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- 75. La plainte figure dans une communication de la Confédération nationale des syndicats de la profession médicale (CESM) du 23 mai 1983. La CESM a envoyé des informations complémentaires par des communications des 24 juin 1983 et 6 février 1984. Le gouvernement a répondu par une communication du 10 octobre 1983.
- 76. L'Espagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
A. Allégations du plaignant
- 77. La Confédération nationale des syndicats de la profession médicale (CESM) allègue que le 25 mars 1983, conformément aux, dispositions contenues dans la Constitution espagnole, dans la loi no 8/80 du 10 mars sur le statut des travailleurs, dans le décret-loi royal no 17/77 du 4 mars et dans le décret-loi royal no 156/79 du 2 février, le personnel médical de la sécurité sociale, des cliniques, \des hôpitaux provinciaux et des centres agréés, administrés et soutenus par la sécurité sociale dans tout l'Etat espagnol, a déclaré une grève pour les 19, 20, 21, 22, 26, 27, 28 et 29 avril 1983, après avoir satisfait à toutes les démarches relatives au préavis et à la notification prévues par les textes de loi susmentionnés. Ainsi, le 16 avril 1983, il a proposé d'assurer les prestations d'assistance minimales nécessaires pour garantir le fonctionnement des services médicaux durant la grève, compte tenu du caractère de service public " que revêtent les prestations médicales. En réponse, l'Institut national de la santé, instance administrative espagnole de tutelle du personnel convoqué à la grève, se référant à la législation en vigueur en Espagne en matière de grève (et en particulier à la sentence rendue par le tribunal constitutionnel le 8 avril 1981, qui est fondamentale pour définir le droit de grève et sa portée et pour interpréter l'article 28.2 de la Constitution espagnole de 1978), a renvoyé la CESM, par une communication du 18 avril 1983, au critère administratif en vertu duquel c'est l'autorité gouvernementale qui a compétence pour établir les services minima essentiels durant les grèves de médecins.
- 78. Par des notes en date du 18 avril 1983, adressées par la CESM à l'Institut national de la santé, et par une note de la même date adressée su gouverneur civil de Madrid par ladite -confédération, il était demandé à l'autorité gouvernementale de fixer effectivement les prestations d'assistance minimales nécessaires pour assurer le bon déroulement de la grève des médecins, compte tenu de leur droit de grève, mais également de leur obligation de veiller à la satisfaction du droit à la santé et à l'assistance sanitaire des citoyens usagers des services où la grève était déclarée.
- 79. Le plaignant indique que, malgré ce qui précède, la grève s'est déroulée sans que les négociations entre les parties concernées aient pu aboutir à un accord satisfaisant, et que, le 27 avril 1983, une nouvelle grève a été convoquée pour les 10, 12, 17 et 19 mai, après que les démarches établies par la législation en vigueur eurent été effectuées et sans que, dans ce cas non plus, l'autorité gouvernementale n'ait déterminé les prestations minimales ni l'effectif minimum de personnel nécessaire pour les assurer, malgré les requêtes présentées, comme précédemment, à l'administration responsable.
- 80. Cependant, ajoute la CESM, pour ce qui est de la province de Madrid, il a été transmis à un affilié en grève de la CESM, et non pas au comité de grève ni à aucun membre de l'organisation syndicale, une photocopie de la note adressée par le gouverneur civil de Madrid au directeur provincial de l'Institut national de la santé (INSALUD) de Madrid, dans laquelle étaient fixées les prestations minimales à assurer sur le plan tant opérationnel qu'organique, par les médecins affectés aux institutions ouvertes (ambulatoires) de l'INSALUD, en raison de la grève fixée. Sans préjudice de ce que les prestations minimales déterminées dans la note en question pouvaient porter atteinte à l'exercice du droit de grève en décidant que l'unité opérationnelle d'assistance en matière extra-hospitalière est constituée par chaque médecin et que tous les médecins sans exception des institutions ouvertes doivent assurer des services minima, il est certain que le fait de ne pas avoir communiqué officiellement la décision en question ni au comité de grève ni, individuellement, aux médecins convoqués à la grève constitue une limitation de fait de la grève, un manquement grave aux obligations de l'administration dans des situations conflictuelles de ce genre. Manquement qu'il faut considérer, en outre, comme intentionnel, étant donné qu'en fait il y a eu intervention de certains organes de direction de centres hospitaliers et ambulatoires. Contre toute régularité et selon le libre arbitre de chaque direction ou responsable des diverses unités, selon les localités et les provinces, des avis ont été apposés sur les tableaux d'affichage, fixant les services minima à assurer, différents selon le lieu où se trouvent les centres à l'intérieur de l'Etat et paraissant être davantage une manière de briser la grève qu'une mesure relevant de la responsabilité de l'administration relative à la fixation des prestations et des services minima à assurer durant la grève, valables pour tout le territoire espagnol.
- 81. La CESM signale, en ce qui concerne les institutions ouvertes (ambulatoires), que l'autorité gouvernementale a précisé, en particulier, les points suivants [le plaignant n'indique pas à quelle province s'applique les points en question]:
- "1. Prestations à domicile: il sera répondu à tous les appels à domicile.
- 2. Les directions des centres en question, en cas d'urgence, réquisitionneront au nom du présent gouvernement civil, de manière individuelle et par un document faisant foi, tous les employés des centres en question, désignés pour assurer les services minima requis par la présente décision et enverront copie de la réquisition au présent gouvernement civil."
- 82. Pour, ce qui est du premier point, poursuit le plaignant, il est évident qu'une telle obligation ne correspond pas à ce que l'on devrait entendre par services minima, étant donné que ces- services, comme il est de pratique courante, ne devraient s'entendre exclusivement que des services considérés comme urgents. En outre, il n'a pas non plus été procédé aux désignations qui auraient dû être normalement faites sur ordre du gouvernement civil lui-même, comme il est indiqué au paragraphe 2 ci-dessus, ce qui a incité les directions provinciales à considérer que les services minima devaient être assurés par absolument tous les médecins des services ambulatoires, exigeant leur présence et leur concours professionnel effectifs sur le lieu de travail.
- 83. Enfin, le plaignant indique que la législation espagnole du travail et la pratique en la matière ne prévoient aucune protection ni garantie appropriées, même pour les cas qui peuvent présente; une certaine restriction du droit de grève, comme par exemple dans celui des médecins. C'est ainsi qu'il n'existe aucune procédure de conciliation ni d'arbitrage appropriée, impartiale et rapide, à toutes les étapes de laquelle les parties intéressées pourraient participer, situation qui laisse les médecins des institutions sanitaires de la sécurité sociale absolument sans défense vis-à-vis de l'administration espagnole.
- 84. Dans sa communication du 6 février 1984, la CESM transmet une copie du jugement du Tribunal de Madrid (quatrième Chambre) du 23 novembre 1983 relatif au service minimum à maintenir pendant la grève convoquée par la CESM en avril 1983.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 85. Le gouvernement déclare que le 18 avril 1983 la Confédération nationale des syndicats de la profession médicale a demandé à l'autorité gouvernementale compétente de fixer les prestations d'assistance minimales à assurer en vue de la grève convoquée les 19, 20, 21, 22, 26, 27, 28 et 29 avril, ladite organisation plaignante déclarant qu'elle avait adressé à la direction provinciale de l'Institut national de la santé (INSALUD) une note détaillée sur les prestations minima à assurer. Or, ladite organisation n'a transmis à l'autorité gouvernementale (gouvernement civil) aucune proposition suffisamment détaillée concernant la détermination des services minima.
- 86. Le gouvernement ajoute que le gouvernement civil de Madrid, compte tenu• de l'impératif du temps et de l'urgence des mesures à prendre, est intervenu avant même que la grève ne se concrétise et durant son déroulement, non seulement en donnant des indications écrites, mais aussi en faisant des propositions verbales par l'intermédiaire de la direction provinciale de l'INSALUD, organisme technique compétent en la matière, qui avait, en outre, normalement déjà étudié quels devraient être les services minima nécessaires, en accord avec les directions des centres hospitaliers affectés par la grève et avec leurs comités de grève.
- 87. Par la suite, poursuit le gouvernement, le gouvernement civil a reçu des pétitions adressées par les directions de certains centres hospitaliers demandant l'instauration de services minima, et il est même arrivé que la direction provinciale d'INSALUD lui communique directement la pétition. Dans le premier cas, les pétitions présentées sous là forme indiquée ont fait l'objet d'un rapport et d'une proposition de la direction provinciale d'INSALUD. En bonne logique, les services minima ont été établis exclusivement dans les centres qui étaient sensiblement affectés par la grève. C'est pourquoi les décisions du gouvernement civil autorisant l'instauration de services minima ont été prises sur la base des propositions concrètes qui ont été présentées et de la répercussion effective de la grève sur les divers centres et, dans tous les cas, en contact direct avec la direction provinciale d'INSALUD. Le gouvernement a envoyé des photocopies des décisions en vertu desquelles les services minima ont été établis et, avant leur exécution, l'autorité gouvernementale en a rendu compte, dans tous les cas, à la direction provinciale d'INSALUD, à la direction provinciale du travail et aux directions et comités de grève des centres touchés par celle-ci, le gouvernement civil ayant exigé, selon le gouvernement, que ces comités soient tenus informés à tout moment.
- 88. Le gouvernement conclut en signalant que la conduite adoptée par l'autorité gouvernementale compétente a été dictée à tout moment par le souci d'assurer le fonctionnement des services médicaux essentiels dans des circonstances particulièrement graves, comme c'est le cas lorsqu'il s'agit d'assurer les prestations sanitaires auxquelles a droit tout citoyen, le cas échéant.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 89. Le comité observe que, dans la présente plainte, l'organisation plaignante a présenté une série d'allégations concernant la fixation du service minimum à assurer en raison des grèves fixées par le personnel médical en avril et mai 1983 et le fait que les comités de grève et les médecins convoqués à la grève n'ont pas été officiellement avisés de ce que devaient être ledit service.
- 90. En premier lieu, le comité tient à souligner que certaines allégations relatives à la fixation des services minima n'ont pas été formulées de façon suffisamment précise ou présentent des contradictions. Ainsi, bien que l'organisation plaignante ait allégué que certains organes de direction des centres hospitaliers et ambulatoires sont intervenus pour exiger des services minima différents selon les localités et les provinces, elle ne donne aucun exemple concret ni aucune précision supplémentaire à ce sujet.
- 91. L'organisation plaignante parait se contredire lorsqu'elle affirme d'abord que, pour les grèves qu'elle a convoquées, l'autorité gouvernementale n'a pas fixé les prestations minimales à assurer, indiquant ensuite quels étaient les services minima établis par l'autorité gouvernementale de Madrid (obligation faite à tous les médecins sans exception d'assurer des services minima) et signalant, enfin, que les services minima à assurer étaient différents selon les localités et les provinces.
- 92. Dans ces conditions, le comité se limitera à examiner le cas des services minima établis pour la province de Madrid et l'allégation relative au fait que le comité de grève et les médecins convoqués à cette grève n'ont pas été officiellement avisés de ce que devaient être les services en question.
- 93. Sur ce premier point, c'est-à-dire sur la décision du gouvernement selon laquelle, durant la grève du personnel médical, tous les médecins de toutes les institutions ouvertes devront accomplir un service minimum, le comité prend note de la décision du Tribunal de Madrid du 23 novembre 1983 qui déclare: "la non-conformité partielle, avec l'exercice du droit de grève reconnu dans la Constitution, des instructions de l'Institut national de la santé publique sur les tableaux d'affichage des institutions sanitaires ouvertes de Madrid (services ambulatoires) au motif que la grève avait été convoquée du 19 au 22 et du 26 au 29 avril 1983 en ce qui concerne l'exigence imposée à tous les médecins d'accomplir un service minimum en fonction du corps auquel ils appartiennent".
- 94. Quant à l'allégation selon laquelle les services minima à assurer n'ont pas été notifiés officiellement aux comités de grève ni aux médecins convoqués à la grève, le comité observe que le gouvernement a déclaré que, à tout moment, le gouvernement civil a exigé que !as comités de grève des centres affectés par celle-ci soient tenus informés de l'instauration des services minima. Cette affirmation se trouve confirmée par la communication du 9 mai 1983 adressée par le gouverneur civil au directeur provincial d'INSALUD, communication qui est adressée en annexe aussi bien par le gouvernement que par l'organisation plaignante. Toutefois, le comité ne dispose pas des éléments d'information qui lui permettraient de déterminer si le comité de grève a ou non été effectivement avisé de façon officielle. D'autre part, le comité observe, à propos de la grève de plusieurs jours en avril 1983, que la décision du Tribunal de Madrid du 23 novembre 1983 déclare: "la non-conformité, avec l'exercice du droit de grève reconnu dans la Constitution, des instructions de l'Institut national de la santé publique sur les tableaux d'affichage des institutions sanitaires ouvertes dans la mesure où ces instructions ont été rendues publiques à partir du 21 avril 1983 alors que la grève avait commencé le 19..."
- 95. Dans ces conditions, le comité exprime l'espoir qu'en cas de grève des médecins des institutions ouvertes (ambulatoires) les autorités tiendront pleinement compte de la décision du Tribunal de Madrid du 23 novembre 1983 à propos du service minimum à maintenir. Le. comité signale, d'une manière générale, l'importance d'assurer que les dispositions relatives au service minimum à appliquer en cas de grève dans un service essentiel soient déterminées avec clarté, appliquées strictement et connues en temps utile par les intéressés.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 96. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- Le comité exprime l'espoir qu'en cas de grève des médecins des institutions ouvertes (ambulatoires) les autorités tiendront pleinement compte des critères contenus dans la décision du Tribunal de Madrid du 23 novembre 1983 au sujet du service minimum à maintenir. Le comité signale, de manière générale, l'importance d'assurer que les dispositions sur le service minimum à accomplir en cas de grève dans un service essentiel soient déterminées avec clarté, appliquées strictement et connues en temps utile par les intéressés.