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- 614. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de mars 2007 et présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 344e rapport, paragr. 725 à 801, approuvé par le Conseil d’administration à sa 298e session.]
- 615. La Confédération générale du travail (CGT) a envoyé de nouvelles allégations sous la forme d’une communication datée du 15 mars 2007.
- 616. Le gouvernement a envoyé ses observations par des communications datées des 9 avril et 4 juillet 2007.
- 617. La Colombie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 618. Lors de son examen antérieur du cas, en mars 2007, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 344e rapport, paragr. 801]:
- a) S’agissant des allégations relatives à la limitation du droit à la négociation collective en conséquence de la récente adoption de l’acte législatif no 01 du 22 juillet 2005 portant modification de l’article 48 de la Constitution politique relatif à la sécurité sociale, le comité:
- i) reconnaît le droit des Etats de réglementer les régimes de retraite mais souligne la nécessité qu’ils respectent le principe de la négociation collective en ce faisant;
- ii) s’agissant des conventions signées avant l’entrée en vigueur de la législation, considérant que les conventions négociées antérieurement devraient continuer à sortir tous leurs effets, y compris ceux relatifs aux clauses sur les pensions, jusqu’à leur date d’expiration, même si celle-ci dépasse le 31 juillet 2010, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures correctives qui s’imposent et de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard;
- iii) s’agissant des conventions signées après l’entrée en vigueur de l’acte législatif no 01, tenant compte du résultat du référendum, le comité demande au gouvernement, compte tenu des circonstances particulières du présent cas et afin de garantir l’harmonie des relations de travail dans le pays, de procéder à de nouvelles consultations approfondies avec les parties intéressées à propos de la retraite et des pensions, afin de trouver une solution négociée acceptable pour toutes les parties intéressées et conforme aux conventions sur la liberté syndicale et la négociation collective ratifiées par la Colombie.
- b) S’agissant des allégations relatives au refus des services du Procureur général de la nation de mener des négociations collectives avec le Syndicat national des travailleurs des services du Procureur général de la nation (SINTRAPROAN), le comité demande au gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour que le droit à la négociation collective des fonctionnaires soit respecté, conformément aux dispositions des conventions nos 98 et 154 ratifiées par la Colombie.
- c) Pour ce qui est des allégations relatives au harcèlement, qui a pris la forme de procédures disciplinaires successives à l’encontre de M. Franco Cuartas, membre fondateur et dirigeant du SINTRAPROAN, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour ouvrir une enquête concernant les allégations et les circonstances qui ont provoqué la démission de M. Franco Cuartas; cette enquête devrait être menée à bien par une personnalité indépendante qui jouit de la confiance des parties et, si cette enquête constate la véracité des allégations, de prendre les mesures nécessaires afin de réintégrer M. Franco Cuartas et pour mettre fin à toute sanction disciplinaire à son égard. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- d) Pour ce qui est de l’allégation relative au licenciement de MM. Luis Carmelo Cataño Cataño, Carlos Romero Aguilar, Francisco Molina et Silvio Elías Murillo, en dépit du fait qu’ils jouissaient de l’immunité syndicale et, dans le cas de M. Murillo, bien que le tribunal administratif du Chocó ait ordonné sa réintégration, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir ses observations sans délai.
- B. Nouvelles allégations
- 619. Dans sa communication datée du 15 mars 2007, la Confédération générale du travail (CGT) fait état du licenciement de MM. Jhon Jair Silva et Jesse Moisés Gutiérrez Herrera, adhérents du SINTRAPROAN.
- C. Réponse du gouvernement
- 620. Dans ses communications datées des 9 avril et 4 juillet 2007, le gouvernement transmet les observations suivantes.
- 621. En ce qui concerne l’alinéa a) des recommandations, le gouvernement répète ce qu’il a déclaré antérieurement à propos de l’acte législatif no 01 de 2005, à savoir que ce dernier, qui complète l’article 48 de la Constitution politique, constitue un élément fondamental de l’ensemble des mesures adoptées pour faire face aux graves problèmes du financement du déficit du régime des pensions.
- 622. Le gouvernement considère que divers aspects méritent d’être pris en compte par le Comité de la liberté syndicale dans le présent cas. Premièrement, la réglementation des conditions d’octroi des pensions de retraite ne relève pas à proprement parler des conditions de travail mais concerne la période postactive, question propre à la sphère des pensions. Les conventions nos 98 et 154, dont la violation est alléguée, visent la négociation des conditions de travail. Ces instruments ne régissent pas les questions relatives aux pensions, thème qui relève du champ d’application d’autres instruments adoptés également par l’Organisation.
- 623. Deuxièmement, compte tenu justement que la question des pensions est régie par d’autres instruments, il conviendrait de prendre en considération que ces conventions envisagent la possibilité pour les Etats de réglementer ou légiférer sur des aspects qui concernent les pensions sans pour autant violer le droit à la négociation collective.
- 624. Troisièmement, la négociation collective en matière de pensions implique, par nature, des éléments qui échappent à la négociation collective et qui relèvent des compétences que les constitutions octroient aux gouvernements et à leurs organes législatifs. Etant donné que ces aspects concernent non pas un groupe humain déterminé – celui qui négocie une convention donnée – mais l’ensemble de la population d’un pays donné, ils ne peuvent pas être réglementés par le mécanisme de la convention mais par le législateur, qui est compétent pour déterminer les conditions générales qui régissent la vie des citoyens. Il s’agit d’une des expressions les plus légitimes de l’Etat de droit social et non d’une atteinte au droit d’association syndicale. Il est naturel que les gouvernements et les parlements déterminent lesquels de ces aspects doivent être réglementés par voie législative ou par décision du pouvoir exécutif. Il est évident et universellement admis que des sujets, tels que l’âge, le nombre de semaines de cotisation, les différences entre hommes et femmes pour certaines conditions, ne sont pas réglés au moyen de négociations collectives entre un groupe déterminé de citoyens – les travailleurs syndiqués – et l’autorité négociatrice, mais par le pouvoir législatif, étant donné qu’il s’agit, encore une fois, de réglementer des aspects généraux qui concernent les conditions de vie de la population en général.
- 625. Le gouvernement signale que l’objectif principal est d’assurer la viabilité financière du système de sécurité sociale. Il s’emploie en outre à faire en sorte que le régime de retraite soit équitable pour tous les Colombiens, raison pour laquelle il signale qu’à compter de 2008 les conditions et prestations de retraite seront celles définies par la loi sur le régime général de retraite.
- 626. Initialement, la protection des personnes contre les risques de vieillesse et d’invalidité a été structurée en fonction de la relation de travail. Le Code du travail l’envisageait ainsi. La Constitution politique de 1991 a adopté, pour la sécurité sociale, un modèle différent car son article 48 dispose que «le droit irrévocable à la sécurité sociale est garanti à tous les habitants» et précise à cet effet que «la sécurité sociale est un service public à caractère obligatoire qui est dirigé, coordonné et contrôlé par l’Etat en vertu des principes d’efficacité, d’universalité et de solidarité et en conformité avec la loi». Ainsi, l’article 48 de la Constitution politique envisage le système de sécurité sociale comme un régime indépendant de celui des relations de travail. De fait, la Constitution de 1991 exclut de la sphère de la volonté privée le droit aux prestations de sécurité sociale et en fait un droit de la personne du simple fait de sa participation au corps social, qui va au-delà de la relation de travail et qui est matérialisé par la prestation d’un service public à caractère obligatoire que l’Etat doit diriger et coordonner en vertu des principes d’efficacité, d’universalité et de solidarité.
- 627. Le gouvernement signale que la promulgation de la loi no 100 de 1993 avait pour but d’appliquer les principes constitutionnels et de régler les problèmes financiers structurels constatés dans le régime des pensions et qui étaient la conséquence de décisions telles que le faible niveau des cotisations – quand elles étaient versées –, la dispersion des régimes de pensions et des prestations excessives. Les mesures prises en vertu de la loi no 100 de 1993 se sont avérées insuffisantes pour corriger les grands déséquilibres qui existaient déjà à l’époque au sein du système. Par ailleurs, cette loi ne couvrait pas tous les secteurs car elle n’incluait pas les membres des forces armées, les fonctionnaires affiliés au Fonds national de prestations sociales du corps enseignant et les travailleurs d’ECOPETROL. De même, la loi ne concernait pas les conventions ou accords collectifs régulièrement conclus et n’empêchait pas qu’il s’en conclue de nouveaux. De la sorte, le régime général de retraite, y compris les régimes de transition, et les régimes d’exception colombiens ont connu des difficultés de financement qui se traduisent par d’importants déficits d’exploitation. En effet, le déficit d’exploitation, correspondant au déséquilibre entre les cotisations et les prestations du régime de retraite, a entraîné la nécessité d’utiliser les ressources des réserves de l’Institut de sécurité sociale (ISS) et du budget général de la nation, soit l’équivalent de 3,3 pour cent du PIB en 2000 (5,1 milliards de pesos) et de 4,6 pour cent du PIB en 2004 (8,2 milliards de pesos). Ainsi, après l’adoption de la loi no 100 de 1993, il s’est produit une situation insoutenable en raison du transfert de passif entre générations, en ce sens que les cotisants en cours et futurs devaient, grâce à leurs contributions fiscales et à leurs cotisations, financer non seulement la dette ainsi formée correspondant aux pensions courantes mais aussi leurs propres dépenses sociales et leurs propres pensions à venir.
- 628. Le déficit d’exploitation dans le secteur des pensions aggravait la situation économique difficile que connaissait le pays, laquelle avait des répercussions négatives sur l’emploi, les recettes fiscales et le versement des cotisations. En effet, pour financer le coût social des pensions, en conformité avec les obligations constitutionnelles, pendant les dix dernières années, la nation a utilisé des ressources qui, autrement, auraient été consacrées à d’autres finalités et objectifs essentiels de l’Etat. En conséquence, la nation a dû s’endetter davantage sur les plans intérieur et extérieur pour financer notamment les investissements sociaux croissants dans les domaines de la santé et de l’éducation.
- 629. Pour assurer la viabilité du système et réduire dans une certaine proportion les déficits prévus, le Congrès de la République a approuvé une réforme des pensions en vertu de la loi no 797, qui envisageait des modifications des conditions et des prestations du régime général de retraite, de manière à réduire le déficit du régime colombien de retraite d’une valeur équivalant à 40 pour cent du PIB de 2000 à un horizon de cinquante ans, afin d’assurer la viabilité des paiements futurs des pensions et la stabilité macroéconomique et budgétaire. Cette loi a également réformé le système de transition.
- 630. La Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnelles, pour vices de procédure, les dispositions de cette loi portant réforme du régime de transition. L’impact budgétaire considérable du régime de transition a contraint le gouvernement à insister sur la nécessité d’une réforme du régime de transition; en effet, entre 2003 et 2004, les paiements courants des pensions à la charge de la nation allaient augmenter de 21 pour cent, passant de 7,1 milliards de pesos en 2003 à 9,9 milliards de pesos en 2004, à cause de la croissance naturelle du nombre de retraités et, surtout, des importantes contributions budgétaires rendues nécessaires par l’épuisement imminent des réserves financières de l’ISS cette année-là. C’est pourquoi le gouvernement national a présenté la loi no 860 de 2003, qui avait pour objet principal de modifier le régime de transition, loi approuvée par le Congrès.
- 631. Les lois nos 797 et 860 visaient à concilier l’intérêt public résidant dans la préservation du système de sécurité sociale et l’exercice du droit inaliénable à la sécurité sociale qui est garanti par la Constitution politique avec les attentes des personnes couvertes par le régime de transition.
- 632. Bien que les réformes adoptées aient contribué à améliorer le bilan d’exploitation du système, elles n’ont pas réussi à l’équilibrer totalement. Le pays dépense plus pour la sécurité sociale que pour d’autres secteurs qui constituent également, d’une manière ou d’une autre, des priorités constitutionnelles.
- 633. Il ressort de la structure du budget général de la nation pour 2004, sans prendre en compte le service de la dette, que le poste de la protection sociale, avec 15,8 milliards de pesos, absorbe 31,7 pour cent du total; dans ce poste, on notera en particulier l’importance prise par le paiement des pensions courantes qui se chiffre à 9,1 milliards de pesos, soit l’équivalent de plus de 18,2 pour cent du budget total, chiffre qui comprend 0,7 milliard de pesos qui ont été budgétés et qui ont été nécessaires pour que l’ISS puisse remplir ses obligations en matière de pensions cette année-là (n’est pas incluse la rallonge de quelque 0,9 milliard de pesos projetée à cette même fin). Les paiements courants des pensions représentent une part du budget plus grande que celle de chacun des autres secteurs inscrits au budget. Il convient de souligner que ces ressources permettent de servir uniquement un peu moins d’un demi-million de retraités (voir le tableau ci-après).
- Nombre de retraités en 2004 par organisme
- Organisme
- Nombre estimatif
- total de retraités
- Pension de retraite moyenne
- (salaire minimum)
- CAJANAL
- 196 935
- 2,9
- Caisse de retraite de la Police nationale
- 65 346
- 2,7
- Fonds de prestations sociales du corps enseignant
- 63 504
- 2,7
- Caisse de retraite des forces armées
- 32 588
- 4,7
- Ministère de la Défense
- 27 926
- 2,1
- Police nationale
- 20 457
- 3,0
- Fonds social des chemins de fer nationaux
- 16 577
- 2,4
- FONCOLPUERTOS
- 15 908
- 6,8
- Caisse de crédit agricole, industriel et minier
- 10 649
- 3,6
- SENA
- 4 203
- 3,2
- Université nationale de Colombie
- 4 182
- 5,9
- Ministère de l’Agriculture
- 3 404
- 3,0
- INCORA
- 2 079
- 2,7
- Fonds de prévoyance sociale du Congrès
- 1 755
- 20,7
- Autres organismes
- 6 747
- Total
- 472 260
- Source: Direction générale du budget public national.
- Ne sont pas inclus les retraités de I’ISS parce que seuls sont actuellement budgétés 0,7 milliard de pesos au titre du financement de l’ISS assureur.
- 634. Dans le cas de la seule force publique, compte tenu des caractéristiques de ce groupe de fonctionnaires et des risques auxquels ses membres sont exposés, il est justifié de maintenir un régime spécial à l’instar de ce qui se passe dans de nombreux pays.
- 635. En ce qui concerne le rapport entre la négociation collective et le régime des pensions, la loi no 100 de 1993, qui organisait le système général des pensions, a manifestement prévu le respect des droits acquis «conformément aux dispositions normatives antérieures, pactes ou conventions collectives de travail», mais elle précisait aussi clairement que cela ne devait pas «porter préjudice à la faculté de dénonciation que possèdent les parties et que le tribunal arbitral tranchera[it] les différends entre les parties». Ce qui précède avait clairement pour but d’adapter les conventions et pactes collectifs aux dispositions de la loi no 100 de 1993 et de tenir compte du fait que la pension ne peut plus être considérée comme simplement une conséquence d’une relation de travail mais comme une prestation qui découle du système de sécurité sociale organisé par le législateur.
- 636. Cependant, étant donné que la Constitution politique garantit le droit à la négociation collective, la loi no 100 n’a pas pu atteindre son but exprimé à l’article 11. En effet, il est toujours possible de définir des règles particulières en matière de pensions, si bien que, et en dépit du fait que la Cour suprême de justice a déclaré à plusieurs reprises que les prestations en matière de pensions doivent être conformes à la loi no 100 de 1993, non seulement les conventions collectives ne sont pas conformes à la loi mais on continue à signer des conventions aux termes desquelles les entités s’engagent à assumer directement de nouvelles obligations en matière de pensions, privilégiant certains fonctionnaires et ne respectant pas l’égalité que le pouvoir constituant a voulu intégrer dans le système de sécurité sociale. En effet, selon la Cour constitutionnelle, l’universalité du système de sécurité sociale présuppose la garantie de la protection pour toutes les personnes sans discrimination aucune, à toutes les étapes de la vie, et cette garantie sans discrimination n’est possible que s’il existe un système unifié ne pouvant être modifié par la volonté d’une catégorie de ses bénéficiaires.
- 637. Compte tenu de ce qui précède, et pour atteindre l’objectif inspiré de l’article 48 de la Constitution politique, il est nécessaire d’établir clairement dans le régime de retraite les conditions à remplir pour accéder à cette protection et aux avantages garantis par ledit système. En outre, ce qui précède est particulièrement important si l’on tient compte non seulement des principes qui doivent régir le système de sécurité sociale mais aussi des conséquences économiques de la situation actuelle, à moyen et à long terme.
- 638. Le gouvernement signale que des ressources considérables servent à financer des régimes de retraite spéciaux alors qu’elles pourraient être utilisées pour étendre la couverture du système général de sécurité sociale et amplifier l’investissement social ou promouvoir davantage le développement du pays. Les raisons susmentionnées justifient clairement la nécessité d’établir que la négociation collective ne doit pas inclure les régimes de pensions.
- 639. Le gouvernement signale que l’article 55 de la Constitution politique dispose que «le droit à la négociation collective pour réglementer les relations de travail est garanti, sauf dans les exceptions prévues par la loi». De ce point de vue, on pourrait faire valoir qu’une loi peut déterminer la portée du droit à la négociation collective et exclure de son champ d’application le régime des pensions. Cependant, l’examen de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle ne permet pas de tirer des conclusions claires à cet égard. En effet, si, au début, la Cour constitutionnelle accueillait plutôt favorablement la possibilité de limiter le droit à la négociation collective dans l’intérêt public, elle s’est montrée plus restrictive au cours des dernières années.
- 640. Tout d’abord, dans son arrêt C-112-93, la Cour constitutionnelle a admis la possibilité de limiter la négociation collective, pour autant que les limites imposées soient raisonnables et permettent d’éviter de mettre en péril les organismes publics. En particulier, la cour a estimé que les conventions ne pouvaient conduire «à l’anéantissement de l’entreprise, à sa faillite, à sa détérioration ou à l’improductivité, et que les organismes publics ne peuvent pas non plus accorder, aux termes de la Constitution, des salaires, prestations ou rentes dérisoires sans rapport avec la réalité sociale». Par la suite, dans son arrêt C-408 de 1994, la Cour constitutionnelle a rappelé que la Constitution politique permet des exceptions raisonnables à la négociation collective.
- 641. Cela étant, l’esprit d’ouverture manifesté par la Cour constitutionnelle dans ses arrêts antérieurs a fait place à une attitude plus restrictive dans ses décisions ultérieures. Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de préciser les règles constitutionnelles en établissant l’interdiction de conclure des pactes ou des conventions collectives en matière de pensions.
- 642. Le gouvernement ajoute que pour pouvoir apprécier la viabilité constitutionnelle de l’acte législatif, ainsi que sa parfaite validité à la lumière des conventions de l’OIT, il est nécessaire d’analyser si ces conventions, qui ont été approuvées par la Colombie et font partie intégrante du bloc de constitutionnalité, interdisent ou empêchent d’établir l’impossibilité de négocier collectivement le régime obligatoire de retraite prévu par la loi. La convention no 87 établit une protection spéciale qui permet aux citoyens de créer des syndicats et contient une série de règles générales pour que les Etats protègent le droit à la liberté syndicale. Aucune des règles examinées n’empêche d’inclure dans la Constitution colombienne, en vertu d’un acte législatif, une limite à la négociation collective concernant le régime obligatoire des pensions. Un tel acte ne constituerait pas un obstacle ni une atteinte au droit d’association syndicale, lequel pourrait s’exercer selon les voies normales et avec la protection de l’Etat. Il est à noter que les dispositions de l’article 39 de la Constitution politique et l’évolution suivie par la jurisprudence constitutionnelle sous la forme de réintégrations à caractère constitutionnel, comme moyen de protection du droit d’association syndicale, au travers d’une action de tutelle, sont autant d’outils appropriés pour développer harmonieusement la liberté syndicale en Colombie.
- 643. La convention no 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective, qui a également été intégrée à la législation ordinaire de la Colombie au travers des lois nos 26 et 27 de 1976, ne contient pas non plus de disposition en matière de négociation collective, qui interdirait à la constitution politique de limiter le champ de la négociation collective vis-à-vis du régime de retraite obligatoire établi dans la loi. En effet, l’article 4, qui traite spécifiquement de la négociation collective, indique que des mesures appropriées aux conditions nationales devront être prises, si nécessaire, pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par des conventions collectives les conditions d’emploi. Ce texte laisse indéniablement toute liberté aux Etats qui ont adopté la convention pour limiter le champ de la négociation collective quand sont en cause des régimes obligatoires, comme celui des retraites, qui permettent d’instituer des exceptions qui influent sensiblement sur le budget de la nation et sur l’égalité entre les travailleurs, dans un domaine aussi important que celui des retraites. La convention no 154 relative à la négociation collective va dans le même sens quand elle dispose, au premier paragraphe de l’article 5: «Des mesures adaptées aux circonstances nationales devront être prises en vue de promouvoir la négociation collective.»
- 644. En conclusion, il convient de signaler qu’aucune des deux conventions qui protègent le droit d’organisation syndicale et la négociation collective ne pourrait faire obstacle à l’inclusion dans la Constitution, en vertu d’un acte législatif, d’une disposition limitant la négociation collective concernant la modification du régime général des pensions.
- 645. Le gouvernement rappelle qu’en 2003 a été organisé un référendum, qui comportait des questions sur des sujets divers, comme par exemple l’organisation politique, le contrôle fiscal, la structure du budget, etc. Seule la question no 8 se rapportait au sujet de la retraite, raison pour laquelle nous jugeons utile de préciser que le résultat dudit référendum ne peut être interprété comme une manifestation de refus de la modification du régime de retraite.
- 646. Le gouvernement signale qu’à l’alinéa a) ii), concernant les conventions qui contiennent des clauses sur les pensions et qui ont été conclues avant l’entrée en vigueur de l’acte législatif no 01 de 2005, il convient de mentionner que l’acte en question dispose ce qui suit:
- …
- En matière de pensions, tous les droits acquis seront respectés.
- Troisième paragraphe. Les règles concernant les pensions et qui sont applicables à la date d’entrée en vigueur de cet acte législatif, contenues dans des pactes, conventions collectives du travail, sentences arbitrales ou accords présentant toutes les garanties de validité, seront maintenues pendant la durée initialement fixée. Les pactes, conventions ou sentences arbitrales conclus ou rendus entre la date d’entrée en vigueur de cet acte législatif et le 31 juillet 2010 ne pourront contenir en matière de retraites des conditions plus favorables que celles actuellement en vigueur. Dans tous les cas, ils deviendront inapplicables le 31 juillet 2010.
- 647. Il ressort de ce qui précède que les clauses concernant les retraites et qui ont été adoptées avant l’acte législatif no 01 de 2005 seront respectées. Le gouvernement signale toutefois que, au sujet des mesures que le Comité de la liberté syndicale recommande de prendre, cela est impossible vu que c’est une décision qui relève du pouvoir législatif et non du pouvoir exécutif auquel le gouvernement appartient (art. 113 de la Constitution politique).
- 648. S’agissant de l’alinéa a) iii) des recommandations relatif à la réalisation de consultations, le gouvernement indique que, en consultant par voie de référendum sur la question des pensions, il a voulu remédier à une situation grave créée par le déficit du système de retraite, ainsi qu’il l’a déjà dit. La question no 8 du référendum était énoncée comme suit:
- 8. Limitation des pensions et salaires à la charge de ressources de nature publique.
- Question: Approuvez-vous la mesure énoncée à l’article suivant pour réduire les inégalités sociales et maîtriser la dépense publique?
- Ajouter à la Constitution politique l’article 187 libellé comme suit:
- A partir de l’entrée en vigueur de la présente réforme constitutionnelle, toute personne qui acquerra le droit de prendre sa retraite ne pourra recevoir à la charge de ressources de nature publique une pension supérieure à l’équivalent de vingt-cinq (25) fois le salaire minimum mensuel légal en vigueur. Feront exception les personnes ayant des droits acquis et celles couvertes par un régime de retraite d’exception ou spécial.
- Les régimes de retraite d’exception, spéciaux ou découlant de règles et d’accords quelconques établis entre des Colombiens expireront le 31 décembre 2007, à l’exception du régime de retraite des présidents de la République applicable à la date d’entrée en vigueur de la présente réforme constitutionnelle.
- Le régime de transition sera régi par la loi sur le système général de pensions.
- Pour tout le monde, les conditions à remplir et les prestations de retraite versées à partir de l’entrée en vigueur de la présente réforme constitutionnelle, les conditions à remplir et les prestations applicables à l’ensemble des personnes, hormis les exceptions temporaires susmentionnées, seront celles établies dans la loi sur le système général de pensions. Ne pourra être prise aucune disposition ni invoqué aucun accord passé entre des Colombiens, de quelque nature que ce soit, pour s’écarter de ce qui est établi dans cette loi.
- Excepté les cas prévus dans la loi sur le système général de pensions, à partir de l’entrée en vigueur de la présente réforme constitutionnelle, aucune pension de vieillesse ou de retraite ne pourra être consentie aux personnes de moins de 55 ans.
- La loi générale sur les pensions prescrira la révision des pensions attribuées sans que les conditions légales aient été remplies, ou ayant donné lieu à un abus de droit.
- Du 1er janvier 2005 jusqu’à décembre 2006, il ne sera procédé à aucune augmentation de salaires et pensions versés aux fonctionnaires, ni de salaires et pensions versés à d’autres personnes au moyen de ressources publiques, lorsque les sommes ainsi perçues dépassent l’équivalent de vingt-cinq (25) fois le salaire minimum mensuel légal en vigueur.
- Est exclu de cette disposition le régime juridique appliqué aux membres de la force publique.
- Oui [ ]
- Non [ ]
- Sans opinion [ ]
- 649. Selon les informations provenant du Registre national de l’état civil, voici quelles ont été les réponses données à la question ci-dessus dans le cadre de ce scrutin populaire:
- Oui
- Non
- Bulletins
- nuls
- Total des votes
- (oui + non
- + bulletins nuls)
- Pourcentage
- de participation
- Oui
- Pourcentage
- de participation
- Absence
- de réponse
- 5 602 823
- 493 563
- 124 926
- 6 221 312
- 90,06
- 24,82
- 451 738
- 650. A la question no 8, ainsi qu’on peut le voir, 90,06 pour cent des électeurs ont répondu par l’affirmative. Cependant, la question n’a pas été intégrée à la Constitution parce qu’on avait besoin d’une participation de 25 pour cent du corps électoral et que la participation n’a été que de 24,82 pour cent. Pour qu’un référendum soit approuvé, il faut non seulement une majorité de réponses affirmatives (pour le oui) aux questions soumises à la considération des électeurs, mais aussi une participation globale minimale de 25 pour cent du corps électoral. En conclusion, si la réponse à la question no 8 n’a pas été intégrée à la Constitution, ce n’est pas faute d’avoir été approuvée, mais à cause d’un manque de participation du corps électoral. Plus de 5 millions et demi de votants se sont prononcés, ce qui représente un nombre extrêmement significatif, raison pour laquelle nous ne jugeons pas nécessaire d’organiser une autre consultation comme le propose le Comité de la liberté syndicale; de même, des explications pertinentes ont été données concernant l’incidence économique qu’aurait la non-application de l’acte législatif no 01 de 2005. (Le gouvernement joint une copie des résultats publiés par le Registre national de l’état civil.)
- 651. S’agissant de l’alinéa b) des recommandations, le gouvernement signale qu’il est respectueux du droit de négociation collective dans le cas des organisations syndicales de fonctionnaires. Ainsi qu’on l’a expliqué à diverses occasions, ces derniers ne peuvent pas présenter de cahiers de revendications pour qu’une solution soit apportée à des conflits de travail dus à leurs relations avec les organismes publics patronaux correspondants, en passant par toutes les étapes prévues dans le Code du travail – règlement direct, convention collective et, éventuellement, grève et arbitrage –, mais ils peuvent présenter une requête en vue d’une amélioration de leurs conditions de travail, sous réserve que soient respectées les compétences constitutionnelles des autorités pour la détermination unilatérale des émoluments des agents publics. Ainsi que le gouvernement l’a expliqué dans plusieurs de ses réponses, le Procureur a apporté toute l’attention voulue aux demandes de l’organisation syndicale. (Le gouvernement joint une copie de la réponse envoyée par les services du Procureur général de la nation.)
- 652. En ce qui a trait à l’alinéa c) des recommandations, le gouvernement signale tout d’abord que les services du Procureur général de la nation ont indiqué que M. Franco Cuartas n’a jamais présenté sa démission pendant qu’il était lié à son employeur.
- 653. Le gouvernement demande au comité de préciser quel organisme ou quelle personnalité aurait la compétence voulue pour réaliser une enquête indépendante, selon les critères du Comité de la liberté syndicale. Les services du Procureur général de la nation, conformément à ce que prévoit l’article 3 de la loi no 734 de 2002, sont habilités en priorité à exercer le pouvoir disciplinaire et peuvent, à ce titre, entamer, poursuivre ou renvoyer une enquête ou un jugement quelconque relevant des organes de contrôle disciplinaire interne des entités publiques.
- 654. Concernant la cessation de toute mesure disciplinaire à l’encontre de M. Franco Cuartas, comme l’indique le Procureur général de la nation, «c’est une mesure impossible à prendre, vu que tant l’article 6 de la Constitution politique que la loi no 734 de 2002 m’imposent l’obligation d’en respecter le contenu, et d’engager une enquête disciplinaire lorsque a été identifié le ou les auteurs présumés de l’infraction, sans exception aucune, au travers de la plainte ou de l’enquête préliminaire».
- 655. S’agissant de l’alinéa d) des recommandations, le gouvernement signale au sujet du licenciement de M. Luis Carmelo Cataño Cataño que le quatrième tribunal du travail de la région de Bogotá, D.C., a rendu un jugement favorable à M. Cataño Cataño, jugement dont les services du Procureur général de la nation ont fait appel. En appel, la chambre du travail du tribunal supérieur de Bogotá a révoqué la décision de première instance rejetant donc les prétentions du demandeur et dégageant ainsi les services du Procureur général de la nation de toute responsabilité.
- 656. Quant au licenciement de M. Carlos Romero Aguilar, selon la communication no 101151 du 7 mai 2007, la directrice de la Division des ressources humaines informe le Bureau des affaires juridiques que les informations fournies par le ministère de la Protection sociale aux services du Procureur ne font pas apparaître le nom de M. Romero Aguilar dans la liste des directions et sous-directions syndicales et que, par conséquent, M. Romero Aguilar ne jouit pas de l’immunité syndicale.
- 657. Pour ce qui est de M. Francisco Molina Alvarado, il est indiqué dans la communication susmentionnée que ce dernier a été inscrit à la sous-direction de la section de Bogotá par le ministère de la Protection sociale; cependant, la secrétaire générale des services du Procureur l’a informé de la désignation, après un concours au mérite, de M. Jovanny Quiñónez Díaz au poste occupé provisoirement par M. Molina Alvarado. Conformément à l’article 188 du décret-loi no 262 de 2000, toute nomination à titre provisoire est valable pour une durée maximale de six (6) mois prorogeable de six (6) autres mois pendant que se déroule le processus de sélection. En l’espèce, M. Molina Alvarado n’a pas été licencié mais il a été remplacé par la personne qui a obtenu le poste à l’issue d’un concours au mérite.
- 658. Dans le cas de M. Silvio Elías Murillo, le gouvernement indique que la demande de réintégration de M. Murillo a essuyé le refus du deuxième tribunal du travail en première instance et de la chambre du travail du tribunal supérieur en seconde instance.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité- 659. Le comité prend note des nouvelles allégations de la Confédération générale du travail (CGT) et des observations du gouvernement en réponse aux recommandations faites par le comité lors de l’examen antérieur du cas.
- 660. En ce qui concerne l’alinéa a) des recommandations relatif à la limitation du droit de négociation collective en vertu de l’adoption récente de l’acte législatif no 01 du 22 juillet 2005, le comité prend note de ce que le gouvernement fait référence aux circonstances économiques qui ont conduit à l’adoption de ladite législation ayant pour objet d’établir un système universel et solidaire, viable sur le plan économique et financier. Le comité note que le gouvernement insiste sur le fait que la réglementation en rapport avec la politique des pensions constitue une attribution confiée au gouvernement par la Constitution et signale que les questions relatives aux pensions n’entrent pas dans le champ d’application des conventions nos 87 et 98, et que ce n’est pas contrevenir à ces conventions que d’interdire ou d’empêcher que ces questions soient négociées collectivement.
- 661. A cet égard, le comité rappelle premièrement, comme il l’avait fait lors de l’examen antérieur du cas, qu’il reconnaît le droit des Etats de réglementer le système de retraite, mais il souligne qu’il est nécessaire que ces derniers respectent le principe du droit à la négociation collective dans ce processus. [Voir 344e rapport, paragr. 801 a) i).] Ainsi que le comité l’avait fait observer lors de l’examen antérieur, l’adoption d’un régime légal de retraite ne relève pas, en règle générale, de la compétence du comité. Toutefois, celui-ci peut vérifier si le régime en question a été adopté dans le respect des principes de la liberté syndicale. En ce sens, le comité observe que, jusqu’à la publication de l’acte législatif no 01, la faculté d’introduire des clauses sur les retraites dans les conventions collectives était légale, notamment des clauses qui amélioraient les prestations légales, et c’est ce qui s’est fréquemment produit entre des entreprises privées et publiques et des organismes publics, d’une part, et diverses organisations syndicales, d’autre part. Dans ces hypothèses, les parties avaient fixé des règles par le biais de la négociation collective concernant le mode d’attribution et le montant des pensions applicables aux travailleurs de l’entreprise ou du secteur.
- 662. La publication de l’acte législatif no 01 modifie le cadre juridique existant en disposant que «à partir de l’entrée en vigueur du présent acte législatif, il ne pourra être établi en matière de retraites, dans des pactes, des conventions collectives du travail, des sentences arbitrales ou dans tout acte juridique quelconque, des conditions différentes de celles établies dans les lois régissant le système général de pensions». Il est établi plus loin que, «sans préjudice des droits acquis, du régime applicable aux membres de la force publique et au président de la République, et de ce qui est établi dans les paragraphes du présent article, les régimes de retraite spéciaux, d’exception et tout autre régime distinct de celui établi de manière permanente dans les lois régissant le système général de pensions viendront à expiration le 31 juillet 2010».
- 663. En effet, le comité observe qu’à partir de la publication de l’acte législatif no 01 il ne sera plus possible de négocier pour les retraites des conditions distinctes de celles du système général. En ce qui concerne les conventions antérieures à l’acte législatif, bien que ce dernier contienne une disposition selon laquelle les droits acquis seront respectés, il est établi plus loin que, dans tous les cas, les régimes déjà existants qui sont distincts du système général cesseront de s’appliquer à partir de 2010. Cela peut impliquer dans certains cas une modification unilatérale du contenu des conventions collectives signées. A cet égard, le comité a considéré dans le passé qu’une telle solution va à l’encontre des principes de la négociation collective ainsi que du principe des droits acquis par les parties. Dans ces conditions, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les conventions collectives qui renferment des clauses sur les pensions soient maintenues jusqu’à leur date d’expiration, même si celle-ci dépasse le 31 juillet 2010.
- 664. En ce qui a trait aux conventions conclues après l’entrée en vigueur de l’acte législatif no 01 concernant notamment l’interdiction générale d’instaurer un régime de retraite distinct du régime général, le comité rappelle que, lors de l’examen antérieur du cas, il avait noté que, selon les allégations, l’acte législatif a été adopté malgré l’opposition des partenaires sociaux, exprimée par un référendum sur lequel ni le gouvernement ni les organisations plaignantes n’ont fourni beaucoup de détails. A ce sujet, le comité avait demandé au gouvernement de réaliser de nouvelles consultations auprès des parties intéressées afin de trouver une solution négociée acceptable pour tous. Le comité prend note des informations fournies par le gouvernement à propos du référendum, d’où il ressort que ce dernier a été décidé par l’autorité législative dans le but d’apporter certaines modifications à la Constitution; le référendum portait sur différents sujets; la huitième question avait trait aux retraites; 90,06 pour cent des votants ont choisi d’approuver le nouveau régime; toutefois, cette disposition n’a pu être incluse dans la Constitution dans la mesure où, en vertu de cette dernière, ledit référendum exigeait une participation supérieure à 25 pour cent, qui n’a pas été atteinte. Le comité note l’avis du gouvernement qui souligne que, malgré tout, plus de 5 millions et demi de personnes ont participé au référendum et que, indépendamment du résultat, l’Etat est compétent pour réglementer la question des retraites par voie législative.
- 665. A cet égard, le comité a expliqué plusieurs fois dans le passé que le processus de consultation en matière de législation et de salaire minimum contribue à ce que les lois, les programmes et les mesures devant être adoptés ou appliqués par les autorités publiques aient un fondement plus solide et soient respectés et appliqués de meilleure façon. Dans la mesure du possible, le gouvernement devrait chercher le consensus général, étant donné que les organisations d’employeurs et de travailleurs doivent pouvoir contribuer au bien-être et à la prospérité de la communauté en général. Ce processus est d’autant plus fondé que les problèmes se posant dans les sociétés sont de plus en plus complexes. Aucune autorité publique ne peut prétendre avoir réponse à tout ni laisser entendre que ce qu’elle propose répondra de façon pleinement adaptée aux objectifs à atteindre. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1076.] Dans ces conditions, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement de, compte tenu des circonstances particulières de ce cas et afin de garantir l’harmonie des relations de travail dans le pays, procéder à de nouvelles consultations approfondies avec les parties intéressées en matière de retraites et de pensions, dans le but de trouver une solution négociée acceptable pour tous et conforme aux conventions sur la liberté syndicale et la négociation collective ratifiées par la Colombie, en veillant notamment à ce que les parties à la négociation collective puissent améliorer les prestations légales en matière de pension et régime de retraite d’un commun accord.
- 666. S’agissant de l’alinéa b) des recommandations relatif au refus des services du Procureur général de la nation de mener des négociations collectives avec le Syndicat national des travailleurs des services du Procureur général de la nation (SINTRAPROAN), le comité note que le gouvernement répète les propos tenus lors de l’examen antérieur du cas, selon lesquels l’article 416 du Code du travail dispose que les organisations syndicales de fonctionnaires ne peuvent pas présenter de cahiers de revendications mais uniquement des requêtes respectueuses. A ce sujet, le comité rappelle que, si certaines catégories de fonctionnaires devaient déjà jouir du droit à la négociation collective conformément à la convention no 98, la promotion de ce droit a été reconnue d’une manière généralisée pour tous les agents de la fonction publique depuis la ratification de la convention no 154, le 8 décembre 2000, en conséquence de quoi les travailleurs du secteur public et de l’administration publique centrale doivent jouir du droit de négociation collective. Dans ces conditions, après avoir rappelé que, dans la négociation collective menée au sein de l’administration publique, il est admis de fixer des modalités d’application particulières, mais estimant dans le même temps que la simple possibilité de présenter des requêtes respectueuses ne suffit pas pour conclure à l’existence d’un vrai droit de négociation collective libre et volontaire, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour réviser l’article 416 du Code du travail afin que le droit à la négociation collective des fonctionnaires soit respecté, conformément aux dispositions des conventions nos 98 et 154 ratifiées par la Colombie.
- 667. Concernant l’alinéa c) des recommandations relatif aux allégations de harcèlement sous la forme de procédures disciplinaires successives à l’encontre de M. Franco Cuartas, membre fondateur et dirigeant du SINTRAPROAN, le comité rappelle qu’il avait demandé au gouvernement de confier une enquête à une personnalité indépendante ayant la confiance des parties et que, si cette enquête confirmait lesdites allégations, de prendre les mesures nécessaires afin de réintégrer l’intéressé et de mettre un terme à toute sanction disciplinaire à son endroit. A cet égard, le comité note que, selon le gouvernement, les services du Procureur général de la nation indiquent que M. Cuartas n’a pas démissionné de son poste. En outre, le gouvernement signale que les services du Procureur général de la nation sont l’autorité qui détient le pouvoir disciplinaire et que, en conséquence, il incombe à cet organisme d’entamer, poursuivre ou renvoyer une enquête ou un jugement quelconque relevant des organes de contrôle disciplinaire interne des entités publiques.
- 668. A ce propos, le comité note que les services du Procureur général de la nation détiennent le pouvoir disciplinaire et d’enquête, mais il observe que les recommandations qu’il avait formulées au sujet de l’organe d’enquête permettant de garantir une complète impartialité n’ont pas été suivies. Sur ce point, le comité estime qu’en l’espèce l’autorité indépendante devrait être l’autorité judiciaire ou une personnalité indépendante qui jouit de la confiance des parties. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires sans retard pour diligenter une enquête indépendante sur ces allégations et, si ces dernières se vérifient, de prendre les mesures qui s’imposent pour que les sanctions disciplinaires décidées à l’encontre de M. Cuartas restent sans effet.
- 669. En ce qui concerne l’alinéa d) des recommandations relatif au licenciement présumé de MM. Luis Carmelo Cataño Cataño, Carlos Romero Aguilar, Francisco Molina et Silvio Elías Murillo en dépit du fait qu’ils jouissaient de l’immunité syndicale et, dans le cas de M. Murillo, bien que le tribunal administratif du Chocó ait ordonné sa réintégration, le comité prend note des informations du gouvernement selon lesquelles: dans le cas de M. Cataño Cataño, le tribunal supérieur de Bogotá a refusé la réintégration, renversant ainsi le jugement rendu par le quatrième tribunal du travail de la région de Bogotá; s’agissant de M. Carlos Romero Aguilar, il ne jouissait pas de l’immunité syndicale; quant à M. Francisco Molina, il n’a pas été licencié mais il occupait son poste à titre provisoire, poste qui a fait l’objet d’un concours et qui a été attribué à une autre personne; dans le cas de M. Murillo, le gouvernement précise que la demande de réintégration a été refusée en première comme en seconde instance par les tribunaux. Le comité observe que le gouvernement n’apporte pas d’éléments d’information complémentaires sur le motif des licenciements, qu’il n’indique pas si l’immunité syndicale des dirigeants a été respectée, pas plus qu’il ne joint une copie des jugements qui permette de vérifier que le licenciement des dirigeants syndicaux n’a pas constitué un acte de discrimination antisyndicale. Le comité rappelle le principe en vertu duquel un travailleur ou un dirigeant syndical ne doit pas être lésé à cause de ses activités syndicales. Afin de pouvoir formuler ses conclusions en pleine connaissance de cause, le comité demande au gouvernement de lui envoyer copie des jugements par lesquels a été refusée la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés.
- 670. En ce qui concerne les nouvelles allégations présentées par la CGT à propos du licenciement de MM. Jhon Jair Silva et Jesse Moisés Gutiérrez Herrera, adhérents du SINTRAPROAN, le comité demande au gouvernement de lui envoyer ses observations sans retard sur la question.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 671. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui a trait aux allégations relatives à la limitation du droit de négociation collective du fait de l’adoption récente de l’acte législatif no 01 du 22 juillet 2005 portant modification de l’article 48 de la Constitution politique sur la sécurité sociale, le comité:
- i) concernant les conventions conclues avant l’entrée en vigueur de la législation, demande une nouvelle fois au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les conventions collectives qui renferment des clauses sur les pensions maintiennent leurs effets jusqu’à leur date d’expiration, même si celle-ci dépasse le 31 juillet 2010;
- ii) s’agissant des conventions conclues après l’entrée en vigueur de l’acte législatif no 01, demande une nouvelle fois au gouvernement, compte tenu des circonstances particulières de ce cas et afin de garantir l’harmonie des relations de travail dans le pays, de procéder à de nouvelles consultations approfondies exclusivement avec les partenaires sociaux, dans le but de trouver une solution négociée acceptable pour tous et conforme aux conventions sur la liberté syndicale et la négociation collective ratifiées par la Colombie, en veillant notamment à ce que les parties à la négociation collective puissent améliorer les prestations légales en matière de pension et régime de retraite d’un commun accord.
- b) S’agissant des allégations relatives au refus des services du Procureur général de la nation de mener des négociations collectives avec le Syndicat national des travailleurs des services du Procureur général de la nation (SINTRAPROAN), le comité demande une nouvelle fois au gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour réviser l’article 416 du Code du travail afin que le droit à la négociation collective des fonctionnaires soit respecté, conformément aux dispositions des conventions nos 98 et 154 ratifiées par la Colombie.
- c) En ce qui a trait aux allégations de harcèlement sous la forme de procédures disciplinaires successives à l’encontre de M. Franco Cuartas, membre fondateur et dirigeant du SINTRAPROAN, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires sans retard pour diligenter une enquête indépendante sur ces allégations et, si ces dernières se vérifient, de prendre les mesures qui s’imposent pour que les sanctions disciplinaires décidées à l’encontre de M. Cuartas restent sans effet.
- d) S’agissant du licenciement présumé de MM. Luis Carmelo Cataño Cataño, Carlos Romero Aguilar, Francisco Molina et Silvio Elías Murillo en dépit du fait qu’ils jouissaient de l’immunité syndicale, le comité, pour pouvoir formuler ses conclusions en pleine connaissance de cause, demande au gouvernement de lui envoyer une copie des jugements par lesquels a été refusée la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés.
- e) Le comité demande au gouvernement de lui envoyer ses observations sans retard concernant les nouvelles allégations présentées par la CGT à propos du licenciement de MM. Jhon Jair Silva et Jesse Moisés Gutiérrez Herrera, adhérents du SINTRAPROAN.