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- 959. Le Comité a examiné ce cas à sa session de mars 2002 et a présenté un rapport intérimaire. [Voir 327e rapport, paragr. 705 à 737, approuvé par le Conseil d’administration à sa 283e session (mars 2002).]
- 960. La Fédération nationale des fonctionnaires du Panama (FENASEP) a envoyé des informations complémentaires par communication du 31 mai 2002. Le gouvernement a répondu par une communication datée du 24 septembre 2002.
- 961. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 962. A sa session de mars 2002, le comité a formulé les conclusions et recommandations suivantes concernant les questions restées en suspens [voir 327e rapport, paragr. 732 à 736]:
- – Le comité note, en ce qui concerne la présente plainte, que l’organisation plaignante dénonce la destitution de 44 dirigeants syndicaux dans le cadre des destitutions massives opérées pour des raisons politico-partisanes et dont des milliers de fonctionnaires ont été victimes depuis l’entrée en fonctions du nouveau pouvoir exécutif (septembre 1999).
- – Le comité note que, selon le gouvernement: 1) le gouvernement sortant avait fait entrer de manière illégale dans la fonction administrative 5 634 fonctionnaires pendant la période de transition; 2) de ce fait, par l’adoption de la décision no 122 du 27 octobre 1999, le gouvernement a suspendu provisoirement l’accès à la fonction administrative et a donné ordre de procéder à des contrôles pour assainir le système. Une fois atteint cet objectif, la décision no 50 du 6 juillet 2001 a annulé la décision antérieure pour que les fonctionnaires remplissant les conditions minimales requises puissent être accrédités en tant que fonctionnaires de carrière administrative; 3) les personnes qui ont fait l’objet de mesures de destitution ou qui se sont vu retirer leur accréditation (c’est-à-dire retirer la possibilité d’intégrer la carrière administrative, tout en conservant leur emploi) ont disposé de recours et nombre d’entre elles ont obtenu gain de cause; 4) le gouvernement a dû prendre des mesures correctives pour s’assurer que les fonctionnaires accrédités remplissaient les conditions minimales requises par la loi (nombre d’années d’expérience, niveau d’instruction minimum, etc.), qui ont mis en évidence l’irrégularité d’une forte proportion des accréditations.
- – Prenant note des déclarations du gouvernement, le comité appelle néanmoins l’attention sur le risque qu’entraînent les mesures de destitution massive de fonctionnaires du point de vue de l’équité, et il regrette que 44 dirigeants syndicaux aient fait l’objet de telles mesures sans autre forme de procès, et ce contrairement à ce qui est prévu à l’article 118 du décret exécutif no 222 qui exige que la destitution soit justifiée par des motifs valables, qu’une procédure préliminaire soit respectée et qu’une enquête rapide soit menée avec possibilité de se défendre. Tenant compte des graves conséquences que ces décisions ont pour l’exercice des droits syndicaux, le comité invite le gouvernement à favoriser la réintégration de ces dirigeants dans leurs fonctions dans la mesure où ils remplissent les conditions légales d’accession à la fonction administrative, et à le tenir informé de l’état d’avancement des mesures entreprises depuis les destitutions.
- – Enfin, le comité prie le gouvernement de lui faire parvenir ses observations sur les allégations relatives à la plainte pénale déposée contre le dirigeant syndical M. Alberto Ibarra.
- B. Informations additionnelles de l’organisation plaignante
- 963. Dans sa communication du 31 mai 2002, l’organisation plaignante signale que, jusqu’en mai 1999, quelque 6 000 fonctionnaires avaient été accrédités. Au total, près de 2 500 fonctionnaires ont été exclus de la fonction administrative, dont près d’un millier ont été destitués. Entre septembre 1999 et mai 2002, plus de 19 000 fonctionnaires ont été destitués sans motif valable.
- 964. L’organisation plaignante indique que l’organe judiciaire retarde le plus possible les jugements en réintégration dans l’emploi et qu’il n’a prononcé que cinq ordonnances de réintégration sur les quelque 500 cas au total; il s’est prononcé à l’encontre des fonctionnaires et en faveur des institutions de l’Etat dans environ 250 cas au total.
- 965. L’organisation plaignante ajoute que la liste des dirigeants syndicaux destitués s’est allongée depuis le dépôt de la plainte auprès du comité (une liste de 16 noms est jointe en annexe).
- 966. Par ailleurs, la décision no 122 a été contestée au motif qu’elle était illégale et inconstitutionnelle. A l’issue du premier jugement, une déclaration d’incompétence a été prononcée car la décision no 122 a été abrogée par la décision no 50 du 6 juillet 2001. Il n’a pas encore été fait droit à l’action en inconstitutionnalité.
- 967. Aucun des 44 dirigeants syndicaux auxquels le comité fait référence dans ses recommandations n’a été réintégré dans son emploi.
- 968. Enfin, l’organisation plaignante relève que le gouvernement n’a pas répondu jusqu’à présent au sujet de la plainte pénale déposée contre le dirigeant M. Alberto Ibarra pour prétendue atteinte à l’honneur, conformément à la décision prise le 30 octobre 2001 par le onzième tribunal pénal du premier district judiciaire de Panama. Dans le cas présent, le manque d’indépendance de l’organe judiciaire est préoccupant, car il est de notoriété publique que cet organe dépend de l’organe exécutif.
- C. Réponse du gouvernement
- 969. Dans sa communication du 24 septembre 2002, le gouvernement rappelle que, dans sa réponse antérieure, il avait clairement expliqué les dispositions existantes en ce qui concerne la carrière administrative régie par la loi no 9 du 20 juin 1994 et le décret exécutif no 222 du 12 septembre 1997 portant approbation du règlement sur la carrière administrative en République du Panama. Dans sa réponse, le gouvernement a expliqué au comité la distinction juridique entre les notions de fonctionnaire titulaire et fonctionnaire nommé ou révoqué librement, en vertu de la loi no 9 précitée «portant création et réglementation de la carrière administrative». Ainsi, on entend: 1) par fonctionnaires titulaires «ceux qui, lors de l’entrée en vigueur de cette loi et de son règlement d’application, occupaient un poste dans les services publics, défini comme permanent, jusqu’à ce qu’ils acquièrent, conformément aux procédures établies, le statut de fonctionnaires de carrière administrative»; et 2) par fonctionnaires pouvant être nommés ou révoqués librement «ceux qui travaillent à des postes de secrétariat, de conseil, d’assistance ou de services directement pour le compte de fonctionnaires qui ne sont pas des fonctionnaires de carrière. Etant donné la nature de leurs fonctions, leur nomination dépend de la confiance de leurs supérieurs, qui peuvent les démettre de leurs fonctions s’ils venaient à perdre cette confiance.» Dans cette réponse, il a été signalé que toutes les mesures administratives ont été prises conformément à la procédure régulière et que les garanties constitutionnelles et légales des fonctionnaires visés ont été préservées.
- 970. En ce qui concerne les 44 personnes mentionnées par la FENASEP comme étant des dirigeants syndicaux, le gouvernement fait savoir qu’aucun des documents communiqués ne confirme leur statut de dirigeant. Cette situation contraste avec le fait que, en République du Panama, aucun syndicat ne compte autant de membres dans ses instances dirigeantes; l’information fournie dans le cadre de la plainte est par conséquent loin d’être exacte. Le ministère du Travail et du Développement social (MITRADEL) a procédé à des vérifications afin de déterminer: si les personnes visées par la plainte déposée par la FENASEP étaient protégées ou non par le système de carrière administrative; si, dans l’affirmative, ces personnes avaient rempli les conditions légales d’accession à la carrière administrative; et si, lorsque les mesures de destitution ont été prises, la procédure régulière avait été respectée. Il est ressorti des vérifications qu’aucune des 44 personnes présentées comme «dirigeants syndicaux» du service public n’avait intégré légalement la carrière administrative. Par ailleurs, il a été constaté de façon probante que toutes les mesures administratives prises à l’encontre des 44 personnes ont été conformes à la procédure régulière. La plupart des intéressés, faisant usage de leur droit de défense, ont déposé des recours en révision assortis de demandes d’indemnité sur lesquels il a été statué conformément à la loi. Dans une longue communication, le gouvernement expose en détail le cas de chacune de ces 44 personnes et les différentes décisions prises à leur égard ainsi que les différents recours administratifs auxquels il a été procédé.
- 971. Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement souligne que, la République du Panama ayant appliqué la législation, elle ne peut légalement réintégrer aucune des 44 personnes faisant l’objet de la plainte de la FENASEP.
- 972. Pour ce qui est des allégations relatives à la plainte pénale déposée contre le dirigeant syndical M. Alberto Ibarra, le gouvernement déclare que, après avoir été destitué en raison d’une absence prolongée et injustifiée à son travail et sa destitution ayant été confirmée dans le cadre d’un recours où toutes les garanties d’une procédure administrative régulière ont été observées, M. Alberto Ibarra Mina a fait des déclarations publiques dans lesquelles il a critiqué la gestion de l’Institut national de la culture (INAC), portant atteinte en particulier à l’honneur, à la dignité, à la probité, au respect et à la réputation de certains fonctionnaires. En conséquence, les personnes offensées ont déposé des plaintes pénales contre Alberto Ibarra pour atteinte à l’honneur, à savoir Hugo Eliécer Bonilla (Direction des affaires juridiques), José Angel Samaniego Amaya (Département de la trésorerie) et Edwin Cedeño (Direction nationale des arts). Lors de l’audience publique tenue par le septième bureau de district des services du Procureur général de la nation, on a demandé le renvoi devant la juridiction de jugement de M. Alberto Ibarra Mina, qui aurait enfreint les règles contenues dans le chapitre premier, titre III, du livre deuxième du Code pénal portant sur les atteintes à l’honneur, conformément aux dispositions de l’article 2222 du Code de procédure judiciaire. Le onzième juge pénal du premier district judiciaire de Panama, qui s’occupe de cette affaire, a poursuivi M. Alberto Ibarra au pénal pour avoir enfreint les règles contenues dans le chapitre premier, titre III, du livre deuxième du Code pénal. A la suite de l’audience préliminaire, le juge a estimé qu’il y avait suffisamment d’éléments justifiant le renvoi du prévenu devant une juridiction de jugement et l’audience a été fixée au mois d’avril 2003.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité- 973. En ce qui concerne les allégations de destitution de 44 dirigeants syndicaux, le comité note que, d’après les nouvelles allégations de l’organisation plaignante, 16 destitutions supplémentaires de dirigeants syndicaux ont eu lieu. Il prend note des déclarations du gouvernement au sujet de la destitution de 44 dirigeants syndicaux et, en particulier, du fait: 1) que le nombre de 44 s’éloigne de la réalité et que l’organisation plaignante n’a pas confirmé leur statut de dirigeant; 2) que les personnes en question n’avaient pas intégré légalement la fonction administrative; 3) que les destitutions ont été conformes à la procédure régulière et que la plupart des intéressés ont déposé des recours en révision avec demandes d’indemnité sur lesquels il a été statué; 4) que, la législation ayant été appliquée, les autorités ne peuvent légalement réintégrer aucune de ces 44 personnes dans leur emploi. Le comité note également que, selon l’organisation plaignante, les autorités judiciaires n’ont statué que dans 250 cas (sur un total de 500 cas dans lesquels des demandes en réintégration ont été introduites).
- 974. Le comité souhaite se référer, en ce qui concerne le présent cas, à ses conclusions antérieures au sujet des allégations de destitution de dirigeants syndicaux dans le cadre des destitutions massives de fonctionnaires opérées pour des raisons politico-partisanes, dont des milliers de fonctionnaires ont été victimes depuis l’entrée en fonctions du nouveau pouvoir exécutif (septembre 1999). Le comité a appelé l’attention sur le risque qu’entraînent les mesures de destitution massive de fonctionnaires du point de vue de l’équité [voir 327e rapport, paragr. 734] et a axé ses recommandations sur 44 dirigeants syndicaux. Le comité note que, dans sa réponse, le gouvernement affirme que les 44 dirigeants ont bénéficié d’une procédure administrative régulière, que l’organisation plaignante a indiqué que les procédures judiciaires relatives à quelque 250 fonctionnaires n’ont pas abouti et que 16 dirigeants syndicaux supplémentaires ont été destitués. Le gouvernement nie, contrairement aux affirmations de l’organisation plaignante, qu’un grand nombre des 44 personnes en question assument les fonctions de dirigeant syndical, et il n’a pas indiqué s’il existait des recours judiciaires en la matière. De son côté, le comité ne peut exclure le fait que la totalité ou une partie des destitutions soit liée à l’exercice des droits syndicaux, même si elles s’inscrivent dans le cadre des destitutions massives de fonctionnaires.
- 975. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement d’examiner la possibilité d’offrir un nouvel emploi aux dirigeants syndicaux destitués. Le gouvernement et l’organisation plaignante n’étant pas d’accord sur le statut de dirigeant syndical des 60 personnes destituées (44 dans un premier temps et 16 ultérieurement), le comité souligne qu’il incombe à l’organisation plaignante d’attester, lors de ces négociations, que ces personnes ont le statut de dirigeant syndical. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 976. Enfin, en ce qui concerne la procédure pénale intentée contre le dirigeant syndical M. Alberto Ibarra pour atteinte à l’honneur (art. 2222 du Code de procédure judiciaire) de trois fonctionnaires de l’INAC, le comité prend note du renvoi de M. Ibarra devant la juridiction de jugement et du fait que l’audience aura lieu en avril 2003. Le comité demande au gouvernement de lui communiquer le texte du jugement.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 977. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration a approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement d’examiner la possibilité d’offrir un nouvel emploi aux dirigeants syndicaux destitués, étant entendu qu’il incombe à l’organisation plaignante de démontrer que les 60 personnes visées ont le statut de dirigeant syndical. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- b) Le comité demande au gouvernement de lui communiquer le texte du jugement qui sera prononcé lors de la procédure pénale intentée contre le dirigeant syndical M. Alberto Ibarra pour atteinte à l’honneur.