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- 724. La plainte figure dans une communication du Syndicat unique des travailleurs de l’industrie de la construction et des secteurs apparentés (SUNTRACS) et de la Confédération nationale de l’unité syndicale indépendante (CONUSI) de mars 2009. Le SUNTRACS et la CONUSI ont présenté des informations complémentaires par communication du 28 avril 2010. L’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB) s’est associée à la plainte par communication du 27 mai 2010.
- 725. Le gouvernement a fait parvenir des observations partielles par communications du 21 septembre 2009 et du 12 avril 2010.
- 726. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 727. Dans leurs communications de mars 2009 et du 28 avril 2010, le Syndicat unique des travailleurs de l’industrie de la construction et des secteurs apparentés (SUNTRACS) et la Confédération nationale de l’unité syndicale indépendante (CONUSI) présentent des allégations d’assassinats, d’agressions et d’actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes et d’arrestations massives de manifestants dans le cadre d’un grave climat de persécution contre le mouvement syndical au Panama, de même que de violations du droit de négociation collective, de création d’un syndicat par une entreprise et de licenciements antisyndicaux.
- 728. Les organisations plaignantes allèguent que, le samedi 11 août 2007, les travailleurs du bâtiment affiliés au SUNTRACS se sont mis en grève dans le cadre du projet d’autoroute Panamá-Colón développé par l’entreprise Constructora Norberto Odebrecht S.A. Les autorités publiques n’ont pas pu assurer le droit à la grève des travailleurs puisque, après avoir été empêchés d’entrer dans l’entreprise, ils ont été agressés par des hommes de main qui semblaient être les dirigeants du syndicat contrôlé par l’entreprise.
- 729. Les organisations plaignantes ajoutent que, le 13 août 2007, l’entreprise a fait agresser physiquement et verbalement, par des hommes de main qu’elle avait recrutés, les travailleurs et les membres du comité directeur du SUNTRACS pendant qu’un piquet de grève se mettait en place devant l’entreprise. A la suite de cette agression, le sous-secrétaire de la surveillance du comité directeur du SUNTRACS, M. David Niño, et le secrétaire à la santé et à la sécurité au travail de la CONUSI, M. Adamson Ronald, ont été blessés. De même, MM. Yamir Córdoba et Luis González, tous deux membres du comité directeur du SUNTRACS, et M. Eustaquio Méndez, secrétaire des finances de la CONUSI, ont été agressés physiquement.
- 730. Les organisations plaignantes allèguent que, le 14 août 2008, quelque 200 affiliés au SUNTRACS, parmi lesquels se trouvaient des délégués syndicaux et des membres du comité directeur de la CONUSI et du SUNTRACS, se sont de nouveau dirigés vers le projet de construction de l’autoroute Panamá-Colón mis en œuvre par l’entreprise pour protester pacifiquement à la suite de l’agression et de l’atteinte à l’intégrité physique dont les dirigeants syndicaux susmentionnés avaient été victimes. Elles ajoutent que, entre 7 et 9 heures du matin, les hommes de main et les délinquants de droit commun recrutés par l’entreprise, faisant usage d’armes à feu, tentèrent d’assassiner des dirigeants du SUNTRACS et de la CONUSI, faisant feu contre eux de l’intérieur des installations du chantier pendant qu’ils protestaient pacifiquement devant l’entreprise. A l’issue de cette action, on retrouva le dirigeant syndical M. Osvaldo Lorenzo Pérez, membre du SUNTRACS, assassiné et MM. José de los Santos Castillo Ceballos et Carlos Dimas Colindres Covilia, blessés. Les organisations plaignantes affirment que ces faits se sont produits en présence des membres de la police nationale dont l’inaction suspecte a permis aux hommes de main de commettre ces actes délictueux à l’encontre des membres du SUNTRACS et de la CONUSI. Le SUNTRACS a entamé une procédure pénale afin d’identifier les auteurs matériels et les instigateurs de l’assassinat du dirigeant syndical M. Lorenzo Pérez; pourtant, alors que près de deux années se sont écoulées, le cas n’est toujours pas résolu. Selon les organisations plaignantes, on observe un climat d’impunité et de complicité de la part de l’Etat concernant ces faits.
- 731. Les organisations plaignantes signalent que, le 12 juin 2007, le SUNTRACS a fait publiquement état de l’intrusion d’hommes de main dans le projet Isla Viveros. Dans ce contexte, les travailleurs affiliés au SUNTRACS ont annoncé des actions de blocage et des manifestations à cause du non-respect de la législation du travail et de la précarité des conditions de travail, de santé et de sécurité, de même que de pratiques antisyndicales. A l’issue de ces protestations, le dirigeant syndical M. Luiyi Antonio Argüelles Moya fut assassiné à Isla Viveros le 16 août 2007, victime d’un coup de feu tiré par le sergent de la police nationale du Panama, M. Manuel Moreno. Ce même jour, le dirigeant syndical M. Raimundo Garcés, secrétaire à la presse et à la propagande du SUNTRACS, a été arrêté.
- 732. Les organisations plaignantes signalent que l’assassinat du dirigeant syndical M. Argüelles Moya s’est produit deux jours après celui du dirigeant M. Osvaldo Lorenzo mais que, au lieu d’instruire les plaintes, le gouvernement a déclaré que le SUNTRACS était le principal responsable des faits survenus. Le SUNTRACS a déposé plainte au pénal contre le sergent Manuel Moreno, le directeur de la police nationale, l’entreprise Maqtec S.A. et la mairie de la juridiction pour le délit d’homicide et d’atteinte à la sécurité collective. Pourtant, suite à cette plainte, seul le sergent Moreno a été inculpé, toutes les autres personnes présumées impliquées étant disculpées. Près de deux ans après le lancement de la procédure, aucun verdict n’a encore été prononcé sur ce cas par le deuxième tribunal supérieur du district judiciaire de Panama puisque l’on attend toujours qu’une date d’audience soit fixée. Les organisations plaignantes considèrent que l’instruction a été menée dans une atmosphère de totale impunité et que l’appareil d’Etat a été, pendant toute la procédure, du côté des personnes présumées impliquées.
- 733. Les organisations plaignantes signalent que, le 12 février 2008, les travailleurs du SUNTRACS ont conduit une grève nationale contre la hausse du coût de la vie et pour obtenir l’approbation d’une réglementation de la santé et de la sécurité dans le secteur de la construction. Alors que les travailleurs manifestaient pacifiquement dans la ville de Colón, ils furent brutalement réprimés. C’est dans ce contexte que se produisit l’assassinat du dirigeant syndical du SUNTRACS, M. Al Iromi Smith, ainsi que les agressions des travailleurs MM. Ronaldo Pinilia et Félix de León par des membres de la police nationale. Le dirigeant syndical assassiné, M. Al Iromi Smith, était un important dirigeant du SUNTRACS dans la province de Colón, de même qu’un dirigeant communal et un membre actif du mouvement étudiant. Il avait pris part à diverses actions revendicatives en faveur des droits des travailleurs et avait notamment dénoncé publiquement dans les médias la politique répressive du gouvernement.
- 734. Les organisations plaignantes indiquent que l’assassinat du dirigeant M. Al Iromi Smith a eu pour effet de faire sortir des milliers de travailleurs dans les rues pour protester. Le gouvernement a réagi en faisant arrêter et incarcérer près de 500 travailleurs dans des casernes de la police nationale, où des représentants du pouvoir judiciaire furent envoyés pour les juger pour trouble à l’ordre public. Ces procès se déroulèrent sans qu’aucun droit soit respecté et en violant toutes les garanties d’une procédure régulière. Les travailleurs se virent imposer des amendes de plus de 100 dollars, qui furent réglées par le SUNTRACS pour qu’ils puissent recouvrer la liberté. Les organisations plaignantes font savoir que, au vu des faits de violence survenus, une plainte pour crime a été déposée contre MM. Eliseo Madrid Valdés et Miguel Ángel Pérez Ortega, membres de la police nationale, pour l’homicide du dirigeant M. Al Iromi Smith. La procédure d’enquête menée par le troisième parquet supérieur du premier district judiciaire de Panama n’est toujours pas terminée et elle a présenté un certain nombre d’anomalies. Les organisations plaignantes considèrent que ce retard et les vices constatés dans le déroulement de la procédure leur permettent d’affirmer que l’Etat n’offre pas les moyens idoines pour garantir le droit à la liberté syndicale, étant donné que les agressions et l’assassinat avaient précisément pour motif de restreindre l’exercice de ce droit.
- 735. Les organisations plaignantes déclarent que, le 25 février, le ministre de l’Economie et des Finances du gouvernement national a annoncé l’approbation par le Conseil du Cabinet d’un projet de réforme fiscale que le gouvernement entreprendrait en augmentant de 5 à 7 pour cent l’impôt sur les transferts de biens corporels meubles et les prestations de services, entre autres mesures portant atteinte aux conditions de vie des travailleurs et de leurs familles. Le 15 mars 2010, le Président de la République du Panama a entériné l’application de la loi sur la réforme fiscale. Les organisations plaignantes allèguent que, le 16 mars, les ouvriers du bâtiment membres du SUNTRACS ont participé à un rassemblement de protestation dans les rues de la ville et ont distribué des tracts aux voitures et aux piétons qui passaient. C’est alors que des membres de la police nationale, sur ordre de la Présidence de la République, ont commencé à réprimer les manifestants sans aucune raison. Ladite répression au moyen de bombes lacrymogènes et de coups de feu de fusils tirant des plombs de chasse et des balles de caoutchouc a entraîné l’arrestation de 224 personnes, dont 47 affiliées au SUNTRACS. Les organisations plaignantes indiquent que les détenus ont été transférés au siège principal de la police nationale, où ils ont été maintenus entassés, sans nourriture, sans pouvoir se faire apporter ni vêtements, ni linge ni affaires de toilette et sans qu’on leur donne de l’eau potable avant d’être ultérieurement transférés au centre pénitentiaire La Joya.
- 736. Les organisations plaignantes ajoutent que, le 20 mars, dans le cadre de procédures irrégulières contre les travailleurs membres du SUNTRACS, ces derniers furent conduits auprès de la magistrature de Calidonia et Bella Vista, où ils se virent frappés d’amendes sans que leur jugement puisse prouver leur participation aux faits dont ils étaient accusés. De la même manière, on les informa que le bureau du Procureur auxiliaire de la République poursuivrait les enquêtes contre les membres du SUNTRACS qui avaient déjà été sanctionnés par les magistrats et que, de ce fait, on prétend les juger deux fois pour la même affaire.
- 737. Les organisations plaignantes signalent que, le 23 mars, les autorités du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale ont harcelé, calomnié, offensé et menacé à travers la presse les membres du SUNTRACS ainsi que ses dirigeants, et en particulier le dirigeant syndical M. Saúl Méndez. Elles ajoutent que, au mois de février, le gouvernement a présenté un projet de loi instaurant la présentation d’un extrait de casier judiciaire comme condition requise pour l’obtention d’un poste de travail. Elles allèguent que ce projet s’est transformé en moyen de persécution des travailleurs et de la population en général, en rendant les protestations dans les rues passibles d’une peine de six mois à deux ans de prison. Il s’agissait de mettre en place une mesure de coercition pour les faits survenus le 16 mars 2010.
- Violation du droit de négociation collective, création d’un syndicat par l’entreprise, licenciements antisyndicaux
- 738. Les organisations plaignantes allèguent que l’entreprise Constructora Norberto Odebrecht S.A. a lancé la mise en œuvre d’un chantier dit du «tronçon Madden-Colón» le 8 mars 2007 et que, le 2 mars 2007, elle a notifié au service des organisations sociales du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale l’affiliation de dix travailleurs à un syndicat, dans le seul objectif de légitimer une soi-disant convention collective présentée au ministère le 12 mars 2007. Selon les organisations plaignantes, il ne fait aucun doute que cette prétendue négociation d’une convention collective ne s’est pas déroulée entre l’entreprise et une authentique représentation syndicale, mais qu’il s’agissait uniquement d’empêcher les travailleurs qui opéraient dans le projet de construction d’exercer les libertés collectives de libre affiliation et de négociation collective. Les organisations plaignantes affirment que, après la signature de cette fausse convention collective, l’entreprise a imposé aux travailleurs l’affiliation obligatoire au syndicat «fantoche» comme condition requise pour pouvoir travailler sur le chantier. Dans ce contexte, de nombreux travailleurs affiliés au SUNTRACS se sont vus contraints de renoncer à leur syndicat et d’accepter la nouvelle affiliation obligatoire au syndicat créé par l’entreprise. Toutefois, après avoir obtenu le travail, de nombreux travailleurs, ne se sentant pas représentés, se sont de nouveau affiliés au SUNTRACS. Les organisations plaignantes ajoutent que, devant les graves manquements au droit du travail survenant sur le chantier, les travailleurs ont fait appel au SUNTRACS pour dénoncer la précarité des conditions de travail, les pratiques antisyndicales et la violation du droit à la liberté syndicale. C’est ainsi que, le 2 mai 2007, le SUNTRACS a présenté un cahier de revendications à l’entreprise Retraneq S.A., qui est une sous-traitante d’Odebrecht, mais aucune solution satisfaisante pour les travailleurs n’ayant été trouvée le SUNTRACS a dû déposer un avis de grève le 18 juin 2007. Le 23 mai 2007, le SUNTRACS a également présenté un cahier de revendications directement à l’entreprise Odebrecht mais, du fait des menaces et de la coercition exercées par l’entreprise contre les travailleurs affiliés au SUNTRACS, ce cahier a été retiré devant la menace de graves représailles. Les organisations plaignantes allèguent que plus de 100 travailleurs affiliés au SUNTRACS ont été licenciés pour avoir refusé l’affiliation obligatoire.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 739. Dans sa communication du 21 septembre 2009, le gouvernement déclare que le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a procédé à une vaste enquête qu’il a étendue à toute la compétence de juridiction de l’institution. Sur ces questions, il a rencontré certaines difficultés pour obtenir les informations pertinentes. Il a également pu compléter les enquêtes de telle sorte que certains doutes sont apparus quant à la véracité des allégations formulées par les organisations plaignantes puisque, dans certains cas, avec de mauvaises intentions, la réalité des faits a été dénaturée et des dénonciations sans aucun fondement ont été formulées qui, en réalité, ne montrent pas que le gouvernement national n’applique pas les conventions ratifiées par le Panama. Le gouvernement déclare que, pour pouvoir clarifier les faits, le ministère a demandé aux organes de l’Etat les informations pertinentes sur les différentes affaires évoquées dans la plainte présentée par le SUNTRACS. Ainsi, en accord avec les informations obtenues, le gouvernement fait savoir ce qui suit:
- – en ce qui concerne l’allégation relative à la négociation de la convention collective dans l’entreprise Retraneq S.A., elle a été réglée par décision no 171-DGT-RT-07 du 31 juillet 2007, selon laquelle il revient au Syndicat national du secteur de la construction et du percement de Panamá (SINTICOPP) de négocier les cahiers de revendications. De même, Retraneq S.A. a passé un contrat de concession avec le projet Madden-Colón, ce qui a conduit le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale (MITRADEL) à offrir sa médiation entre le SUNTRACS, le SINTICOPP et l’entreprise Retraneq S.A. Cette entreprise n’a pas eu recours aux négociations du MITRADEL. Le SUNTRACS a lancé un appel à la grève contre l’entreprise Retraneq S.A. pour le 11 juin 2007;
- – quant à l’assassinat du dirigeant M. Osvaldo Lorenzo Pérez, pour déterminer les actions juridiques que l’organe judiciaire de Panama, à titre d’organe indépendant de l’organe exécutif, peut prendre et, en vertu du fait que les délits contre la vie font d’office l’objet d’une enquête, comme l’indique l’article 1951 du Code judiciaire de la République du Panama, il a été demandé à la Cour suprême de justice de l’informer sur les conditions juridiques mises en œuvre. La Cour suprême de justice, par communication no SGP-1405 du 15 septembre 2009, a indiqué que le deuxième tribunal de justice, par un jugement rendu le 19 mai 2009, a ordonné par décret l’ouverture d’un procès criminel contre MM. Jorge Morgan, Eduardo Boyte Mathews, Jorge Coronado, Rogelio Ramos et Gustavo Santimateo Jean François pour le délit d’homicide volontaire commis sur M. Osvaldo Lorenzo Pérez;
- – en ce qui concerne l’assassinat de M. Luiyi Argüelles Moya, un rapport certifié a été demandé à l’organe judiciaire pour faire savoir où en sont les enquêtes et, par la communication no SGP-1405 du 15 septembre 2009, le deuxième tribunal supérieur de justice a, par décision no 299 du 11 septembre 2009, ouvert un procès criminel contre MM. César Garay Carmona et Manuel Moreno Asprilla pour le délit d’homicide volontaire commis à l’encontre de M. Luiyi Argüelles;
- – quant à l’assassinat du syndicaliste M. Al Iromi Smith, la Cour suprême de justice a fait savoir le 15 septembre 2009 que le deuxième tribunal supérieur de justice a ordonné l’arrestation de M. Eliseo Madrid et des mesures conservatoires à l’encontre de M. Miguel Ángel Pérez Ortega et, à l’heure actuelle, la procédure pénale suit son cours.
- 740. Le gouvernement affirme qu’il ne procède ni ne procédera à aucun type d’actes de persécution à l’encontre de dirigeants syndicaux ou de membres des syndicats. L’Etat panaméen, par l’intermédiaire de l’organe judiciaire, veille à faire avancer les enquêtes et a lancé l’instruction d’un procès criminel contre les personnes présumées responsables de la mort des syndicalistes précités, ce qui atteste que le Panama respecte la garantie d’une procédure régulière pour la détermination des responsables des faits exposés dans la plainte. Il informe d’autre part le comité que, eu égard à sa demande de prier les organisations d’employeurs concernées par le cas de donner les points de vue des entreprises concernées par ledit cas, il s’en remet aux communications que les entreprises Maqtec S.A., Grupo Viveros S.A. et Constructora Norberto Odebrecht S.A. ont adressées à ce sujet.
- 741. Par communication du 18 septembre 2009, l’entreprise Constructora Norberto Odebrecht S.A. de Panamá déclare qu’elle est la plus grande entreprise d’ingénierie et du bâtiment d’Amérique latine et l’une des plus grandes entreprises internationales de construction, offrant depuis soixante-cinq ans des services complets d’ingénierie, de fourniture, de construction, de montage et de gestion d’ouvrages civils, industriels et de technologie spécialisée. Elle a réalisé plus de 2 000 ouvrages de par le monde, dans des régions aussi différentes que l’Asie, l’Afrique, l’Amérique latine et l’Amérique du Nord, en particulier aux Etats-Unis. Odebrecht est une entreprise qui a pris des engagements en faveur des droits des travailleurs et des principes fondamentaux du travail, conformément aux principes de l’OIT et aux principes de l’entreprise elle-même, et elle respecte les normes nationales du travail. Avant de démarrer des activités dans un pays, l’entreprise commence, avant toute chose, par embaucher des spécialistes locaux, essentiellement en matières juridique, professionnelle, financière, comptable, etc., pour qu’ils la conseillent sur les aspects fondamentaux de la législation, en particulier dans les domaines de la fiscalité, du travail, des sociétés, etc., afin de ne pas commettre d’erreurs qui pourraient ultérieurement être interprétées comme des infractions à la loi nationale. Dans tous les projets déjà réalisés ou en cours de réalisation par l’entreprise, les activités de cette dernière en relation avec les travailleurs se sont déroulées dans le cadre légal fixé par la réglementation, notamment par le Code du travail et les conventions collectives.
- 742. En 2006, l’entreprise a lancé son premier projet au Panama. Il s’agissait de la construction d’un système d’irrigation, connu comme le projet Remigio Rojas dans la province de Chiriquí, qui a permis de réaliser le rêve des producteurs panaméens de disposer d’un système d’arrosage innovant pour leurs activités agricoles et qui a généré plus de 630 emplois directs et une multitude d’autres indirects. Plus tard, elle a commencé à construire l’autoroute Madden-Colón et la Cinta Costera, l’une des avenues les plus importantes de la capitale panaméenne qui voit passer chaque jour plus de 70 000 véhicules. L’entreprise signale qu’elle a, en application de la législation du travail panaméenne, négocié et signé une convention collective avec le Syndicat national du secteur de la construction et du percement de Panamá (SINTICOPP), qui est une organisation syndicale reconnue par le ministère du Travail et qui représentait la majorité des travailleurs du projet Remigio Rojas à Chiriquí. D’autre part, le SUNTRACS n’a pas présenté de preuve valable à l’appui de son allégation d’une soi-disant violation de la liberté syndicale et de la non-existence d’une convention collective. De ce fait, l’affirmation du SUNTRACS selon laquelle il y a eu violation de la liberté syndicale et qu’il n’existait pas de convention collective n’est pas correcte et manque de fondement.
- 743. Pour l’autoroute Madden-Colón, une fois l’autorisation de lancement des travaux accordée par le gouvernement, des discussions ont démarré avec le Syndicat national du secteur de la construction et du percement de Panamá (SINTICOPP), qui représente légalement les travailleurs de la construction dans le pays. Ladite négociation était en totale conformité avec les dispositions de la loi.
- 744. Quant au cahier de revendications présenté par le SUNTRACS à l’entreprise Retraneq S.A., il importe de souligner que, dans la même plainte, il est indiqué que ladite entreprise est une sous-traitante d’Odebrecht. De ce fait, le cahier de revendications qui, comme le dit le SUNTRACS, a ensuite été présenté à Odebrecht, ne lui était pas imputable étant donné que sa relation avec Retraneq S.A. était une relation de sous-traitance dans le cadre du fonctionnement normal des activités des deux entreprises, et non une relation de subordination juridique et de dépendance économique. Dès lors, il n’existait (et il n’existe) pour Odebrecht aucune obligation à l’égard des travailleurs de Retraneq S.A., cette dernière ayant été recrutée pour réaliser des services spécialisés.
- 745. Dans le projet Cinta Costera y Nueva Vialidad, la convention collective a été négociée et signée avec le Syndicat unique des travailleurs de l’industrie de la construction et des secteurs apparentés (SUNTRACS). De ce fait, il n’est pas vrai que Odebrecht ne respecte pas les libertés syndicales et ne pratique pas la négociation, étant donné qu’elle a signé une convention collective avec le SUNTRACS. L’entreprise ajoute qu’il importe de préciser que, outre les projets déjà mentionnés, elle réalise actuellement un autre projet de grande envergure. Il s’agit d’un projet hydroélectrique de 115 MW, pour lequel une convention collective a été signée avec le SUNTRACS. Enfin, contrairement à ce qu’affirme le SUNTRACS, il n’est pas vrai qu’Odebrecht a signé avec ce syndicat une convention collective uniquement pour le projet Cinta Costera. Les dirigeants du SUNTRACS ont accès à l’entreprise pour traiter de n’importe quelle affaire sur les relations de travail, comme en attestent les conventions collectives qui ont été signées.
- 746. Concernant l’allégation selon laquelle Odebrecht exerce le contrôle sur le SINTICOPP, cette affirmation semble à la fois infondée et étrange. De fait, on ne voit pas comment on peut dire qu’un contrôle est exercé sur un syndicat qui a été constitué bien longtemps avant qu’Odebrecht commence à travailler au Panama. De plus, elle a souscrit avec le SUNTRACS deux conventions collectives pour des projets distincts. Si le SINTICOPP était effectivement contrôlé par Odebrecht, il eut été pour elle plus simple de ne signer aucune convention collective avec d’autres organisations syndicales, ce qui ne correspond pas à la réalité.
- 747. Pour ce qui a trait à la mort regrettable du citoyen M. Osvaldo Lorenzo Pérez aux abords immédiats du campement du projet Madden-Colón et qui est, de manière irresponsable, imputée à l’entreprise, nous précisons ce qui suit: le matin du 14 août 2007, un groupe considérable (quelque 200 personnes selon la plainte elle-même) de membres du SUNTRACS se sont rendus dans des bus payés jusqu’aux installations de l’entreprise dans le Camping Resort de Chilibre. A cette heure-là, les travailleurs, qui démarraient leurs tâches quotidiennes, furent importunés par la pression qu’exerçait le groupe de membres du SUNTRACS. Les travailleurs qui se trouvaient sur leur lieu de travail ne cherchaient pas à avoir un contact quel qu’il soit avec les membres du SUNTRACS. Les affiliés au SUNTRACS s’étaient déplacés de différents points du territoire national pour aller spécialement faire une «protestation» devant les installations de l’entreprise. De ce fait, les termes de la plainte alléguant qu’il s’agissait d’une «action préméditée et planifiée» sont totalement fallacieux, étant donné que l’entreprise n’a eu à aucun moment l’intention d’affronter les membres du SUNTRACS ni n’est intervenue de quelque façon que ce soit quand ceux-ci sont venus la harceler dans ses installations de Chilibre. C’est dans le feu de l’action que s’est alors produit le tragique décès du membre du SUNTRACS. Ce fait a donné lieu à une enquête de la part des autorités compétentes (ministère public), et l’entreprise a apporté toute la collaboration qui a été exigée d’elle. A tout moment, Odebrecht a apporté sa coopération totale aux autorités de la police nationale, du ministère public et de l’organe judiciaire pour que toute la lumière soit faite sur les faits.
- 748. Pour finir, l’entreprise signale que l’on trouve dans la plainte des éléments d’appréciation subjective émis par le SUNTRACS qui ne sont de la compétence ni de l’entreprise ni d’aucune autorité autre que celle relevant de l’organe judiciaire.
- 749. L’entreprise Grupo Viveros S.A., en tant que promoteur dans le projet Isla Viveros S.A., a passé un contrat d’ouvrage civil avec l’entreprise de construction Maqtec S.A. pour la construction de divers ouvrages dans le cadre du projet en question. Le 27 octobre 2006, l’entreprise Maqtec S.A. a signé avec le Syndicat national du secteur de la construction et du percement de Panamá (SINTICOPP) une convention collective, enregistrée auprès du Département des relations de travail le 31 octobre 2006, devant rester en vigueur pendant quatre ans de 2006 à 2010. Le 11 janvier 2007, le Syndicat unique des travailleurs de l’industrie de la construction et des secteurs apparentés (SUNTRACS) a déposé un cahier de revendications auprès de la Direction générale du travail du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, dont le premier point portait sur ce qui suit: Revendications: «1. Que l’entreprise, du fait qu’il n’existe pas de convention collective, soit obligée de négocier le cahier de revendications et, ainsi, de convenir d’une convention collective de travail entre le SUNTRACS et Maqtec S.A.». L’entreprise indique que, face à cette situation, elle se rend compte que la première requête du cahier et d’autres demandes exprimées sont irrecevables, étant donné que l’entreprise Maqtec S.A. avait déjà souscrit en 2006 une convention collective avec un autre syndicat pour une durée de quatre ans.
- 750. L’entreprise affirme que la législation indique clairement qu’une nouvelle convention collective pourra être passée avec l’entreprise seulement s’il n’en existe pas déjà une en vigueur ou si la précédente est parvenue à échéance. Devant cette situation, le cahier de revendications a suivi son cours jusqu’à l’avis de grève, cette dernière n’ayant pas été faite légalement puisque, lors du décompte des travailleurs, le SUNTRACS n’en avait pas un nombre suffisant pour déclarer la légalité de la grève comme le stipule l’article 448 du Code du travail. En l’espèce, il ne disposait pas de la majorité lui permettant de faire légalement la grève. Dès lors, ils ont eu recours à la procédure d’arbitrage. Par sentence arbitrale du 26 mars 2007, l’affaire a été classée.
- 751. L’entreprise ajoute que, le 2 juillet 2007, le SUNTRACS a déposé un nouveau cahier de revendications et le SINTICOPP en a présenté un autre le 7 juin 2007. Le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale du Panama, par la Direction générale du travail du Panama, a décidé qu’il revenait au SINTICOPP de négocier les cahiers de revendications, ce syndicat comptant à cette date un plus grand nombre d’affiliés sur le chantier. Le SUNTRACS a décrété une grève de fait à partir du 29 juin 2007, les faits commençant dès le vendredi quand des membres du SUNTRACS se lancèrent dans divers actes de provocation et de confrontation avec les autres travailleurs membres du SINTICOPP. Eu égard à ce qui précède, une plainte no CL06607 a alors été déposée auprès du ministère public par Maqtec S.A. L’entreprise indique que, par suite de l’insécurité et du vandalisme qui régnaient sur les lieux du projet, les propriétaires des maisons qui se trouvaient à Panama ne pouvaient pas y accéder.
- 752. A l’occasion des faits provoqués par la grève de fait dans le campement des travailleurs de Maqtec S.A., les maisons 13 et 14 furent entièrement vandalisées. Dans ce contexte, on apprend la survenue, dans les projets Isla Viveros dans l’archipel des Perles, du décès d’un manifestant du SUNTRACS provoqué par un affrontement avec les membres de la police. Il s’agit de M. Luiyi Argüelles, membre du SUNTRACS, dont on sait qu’il avait pour fonction de mobiliser les masses et de faire partie de l’escadron de choc à l’intérieur du projet, puisque ce monsieur ne figurait sur les listes du personnel d’aucune des entreprises ou des fournisseurs du projet.
- 753. L’entreprise signale que le projet Isla Viveros est un projet spécial de type touristique et que, s’agissant d’une île éloignée de la terre ferme et présentant 35 km de plage et de côte, on peut y accéder de n’importe quel endroit. Le présent conflit ne s’est donc pas cantonné aux seules propriétés des ouvrages en construction. Le SUNTRACS a investi de force l’île tout entière. Cette île étant une propriété privée avec un droit de propriété incontestable, les garanties fondamentales prévues dans la Constitution ont donc été, en l’espèce, totalement mises à mal. Le SUNTRACS a déposé une plainte criminelle contre le directeur de la police nationale de Panama et contre les agents de la police qui se trouvaient présents le jour des faits et, dans cette même plainte, il incrimine également le directeur du projet Isla Viveros (il est avéré qu’il n’a pas participé aux faits lamentables survenus le 16 août 2007). Suite à ce conflit, le SUNTRACS et ses filiales régionales des différentes provinces ont organisé des manifestations continuelles dans les divers chefs-lieux d’arrondissement des provinces, les consignes étant de faire pression pour la signature de la convention collective. A l’issue de diverses négociations et discussions, Maqtec S.A. et le SUNTRACS, pour pacifier la situation et obtenir la stabilité dans les travaux du projet Isla Viveros, ont signé un accord le 7 octobre 2007. A l’heure actuelle, le projet se déroule en entretenant les meilleures relations avec le SUNTRACS de Panama. Il convient de souligner que le deuxième tribunal supérieur de justice de Panama suit actuellement l’affaire relative aux agents de police qui se sont malheureusement vus impliqués dans la mort de M. Luiyi Argüelles, et que ladite affaire est en phase de qualification. La position de l’entreprise Grupo Viveros S.A. a toujours été de dialoguer en permanence avec les travailleurs.
- 754. L’entreprise Maqtec S.A. a envoyé une communication confirmant les déclarations du Grupo Viveros S.A.
- 755. Dans sa communication du 12 avril 2010, le gouvernement fait savoir que le deuxième tribunal supérieur de justice a rendu le jugement no 5-P-I, en rapport avec le procès en cours intenté contre MM. Jorge Morgan Melchor, Rogelio Ramos Camargo et Miguel Ángel Ibarra, accusés du délit d’homicide commis le 18 mars 2010 sur M. Osvaldo Lorenzo, qui était membre du Syndicat unique des travailleurs de l’industrie de la construction et des secteurs apparentés (SUNTRACS). Aux termes de ce jugement, MM. Jorge Morgan et Miguel Ángel Ibarra ont été condamnés à vingt-cinq ans de prison et à l’interdiction d’exercer des fonctions publiques pendant une durée de cinq ans à l’issue de leur peine d’emprisonnement. De même, M. Rogelio Ramos a été condamné à vingt ans de prison et à la même interdiction d’exercice d’une fonction publique pendant cinq ans. Le gouvernement fait également savoir que, concernant les procès en cours pour les assassinats de MM. Luiyi Antonio Argüelles et Al Iromi Smith, membres du SUNTRACS, ces procès se poursuivent au sein de l’organe judiciaire et que des informations seront communiquées en temps opportun à mesure des avancées de la procédure.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 756. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent des assassinats, des agressions et des actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes et des arrestations massives de manifestants, de même que des violations au droit de négociation collective, la création d’un syndicat par une entreprise et des licenciements antisyndicaux.
- 757. Concernant les allégations relatives aux assassinats et autres actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, ainsi qu’à des arrestations massives de manifestants du secteur de la construction, le comité est préoccupé de constater que les organisations plaignantes se réfèrent:
- – à l’assassinat du dirigeant syndical du SUNTRACS, M. Osvaldo Lorenzo Pérez, le 14 août 2007, dans le cadre d’une protestation dans le projet de construction de l’autoroute Panamá-Colón réalisé par l’entreprise ODEBRECHT (selon l’organisation plaignante, des hommes de main et des délinquants recrutés par l’entreprise ont utilisé des armes à feu contre les membres du SUNTRACS); et aux blessures dont ont été victimes les dirigeants MM. David Niño, membre du comité directeur du SUNTRACS, et Eustaquio Méndez, secrétaire des finances de la CONUSI;
- – à l’assassinat du dirigeant syndical, M. Luiyi Antonio Argüelles Moya le 16 août 2007 par un sergent de la police nationale, dans le cadre d’une protestation dans le projet Isla Viveros de l’entreprise Maqtec S.A.; et à l’arrestation du secrétaire à la presse et à la propagande du SUNTRACS, M. Raymundo Garcés;
- – à l’assassinat du dirigeant syndical du SUNTRACS, M. Al Iromi Smith; aux agressions par la police à l’aide d’armes à feu, le 12 février 2008, des travailleurs MM. Donaldo Pinilla et Félix de León alors qu’ils participaient à une manifestation pacifique dans le cadre d’une grève nationale; et à l’arrestation et à la condamnation à des amendes de plus de 500 travailleurs qui protestaient pour la mort du dirigeant syndical;
- – à la répression violente par la police, à l’arrestation et à la condamnation à des amendes de 224 travailleurs – sur lesquels 47 étaient affiliés au SUNTRACS – qui participaient à une protestation le 16 mars 2010; et
- – à la présentation par le gouvernement d’un projet de loi imposant l’«extrait de casier judiciaire» (absence d’antécédents judiciaires) comme condition requise pour l’obtention d’un poste de travail qui, de l’avis des organisations plaignantes, a pour objectif de pénaliser les protestations.
- 758. Le comité prend note que le gouvernement fait savoir que: 1) en relation avec la procédure judiciaire liée au crime d’homicide commis sur M. Osvaldo Lorenzo Pérez, le deuxième tribunal supérieur de justice a rendu un jugement condamnant M. Jorge Morgan et M. Miguel Ángel Ibarra à vingt-cinq ans de prison et à l’interdiction d’exercer une fonction publique pendant une durée de cinq ans à l’issue de leur peine d’emprisonnement, et M. Rogelio Ramos à vingt ans de prison et à cinq ans d’interdiction d’exercice d’une fonction publique; 2) les procès pour les assassinats de MM. Luiyi Antonio Argüelles et Al Iromi Smith suivent leur cours, et des informations seront communiquées en temps opportun à mesure des avancées de la procédure.
- 759. De même, le comité prend note que l’entreprise ODEBRECHT déclare, concernant la mort de M. Osvaldo Lorenzo Pérez, que: a) le 14 août 2007, quelque 200 membres du SUNTRACS se sont rendus dans l’entreprise pour faire une protestation, et ils ont importuné les travailleurs qui commençaient leurs tâches; b) le décès du dirigeant syndical est survenu dans ce contexte; et c) à aucun moment, l’entreprise n’a affronté les membres du SUNTRACS et elle a apporté sa coopération totale aux autorités de la police nationale, du ministère public et de l’autorité judiciaire pour que toute la lumière soit faite sur les faits; et que, concernant le décès de M. Luiyi Argüelles, les entreprises Grupo Viveros S.A. et Maqtec S.A. indiquent que: i) le SUNTRACS a décrété le 29 juin 2007 une grève au cours de laquelle se sont produits des actes de provocation et de confrontation avec des travailleurs affiliés à un autre syndicat; ii) à l’occasion des faits de violence, des habitations des travailleurs de l’entreprise ont été détruites; iii) le décès de M. Luiyi Argüelles, qui ne travaillait dans aucune de ces entreprises, est survenu dans le cadre du conflit; iv) une enquête a prouvé que le directeur du projet d’Isla Viveros n’a pas participé aux faits de violence et, à l’heure actuelle, le projet se déroule en entretenant les meilleures relations avec le SUNTRACS, avec lequel il a signé un accord le 7 octobre 2007; et v) le deuxième tribunal supérieur de justice de Panama enquête actuellement sur la participation des agents de police qui se sont vus impliqués dans la mort de M. Luiyi Argüelles.
- 760. Le comité, tout en prenant bonne note des efforts déployés pour arrêter et condamner les auteurs de l’assassinat de M. Osvaldo Lorenzo Pérez, déplore profondément les faits de violence allégués, regrette que les enquêtes pour déterminer les responsabilités et punir les coupables n’aient pas encore abouti et rappelle qu’un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne saurait se développer dans le secteur de la construction dans un climat de violence qui donne lieu à l’assassinat de dirigeants syndicaux et à des agressions de syndicalistes. Le comité espère fermement que les enquêtes en cours sur les assassinats de MM. Luiyi Antonio Argüelles et Al Iromi Smith aboutiront sans délai et permettront de punir les auteurs de ces faits, et il demande au gouvernement de l’informer des décisions de justice qui seront prises. De même, le comité prie instamment le gouvernement de lui faire parvenir sans délai ses observations concernant les allégations suivantes: 1) les blessures dont ont été victimes, le 14 août 2007, les dirigeants M. David Niño, membre du comité directeur du SUNTRACS, et M. Eustaquio Méndez, secrétaire des finances de la CONUSI; 2) l’arrestation du secrétaire à la presse et à la propagande du SUNTRACS, M. Raymundo Garcés; 3) les agressions par la police avec des armes à feu, le 12 février 2008, des travailleurs MM. Donaldo Pinilla et Félix de León quand ils participaient à une manifestation pacifique dans le cadre d’une grève nationale, et l’arrestation et les amendes imposées à plus de 500 travailleurs qui protestaient pour la mort du dirigeant syndical M. Al Iromi Smith; 4) la répression violente de la part de la police, l’arrestation et les amendes imposées à 224 travailleurs – sur lesquels 47 étaient affiliés au SUNTRACS – qui participaient à une protestation le 16 mars 2010; et 5) la présentation par le gouvernement d’un projet de loi instaurant la présentation d’un «extrait de casier judiciaire» (absence d’antécédents judiciaires) comme condition requise pour l’obtention d’un poste de travail qui, de l’avis des organisations plaignantes, a pour objectif de pénaliser les protestations.
- 761. Concernant les allégations relatives à la création d’un syndicat par l’entreprise Odebrecht sur un chantier (projet d’autoroute Madden-Colón), à la signature d’une «fausse» convention collective avec ce syndicat, au licenciement de plus de 100 travailleurs affiliés au SUNTRACS pour avoir refusé d’adhérer au syndicat créé par l’entreprise et au refus de l’entreprise Retraneq S.A. (sous-traitante d’Odebrecht selon les organisations plaignantes) de négocier un cahier de revendications présenté par le SUNTRACS, le comité prend note que le gouvernement indique que: 1) par décision no 171-DGT-RT-07 du 31 juillet 2007, l’autorité administrative a statué qu’il revient au SINTICOPP de négocier les cahiers de revendications au sein de l’entreprise Retraneq S.A.; 2) étant donné que Retraneq S.A. a passé un contrat de concession dans le projet Madden-Colón, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a tenté d’offrir sa médiation entre le SUNTRACS, le SINTICOPP et l’entreprise, mais cette dernière n’y a pas pris part; et 3) le SUNTRACS a lancé un appel à la grève contre l’entreprise Retraneq S.A.
- 762. Le comité prend également note que le gouvernement a envoyé les observations transmises par l’entreprise Odebrecht, dans lesquelles cette dernière indique que: 1) en application de la législation, l’entreprise a négocié et conclu une convention collective avec le Syndicat national du secteur de la construction et du percement de Panamá (SINTICOPP), qui est une organisation syndicale reconnue par le ministère du Travail et qui représentait la majorité des travailleurs; 2) cette entreprise ne contrôle pas le SINTICOPP, qui a été constitué bien longtemps avant qu’elle commence à travailler au Panama; 3) le cahier de revendications présenté par le SUNTRACS à l’entreprise Retraneq S.A. ne lui était pas imputable (c’est-à-dire approprié) puisqu’il n’existe entre les deux entreprises ni subordination juridique ni dépendance économique; et 4) des conventions collectives ont été signées avec le SUNTRACS dans d’autres projets de construction de l’entreprise, et les dirigeants de ce syndicat ont accès à l’entreprise pour traiter toute affaire relative aux relations de travail.
- 763. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre rapidement les mesures nécessaires pour qu’une enquête soit menée sans délai en relation avec les allégations sur le licenciement de plus de 100 travailleurs affiliés au SUNTRACS pour avoir refusé, selon l’organisation plaignante, d’adhérer à un autre syndicat qui aurait été créé par l’entreprise, et de l’informer des résultats de cette enquête et, compte tenu du fait que les allégations remontent à 2007, de l’informer sur l’état actuel des relations de travail entre les entreprises concernées et les syndicats du secteur.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 764. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité espère fermement que les enquêtes en cours sur les assassinats de MM. Luiyi Antonio Argüelles et Al Iromi Smith aboutiront sans délai et permettront de punir les auteurs de ces faits, et il demande au gouvernement de l’informer des décisions de justice qui seront prises.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de lui faire parvenir sans délai ses observations concernant les allégations suivantes: 1) les blessures dont ont été victimes, le 14 août 2007, les dirigeants M. David Niño, membre du comité directeur du SUNTRACS, et M. Eustaquio Méndez, secrétaire des finances de la CONUSI; 2) l’arrestation du secrétaire à la presse et à la propagande du SUNTRACS, M. Raymundo Garcés; 3) les agressions par la police avec des armes à feu, le 12 février 2008, des travailleurs MM. Donaldo Pinilla et Félix de León quand ils participaient à une manifestation pacifique dans le cadre d’une grève nationale, et l’arrestation et les amendes imposées à plus de 500 travailleurs qui protestaient pour la mort du dirigeant syndical M. Al Iromi Smith; 4) la répression violente de la part de la police, l’arrestation et les amendes imposées à 224 travailleurs – sur lesquels 47 étaient affiliés au SUNTRACS – qui participaient à une protestation le 16 mars 2010; et 5) la présentation par le gouvernement d’un projet de loi instaurant la présentation d’un «extrait de casier judiciaire» (absence d’antécédents judiciaires) comme condition requise pour l’obtention d’un poste de travail qui, de l’avis des organisations plaignantes, a pour objectif de pénaliser les protestations.
- c) Le comité demande au gouvernement de prendre rapidement les mesures nécessaires pour qu’une enquête soit diligentée sans délai en relation avec les allégations sur le licenciement de plus de 100 travailleurs affiliés au SUNTRACS pour avoir refusé d’adhérer à un autre syndicat qui aurait été créé par l’entreprise Odebrecht, et de l’informer des résultats de cette enquête et, compte tenu du fait que les allégations remontent à 2007, de l’informer sur l’état actuel des relations de travail entre les entreprises concernées et les syndicats du secteur.
- d) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.