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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
- 125. Le présent cas a trait à de nombreux actes d’intimidation et de discrimination antisyndicales, y compris des licenciements, de la part de la direction de deux entreprises (Hetman Ltd. Et SIPMA SA), ainsi qu’à la partialité du bureau du Procureur, à la lenteur des procédures et à la non-exécution de décisions judiciaires. Durant son dernier examen du cas, le comité a instamment prié le gouvernement de renouveler et intensifier ses efforts, sous les auspices de la Commission tripartite régionale de dialogue social, pour ramener les parties à la table de négociation et les inciter à renouer le dialogue social, tout en veillant à l’application des principes de liberté syndicale et de négociation collective, en particulier la reconnaissance et la protection efficaces des syndicats contre les actes de discrimination antisyndicale et contre l’ingérence dans les activités de ces organisations. [Voir 333e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 289e session (mars 2004), paragr. 878 à 919.]
- 126. Dans une communication datée du 2 novembre 2004, le syndicat plaignant NSZZ «Solidarnosc» (Solidarnosc) communique des renseignements complémentaires au sujet du différend survenu dans l’entreprise SIPMA SA. L’organisation plaignante allègue que l’employeur a essayé d’éviter de coopérer avec le syndicat établi au niveau de l’entreprise depuis l’élection de ses dirigeants en février 2002. Ainsi, le 22 novembre 2002, l’employeur a intenté une action au civil devant le tribunal de district de Lublin, alléguant que le syndicat n’avait pas de personnalité juridique car la procédure d’enregistrement au registre du tribunal national n’avait pas été menée à son terme en raison du manque de vigilance du syndicat. L’organisation plaignante répond qu’en vertu de la législation en vigueur les sections de Solidarnosc établies au niveau des entreprises ont été enregistrées dans les sections régionales du syndicat et ont ainsi acquis la personnalité juridique. Le syndicat constitué au niveau de l’entreprise SIPMA SA avait donc déjà été enregistré conformément à l’article 14 de la loi sur les syndicats du 23 mai 1991 et à la jurisprudence de la Cour suprême datant de 1993. Cette pratique a aussi été confirmée par le ministère de la Justice dans une lettre adressée au président de Solidarnosc datant de 2003.
- 127. Selon l’organisation plaignante, l’employeur est loin de coopérer avec le syndicat établi au niveau de l’entreprise. Cependant, la procédure concernant l’existence de cette obligation est en suspens depuis le 22 novembre 2002 et la première audience n’a pas encore été organisée. Quatre tribunaux différents se sont mutuellement renvoyés l’affaire, ne se considérant pas comme compétents en la matière. Dans ces conditions, il est impossible d’imposer à l’employeur l’obligation de coopérer avec le syndicat. Un retard excessif de la procédure judiciaire constitue en soi une atteinte au droit à une protection appropriée contre la discrimination et une violation des conventions et des principes de la liberté syndicale.
- 128. L’organisation plaignante indique par ailleurs que le tribunal de district de Lublin a suspendu la procédure visant le licenciement de Zenon Mazus, ancien dirigeant du syndicat établi au niveau de l’entreprise SIPMA SA, jusqu’à ce que soit rendue la décision du tribunal dans le cadre de la procédure susmentionnée concernant la reconnaissance de l’obligation de coopérer avec le syndicat incombant à l’employeur. La procédure concernant Zenon Mazus est donc en suspens depuis le 8 juillet 2002.
- 129. En ce qui concerne les poursuites pénales engagées contre 19 cadres supérieurs de SIPMA SA pour avoir fait obstacle aux activités syndicales et violé les droits des travailleurs le 14 octobre 2003, l’organisation plaignante déplore que les tribunaux n’ont pris aucune initiative, et l’affaire a été transférée au district de Kielce parce que le procureur du district de Lublin n’avait entrepris aucune action.
- 130. L’organisation plaignante déclare enfin que le fait de ne pas pouvoir obtenir un procès équitable pour les violations de la liberté syndicale exposées plus haut constitue un déni de justice, empêche de s’opposer aux activités de l’employeur visant à éliminer le syndicat de l’entreprise et entraîne une baisse des affiliations au syndicat. En 2003, le nombre de membres du syndicat est tombé à moins de neuf, et la section de Solidarnosc dans la région de Lublin a entrepris des activités visant à lutter contre la dissolution du syndicat établi au niveau de l’entreprise SIPMA SA. Plus concrètement, il a été transformé en syndicat de niveau interentreprises, absorbant les membres restants du syndicat établi au niveau de SIPMA SA. Toutefois, l’employeur a continué à refuser de coopérer avec le syndicat. Ainsi, selon l’organisation plaignante, les recommandations du comité n’ont pas été mises en œuvre et la situation appelle des mesures complémentaires.
- 131. Dans une communication datée du 24 février 2005, le gouvernement déclare que la première chambre civile du tribunal de district de Lublin a entrepris le 3 décembre 2002 d’examiner l’action intentée par SIPMA SA contre le syndicat établi au niveau de l’entreprise au sujet de la reconnaissance du devoir de coopérer avec le syndicat incombant à l’employeur. L’affaire a ensuite été renvoyée aux fins d’examen à la septième chambre du tribunal de district, spécialisée dans les questions de travail, laquelle l’a renvoyée, par décision du 4 février 2004, à la chambre du tribunal de district de Lublin spécialisée dans ces questions. Après que l’organisation plaignante a interjeté appel, l’affaire a été examinée par la Cour d’appel de Lublin, qui a reconnu, par une décision datée du 31 mars 2004, que la première chambre civile du tribunal de district de Lublin était l’organe compétent pour connaître de cette affaire, car elle ne concernait pas la relation d’emploi et n’avait donc pas à être examinée par un tribunal du travail. La première audience devant le tribunal compétent s’est tenue le 8 juin 2004 mais a été ajournée car l’organisation plaignante s’est vue opposer que le défendeur aurait perdu la capacité d’être partie à des actions intentées au civil. Comme l’ont déclaré les deux parties au différend, le syndicat NSZZ «Solidarnosc» exerçant ses activités dans l’entreprise SIPMA SA avait cessé d’exister au 5 avril 2004, après avoir été rayé du registre des organisations de Solidarnosc. Le retrait est intervenu lorsque l’organisation interentreprises de Solidarnosc de la région du centre-est a été établie et que les membres du syndicat établi dans l’entreprise SIPMA SA ont rejoint l’entité nouvellement constituée. Le défendeur a considéré qu’il s’agissait d’un facteur déterminant en ce qui concerne l’existence du syndicat et sa capacité à être partie à la procédure.
- 132. Selon le gouvernement, les parties ne constatent pas l’incapacité d’ester dans une action intentée au civil. Ainsi, lorsqu’elle a eu connaissance de la position de l’organisation plaignante, la première chambre civile du tribunal de district de Lublin a décidé, le 22 novembre 2004, de suspendre la procédure puisqu’une partie à l’affaire avait perdu la capacité d’ester. Néanmoins, des mesures ont été prises ex officio pour poursuivre l’examen de l’affaire. Le juge a ordonné la présentation de copies certifiées de documents confirmant l’établissement et l’enregistrement de l’organisation interentreprises de Solidarnosc de la région du centre-est. Ces renseignements permettraient au tribunal de déterminer la capacité de l’organisation plaignante d’être partie à des actions intentées au civil, ce qui constituait une condition préalable à la poursuite de la procédure. Le gouvernement a conclu que, bien que la durée de la procédure ait été allongée parce que l’affaire avait été renvoyée devant divers tribunaux, il était nécessaire de clarifier la question pour éviter qu’une action ne soit intentée à l’avenir pour infirmer la décision du tribunal.
- 133. S’agissant de Zenon Mazus, le gouvernement a dit qu’il avait intenté une action en annulation de la résiliation de son contrat de travail. L’examen de la plainte a commencé le 2 juillet 2002 à la septième chambre du tribunal de district de Lublin, spécialisée dans les questions de travail. Six audiences ont eu lieu jusque là. La première a été fixée au 1er juillet 2003, mais les dates des audiences suivantes ont été fixées régulièrement, séparées par des intervalles bien plus courts, et les ajournements des audiences ont été causés par le dépôt par les deux parties de nouvelles motions relatives aux éléments de preuve (en particulier l’audition des témoins). Au cours des audiences tenues les 16 décembre 2003, 12 février et 15 avril 2004, le tribunal a interrogé les témoins. La dernière audience a été ajournée sur demande de l’organisation plaignante, afin de répondre à un argument du défendeur et de déposer d’éventuelles motions relatives aux éléments de preuve. A l’audience suivante qui s’est tenue le 27 mai 2004, le tribunal a convoqué un membre du Conseil d’administration de la société défenderesse. Toutefois, en raison de son absence justifiée, le tribunal a reporté une nouvelle fois l’audience au 9 septembre 2004. A cette date, la procédure a été suspendue par le tribunal à la demande du défendeur. Le tribunal de district a décidé que l’examen du cas de l’employé dépendait du résultat d’une action parallèle intentée au civil qui était en cours d’examen devant le tribunal de district de Lublin. Toutefois, le tribunal de seconde instance ne partageait pas cet avis et, ayant examiné l’objection soulevée par l’organisation plaignante, il a décidé le 8 novembre 2004 d’infirmer la décision de suspendre la procédure. L’audience suivante a été fixée au 11 janvier 2005.
- 134. S’agissant des poursuites pénales engagées contre 19 cadres supérieurs de SIPMA SA accusés de faire obstacle à l’activité du syndicat et de violer les droits des travailleurs, le gouvernement déclare que, lorsque des copies certifiées de l’acte d’accusation ont été délivrées, onze des accusés ont déposé de longues objections de procédure auprès du tribunal. De plus, l’un d’eux a déposé une motion de renvoi de l’affaire devant le bureau du procureur. Cette demande a été rejetée le 13 novembre 2003, décision confirmée les 25 novembre et 29 décembre 2003 par le tribunal de district de Lublin. Après quoi, le juge saisi du dossier a été remplacé le 19 mai 2004. Le nouveau juge s’est vu accorder un délai de trois mois pour se familiariser avec la documentation (42 volumes) et une nouvelle audience a été fixée au 27 octobre. Cependant, la procédure n’a pas été engagée car l’un des accusés (Jan Pradziuch) ne s’est pas présenté, son absence étant justifiée par un congé de maladie. Ainsi, le tribunal a ajourné l’affaire et admis les éléments de preuve (un avis émis par le Département de médecine légale de l’Académie de médecine de Lublin) relatifs à la question de savoir si l’accusé pouvait participer à l’audience. Cinq des accusés ont déposé des motions de renvoi du dossier au bureau du procureur en raison de la nature de l’affaire. Lesdites motions n’ont pas été examinées comme prévu le 15 novembre 2004, car l’Académie de médecine n’avait pas rendu le dossier. La réunion suivante a été fixée au 8 décembre 2004. Le grand nombre d’accusés, le volume important des éléments de preuve et les motions formelles ou procédurales ont été autant d’éléments qui ont contribué à ralentir la procédure. Toutefois, il y a eu des obstacles objectifs sur lesquels le tribunal n’avait aucune influence.
- 135. Enfin, le gouvernement déclare que, pour accentuer les efforts déployés par le tribunal et mener la procédure susmentionnée à son terme dans les meilleurs délais, les affaires évoquées ci-dessus demeureraient dans la sphère d’intérêt du Département des tribunaux ordinaires du ministère de la Justice. Elles relèvent aussi du service de surveillance administrative des présidents des tribunaux respectifs.
- 136. Le comité note que, au vu des dernières communications de l’organisation plaignante et du gouvernement, aucune disposition n’a apparemment été prise sous les auspices de la Commission régionale de dialogue social pour ramener les parties à la table de négociation, comme l’avait demandé le comité dans ses recommandations précédentes. Au contraire, le climat de relations industrielles difficiles, caractérisées par la permanence d’un conflit et le refus des différents employeurs de reconnaître une organisation de travailleurs et d’engager des négociations de bonne foi avec celle-ci, observé par le comité durant son dernier examen du présent cas, semble persister. [Voir 333e rapport, paragr. 916.] Le comité note par ailleurs avec regret que le syndicat NSZZ «Solidarnosc» établi dans l’entreprise SIPMA SA a cessé d’exister et a dû être incorporé dans l’organisation interentreprises de Solidarnosc de la région du centre-est pour maintenir la représentation des quelques membres qui demeuraient dans l’entreprise. Le comité rappelle que, du fait que des garanties inadéquates contre les actes de discrimination, notamment les licenciements, peuvent conduire à la disparition des syndicats eux-mêmes lorsqu’il s’agit d’organisations qui comprennent les travailleurs d’une seule entreprise, d’autres mesures devraient être envisagées afin d’assurer aux dirigeants de toutes les organisations, aux délégués et aux membres des syndicats une protection plus complète contre tous actes discriminatoires. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 700.]
- 137. S’agissant de la nécessité d’assurer une protection efficace des dirigeants syndicaux contre les actes de discrimination antisyndicale et contre l’ingérence, qui faisait partie de ses recommandations précédentes, le comité note avec regret, au vu des communications de l’organisation plaignante et du gouvernement, que la procédure judiciaire engagée par Zenon Mazus, dirigeant du syndicat NSZZ «Solidarnosc» établi dans l’entreprise SIPMA SA, afin de priver d’effet son licenciement, est en suspens depuis le 2 juillet 2002, soit presque trois ans aujourd’hui. Le comité observe en particulier que la première audience du présent cas a été fixée douze mois après le dépôt de la plainte et qu’ensuite la procédure a été suspendue pendant plusieurs mois (entre le 9 septembre et le 11 janvier 2005) en raison d’une action en justice parallèle engagée le 3 décembre 2002 par l’employeur. S’agissant de cette dernière procédure, le comité note que, même si elle avait pour objet de déterminer si l’employeur avait le devoir de coopérer avec le syndicat, les tribunaux n’ont apparemment pas examiné cette question jusqu’à aujourd’hui. Au contraire, depuis deux ans et demi, des décisions successives ont été rendues sur des questions préliminaires comme la détermination du tribunal compétent et la situation du syndicat défendeur après son incorporation dans l’organisation interentreprises de Solidarnosc de la région du centre-est. Enfin, en ce qui concerne les poursuites pénales engagées contre 19 cadres supérieurs de SIPMA SA le 14 octobre 2003, le comité note que, selon le gouvernement, cette affaire est en suspens en raison du grand nombre d’accusés, de l’importance du volume de la documentation et d’une série de motions procédurales déposées par les parties. Le comité observe par ailleurs que le gouvernement ne répond pas à l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle le présent cas a été renvoyé au district de Kielce parce que le procureur du district de Lublin n’entreprenait aucune action. Le comité note enfin la déclaration du gouvernement selon laquelle toutes les affaires évoquées ci-dessus demeureront dans «la sphère d’intérêt» du Département des tribunaux ordinaires du ministère de la Justice et qu’elles relèvent aussi du service de surveillance administrative des présidents des tribunaux respectifs.
- 138. Le comité note avec un profond regret que ce n’est pas le seul cas qui lui est soumis en ce qui concerne des retards injustifiés dans l’administration de la justice et la partialité alléguée du bureau du procureur dans des affaires concernant la discrimination antisyndicale. Ces questions de portée générale sont traitées dans le cadre du cas no 2395.
- 139. Notant avec regret que le syndicat NSZZ «Solidarnosc» établi dans l’entreprise SIPMA SA a été dissous, le comité demande au gouvernement d’intercéder auprès des parties en vue d’améliorer le climat des relations industrielles entre l’entreprise et l’organisation interentreprises de Solidarnosc de la région du centre-est de façon que cette dernière puisse exercer ses activités concernant cette entreprise sans aucune ingérence ou discrimination de la part de l’employeur contre ses membres ou ses délégués. De plus, rappelant une nouvelle fois que les retards de la justice constituent un déni de justice, le comité escompte que les mesures prises par le gouvernement accéléreront effectivement la procédure judiciaire en annulation de licenciement, engagée il y a presque trois ans par Zenon Mazus, dirigeant du syndicat NSZZ «Solidarnosc» établi dans l’entreprise SIPMA SA. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des questions exposées ci-dessus ainsi que de l’évolution de la procédure concernant l’obligation de coopérer avec le syndicat qui incombe à l’employeur et les poursuites pénales engagées contre 19 cadres supérieurs de SIPMA SA et de lui communiquer des renseignements au sujet du différend à l’entreprise Hetman Ltd.