours de la mission, j'ai eu l'occasion de discuter des
- divers
- problèmes que comporte ce cas; premièrement, à Ottawa,
- avec les représentants
- du Congrès du travail du Canada (CTC) et ceux du Syndicat
- national du
- personnel des gouvernements provinciaux (NUPGE) et,
- deuxièmement, à Edmonton,
- avec les représentants du Syndicat des salariés provinciaux
- de l'Alberta
- (AUPE) et de ses divisions constitutives. Des discussions ont
- également eu
- lieu avec le sous-ministre adjoint du Travail et de hauts
- fonctionnaires du
- gouvernement provincial. Outre les déclarations qui ont été
- faites oralement
- par les parties, une volumineuse documentation m'a été
- communiquée à l'appui
- des arguments présentés.
- 47. Il ressort de toutes ces discussions que les trois grands
- problèmes qui
- préoccupaient les syndicats à la suite de la promulgation de la
- loi no 44, qui
- modifiait à la fois la loi de 1980 sur les relations
- professionnelles dans la
- fonction publique et la loi sur les relations professionnelles,
- étaient la
- réduction des droits de négociation collective des salariés du
- secteur public
- et le fonctionnement des procédures d'arbitrage, les nouvelles
- restrictions
- que la loi no 44 apportait au droit de grève des fonctionnaires
- et l'exclusion
- de certains salariés d'une unité de négociation. Plusieurs
- autres questions,
- qui faisaient aussi partie de la plainte, ont également été
- examinées de façon
- détaillée et seront traitées plus loin.
- a) Négociation collective et arbitrage
- 48. Les syndicats soutenaient que la présentation de la loi
- no 44 tendait
- clairement et délibérément à restreindre encore les droits de
- négociation
- collective du personnel du gouvernement provincial. En outre,
- la loi no 44
- avait eu pour résultat d'ôter toute crédibilité à l'équité et à
- l'impartialité
- du système d'arbitrage, seul mécanisme de règlement des
- conflits dont
- disposait cette catégorie de travailleurs.
- 49. De nombreux renseignements ont été obtenus en ce qui
- concerne la manière
- dont la négociation collective se déroule entre le Syndicat des
- salariés
- provinciaux de l'Alberta, en tant qu'agent négociateur
- accrédité représentant
- 12 catégories distinctes de salariés (environ 38.000
- personnes), et la
- Couronne du chef de l'Alberta, en tant qu'employeur. Aux
- termes de l'article
- 50 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
- publique, en
- cas de conflit, si le Conseil des relations professionnelles dans
- la fonction
- publique est convaincu que les parties au conflit n'ont pas fait
- des efforts
- raisonnables pour conclure une convention collective, ce
- conseil peut demander
- aux parties de poursuivre la négociation collective. L'article 51
- 1) c) de la
- loi autorise le conseil à constituer un conseil d'arbitrage s'il est
- convaincu, non seulement que d'autres points devraient être
- soumis à
- arbitrage, mais aussi que le moment est venu de soumettre la
- question à un
- conseil d'arbitrage.
- 50. A l'époque de la mission, il avait été conclu des
- conventions
- collectives pour huit des douze catégories de l'AUPE; les
- quatre groupes pour
- lesquels l'accord n'avait pas été possible étaient les infirmières,
- le
- personnel des services économiques, les travailleurs sociaux
- et les
- enseignants.
- 51. Le principal négociateur de l'AUPE a expliqué que la loi
- no 44 avait
- été promulguée par suite du mécontentement qu'avaient
- causé au gouvernement
- les sentences rendues en 1983 par 12 conseils d'arbitrage
- distincts. Ces
- arbitrages avaient été précédés d'une décision du Conseil des
- relations
- professionnelles dans la fonction publique selon laquelle les
- salariés
- n'avaient pas négocié de bonne foi. La série actuelle de
- négociations, entamée
- en janvier 1984 pour la période 1984-85, s'était déroulée dans
- un climat
- nouveau, créé par la promulgation de la loi no 44, et les
- salariés avaient
- fait preuve d'agressivité à la table de négociation. L'échec des
- négociations
- a conduit le syndicat à présenter une demande d'arbitrage en
- avril 1984, mais
- cette demande a été rejetée par le conseil. En juillet 1984,
- après l'échec de
- la médiation, le conseil a renvoyé la convention principale, ou
- convention clé
- à l'arbitrage.
- 52. Des éléments de preuve ont également été présentés au
- sujet du processus
- de négociation qui, affirmaient les syndicats, était
- décourageant et faisait
- perdre du temps. Le Conseil des relations professionnelles
- dans la fonction
- publique servait souvent à retarder ou à empêcher la
- soumission des cas à
- l'arbitrage. Dans un cas concernant environ 14.000 agents
- administratifs et
- employés de bureau, les négociations avaient débuté en
- janvier 1984; le
- conseil, à non moins de trois reprises, avait rejeté une
- demande d'arbitrage
- au motif qu'elle était "inopportune et inappropriée". Il s'ensuivit
- une
- requête au tribunal qui, en mars 1985, confirma le pouvoir
- discrétionnaire
- qu'avait le conseil de constituer un conseil d'arbitrage et
- déclara que, dans
- le cas présent, la décision du conseil n'était pas
- "manifestement
- déraisonnable". Ce n'est qu'après 18 mois ou plus que
- l'arbitrage fut obtenu
- et la question de la rétroactivité des majorations salariales a,
- comme l'ont
- souligné les syndicats, dû faire l'objet d'une négociation.
- 53. Plus spécifiquement, en ce qui concerne le processus
- d'arbitrage, les
- syndicats se sont montrés très préoccupés par l'application
- pratique de
- l'article 5.48 2) de la loi sur les relations professionnelles dans
- la
- fonction publique, qui limite le nombre des questions
- susceptibles d'être
- soumises à l'arbitrage. Le Conseil des relations professionnelles
- dans la
- fonction publique est compétent pour décider si une
- réclamation particulière
- fait partie des questions ne relevant pas de l'arbitrage qui sont
- énumérées
- dans cet article. De l'avis des syndicats, cette disposition
- donnait à
- l'employeur le droit unilatéral de fixer les conditions d'emploi. Ils
- ont
- affirmé que toutes les questions couvertes par cette disposition
- devraient
- relever de la négociation et de l'arbitrage puisqu'elles ne
- concernaient pas
- totalement des questions de prérogative de la direction.
- 54. Parmi les exemples de questions qui, en vertu de l'article
- 5.48,
- n'avaient pas été jugées relever de l'arbitrage figuraient le droit
- qu'a
- l'employeur de donner à l'extérieur les travaux de l'unité de
- négociation, les
- questions de durée du travail et de travail par équipes,
- certaines périodes de
- congé et le calcul des heures supplémentaires (art. 48 2a)); les
- questions
- d'évaluation des emplois, l'établissement de définitions des
- tâches, les
- questions d'égalité de rémunération pour un travail de valeur
- égale (article
- 48 2b)); la sélection, le transfert, la promotion, la formation, la
- formation
- effective à la sécurité dans le maniement du matériel, etc.
- (article 48 2c)).
- Dans un cas récent (décembre 1984), le Conseil des relations
- professionnelles
- dans la fonction publique avait décidé que la proposition d'un
- syndicat visant
- à protéger les postes des salariés licenciés en exigeant de
- l'employeur qu'il
- donne préavis des licenciements prévus ne relevait pas de
- l'arbitrage parce
- qu'elle limitait la liberté de décision de l'employeur. En
- conséquence, les
- syndicats ont allégué que ces exemples prouvaient que le
- conseil donnait une
- large interprétation de l'article 48 2) afin de protéger la
- prérogative
- directoriale de l'employeur.
- 55. En outre, les syndicats ont allégué que, même lorsque
- les points
- contestés étaient soumis à l'arbitrage, la liberté de décision des
- arbitres
- était restreinte puisqu'ils étaient tenus de prendre certaines
- questions en
- considération. Ces critères figurent à l'article 55 de la loi et
- obligent, en
- particulier, les arbitres à tenir spécialement compte des
- déclarations de
- politique fiscale du gouvernement. De l'avis du syndicat, ces
- dispositions ont
- été adoptées en 1983, par réaction à la série de sentences
- arbitrales que le
- gouvernement avait critiquées comme étant trop généreuses.
- Des déclarations
- récentes du gouvernement en matière de politique fiscale ont
- été fournies à la
- mission. Selon les syndicats, les arbitres étaient tenus de
- faciliter la
- politique fiscale du gouvernement et, en conséquence, les
- résultats de
- l'arbitrage reflétaient cette politique. En d'autres termes, ce
- contrôle de
- l'élaboration des décisions arbitrales signifiait qu'en fait le
- gouvernement
- obtenait, par la voie législative, des résultats pour lui-même en
- tant
- qu'employeur. Les arbitres étaient ainsi empêchés d'exercer le
- degré
- d'indépendance qui était indispensable pour remplacer, de
- façon satisfaisante
- la négociation collective.
- 56. A cet égard, un certain nombre de sentences arbitrales
- récentes ont été
- fournies à la mission. Il ressort de ces sentences que les
- conseils
- d'arbitrage en cause ont tenu soigneusement compte des
- dispositions de
- l'article 55 a) et b) et ont longuement examiné les rôles
- contradictoires du
- gouvernement chargé de déterminer la politique fiscale de la
- province à
- l'égard des travailleurs et d'agir en tant qu'employeur. Dans
- certains cas, le
- conseil n'a en fait pas jugé nécessaire de tenir compte des
- dispositions
- facultatives qui figurent à l'article 55 b) de la loi. Dans un autre
- cas, au
- mois de mai 1984, le conseil d'arbitrage a déclaré que les
- orientations de
- politique budgétaire du gouvernement n'étaient pas utiles
- puisque, entre
- autres choses, elles ne prescrivaient pas expressément le
- montant exact de
- l'augmentation à accorder.
- b) Salariés exclus
- 57. La mission a également entendu des témoignages
- concernant l'exclusion,
- en vertu de l'article 21 1) de la loi, de certaines catégories de
- salariés
- d'une unité de négociation à des fins de négociation
- collective. Les récentes
- modifications introduites par la loi no 44 avaient élargi la
- gamme des
- personnes auxquelles était dénié le droit d'entamer des
- négociations
- collectives. Certaines de ces catégories bénéficiaient
- auparavant de ce droit.
- Il convient de rappeler que l'article 21 dispose, en substance,
- que les
- personnes occupées, qui ont ou exercent des responsabilités
- ou des fonctions
- de direction ou qui s'occupent avant tout de l'administration
- des politiques
- ou des programmes en matière de personnel, ne pourront pas
- faire partie d'une
- unité de négociation.
- 58. De l'avis des syndicats, l'exclusion de ces salariés n'était
- pas
- justifiée et la modification introduite par la loi no 44 avait privé
- du droit
- de négocier collectivement un certain nombre de groupes de
- salariés auxquels
- le Conseil des relations professionnelles dans la fonction
- publique avait
- octroyé ce droit dans le cadre de la loi précédente. Le
- gouvernement s'est
- servi de son pouvoir de propositions législatives pour réformer
- une série de
- décisions du conseil. Par exemple, le conseil avait statué,
- dans un cas, que
- les salariés des programmes d'hygiène et de sécurité du travail
- et des
- programmes et activités de développement administratif se
- situaient en dehors
- des "politiques ou programmes de personnel" définis à l'article
- 21 1) b) de la
- loi. Dans sa décision, le conseil avait déclaré que le terme
- "personnel", au
- sens de cet article, couvrait les politiques ou programmes
- concernant le
- recrutement des candidats, l'embauchage, la nomination et la
- promotion des
- salariés ou la classification, l'évaluation, la discipline ou le
- renvoi des
- salariés. Les syndicats ont présenté d'autres exemples de cas
- dans lesquels
- les modifications apportées par la loi no 44 déniaient le droit de
- faire
- partie d'une unité de négociation à des groupes de travailleurs
- ou à certains
- fonctionnaires auxquels ce droit avait été reconnu par le
- conseil. Selon les
- syndicats, le droit de négocier collectivement avait été refusé
- à plus de 400
- personnes par les modifications apportées à l'article 21.
- c) Le droit de grève
- 59. La mission a également entendu des déclarations des
- syndicats relatives
- au refus général du droit de grève que l'article 93 de la loi sur
- les
- relations professionnelles dans la fonction publique imposait
- aux salariés
- concernés par cette loi. Selon les syndicats, le gouvernement
- s'était efforcé
- de justifier ce refus en déclarant que, bien que tous les salariés
- concernés
- ne fournissent pas de services essentiels, ils étaient liés si
- étroitement à
- ceux qui les fournissaient qu'il était raisonnable de les traiter de
- la même
- manière; qu'il n'y avait aucun moyen de remplacement de ces
- services; que ces
- salariés étaient en mesure, du fait de leur situation, d'exercer
- une plus
- grande pression sur le gouvernement que d'autres citoyens.
- 60. Les syndicats ont affirmé qu'il n'y avait pas de preuve de
- l'existence
- de liens étroits entre les personnes exerçant des fonctions
- essentielles et
- celles qui n'en exerçaient pas et, ce qui est plus important, que
- le refus de
- travailler opposé par des personnes n'exerçant pas de
- fonctions essentielles
- ne nuirait pas à la fourniture des services essentiels. Il n'y avait
- pas
- davantage de preuve qu'il n'y avait aucun autre moyen de
- remplacement des
- services fournis par les salariés en question. En outre, ont
- déclaré les
- syndicats, le même raisonnement n'avait pas été suivi dans le
- secteur privé,
- dans des cas où on ne disposait d'aucun moyen de
- remplacement pour bien des
- services.
- 61. Lors de réunions avec les représentants du
- gouvernement provincial de
- l'Alberta, les problèmes qui avaient été portés à l'attention du
- BIT et
- discutés avec la mission ont été expliqués en détail. Les
- représentants du
- gouvernement ont déclaré à la mission que le secteur privé
- avait réagi de
- façon constructive au grave ralentissement de l'économie et
- que les
- allégations des syndicats du secteur public, selon lesquelles
- un traitement
- particulièrement défavorable leur aurait été réservé, n'avaient
- été présentées
- que par cette catégorie de travailleurs.
- 62. En ce qui concerne le processus de négociation
- collective, les
- représentants du gouvernement ont expliqué que les deux
- parties disposaient du
- droit de veto sur les questions soumises à l'arbitrage. Les
- questions que le
- Conseil des relations professionnelles avait exclues de la
- convention clé
- conclue avec l'AUPE pour lesquelles l'arbitrage avait été
- demandé concernaient
- exclusivement les droits de la direction. Le gouvernement a
- toutefois admis
- que la définition des droits de la direction était une question
- complexe.
- 63. A cet égard, j'ai suggéré aux représentants du
- gouvernement que le
- Conseil des relations professionnelles, en refusant de
- considérer que
- certaines questions spécifiques pouvaient être soumises à
- arbitrage, arbitrait
- lui-même ces questions. Lorsque l'arbitrage est fondamental
- dans une situation
- où la grève n'a pas été déclenchée, il semble anormal que l'on
- puisse voir le
- conseil, qui est un organe procédural, agir lui-même en qualité
- d'arbitre pour
- certaines questions. Cette façon d'agir ne pouvait que détruire
- la confiance
- des syndicats dans le conseil. J'ai indiqué en outre qu'il
- semblait que
- l'utilisation par le gouvernement de son pouvoir législatif pour
- traiter de la
- négociation collective avait également conduit les syndicats à
- perdre
- confiance dans le système de négociation.
- 64. En ce qui concerne l'arbitrage lui-même, les
- représentants du
- gouvernement ont indiqué que, sur la base de l'expérience
- limitée que le
- gouvernement avait acquise de l'arbitrage des conflits
- d'intérêts, il n'y
- avait eu aucune preuve d'abus de la disposition (art. 55 de la
- loi) qui
- demande aux arbitres de tenir compte de la politique fiscale de
- la province.
- Il n'y avait aucun moyen de savoir qu'elle était l'attention que
- les arbitres
- prêtaient à cet article mais, de toute manière, la politique
- fiscale donnait
- toute latitude aux arbitres. Des exemples de la politique fiscale
- du
- gouvernement ont été donnés à la mission.
- 65. En ce qui concerne les exclusions au titre de l'article 21
- 1) de la loi
- dans sa teneur modifiée, le gouvernement a expliqué que 260
- salariés en tout
- étaient touchés par la modification. Ces salariés s'occupaient
- principalement
- de questions de politique du personnel et une douzaine
- seulement, occupés dans
- le domaine de la sécurité et de l'hygiène, avaient été exclus de
- l'unité de
- négociation.
- 66. En ce qui concerne le déni du droit de grève, j'ai informé
- le
- gouvernement de manière générale que le Comité de la liberté
- syndicale
- exprimerait vraisemblablement quelques préoccupations au
- sujet des
- dispositions de la législation en la matière, à la lumière de sa
- jurisprudence. Les représentants du gouvernement en ont pris
- note et m'ont
- informé que la Cour était actuellement saisie de certaines
- questions
- concernant le droit de grève des salariés du secteur public.
- 67. J'ai également attiré l'attention du gouvernement sur la
- question qui
- préoccupe également les syndicats, de l'absence d'une
- consultation préalable
- des syndicats sur la législation relative à des questions qui les
- touchent,
- eux ou leurs affiliés. En réponse, le représentant du
- gouvernement m'a informé
- que toute omission de la consultation en la matière serait due à
- l'urgence de
- la situation et non à une décision systématique de ne pas
- consulter. Même si
- les questions étaient urgentes, il y aurait des auditions
- publiques au
- Parlement mais, normalement, une loi est le résultat de
- discussions prolongées
- et constructives avec toutes les parties qui seraient touchées.
- d) Autres questions
- 68. Pendant les discussions avec l'AUPE, j'ai été informé
- que, bien que
- cette organisation ait craint de prime abord que le recours à
- des négociateurs
- expérimentés étrangers à la province soit peut-être limité par
- l'article 74
- 1), cette disposition dans sa teneur actuelle ne constituait pas
- un problème.
- Les représentants du gouvernement provincial ont expliqué
- que cette
- disposition avait été introduite uniquement pour résoudre les
- difficultés
- d'ordre pratique qui s'étaient posées dans le passé lorsqu'il
- n'avait pas été
- possible d'entrer en contact avec les négociateurs extérieurs à
- la province
- pendant les négociations ou, au moment même du règlement,
- pour la signature
- d'une convention. Etant donné que l'article 74 ne semblait pas
- poser de graves
- problèmes dans la pratique, j'ai exprimé l'espoir que les parties
- pourraient
- débattre de la question si, à l'avenir, des problèmes se
- posaient à cet égard.
- 69. Il a été expliqué à la mission que l'article 87 de la loi sur
- les
- relations professionnelles (autorisant une seule grève ou un
- seul lock-out
- dans un conflit) avait été introduit par réaction à une grève
- déclenchée en
- 1982 par le personnel infirmier du Banff Mineral Springs
- Hospital pendant
- laquelle l'un des syndicats concernés avait contesté les
- résultats d'un vote
- relatif à la grève. Le gouvernement a également souligné
- qu'aux termes de
- cette disposition les syndicats pouvaient se réunir et discuter
- d'une grève
- éventuelle aussi souvent qu'ils le souhaitaient, mais qu'ils ne
- pouvaient
- demander qu'un seul scrutin sur la grève organisée sous la
- surveillance du
- Conseil des relations professionnelles. Les deux parties sont
- convenues que la
- situation actuelle ne semblait pas poser de problèmes dans la
- pratique.
- 70. Il a été expliqué à la mission, au sujet de l'article 102.2 2)
- (prévoyant un vote de contrôle, par le Conseil des relations
- professionnelles,
- de l'acceptation pour les salariés d'un réglement du conflit),
- que la
- Commission des conflits du travail était une sorte d'organe de
- médiation
- obligatoire, instituée pour examiner des conflits déterminés. Cet
- article
- portait sur la question de savoir si les dirigeants syndicaux
- pouvaient
- accepter ou refuser les sentences arbitrales ou si les membres
- du syndicat, à
- titre individuel, devaient voter à ce propos. Cet article n'avait
- d'ailleurs
- pas encore été utilisé.
- 71. Pendant les discussions avec les représentants
- syndicaux, il a été
- clairement expliqué à la mission que l'article 105 3), faisant un
- délit de la
- simple menace d'une grève illicite, avait eu pour effet
- d'amplifier leurs
- craintes concernant le but véritable de la loi no 44. Ces
- représentants ont
- souligné que le danger que présentait cette disposition était
- accru par le
- fait que la législation avait donné une large définition de la
- grève. D'un
- autre côté, le gouvernement a souligné que de nombreuses
- décisions du Conseil
- des relations professionnelles avaient précisé la définition des
- grèves. Il a
- également fait ressortir que cette disposition découlait du
- principe de la
- négociation collective équitable, en ce sens que la menace
- d'une action
- illicite ne contribuait pas à la solution d'un problème de
- négociation
- particulier ou aux négociations en général. J'ai fait remarquer
- que toute
- "personne agissant au nom de l'agent négociateur" était
- également couverte du
- fait de la large portée de cette disposition. Le gouvernement a
- expliqué que
- l'article 105 3) n'avait pas été utilisé et qu'il appartiendrait au
- Conseil
- des relations professionnelles, lorsqu'il aurait à se prononcer
- sur
- l'application de cette disposition, de mettre en évidence tout
- problème de
- rédaction concernant la position des agents syndicaux.
- 72. En ce qui concerne l'allégation relative à l'article 49 de la
- loi sur
- les relations professionnelles (introduisant un délai de 90 jours
- avant de
- pouvoir disposer d'une autre demande d'accréditation), il a été
- expliqué à la
- mission qu'aux termes de la loi sur les relations professionnelles
- le Conseil
- des relations professionnelles était autorisé à accorder une
- accréditation
- pour la négociation collective dans trois situations:
- premièrement, lorsqu'il
- a la certitude qu'une majorité des salariés d'une unité ont payé
- leur
- cotisation à un syndicat qu'ils ont choisi comme agent
- négociateur;
- deuxièmement, lorsqu'il a la certitude qu'une majorité des
- salariés d'une
- unité de négociation ont demandé à s'affilier au syndicat et ont
- payé une
- cotisation, pas plus de 90 jours avant la date de la demande
- d'accréditation,
- et, troisièmement, après un vote. Avant l'introduction de la
- modification, le
- délai n'était que de 30 jours pour les salariés qui avaient payé
- une
- cotisation. Les représentants syndicaux ont estimé que la
- prolongation du
- délai était un exemple de plus de l'intention véritable de la loi
- no 44. Le
- gouvernement a expliqué que l'article 49 visait les situations où
- les
- syndicats ne menaient pas une campagne permanente de
- recrutement aux fins
- d'accréditation en matière de négociation collective. Cette
- modification a été
- introduite pour qu'il n'y ait plus aucune incertitude au sujet de
- la force
- véritable d'un syndicat dans une unité de négociation et pour
- éviter que l'on
- n'abuse de la procédure d'accréditation afin, par exemple,
- d'empêcher d'autres
- syndicats d'organiser des campagnes de recrutement dans la
- même unité de
- négociation. Le gouvernement a indiqué que, depuis
- l'adoption de cet
- amendement, il n'y avait pas eu de preuve de ses effets sur
- l'aptitude d'un
- syndicat à recruter et à demander l'accréditation. Comme les
- statuts d'un
- syndicat fixeraient le laps de temps au bout duquel prendrait fin
- l'affiliation des candidats ayant payé la cotisation, tout
- problème de
- procédure que l'article 49 serait susceptible de poser aux
- syndicats pourrait
- probablement être tranché par une simple modification de leurs
- statuts. En
- outre, il a été précisé que le Conseil des relations
- professionnelles avait
- tout pouvoir pour organiser un vote, même si la majorité (51
- pour cent) des
- salariés de l'unité de négociation avaient fait connaître leur
- choix d'un
- syndicat comme agent négociateur.
- 73. Les représentants syndicaux m'ont dit que la modification
- apportée à
- l'article 132 concernant les droits du successeur n'avait pas de
- raison d'être
- en matière de relations professionnelles. Le gouvernement a
- expliqué que cette
- modification avait été adoptée à la suite d'une décision
- judiciaire qui avait
- donné une interprétation trop large de la disposition
- précédente, permettant
- ainsi aux droits du successeur de lier les salariés à d'"autres
- activités
- connexes"; la situation en matière de droits du successeur est
- maintenant
- classée dans la loi, et le Conseil des relations professionnelles
- a seulement
- le pouvoir discrétionnaire, et non l'obligation, de déterminer
- quels droits,
- privilèges et obligations ont été retenus lorsqu'une question se
- pose dans le
- cadre de cette disposition.
- 74. Il ressort d'informations obtenues pendant la mission au
- sujet de
- l'article 117.94 de la loi sur les relations professionnelles et de
- l'article
- 92.2 de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction
- publique
- concernant le retrait de la retenue à la source des cotisations
- syndicales que
- les allégations initiales de l'organisation plaignante
- concernaient un projet
- de disposition qui ne mentionnait pas le préavis et le droit de
- recours au
- conseil approprié. Les représentants syndicaux ont reconnu
- que les articles
- 117.94 et 92.2, dans leur teneur actuelle, ne posaient pas de
- problème
- puisqu'ils n'avaient pas été utilisés. Le gouvernement a
- souligné le caractère
- équitable du préavis, du recours et du délai fixés par le présent
- article;
- néanmoins, il a reconnu que l'employeur avait la possibilité de
- suspendre les
- retenues à la source sur tous les salaires dans une situation où
- un seul
- salarié aurait refusé de s'acquitter de ses services. Il a estimé
- qu'en de
- pareils cas le conseil approprié aurait à décider s'il y a eu, ou
- non, grève
- illicite et, dans la négative, à ordonner à l'employeur de ne pas
- suspendre le
- système des retenues à la source.
- 75. Pendant les discussions relatives à la suppression du
- droit de grève des
- travailleurs du secteur hospitalier (art. 117.1 de la loi sur les
- relations
- professionnelles), les représentants de l'AUPE ont exprimé leur
- préoccupation
- face au caractère indiscriminant de l'article 117.1 dans la
- mesure où le
- personnel des services non essentiels était aussi couvert par
- l'interdiction
- de la grève. Dans un contexte plus général, ce point a été
- examiné ci-dessus
- de façon assez détaillée. Les employés de l'hôpital ont
- présenté des éléments
- de preuve pour démontrer que leur description de tâches et
- leurs attributions
- ne différaient pas des travaux de bureau effectués en dehors
- du système
- hospitalier et ne pouvaient donc pas être considérées comme
- essentielles. Le
- gouvernement a souligné qu'il y avait beaucoup d'incertitude,
- au niveau
- national comme au plan international, sur la notion de "service
- essentiel". Il
- a été expliqué que le gouvernement de la province avait
- décidé d'éclaircir la
- situation par la voie législative plutôt que par le biais de
- décisions du
- Conseil des relations professionnelles ou de décisions
- arbitrales. Le
- gouvernement a souligné que l'article 117.1 n'avait touché
- que de petits
- groupes de salariés. Après qu'il fut indiqué au gouvernement
- que, dans
- certains cas spécifiques, les organes internationaux avaient
- donné une
- définition très claire du concept de services essentiels, la
- question d'un
- abus éventuel a été soulevée. Le gouvernement a expliqué
- que cette question
- avait été portée devant les tribunaux dans deux juridictions, à
- savoir le
- recours contre une décision d'une cour d'appel de l'Alberta
- devant la Cour
- suprême du Canada (contestant la loi no 44, motif pris qu'elle
- enfreint la
- Charte canadienne des droits et libertés - la cause sera
- entendue en octobre
- 1985) et un recours de l'AUPE devant la cour d'appel de
- l'Alberta, qui a été
- ajourné en attendant la décision susmentionnée de la Cour
- suprême.
- D. Remarques finales
- 76. Les plaintes déposées contre le gouvernement de
- l'Alberta se divisent
- en deux groupes. Un certain nombre d'entre elles semblaient
- indiquer que des
- modifications législatives récentes, en particulier la loi no 44,
- avaient
- changé le processus de la négociation collective et de la
- soumission à
- l'arbitrage. Cela était-il allégué, enfreignant manifestement les
- principes de
- l'OIT applicables à une structure où la limitation du droit de
- grève est
- compensée par le libre accès à l'arbitrage obligatoire. D'autres
- portaient sur
- des points de détail distincts. Il était suggéré que ceux-ci, pris
- dans leur
- ensemble, opposaient de sérieux obstacles à la liberté
- syndicale et à la libre
- négociation collective. Pris ensemble, ces deux groupes de
- plaintes étaient
- intensément ressentis et sincèrement considérés comme
- formant une politique
- cohérente visant à affaiblir le syndicat de la fonction publique.
- J'ai le
- sentiment qu'il serait utile, pour le Comité de la liberté
- syndicale, que je
- résume la position telle que je l'ai vue en traitant chacun des
- groupes
- séparément, puis en évaluant la situation globale.
- Négociation collective et arbitrage
- 77. La loi no 44, qui a apporté plusieurs modifications à la
- structure de
- la négociation, et la pratique récente ont fait naître le
- sentiment que des
- limitations importantes avaient été imposées et qu'un préjudice
- avait été
- causé. Dans son fonctionnement actuel, le système soulève
- les problèmes
- ci-après sur lesquels l'attention du comité est spécialement
- attirée:
- a) Le système refuse le droit de grève aux agents de la
- fonction publique
- qui sont couverts par la loi. Il offre en contrepartie l'accès à
- l'arbitrage
- obligatoire.
- b) L'accès à l'arbitrage est limité par une clause de
- compétence (art. 48
- 2)). Cette clause est en fait l'équivalent de la clause relative
- aux droits de
- la direction habituellement contenue dans une convention
- collective. Deux
- questions ont été soulevées: i) la rédaction de la loi permet à
- l'organe qui
- prononcera le jugement d'avoir une large conception des
- droits de la
- direction. Si tel est le cas, le syndicat opposera un solide
- argument, étant
- donné que l'exercice de ces droits soulèvera certainement, à
- bien des
- occasions, la question dont le syndicat estime avec raison
- qu'elle relève de
- la négociation; ii) avec les méthodes de procédure adoptées,
- la question de la
- compétence relève du Conseil des relations professionnelles
- dans la fonction
- publique. Cela a pour effet d'enlever à l'arbitre, saisi des
- problèmes
- causés par la rupture des négociations, certaines des
- questions contestées.
- Les syndicats semblent être gênés par cette dualité. L'étude
- des sentences
- arbitrales indique que l'application de ces dispositions a donné
- des résultats
- qui diminuent considérablement la compétence de l'arbitre. Il
- semble que le
- système qui, on l'a vu, vise à compenser la perte du droit de
- grève
- restreigne le nombre des questions censées relever de
- l'arbitrage. C'est là un
- point qui doit être examiné attentivement.
- c) L'adjonction, dans les règles statutaires applicables à la
- tâche de
- l'arbitre qu'énumère l'article 55, de l'obligation de considérer
- "toute
- politique fiscale de l'Etat qui peut être, de temps en temps,
- annoncée par le
- Trésorier provincial": il semble, d'après ce qui m'a été dit, que
- c'est
- l'impact potentiel de cette clause que l'on craint. Il est difficile
- de voir
- l'effet de cette disposition prise en son sens apparent dans la
- pratique de
- l'arbitrage. On ne peut pas sérieusement prétendre que l'arbitre
- ne
- considérerait pas ladite politique fiscale s'il ne recevait pas
- cette
- directive. Les dangers sont toutefois là: i) l'arbitre, conscient
- de la
- précarité de sa profession, peut donner la prééminence à cette
- disposition.
- Certes, il convient de dire qu'en réalité c'est là un danger bien
- théorique,
- mais ce problème existe, que la position soit statutaire ou non;
- ii) le
- gouvernement peut annoncer sa politique fiscale sous la
- forme, par exemple,
- d'une norme applicable aux majorations salariales. Cela, sans
- aucun doute,
- augmenterait l'impact de la considération particulière ici
- examinée. Cela
- porterait gravement atteinte à la liberté de l'arbitre. De fait, on
- s'apercevrait qu'elle modifie le concept d'arbitrage
- indépendant. Une telle
- intervention devrait être directement, et non indirectement,
- statutaire. Les
- politiques fiscales qui m'ont été montrées ne recèlent aucun
- signe d'une
- telle ingérence. Elles énoncent clairement et succinctement
- des facteurs
- économiques généraux dont le gouvernement se préoccupe.
- On ne peut pas dire
- des sentences étudiées quelles démontrent un abus
- quelconque de cet article
- visant à détruire l'indépendance.
- d) Les exclusions des garanties prévues par la loi ont été
- récemment
- élargies. Cela augmente le nombre des fonctionnaires qui ne
- sont pas protégés
- par le système. Les faits sont clairement exposés dans les
- éléments de preuve
- apportés par les parties et résumés ci-dessus. Les effectifs
- couverts par la
- loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique
- ne sont pas
- excessifs. Il serait possible de débattre de la validité, au regard
- des normes
- de l'OIT, de quelques catégories, mais il n'y a pas de
- négligence flagrante
- à l'égard des principes en cause.
- 78. Il convient toutefois d'examiner l'exclusion des
- travailleurs des
- établissements de soins des structures de négociation
- parallèles garanties par
- la loi sur les relations professionnelles. Cette exclusion est très
- large et
- attache trop peu d'importance aux qualifications requises pour
- être considéré
- comme un "employé essentiel". Elle est si large qu'elle justifie
- véritablement
- les préoccupations des plaignants.
- Questions particulières
- 79. Ces questions ont été exposées ci-dessus de façon
- détaillée et les
- opinions des parties ont été indiquées. Il est possible de les
- grouper
- partiellement. Quatre questions portent sur les modifications
- statutaires
- apportées aux structures légales. Sans aucun doute, ces
- modifications rendent
- la position des syndicats moins favorable, d'où la raison des
- plaintes. Elles
- ne semblent pas toutefois mettre d'importantes entraves aux
- droits syndicaux.
- Le comité sera en mesure de les juger d'après les opinions
- exprimées; j'ai
- trouvé peu de choses à ajouter:
- a) l'article 74.1 de la loi sur les relations professionnelles
- exige qu'un
- représentant dûment autorisé à mener les négociations
- collectives réside dans
- l'Alberta. Il a été précisé que la loi n'interdit pas aux syndicats
- de
- rechercher pour les négociations l'aide de personnes qui
- résident à
- l'extérieur de la province;
- b) l'article 87.2 de la loi sur les relations professionnelles
- autorise
- une seule grève ou un seul lock-out. Cela restreint certaines
- tactiques
- syndicales antérieurement permises, mais n'empêche pas de
- sonder suffisamment
- les membres pour déterminer la position avant de demander un
- scrutin;
- c) l'article 49 de la loi sur les relations professionnelles, en
- cas de
- rejet d'une accréditation à l'issue d'un vote, où il est prévu
- maintenant un
- moratoire de 90 jours. Cela porte atteinte à la pratique
- courante qui est
- d'inscrire des membres pour une courte période (30 jours). Il
- est certain que
- cela entraînera un changement de tactique;
- d) l'article 132 de la loi sur les relations professionnelles,
- lorsqu'une
- affaire ou une entreprise change de main, prévoyait le transfert
- automatique
- au nouvel employeur des droits et obligations en matière de
- négociation
- collective. L'article 132 autorise maintenant le conseil à
- intervenir. Comme
- il est probable qu'il ne le fera que lorsqu'on prévoit des
- difficultés, il
- semble que cette disposition réglemente et accélère
- simplement la pratique
- normale. Rien n'a indiqué que cette disposition serait utilisée
- pour modifier
- les motifs précédents d'intervention;
- e) l'article 1 w.1) de la loi sur les relations professionnelles n'a
- jamais
- été promulgué.
- 80. Trois questions appellent des commentaires distincts:
- a) Article 102.2 - Loi sur les relations professionnelles Cette
- disposition confère le droit de faire voter les travailleurs
- concernés sur les
- recommandations d'une commission d'enquête chargée d'un
- conflit du travail
- dans les dix jours qui suivent la publication de ces
- recommandations. Demander
- ce vote est considéré comme le déni du droit des
- responsables syndicaux de
- gérer les affaires de leur propre syndicat. Toutefois, cela ne
- prive pas les
- travailleurs pris individuellement de leurs droits.
- b) Article 105 et article 106 - Loi sur les relations
- professionnelles Le
- délit de menace de grève illicite qui est créé par ces
- dispositions demande un
- examen attentif. Il semble mettre quelque peu en danger les
- salariés et les
- responsables syndicaux. Deux problèmes se posent: i) la
- définition d'une grève
- n'est aucunement certaine et précise. Dans bien des cas, il
- est possible que
- la question ne puisse être tranchée que par un tribunal. Un
- salarié ou
- responsable syndical ou bien se voit fortement entravé dans
- sa ligne de
- conduite (par peur de commettre une infraction eventuelle
- mais non certaine),
- ou bien agit de bonne foi, persuadé que la grève est licite, et
- s'aperçoit par
- la suite qu'elle ne l'est pas. Il semble être essentiel qu'un
- individu qui n'a
- pas de culpabilité subjective (c'est-à-dire la connaissance ou
- la conviction
- que l'acte est illégal) devrait être protégé; ii) la question du droit
- qu'a
- telle ou telle personne d'agir au nom du syndicat peut
- également se poser. Ici
- encore, il convient d'espérer que des éclaircissements seront
- apportés pour
- éviter toute incertitude.
- c) Article 117.94 - Loi sur les relations professionnelles;
- article 92.2 -
- Loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique.
- Aux termes
- de ces dispositions, lorsqu'une grève illicite est déclenchée,
- l'employeur
- peut suspendre la déduction, sur la rémunération des salariés,
- des cotisations
- syndicales et leur versement au syndicat. C'est là un exemple
- de la crainte
- que les dispositions puissent être utilisées inéquitablement. La
- loi semble
- autoriser le blocage de toutes les cotisations dans l'unité à la
- suite de
- l'action d'une seule personne. Il nous a été dit qu'une telle
- réaction était
- extrêmement improbable, sauf dans le cas de travailleurs
- "pivots" tout
- spécialement choisis. Ici encore, il importe de noter qu'il peut y
- avoir des
- situations dans lesquelles le syndicat lui-même s'efforce
- d'empêcher la grève
- illicite ou d'y mettre fin. Prendre des mesures de représailles
- dans ces
- conditions ne semblerait pas être équitable. Là encore, il s'agit
- d'une
- question qui, une fois exposée, peut être réglée en
- éclaircissant la portée
- exacte de la disposition.
- Considérations générales
- 81. Consultation: Les plaintes portent sur une période
- pendant laquelle les
- attitudes du gouvernement et du syndicat de la fonction
- publique étaient
- diamétralement opposées. La consultation courante sur des
- questions telles que
- l'hygiène et la sécurité semble s'être poursuivie sans
- changement. Toutefois,
- le gouvernement étant déterminé à agir rapidement à la suite
- du ralentissement
- marqué de l'activité économique, la consultation sur les
- modifications
- introduites par la loi no 44 s'est presque totalement réduite à
- une audition
- publique devant une commission du Parlement. Comme la loi
- touchait des
- procédures dans lesquelles le gouvernement et le syndicat
- agissaient de
- concert, il est regrettable qu'on n'ait pas accordé plus de
- temps à la
- consultation. Il semblerait que, maintenant que les pressions
- économiques se
- sont atténuées, le processus de consultation puisse être
- rétabli. Cela
- permettra à tout le moins de faire disparaître les malentendus
- avant que des
- modifications ne soient promulguées.
- 82. Attitudes: Il est apparu clairement que le syndicat était
- convaincu
- qu'il avait été choisi spécialement pour subir une attaque
- concertée contre sa
- position et ses droits. Les mesures prises par le gouvernement,
- dans leur
- intention évidente - limiter les augmentations pécuniaires -, et
- les diverses
- modifications considérées sous le jour le plus défavorable ont
- conduit à la
- formation de cette conviction. Il n'est pas facile de déterminer
- si ces
- craintes et l'interprétation la plus rude des modifications
- législatives
- reflètent les intentions. J'ai vu peu de preuves objectives à
- l'appui de cette
- opinion pessimiste, bien que j'admette que la crainte était
- véritable.
- 83. Il convient de mentionner deux aspects du problème
- fondamental:
- 1. Il est important et assez raisonnable d'examiner les
- questions soulevées
- en ce qui concerne la crainte des manières dont la loi peut
- être utilisée pour
- empêcher le syndicat de s'acquitter de son rôle de
- négociation. Il est apparu
- que bon nombre de ces questions pourraient être résolues par
- entente interne,
- obtenue par exemple par un échange de lettres.
- 2. Le deuxième aspect est un peu plus complexe. Les
- procédures semblent
- avoir modifié l'indépendance telle qu'elle était perçue du
- Conseil des
- relations professionnelles dans la fonction publique et du
- processus
- d'arbitrage. Les raisons en sont exposées au début de la
- présente section. Il
- est essentiel que l'on se préoccupe de faire en sorte que
- l'indépendance de
- l'arbitrage soit maintenue et que l'on puisse constater qu'il en
- est fait
- grand cas.
- 84. Il est souhaitable et même possible de créer de
- meilleures relations
- entre les parties maintenant que la situation économique est
- moins alarmante
- et que les syndicats comme le gouvernement sont plus
- conscients de leurs
- responsabilités et obligations respectives. Il ne sera pas facile
- d'établir
- rapidement la confiance mutuelle mais, si l'on étudie
- conjointement les
- problèmes qui m'ont été exposés, il devrait être possible
- d'arriver à de
- meilleures relations. Les deux parties ont manifestement tout
- intérêt à
- déployer des efforts dans ce sens et à supprimer les craintes
- actuelles d'une
- inobservation des principes de l'OIT.
- IV. Cas de l'Alberta: no 1234
- A. Introduction
- 85. Dans une communication du 19 septembre 1983, la
- Confédération des
- associations des enseignants universitaires de l'Alberta
- (Confederation of
- Alberta Faculty Associations - CAFA) a présenté une plainte
- alléguant des
- violations des droits syndicaux dans l'Alberta. Le
- gouvernement de l'Alberta a
- transmis ses observations dans une communication du 21
- février 1984.
- B. Problèmes en cause
- 86. Dans sa communication du 19 septembre 1983, la CAFA
- a allégué qu'une
- modification apportée en novembre 1981 à la loi sur les
- universités privait le
- personnel enseignant des universités de la province de
- l'Alberta des droits
- conférés par la convention no 87, qui avait été ratifiée par le
- Canada.
- L'organisation plaignante expliquait qu'un nouvel article 17 1)
- d.1) donnait
- au conseil des gouverneurs de chaque établissement
- universitaire le pouvoir de
- désigner les salariés qui seraient membres de l'association du
- personnel
- académique de l'établissement et donc qui pourraient
- appartenir à
- l'association du personnel de la faculté de chaque université.
- Cet article a
- la teneur suivante:
- Après consultation de l'association du personnel
- enseignant, (le conseil
- des gouverneurs a le pouvoir) de prendre une ou plusieurs des
- décisions
- suivantes: i) désigner les catégories de salariés qui font partie
- du personnel
- enseignant de l'université; ii) désigner tel ou tel salarié comme
- étant membre
- du personnel enseignant de l'université; iii) modifier les
- désignations faites
- en vertu des points i) et ii) ci-dessus.
- Selon l'organisation plaignante, cet article accordait à
- l'employeur le
- droit de déterminer les personnes qui devraient faire partie de
- l'association
- du personnel enseignant de l'université, ce qui est en
- contradiction avec
- l'article 2 de la convention no 87.
- 87. La CAFA a expliqué que sa plainte était semblable aux
- plaintes
- précédentes qui avaient été présentées par diverses
- associations canadiennes
- de travailleurs contre le gouvernement et, en particulier, à la
- plainte
- présentée en 1977 par le Congrès du travail du Canada et
- l'Association
- canadienne des professeurs d'université (cas no 893, que le
- comité a examiné
- pour la dernière fois de façon approfondie dans son 194e
- rapport, paragraphes
- 92 à 118) et à la plainte présentée en 1981 par l'Association
- du corps
- enseignant des collèges de l'Alberta (cas no 1055, examiné
- par le comité dans
- son 214e rapport, paragraphes 332 à 350).
- 88. La CAFA a fait observer qu'elle avait attendu, pour
- présenter à l'OIT
- une plainte concernant la loi de 1981 portant modification de
- la loi sur les
- universités, de voir ce qui se produirait en fait lors de la
- première
- désignation par un conseil des gouverneurs des membres du
- personnel enseignant
- universitaire et, partant, des membres d'une association aux
- termes de la
- nouvelle loi. Elle a cité un exemple de désignation de ce
- genre: le Conseil de
- l'Université d'Athabasca a fait savoir qu'il avait l'intention de
- désigner en
- tant que "membres du personnel enseignant universitaire"
- moins d'un tiers des
- personnes qui avaient antérieurement été membres de
- l'Association du personnel
- enseignant de l'Université d'Athabasca en déclarant
- arbitrairement quelles
- seraient les personnes à en exclure au motif qu'elles
- s'occupaient de
- l'administration supérieure ou que leurs activités ne
- correspondaient pas à la
- définition du terme "universitaire" adoptée par le conseil. Selon
- l'organisation plaignante, l'Association du personnel
- enseignant de
- l'Université d'Athabasca était parvenue à convaincre le
- conseil de
- l'établissement que les définitions qu'il avait initialement
- adoptées ne se
- justifiaient pas et, par la suite, un accord sur la désignation
- avait été
- conclu. Néanmoins, selon l'organisation plaignante, étant
- donné que la loi
- accordait toujours au conseil des gouverneurs le droit de
- révoquer à son gré
- une désignation, sous réserve d'une consultation préalable, ce
- texte
- continuait de menacer la liberté syndicale.
- 89. Dans sa communication du 21 février 1984, le
- gouvernement a expliqué que
- la création et la structure des universités de l'Alberta
- répondaient au
- principe de la liberté universitaire - le droit pour chaque
- membre du corps
- enseignant de l'université d'étudier, de poursuivre des
- recherches et de
- communiquer des idées en toute liberté. Le gouvernement a
- ajouté que le
- principe de la liberté universitaire devait être protégé par des
- structures
- institutionnelles appropriées et que le rôle des enseignants
- dans la gestion
- des universités était reconnu depuis longtemps.
- 90. Selon le gouvernement, par suite de la complexité des
- fonctions
- professorales et administratives exercées par ces
- établissements, il avait été
- reconnu que la gestion universitaire incombait conjointement
- aux divers
- éléments importants de la communauté universitaire, y compris
- les professeurs,
- les gestionnaires, les conseils d'administration et les étudiants.
- En
- particulier, les professeurs devaient jouer un rôle majeur dans
- la
- détermination des programmes d'étude, des matières et des
- méthodes
- pédagogiques, de la recherche, des exigences à respecter
- pour la délivrance
- des diplômes, ainsi que dans le recrutement, la titularisation et
- le
- licenciement des enseignants, étant donné que les
- professeurs étaient les
- seuls à avoir la compétence requise pour juger de ces
- questions. Le
- gouvernement a cité à titre d'exemple la structure de
- l'Université de
- l'Alberta, où les membres du personnel enseignant jouaient un
- rôle important
- dans l'administration et dans la détermination de la politique
- globale de
- l'établissement; "les membres du personnel" sont définis dans
- la convention
- collective de l'association des professeurs comme étant toutes
- les personnes
- qui ont été nommées pour occuper à temps complet des
- postes d'enseignement et
- de recherche, ce qui comprend tous les professeurs et
- administrateurs
- supérieurs, tels que le président, le vice-président et les
- doyens. Le conseil
- des gouverneurs, dans cette université, comprend notamment
- le président de
- l'université et deux membres du personnel enseignant. Le
- Conseil général des
- facultés, qui est chargé des questions d'enseignement de
- l'université, sous
- réserve des pouvoirs de celle-ci, comprend notamment le
- président, le
- vice-président, les doyens de toutes les facultés, les directeurs
- de chaque
- école ou institut, le bibliothécaire en chef, le secrétaire général
- et les
- membres élus de toutes les facultés et de tous les instituts ou
- écoles. Le
- gouvernement a expliqué que toutes ces personnes faisaient
- partie du
- "personnel universitaire" mais que, parallèlement, elles étaient
- des membres
- actifs et influents de l'organisme même qui intervient en tant
- qu'instrument
- du conseil de l'université pour la gestion interne, ce qui
- comprend les
- questions de titularisation, de rémunération et de promotion
- ainsi que les
- recours et les questions disciplinaires.
- 91. Le gouvernement a donc conclu que, dans le milieu
- universitaire, les
- distinctions traditionnelles entre employeurs et salariés ou entre
- gestionnaires et non gestionnaires ne s'appliquaient pas. Tous
- les groupes
- d'intérêts qui exercent leurs activités dans le cadre de
- l'établissement
- interviennent dans sa gestion, notamment dans la désignation
- du "personnel
- universitaire", puisque le personnel est fortement représenté
- au sein du
- conseil des gouverneurs. Le gouvernement a souligné que la
- loi portant
- modification de la loi sur les universités s'efforçait de créer un
- cadre dans
- lequel le dialogue pouvait s'instaurer au sujet de questions de
- conditions de
- travail plus traditionnelles, tout en reconnaissant la nature
- spécifique des
- universités. En particulier, la loi a désigné le conseil des
- gouverneurs comme
- étant l'autorité définitive et, en second lieu, la loi a exigé une
- "consultation", ce que le gouvernement a interprété comme
- étant une
- consultation au plein sens du terme permettant aux personnes
- intéressées de
- bénéficier raisonnablement, largement et suffisamment de
- l'occasion d'exprimer
- leur avis.
- 92. Se référant à l'exemple cité par l'organisation plaignante,
- le
- gouvernement a expliqué qu'au début de 1983 le conseil des
- gouverneurs de
- l'Université d'Athabasca avait déclaré son intention de
- désigner en tant que
- "membres du personnel universitaire" moins d'un tiers des
- personnes qui
- avaient antérieurement fait partie de l'Association du personnel
- enseignant de
- l'Université d'Athabasca. Le conseil des gouverneurs avait
- estimé que bon
- nombre des membres du personnel exerçaient des fonctions
- de gestion supérieure
- et que, cela étant, leurs activités n'entraient pas dans le cadre
- de sa
- définition du terme "universitaire"; à la suite de consultations
- entre le
- conseil des gouverneurs et l'Association du personnel
- enseignant, la portée
- des désignations avait été modifiée et, en conséquence,
- nombre des personnes
- concernées - dont la désignation avait changé - avaient été
- désignées de
- nouveau comme étant "membres du personnel universitaire".
- Selon le
- gouvernement, cet exemple prouvait l'efficacité de la
- consultation telle
- qu'elle était exigée par la loi portant modification de la loi sur
- les
- universités, étant donné, tout particulièrement, que le conseil
- des
- gouverneurs avait reconnu que la fragmentation du personnel
- enseignant en
- petites unités de négociation ne présentait pas d'avantage
- pour l'université.
- C. Informations reçues pendant la mission
- 93. Pendant les discussions avec les représentants de la
- CAFA, deux points
- ont été soulignés. Premièrement, le syndicat s'efforçait de
- mener des
- consultations de bonne foi avec les employeurs (les conseils
- de gouverneurs)
- pour essayer de remédier au caractère restrictif de l'article 17
- 1) d.1); de
- telles consultations informelles avaient en fait donné des
- résultats dans la
- situation de l'Université d'Athabasca dont il est question dans
- la plainte qui
- a été déposée. Deuxièmement, la CAFA a souligné qu'elle se
- préoccupait du fait
- qu'il n'y avait aucun droit de recours contre une désignation de
- personnel
- universitaire effectuée par le conseil des gouverneurs en vertu
- de l'article
- 17 1) d.1). La CAFA a considéré qu'une solution possible pour
- sortir de cette
- situation pourrait consister à inclure des dispositions dans la loi
- prévoyant
- l'arbitrage d'une tierce personne sur la question des
- désignations, comme il
- en existe en cas de blocage des négociations collectives. J'ai
- noté que
- c'était là une utile suggestion puisque, dans la plupart des cas,
- les
- définitions des tâches indiquaient quels étaient les membres du
- personnel
- universitaire qui se consacraient à l'enseignement et à la
- recherche et quels
- étaient ceux qui étaient occupés à des tâches de gestion.
- 94. Le gouvernement a souligné que la situation à l'Université
- d'Athabasca
- avait été particulièrement tendue du fait qu'à l'époque de la
- plainte
- l'université venait juste d'être transférée d'Edmonton à la ville,
- située plus
- au nord d'Athabasca (qui avait donné son nom à l'université)
- pour poursuivre
- ses programmes d'"université ouverte". Selon le
- gouvernement, aucune des trois
- autres universités de l'Alberta n'avait connu de problème; les
- employeurs de
- l'Université de l'Alberta (à Edmonton) avaient en fait été surpris
- à propos de
- cette plainte parce qu'ils n'avaient aucune difficulté à négocier
- avec leur
- conseil de gouverneurs la question du personnel universitaire.
- Néanmoins, le
- gouvernement a reconnu que la loi ne prenait pas en
- considération les
- différences radicales que présentent les quatre universités de
- la province.
- J'ai fait remarquer que, bien que la législation ne suscite
- actuellement aucun
- problème, la CAFA souhaitait qu'un mécanisme d'un genre ou
- d'un autre assure
- une protection contre des situations comme celles qui s'étaient
- produites à
- l'Université d'Athabasca. A cela, le gouvernement a répondu
- que, les autres
- universités ayant réussi à parvenir aux désignations, on ne
- pouvait envisager
- aucune modification importante de la politique suivie. J'ai
- indiqué qu'un
- moyen informel tel qu'une lettre d'entente suffirait peut-être.
- D. Remarques finales
- 95. La question ici est simple. Le pouvoir qui est donné à
- l'employeur de
- désigner le personnel académique permettrait d'exercer un
- contrôle important
- sur la nature et la taille de l'unité de négociation. Dans les
- universités, où
- règnent la participation et la consultation, les relations
- professionnelles
- sont de nature individuelle. Les rapports étaient excellents,
- mais le pouvoir
- de désignation a entraîné un grave problème à l'Université
- d'Athabasca qui,
- parce qu'elle se concentre sur le "télé-enseignement" -
- c'est-à-dire un
- enseignement destiné à des étudiants qui ne sont pas sur le
- campus -, a une
- structure de personnel particulière. Ce problème a été résolu
- de façon
- satisfaisante, mais une faiblesse de la loi a mis l'association du
- personnel
- sur le qui-vive.
- 96. Il est certain que le pouvoir unilatéral d'opérer les
- désignations
- place potentiellement le syndicat dans une situation très
- défavorable. Tout ce
- qui est demandé, c'est l'accès à l'arbitrage indépendant pour
- les désignations
- contestées. Cela semble être une sauvegarde nécessaire pour
- protéger
- l'intégrité de l'unité de négociation. Il semble très improbable
- que ce
- mécanisme soit souvent utilisé car les relations paraissent
- bonnes. On
- pourrait donc envisager d'introduire la simple sauvegarde que
- demande le
- syndicat.
- V. Cas de l'Ontario - no 1172
- A. Introduction
- 97. La plainte que le Congrès du travail du Canada (CTC)
- avait présentée au
- nom de plusieurs des organisations - le Syndicat national du
- personnel des
- gouvernements provinciaux (NUPGE), le Syndicat des
- employés de la fonction
- publique de l'Ontario (OPSEU) et le Syndicat canadien des
- employés publics
- (CUPE) - qui lui sont affiliées figurait dans une communication
- en date du 15
- novembre 1982. Le CTC a fourni des informations
- supplémentaires dans des
- communications des 15 décembre 1982, 16 février et 28
- octobre 1983 et 10
- janvier 1984. La Confédération mondiale des organisations de
- la profession
- enseignante (CMOPE) a présenté sa plainte au nom des
- organisations qui lui
- sont affiliées - la Fédération des enseignants du Canada et la
- Fédération des
- enseignants de l'Ontario - dans une lettre du 8 février 1983 et
- des
- informations supplémentaires dans une communication du 7
- mars 1983. Le
- Syndicat international des salariés des services (SISS) a
- présenté sa plainte
- dans une lettre du 6 avril 1984. Le gouvernement a adressé
- ses observations
- dans des communications des 25 avril 1983, 7 juin et 16
- octobre 1984.
- B. Problèmes en cause
- 98. Dans ses communications initiales, le CTC a fait valoir
- qu'un nouveau
- texte législatif adopté par l'Ontario "la loi concernant les
- restrictions en
- matière de rémunération dans le secteur public de l'Ontario et
- le contrôle des
- facteurs inflationnistes dans l'économie de la province"
- (connue sous le nom
- de loi no 179) enfreignait les articles 3 et 4 de la convention no
- 87 et
- l'article 4 de la convention no 98. Cette loi, entrée en vigueur
- vers la fin
- de 1982, était applicable aux salariés de la fonction publique
- de l'Ontario,
- de toutes les municipalités de l'Ontario, des corporations, des
- commissions,
- des conseils et des organismes municipaux et provinciaux de
- l'Ontario, y
- compris les universités, les écoles secondaires, les hôpitaux et
- les conseils
- de santé. En particulier, le CTC a allégué que la loi supprimait
- le droit
- qu'avaient les travailleurs visés de s'organiser et de négocier
- collectivement
- parce qu'elle permettait au gouvernement provincial de
- prolonger
- arbitrairement la durée d'application des conventions
- collectives de douze
- mois et, pendant cette période, de fixer unilatéralement les
- augmentations
- salariales des travailleurs. De plus, selon le CTC, le Conseil de
- restriction
- de l'inflation, créé aux termes de la loi, s'était vu accorder de
- très grands
- pouvoirs lui permettant de résoudre les différends sans en
- référer aux
- syndicats ni aux salariés intéressés.
- 99. La CMOPE, dans sa communication du 8 février 1983, a
- déclaré que la loi
- no 179 constituait une ingérence injustifiable dans l'exercice
- du droit de
- négociation. Elle a fait observer que ce texte passait outre à la
- procédure
- normale de négociation collective prévue dans diverses lois
- provinciales
- précises en limitant les salaires du personnel du secteur public,
- y compris
- les enseignants, car il prenait effet "par dérogation à toute
- autre loi, à
- l'exception de la loi canadienne de 1981 sur les droits de la
- personne ...".
- La CMOPE a déclaré en outre que l'Ontario n'était pas touché
- par un état
- d'urgence national suffisamment grave pour justifier cette
- restriction
- importante au droit fondamental de négocier collectivement,
- l'engagement que
- le gouvernement avait pris de réduire l'inflation ne constituant
- pas une
- raison suffisante pour prendre cette mesure de suspension par
- voie
- législative.
- 100. Selon les informations supplémentaires fournies par le
- CTC en date du
- 16 février 1983, la loi avait, en fait, été promulguée le 15
- décembre 1982
- avec effet rétroactif au 21 septembre 1982 et s'appliquait aussi
- à des
- sociétés privées du secteur parapublic qui étaient liées par
- contrat au
- gouvernement provincial ou financées par lui, notamment les
- maisons de repos,
- les services d'ambulances, les entreprises de ramassage des
- ordures ménagères,
- ainsi qu'à certaines organisations de bienfaisance privées et à
- des organismes
- non gouvernementaux tels que le Musée de l'Ontario et le
- Jardin botanique
- (art. 6). L'organisation plaignante a déclaré que le lieutenant-
- gouverneur-en-conseil était en outre habilité à étendre la
- portée de la loi
- par voie réglementaire, sans débat législatif (art. 25).
- 101. Le CTC a expliqué comme suit ce qu'il reprochait à la loi
- no 179: elle
- imposait une majoration salariale de 5 pour cent aux salariés
- intéressés
- pendant une période minimale d'un an (dénommée "l'année de
- contrôle"), quels
- que soient le taux de l'inflation et les accords conclus dans le
- secteur privé
- au sujet des salaires et des avantages accessoires (art. 12);
- elle
- "amoindrissait" ou confisquait, sans compensation, les droits
- contractuels
- dont bénéficiaient les salariés en vertu de conventions
- collectives dont la
- durée d'application s'étendait au-delà du 1er octobre 1983 et
- elle limitait
- les majorations de salaire et les primes pouvant être accordées
- à ces salariés
- en vertu desdites conventions collectives (art. 8, 9, 10, 11 et
- 12); elle
- supprimait le droit de faire grève ou de recourir à un arbitrage
- ayant force
- obligatoire dans le cas où le recours à ces mesures serait lié à
- des
- revendications visant à obtenir des avantages en espèces
- dépassant ceux que la
- loi avait fixés (art. 13); elle semblait permettre aux parties à une
- convention collective de modifier les dispositions non
- pécuniaires prévues par
- la convention, sans toutefois offrir les moyens d'obtenir une
- telle
- modification, étant donné que le droit de grève et le droit de
- recourir à un
- arbitrage ayant force obligatoire étaient supprimés (art. 15); elle
- empêchait
- les syndicats de négocier un premier accord avec un
- employeur lorsque
- l'accréditation de l'unité de négociation était postérieure au 21
- septembre
- 1982, puisque les salariés n'avaient le droit de faire grève ou
- de recourir à
- un arbitrage ayant force obligatoire qu'en liaison avec des
- questions non
- pécuniaires (art. 13, en liaison avec le règlement no 57 de
- l'Ontario, du 21
- janvier 1983, pris en application de la loi et aux termes duquel
- les premiers
- accords conclus après le 21 septembre devaient respecter la
- majoration
- salariale de 5 pour cent fixée par la loi); elle imposait une
- discrimination à
- l'encontre du personnel du secteur public, puisqu'elle
- l'assujettissait aux
- restrictions sumentionnées et que celles-ci n'étaient pas
- applicables aux
- travailleurs du secteur privé. L'organisation plaignante a fait
- observer en
- outre que, même si les parties à une convention collective
- s'étaient mises
- d'accord pour augmenter les salaires ou les primes dans des
- proportions
- dépassant celles que la loi permettait, le Conseil de restriction
- de
- l'inflation - composé de fonctionnaires désignés du
- gouvernement de l'Ontario
- - avait le pouvoir de rendre une ordonnance empêchant les
- parties de mettre en
- oeuvre la convention qu'elles avaient signée (art. 21 de la loi).
- De plus, les
- ordonnances dudit conseil pouvaient être enregistrées auprès
- de la Cour
- suprême de l'Ontario, de telle sorte qu'elles acquéraient force
- de jugement,
- ce qui permettait aux pouvoirs publics d'en obtenir l'application
- par
- n'importe quel moyen judiciaire d'exécution, y compris
- l'emprisonnement et les
- amendes.
- 102. Selon le CTC, les restrictions à la négociation collective
- énumérées
- ci-dessus enfreignaient l'article 4 de la convention no 98 et
- l'article 7 de
- la convention no 151, tandis que l'absence de mécanismes de
- règlement des
- différends enfreignait l'article 8 de la convention no 151. De
- plus, le CTC
- estimait qu'il y avait violation de l'article 3 de la convention no
- 87 du fait
- de la modification qui avait été apportée par voie législative
- aux conditions
- de travail pendant une certaine période et de la suppression
- de la possibilité
- pour les syndicats d'agir par voie de négociation. Le CTC a fait
- observer
- qu'en vertu de l'article 2 d) de la Charte canadienne des droits
- et des
- libertés, qui a été incorporée dans la Constitution fédérale en
- 1981, toutes
- les personnes jouissaient du droit d'organisation au Canada;
- compte tenu du
- nouveau texte législatif promulgué, les fonctionnaires et autres
- personnes
- entrant dans le champ d'application de la loi de l'Ontario
- étaient maintenant
- privés du droit d'organisation.
- 103. Dans sa communication en date du 7 mars 1983, la
- CMOPE a rappelé qu'en
- vertu de la loi de l'Ontario de 1975 concernant les
- négociations collectives
- entre conseils scolaires et enseignants, une procédure de
- négociation
- collective avait été mise en place en vertu de laquelle - si les
- négociations
- initiales entre les enseignants et les conseils qui les
- employaient échouaient
- - les mesures ci-après pouvaient être prises: enquête initiale;
- médiation;
- recours volontaire à un arbitrage ayant force obligatoire; choix
- d'offres
- finales; grève ou lock-out. Selon l'organisation plaignante, la
- négociation
- collective librement menée en vertu de cette procédure n'avait
- pas provoqué de
- pressions salariales inflationnistes; en fait, depuis 1970 et à
- chaque
- trimestre, le taux d'augmentation des salaires des enseignants
- n'avait pas
- suivi le taux de l'inflation, ce qui avait abouti à une diminution
- cumulative
- du pouvoir d'achat de plus de 7 pour cent.
- 104. En outre, la CMOPE a énuméré comme suit ses
- principaux griefs à l'égard
- du nouveau texte de loi: dans les cas où les négociations
- relatives à la
- période contractuelle 1981-82 se poursuivaient, la loi no 179 a
- mis un terme
- aux négociations, a déclaré que la convention précédente
- restait en vigueur
- jusqu'au premier jour anniversaire tombant après le 1er octobre
- 1982 (période
- dite "de transition") et a imposé une majoration salariale
- maximale de 9 pour
- cent. Les conventions collectives déjà en vigueur et arrivant à
- échéance avant
- le 30 septembre 1983 étaient réputées être prorogées pendant
- une période de 12
- mois ("année de contrôle"), avec une majoration salariale de 5
- pour cent.
- Selon la CMOPE, la loi no 179 interdisait aussi le versement
- d'une prime au
- mérite, d'une augmentation liée au service, de primes
- d'ancienneté ou
- d'allocations récompensant un salarié ayant achevé avec
- succès un programme de
- formation ou un cours d'instruction, que le versement de ces
- sommes fût prévu
- dans les conventions collectives ou non, pour autant qu'un tel
- versement
- puisse avoir pour effet de porter la rémunération totale à un
- niveau supérieur
- à 35.000 dollars par an. Cette prorogation, par voie législative,
- des
- conventions collectives supprimait la possibilité de négocier
- même des
- questions non pécuniaires telles que les conditions de travail
- et, comme les
- grèves étaient interdites pendant la durée d'application d'une
- convention, la
- loi no 179 revenait en fait à un déni du droit de grève; ainsi, les
- salariés
- visés n'avaient plus aucun moyen d'apporter une modification
- quelconque à
- leurs conditions de travail.
- 105. Enfin, la CMOPE a mis en cause la composition et les
- procédures du
- Conseil de restriction de l'inflation qui avait été créé en vertu
- de la loi no
- 179 - et en particulier l'absence de recours contre ses
- décisions -, ainsi que
- les vastes pouvoirs conférés au
- lieutenant-gouverneur-en-conseil. La CMOPE a
- déclaré que, lorsque le droit de grève était supprimé, il était
- impératif de
- le remplacer par un mécanisme adéquat de règlement des
- différends - or la loi
- no 179 laissait les salariés touchés sans mécanisme de ce
- genre.
- 106. Dans sa communication du 28 octobre 1983, le CTC
- s'est référé à une
- décision récente de la Cour suprême de l'Ontario (cas
- Broadway Manor) et à la
- déclaration publique par le gouvernement de son intention de
- prolonger la
- durée de son programme de contrôle par la voie législative
- jusqu'au début de
- novembre 1983. La décision judiciaire du 24 octobre 1983
- déclarait nul et non
- avenu l'article 13 b) de la loi no 179 au motif qu'il portait
- atteinte au
- droit d'organisation - comportant le droit de changer d'agent
- négociateur, le
- droit de négociation collective et le droit de grève - qui était
- garanti par
- la Constitution du Canada. Seul cet article du texte législatif
- était
- considéré comme inconstitutionnel car il portait atteinte à la
- négociation
- collective sur les questions autres que la rémunération, ce qui,
- selon la
- Cour, ne pouvait pas se justifier comme étant raisonnablement
- nécessaire pour
- contrôler les augmentations de salaire. Le 10 janvier 1984, le
- CTC a envoyé
- des documents se rapportant au remplacement de la loi no
- 179 par un nouveau
- projet de loi connu sous le nom de projet no 111 qui, s'il était
- adopté,
- prendrait effet au 1er octobre 1983.
- 107. Le 6 avril 1984, le Syndicat international des salariés
- des services a
- présenté son dossier au sujet de la loi no 179, répétant les
- griefs contre la
- loi mentionnés plus haut (elle supprimait le droit de changer
- d'agent
- négociateur, le droit de négocier collectivement sur les
- questions non
- pécuniaires comme sur les questions pécuniaires et le droit de
- faire grève ou
- de recourir à l'arbitrage d'intérêts pour un secteur public
- largement défini),
- et ajoutant que ce texte législatif n'était pas conforme aux
- dispositions de
- la convention no 154.
- 108. Rappelant l'importance de l'indépendance et de
- l'autonomie des parties
- à la négociation collective et le principe de la négociation
- volontaire des
- conventions collectives, reconnus par le Comité de la liberté
- syndicale comme
- étant des éléments fondamentaux de la convention no 98, le
- SISS a soutenu que
- la loi no 179, en empiétant sur les dispositions en vigueur de
- conventions
- collectives librement négociées, constituait une ingérence non
- nécessaire et
- inacceptable dans les résultats de négociations collectives
- libres et
- enfreignait les dispositions de la convention no 154. Il a cité
- l'exemple des
- employés de l'hôpital Sensenbrenner auxquels une commission
- d'arbitrage
- d'intérêts composée de trois personnes avait accordé, au
- cours de l'été 1982,
- une augmentation salariale globale de 11 pour cent et dont
- certains - étant
- parmi les travailleurs les plus mal payés du secteur hospitalier -
- s'étaient
- vu accorder, par sentence arbitrale également, une
- augmentation supplémentaire
- en octobre 1982. Le Conseil de restriction de l'inflation a
- décidé, le 2
- novembre 1983, que les augmentations de salaire spéciales
- prévues par la
- deuxième sentence étaient nulles et non avenues dans la
- mesure où elles
- dépassaient les 5 pour cent prescrits par la loi et il a ordonné
- que les 72
- employés concernés remboursent à l'hôpital la portion des
- salaires perçus qui
- dépassait l'augmentation prescrite. En janvier 1984, le conseil
- a refusé de
- faire droit à une demande du SISS tendant à ce qu'il
- recommande, au titre de
- l'article 17 5) de la loi, que les employés de l'hôpital
- Sensenbrenner
- bénéficient d'une dérogation à l'application de celle-ci. Selon
- le SISS,
- aucune dérogation n'a été accordée aux travailleurs au titre de
- ces
- dispositions de la loi et aucune recommandation n'a été
- formulée en ce sens.
- 109. Enfin, le SISS a critiqué les déclarations du
- gouvernement selon
- lesquelles les conditions d'emploi autres que la rémunération
- n'étaient pas
- modifiées par la loi no 179, qu'il était possible d'établir les
- éléments non
- pécuniaires d'un régime de rémunération en vertu de l'article
- 15 de ladite
- loi, que l'exercice du droit de choisir un agent négociateur était
- seulement
- ajourné d'un an au plus et, ce qui était le plus important
- d'après
- l'organisation plaignante, que, si le champ d'application de la
- négociation
- collective avait été réduit temporairement, il englobait encore
- les dosages
- entre les salaires et les avantages accessoires et la
- détermination des
- conditions d'emploi à caractère non pécuniaire. Le SISS a
- allégué que cette
- dernière justification était totalement inexistante et dépourvue
- de fondement,
- étant donné surtout que la loi suspendait l'obligation de
- négocier de bonne
- foi comme cela était prévu par la loi sur les relations du travail.
- 110. Répondant aux plaintes dans sa communication du 25
- avril 1983, le
- gouvernement a déclaré qu'en adoptant le nouveau texte de
- loi il avait fait
- face à ses responsabilités et adopté une mesure indispensable
- à laquelle il ne
- s'était résolu qu'après avoir étudié une large gamme de
- formules de
- restriction envisageables pour surmonter la pire récession qui
- ait sévi depuis
- la grande crise des années trente. Selon le gouvernement, en
- 1981 et pendant
- la première moitié de 1982, les majorations salariales, dans le
- secteur
- public, avaient été plus élevées que celles qu'avaient
- octroyées les accords
- conclus dans le secteur privé de l'Ontario, et on était fondé à
- penser que les
- prix du secteur public - prix fixés ou directement autorisés par
- des
- ministères de tutelle ou des organismes publics - jouaient un
- rôle majeur dans
- la perpétuation de l'inflation.
- 111. Le gouvernement a fait observer que le programme de
- limitation de la
- rémunération prévoyait une restriction temporaire (dans la
- plupart des cas
- d'un an seulement) des majorations salariales, fixées à 5 ou à 9
- pour cent, et
- permettait la modification, par accord mutuel, des conditions
- de travail
- autres que la rémunération (art. 15 de la loi). Il a déclaré que
- l'article 12
- tenait expressément compte des travailleurs ayant un faible
- revenu et a
- souligné que le lieutenant-gouverneur-en-conseil pouvait, en
- vertu de
- l'article 25, accorder des dérogations à l'application de la loi à
- des régimes
- de rémunération. Selon le gouvernement, l'article 14 permettait
- au Conseil de
- restriction de l'inflation d'autoriser des dosages entre salaires et
- avantages
- accessoires et une liste d'exemples de compensations de ce
- genre était donnée.
- 112. En ce qui concerne l'allégation d'infraction à la
- convention no 87, le
- gouvernement a souligné qu'en fait la loi mise en cause
- favorisait, d'une
- certaine manière, les organisations de travailleurs, puisque les
- travailleurs
- protégés par une convention collective avaient
- automatiquement droit à une
- majoration salariale de 5 pour cent, alors que d'autres salariés
- pouvaient
- recevoir moins (art. 12 1) d)). Pour les travailleurs déjà
- représentés qui
- désiraient changer de représentants accrédités, le
- gouvernement a reconnu que
- la prorogation des conventions collectives en vertu de la loi
- retarderait ce
- changement d'un an au maximum mais a fait observer que,
- dans le cadre du
- système normal de négociation collective, une telle
- modification était de
- toute façon subordonnée au respect d'un délai - fixé, par
- exemple, de 90 à 12
- jours par la loi sur les relations du travail. En ce qui concerne
- les
- restrictions qui auraient été apportées à la liberté d'action des
- syndicats,
- le gouvernement a déclaré que cette allégation était fausse:
- s'il était vrai
- que la portée des négociations avait été temporairement
- réduite, le système de
- négociation collective restait en place et les syndicats avaient
- toute
- latitude pour organiser leurs activités, seuls le droit de grève et
- celui de
- recourir à un arbitrage ayant force obligatoire avaient été
- provisoirement
- suspendus. Un exemple de cette liberté d'action était celui de
- groupes qui
- avaient été accrédités en qualité d'agents négociateurs avant
- le 21 septembre
- 1982 mais qui n'avaient pas encore conclu leur première
- convention collective.
- En vertu du règlement no 57/83 pris en application de la loi,
- ces groupes
- pouvaient recourir à tous les moyens prévus dans la procédure
- normale de
- négociation collective - y compris à la grève - pour aboutir à
- leur première
- convention collective, à condition toutefois que celle-ci prévoit
- une
- majoration salariale de 5 pour cent pour une période de 12
- mois commençant
- entre le 1er octobre 1982 et le 1er octobre 1983 et que les
- dispositions de
- l'ensemble de la convention soient comparables, pour
- l'essentiel, à celles qui
- s'appliquaient aux salariés relevant de marchés de l'emploi
- connexes.
- 113. En ce qui concerne l'infraction alléguée aux
- conventions nos 98 et
- 151, le gouvernement a déclaré que la loi n'interrompait pas le
- fonctionnement
- du mécanisme de négociation volontaire mais se bornait à
- prolonger les
- conventions collectives, avec des dispositions précises
- concernant les
- majorations salariales, pour la période fixée. Le gouvernement
- a souligné que
- les conditions non pécuniaires pouvaient être modifiées par
- accord mutuel et
- que les parties pouvaient convenir de recourir à des
- médiateurs et à des
- arbitres à cet effet. Selon le gouvernement, il y avait eu un
- assez grand
- nombre de cas où la négociation collective avait abouti à
- l'octroi de la
- totalité des 9 pour cent pour la période de 12 mois précédant
- l'année de
- contrôle en application de l'article 10 de la loi. En ce qui
- concerne les
- restrictions apportées aux procédures de règlement des
- différends, le
- gouvernement a déclaré que l'article 14 de la loi permettait au
- Conseil de
- restriction de l'inflation d'arbitrer, en rendant des décisions qui
- étaient
- obligatoires pour les parties et aussi en indiquant ses motifs,
- bien que la
- loi ne lui fît pas obligation de le faire. De plus, le gouvernement
- a fait
- observer qu'en vertu des articles 17 et 25 de la loi, des
- groupes de salariés
- pouvaient être exclus de l'application de la partie II de la loi; il
- a reconnu
- que ces dispositions n'avaient pas encore été utilisées.
- 114. Dans sa communication du 7 juin 1984, le
- gouvernement s'est référé au
- recours présenté contre la décision du tribunal des appels de
- la Cour suprême
- de l'Ontario, en date du 24 octobre 1983, aux termes de
- laquelle l'article 13
- b) de la loi sur la restriction de l'inflation était nul et non avenu.
- Le
- gouvernement avait joint à sa communication des extraits du
- compte rendu
- officiel des débats parlementaires où figuraient des
- déclarations du Procureur
- général de l'Ontario qui correspondaient à la préoccupation du
- gouvernement au
- sujet des "implications de la très large interprétation donnée
- par le tribunal
- à la liberté d'organisation".
- 115. Dans sa communication du 16 octobre 1984, le
- gouvernement s'est référé
- à nouveau à la crise économique de 1981 qui avait conduit
- toutes les provinces
- canadiennes, à l'exception du Manitoba, à adopter des
- programmes de
- restriction dans le secteur public. Selon le gouvernement, 71
- pour cent de
- toutes les conventions et 69 pour cent de tous les salariés
- relevant de la loi
- sur la restriction de l'inflation n'avaient été soumis à des
- contrôles que
- pendant 12 mois. Le gouvernement a également présenté des
- statistiques
- indiquant qu'après l'adoption de la loi il y avait eu une
- diminution
- spectaculaire du taux d'inflation.
- 116. En ce qui concerne la négociation des questions non
- pécuniaires en
- vertu de l'article 15 de la loi, le gouvernement a souligné que
- le ministère
- du Travail de l'Ontario avait continué à offrir et à fournir des
- services de
- médiation aux parties couvertes par la loi qui décidaient, d'un
- commun accord,
- de négocier les questions n'ayant pas trait à la rémunération,
- et que des
- négociations avaient effectivement eu lieu sur des points tels
- que les
- procédures de présentation des réclamations, le nombre
- d'élèves par enseignant
- et la sécurité de l'emploi. Le Conseil de restriction de l'inflation
- avait
- rendu 655 décisions et ordonnances entre le 1er décembre
- 1982 et décembre
- 1983, et un certain nombre d'entre elles découlaient de
- questions qui
- s'étaient posées au cours de la négociation. Le gouvernement
- a affirmé que
- cette médiation était conforme aux exigences de la convention
- no 151.
- 117. Le gouvernement a également souligné que le pouvoir
- qu'avait le
- lieutenant-gouverneur, en vertu de la loi, de mettre fin à
- l'application des
- contrôles pour n'importe quel régime de rémunération avait été
- exercé en ce
- qui concerne certains plans de retraite du personnel municipal
- (règlement no
- 92/83) et pour exclure certains handicapés, des personnes
- non couvertes par la
- législation sur le salaire minimum et des personnes qui
- recevaient moins de 50
- pour cent de leurs indemnités d'un employeur gouvernemental
- (règlements nos
- 819/82 et 844/82). En outre, la loi disposait que le Conseil de
- restriction de
- l'inflation devait enquêter sur les augmentations de prix dans
- les services
- gouvernementaux appelés "services administrés" que lui
- désignait le ministre.
- Par exemple, en 1982, le conseil avait examiné une
- augmentation de prix pour
- Northern and Central Gas qui avait été approuvée par la
- Commission de
- l'énergie de l'Ontario; le conseil a conclu que l'augmentation
- de prix n'était
- pas conforme aux critères du ministre, et le prix proposé a été
- ultérieurement
- diminué afin de satisfaire à ces critères. L'article 29 de la loi
- autorisait
- également le lieutenant-gouverneur à refuser, modifier ou
- retarder une
- augmentation de prix, et la Commission ministérielle des prix
- administrés a
- maintenu une augmentation de 5 pour cent seulement dans
- plus de la moitié des
- cas qui lui avaient été soumis, par exemple pour les frais
- d'assistance
- juridique, les prix de la bière, les tarifs des autocars scolaires,
- les droits
- de scolarité pour les étudiants canadiens, les billets d'entrée
- dans les parcs
- provinciaux, les permis de pêche pour les résidents et les taxes
- téléphoniques
- de la Northern Telephone Ltd. C'est ainsi que 92 pour cent
- des prix
- administrés n'avaient pas dépassé l'augmentation de 5 pour
- cent qui avait été
- fixée comme objectif.
- 118. Le gouvernement a expliqué que le texte législatif qui
- remplaçait la
- loi no 179 à compter d'octobre 1983 - la loi portant examen
- des prix et des
- rémunérations dans le secteur public (connue sous le nom de
- loi no 111) -
- assurait la négociation collective complète des questions tant
- salariales que
- non salariales et autorisait les procédures normales de grève
- ou d'arbitrage
- lorsque les parties ne parvenaient pas à conclure une
- convention collective.
- 119. Enfin, le gouvernement s'est référé aux allégations du
- SISS et a
- déclaré qu'à aucun moment pendant l'application de la loi sur
- la restriction
- de l'inflation le droit des salariés de constituer des
- organisations de leur
- choix, de s'y affilier et de participer pleinement à leurs activités
- n'avait
- été supprimé. Seules des situations telles que celles qui
- s'étaient produites
- dans le cas Broadway Manor porté devant la Cour suprême
- avaient été touchées
- par la loi; dans ce cas, seule l'accréditation avait été retardée
- et, selon le
- droit de l'Ontario, l'accréditation n'était pas une condition
- préalable pour
- la constitution licite d'un "nouveau" syndicat ou la participation
- licite à ce
- syndicat. Le gouvernement a déclaré que son recours devant
- la Cour d'appel de
- l'Ontario contre la décision de première instance dans le cas
- de Broadway
- Manor avait été examiné le 4 juin 1984, mais que la décision
- n'avait pas
- encore été rendue. Quant à la situation dans l'hôpital
- Sensenbrenner, le
- gouvernement a nié que le Conseil de restriction de l'inflation
- ait ordonné le
- remboursement des paiements qui avaient dépassé la limite
- prescrite; le
- conseil avait simplement renvoyé la question aux parties.
- C. Informations reçues pendant la mission
- 120. A Toronto, j'ai eu l'occasion de rencontrer des
- représentants des
- organisations suivantes: le Syndicat international des salariés
- des services
- (local 204), le Syndicat des employés de la fonction publique
- de l'Ontario, le
- Syndicat canadien des employés publics et la Fédération des
- enseignants de
- l'Ontario. Ces entrevues ont été suivies d'une réunion avec un
- certain nombre
- de hauts fonctionnaires gouvernementaux représentant la
- province de l'Ontario.
- Au cours de mes réunions avec les organisations syndicales,
- j'ai reçu des
- informations sous la forme de présentations orales et de
- déclarations par
- écrit. Le gouvernement provincial m'a fait également remettre
- des déclarations
- par écrit et des documents.
- 121. Lors de mes premières rencontres à Ottawa avec le
- Congrès du travail du
- Canada, les problèmes dont il est question dans la plainte
- résultant de
- l'entrée en vigueur, le 21 septembre 1982, de la loi sur la
- restriction de
- l'inflation (loi no 179) ont été mentionnés.
- 122. Etant donné que les arguments avancés par tous les
- syndicats étaient
- pour l'essentiel virtuellement identiques en ce qui concerne ce
- qu'ils
- jugeaient être une violation de leurs droits syndicaux entraînée
- par la
- promulgation de la loi no 179 et, dans une certaine mesure,
- par la
- promulgation ultérieure, le 10 octobre 1983, de la loi portant
- examen des prix
- et des rémunérations dans le secteur public (loi no 111), il
- suffira ici de
- résumer ces arguments et les informations fournies à l'appui.
- 123. Je dois indiquer ici que j'ai fait remarquer à toutes les
- parties
- qu'aucune allégation officielle concernant la loi no 111 n'avait
- été présentée
- au BIT et qu'à strictement parler cette loi se situait en dehors
- de mon
- mandat. Toutefois, comme la loi no 111 est d'un intérêt direct
- pour les
- problèmes exposés dans les plaintes officielles et qu'elle
- représente la
- dernière action du gouvernement en matière de négociation
- collective dans le
- secteur public, j'ai estimé qu'il était approprié de rapporter les
- vues des
- syndicats aussi bien que celles du gouvernement sur ce texte
- législatif
- ultérieur et sur l'effet qu'il a exercé sur la négociation dans le
- secteur
- public. En fait, à l'époque de la mission, la loi no 111, qui avait
- elle-même
- un caractère temporaire, devait expirer.
- 124. Le grief principal de tous les syndicats était que la
- promulgation de
- la loi no 179 en septembre 1982 n'avait pas seulement mis fin
- aux négociations
- collectives, et même aux activités syndicales, pendant près de
- deux ans, mais
- avait également empêché l'entrée en vigueur de conventions
- collectives
- librement conclues avant cette promulgation. De façon
- générale, les
- conventions venant à expiration le 10 octobre 1981 ou après
- cette date étaient
- prolongées de douze mois, à condition que l'augmentation des
- rémunérations ne
- soit pas supérieure à 9 pour cent. Ces conventions à leur
- expiration et toute
- autre convention étaient censées comprendre une disposition
- augmentant les
- taux de rémunération de 5 pour cent pour les douze mois
- suivants. Les
- syndicats ont soutenu qu'il était douteux que la situation
- économique du pays,
- et plus précisément de la province, justifiât ces mesures et
- que, même s'il y
- avait des difficultés économiques, rien ne justifiait ce qui
- équivalait à une
- interdiction virtuelle des activités syndicales pendant tout le
- temps où la
- loi devait demeurer en vigueur. De fait, étant donné que les
- négociations
- collectives étaient exclues, même sur des questions non
- pécuniaires, il ne
- pouvait pas y avoir de recours à l'arbitrage qui était la
- contrepartie admise
- de la suppression du droit de grève dans la fonction publique.
- 125. Le Syndicat international des salariés des services
- (SISS), dont la
- majorité des 33.000 membres était occupée dans le secteur
- des hôpitaux et des
- maisons de repos, a déclaré qu'il avait toujours admis que le
- droit de grève
- soit remplacé par le droit de recourir à l'arbitrage indépendant
- et ayant
- force obligatoire d'une tierce partie. La loi no 179 et,
- ultérieurement, la
- loi no 111 ont démontré que le gouvernement n'était en faveur
- ni du droit de
- grève ni de l'arbitrage véritablement indépendant et impartial.
- Des arguments
- semblables ont été avancés par le Syndicat des employés de
- la fonction
- publique de l'Ontario (OPSEU), représentant 80.000 membres,
- qui a ajouté que
- la limite de 5 pour cent imposée aux augmentations de salaire
- avait élargi le
- fossé entre les bas salaires et les salaires élevés. Environ
- 15.000 de leurs
- membres occupés à temps partiel, pour lesquels de longues
- négociations avaient
- conduit à une convention d'une durée de deux ans prévoyant
- une augmentation de
- 9 pour cent et de 11 pour cent, s'étaient vu refuser
- l'augmentation de 11 pour
- cent quand la loi no 179 avait été promulguée. D'autres
- catégories de
- travailleurs avaient été touchées d'une manière analogue.
- L'OPSEU a également
- présenté des témoins qui ont décrit les conséquences de la loi
- no 179 pour les
- travailleurs des laboratoires et le personnel de soutien des
- universités
- communales (environ 5.000) auxquels avait été garantie,
- pendant les
- négociations de 1981, une augmentation de 20 pour cent de
- leur salaire au
- cours des trois années suivantes. Toutes ces catégories
- avaient pâti du
- contrôle des salaires imposé par la loi no 179.
- 126. Le CUPE a souligné que la loi no 179 n'imposait pas
- seulement des
- restrictions aux rémunérations mais supprimait aussi le droit de
- négocier
- effectivement avec les employeurs au sujet des clauses non
- pécuniaires d'une
- convention collective. Les représentants de ce syndicat ont
- ajouté que cela
- avait été critiqué par la Cour d'appel de l'Ontario (cas
- Broadway Manor) dans
- une décision, rendue le 22 octobre 1984, qui avait d'ailleurs
- peu d'intérêt
- pratique puisque la loi no 179 avait alors été remplacée par
- une autre loi
- (loi no 111). Le CUPE a également souligné que, pendant que
- la loi no 179
- était en vigueur, les travailleurs régis par la loi sur les relations
- professionnelles avaient été effectivement privés du droit de
- grève. En outre,
- la possibilité de recourir à l'arbitrage avait été effectivement
- supprimée
- pour les travailleurs régis par les dispositions ou bien de la loi
- sur
- l'arbitrage des conflits du travail dans les hôpitaux ou bien de
- la loi sur la
- négociation collective des salariés de la Couronne.
- 127. Le CUPE a également expliqué que, par suite de la loi
- no 179, il avait
- affirmé à l'origine que le droit d'organisation avait été violé,
- puisque les
- travailleurs ne pouvaient pas changer d'agent négociateur
- pendant la période
- de contrôle. C'était là une autre question qui a été tranchée
- par la Cour
- d'appel de l'Ontario dans le cas Broadway Manor. La cour a
- statué que la loi
- no 179 avait pour effet non pas de prolonger les conventions
- collectives
- mêmes, mais seulement de prolonger les stipulations de ces
- conventions. La loi
- no 179 ne restreignait donc pas le droit de changer d'agent
- négociateur.
- Toutefois, comme indiqué ci-dessus, la décision dans le cas
- Broadway Manor n'a
- été rendue qu'à l'expiration de la loi no 179.
- 128. Le CUPE a donné un certain nombre d'exemples d'une
- centaine de
- conventions conclues avant la promulgation de la loi no 179
- qui avaient été
- "amoindries" par la loi et a expliqué que bon nombre de
- travailleurs recevant
- un bas salaire avaient été touchés par cette mesure. Ce
- syndicat a également
- indiqué que, dans le secteur hospitalier, il y avait toujours eu
- un étroit
- rapport salarial entre les travailleurs représentés par le CUPE et
- ceux que
- représentait le SISS. Toutefois, le personnel de l'hôpital affilié
- au SISS,
- qui effectue exactement les mêmes tâches que le personnel
- affilié au CUPE, a
- obtenu une augmentation de 11 pour cent dans un contrat
- d'une durée d'une
- année, soumis à l'arbitrage juste avant l'entrée en vigueur de
- la loi no 179,
- alors que le personnel affilié au CUPE n'a pas reçu plus de 9
- pour cent la
- première année de sa convention, conformément aux
- dispositions de la loi no
- 179. Ainsi donc, le personnel affilié au CUPE a été traité
- défavorablement par
- rapport au personnel affilié au SISS, tout simplement parce
- qu'il se trouvait
- que les conventions collectives prenaient fin à des dates
- différentes.
- 129. La Fédération des enseignants de l'Ontario, qui
- représente plus de 104.
- 000 enseignants des écoles primaires et secondaires
- publiques de l'Ontario,
- s'est également plainte que la loi no 179 et, ultérieurement, la
- loi no 111
- avaient eu pour effet de l'emporter sur le processus de
- négociation institué
- en vertu de la loi de 1975 concernant les négociations
- collectives entre
- conseils scolaires et enseignants, modifiée en 1983. A son
- avis, il n'existait
- pas dans l'Ontario d'état d'urgence économique justifiant la
- promulgation de
- la loi no 179. En outre, le droit de grève dont disposent les
- enseignants de
- l'Ontario a été suspendu pendant la période de contrôle des
- salaires imposée
- par la loi. La fédération a fourni des informations détaillées
- indiquant les
- effets de la loi no 179 sur les salaires des enseignants de la
- province.
- 130. La loi de 1983 portant examen des prix et des
- rémunérations dans le
- secteur public (connue sous le nom de loi no 111), qui a
- remplacé la loi no
- 179, n'a pas, au dire des syndicats, rétabli la libre négociation
- collective
- mais a imposé, de manière plus subtile, une nouvelle période
- de restriction
- aux négociations collectives. En fait, la loi no 111 disposait
- que, pendant
- une "période de restriction" de douze mois, le Conseil de
- restriction de
- l'inflation avait le pouvoir de fixer et de contrôler toutes les
- modifications
- de la rémunération dans le même secteur public, au sens
- large, que la loi no
- 179, afin de déterminer si les modifications de la rémunération
- étaient
- conformes à la politique fiscale de la province telle que le
- trésorier de
- l'Ontario l'avait définie. Le trésorier avait annoncé que les
- augmentations de
- la rémunération moyenne devraient être de 5 pour cent au
- maximum pendant cette
- période de restriction. En outre, le gouvernement avait
- annoncé que les
- subventions gouvernementales et les transferts aux institutions
- financées par
- les fonds publics que couvrait la loi no 111, ainsi que les
- indemnités versées
- à ses propres fonctionnaires, permettraient d'augmenter la
- rémunération
- moyenne de 5 pour cent au maximum. Il était possible
- d'accorder des
- augmentations de la rémunération supérieures à 5 pour cent,
- mais le Conseil de
- restriction de l'inflation, le gouvernement et les personnalités
- dirigeantes
- des municipalités n'avaient pas caché que toute tentative de
- dépasser les 5
- pour cent aurait pour résultat de diminuer les paiements de la
- province.
- 131. En présentant ces commentaires au sujet de la loi no
- 111, le CUPE comme
- le SISS ont également rappelé que l'article 10 de la loi
- disposait que les
- arbitres devaient tenir compte de "la capacité de paiement de
- l'employeur ...,
- compte tenu de la politique fiscale existante de la province".
- Selon les
- syndicats, le gouvernement, en se servant de cette
- disposition, pouvait
- déterminer unilatéralement le financement des institutions du
- secteur public
- et le fait que la capacité de paiement de l'employeur reposant
- sur lui
- signifiait dans les faits que le gouvernement pouvait aussi fixer
- unilatéralement les taux de salaire. Cela sapait également toute
- prétention de
- l'indépendance et de l'impartialité du processus d'arbitrage. La
- Fédération
- des enseignants du Canada a présenté des commentaires
- analogues au sujet de la
- loi no 111.
- 132. En outre, tous les syndicats ont mentionné le fait qu'un
- certain nombre
- d'arbitres d'intérêts de renom avaient rejeté le critère de la
- "capacité de
- paiement" pour la détermination des salaires du secteur public.
- On a présenté
- des déclarations d'arbitres de premier plan où ceux-ci
- mentionnaient le
- "climat d'intimidation" que créait la loi et des déclarations
- publiques du
- trésorier aux termes desquelles, si la politique économique du
- gouvernement
- n'était pas suivie, des textes législatifs restrictifs de longue
- durée
- seraient présentés.
- 133. Avec les représentants du gouvernement de la province
- de l'Ontario,
- j'ai soulevé tous les problèmes sur lesquels mon attention avait
- été attirée
- pendant mes réunions avec les divers syndicats du secteur
- public. Les
- représentants du gouvernement ont affirmé que des raisons
- impérieuses
- d'intérêt économique, aux plans national et provincial, avaient
- conduit le
- gouvernement à conclure qu'il devait exercer un contrôle sur
- les salaires dans
- le secteur public. Ils ont expliqué qu'en 1982 l'Ontario
- connaissait la
- récession, une inflation à deux chiffres (de 11 à 12 pour cent),
- une perte de
- compétitivité au plan international et des licenciements dans le
- secteur privé
- (environ 164.000 licenciements dans la seule province de
- l'Ontario). Les
- restrictions imposées aux salaires du secteur public par la loi
- no 179
- constituaient une mesure exceptionnelle. La loi ne visait pas à
- restructurer
- la législation du travail dans la province et ne devait pas
- davantage être
- permanente. La loi no 179 imposait un contrôle sur les salaires
- pendant douze
- mois seulement pour la majorité des salariés, et 31 pour cent
- seulement des
- salariés touchés étaient soumis à la période de transition qui
- pouvait
- prolonger le contrôle des salaires pendant deux ans. Aucun
- salarié n'était
- maintenant affecté par la loi no 179.
- 134. Le texte législatif ultérieur (la loi de 1983 portant examen
- des prix
- et des rémunérations dans le secteur public - loi no 111) fixait
- un critère
- applicable pendant un an aux augmentations de salaire du
- secteur public. Dans
- le cas des salariés du secteur public dont les conventions
- étaient déterminées
- par un arbitrage d'intérêts, le nouveau texte législatif
- demandait aux
- arbitres d'intérêts d'évaluer le coût de toute modification
- apportée aux
- clauses des conventions collectives et de prendre en
- considération la capacité
- de paiement de l'employeur. Dans le cas des salariés du
- secteur public qui
- négociaient des conventions (y compris ceux qui avaient le
- droit de se mettre
- en grève), la loi demandait que soient fournies des informations
- sur tout
- changement apporté au régime de rémunération. Si un arbitre
- décidait ou si les
- parties convenaient d'augmentations de salaire supérieures à
- 5 pour cent, la
- loi ne contenait pas de mécanisme permettant d'annuler les
- augmentations de
- salaire décidées ou négociées. Les représentants du
- gouvernement ont ajouté
- que, depuis que la loi no 111 était caduque, aucune loi sur la
- restriction des
- salaires n'était en vigueur actuellement dans l'Ontario.
- 135. Les représentants du gouvernement ont expliqué en
- outre qu'au moment
- de l'examen de la situation économique en 1982 plusieurs
- actions possibles
- avaient été envisagées, y compris un programme national de
- contrôle des
- salaires et des prix. Comme il n'avait pas été possible d'arriver
- sur ce point
- à un consensus avec les autres provinces et comme des
- difficultés se posaient
- en raison de la nature même de la province de l'Ontario en ce
- qui concerne un
- programme éventuel applicable aux travailleurs du secteur
- public et du secteur
- privé, il avait été décidé d'adopter un programme de contrôle
- des prix et des
- salaires dans le seul secteur public.
- 136. Le gouvernement a souligné qu'on avait prévu des
- sauvegardes pour
- protéger le niveau de vie des travailleurs. Outre le contrôle des
- prix, le
- taux d'inflation avait été abaissé (à moins de 11 pour cent
- pendant le
- troisième trimestre de 1982). Depuis l'introduction de la loi no
- 179,
- l'inflation avait continué à décroître, et elle n'était que de 3,6
- pour cent
- au premier trimestre de 1985. La sécurité de l'emploi et le
- volume de l'emploi
- ont également été maintenus dans le secteur public à une
- époque où le secteur
- privé connaissait de nombreux licenciements. Les salariés
- couverts par la loi
- bénéficiaient aussi de la garantie d'augmentations équitables
- et raisonnables.
- A ce sujet, le gouvernement a fourni des informations
- statistiques indiquant
- que les augmentations accordées en vertu de la loi étaient
- comparables aux
- augmentations salariales du secteur privé et leur étaient en fait
- supérieures
- depuis le quatrième trimestre de 1983. La loi no 179 contenait
- également des
- clauses d'augmentations minimales en faveur des salariés à
- faible revenu et
- des ajustements de salaire. Elle autorisait également les
- syndicats
- nouvellement accrédités, c'est-à-dire ceux qui l'avaient été
- avant la
- promulgation de la loi no 179, à négocier librement des
- augmentations de
- rémunération pour la période de leurs premières conventions
- qui menait à la
- période de contrôle. La loi maintenait aussi la possibilité de
- modifier, par
- accord mutuel, les questions non pécuniaires d'une
- convention collective,
- comme l'a démontré par la suite la décision en ce sens de la
- Cour d'appel de
- l'Ontario dans le cas Broadway Manor.
- 137. Se référant à la plainte du SISS selon laquelle la loi no
- 179 avait
- suspendu le droit de changer d'agent négociateur, le droit de
- négocier
- collectivement au sujet des questions non pécuniaires et le
- droit de grève ou
- de recourir à l'arbitrage d'intérêts, les représentants du
- gouvernement ont
- mentionné la décision de la cour d'appel, dans le cas
- Broadway Manor, qui
- établissait que les allégations du syndicat étaient erronées. La
- cour avait
- toutefois exprimé des doutes sur la question de savoir si les
- salariés
- pouvaient déclencher une grève ou recourir à l'arbitrage sans
- rendre
- effectivement de décision sur ce point.
- 138. Le gouvernement a ajouté que de très nombreuses
- consultations avaient
- eu lieu avant la promulgation de la loi no 179 et qu'il s'était
- dégagé un
- large consensus politique en faveur de son adoption. Le
- gouvernement avait été
- satisfait des résultats de la loi no 179 et l'avait remplacée par la
- loi no
- 111 qui n'était pas une mesure exceptionnelle prise en période
- de crise. La
- loi no 111 était conçue comme un pas de plus vers une
- situation normale et le
- rétablissement des négociations collectives dans le secteur
- public. Si le
- Conseil de restriction de l'inflation était maintenu, c'était
- uniquement pour
- qu'il puisse participer au règlement des litiges en cours.
- 139. En ce qui concerne l'obligation pour les arbitres
- d'intérêts, aux
- termes de la loi no 111, de tenir compte de la politique fiscale
- de la
- province et de la capacité de paiement de l'employeur, les
- représentants du
- gouvernement ont souligné que les sommes transférées aux
- institutions
- publiques avaient toujours été fixées par le gouvernement. Aux
- termes de la
- loi no 111, les montants étaient clairement indiqués. Dans les
- cas où la norme
- des 5 pour cent serait dépassée par les arbitres ou par les
- besoins d'une
- institution publique, on pourrait trouver les moyens de fournir
- des fonds
- supplémentaires.
- 140. En ce qui concerne la préoccupation des syndicats,
- pour lesquels le
- gouvernement semblait s'être constamment efforcé de trouver
- des moyens de
- réduire la flexibilité et d'exercer des pressions sur les arbitres,
- ce qui
- érodait le système d'arbitrage et diminuait la confiance en ce
- système, les
- représentants du gouvernement ont souligné que la loi no 111
- demandait
- simplement aux arbitres de garder présents à l'esprit certains
- critères.
- Nombre d'entre eux ne se sentaient pas liés par ces critères et
- il avait été
- rendu, en 1984-85, quelque 200 sentences qui, dans leur
- majorité, dépassaient
- les règlements négociés. En vertu de la loi sur les relations
- professionnelles, il avait été constitué une liste d'arbitres pour
- régler les
- litiges nés de doléances, et c'était généralement sur cette liste
- que les
- arbitres étaient choisis pour régler les litiges nés de questions
- d'intérêts.
- Le gouvernement a admis que les informations dont il disposait
- sur les accords
- salariaux dans certains secteurs (par exemple, dans les
- municipalités) étaient
- insuffisantes, mais il a indiqué qu'il s'efforçait de résoudre ce
- problème.
- 141. Au sujet des "annulations", le gouvernement a admis
- que cette mesure
- avait été jugée très dure, mais il a déclaré à nouveau qu'elles
- avaient été
- dictées par une nécessité économique. Le gouvernement a
- également souligné
- qu'à sa connaissance, hormis un ou deux cas, l'absence de
- négociation sur les
- questions non pécuniaires n'avait pas été un problème
- important.
- 142. Le gouvernement a également admis que la loi no 179
- pourrait exercer
- des effets à long terme, par exemple sur les programmes
- d'évaluation des
- emplois et de classification des tâches, mais le rétablissement
- des
- négociations collectives devait résoudre toute anomalie
- restante. Il était
- également certain que, dans certains cas, les employeurs
- avaient tiré avantage
- de la loi en refusant de payer les augmentations de salaire
- négociées. C'était
- là, toutefois, une question qui relevait des tribunaux et sur
- laquelle le
- gouvernement avait peu d'emprise.
- 143. Se référant à nouveau à la décision rendue dans le cas
- Broadway Manor
- et au problème du changement d'agent négociateur pendant
- la période de
- contrôle d'une année instituée par la loi no 179, le
- gouvernement a expliqué
- qu'il avait examiné cette question avant l'adoption de la loi.
- Etant donné
- qu'il était inapproprié de changer d'agent négociateur pendant
- cette période,
- puisque le syndicat entrant ne serait pas en mesure de
- négocier, le
- gouvernement avait examiné cette question avec les
- syndicats, qui avaient
- réagi au problème de façon mitigée. De toute manière, selon le
- gouvernement,
- étant donné que les syndicats de la fonction publique étaient
- solidement
- établis, il était peu vraisemblable qu'un concurrent se présente
- pendant la
- période de contrôle. Le gouvernement a rappelé que les
- syndicats nouvellement
- accrédités n'étaient pas touchés par ce qui était, comme
- l'avait prouvé
- ultérieurement la décision rendue dans le cas Broadway
- Manor, un faux
- problème.
- D. Remarques finales
- 144. Un trait évident de la présente plainte tient à ce qu'elle
- concerne
- les dispositions et les effets de la loi de 1982 sur la restriction
- de
- l'inflation (loi no 179), qui n'est plus en vigueur. En fait, cette loi
- a été
- suivie de la loi no 111 qui, elle-même, devait expirer à la fin de
- septembre
- 1985. A l'heure actuelle, aucun autre texte de loi n'a été
- proposé dans ce
- domaine. Il importe néanmoins d'évaluer la loi no 179 au
- regard des normes de
- l'OIT. Bien que ce texte ne soit plus en vigueur, exception faite
- de certaines
- questions résiduelles auxquelles il s'applique encore pour des
- raisons
- techniques, les opinions divergent toujours fortement dans la
- province quant à
- sa nature et à ses effets. En outre, il a été suggéré que
- certaines pratiques
- introduites par cette loi se perpétueront du fait d'une action
- administrative
- informelle. Ce point doit lui aussi être examiné.
- 145. La loi no 179 a été promulguée pour stopper l'inflation.
- Elle a eu
- pour effet d'imposer un contrôle des salaires assez strict dans
- le secteur
- public. Ce contrôle se fondait sur une "année de contrôle" et
- une majoration
- salariale limitée à 5 pour cent et s'assortissait de contrôles
- moins sévères
- admettant un plafond de 9 pour cent pour les majorations
- salariales.
- L'ensemble du contrôle pouvait toucher une unité de
- négociation pendant une
- période de deux ans. Il a été suggéré que le gouvernement
- n'avait pas réussi à
- établir qu'il y avait effectivement crise économique. La
- compréhension du
- problème et les recherches à son sujet avaient été
- insuffisantes. Il a été
- également dit que les augmentations salariales auraient
- diminué année après
- année sans recours à la législation. Ces deux convictions sont
- évidemment des
- questions d'opinion. Les données fondamentales ne sont pas
- sérieusement
- contestées. Il y a une différence d'interprétation manifeste
- entre les
- syndicats qui ont présenté ces arguments et le gouvernement.
- Il a été suggéré
- que de telles divergences d'opinion devraient être résolues par
- un mécanisme
- indépendant tel que les tribunaux. Il est difficile de voir la
- nécessité en
- principe d'une telle entrave à l'exercice de la volonté politique.
- Les
- occasions ne manquent pas de mettre les questions dont il
- s'agit à l'épreuve
- publique du débat politique.
- 146. Etant donné que le secteur public était choisi tout
- spécialement pour
- l'introduction d'un contrôle spécial dans l'hypothèse que les
- salaires du
- secteur privé suivraient la tendance ainsi établie, il est
- essentiel de
- réserver tout le temps voulu à la consultation. Si on omettait de
- le faire,
- cela pourrait indiquer que l'action était en fait précipitée et
- menée de parti
- pris. Il n'y a pas eu de plainte alléguant l'absence de
- consultation. Ce qui
- est dit, c'est que les opinions des syndicats n'ont pas eu d'effet
- sensible
- sur l'attitude et les actions du gouvernement. C'est là tout autre
- chose.
- 147. Jusqu'à maintenant, les présentes remarques portent
- sur les aspects
- politiques de la préoccupation qui a été exprimée. Toutefois,
- les actions
- soulèvent certainement des considérations pratiques et
- juridiques. Ce qui est
- le plus évident c'est l'impact que la loi a exercé sur les
- conventions
- collectives existantes. Celles-ci ont subi, dans bien des cas,
- des
- modifications, du fait en particulier que la loi n'autorisait qu'une
- augmentation salariale inférieure. Un juriste dirait qu'il s'agit
- d'un retrait
- de droits.
- 148. Il est difficile d'éviter ce résultat lorsqu'on impose un
- régime de
- restriction destiné à avoir des effets rapides. Le gouvernement
- était
- conscient du problème et avait décidé d'appliquer ce qu'il
- considérait comme
- une "justice rudimentaire". En réalité, on s'était efforcé
- d'atténuer
- certaines des conséquences. le plus important était d'accorder
- une certaine
- protection à la première convention, c'est-à-dire la première
- convention
- conclue après qu'un syndicat avait obtenu les droits de
- négociation. Ces
- conventions comportent souvent de notables améliorations
- des conditions de
- travail. Cela a été reconnu par la loi et l'impact de la norme des
- 5 pour cent
- a été retardé pour que la première convention puisse exercer
- ses effets.
- 149. Malgré cette préoccupation, la loi semble avoir eu sur la
- libre
- négociation collective un impact plus considérable que ce qui
- était voulu ou
- prévu. Trois aspects de cet impact semblent être tout
- particulièrement
- importants: l'"effet de refroidissement" sur les négociations
- collectives en
- général, le préjudice causé aux politiques que poursuivaient
- les syndicats
- contrat après contrat et le mécanisme de l'accréditation
- pendant la période
- dite "ouverte".
- 150. Bien que la loi n'ait été applicable qu'aux questions
- pécuniaires, elle
- semble avoir exercé un effet sur les questions non couvertes
- par la loi que
- les parties étaient libres de négocier. Cela était en partie
- d'autant plus
- vraisemblable qu'il y avait eu anticipation de la conversion des
- négociations
- aux questions non pécuniaires. On avait pris quelques
- mesures pour empêcher
- que cela ne soit utilisé pour saper le contrôle financier projeté.
- Il n'est
- guère possible de douter que certaines questions en ont
- souffert, les
- questions d'hygiène et de sécurité se présentant aussitôt à
- l'esprit. Le
- problème peut maintenant être considéré à la lumière de
- l'expérience; il sera
- possible de s'y attaquer si la nécessité s'en présente à l'avenir.
- Il convient
- de s'attacher tout particulièrement à l'accessibilité des
- mécanismes de
- solution des conflits afin que des relations normales puissent
- se poursuivre
- et ne soient entravées que par les restrictions minimales
- qu'exige la
- réalisation des objets des mesures d'urgence.
- 151. Les objectifs généraux que les syndicats du secteur
- public
- s'efforçaient d'atteindre et qui ont dû passer au second plan
- sont, par
- exemple, l'amélioration des bas salaires et l'égalité pour les
- femmes. Ces
- deux objectifs sont légitimes, et même louables. Il est certain
- que la loi no
- 179 ne facilitait pas leur réalisation. Le plus manifeste c'est
- l'utilisation
- d'une norme pour les augmentations de salaire exprimée en
- pourcentage de
- préférence à une augmentation uniforme. Le gouvernement
- admet que cette
- conséquence s'est produite et fait remarquer que certaines
- mesures avaient été
- prises pour atténuer ce résultat. Certaines des dispositions
- visaient
- effectivement à accorder des avantages spéciaux à ceux qui
- avaient de bas
- salaires; les plus importants ont été, dans une certaine mesure,
- limités.
- Avait-on ou non fait assez - c'est là un point contesté. Il
- semble que l'on
- admette la nécessité de tenir compte de ces considérations
- lors de
- l'élaboration d'un texte législatif. Cela semble être un point
- important.
- 152. Le troisième exemple du vaste impact de la loi concerne
- la "fermeture"
- de la période "ouverte" qui caractérise le système canadien
- de relations
- professionnelles. La loi était censée fermer la période
- "ouverte" de l'année
- de contrôle. On a pensé que cela enlevait aux syndicats le
- droit d'obtenir
- l'accréditation. La question a été portée devant les tribunaux.
- Ici encore, il
- est certain que l'objet de la disposition était d'avoir des
- relations
- professionnelles aussi paisibles que possible pendant la
- période de
- restriction. La question soulevée est de savoir si cette action
- était commode
- et utile plutôt que nécessaire. Il faudrait connaître de façon
- détaillée ce
- qu'ont été les effets précis pendant que la loi no 179 était en
- vigueur mais,
- à première vue, la limitation semble viser à éviter des troubles
- plutôt qu'à
- obtenir un élément essentiel du plan de limitation.
- 153. Au sujet du cas Broadway Manor, deux commentaires
- seront peut-être
- utiles. La décision a été qu'en fait la période "ouverte" n'était
- pas fermée -
- une distinction était faite entre les conditions qui étaient
- maintenues et la
- convention collective qui ne l'était pas. La décision dépendait
- évidemment du
- libellé exact des dispositions de la loi no 179. En cela, elle
- présente peu
- d'intérêt, mais elle suscite de plus larges considérations. Le
- cas démontre
- l'importance d'une discussion préalable de toutes les
- conséquences possibles
- du texte législatif qui est proposé, c'est-à-dire l'importance de la
- consultation. Ce qui est décidé alors sera appliqué. D'un autre
- côté, recourir
- aux tribunaux pour éclaircir ou interpréter le texte législatif
- permet
- peut-être d'apporter des modifications, mais celles-ci se
- révéleront presque
- toujours inapplicables puisqu'il est improbable que la décision
- soit rendue
- pendant l'existence de la loi qui est de courte durée. La
- consultation, pas
- seulement sur les grandes questions - comme la promulgation
- d'une disposition
- -, peut conduire simplement à une réaffirmation de la politique
- proposée mais,
- si elle porte aussi sur les conséquences pratiques - ce qui en
- fait va
- probablement se produire - risque de conduire à des
- modifications sensibles.
- 154. L'une des considérations les plus claires et les plus
- importantes que
- les divers syndicats nous ont présentées était l'impact qu'a
- exercé la loi sur
- le mécanisme normal des relations professionnelles. Divers
- exemples ont été
- donnés. Le sentiment était que l'employeur, lorsque sa
- capacité financière de
- satisfaire les revendications syndicales était sévèrement limitée
- par la
- politique fiscale du gouvernement, était dans l'impossibilité de
- négocier en
- toute liberté. Sa flexibilité pouvait avoir une portée plus ou
- moins grande,
- mais son attitude était considérablement modifiée. Il y en avait
- des signes
- dans certains des exemples présentés, mais les informations
- étaient trop
- insuffisantes pour que l'on puisse apprécier avec quelque
- certitude la
- situation dans la province de l'Ontario.
- 155. Les problèmes que la législation et la pratique qui en est
- résultée ont
- entraînés pour l'élément important du système - l'arbitrage
- indépendant - sont
- beaucoup plus clairs et ont été exposés avec beaucoup plus
- de force. Cependant
- la période où la loi no 179 a exercé ses effets sur la
- négociation collective,
- des normes ont, bien entendu, remplacé effectivement
- l'arbitrage. Depuis lors,
- en vertu de la loi no 111, l'idée d'une norme ou d'une
- augmentation maximum
- souhaitable formulée par le gouvernement s'est perpétuée. Les
- arbitres
- reçoivent des indications très précises de l'opinion du
- gouvernement, et on
- s'attend qu'ils en tiennent compte. Il y a une grande
- divergence de vues au
- sujet des effets de cette pratique qui semble appelée à se
- poursuivre. Il doit
- être vrai que les arbitres pensent toujours à la situation
- économique dans
- laquelle ils vont rendre leur sentence. Bon nombre d'arbitres
- indépendants
- sont des universitaires, mais peu d'entre eux vivent dans une
- tour d'ivoire,
- comme on le suppose habituellement, au point de ne pas avoir
- clairement
- conscience de ces facteurs. Au cas, très invraisemblable, où
- ils ne
- l'auraient pas, les parties ne manqueront pas de soulever la
- question dans
- leurs déclarations. D'un autre côté, publier une norme peut
- exercer un certain
- effet sur l'arbitre. Là encore, la présentation de cas particuliers
- n'apporte
- aucune clarté car, malheureusement, il n'est pas possible de
- présumer que,
- lorsqu'un arbitre déclare qu'il a "tenu compte" de tel ou tel
- chiffre, il
- donne à comprendre qu'il a été grandement influencé par ce
- chiffre ou ne l'a
- pas été. Dans de nombreux cas, l'arbitre a manifesté du
- scepticisme. Par
- contre, il semble que plusieurs arbitres aient refusé d'agir parce
- qu'ils
- estimaient que leur liberté d'action était entravée.
- 156. L'indépendance du système d'arbitrage est de la plus
- haute importance.
- C'est la caractéristique du système appliqué dans le secteur
- public qui
- s'efforce de compenser la non-existence du droit de grève.
- C'est là une
- équation dont ceux qui viennent témoigner n'admettent pas
- tous qu'elle est
- juste ou convenable, mais cette question ne se pose pas ici.
- Ce qui est
- important, c'est que, lorsque ce système est appliqué,
- l'arbitrage doit être
- indépendant. La confiance dans l'arbitrage est facilement
- détruite, si bien
- que tout doit être fait pour ne laisser planer aucun doute sur
- son
- indépendance. Il ne s'agit pas de tester ou de contrôler sa
- validité. Il est
- indispensable de voir si l'on peut prendre des mesures
- appropriées pour
- renforcer l'indépendance. Un argument significatif qui a été
- avancé concerne
- la nomination des arbitres. Si la chose est possible, cette
- nomination devrait
- être effectuée par un organe ne dépendant pas du
- gouvernement, un conseil des
- relations professionnelles, un tribunal, etc., selon les structures
- particulières. C'est là une question qui demanderait à être
- sérieusement
- examinée par les autorités provinciales.
- 157. Enfin, il convient de noter que la façon dont ces
- remarques seront
- interprétées dépend, pour une large part, du maintien ou non
- de la restriction
- de l'inflation obtenue en exerçant une pression sur le secteur
- public en
- particulier. On a déjà noté que la loi no 111 ne semble pas
- avoir de
- successeur. Si la politique du gouvernement demeure la
- même, si tant est qu'il
- en soit ainsi, elle se poursuivra au moyen de mesures
- administratives et
- pratiques. Au vu de l'expérience, ces mesures peuvent jouer
- un rôle important
- dans la politique du gouvernement. Si tel est le cas, étant
- donné que la
- méthode adoptée est de caractère informel, il sera essentiel de
- se préoccuper
- encore plus de faire en sorte qu'il ne soit pas porté préjudice
- aux structures
- des relations professionnelles, tout particulièrement au droit de
- demander
- l'accréditation, de négocier collectivement et de bénéficier
- d'un arbitrage
- véritablement indépendant. Les appréhensions des syndicats
- semblent devancer
- les faits - et on le comprend. La conscience de ces craintes et
- la discussion
- des problèmes devraient contribuer à éviter de porter tort sans
- le vouloir aux
- sauvegardes d'importance vitale qu'assure la législation
- actuelle de
- l'Ontario.
- VI. Cas de Terre-Neuve: no 1260
- A. Introduction
- 158. L'origine de ce cas remonte à une plainte présentée le
- 9 février 1984
- par le Congrès du travail du Canada au nom de l'Association
- du personnel des
- services publics de Terre-Neuve (NAPE), qui est une des
- branches du Syndicat
- national du personnel des gouvernements provinciaux
- (NUPGE), lui-même affilié
- au CTC. Le gouvernement a présenté ses observations en
- réponse à la plainte
- dans une communication du 29 mai 1984.
- B. Problèmes en cause
- 159. Le 19 août 1983, une loi (connue sous le nom de "loi
- no 59") a été
- promulguée; elle apportait des modifications à la loi de 1973
- sur les
- négociations collectives dans la fonction publique. Selon le
- CTC, ces
- modifications sont contraires aux dispositions des conventions
- de l'OIT nos
- 87, 98 et 151 sur trois points: la définition de l'"employé public"
- contenue à
- l'article 2 1) c) de la loi, la désignation des "employés publics
- exerçant de
- fonctions essentielles" (art. 10) et la limitation du droit de grève
- (art. 10
- 12), 23 et 24). Selon le CTC, la loi no 59 constituait le plus
- récent d'une
- série de textes antisyndicaux restrictifs promulgués pour
- instituer un
- contrôle des salaires dans la fonction publique et pour limiter
- les
- possibilités de recours au droit de grève.
- 160. Le gouvernement de Terre-Neuve a expliqué que, de
- 1973 (date à laquelle
- la loi sur les négociations collectives dans la fonction publique
- avait
- accordé le droit de négociation aux fonctionnaires du
- gouvernement de
- Terre-Neuve) à 1983, il était apparu à l'évidence que l'article
- 10 de la loi
- était resté sans effet puisque, dans la quasi-totalité des cas où
- cet article
- avait été invoqué devant la Commission des relations du
- travail, celle-ci ou
- encore les tribunaux avaient jugé le cas défectueux sur tel ou
- tel point.
- L'article 10 devait donc être modifié de façon à prévoir la
- désignation des
- employés publics exerçant des fonctions essentielles dont les
- services étaien
- nécessaires à la santé, à la sûreté ou à la sécurité publiques.
- En outre, les
- syndicats continuaient à demander à la Commission des
- relations du travail
- d'inclure dans les unités de négociation des fonctionnaires
- d'encadrement et
- des fonctionnaires chargés de tâches "confidentielles" et, bien
- que la
- commission ait généralement refusé d'accéder à ces
- demandes, il a été décidé
- que la loi devrait également être modifiée pour combler une
- lacune de la
- législation et énoncer explicitement les exclusions. Selon le
- gouvernement,
- aucune modification n'avait été apportée à la législation de
- base
- antérieurement au projet de loi no 59. A la suite des
- discussions
- préliminaires engagées avec divers syndicats de la fonction
- publique et en
- raison des préoccupations exprimées en ce qui concernait
- particulièrement
- trois articles, il avait été décidé que le processus d'adoption du
- projet de
- loi serait mis en oeuvre. Le ministre du Travail et de la
- Main-d'oeuvre avait
- pris alors contact avec chacun des syndicats de la fonction
- publique et avait
- invité ceux-ci à présenter leurs recommandations au
- gouvernement sur les
- points objets de leurs préoccupations. Le gouvernement
- n'avait reçu ni
- propositions concrètes ni communications écrites et, en
- conséquence, la loi
- modificatrice avait été adoptée le 19 août 1983 et était entrée
- en vigueur le
- 1er septembre suivant.
- a) Définition de l'"employé public"
- 161. Le CTC a soutenu que la définition modifiée des mots
- "employé public"
- avait conduit à l'exclusion de plus de 2.000 fonctionnaires
- publics de
- l'affiliation à l'Association nationale du personnel des services
- publics
- (NAPE) et les avait empêchés d'adhérer à tout autre syndicat.
- Ces
- fonctionnaires comprenaient les juristes du ministère de la
- Justice, le
- personnel de l'Assemblée législative, les cadres moyens et les
- conseillers du
- ministère de la Justice et pouvaient comprendre également un
- certain nombre de
- fonctionnaires alors affiliés à l'organisme qui était l'agent
- négociateur
- représentant les fonctionnaires du gouvernement provincial,
- en l'occurrence la
- NAPE. Le plaignant s'est insurgé particulièrement contre le
- nouvel article 2
- 1) i), xii) qui interdit expressément aux personnes engagées
- dans le cadre de
- programmes financés par des subventions gouvernementales
- et qui travaillent
- pour le compte du gouvernement provincial d'adhérer à un
- syndicat. Il
- soupçonnait le gouvernement provincial d'avoir l'intention de
- recourir à cet
- alinéa pour licencier des fonctionnaires permanents et les
- remplacer par des
- employés non syndiqués qui effectueraient des tâches
- confiées
- traditionnellement à des membres de l'unité de négociation
- intéressée.
- 162. Dans sa réponse écrite à la plainte, le gouvernement a
- déclaré qu'il
- avait été nécessaire d'apporter des modifications à l'article 2
- pour prévenir
- les ingérences des organismes employeurs dans les activités
- syndicales et pour
- éviter les conflits d'intérêts mettant en cause le personnel de
- direction. Il
- a souligné que les exclusions prévues à l'article 2 1) i), viii) , ix),
- x) et
- xi) concernaient de hauts fonctionnaires, dont les fonctions
- sont normalement
- considérées comme ayant trait à la formulation des politiques à
- suivre ou à
- des tâches de direction, ou bien des employés publics dont les
- responsabilités
- ont un caractère hautement confidentiel telles que décrites à
- l'article 1.2 de
- la convention no 151. Le gouvernement a déclaré qu'aucun
- de ces fonctionnaires
- n'avait été membre d'une unité de négociation à la date de
- promulgation de la
- loi no 59 et que le syndicat intéressé n'avait jamais fait de
- demande visant à
- inclure dans une unité de négociation l'une quelconque de
- ces catégories de
- fonctionnaires. Selon le gouvernement, les exclusions prévues
- à l'article 2 1)
- i), xiii), xiv) et xv) visent des personnes au sujet desquelles la
- Commission
- des relations du travail - et non le gouvernement - décide s'il y
- a lieu de
- les rattacher à une unité de négociation. Ces fonctionnaires
- seraient ceux
- qui, de l'avis de la commission, exerçaient des fonctions de
- direction ou
- d'encadrement ou qui étaient employés à des tâches
- confidentielles portant sur
- les relations professionnelles. Dans le passé, en se fondant sur
- ces critères,
- la commission avait envisagé les exclusions de l'unité de
- négociation d'une
- manière assez restrictive.
- 163. Le gouvernement a déclaré que l'article 2 1) i), xv)
- autorise
- l'exclusion d'employés publics qui, d'après la commission,
- fournissent des
- avis à l'organisme employeur concernant le développement ou
- l'administration
- de mesures ou de programmes, et que seuls les conseillers
- techniques de niveau
- supérieur devaient être exclus des unités de négociation par
- cet article. Même
- si ces employés publics n'étaient pas des directeurs au sens
- habituel du terme
- ou n'avaient pas accès à des informations confidentielles
- relatives aux
- relations du travail, le gouvernement a estimé qu'ils
- constituaient un élément
- essentiel de l'équipe dirigeante de nombreux organismes
- gouvernementaux et
- qu'il était donc tout à fait inopportun de les rattacher à une
- unité de
- négociation. Le gouvernement a souligné qu'à ce jour la
- Commission des
- relations du travail n'avait pris aucune décision interprétant
- cette
- disposition.
- 164. En ce qui concerne l'article 2 1) i), xii), le gouvernement
- a fait
- valoir qu'il s'agissait d'une modification visant à régler une
- situation
- particulière au sujet de laquelle un accord écrit avait été
- conclu avec le
- syndicat intéressé; cette situation était celle des personnes
- bénéficiant de
- l'aide sociale du gouvernement provincial, destinée à les aider
- à devenir
- autonomes en les intégrant à la population active et en leur
- permettant
- d'accéder aux prestations de chômage. Le gouvernement a
- fait remarquer que bon
- nombre de ces personnes n'avaient ni expérience du travail ni
- qualifications
- professionnelles, ce qui leur interdisait pratiquement d'obtenir
- un emploi en
- période difficile; elles étaient placées, dans toute la province,
- auprès
- d'employeurs très divers - souvent dans le secteur privé - pour
- leur permettre
- d'acquérir qualifications ou expérience et ainsi de trouver par
- la suite un
- emploi; elles n'étaient pas des fonctionnaires au sens véritable
- du terme
- puisqu'elles n'étaient pas obligées de se présenter au travail et
- que, si
- effectivement elles ne se présentaient pas, elles étaient
- simplement reprises
- en charge par l'aide sociale; leur salaire était versé par le
- gouvernement et
- elles étaient employées pour une durée déterminée. Le
- gouvernement a insisté
- sur le fait que le syndicat avait accepté que ces personnes ne
- soient pas
- tenues de verser une cotisation syndicale et que les
- conventions collectives
- ne leur soient pas applicables. Toutefois, en mai 1983, le
- syndicat avait
- refusé d'honorer ses engagements, ce qui avait entraîné
- l'adoption de la
- modification législative dont il est question. Le gouvernement a
- soutenu que
- les protections syndicales normales concernant l'embauche et
- les priorités de
- réembauche ne pouvaient pas s'appliquer à ce type particulier
- de programme; si
- ces protections avaient été appliquées, le programme en aurait
- été gravement
- affaibli ou même rendu inopérant, et de nombreuses personnes
- dans le besoin en
- auraient souffert.
- 165. L'argument final du gouvernement concernant la
- définition du terme
- "employé public" dans la loi modifiée était que les employés
- publics exclus
- bénéficiaient en fait de la liberté syndicale et du droit
- d'organisation. Ni
- la convention no 87 ni la convention no 98 n'imposent au
- gouvernement
- l'obligation d'accorder des droits d'accréditation aux fins de la
- négociation
- collective. Les employés publics exclus pouvaient s'organiser
- et négocier
- collectivement leurs conditions d'emploi, souvent
- officieusement et souvent
- officiellement, dans les cas où le gouvernement avait reconnu
- volontairement
- certaines associations et négociait avec elles au nom de leurs
- membres;
- c'était le cas, par exemple, de l'Association des chefs
- d'établissements
- d'enseignement de Terre-Neuve et du Labrador et de
- l'Association médicale de
- Terre-Neuve.
- b) Désignation des "employés publics exerçant des fonctions
- essentielles"
- 166. En ce qui concerne la modification de l'article 10 de la
- loi, qui
- définit les modalités de désignation des "employés publics
- exerçant des
- fonctions essentielles", le plaignant a fait état des restrictions
- figurant
- aux paragraphes 1, 2, 3, 6, 7 et 8. Le paragraphe 1 autorise
- l'organisme
- employeur des employés publics faisant partie d'une unité de
- négociation à
- présenter à la Commission provinciale des relations du travail
- une déclaration
- écrite indiquant le nombre d'employés publics dont il estime
- qu'ils exercent
- des fonctions essentielles. Le paragraphe 2 dispose que, si
- aucune objection à
- cette déclaration n'est soumise à la commission, le nombre
- d'employés publics
- indiqué est réputé être le nombre des employés publics
- exerçant des fonctions
- essentielles; le paragraphe 3 dispose qu'en cas d'objection
- écrite la
- commission, après l'avoir examinée et après avoir donné à
- l'agent négociateur
- et à l'organisme employeur la possibilité de faire des
- observations et de
- présenter leurs arguments, fixe le nombre des employés publics
- dont elle
- considère qu'ils exercent des fonctions essentielles.
- L'organisme employeur
- dresse ensuite la liste des employés publics de l'unité qui sont
- considérés
- comme exerçant des fonctions essentielles (paragr. 7) et a le
- droit de
- modifier cette liste (paragr. 8). Selon le plaignant, le
- paragraphe 1 autorise
- l'organisme employeur à communiquer à la commission, en tout
- temps et aussi
- souvent qu'il le désire, une déclaration indiquant le nombre des
- employés
- publics qu'il considère comme exerçant des fonctions
- essentielles. L'organism
- employeur peut ainsi agir en tant que briseur de grève en
- fixant, par exemple,
- très bas le nombre des employés publics considérés comme
- exerçant des
- fonctions essentielles au début d'une grève, puis en
- augmentant ce nombre à
- mesure que la grève se prolonge, de façon à rendre la grève
- impossible. En
- outre, les dispositions combinées des paragraphes 2, 3 et 7 de
- l'article 10
- permettent aux organismes employeurs de décider que seuls
- certains employés
- publics d'une catégorie sont essentiels et que d'autres
- exerçant exactement
- les mêmes tâches ne le sont pas.
- 167. Le plaignant a allégué en outre que la procédure de
- désignation des
- employés publics exerçant des fonctions essentielles instituée
- par la loi no
- 59 comportait un autre élément discriminatoire, à savoir que la
- Commission
- provinciale des relations du travail n'était plus maintenant en
- mesure de
- fonctionner de manière véritablement indépendante du fait
- qu'en vertu de
- l'article 10 3) elle ne pouvait augmenter le nombre des
- employés publics
- considérés comme exerçant des fonctions essentielles qui est
- indiqué dan s la
- déclaration de l'organisme employeur. Si, par exemple, un
- organisme employeur
- plaçait 49 pour cent des membres d'une unité de négociation
- dans la catégorie
- des employés publics considérés comme essentiels, cela avait
- pour conséquence
- pratique d'interdire la grève et les employés publics ne
- pouvaient pas
- soumettre leurs griefs à l'arbitrage prévu par la loi puisqu'une
- majorité
- était nécessaire.
- 168. Selon le plaignant, l'article 10 12) viole, lui aussi, les
- droits des
- travailleurs du secteur public puisqu'il interdit de procéder à un
- vote sur
- une grève avant qu'un différend portant sur la détermination
- des employés
- publics exerçant des fonctions essentielles ait été réglé. Ainsi,
- même les
- sondages visant à connaître l'opinion des membres d'un
- syndicat sur une grève
- éventuelle sont interdits.
- 169. Le plaignant a déclaré que l'aspect le plus répressif de
- la
- modification apportée au mode de désignation des employés
- publics exerçant de
- fonctions essentielles touchait au fait que ceux qui avaient été
- considérés
- comme exerçant des fonctions essentielles perdaient tous
- leurs droits en
- matière d'emploi - ils n'étaient couverts ni par une convention
- collective ni
- par la législation fondamentale en matière de normes du travail.
- De plus,
- l'article 10 11) autorise l'organisme employeur à licencier sans
- préavis un
- employé public considéré comme exerçant des fonctions
- essentielles qui ne se
- présente pas à son travail, sans garantir à cet employé public
- une procédure
- d'appel. Le paragraphe 11 a la teneur suivante: "Lorsqu'un
- employé public
- considéré comme exerçant une fonction essentielle par
- l'organisme employeur n
- se présente pas à son travail comme l'exige le paragraphe 10),
- l'organisme
- employeur procédera au licenciement immédiat de cet employé
- public, à moins
- que celui-ci ne puisse justifier par des motifs raisonnables, à la
- satisfaction de l'organisme employeur, son absence au travail."
- 170. Dans ses observations écrites relatives à la question
- des employés
- publics considérés comme exerçant des fonctions essentielles,
- le gouvernement
- a fait valoir que la loi de 1973 n'avait enlevé le droit de grève à
- aucun
- groupe de fonctionnaires, et qu'elle ne l'avait retiré qu'au
- personnel de
- toute unité de négociation que la Commission des relations du
- travail pouvait
- considérer comme nécessaire à la santé, à la sûreté ou à la
- sécurité
- publiques. Le gouvernement a déclaré que la version de 1973
- de l'article 10
- n'avait pas atteint son objectif, puisque les syndicats avaient
- réussi à
- bloquer les demandes faites par le gouvernement à la
- commission en vue de la
- détermination des employés publics exerçant des fonctions
- essentielles. Au
- début, peu de grèves s'étaient produites dans les domaines
- touchant la santé,
- la sûreté ou la sécurité publiques et ces grèves avaient été
- assez courtes;
- les services d'urgence pouvaient être assurés par les
- employés publics de
- direction et, dans certains cas, les syndicats avaient autorisé
- des membres
- des unités de négociation à travailler en cas d'urgence.
- Cependant, les choses
- avaient changé en 1981 lorsque les employés de laboratoire et
- de radiographie
- s'étaient mis en grève. Selon le gouvernement, le syndicat
- avait assuré les
- services d'urgence mais non les services essentiels, et les
- services d'urgence
- n'avaient été fournis que dans les cas où il y avait danger de
- mort immédiat.
- Les fonctionnaires de direction avaient pu assurer des
- services
- supplémentaires, de sorte que les hôpitaux avaient réussi à
- fonctionner
- pendant un certain temps. Mais la grève s'était poursuivie
- pendant plus d'un
- mois et les difficultés étaient apparues, obligeant le
- gouvernement à agir par
- l'adoption de la loi no 111 qui disposait qu'un tiers environ des
- membres des
- unités de négociation devaient assurer les services essentiels.
- Cette loi a
- été abrogée à compter de la date de la signature d'une
- nouvelle convention
- collective applicable aux employés de laboratoire et de
- radiographie; en tout
- état de cause, lorsque la loi no 111 avait été promulguée, le
- syndicat avait
- déjà mis fin à la grève. Cette situation difficile une fois réglée,
- le
- gouvernement avait décidé de modifier la loi de 1973 afin de
- disposer d'une
- méthode plus satisfaisante de désignation des employés
- publics exerçant des
- fonctions essentielles, désignation qui serait opérée par un
- tribunal
- indépendant préalablement à la grève. C'est ainsi que la loi no
- 59 avait
- modifié les dispositions relatives aux employés publics exerçant
- des fonction
- essentielles; ceux-ci auraient désormais le droit de faire grève,
- mais les
- services essentiels devraient être assurés. Le gouvernement a
- exposé qu'aux
- termes de la modification la Commission des relations du travail
- fixait le
- nombre des employés publics de chaque catégorie qui
- devaient assurer les
- services essentiels. Ce nombre était fixé selon les chiffres
- soumis par
- l'organisme employeur et prévoyait l'intervention de l'agent
- négociateur. Une
- fois que le syndicat et l'organisme employeur s'étaient mis
- d'accord sur le
- nombre d'employés publics à inclure ou que la commission
- avait fixé ce nombre,
- l'organisme employeur désignait les employés publics et
- pouvait modifier ces
- désignations. Cette pratique était nécessaire, a déclaré le
- gouvernement, pour
- permettre à l'organisme employeur de choisir les employés
- publics qualifiés
- pour les tâches requises (les employés publics d'une même
- catégorie pouvant en
- effet avoir une certaine spécialisation; ainsi en est-il des
- infirmières
- responsables des soins intensifs et de celles qui sont chargées
- des soins
- courants). Cette pratique permettait aussi à l'organisme
- employeur de désigner
- un employé à la place d'un collègue qui avait démissionné ou
- pris sa retraite,
- ou se trouvait en congé autorisé.
- 171. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la
- Commission des
- relations du travail n'était plus à même de fonctionner de
- manière
- indépendante du fait qu'elle ne pouvait pas augmenter le
- nombre des employés
- publics exerçant des fonctions essentielles fixé par la
- déclaration de
- l'organisme employeur, le gouvernement a déclaré que c'était
- lui-même ou un
- organisme employeur, et non pas la Commission des relations
- du travail, qui
- devait fixer le niveau des services à assurer pour garantir que
- la santé, la
- sûreté ou la sécurité publiques n'étaient pas menacées. Le
- gouvernement a
- soutenu que, si les organismes employeurs s'efforçaient
- d'obtenir
- l'abaissement du nombre des employés par rapport au nombre
- normalement
- nécessaire pour garantir le niveau de service exigé et
- l'obtenaient, il y
- aurait un manquement aux obligations envers le public. Il a
- souligné que,
- lorsque le nombre des employés publics considérés comme
- exerçant des fonction
- essentielles dépassait 50 pour cent des effectifs, l'unité de
- négociation
- avait le droit de notifier à l'organisme employeur et à la
- commission que tous
- les employés publics devaient être considérés comme
- exerçant des fonctions
- essentielles et qu'ainsi l'agent négociateur disposait alors,
- conformément à
- l'article 20 de la loi, du droit de demander l'arbitrage obligatoire.
- 172. Le gouvernement a exposé qu'aux termes de l'article 10
- 12) les grèves
- et les votes conduisant aux grèves n'étaient autorisés que
- lorsque le nombre
- (et non le nom) des employés publics exerçant des fonctions
- essentielles avai
- été décidé par les parties d'un commun accord ou fixé par la
- commission.
- L'organisme employeur ne pouvait retarder unilatéralement la
- fixation du
- nombre des employés publics exerçant des fonctions
- essentielles, étant donné
- qu'aux termes de l'article 10 1) le syndicat était autorisé à
- demander à la
- Commission des relations du travail d'ordonner à l'organisme
- employeur de
- faire les propositions nécessaires. Le gouvernement a insisté
- sur le fait que
- l'article 10 12) n'interdisait aucunement aux syndicats de
- sonder leurs
- membres pour connaître leur opinion sur un mouvement de
- grève; cet article
- disposait seulement qu'il ne peut être procédé à un vote
- conduisant à une
- grève, conformément à l'article 23, tant que le nombre des
- employés publics
- exerçant des fonctions essentielles n'a pas été fixé. Selon le
- gouvernement,
- cette disposition était analogue à celle qui dispose qu'un vote
- sur une grève
- ne peut avoir lieu tant que la procédure de conciliation n'a pas
- été menée à
- terme.
- 173. Le gouvernement a soutenu que les employés publics
- qui étaient désignés
- comme exerçant des fonctions essentielles et qui étaient
- présents au travail
- ne perdaient pas tous leurs droits en matière d'emploi. L'article
- 10 disposait
- qu'ils devaient se présenter au travail comme s'il n'y avait pas
- de grève, ce
- qui signifiait que les dispositions de la convention collective
- arrivée à
- expiration continuaient à leur être applicables. Les employés
- publics exerçant
- des fonctions essentielles qui travaillaient durant toute la durée
- d'une grève
- avaient droit automatiquement à tous les avantages que les
- employés publics en
- grève avaient obtenus à l'issue de celle-ci. En outre, le
- gouvernement a
- précisé de nouveau que, si plus de 50 pour cent des membres
- d'une unité de
- négociation avaient été considérés comme exerçant des
- fonctions essentielles,
- tous les membres de cette unité bénéficiaient de la procédure
- d'arbitrage
- obligatoire. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle, en
- raison de la
- désignation des employés publics considérés comme exerçant
- des fonctions
- essentielles, les grèves deviendraient impossibles, le
- gouvernement a déclaré
- qu'il s'agissait là d'une déclaration prématurée étant donné que
- la commission
- n'avait encore émis aucune ordonnance. Le gouvernement a
- également souligné
- que les employés publics considérés comme exerçant des
- fonctions essentielles
- qui ne se présentaient pas au travail sans motif valable
- pouvaient être
- licenciés; cependant, comme la convention collective arrivée
- à expiration
- continuait à être applicable aux employés publics considérés
- comme exerçant
- des fonctions essentielles qui n'étaient pas en grève, les
- dispositions
- relatives aux réclamations demeuraient également en vigueur.
- Les employés
- publics pouvaient donc toujours être congédiés pour juste
- cause, et la loi
- indiquait simplement que le fait de ne pas se présenter au
- travail sans motif
- valable constituait une juste cause. Les mesures prises par
- l'organisme
- employeur et les motifs valables invoqués par l'employé public
- continueraient
- à être soumis à l'examen des arbitres et des tribunaux.
- c) Limitations du droit de grève
- 174. La troisième modification introduite par la loi no 59 qui
- faisait
- l'objet de la plainte concernait l'article 23, dont le nouveau
- texte disposait
- que les fonctionnaires qui décident de faire grève doivent
- observer un préavis
- légal de 38 jours (un mois et sept jours), faute de quoi la grève
- est
- illégale. En outre, l'article 24 de la loi avait été modifié de façon
- à
- interdire aux travailleurs des établissements de soins de
- déclencher des
- grèves tournantes. Selon le plaignant, les articles 23 et 24
- dans leur teneur
- nouvelle n'avaient d'autre objectif que de restreindre la liberté
- d'expression
- des fonctionnaires syndiqués et de limiter le droit de grève à
- une forme
- particulière de grève. Le plaignant soulignait que l'organisme
- employeur, lors
- de la rédaction de la loi, avait décidé de s'attaquer uniquement
- au syndicat,
- puisque cette loi ne contenait aucune disposition relative aux
- mesures
- inverses que pourrait prendre l'organisme employeur, tel le
- lock-out.
- 175. En ce qui concerne la limitation du droit de grève, le
- gouvernement a
- souligné qu'aux termes de la loi de 1973 le déclenchement de
- toute grève était
- subordonné à l'observation d'un préavis de sept jours. Cette
- disposition
- n'avait été modifiée que sur un point: lorsqu'une grève ne
- commençait pas à la
- date notifiée, un nouveau préavis ne pouvait être donné qu'un
- mois après cette
- date. Le gouvernement a expliqué que cette disposition avait
- été introduite
- pour empêcher les syndicats d'obliger les établissements à
- fermer, par exemple
- les hôpitaux, sans déclencher effectivement la grève.
- Lorsqu'un hôpital reçoit
- un préavis de grève, il doit réduire largement ses activités et
- s'organiser de
- manière à ne plus fournir que les services essentiels, que les
- fonctionnaires
- interrompent effectivement leur travail ou non. En vertu de la
- nouvelle
- disposition, les fonctionnaires, s'ils ne s'étaient pas mis en
- grève à la date
- prévue initialement, devaient permettre aux établissements de
- retrouver leur
- rythme de fonctionnement normal pendant une durée
- raisonnable.
- 176. S'agissant des grèves tournantes, le gouvernement a
- déclaré qu'elles
- avaient été interdites dans les établissements de soins de
- façon à éviter que
- des fonctionnaires de l'hôpital ne se mettent en grève sans
- préavis au moment
- où des personnes sont admises à l'hôpital pour y subir une
- intervention
- chirurgicale. Selon le gouvernement, les grèves tournantes
- dans les
- établissements de soins créaient un danger pour la vie des
- personnes et
- étaient totalement inacceptables. Le gouvernement a toutefois
- fait remarquer
- que ces deux dispositions applicables aux délais à respecter et
- à la nature de
- la grève ne touchaient ni au droit de grève ni à l'efficacité des
- mouvements
- entrepris; il s'agissait de limitations raisonnables, imposées
- seulement pour
- protéger la santé et la sécurité publiques, qui ne constituaient
- pas des
- violations de la liberté syndicale. Le gouvernement a estimé
- que l'allégation
- selon laquelle la modification de la loi ne comprenait pas
- d'interdiction
- parallèle du lock-out tournant était difficile à comprendre
- puisque ce type
- d'action ne pourrait en aucun cas être profitable pour les
- établissements de
- soins.
- 177. En conclusion, le gouvernement a déclaré que les
- modifications
- examinées avaient été introduites pour protéger la santé, la
- sûreté et la
- sécurité publiques, et non dans un but de discrimination ou
- d'ingérence dans
- les activités légales des syndicats. Il a souligné que le Comité
- de la liberté
- syndicale avait admis que le fait de refuser aux fonctionnaires
- occupant des
- postes de confiance au niveau de la direction ou de
- l'encadrement le droit de
- se syndiquer et de participer à la négociation collective était
- justifié. Le
- gouvernement a soutenu que, si la modification apportée à
- l'article 2 1) avait
- eu pour effet d'exclure ces fonctionnaires de l'unité de
- négociation, il leur
- avait laissé la liberté d'adhérer aux associations qui défendent
- leurs
- intérêts professionnels. Il a souligné que ces associations
- avaient été
- reconnues par le gouvernement et que des négociations
- avaient été engagées
- avec elles. En ce qui concerne les autres exclusions
- particulières énumérées à
- l'article 2 1) i), viii) à xii), le gouvernement a déclaré qu'il n'avait
- pas
- de pouvoir de décision sur ces exclusions puisque les
- demandes devaient être
- faites auprès de la Commission des relations du travail, dont les
- décisions se
- fondent sur des précédents reconnus et des principes du droit
- du travail
- applicables aux exclusions de l'unité de négociation. Il a fait
- remarquer
- qu'au cours des dernières années la plupart des questions
- d'inclusion ou
- d'exclusion qui s'étaient posées dans l'administration
- gouvernementale avaient
- été réglées par accord entre le syndicat intéressé et
- l'organisme employeur,
- et qu'un très petit nombre seulement de cas litigieux avaient
- été portés
- devant la Commission des relations du travail pour décision. En
- ce qui
- concerne l'allégation selon laquelle la nouvelle méthode de
- désignation des
- employés publics exerçant des fonctions essentielles opérait
- une
- discrimination à l'encontre des militants syndicaux, le
- gouvernement a déclaré
- qu'il n'y avait eu aucune ingérence dans l'organisation
- syndicale et qu'aucun
- fonctionnaire n'avait dû adhérer à un syndicat ou renoncer à
- son affiliation
- syndicale. Selon le gouvernement, il était de l'intérêt des
- organismes
- employeurs que des fonctionnaires assurent les services
- essentiels, et ces
- organismes avaient pour politique de ne pas désigner des
- dirigeants ou des
- responsables syndicaux, sauf si ceux-ci étaient les seuls
- membres de leur
- catégorie en mesure d'effectuer le travail demandé. Le
- gouvernement a affirmé
- à nouveau que les modifications apportées à la loi en ce qui
- concerne les
- délais à observer et la nature de la grève ne constituaient pas
- des ingérences
- inopportunes dans les activités et les programmes syndicaux
- mais posaient
- simplement les conditions préalables au déclenchement de la
- grève. Il a
- indiqué que le syndicat était libre de sonder ses membres et de
- procéder à des
- scrutins pour connaître leur opinion sur une grève éventuelle;
- seuls les votes
- formels sur la grève débouchant effectivement sur une grève
- étaient interdits
- tant que les employés publics exerçant des fonctions
- essentielles n'avaient
- pas été désignés.
- C. Informations reçues pendant la mission
- 178. J'ai eu de longues discussions, au sujet des questions
- soulevées dans
- ce cas, avec la NAPE et les représentants du gouvernement
- provincial, conduits
- par le sous-ministre adjoint, sur place à Saint-Jean,
- Terre-Neuve, et à
- Ottawa, où les représentants du Congrés du travail du Canada
- CTC et du
- Syndicat national du personnel des gouvernements
- provinciaux NUPGE m'ont
- également parlé de la loi no 59. Une fois de plus, les
- déclarations orales des
- parties ont été complétées par de longues déclarations par
- écrit qui m'ont été
- remises à Saint-Jean.
- 179. Le premier point qui est apparu pendant ces discussions
- a été que
- l'excellent climat de relations professionnelles qui régnait dans
- la province
- depuis les années cinquante était devenu conflictuel. Selon le
- syndicat, du
- fait en partie de la récession, du fait en partie d'une réaction
- excessive au
- radicalisme croissant de certains syndicats de la fonction
- publique et,
- peut-être, du fait que les deux parties répugnaient à demander
- un arbitrage
- d'intérêts, le gouvernement s'est ingéré, avec la loi no 59,
- dans le processus
- de négociation collective. Selon la NAPE, avant la loi no 59, la
- responsabilité de la dégradation des relations professionnelles
- incombait
- autant aux syndicats, du fait de leur radicalisme, qu'au
- gouvernement, du fait
- de son paternalisme. Toutefois, on ne pouvait pas reprocher
- aux syndicats la
- "panique" dont avait fait preuve le gouvernement en
- promulguant la loi no 59,
- qui était entièrement favorable aux employeurs et ne pouvait
- qu'aggraver la
- dégradation des relations du travail. Les faits qui ont précédé
- la
- présentation du texte législatif au Parlement expliquent le
- malentendu qui
- oppose actuellement les parties; ce point sera mentionné plus
- loin dans le
- présent rapport.
- a) Consultation
- 180. Pendant nos discussions, le syndicat a souligné qu'il
- n'avait reçu, en
- fait, qu'un jour de préavis lorsque le projet de loi avait été
- déposé. Il n'y
- a pas eu d'audition publique sur les propositions
- d'amendement et la NAPE
- avait pensé que le projet de loi no 59 dans son ensemble
- devait être proclamé,
- alors que seules les trois questions contestées (définition du
- fonctionnaire,
- désignation des employés publics exerçant des fonctions
- essentielles et
- dispositions concernant le droit de grève) sont restées en
- suspens et ont paru
- plus tard au Journal officiel. La NAPE a affirmé que la loi no 59
- avait
- amoindri la confiance qui pouvait avoir existé antérieurement
- entre les
- parties et avait créé un climat d'affrontement. Selon le
- syndicat, la raison
- du dépôt de cette loi avait été certainement un mépris de plus
- en plus grand
- du gouvernement pour les syndicats et leur puissance
- croissante, ainsi qu'un
- manque de considération pour l'aptitude des syndicats à
- représenter les
- intérêts de leurs membres. La situation, avant la loi no 59, avait
- été
- satisfaisante, 294 contrats ayant été conclus. Le système
- d'arbitrage et le
- choix des arbitres sur une liste constituée par la Commission de
- coopération
- travailleurs-employeurs avaient également été satisfaisants.
- 181. D'un autre côté, le gouvernement a expliqué que des
- exemplaires des
- projets d'amendement avaient été remis au syndicat très peu
- de temps avant que
- le Parlement en soit saisi. Les difficultés au sujet de la loi
- fondamentale
- sur les négociations collectives, et de l'article 10 en particulier,
- avaient
- été examinées à maintes reprises, par le passé, avec les
- représentants de la
- NAPE. Le gouvernement a retardé la proclamation des parties
- contestées du
- projet de loi no 59 et a informé le syndicat qu'il désirait recevoir
- ses
- suggestions à leur sujet. Toutefois, selon le gouvernement,
- aucune déclaration
- par écrit n'a été reçue; il n'a été remis au ministère du Travail
- qu'un exposé
- général des problèmes, enregistré sur bande magnétique. Le
- gouvernement en a
- déduit qu'une discussion face à face n'intéressait pas le
- syndicat. Les
- dispositions ont alors été proclamées et sont entrées en
- vigueur le 1er
- septembre 1983. Le gouvernement n'a pas pu expliquer
- pourquoi le syndicat
- s'était retiré à ce moment-là, tout en admettant que la raison en
- avait
- peut-être été la rupture des relations de coopération informelle
- que les
- syndicats avaient entretenues avec le gouvernement, en tant
- qu'employeur, par
- le passé.
- b) La définition de l'employé public
- 182. Selon la NAPE, par la modification de l'article 2 1) de la
- loi no 59,
- le gouvernement avait effectivement exclu jusqu'à 2.000
- travailleurs de
- l'affiliation syndicale. La NAPE s'est inquiétée de l'exclusion,
- dans la
- définition de l'employé public de personnes occupées au titre
- d'un programme
- d'emploi que le gouvernement provincial administrait avec ses
- propres fonds
- et/ou des fonds fédéraux (article 2 1) i) xii)). Le syndicat a
- souligné que
- cette exclusion de l'application de la loi ne se retrouve pas
- dans le cas de
- programmes analogues administrés à d'autres échelons
- gouvernementaux, tels que
- les conseils scolaires et les municipalités. Il a affirmé que le but
- de ces
- programmes était, non pas de former les chômeurs pour qu'ils
- puissent
- s'intégrer dans la population active, mais de transférer les états
- de paie de
- la province à l'Etat fédéral. Comme ces personnes ne
- pouvaient pas s'affilier
- à un syndicat, il était plus difficile de négocier une
- augmentation des
- avantages accessoires des membres du syndicat, et ce
- dernier se sentait menacé
- par ces travailleurs "jaunes", en cas de grève, et par la
- réduction éventuelle
- du temps de travail des membres du syndicat. La NAPE se
- méfiait tout
- particulièrement de cette disposition parce qu'elle a conclu de
- nombreuses
- conventions avec des employeurs non couverts par la loi
- (municipalités,
- Collège de pêche, hôpitaux privés) autorisant les programmes
- de création
- d'emplois dans des lieux de travail où elle représente les
- travailleurs.
- D'après les conventions dont copie m'a été remise, il
- apparaissait que la
- seule condition préalable que posait la NAPE pour accepter
- les travailleurs
- non syndiqués dans ces lieux de travail était la protection de la
- sécurité de
- l'emploi et des avantages accessoires de ses membres. L'autre
- point de cette
- disposition qui préoccupait le syndicat - elle refusait à ces
- personnes le
- droit de s'affilier à un syndicat - n'avait pas de rapport avec
- une convention
- précédente que la NAPE avait conclue avec le gouvernement
- en ce qui concerne
- la non-syndicalisation; cet accord ne concernait que les
- personnes au bénéfice
- de l'aide sociale. Selon la NAPE, lorsque le gouvernement a
- commencé à
- utiliser ces personnes dans les programmes, cet accord a pris
- fin. Etant donné
- que le syndicat était disposé à représenter ces personnes pour
- les questions
- sans rapport avec leurs taux de rémunération, qui étaient fixés
- dans le cadre
- du programme et correspondaient plus ou moins au salaire
- minimum, et qu'il ne
- leur demanderait pas de verser des cotisations, il estimait que
- le
- gouvernement aurait dû négocier leur situation avec la NAPE
- au lieu de les
- exclure en légiférant du champ d'application de la loi.
- 183. Le gouvernement a fait remarquer que les programmes
- de création
- d'emploi étaient conçus pour permettre aux chômeurs
- d'accumuler les vingt
- semaines d'intrégration à la population active exigées pour
- avoir droit aux
- prestations de chômage fédérales. Lorsque le gouvernement a
- été informé de la
- position de la NAPE au sujet de la couverture de ces
- personnes pour les
- questions qui ne relevaient pas de la négociation collective, il
- semble y
- avoir eu un autre malentendu: le gouvernement a déclaré
- qu'en 1984-85 environ
- 600 personnes avaient bénéficié des programmes et n'avaient
- donc pas droit aux
- négociations collectives, alors que le syndicat avait affirmé
- que 2.000
- personnes s'étaient trouvées exclues des conventions
- collectives. Etant donné
- que les personnes relevant de ces programmes exceptionnels
- n'occupaient que
- des emplois temporaires, le gouvernement avait du mal à
- comprendre pourquoi le
- syndicat s'intéresserait à recruter ces personnes pour
- l'affiliation en soi,
- mais il n'a pas exprimé d'opposition à cette possibilité.
- 184. En ce qui concerne l'exclusion figurant à l'article 2 1) i)
- xv)
- (personnes fournissant des avis à l'employeur en matière de
- politiques ou de
- programmes), la NAPE a expliqué que, dans le passé, la
- pratique des
- négociations et les décisions de la Commission des relations
- du travail avait
- toujours donné de bons résultats lorsque des conflits - qui
- étaient très rares
- - surgissaient au sujet de cette catégorie d'employés publics.
- Elle craignait
- que l'on n'abuse de cette modification pour inclure des
- personnes telles que
- les travailleurs sociaux ou les conseillers. Elle a fait remarquer
- que la
- Commission des relations du travail a refusé d'accorder des
- exemptions pour le
- moment, jusqu'à ce que les contestations élevées par la voie
- judiciaire contre
- la loi no 59 dans son ensemble soient réglées. Le
- gouvernement a estimé qu'il
- s'était contenté de donner une forme législative aux critères
- qu'avait
- appliqués la commission dans le passé, à savoir l'exclusion des
- employés
- chargés de la formulation des politiques à suivre, ayant des
- tâches de
- direction ou dont les responsabilités ont un caractère
- hautement confidentiel.
- Il a souligné que c'était là une exclusion spécifiquement
- admise à l'article 1
- de la convention no 151. J'ai fait observer que la méfiance du
- syndicat avait
- peut-être résulté d'un manque de communication quant au but
- de cette
- disposition.
- 185. Pendant ces discussions au sujet de l'article 2 1), le
- gouvernement a
- également souligné qu'il n'y avait aucune intention cachée
- derrière le
- paragraphe ix) - qui exclut de la loi les "avocats et les
- conseillers
- législatifs - et indiqué que ces employés publics constituent
- effectivement
- des associations et négocient collectivement avec
- l'employeur.
- c) Questions concernant le droit de grève
- 186. L'article 2 de la loi modificatrice de 1983 (loi no 59) a
- abrogé
- l'article 10 de la loi de 1973 sur les négociations collectives
- dans la
- fonction publique qui portait sur la désignation des employés
- publics exerçant
- des fonctions essentielles, c'est-à-dire "les employés dont les
- attributions
- sont totalement ou partiellement des attributions dont
- l'exécution, à un
- moment quelconque ou pendant une période spécifiée
- quelconque, est ou peut
- être indispensable pour la santé, la sûreté ou la sécurité
- publiques". La
- définition des employés publics exerçant des fonctions
- essentielles était
- restée la même après la modification de 1983, mais un certain
- nombre de
- questions se posait du fait des autres modifications apportées
- à la loi de
- 1973 par la loi no 59.
- 187. La NAPE a allégué que les syndicats du secteur public
- avaient toujours
- fourni les services essentiels pour protéger la santé, la sûreté
- et la
- sécurité publiques. Toutefois, elle s'est dite convaincue que la
- législation
- était utilisée pour donner à l'employeur, le gouvernement et
- l'Association des
- hôpitaux de Terre-Neuve, un avantage dans les négociations
- collectives. Les
- représentants de la NAPE ont affirmé qu'ils étaient
- parfaitement conscients de
- la nécessité de dispenser les services essentiels pendant les
- conflits du
- travail. La loi no 59 autorisait néanmoins la Commission des
- relations du
- travail à être l'arbitre final pour ce qui est des services
- essentiels. La
- commission péchait toujours par excès de prudence lorsqu'elle
- rendait des
- décisions sur les services essentiels, ce qui favorisait
- l'employeur. La NAPE
- a prétendu que la commission ne nommait pas un plus grand
- nombre d'employés
- publics exerçant des fonctions essentielles que celui qui était
- demandé par le
- gouvernement. Il en résultait que plus de la moitié du
- personnel d'une unité
- de négociation ne pouvait pas être désignée comme exerçant
- des fonctions
- essentielles, ce qui empêchait, à son tour, le règlement d'un
- différend par
- voie d'arbitrage. L'intention du gouvernement était
- manifestement de supprimer
- le droit de grève, mais elle était aussi d'empêcher le règlement
- des conflits
- par voie d'arbitrage.
- 188. La NAPE a soutenu qu'il était difficile pour le syndicat de
- donner son
- accord à la détermination des employés publics exerçant des
- fonctions
- essentielles, étant donné que l'employeur refusait de lui donner
- des
- informations sur le nombre total des travailleurs des unités de
- négociation et
- sur leurs catégories professionnelles.
- 189. Selon la NAPE, les travailleurs des magasins de
- spiritueux, qui
- avaient été considérés antérieurement comme essentiels,
- avaient retrouvé leur
- droit de grève, alors que le statut des travailleurs hospitaliers
- affectés au
- service des repas n'avait pas changé. Leur droit de grève était
- toujours
- demeuré intact. La situation était anormale lorsque les
- inspecteurs de
- l'hygiène au service du gouvernement provincial étaient
- considérés comme
- essentiels alors que les agents qui ne travaillaient pas pour la
- province mais
- préparaient les repas pour un certain nombre d'hôpitaux ne
- l'étaient pas.
- 190. Le gouvernement, selon la NAPE, avait toujours été peu
- disposé à régler
- les questions relatives aux employés publics exerçant des
- fonctions
- essentielles par voie de négociation ou en suivant d'autres
- procédures de
- règlement des conflits. Ce problème s'était perpétué pendant
- des années et les
- tribunaux et la Commission des relations du travail avaient
- établi que
- l'approche du gouvernement s'était révélée peu réaliste.
- 191. Si, par exemple, à la suite de négociations ou d'une
- décision de la
- Commission des relations du travail, 33 pour cent du personnel
- de soutien de
- l'hôpital étaient déclarés essentiels, cela signifierait que, sur
- une unité de
- négociation de 800 personnes, 265 resteraient présentes au
- travail. A ce
- chiffre-ci s'ajouteraient les travailleurs ayant des tâches de
- gestion, les
- travailleurs des unités qui ne négocieraient pas et les
- travailleurs d'autres
- unités de négociation. En d'autres termes, un grand hôpital,
- pendant une
- grève, pourrait disposer d'un plus grand nombre de travailleurs
- que pendant la
- période critique des congés annuels. En outre, il était habituel,
- à
- Terre-Neuve, de recruter d'autres travailleurs pour remplacer le
- personnel en
- grève. Le personnel de soutien de l'hôpital avait, par
- conséquent, perdu ses
- droits de négociation collective par le biais de cette procédure
- qui, en
- outre, leur interdisait tout autre mécanisme de règlement des
- conflits.
- 192. En vertu de la loi no 59, les employeurs pouvaient
- choisir comme ils
- l'entendaient les employés publics exerçant des fonctions
- essentielles ou,
- manipuler d'une autre manière les grèves en rendant difficile le
- traitement
- d'un conflit si une large minorité de travailleurs étaient censés
- exercer des
- services essentiels et recevaient l'intégralité de leur salaire et
- de leurs
- avantages accessoires alors que les grévistes ne recevaient
- plus leur revenu
- normal.
- 193. Autre aspect de la question, l'employeur, selon la
- NAPE, avait la
- possibilité de faire déclarer essentiel un faible pourcentage de
- l'unité de
- négociation puis de revenir périodiquement devant la
- commission pour demander
- des augmentations de ce pourcentage. Une telle pratique
- aurait pour effet de
- briser les grèves.
- 194. La NAPE a reconnu que la loi n'avait jamais été utilisée
- par
- l'employeur de cette manière mais a néanmoins affirmé que
- ces avantages,
- inscrits dans la loi, nuisaient au moral des travailleurs et au
- processus de
- négociation collective. La NAPE comme le gouvernement sont
- convaincus qu'il
- doit y avoir des niveaux au-dessous desquels les services
- publics ne devraient
- pas être réduits ni utilisés, que ce soit par les syndicats ou par
- le
- gouvernement, pour obtenir des avantages dans la
- négociation collective.
- 195. De l'avis de la NAPE, la question des services
- essentiels devrait être
- tranchée par voie de négociation entre le gouvernement et le
- syndicat, ou par
- un expert indépendant, ou encore par un tiers expert en la
- matière. Personne
- ne devrait obtenir un avantage quelconque et les services
- essentiels devraient
- être répartis de façon égale entre les membres de l'unité de
- négociation qui
- remplissent les conditions nécessaires. Comme la question des
- services
- essentiels annihile le droit de grève, toute unité de négociation
- dans
- laquelle se pose la question doit avoir à sa disposition une
- autre procédure
- de règlement des conflits.
- 196. La NAPE a également mis en doute la nécessité des
- articles 27 à 29 de
- la loi qui disposent que l'état d'urgence peut être déclaré
- pendant une grève
- si celle-ci menace la santé ou la sécurité des personnes, ou un
- groupe ou une
- catégorie de personnes, ou encore la sûreté de la province.
- 197. Le syndicat a mentionné un cas relatif à une grève, en
- 1981, de
- techniciens de laboratoire et de radiologie, qui avait été
- déclenchée à la
- suite de la non-acceptation par le gouvernement du rapport
- d'une commission de
- conciliation. Bien que la grève ait été déclarée, le syndicat
- avait mis en
- place un système par lequel les employés essentiels étaient à
- leur poste et
- avait fourni des spécialistes sur une base permanente. Une
- nouvelle offre de
- l'employeur avait été refusée par le syndicat. Le gouvernement
- avait présenté
- un texte législatif (loi no 111) qui déclarait que la moitié du
- personnel de
- l'unité de négociation était essentielle, mettant ainsi fin à la
- grève. De
- l'avis de la NAPE, le gouvernement aurait pu soumettre les
- questions
- contestées à l'arbitrage ou aurait pu revenir à la table de
- négociation. Au
- lieu de cela, en présentant ce texte législatif, il avait mis fin à la
- négociation collective pour l'unité concernée. Par la suite, le
- syndicat a
- signé une convention collective et la loi no 111 est arrivée à
- expiration.
- 198. La NAPE a également affirmé que l'article 2) xii) de la loi
- no 59
- enlevait aux membres du syndicat le droit de voter la grève. Si
- l'employeur
- faisait une offre, le seul vote autorisé était celui qui conduirait à
- son
- acceptation, sinon il serait illicite. La désignation des employés
- publics
- exerçant des fonctions essentielles devrait suivre - et non
- précéder - la
- décision de déclencher une grève.
- 199. Un autre problème était celui que posait l'article 23 de la
- loi,
- modifié par l'article 6 de la loi no 59. Aux termes de la loi
- précédente de
- 1973, les unités de négociation étaient tenues de donner un
- préavis de sept
- jours avant toute grève. Aux termes de la loi no 59, si le
- syndicat ne
- déclenchait pas la grève à la date précisée dans le préavis,
- trente jours
- devaient s'écouler avant qu'il soit possible de donner un
- nouveau préavis de
- sept jours. Là encore, selon le syndicat, il y avait tentative de
- contrôler la
- négociation collective à l'avantage de l'employeur.
- 200. L'article 24 de la loi de 1973 avait été également
- modifié par la loi
- no 59 pour empêcher les grèves tournantes qui, de l'avis de la
- NAPE, ne
- devraient pas être interdites. Là encore, cette interdiction
- permettait à
- l'employeur de peser lourdement sur la stratégie de négociation
- du syndicat.
- En outre, avec des grèves tournantes, une partie seulement
- des hôpitaux de la
- province serait en grève à un moment donné.
- 201. Dans ses déclarations sur la question des grèves, le
- gouvernement a
- expliqué que la loi de 1973 accordait le droit de grève à tous
- les
- travailleurs relevant de cette loi, c'est-à-dire les fonctionnaires,
- le
- personnel des hôpitaux et les instructeurs des écoles
- professionnelles, à
- l'exception de ceux qui pourraient être désignés comme
- exerçant des fonctions
- essentielles. Avant la loi no 59, l'employeur, au moment de
- l'accréditation du
- syndicat, saisissait la Commission des relations du travail d'une
- demande
- concernant le choix d'une liste de fonctionnaires nommément
- désignés. La
- quasi-totalité de ce genre de demandes avaient été
- contestées par le syndicat
- et jugées défectueuses d'une manière ou d'une autre par les
- tribunaux qui
- avaient dit eux-mêmes qu'à cet égard la loi exigeait des
- modifications
- substantielles. A une occasion, même, où la commission avait
- nommé un groupe
- d'experts chargé de la désignation, le tribunal avait déclaré
- que ce groupe
- n'était pas compétent pour ce faire.
- 202. Cette situation peu satisfaisante a duré près de dix ans,
- et ce n'est
- qu'après la grève de 1981 du personnel des laboratoires et
- des services de
- radiographie, pendant laquelle on avait brandi la menace
- d'interrompre même
- les services essentiels, que des modifications ont été
- introduites par la loi
- no 59. En ce qui concerne la grève de 1981, le gouvernement
- a ajouté que le
- texte législatif ne prévoyait pas d'arbitrage et que, d'un point
- de vue
- économique, le gouvernement ne jugeait pas qu'il fût approprié
- de soumettre
- les questions à l'arbitrage. Certes, les résultats de la
- conciliation avaient
- été rejetés par le gouvernement, mais c'était souvent le
- syndicat qui rejetait
- ces résultats. De toute manière, la législation d'urgence avait
- été promulguée
- étant donné que la santé des malades était immédiatement et
- sérieusement
- menacée.
- 203. La loi de 1973 s'était donc révélée inapplicable en ce
- qui concerne les
- services essentiels, et la loi no 59 avait introduit des
- modifications de
- procédure plutôt que de fond. Au lieu de demander à la
- commission de désigner
- nommément des employés publics, on la priait de fournir un
- chiffre.
- L'employeur pouvait s'adresser à la commission en tout temps
- et non pas
- seulement, comme auparavant, à l'époque de l'accréditation,
- la plupart des
- syndicats étant de toute manière volontairement reconnus.
- Selon le
- gouvernement, le syndicat se méprenait en alléguant que
- l'employeur pouvait
- présenter des demandes successives à la commission afin
- d'augmenter le chiffre
- indiqué et, ainsi, de briser une grève. Non seulement cela
- n'entrait pas dans
- les intentions de l'employeur, mais cela était également
- impossible dans la
- pratique puisqu'il était extrêmement difficile de convoquer la
- commission à
- bref délai.
- 204. Selon le gouvernement, il y avait eu des rencontres
- avec la NAPE pour
- examiner ces problèmes, mais, malgré toutes les explications
- qui lui avaient
- été données, le malentendu avait persisté. Il n'existait toutefois
- aucun
- problème de ce genre entre l'employeur et les autres unités de
- négociation,
- comme le Syndicat canadien de la fonction publique, par
- exemple, au sujet de
- ces questions. Des accords sur la désignation des employés
- publics exerçant
- des fonctions essentielles avaient été conclus avec d'autres
- syndicats, mais
- la NAPE, qui était au courant des propositions que faisait
- l'employeur, avait
- demandé à la commission de ne pas poursuivre les auditions à
- leur sujet. Le
- gouvernement a fourni à la mission des informations détaillées
- sur les
- recommandations qu'il avait présentées à la commission en ce
- qui concerne le
- pourcentage d'employés publics exerçant des fonctions
- essentielles que la
- commission pourrait fixer. Depuis 1983, cependant, la NAPE
- avait obstinément
- refusé de participer au processus de négociation des besoins
- en employés
- publics exerçant des fonctions essentielles.
- 205. Il importe de souligner, a poursuivi le gouvernement,
- qu'en juin 1985
- l'article 10 de la loi a été modifié et qu'un nombre significatif de
- fonctionnaires du gouvernement appartenant à neuf unités de
- négociation
- déterminées ont été exclus de la désignation des besoins
- essentiels. D'autres
- institutions gouvernementales ou commissions avaient identifié
- un besoin
- minime ou inexistant et, pour l'ensemble du secteur
- gouvernemental, il avait
- été déterminé que 21 pour cent (17,7 pour cent, y compris les
- unités de
- l'article 10) des fonctionnaires exerçaient des fonctions
- essentielles. Ce
- groupe comprenait 100 pour cent des gardiens de prison (qui
- avaient maintenant
- automatiquement accès à l'arbitrage) et d'autres personnels
- tels que les
- équipes de lutte contre les incendies de forêt, les travailleurs
- sociaux, etc.
- Dans le secteur des soins de santé, le besoin était plus
- important (33 pour
- cent) pour qu'un niveau minimum de soins soit assuré aux
- malades et aux
- personnes âgées.
- 206. Le gouvernement a fait remarquer qu'il y a cinq ans le
- syndicat
- n'aurait pas été disposé à accepter l'arbitrage en tant que
- remplacement de
- son droit de grève. Maintenant, c'était le gouvernement qui,
- dans la situation
- économique actuelle, hésitait à demander l'arbitrage. La loi no
- 59, et le
- gouvernement a insisté sur ce point, avait été adoptée à la
- suite de décisions
- judiciaires et son adoption avait été hâtée par la grève de
- 1981. Maintenant,
- a souligné le gouvernement, les règles étaient fixées et bien
- connues, et cela
- était préférable à l'adoption - comme ce fut le cas en 1981 -
- d'une loi
- d'urgence en cas de grève dans un service essentiel. Depuis
- 1981, il n'y avait
- pas eu de grève dans le secteur hospitalier.
- 207. En ce qui concerne les articles 23 et 24 de la loi, dans
- leur teneur
- modifiée par la loi no 59, les modifications introduites en juin
- 1985 avaient
- abrogé l'article 23 mais maintenu les sept jours de préavis pour
- les hôpitaux
- et les établissements de soins. Si les travailleurs de ces
- secteurs ne
- déclenchaient pas la grève à la date précisée dans le préavis,
- trente autres
- jours devaient s'écouler avant qu'un autre préavis soit donné.
- La raison de
- cette disposition était la nécessité de régler le problème du
- renvoi des
- malades chez eux et de leur rappel à l'hôpital si la grève ne se
- produit pas.
- Ce système n'exclut pas des négociations de la onzième heure
- et, de l'avis du
- gouvernement, rien n'empêche que, par accord entre les
- parties, on ne prolonge
- d'un jour le préavis de sept jours si une nouvelle offre est
- présentée.
- 208. En ce qui concerne les grèves tournantes, le
- gouvernement a expliqué
- que la loi no 59 avait modifié l'article 24 de la loi pour interdire
- ces
- grèves uniquement dans les établissements de soins. La loi ne
- concernait que
- l'unité de négociation et, si une partie de cette unité pouvait
- être appelée à
- cesser le travail, il n'était pas question que cette partie pratique
- des
- grèves tournantes. Cette disposition avait été introduite pour
- éviter le genre
- de problème que l'on avait connu pendant la grève de 1981
- du personnel des
- laboratoires et des services de radiographie.
- D. Remarques finales
- 209. Fondamentalement, les fonctionnaires représentés par
- la NAPE
- conservent le droit de grève. Les mesures de lutte contre
- l'inflation l'ont
- emporté sur le système de négociation qui a pu être utilisé
- dans son intégrité
- une fois que la législation extraordinaire n'a plus été applicable.
- La plainte
- porte donc sur les limitations qui semblent avoir été récemment
- apportées au
- processus normal de la négociation.
- 210. Le premier point soulevé, et il a beaucoup d'importance,
- est que les
- mesures introduites dans la loi no 59 n'ont jamais fait l'objet des
- consultations appropriées. Pour une personne de l'extérieur qui
- vient à
- Terre-Neuve, il est évident que, bien que les relations
- professionnelles dans
- le secteur public ne soient pas à l'abri des problèmes et de
- quelques
- différends, le syndicat et le gouvernement entretiennent de
- bons rapports.
- Cela n'a pas empêché un désaccord au sujet de la loi no 59. Il
- est difficile
- d'indiquer avec exactitude l'importance des consultations au
- sujet de la loi
- no 59, puisqu'elles ne sont pas perçues de la même manière.
- Les contacts
- effectifs ont eu lieu dans un climat où le gouvernement, ayant
- récemment
- examiné les relations professionnelles, était décidé à les réviser
- sur la base
- de l'expérience. Le syndicat considérait que les modifications
- menaçaient sa
- position, mais, en fait, il estimait que cette position n'avait pas
- été
- convenablement évaluée et il se sentait menacé par les
- dispositions de la loi,
- dont certaines, à son avis, étaient loin d'être claires. Il
- apparaissait à la
- NAPE qu'une série d'incidents qui s'étaient produits ces
- dernières années
- avait entraîné une réaction plutôt extrême qui ne reflétait pas
- ce à quoi on
- pouvait véritablement s'attendre. La confusion et la méfiance
- sous-jacentes ne
- faisaient pas de doute.
- 211. La loi est maintenant en vigueur depuis environ deux
- ans. Il existe
- encore des malentendus et des hésitations. Il convient de
- noter que, tout
- dernièrement, d'importantes modifications ont été apportées
- par une loi
- modificatrice de juin 1985. Cela souligne la nécessité de
- reprendre les
- consultations dans un esprit de coopération. Il est encore
- possible de déceler
- des divergences de vues sur la signification et l'intention de
- diverses
- dispositions de la loi no 59: on peut prévoir diverses difficultés
- d'ordre
- pratique et chacune des parties se préoccupe avant tout de la
- possibilité de
- réactions extrêmes de la part de l'autre. Le terrain, de ce fait,
- est
- certainement favorable à la consultation et il semble qu'il soit
- possible
- d'oeuvrer conjointement à éclaircir, uniformiser et définir plus
- nettement les
- règles et, ce faisant, de rétablir de meilleurs rapports de travail.
- 212. L'un des points les plus graves soulevés par le syndicat
- concerne la
- limitation apportée aux négociations collectives par les
- modifications de la
- définition de l'employé public. Deux éléments sont à distinguer.
- L'article 1
- b) xii) exclut de la définition cruciale de l'employé ceux qui
- travaillent
- dans le cadre d'un programme de création d'emploi. Il y a une
- certaine
- confusion dans les explications qui sont données de la portée
- exacte de cette
- disposition. Ce qui est clair, c'est qu'elle exclut des unités de
- négociation
- les travailleurs auxquels est offert un placement dans le cadre
- d'un programme
- de création d'emplois. Cela est compréhensible, étant donné
- que les
- principales conditions sont régies par les termes du
- programme. Toutefois,
- deux préoccupations demeurent. Le syndicat demande à avoir
- le droit d'être
- consulté dans le cas de ceux de ces travailleurs qui sont
- utilisés à des
- tâches au sein de l'unité de négociation ou à des tâches en
- rapport avec cette
- unité. Il semble également qu'il n'y ait aucune raison de ne pas
- admettre ces
- travailleurs en tant que membres versant des cotisations
- limitées ou
- théoriques afin que le syndicat puisse leur rendre des services
- autres que la
- négociation. La deuxième disposition qui suscite une objection
- concerne les
- employés du gouvernement chargés de l'élaboration ou de
- l'administration des
- politiques ou des programmes au sujet desquels la Commission
- des relations du
- travail doit statuer. Il a été admis que cette disposition
- consacrait la
- pratique suivie. Que les deux parties soient d'accord sur ce
- point et que,
- pourtant, le syndicat soupçonne que l'on voulait introduire un
- changement
- montre bien que l'entente fait défaut. Seul un dialogue franc et
- ouvert peut
- mettre fin à des malentendus aussi apparents.
- 213. Les modifications apportées par la loi no 59 à la notion
- d'employés
- publics exerçant des fonctions essentielles constituent un des
- problèmes
- complexes et essentiels de la plainte. Les unités de
- négociation concernées
- comprennent, par exemple, les hôpitaux ou les contrôleurs du
- trafic aérien.
- Bien qu'il y ait eu peu de grèves, le gouvernement a cherché à
- donner dans la
- loi une protection accrue aux services essentiels. Le syndicat,
- dans presque
- tous les cas, a offert un "personnel d'urgence". Le désaccord
- porte sur ce que
- devrait être la portée de cette expression, que résume bien
- l'utilisation de
- mots différents - "urgence" et "essentiel". Le processus de
- désignation d'une
- proportion de chaque unité de négociation comme étant
- essentielle a été
- paralysé. Les chiffres suggérés par le gouvernement ont été
- arrêtés en sachant
- que la Commission des relations professionnelles a le pouvoir
- de décision.
- Deux difficultés se posent. Le syndicat conteste certains des
- chiffres qui,
- semble-t-il, ont été fixés trop généreusement. Il craint que la
- Commission des
- relations du travail ne soit pas en mesure d'étudier la question
- avec rigueur,
- étant donné que la décision, qui peut affecter la sécurité et
- l'hygiène, est
- une lourde responsabilité. Ce problème ne devrait pas être trop
- difficile à
- résoudre.
- 214. L'effet que la désignation exercera vraisemblablement
- sur les grèves
- est beaucoup plus préoccupant et il convient de se rappeler
- que le droit de
- grève est une caractéristique importante des rapports
- examinés ici. Si plus de
- 50 pour cent du personnel d'une unité est désigné comme
- essentiel, alors le
- droit de grève est remplacé par l'arbitrage indépendant ayant
- force
- obligatoire. Ni le gouvernement ni le syndicat n'aiment pas
- beaucoup ce
- mécanisme. Néanmoins, il est certain que, si une importante
- proportion des
- travailleurs sont désignés en tant qu'employés exerçant des
- fonctions
- essentielles, alors l'arbitrage devient plus intéressant pour le
- syndicat
- qu'une grève sans vigueur. Comme pour bien des points de la
- plainte, ce
- problème exige une étude et un compromis. Si on ne relâche
- pas les règles, les
- secteurs où, disons, de 33 à 50 pour cent du personnel sont
- désignés comme
- essentiels se trouveront entre les deux systèmes et les droits
- syndicaux
- seront restreints de façon inacceptable. Un autre point qui a
- été soulev é est
- le rapport entre la désignation des travailleurs essentiels et le
- vote sur la
- grève. Là encore, les vues divergent sur la manière dont le
- système
- fonctionnera dans la pratique. Il semble y avoir une chance
- que la désignation
- d'une proportion du personnel en dehors du contexte d'une
- grève, c'est-à-dire
- en tant que procédure normale, et de personnes prises
- individuellement après
- le vote sur la grève pourrait contribuer à atténuer le problème.
- 215. La loi no 59 a traité de deux tactiques de grève. Toutes
- deux ont pour
- origine des cas isolés qui se sont produits dans le passé et les
- dispositions
- de la loi semblent ici encore avoir une certaine ambiguóté.
- L'interdiction de
- la grève pendant trente jours, lorsque la date indiquée est
- passée, et
- l'interdiction d'un nouveau préavis pourraient être utilisées pour
- retarder
- une grève en négociant à la dernière minute. Rien ne prouve
- que c'est là
- l'intention, et une simple modification ou même une simple
- lettre d'intention
- devraient faire disparaître une crainte qui est sincère. La
- disposition
- interdisant ce que l'on appelle les grèves tournantes semble
- être une
- ingérence dans le pouvoir qu'a le syndicat de déterminer sa
- tactique de grève.
- Là encore, la disposition suscite une crainte justifiée mais, s'il
- n'en est
- pas fait un mauvais usage, on ne peut pas dire qu'elle entrave
- sérieusement
- l'action de grève.
- 216. Il est manifeste que le gouvernement, voyant la pratique
- suivie par le
- passé, a décidé d'empêcher des pratiques dont il estimait
- qu'elles
- constituaient un abus du pouvoir syndical qui causaient des
- problèmes
- potentiellement difficiles dans des domaines essentiels du
- secteur public.
- Cela a entraîné une forte réaction et une dose encore plus
- forte de méfiance.
- Le syndicat a suggéré, par exemple, que des dispositions qui
- semblent, à
- première vue, consacrer une pratique utile et habituelle (telles
- que l'article
- 18 qui habilite le ministre à différer le processus réglementaire
- pour faire
- intervenir un conciliateur ou un médiateur) peuvent servir à
- différer ou à
- retarder le processus. C'est là un exemple éclatant de la
- nécessité de
- préciser les attitudes et les intentions. Avec un nombre
- relativement
- restreint d'accords ou de déclarations d'intention, d'un côté
- comme de
- l'autre, on réussirait à faire admettre que l'intention de la loi
- n'est pas
- d'utiliser éventuellement ces dispositions pour léser ou pour
- entraver
- l'exercice approprié du pouvoir syndical.
- 217. Le Comité de la liberté syndicale comprendra que les
- fins de la
- législation n'aient pas été éclaircies puisqu'on peut l'utiliser
- dans divers
- cas avec des résultats différents. Une seule interprétation
- limiterait
- sérieusement le droit de mener une grève efficacement en
- utilisant des
- critères normaux. Si cela doit être une possibilité, les
- fondements du système
- pourraient être en danger. Il convient de ne pas oublier ce
- qu'est la formule
- habituelle dans le secteur public: si le droit de grève est refusé,
- l'autre
- protection, dans ces cas spéciaux, est l'accès à l'arbitrage
- indépendant ayant
- force obligatoire. Lorsque le droit de grève existe mais est
- sérieusement
- entravé ou mis en danger, alors les travailleurs concernés ne
- sont pas
- efficacement protégés.
- 218. Il importe que la signification exacte et les utilisations
- possibles
- des dispositions de la loi no 59 soient éclaircies. Cela conduira,
- sans aucun
- doute, à des ajustements - il a été agréable d'apprendre que la
- loi de 1985
- avait déjà, quoique unilatéralement, entamé ce processus.
- Une fois que ce
- processus sera achevé, il sera indispensable d'examiner si le
- droit de grève,
- assorti de limitations raisonnables pour protéger la santé, le
- bien-être et la
- sécurité des personnes, existe. Dans les cas où ce droit
- n'existe pas, une
- autre forme de protection sera nécessaire.
- VII. Observations finales
- 219. Trois des plaintes résultent d'une réaction à des textes
- législatifs
- récemment promulgués dans l'Alberta (cas no 1247) - la loi no
- 44 -, dans
- l'Ontario (cas no 1172) - la loi no 179 - et à Terre-Neuve (cas
- no 1260) - la
- loi no 59. La quatrième, Alberta (cas no 1234), est une affaire
- beaucoup plus
- limitée. Bien que le système de relations professionnelles varie
- d'une
- province à l'autre, et même sensiblement à certains égards, et
- bien que les
- trois textes législatifs adoptent des approches différentes, il y a
- fondamentalement une grande similarité de principes et de
- buts. Il semble donc
- approprié, dans les présentes observations finales, d'attirer
- l'attention du
- Comité de la liberté syndicale sur les tendances profondes.
- 220. Les trois lois ont été promulguées du fait que le
- gouvernement devait
- lutter contre l'inflation. Toutes les trois s'appliquaient au
- secteur public,
- c'est-à-dire au personnel directement employé par le
- gouvernement, et à
- d'autres personnels employés par des organes indépendants
- largement
- tributaires des fonds publics. Cette attention portée au secteur
- public avait
- deux causes premières. Le gouvernement lui-même était
- l'employeur ou exerçait
- une forte influence sur l'employeur et on estimait que le
- contrôle du secteur
- public, d'une part, était nécessaire et, d'autre part, fixerait le
- niveau pour
- le secteur privé. Sur ce point, la plupart des interrogations
- ressortissent au
- débat économique. Ce qui préoccupait les syndicats et doit
- préoccuper le
- comité est le préjudice que cette législation a causé aux
- relations
- professionnelles, notamment, bien entendu, en violation des
- principes énoncés
- dans les conventions de l'OIT sur la liberté syndicale
- (c'est-à-dire les
- conventions nos 87, 98 et 151).
- 221. Plusieurs caractéristiques importantes méritent qu'on s'y
- arrête. Le
- système canadien de relations professionnelles a une structure
- qui, à première
- vue, reproduit celle qui a été mise au point aux Etats-Unis.
- Autrement dit, il
- est assez étroitement réglementé par la législation. Toutefois, il
- existe
- également une forte tradition de contacts informels grâce
- auxquels les parties
- ont pu conclure des accords volontaires et déterminer une
- partie non sans
- importance de leurs rapports. Il a été suggéré que ce
- processus consultatif a
- subi un préjudice. Il est certain que le recours à la législation a
- donné
- cette impression. Un problème important vient de ce que le
- gouvernement,
- lorsqu'il utilise la législation dans le secteur public, exerce
- simultanément
- deux fonctions. Il est le gouvernement démocratique qui agit
- pour protéger
- l'économie, mais il est aussi l'employeur qui modifie l'équilibre
- de ses
- rapports avec le syndicat. Cela ouvre largement la porte aux
- confusions, aux
- malentendus et à une grave altération des relations internes. Il
- est facile
- sur ce point de faire une erreur d'appréciation, car des
- relations normales
- continuent généralement à régner dans de nombreux
- domaines, mais la crainte et
- la méfiance étaient visibles dans chacune des trois provinces.
- On peut dire,
- ironiquement, que ce qui est le plus nécessaire est le
- rétablissement des
- processus normaux des relations professionnelles - la
- consultation, la
- conciliation et la compréhension mutuelle.
- 1. Lutte contre l'inflation
- 222. La lutte contre l'inflation est une tâche
- gouvernementale importante,
- mais il convient de faire une distinction entre les mesures à
- court terme
- visant à contrôler une situation et une structure de caractère
- plus permanent.
- On prend les mesures précitées parce qu'un problème
- particulier menace le
- système. Telle était la situation dans l'Alberta, où le
- ralentissement
- économique avait été brusque et grave. Elle se retrouvait,
- avec un peu moins
- d'intensité, dans l'Ontario et à Terre-Neuve, bien que les
- problèmes
- économiques de ces provinces soient évidents. Dans
- l'Ontario, la législation
- avait déjà cessé d'être en vigueur. Dans les trois provinces,
- toutefois, ce
- sont les effets durables de la législation ou, dans le cas de
- l'Ontario, des
- pratiques résultant de la période d'application de la loi qui
- doivent être
- mesurés.
- 223. Dans chaque cas, il y a eu, sans aucun doute, des
- effets durables. Il
- s'agit ou bien de modifications apportées à la structure des
- négociations
- collectives ou bien d'influences exercées sur le système
- indépendant de
- règlement des conflits qui est la sauvegarde prédominante
- dans l'Alberta et
- dans l'Ontario et qui joue un rôle réduit à Terre-Neuve. C'est
- l'évaluation de
- ce préjudice qui est essentielle dans ces cas.
- 2. Consultation
- 224. Bien que le système canadien des relations
- professionnelles applique
- des procédures de négociation réglementées par la loi,
- l'importance de la
- consultation demeure. Il en est particulièrement ainsi lorsqu'un
- gouvernement
- dépose un projet de loi pour modifier les règles applicables à
- ce système et
- pour changer la position relative des parties à la négociation.
- On a déjà fait
- observer que cette consultation est doublement importante
- lorsque le
- gouvernement cherche à modifier des structures de
- négociation dans lesquelles
- il agit effectivement ou indirectement en tant qu'employeur. On
- doit disposer
- de suffisamment de temps pour la consultation. Bien
- évidemment, celle-ci peut
- être limité par l'urgence des mesures à prendre pour faire face
- à des
- problèmes économiques. Son efficacité peut être diminuée du
- fait de l'attitude
- qu'adoptent les syndicats concernés. Mais il va de soi que les
- propositions
- devraient être franchement discutées, éclaircies, et les doutes,
- craintes et
- malentendus réglés avant que le texte législatif ne prenne sa
- forme
- définitive. Sinon, la méfiance grandit et l'attention est
- détournée vers de
- longues contestations judiciaires, souvent inopportunes.
- 225. Dans l'Alberta, le gouvernement a considéré que la
- rapide dégradation
- de la prospérité économique exigeait des mesures urgentes.
- La consultation
- semble s'être limitée à une présentation officielle d'opinions
- devant le corps
- législatif. Dans l'Ontario, il semble y avoir eu d'amples
- possibilités de
- consultation qui ne paraissent pas avoir été utilisées de façon
- constructive.
- A Terre-Neuve, il existe une longue et solide tradition de
- consultation qui
- constituait une caractéristique appréciée des relations
- professionnelles.
- Malheureusement, bien qu'il ait été procédé à des
- consultations, il semble y
- avoir eu rupture des relations habituelles, du moins
- temporairement.
- 3. Fonctionnaires - négociation et droit de grève
- 226. Dans la plupart des provinces canadiennes, mais non à
- Terre-Neuve, le
- droit de grève est refusé et l'accès à l'arbitrage indépendant
- ayant force
- obligatoire prend sa place. Cela n'arrive à Terre-Neuve que
- dans des
- situations très limitées. Pour garantir l'intégrité du système, il est
- essentiel que les procédures de négociation soient libres de
- toute entrave et
- qu'il existe un mécanisme authentiquement indépendant pour
- régler les conflits
- d'intérêts que la négociation ne résoud pas. La plupart des
- détails des
- plaintes, dans chacun des quatre cas, concernent un aspect
- ou un autre de cet
- équilibre crucial. Si l'équilibre est gravement atteint, mise à part
- l'intervention économique à court terme en période d'urgence,
- alors les
- principes de l'OIT en matière de liberté syndicale sont mis en
- cause.
- a) Négociation collective
- 227. Il n'est pas nécessaire d'attirer l'attention du comité sur
- chacune
- des plaintes qui concernaient des dispositions dont on estimait
- qu'elles
- jetaient à bas le juste équilibre des négociations collectives.
- De même, il
- suffit de souligner que les gouvernements estiment tous qu'il
- est devenu
- important, en période de crise économique, d'introduire dans le
- secteur public
- des facteurs de négociation correspondant aux sombres
- nouvelles qu'un
- employeur du secteur privé est en mesure d'apporter à la table
- de négociation
- lorsqu'il annonce que le profit diminue et que les carnets de
- commandes se
- dégarnissent.
- 228. Il suffit de donner divers exemples. Dans l'Alberta, un
- nombre
- appréciable de modifications du système de négociation ont
- été promulguées. A
- Terre-Neuve, la loi a introduit d'importantes limitations aux
- unités de
- négociation et à la participation des membres de ces unités
- aux grèves. Il
- n'est pas facile d'évaluer l'étendue du préjudice, mais les
- syndicats
- appellent l'attention sur des dispositions flexibles qui suscitent
- la crainte
- d'une perte d'efficacité.
- b) Système indépendant de règlement des conflits
- 229. Cet aspect est d'une importance vitale pour un système
- bien conçu.
- Toutes les provinces ont un conseil des relations
- professionnelles (ou
- commission des relations du travail) qui agit en toute
- indépendance en tant
- que régulateur et responsable des décisions au sein du
- système. Bien que
- quelques soupçons de partialité aient été mentionnés, il n'y a
- guère
- d'éléments concrets pour les étayer. La situation de l'arbitrage
- ayant force
- obligatoire est plus préoccupante. Détestée parfois par les
- deux parties, elle
- demeure la pierre angulaire de la structure de remplacement
- "pas de grèves -
- règlement indépendant des conflits".
- 230. Il est notoire que la profession d'arbitre est de courte
- durée et que
- les décisions des arbitres donnent souvent à l'une des parties
- l'impression,
- presque invariablement erronée, que l'arbitre n'est pas
- indépendant. Il est
- certain qu'en période de crise économique les pressions
- augmentent. Les
- gouvernements acceptent mal un système qui donne le
- contrôle des décisions
- financières à un tiers. Ils ont naturellement tendance à essayer
- d'influencer
- l'arbitre. Demander qu'il soit tenu compte de la situation
- économique semble
- être inévitable et raisonnable. Insister sur la conformité à une
- norme met fin
- à l'indépendance. Dans la pratique, la pression tend à se situer
- entre ces
- extrêmes. Il est essentiel que l'on prenne soin de protéger
- l'indépendance de
- l'arbitrage: le mode de nomination comme la durée du mandat
- des arbitres
- doivent être réglementés avec soin. Le système,
- inévitablement, et quelle que
- soit l'hésitation des parties, veut que l'on soit convaincu que
- les arbitres
- agissent équitablement et raisonnablement.
- 231. Enfin, il convient de souligner qu'un grand nombre des
- griefs qui ont
- donné lieu à ces plaintes pourraient être réglés, pas facilement
- il est vrai,
- par voie d'accords entre les gouvernements et les syndicats.
- Tant qu'elles ne
- le seront pas, on aura tendance à utiliser une législation, des
- pouvoirs et
- des pratiques qui portent préjudice à l'équilibre essentiel que
- consacrent les
- conventions de l'OIT. Il ne m'appartient pas de dire jusqu'à
- quel point cela
- s'est produit: les informations détaillées données ci-dessus
- constituent les
- matériaux sur la base desquels le Comité de la liberté syndicale
- arrive à ses
- décisions.
- 232. En concluant ce rapport, je désire exprimer au
- gouvernement du Canada
- et aux gouvernements des provinces de l'Alberta, de l'Ontario
- et de la
- Terre-Neuve ma sincère reconnaissance pour l'efficacité et la
- courtoisie dont
- a bénéficié ma mission et pour l'authentique esprit de
- coopération dans lequel
- les discussions avec les représentants des divers
- gouvernements se sont
- déroulées. Je désire également remercier le Congrès du travail
- du Canada, le
- Syndicat national du personnel des gouvernements
- provinciaux, la Fédération
- des enseignants du Canada et tous les syndicats provinciaux
- de fonctionnaires
- dont les représentants m'ont été du plus grand secours
- pendant toute la
- mission. Mes remerciements vont spécialement à Mme Lucille
- Caron, du ministère
- fédéral du Travail, à M. Brian Mallon, du Congrès du travail du
- Canada, et à
- M. Derek Fudge, du Syndicat national du personnel des
- gouvernements
- provinciaux, qui m'ont accompagné à divers stades de la
- mission et dont j'ai
- grandement apprécié l'aide précieuse qu'ils ont apportée pour
- les dispositions
- pratiques. Mes remerciements vont également à M. John R.W.
- Whitehouse,
- directeur du bureau de l'OIT à Ottawa qui, avec le concours
- efficace de ses
- collaborateurs, a facilité les arrangements d'ordre pratique.
- Enfin, je tiens
- à exprimer ma profonde gratitude à M. W.R. Simpson, chef du
- Service de la
- liberté syndicale du BIT et à Mme Jane Hodges, de ce service
- également, qui
- m'ont accompagné pendant ma mission au Canada. Leur
- maîtrise des principes de
- l'OIT, leur profonde compréhension des relations
- professionnelles, s'alliant à
- leur aptitude à travailler rapidement, ont été d'une importance
- capitale pour
- l'accomplissement de ma mission et l'achèvement du présent
- rapport.
- John Wood, LLM, CDE.
- ANNEXE
- Réunions à Ottawa (12-13 septembre 1985)
- M. M. Dorais, directeur général de la politique et des relations
- du ministère
- du Travail du Canada, avec Mme L. Caron, M. B. de Laat, M.
- A. Torobin, M. P.
- Sorokan, Mme C. Racine, Mme J. Godon, M. J. Lynch, M. P.
- Hewson et M. Beaupré
- Bérard du ministère fédéral; du ministère du Travail et du
- Département de
- l'éducation de l'Alberta, respectivement. M. A. Kennedy
- (sous-ministre adjoint
- du Travail) et Mme C. Mead; du ministère du Travail et du
- Trésor de l'Ontario,
- respectivement, Mme M. Kenny et Mme J. Bass; du ministère
- du Travail, du
- Conseil du Trésor et du Département de la justice de
- Terre-Neuve,
- respectivement, M. H. Noseworthy, M. L. Powell et Mme D.
- Fry. Du côté des
- syndicats, Mme S. Carr, secrétaire-trésorière du Congrès du
- travail du Canada
- (CTC), Mr. J. Fryer, président du Syndicat national du
- personnel des
- gouvernements provinciaux (NUPGE) et les représentants de
- leurs organisations
- affiliées, M. F. March, M. J. Shields, M. M. Hedley, M. A. Kube,
- M. D. Bean,
- M. D. Fudge, Mme L. Nicholson, Mme N. Riche et M. F.
- Moorgen. Des réunions ont
- également eu lieu avec les représentants de la Fédération des
- enseignants du
- Canada (FCE), à savoir le président M. F. Garrity, M. S.
- Mcdowell, M. R.
- Barkar, Mme E. McMurphy, M. D. Yorke et Mme S. Hanley.
- A Edmonton (16-17 septembre 1985)
- Le sous-ministre adjoint M. A. Kennedy, Mme C. Mead, M. R.
- Maybank, M. W.
- Sawadsky, M. P. Whittaker et Mme D. Gares; les
- représentants du Syndicat des
- salariés provinciaux de l'Alberta (AUPE), à savoir le Président
- M. J. Booth,
- M. T. Christian, M. G. Bourgeois, M. F. McRae, M. F.
- Moorgen, Mme M. Sykes, M.
- S. Nymchuk, Mme P. Wocknitz et Mme K. Lilly, ainsi que
- plusieurs autres
- témoins, notamment M. B. Olien, M. D. Andersen, M. W.
- Leeson, le professeur J.
- Robb et M. D. Werlin. Des réunions ont également eu lieu
- avec les
- représentants de la Confédération des associations des
- enseignants
- universitaires de l'Alberta: le professeur R. Heron, M. G. Unger,
- M. A.
- Mandelbaum et le professeur M. Sandilands.
- A Toronto (18-20 septembre 1985)
- M. D. Gilbert, directeur du Service des politiques et Mme J.
- Bass, Mme K.
- Boney, Mme M. Kenny, M. R. Peebles, M. Q. Silk et M. R.
- Huston; les
- représentants du Syndicat international des salariés des
- services (SISS), à
- savoir le président M. T. Roscoe, et M. J. van Beek, avec le
- conseiller
- juridique, M. J. Sack, M. S. Barrette et M. Pozkranzer; le
- Syndicat des
- salariés de la fonction publique de l'Ontario (OPSEU), à savoir
- le président,
- M. J. Clancy, M. C. Paliare, M. A. Todd, Mme J. Gates, Mme
- S. Vallence, M. J.
- Bernard, Mme R. Lees et M. R. Martin; le Syndicat canadien
- de la fonction
- publique (CUPE), à savoir le président, Mme L. Nicholson, M.
- L. Kovacsi, M. D.
- Macleod, M. G. Williams, M. D. Foley; ainsi que la Fédération
- des enseignants
- de l'Ontario, à savoir le président, M. G. Matte, Mme S.
- Hildreth, M. D.
- McAndless, M. K. Kennedy, M. M. Buchanan, Mme M. Wilson,
- M. M. Green, M. J.
- Carey et M. D. Halesworth.
- A Saint-Jean (23-24 septembre 1985)
- Le sous-ministre adjoint M. H. Nosewprthy, Mme D. Fry, M. L.
- Powell, M. A.
- Andrews et M. J. O'Neill; et les représentants de l'Association
- du personnel
- des services publics de Terre-Neuve (NAPE), à savoir le
- président, M. F.
- March, M. E. Seward, Mme M. Fleming, M. P. Ivany, M. E.
- Hogan, Mme E. Price,
- M. D. Curtis et M. D. Harnett.