386. Dans une communication en date du 27 mars 1995, le Congrès philippin des syndicats (TUCP) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement des Philippines. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à cette plainte dans une communication du 5 avril 1995.
- 386. Dans une communication en date du 27 mars 1995, le Congrès philippin des syndicats (TUCP) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement des Philippines. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à cette plainte dans une communication du 5 avril 1995.
- 387. Le gouvernement a fait part de ses observations dans une communication datée du 29 décembre 1995.
- 388. Les Philippines ont ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 389. Le Congrès philippin des syndicats (TUCP) indique qu'il dépose cette plainte au nom de l'Union des travailleurs (ALU) et de l'Union des employés, cadres et techniciens (APSOTEU), qui lui sont toutes les deux affiliées. Le TUCP allègue que le gouvernement a violé les conventions nos 87 et 98 comme suit.
- 390. Le TUCP explique que l'ALU et l'APSOTEU sont des organisations légitimes de travailleurs des Philippines dûment enregistrées auprès du Département du travail et de l'emploi. Ces deux organisations ont regroupé respectivement les travailleurs de la base et le personnel d'encadrement de la société Cebu Mitsumi, ce qui a permis la création de l'Union des travailleurs de Cebu Mitsumi (CMEU), syndicat local de ALU, et l'Union du personnel d'encadrement de Cebu Mitsumi (CMSEU), syndicat local de l'APSOTEU. Cebu Mitsumi est une entreprise de composants électroniques installée dans la ville de Danao (province de Cebu), qui occupe 8 000 travailleurs environ.
- 391. En février 1994, la CMEU a déposé une requête dans laquelle elle demandait l'organisation d'élections visant à lui permettre d'être homologuée par le bureau régional no 7 du Département du travail et de l'emploi de la ville de Cebu. Cette requête, exigée par le Code du travail philippin, a été signée par la quasi-totalité des travailleurs de la base de Cebu Mitsumi. Le TUCP allègue que, lorsqu'elle a eu connaissance de la requête du syndicat, la direction de l'entreprise a invité les travailleurs à participer à des réunions auxquelles assistaient également des membres du corps municipal Danao, sur instruction du maire Jesus Durano. Lors de ces réunions, des représentants de la direction et des responsables municipaux ont tenté de dissuader les travailleurs de s'affilier au syndicat.
- 392. Le TUCP allègue en outre que la municipalité de Danao ne veut d'aucun syndicat dans sa juridiction, et encore moins d'un syndicat ne pouvant être contrôlé par les autorités locales. Les activités syndicales sont interdites dans cette ville. C'est ainsi que, lorsque le gouvernement national a confié à une partie de la ville le statut de zone spéciale d'échanges (le TUCP joint à sa plainte des coupures de presse sur le sujet), le conseil municipal de Danao a voté une résolution faisant de Danao une ville sans syndicat et sans grève. L'ALU a demandé copie de cette résolution qui est considérée comme un document public, mais le conseil municipal n'a pas donné suite à sa demande jusqu'à présent. (Le TUCP joint également à sa plainte copie de la lettre adressée le 6 mars 1995 au maire adjoint de la ville de Danao par le responsable ALU de la région des Visayas centrales.) Le TUCP ajoute qu'aucun décret émanant d'un conseil municipal ou d'un haut fonctionnaire, ni même aucun accord antérieur ne peut interdire aux travailleurs de constituer des syndicats ou de faire grève. De son point de vue, le droit de s'organiser et le droit de grève sont des droits constitutionnels qui ne peuvent être violés par aucune loi ni aucun contrat.
- 393. Le TUCP affirme que le maire de la ville de Danao, Jesus Durano, a une perception différente du syndicalisme. Il a fait une déclaration publiée dans les journaux locaux, dans laquelle il indique que le syndicalisme peut à long terme freiner le développement économique en raison des grèves auxquelles les syndicats ont été associés (des coupures de presse locale reprenant cette déclaration sont annexées à la plainte). Par ce comportement, les autorités municipales de Danao ont aidé la direction de Cebu Mitsumi à priver les travailleurs de cette entreprise de leurs droits syndicaux. Ils ont harcelé les travailleurs syndiqués, et notamment les responsables syndicaux, et les ont menacés dans l'exercice de leur liberté syndicale et de leur droit d'organisation.
- 394. En outre, lorsque les autorités municipales de Danao et la direction de Cebu Mitsumi ont découvert que leur campagne antisyndicale échouait, elles se sont livrées à d'autres actes de harcèlement dont Ferdinand et Annabella Ulalan ont été les premières victimes. Ferdinand, qui assume les fonctions de président de la CMEU, et son épouse Annabella, elle-même responsable de la CMSEU, ont été arrêtés par la police de Danao qui n'avait ni mandat de perquisition ni mandat d'arrêt, au motif qu'ils étaient prétendument en possession d'une drogue interdite connue sous le nom de "shabu". Ils ont été détenus dans la prison de Danao et accusés par la suite d'avoir violé la loi nationale en matière de stupéfiants, chef d'accusation inventé de toutes pièces pour mettre un terme à leurs activités syndicales et décourager d'autres travailleurs de poursuivre ce type d'activité. Le TUCP souligne que, comme tous les autres travailleurs de Cebu Mitsumi, Ferdinand et Annabella ont été soumis à une fouille minutieuse de routine conduite par les gardes responsables de la sécurité le jour de leur arrestation avant de pénétrer dans les locaux de l'entreprise et de les quitter. Les responsables de la sécurité, Lizathiel L. Cola, Crisanta K. Batican et Reynaldo G. Manulat de l'Agence insulaire de sûreté et d'enquête, qui ont fouillé les travailleurs, et notamment le couple, ont certifié que Ferdinand et Annabella n'avaient sur eux aucune drogue interdite (le TUCP joint des coupures de presse à l'appui de cette déclaration). Le TUCP affirme que l'arrestation et la détention illégales de Ferdinand et d'Annabella Ulalan s'inscrivent dans le cadre d'une politique de harcèlement persistant à laquelle sont soumis les dirigeants et les membres du syndicat dans l'entreprise Cebu Mitsumi. Cette politique a été non seulement critiquée par les syndicats philippins, mais aussi par le mouvement syndical international. Des organes de communication tant locaux que nationaux ont condamné cette accusation montée de toutes pièces. Toutefois, le fait que cette arrestation ait été organisée pour décourager les activités syndicales dans l'entreprise Cebu Mitsumi n'a pas empêché qu'une enquête soit ouverte à l'échelle nationale.
- 395. Le TUCP indique que les officiers de police, responsables de l'arrestation et de la détention illégales de Ferdinand et d'Annabella Ulalan, ont été identifiés en les personnes de Gabriel Galon et de Trinidad Batucan. De l'avis du TUCP, ceux-ci n'ont pu agir de leur propre initiative; ils ont suivi les instructions de plus hauts responsables des autorités municipales de Danao, qui ressortissent à leur stratégie de harcèlement dirigée contre les travailleurs de Cebu Mitsumi. L'ALU et l'APSOTEU ont déposé plainte contre les officiers de police responsables qui ont, de ce fait, été suspendus pendant la durée de l'enquête. (Le TUCP renvoie à des coupures de presse relatant les incidents précités qu'il joint à sa plainte.)
- 396. Le TUCP affirme, en outre, que les harcèlements, menaces et manoeuvres d'intimidation dirigés contre les travailleurs de l'entreprise Cebu Mitsumi continueront jusqu'à ce que la municipalité de Danao soit parvenue à démanteler le syndicat, conformément à sa résolution de débarrasser la ville des syndicats. Il prétend que la situation dans l'entreprise de Cebu Mitsumi et l'adoption par le conseil municipal de Danao d'une résolution controversée visant à faire de Danao une ville sans grève et sans syndicat ne sont que quelques illustrations de la manière dont les autorités municipales locales abusent de leur pouvoir et de leur autorité. Cette tendance alarmante à dénier aux travailleurs des droits fondamentaux de l'homme et leurs droits syndicaux se dessine également dans d'autres régions du pays, et notamment dans celles auxquelles le gouvernement a conféré le statut de zones industrielles d'exportation. Le TUCP déclare qu'il a déjà appelé l'attention des représentants du gouvernement, et notamment du secrétaire au Travail et à l'Emploi et du secrétaire au Commerce et à l'Industrie, sur cet état de fait, mais que ces derniers semblent ne pas pouvoir ou vouloir y mettre un terme.
- 397. Le TUCP estime en conclusion que le fait de déclarer ouvertement, comme l'ont fait les autorités municipales de Danao, avoir adopté une résolution tendant à faire de Danao une ville sans syndicat et sans grève, constitue une violation directe non seulement des dispositions de la Constitution des Philippines, mais aussi des conventions nos 87 et 98 de l'OIT. Depuis que les Philippines ont ratifié ces deux conventions, il appartient au gouvernement de veiller à ce qu'elles soient effectivement respectées et appliquées à tous les échelons de la hiérarchie administrative au lieu de permettre à certains fonctionnaires de les bafouer.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 398. Dans sa communication datée du 29 décembre 1995, le gouvernement se réfère à la requête déposée par les travailleurs de l'entreprise Mitsumi en vue de la tenue d'élections d'homologation. Il souligne qu'à plusieurs reprises le Département du travail et de l'emploi s'est efforcé d'organiser des élections de ce type dans l'entreprise Mitsumi, mais que cela n'a pas été possible en raison des exigences de procédure et des événements relatés ci-après.
- 399. En premier lieu, l'élection a été reportée à la demande des deux parties, alors que le processus d'inclusion et d'exclusion se poursuivait, parce que la liste des candidats habilités à voter était incomplète. En outre, l'entreprise Mitsum a déposé une motion d'ajournement de l'élection, laquelle a été rejetée par le médiateur-arbitre. Le bureau du secrétaire au Travail et à l'Emploi a ensuite été saisi de ce rejet, conformément aux règles régissant la médiation et l'arbitrage, ce qui explique que l'élection n'ait pas eu lieu. L'entreprise Mitsumi a finalement introduit une requête visant à obtenir l'inclusion de près de 5 152 salariés dans la liste des votants agréés de l'entreprise. A ce jour, la sentence accordant à ces derniers salariés le droit de voter n'a pas été pleinement exécutée.
- 400. En ce qui concerne la prétendue ingérence du maire de Danao, Jesus Durano, dans l'affaire de l'entreprise Mitsumi, le gouvernement déclare qu'il a coordonné les opérations avec le Département responsable des affaires intérieures et de l'administration locale auquel les autorités locales et les municipalités sont directement subordonnées. A cet égard, le gouvernement fournit, à l'appui de ses observations, une copie de la lettre adressée par le maire Durano au Département responsable des affaires intérieures et de l'administration locale, qui contient ses commentaires sur la plainte.
- 401. Dans cette lettre, le maire, M. Durano, affirme que cela n'a été l'intention ni de la municipalité dans son ensemble ni de lui-même de s'immiscer, directement ou indirectement, dans les activités syndicales ni dans aucune affaire qui mettrait en cause les relations paritaires dans un établissement quelconque déployant ses activités dans le cadre de sa juridiction. Cette remarque vaut pour l'entreprise Cebu Mitsumi. La municipalité de Danao est consciente des droits que confère la Constitution à chaque travailleur comme, par exemple, le droit de s'organiser, de négocier et de participer à des négociations collectives. Il est par conséquent faux d'alléguer que la municipalité de Danao a, sur les prétendues instructions du maire, invité les travailleurs de Mitsumi à une réunion en vue de les dissuader de s'affilier au syndicat. Les membres du conseil municipal ne sont pas en mesure de savoir si un syndicat est déjà implanté dans un établissement donné, non seulement en raison du nombre d'établissements en activité dans la ville, mais aussi parce qu'il n'est pas dans leurs habitudes de s'occuper des affaires internes de ces établissements.
- 402. En outre, l'allégation selon laquelle le conseil municipal de Danao aurait adopté une résolution en vue de faire de Danao une ville sans syndicat et sans grève est absurde; aucune résolution ni aucun arrêté n'a été pris à cet effet. Cela serait contraire aux dispositions de la loi ainsi qu'à la Constitution des Philippines. La municipalité de Danao n'ignore pas la teneur de ces lois et les respecte.
- 403. En ce qui concerne le cas du président du syndicat et de son épouse, Ferdinand et Annabella Ulalan, il s'agit d'une affaire qui concerne la police et qui dépasse la compétence des autorités municipales. Il apparaît que ces personnes ont été appréhendées alors qu'elles étaient en possession d'une substance interdite connue sous le nom de "shabu" et qu'elles ont été, pour cette raison, détenues dans la prison de Danao. Bien qu'il n'appartienne pas à l'administration de formuler des observations quant au fond sur une affaire en cours d'instance, il apparaît clairement que les deux personnes précitées portaient sur elles une drogue interdite. Les officiers de police qui les ont arrêtées ne savaient même pas qu'elles étaient des responsables syndicaux au moment où elles furent arrêtées. Il n'existe, en tout état de cause, aucune loi qui exempte un responsable syndical de l'arrestation prévue en cas de délit de droit commun. Il appartient au premier chef à la police de préserver les intérêts de l'ensemble des habitants de Danao en faisant respecter la loi.
- 404. Enfin, la municipalité ne s'est pas livrée au harcèlement, menaces et manoeuvres d'intimidation allégués dans la plainte. Au contraire, ce sont les membres du conseil municipal de Danao et de la police qui ont fait l'objet de harcèlements réitérés sur les ondes (notamment de la part de la station DYLA, contrôlée et gérée par l'ALU et le TUCP) et dans la presse écrite, car l'ALU et le TUCP n'ont pas hésité dans leurs communiqués de presse à porter atteinte à l'honneur et à la réputation des fonctionnaires en se fondant sur de pures spéculations et conjectures. Il faudrait inviter l'ALU et le TUCP à ne plus se livrer à ces pratiques illégales pour ne pas envenimer la situation.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 405. Le comité note que les allégations formulées dans le cas présent font état de harcèlement et de manoeuvres d'intimidation de la part des autorités municipales et de la direction de l'entreprise Cebu Mitsumi, entreprise électronique installée à Danao, à l'encontre de membres d'un syndicat récemment créé sous le nom d'Union des travailleurs de Cebu Mitsumi (CMEU) qui est un syndicat local de l'Union des travailleurs (ALU), organisation elle-même affiliée au plaignant, le Congrès philippin des syndicats (TUCP). Ces diverses manoeuvres d'intimidation se seraient produites après que la CMEU ait déposé en février 1994 une requête en vue d'obtenir l'organisation d'élections d'accréditation, laquelle avait été signée par la presque totalité des travailleurs de l'entreprise Cebu Mitsumi. Les allégations font également état de l'arrestation et de la détention illégales de Ferdinand et d'Annabella Ulalan, respectivement président de la CMEU et responsable de la CMSEU.
- 406. Le comité prend acte des raisons invoquées par le gouvernement pour expliquer l'ajournement des élections d'accréditation dans l'entreprise Cebu Mitsumi, à savoir que l'entreprise avait déposé une motion d'ajournement en faisant valoir que la liste des candidats habilités à voter était incomplète. Le gouvernement indique en outre que cette motion a été rejetée par le médiateur-arbitre et que l'entreprise en a ensuite saisi le bureau du secrétaire au Travail et à l'Emploi qui l'a acceptée. Cela explique que l'élection n'ait pas eu lieu.
- 407. A cet égard, le comité a déjà déclaré à de précédentes occasions qu'il n'est pas nécessairement incompatible avec la convention no 98 de prévoir la délivrance d'un certificat au syndicat le plus représentatif dans une unité donnée pour le reconnaître comme l'agent exclusif des négociations au nom de cette unité, encore faut-il qu'un certain nombre de garanties soient assurées, parmi lesquelles figure l'octroi du certificat par un organisme indépendant. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 834.)
- 408. Dans le cas présent, le comité estime que la décision d'ajourner les élections en vue de l'accrédition ne devrait pas avoir été prise par le bureau du secrétaire au Travail et à l'Emploi, qui ne constitue pas à ses yeux un organe indépendant au sens évoqué plus haut. Cette constatation se trouve renforcée, à son avis, par la déclaration du plaignant (que le gouvernement ne réfute pas) selon laquelle la requête déposée en vue de la tenue d'élections a été signée par la presque totalité des travailleurs de l'entreprise Cebu Mitsumi et la demande d'ajournement de l'élection a été refusée par le médiateur-arbitre. En outre, la question de savoir quels sont les travailleurs qui avaient le droit de participer au vote n'a pas encore été résolue à ce jour, c'est-à-dire plus de deux ans après que la requête ait été déposée. Compte tenu des considérations qui précèdent, le comité souhaite demander instamment au gouvernement de prendre immédiatement les mesures appropriées en vue de faire en sorte que, dans un très proche avenir, les élections visant à désigner l'organisation la plus représentative soient organisées dans l'entreprise Cebu Mitsumi. Il lui demande également de l'informer de tout progrès intervenu à ce égard.
- 409. Le comité constate qu'il est fait état dans les informations fournies par l'organisation plaignante que le conseil municipal de Danao a, de fait, adopté une résolution qui proclame Danao ville sans syndicat, après que les autorités nationales eurent conféré à un quartier de Danao le statut de zone spéciale d'échanges.
- 410. Le comité note toutefois en outre que la municipalité de Danao nie catégoriquement l'allégation selon laquelle, après avoir eu connaissance de la requête du syndicat, des représentants de la direction et des membres du conseil municipal auraient invité des travailleurs à des réunions pour les dissuader de s'y affilier. Elle nie également avoir proféré des menaces ou s'être livrée à d'autres actes de harcèlement et manoeuvres d'intimidation à l'encontre des travailleurs, à partir du moment où la CMEU a déposé sa requête en vue d'obtenir la tenue des élections en février 1994. Les autorités municipales réfutent enfin l'allégation selon laquelle le conseil municipal de Danao aurait adopté une résolution en vue de faire de Danao une ville sans syndicat et sans grève lorsque les autorités nationales ont décidé de conférer à un quartier de la ville le statut de zone spéciale d'échanges. Le comité demande au gouvernement de confirmer les affirmations de la municipalité de Danao.
- 411. A cet égard, le comité rappelle de façon générale le principe selon lequel les travailleurs des zones franches d'exportation doivent jouir des droits syndicaux prévus par les conventions sur la liberté syndicale. Le comité insiste sur le fait que le harcèlement et les manoeuvres d'intimidation perpétrés à l'encontre de travailleurs au motif de leur affiliation syndicale ou de leur participation à des activités syndicales légitimes peuvent, bien qu'ils ne portent pas nécessairement préjudice aux travailleurs dans leur emploi, les décourager de s'affilier aux organisations de leur choix et, par là même, violer leur droit d'organisation. En conséquence, le comité invite le gouvernement à garantir qu'à l'avenir il ne soit pas recouru à de tels actes de harcèlement et manoeuvres d'intimidation à l'encontre des militants et des responsables de la CMEU, de manière que cette dernière puisse conduire librement ses activités syndicales légitimes. Le comité invite le gouvernement à le tenir informé des mesures concrètes qu'il prendra à cet effet.
- 412. Le comité note, en outre, que les autorités municipales de Danao maintiennent que le président de la CMEU, Ferdinand Ulalan, et son épouse Annabella ont été arrêtés et détenus parce qu'ils se trouvaient en possession d'une drogue interdite connue sous le nom de "shabu". Le comité relève néanmoins que le plaignant indique que les deux officiers de police responsables de l'arrestation, à savoir Gabriel Galon et Trinidad Batucan, ont été suspendus par le secrétaire aux Affaires intérieures et à l'Administration locale jusqu'à ce que l'enquête conduite par la police nationale des Philippines ait abouti. En outre, le bureau régional de la Commission pour les droits de l'homme (CHR 7) aurait de son côté ouvert une enquête sur la légalité de l'arrestation du couple. L'enquête menée par ce bureau se serait concentrée sur les machinations compromettantes, l'arrestation illégale, la détention arbitraire et les violations de la loi RA 7438 qui définit les droits de l'accusé lors de l'arrestation, de la détention et de l'enquête. Toujours selon le plaignant, les trois gardes chargés de la sécurité dans l'entreprise Cebu Mitsumi - à savoir Lizathiel L. Cola, Crisanta K. Batican et Reynaldo G. Manulat, tous trois employés de l'Agence insulaire de sûreté et d'enquête - ont fait sous serment une déposition écrite dans laquelle ils déclarent qu'aucun des travailleurs de l'entreprise, parmi ceux qui entraient ou sortaient, n'a été trouvé en possession d'une drogue interdite le 31 janvier 1995, c'est-à-dire lors de l'arrestation du couple Ulalan.
- 413. Le comité prend note avec une grande préoccupation des incidents précités qui, s'ils se trouvaient confirmés par les deux enquêtes, constitueraient une violation flagrante des droits syndicaux. Il tient à rappeler au gouvernement que l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constituent une grave violation des libertés publiques en général et des libertés syndicales en particulier. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 70 et 71.) Le comité espère vivement que les deux enquêtes qui ont été ouvertes, d'un côté par la police nationale des Philippines et de l'autre par le bureau régional de la Commission pour les droits de l'homme (CHR 7), détermineront les responsabilités de chacun et que les coupables seront punis. Il demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de ces enquêtes.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 414. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes.
- a) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement des mesures appropriées en vue de faire en sorte que des élections visant à désigner l'organisation la plus représentative aient lieu dans un très proche avenir dans l'entreprise Cebu Mitsumi. Il demande au gouvernement de le tenir informé de tout progrès intervenu à cet égard.
- b) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel les travailleurs des zones franches d'exportation devraient jouir des droits syndicaux prévus par les conventions sur la liberté syndicale.
- c) Le comité demande au gouvernement de confirmer les affirmations de la municipalité de Danao. Il invite le gouvernement à garantir qu'à l'avenir il ne soit pas recouru à des actes de harcèlement et à des manoeuvres d'intimidation à l'encontre des syndicalistes et des responsables syndicaux de l'Union du personnel de la Cebu Mitsumi (CMEU), qui pourraient les décourager de s'affilier au syndicat et de participer à ses activités. Il demande au gouvernement de le tenir informé des mesures concrètes prises à cet égard.
- d) Le comité rappelle au gouvernement que l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des raisons liées à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constituent une grave violation des libertés publiques en général et des libertés syndicales en particulier.
- e) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des enquêtes sur les officiers de police responsables de l'arrestation et de la détention des deux dirigeants syndicaux, Ferdinand et Annabella Ulalan, qui ont été ouvertes, respectivement, par la police nationale des Philippines et par le bureau régional de la Commission pour les droits de l'homme (CHR 7).