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- 347. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 22 septembre 1993. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 4 mai 1994.
- 348. La République dominicaine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
A. Allégations du plaignant
- 349. Dans sa communication du 22 septembre 1993, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) déclare que l'essor de l'activité syndicale dans les zones franches industrielles a entraîné la création de la Fédération nationale des travailleurs des zones franches en septembre 1992 et que, à ce jour, cette fédération compte 98 syndicats affiliés dans tout le territoire national. L'organisation plaignante allègue que ce mouvement syndical s'est heurté à une opposition très ferme des chefs d'entreprise, qui ont dressé des listes noires de dirigeants syndicaux licenciés afin d'empêcher qu'ils ne soient embauchés ailleurs. De même, l'organisation plaignante fait savoir qu'aucun des 98 syndicats constitués n'a pu conclure de convention collective, étant donné que les membres des comités exécutifs ont été licenciés, de même que tout travailleur qui exprime son désir de s'affilier à un syndicat.
- 350. L'organisation plaignante allègue que des mesures antisyndicales ont été prises dans les entreprises suivantes:
- - Woo-Chang et Bonaham Apparel (ville de Bonao): la totalité des membres des comités exécutifs ont été licenciés;
- - Big Bond Apparel (ville de Bonao): en juin 1992, tous les membres du comité exécutif ont été licenciés; la justice a condamné l'entreprise à payer une amende et à verser des indemnités aux dirigeants syndicaux;
- - Westinghouse (complexe industriel de Itabo): la totalité des membres du comité exécutif ont été licenciés;
- - Hotel Hamaca Beach Resort: le 22 août 1993, 31 travailleurs ont été licenciés parce qu'ils s'étaient syndiqués;
- - Entreprise Attwoods Dominicana S.A.: 26 travailleurs affiliés au syndicat ont été licenciés ainsi que la totalité des membres de son comité exécutif; le secrétaire général a été arrêté sous de fausses accusations par les services secrets de la police et détenu pendant sept jours, durant lesquels il a été battu.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 351. Pour ce qui est des allégations de violation de la liberté syndicale dans les diverses entreprises dans les zones franches, le gouvernement déclare que les autorités administratives ont pris acte de ces infractions et ont porté plainte contre les responsables des entreprises coupables devant la justice pénale. Plus concrètement, en ce qui concerne les entreprises mentionnées par l'organisation plaignante, le gouvernement indique les faits suivants: 1) entreprise Big Bond Apparel: un tribunal a condamné l'entreprise à payer des indemnités aux dirigeants syndicaux licenciés, mais celle-ci a interjeté appel; par ailleurs, le ministère du Travail a obtenu la suspension de la licence d'exportation de cette entreprise tant qu'elle ne respecte pas les droits syndicaux; 2) entreprise Westinghouse: quelques membres seulement du comité exécutif ont été licenciés avec l'autorisation du Tribunal du travail de San Cristóbal, au motif qu'ils avaient fait une grève illégale au cours de laquelle ils avaient commis des actes de violence contre les biens de l'entreprise (la documentation envoyée par le gouvernement fait état de 12 travailleurs licenciés pour avoir commis "des fautes dans l'exercice de leurs fonctions"); 3) entreprises Woo-Chang Dominicana et Bonaham Apparel: des actions en justice ont été intentées et les cas n'ont pas encore été jugés; 4) entreprises Hotel Hamaca Beach Resort et Attwoods Dominicana S.A.: le gouvernement déclare qu'elles ne se trouvent pas dans les zones franches et qu'en ce qui concerne l'Hotel Hamaca Beach Resort le ministère du Travail a intenté une action en justice, qui est encore en instance. Quant à la deuxième entreprise (Attwoods Dominicana S.A.), le ministère du Travail a pris acte de l'infraction dont il a saisi la justice pénale, et les travailleurs licenciés ont intenté des actions auprès des tribunaux du travail.
- 352. Enfin, le gouvernement fait savoir que, pour améliorer les relations professionnelles entre les employeurs et les travailleurs des zones franches, le gouvernement, l'Association dominicaine des zones franches et cinq des six centrales syndicales qui existent dans le pays ont conclu un accord tripartite aux termes duquel les parties acceptent de soumettre les conflits collectifs du travail à l'arbitrage du ministère du Travail et, en cas d'échec de ce dernier, au Conseil national des zones franches, qui a la faculté de suspendre ou d'annuler les licences d'exportation des entreprises de ces zones lorsqu'elles ne respectent pas la législation du travail.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 353. Le comité observe que les allégations concernent de nombreux licenciements de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, l'utilisation de listes noires dans les entreprises des zones franches, la détention d'un dirigeant syndical et d'autres mesures de discrimination antisyndicale. Le comité prend note des observations du gouvernement et des diverses mesures prises sur les plans judiciaire et administratif concernant les faits allégués, ainsi que de l'accord tripartite qui a été signé dans les zones franches. Cependant, vu le grand nombre de cas de discrimination antisyndicale allégués, le comité souhaite souligner en premier lieu l'importance qu'il accorde au principe selon lequel nul ne devrait être licencié ou faire l'objet de discrimination antisyndicale en raison de ses activités syndicales légitimes. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 538.)
- 354. S'agissant des allégations relatives aux licenciements antisyndicaux dans diverses entreprises (Woo-chang et Bonaham Apparel: licenciement des membres du comité exécutif; Hotel Hamaca Beach Resort: licenciement de 31 travailleurs affiliés au syndicat; Attwoods Dominicana S.A.: licenciement de 26 travailleurs affiliés au syndicat, dont la totalité des membres du comité exécutif; Big Bond Apparel: licenciement des membres du comité exécutif du syndicat), le comité note que le gouvernement déclare que certaines actions judiciaires intentées par les autorités du travail et que, dans le cas de Big Bond Apparel, le ministère du Travail a obtenu la suspension de la licence d'exportation de cette entreprise tant qu'elle ne respecte pas les droits syndicaux. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats des actions judiciaires intentées. Par ailleurs, puisque les autorités du travail ont reconnu la nature antisyndicale des licenciements en question en intentant ces actions, le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour obtenir la réintégration dans leur poste de travail de tous les dirigeants syndicaux et syndicalistes qui ont été licenciés à cause de leur appartenance à un syndicat ou de leurs activités syndicales. Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur, même si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 547.)
- 355. Pour ce qui est des allégations relatives au licenciement des membres du comité exécutif du syndicat de l'entreprise Westinghouse, le comité observe que le gouvernement déclare que quelques membres seulement ont été licenciés avec l'autorisation du Tribunal du travail de San Cristóbal, au motif qu'ils avaient fait une grève illégale et qu'ils s'étaient rendus coupables d'actes de violence à l'encontre des biens de l'entreprise. Cependant, observant que la documentation fournie par l'autorité judiciaire et envoyée en annexe par le gouvernement indique que le licenciement de 12 travailleurs est motivé par "des fautes commises dans l'exercice de leurs fonctions" et que, dans l'acte dressé par l'inspection du travail (également envoyé par le gouvernement), les intéressés ont nié avoir accompli des sabotages, le comité prie instamment le gouvernement de réexaminer la situation des dirigeants licenciés et à le tenir informé à cet égard.
- 356. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle le secrétaire général du syndicat de l'entreprise Attwoods Dominicana S.A. a été faussement accusé et détenu par les services secrets de la police pendant sept jours, au cours desquels il a été battu, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas communiqué d'observations. Il déplore profondément cette détention et les mauvais traitements qu'aurait subis ce dirigeant syndical. Le comité signale au gouvernement que l'arrestation et la détention de syndicalistes, sans que leur soit imputé un délit ou sans qu'il existe un mandat judiciaire, constituent une grave violation des droits syndicaux. (Voir 284e rapport, cas no 1642 (Pérou), paragr. 986.) Comme il l'a fait dans des cas semblables, le comité signale également à l'attention du gouvernement que "les gouvernements doivent donner les instructions nécessaires pour qu'aucun détenu ne fasse l'objet de mauvais traitements et imposer des sanctions efficaces dans les cas où de tels actes auraient été commis; de même le comité souligne l'importance qu'il convient d'attribuer au principe consacré par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques selon lequel toute personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine". (Voir 278e rapport du comité, cas no 1527 (Pérou), paragr. 238.)
- 357. Pour ce qui est de l'élaboration de listes noires, qui ont pour objet d'empêcher les dirigeants syndicaux licenciés de retrouver du travail dans une entreprise du secteur, le comité déplore que le gouvernement n'ait communiqué aucune observation, car il est impossible de savoir si cette initiative figure parmi les points que devra examiner l'autorité judiciaire dans le cadre des actions intentées contre diverses entreprises. Le comité signale à l'attention du gouvernement que "les pratiques de "listes noires" de dirigeants syndicaux mettent gravement en péril le libre exercice des droits syndicaux et que les gouvernements devraient prendre des mesures sévères à l'égard de telles pratiques". (Voir 177e rapport du comité, cas no 844 (El Salvador), paragr. 276.) Dans ces conditions, le comité demande qu'une enquête soit ouverte et, si elle confirme l'existence de ces listes, que des mesures nécessaires soient prises pour sanctionner les coupables et éviter la répétition de telles pratiques.
- 358. Le comité note avec intérêt la signature de l'accord tripartite dans les zones franches en matière de relations professionnelles. Il exprime l'espoir que cet accord ainsi que la législation en vigueur constitueront le cadre nécessaire pour qu'il soit mis fin aux actes de discrimination antisyndicale commis dans les zones franches et pour que s'instaurent des relations professionnelles saines grâce à la négociation collective. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que cet accord soit pleinement respecté.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 359. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des actions judiciaires intentées au sujet des dirigeants syndicaux et des syndicalistes qui ont été licenciés par les entreprises Woo-Chang, Bonaham Apparel, Hotel Hamaca Beach Resort, Attwoods Dominicana S.A. et Big Bond Apparel. De même, étant donné que les autorités du travail ont reconnu la nature antisyndicale de ces licenciements, le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour obtenir la réintégration dans leur poste de travail de tous les dirigeants syndicaux et syndicalistes licenciés au motif de leur affiliation syndicale ou de leurs activités syndicales.
- b) Attirant l'attention sur le fait que les listes noires constituent une grave menace contre le libre exercice des droits syndicaux, le comité demande au gouvernement d'ouvrir une enquête sur les entreprises mentionnées dans les allégations et, au cas où l'existence de ce type de listes serait confirmée, de prendre les mesures nécessaires pour sanctionner les coupables et éviter la répétition de ces pratiques.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement de réexaminer la situation des dirigeants syndicaux licenciés par l'entreprise Westinghouse et le prie de le tenir informé à cet égard.
- d) Le comité note avec intérêt la signature d'un accord tripartite dans les zones franches concernant les relations professionnelles. Il exprime l'espoir que cet accord ainsi que la législation en vigueur constitueront le cadre nécessaire pour qu'il soit mis un terme aux actes de discrimination antisyndicale commis dans les zones franches et pour que des relations professionnelles saines puissent s'instaurer grâce à la négociation collective. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que cet accord soit pleinement respecté.