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Interim Report - Report No 331, June 2003

Case No 2231 (Costa Rica) - Complaint date: 08-NOV-02 - Closed

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  1. 357. La plainte figure dans une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) datée du 8 novembre 2002. La Confédération mondiale du travail (CMT) a soutenu la plainte par communication du 13 décembre 2002.
  2. 358. Le gouvernement a envoyé ses observations par communication du 17 février 2003.
  3. 359. Le Costa Rica a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 360. Dans sa communication du 8 novembre 2002, la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) fait état d’une violation des droits syndicaux dans l’entreprise avicole PROPOKODUSA où un groupe de travailleurs a été licencié pour avoir formé un syndicat (constitué le 16 juin 2002 par 21 travailleurs): le Syndicat des travailleurs de l’industrie avicole et des métiers connexes (SINTRAINAVI). Ce syndicat a respecté toutes les conditions requises par la loi et est affilié à la Centrale des travailleurs du Costa Rica (CMTC). La CMTC a tenté d’instaurer un dialogue entre l’entreprise et le syndicat afin qu’il soit reconnu et ces travailleurs réintégrés à leurs postes de travail, mais n’a pu y parvenir. La CLAT joint différents documents et informations sur ces licenciements qui peuvent être résumés de la manière suivante.
  2. 361. Le 16 juin 2002, les travailleurs de cette entreprise formaient le syndicat SINTRAINAVI. La réponse de l’entreprise ne s’est pas fait attendre et, le 25 juillet, les travailleurs ont été pris au dépourvu par le patronat, quand ils ont été convoqués par petits groupes pour accepter des conditions de travail unilatérales sous couvert d’un prétendu processus de restructuration dont ils n’avaient pas eu connaissance auparavant. Les travailleurs qui n’acceptaient pas les nouvelles conditions unilatérales, non seulement infernales, mais en plus imposées sans qu’ils aient le temps de les examiner, recevaient immédiatement leur lettre de licenciement; les travailleurs ont été informés que ceux qui n’avaient pas retiré cette lettre étaient attendus pour que les représentants patronaux la leur remettent en présence de témoins.
  3. 362. La centrale syndicale à laquelle est affilié le syndicat SINTRAINAVI (CMTC) a déposé une plainte pour violation de la liberté d’organisation syndicale devant le ministère du Travail le 10 septembre 2002. Depuis la constitution du syndicat (le 16 juin 2002), les travailleurs sont menacés de licenciements et de changements dans leurs horaires, ainsi que dans le mode de rémunération; le 21 juillet, le syndicat a demandé une réunion, l’entreprise a répondu le 24 juillet, demandant à être informée de l’ordre du jour et, le 25 juillet, les membres du syndicat ont été injustement pris au dépourvu quand des représentants de l’entreprise les ont appelés par petits groupes et leur ont proposé deux options: soit ils acceptaient les nouvelles conditions nettement préjudiciables aux intérêts économiques des travailleurs, soit ils devaient signer une lettre de démission avec responsabilité patronale et exigence d’un mois de préavis; les travailleurs ont refusé de signer. Le 26 juillet, la CMTC a demandé une réunion urgente du ministère du Travail pour que l’entreprise reconsidère les licenciements et qu’elle satisfasse d’abord la demande de réunion du syndicat. Le 29 juillet, les membres du syndicat licenciés et les membres du conseil de direction ont reçu le chèque correspondant aux indemnités légales et se sont vu interdire l’entrée au lieu de travail, ce qui contrevenait au délai légal de préavis d’un mois. Le 5 août, après une réunion avec des représentants du syndicat et du ministère, l’entreprise a manifesté sa décision de maintenir les licenciements.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 363. Dans sa communication datée du 17 février 2003, le gouvernement déclare que le ministère du Travail a d’abord reçu une plainte de la Confédération costa-ricienne des travailleurs démocrates Rerum Novarum (le 5 septembre 2002) puis une autre émanant de la Centrale des travailleurs du Costa Rica (CMTC) (le 24 septembre 2002), contre l’entreprise PROPOKODUSA S.A. pour harcèlement antisyndical et pratiques déloyales en matière de travail. Le ministère a demandé aux travailleurs de SINTRAINAVI leurs cartes d’adhérents et la preuve de la personnalité juridique de ce syndicat. La question s’est posée aussi de savoir laquelle des deux centrales avait qualité pour représenter le syndicat; la Confédération Rerum Novarum s’est désistée de sa plainte par la suite.
  2. 364. Le rapport du directeur régional compétent de la Direction générale du travail, daté du 9 décembre 2002, signale que la CMTC s’est bornée à fournir l’information sur les huit membres du conseil de direction du syndicat sans indiquer, entre autres, jusqu’à quel point ils avaient été affectés par les actions prétendument irrégulières de l’entreprise, et quels étaient les autres membres du syndicat affectés, information qui n’a pas encore été fournie par les syndicats plaignants, bien que cela leur ait été demandé à plusieurs reprises. Indépendamment de la plainte déposée par la CMTC pour harcèlement antisyndical et pratiques déloyales en matière de travail, les inspecteurs du travail ont fait, le 8 octobre 2002, une visite d’inspection dans la société PROPOKODUSA, et les infractions suivantes ont été constatées: horaires anormaux, horaires interdits, repos minimal obligatoire et salaire minimum, entre autres. En outre, selon les déclarations des travailleurs, à la question de savoir qui était affilié à un syndicat, aucun d’entre eux n’a répondu affirmativement à ce moment-là. Le rapport du directeur régional indique que, dans l’impossibilité de poursuivre cette enquête, l’information requise par la loi (de la part de l’organisation plaignante) faisant défaut, la décision d’archiver ce cas pour manque d’intérêt de la partie plaignante sera prononcée dans les jours qui suivent.
  3. 365. Le gouvernement signale que le 26 juillet 2002, par ordre du ministre du Travail, deux inspecteurs du travail ainsi que le Directeur général des questions de travail se sont présentés à l’entreprise, afin de prendre connaissance de la plainte initiale déposée par la Centrale du mouvement des travailleurs du Costa Rica (CMTC) au sujet du licenciement de membres du Syndicat de travailleurs de l’industrie avicole et des métiers connexes (SINTRAINAVI), et d’y donner suite. A cette occasion, ils ont discuté séparément avec les représentants syndicaux et ils ont effectué les premières démarches en vue d’une réunion de conciliation. Ils se sont de nouveau présentés le 29 juillet 2002, et ont encouragé une réunion de conciliation entre l’organisation syndicale et l’entreprise. A cette date, les licenciements de 37 travailleurs était effective, et ils ont perçu leurs indemnités de départ au titre de la liquidation des droits. Une patrouille policière a été observée à l’entrée des installations. Le 1er août 2002, en présence du vice-ministre du Travail et du Directeur général des questions de travail, a eu lieu une réunion de conciliation, convoquée par les services du vice-ministre, dans le but de rechercher une solution au différend entre le syndicat et l’entreprise. Au cours de cette réunion, les parties ont réitéré leurs positions:
    • – Entreprise PROPOKODUSA: depuis le 20 mars 2002, les 82 travailleurs de l’usine de transformation avaient été prévenus d’une restructuration que devait engager l’entreprise, et qui consistait à payer à l’heure au lieu de payer à la pièce (par poulet transformé), comme c’était le cas jusque-là, et à travailler seulement huit heures, en accord avec la législation du travail. Le 12 juillet 2002, ces travailleurs ont reçu des documents du service du personnel indiquant les modifications signalées: celui qui n’accepterait pas les changements serait licencié, avec paiement de toutes les indemnités légales. Le 25 juillet 2002, ils ont été sommés de prendre une décision; ils sont donc passés par groupes de 20 personnes au bureau administratif, et ceux qui n’acceptaient pas les nouvelles conditions se voyaient licenciés. L’entreprise continue à affirmer que le syndicat s’est formé pendant le processus de restructuration, sans qu’elle ait eu connaissance du nom des affiliés, par contre elle connaissait celui des dirigeants. De toute façon, tous les travailleurs ont eu l’option de continuer à travailler, et si les dirigeants syndicaux ont refusé d’accepter les nouvelles conditions, personne ne les y obligeait. Des 82 travailleurs affectés par la réorganisation (nombre différent du total des travailleurs), 37 n’ont pas accepté les nouvelles conditions et c’est pourquoi ils ont reçu la lettre de licenciement, avec responsabilité patronale. L’entreprise ne sait pas si des membres du syndicat ont été licenciés, du fait qu’elle ne connaissait pas leurs noms.
    • – Centrale des travailleurs du Costa Rica: dans l’entreprise, il y a un conflit de travail suite au licenciement du conseil de direction d’un syndicat formé le 16 juin 2002, et leur réintégration est demandée. Le 26 juillet 2002, l’organisation syndicale a présenté un agenda à l’entreprise pour instaurer un dialogue portant surtout, entre autres, sur le fait que le travailleur n’avait que cinq minutes pour décider d’accepter les nouvelles conditions de travail ou être licencié. L’organisation de travailleurs demande: un réengagement, la reconnaissance du syndicat et la mise en place de négociations. La possibilité de nouvelles réunions entre les parties, avec la médiation du ministère du Travail a été écartée du fait que l’entreprise a communiqué par téléphone au vice-président son refus de considérer les points proposés à l’ordre du jour par l’organisation syndicale.
  4. 366. Dans sa communication du 13 décembre 2002, le Directeur national et inspecteur général du Travail demande au ministère du Travail de poursuivre l’enquête sur ce cas.
  5. 367. Le gouvernement fait parvenir une communication de l’entreprise au sujet de la plainte, dans laquelle il souligne les points suivants: 1) depuis janvier 2002, l’entreprise, en pleine expansion, a engagé de nouveaux travailleurs (avec un nouveau régime d’horaires et un nouveau mode de paiement) et elle a dû se restructurer; 2) depuis ce mois-là, et en pleine transparence, l’entreprise en a informé les travailleurs au cours de plusieurs réunions, et leur a annoncé qu’il y aurait des changements (organisation de la journée de travail et une autre façon de comptabiliser les salaires – en augmentation, en particulier afin de s’ajuster aux conditions de travail des nouveaux travailleurs qui avaient été engagés en raison de l’expansion de l’activité de l’entreprise); 3) en plein processus de restructuration, 21 des 140 travailleurs de l’entreprise ont constitué un syndicat; 4) la date limite pour accepter la restructuration et les nouvelles conditions était le 25 juillet 2002, l’entreprise avait indiqué que celui qui n’accepterait pas serait licencié, même si l’entreprise désirait que tous acceptent; 5) nombre de ceux qui appartenaient au syndicat ont accepté les nouvelles conditions, d’autres non, mais par la suite ils ont changé d’avis et, dans ce cas, l’ordre de licenciement a été annulé; 6) aucun des membres du conseil de direction du syndicat n’a accepté la restructuration, ils ont donc été licenciés et ont perçu toutes les indemnités auxquelles ils avaient droit; 7) l’entreprise s’est conformée aux normes légales et il n’y a pas de procès engagé contre elle à ce sujet; 8) la restructuration n’a pas eu d’objectif antisyndical mais économique; et 9) les postes vacants ont déjà été pourvus.
  6. 368. Selon les documents syndicaux envoyés par le gouvernement, la constitution du syndicat a été notifiée au ministère du Travail le 27 juin 2002 et à l’entreprise le 15 juillet 2002. Selon une communication de l’entreprise fournie par le gouvernement, 37 travailleurs qui ont fait leur choix dans l’alternative présentée par l’entreprise et due à sa restructuration (offre de meilleures conditions de travail ou versement de départ au titre de la liquidation des droits) sont partis de l’entreprise.
  7. 369. Voici le modèle de lettre d’acceptation de la restructuration:
    • M. (Mme) soussigné(e) …………………………… communique par la présente ce qui suit:
  8. 1. J’accepte la nouvelle restructuration de l’entreprise.
  9. 2. J’accepte le nouveau mode de paiement pour mon travail qui sera de 400 colones l’heure à partir du 5 août 2002.
  10. 3. J’accepte le nouvel horaire de travail qui sera de 48 heures par semaine à partir du 5 août 2002.
  11. 4. En conséquence, à partir du 5 août 2002, je cesserai de travailler dans les conditions antérieures pour travailler dans les nouvelles conditions établies dans les points 2 et 3 de cette lettre.
  12. 5. Ainsi je reste comme travailleur dans l’entreprise et je garde mon ancienneté.
    • Signature du (de la) travailleur(se).

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 370. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue le licenciement avec responsabilité patronale (c’est-à-dire avec paiement des indemnisations légales prévues dans la législation pour licenciement injustifié) d’un groupe de travailleurs de l’entreprise PROPODOKUSA (37 selon les informations fournies par le gouvernement et par l’entreprise) parmi lesquels figurent les huit membres du conseil de direction du syndicat SINTRAINAVI, suite à la constitution de ce syndicat, licenciements intervenus par surprise le 25 juillet 2002, quand les travailleurs en question ont refusé les nouvelles conditions de travail unilatérales présentées par l’entreprise qui a invoqué un prétendu processus de restructuration inconnu jusqu’alors.
  2. 371. Le comité observe que l’entreprise soutient pour sa part que le licenciement n’a pas d’objectifs antisyndicaux mais économiques, que le processus de restructuration était connu des travailleurs depuis le début de l’année 2002, que des réunions avaient été tenues avec eux (la dernière le 12 juillet 2002), que le syndicat ne comptait que 21 membres sur les 140 travailleurs de l’entreprise et que le 25 juillet 2002 était la date limite pour que les travailleurs acceptent la restructuration, à savoir les nouvelles conditions de travail proposées par l’entreprise (voir le dernier paragraphe de la réponse du gouvernement) et que ceux qui n’accepteraient pas les changements se verraient licenciés avec le paiement de la totalité de leurs droits sociaux.
  3. 372. Le comité prend note des inspections et des audiences de conciliation (qui n’ont pas réussi) menées par les autorités du ministère du Travail, suite à une plainte d’origine syndicale, et il observe que la partie syndicale n’a pas fourni les cartes syndicales de tous les membres licenciés réclamées par les autorités durant l’enquête, mais seulement celles des huit membres du conseil de direction du syndicat; elle n’a pas non plus précisé dans quelle mesure les actions irrégulières de l’entreprise avaient affecté ses membres, ce qui a empêché la poursuite de l’enquête faute d’avoir les informations demandées à l’organisation syndicale plaignante. Le comité observe que, le 13 décembre, le Directeur national et inspecteur général du travail a demandé de pouvoir poursuivre l’enquête sur ce cas.
  4. 373. Le comité observe que, contrairement à l’entreprise, l’organisation plaignante soutient que les travailleurs n’ont eu connaissance de la restructuration qu’au dernier moment.
  5. 374. Le comité demande au gouvernement et aux organisations plaignantes de communiquer des informations complémentaires et notamment de transmettre tous les textes législatifs assurant la protection des dirigeants syndicaux, et d’indiquer si cette législation les protège contre le licenciement pendant toute la durée de leur mandat (dans la mesure où ils ne commettent pas de faute professionnelle grave) ou s’ils sont seulement protégés dans la mesure où la décision de les licencier ou toute autre mesure leur portant préjudice est en relation avec leurs activités syndicales.
  6. 375. Enfin, le comité déplore de toute façon que l’entreprise n’ait pas consulté le syndicat en ce qui concerne la restructuration. Le comité souligne donc l’importance qu’il y a à ce que les employeurs et les organisations de travailleurs établissent des consultations sur les questions d’intérêt commun et tentent de parvenir à un accord, et en particulier qu’ils discutent sur les conséquences des programmes de restructuration sur l’emploi et les conditions de travail.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 376. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité demande aux organisations plaignantes et au gouvernement de transmettre des renseignements supplémentaires et, notamment, de communiquer tous les textes législatifs assurant la protection des dirigeants syndicaux, et d’indiquer si cette législation les protège contre les licenciements pendant toute la durée de leur mandat (dans la mesure où ils ne commettent pas de faute professionnelle grave) ou s’ils sont seulement protégés dans la mesure où la décision de les licencier, ou toute autre mesure leur portant préjudice, est en relation avec leurs activités syndicales.
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