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- 124. La plainte est présentée dans des communications des Syndicats indépendants d’Albanie (les BSPSH) en date des 4 et 29 septembre 2009.
- 125. Le gouvernement a répondu en partie à ces allégations dans une communication en date du 13 janvier 2010.
- 126. L’Albanie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 127. Dans une communication en date du 4 septembre 2009, l’organisation plaignante allègue que, en 2007, les deux confédérations syndicales albanaises ont été expulsées de leurs locaux et interdites d’activités. L’organisation plaignante allègue en outre qu’un projet de loi visant à confisquer les biens de tous les syndicats albanais a été approuvé par le Conseil des ministres et devrait être présenté pour approbation au parlement.
- 128. Concernant la chronologie des faits, les BSPSH indiquent que, le 5 juin 1992, le Président de la République a émis le décret no 204 concernant les biens des syndicats albanais (ci-après nommé le décret de 1992). Selon ce décret, les syndicats se sont entendus pour se partager les biens de l’ancien syndicat professionnel. Le 6 mai 1998, le décret de 1992 a été abrogé, et la loi no 8340/1 relative au règlement des conséquences de la mise en œuvre du décret no 204 de 1992 a été approuvée (ci-après nommée la loi de 1998), reconnaissant les syndicats albanais comme étant les seuls propriétaires de ces biens. Le premier acte de violation a eu lieu en août 2007, lorsque les deux confédérations syndicales albanaises ont été expulsées de leurs locaux et interdites d’activités. Le 18 août 2009, le Premier ministre albanais a publié dans les médias un projet de loi sur la confiscation des biens de tous les syndicats albanais. Le projet de loi a été approuvé par le Conseil des ministres, sans consultations préalables avec les syndicats.
- 129. L’organisation plaignante estime que le projet de loi porte atteinte au mouvement syndical albanais et illustre un cas de fraude publique de la part du Premier ministre, qui s’est abstenu délibérément d’informer le public du contenu de la loi de 1998. Ayant pour principe de régler les différends par le dialogue social, les BSPSH ont présenté une requête au gouvernement le 25 septembre 2009, assortie d’une lettre ouverte au Premier ministre de l’Albanie, en vue d’amorcer le dialogue avec les syndicats qui n’ont été ni avisés ni consultés au sujet du projet de loi. A ce jour, cette requête est demeurée sans réponse. Le conseil national des BSPSH a, une fois encore, exhorté le Premier ministre à amorcer le dialogue et à entamer des négociations.
- 130. Dans sa communication du 29 septembre 2009, l’organisation plaignante ajoute que, le 28 septembre 2009, le projet de loi a été présenté pour approbation devant la Commission parlementaire de l’économie, et qu’il n’a pas été examiné par la Commission parlementaire du travail et des affaires sociales, qui est en contact direct avec les syndicats, ni par aucune autre commission parlementaire. Les syndicats albanais n’ont pas été invités à discuter du projet de loi ni à siéger à la Commission parlementaire de l’économie qui a examiné le projet de loi. Aucune consultation préalable n’a eu lieu avec les syndicats albanais, et la demande des syndicats d’amorcer le dialogue n’a pas été prise en considération. La séance plénière visant à examiner et approuver le projet de loi est fixée au 8 octobre 2009. Les commissions parlementaires et la séance plénière sont composées uniquement de députés de la majorité, les députés de l’opposition ne reconnaissant pas les résultats de la dernière élection législative et n’étant pas présents aux séances du parlement.
- 131. Invoquant ce manque de transparence, l’organisation plaignante est d’avis que l’objectif du gouvernement est de mettre fin au mouvement syndical albanais en se portant injustement acquéreur de biens syndicaux. L’adoption du projet de loi par le parlement contribuerait incontestablement à l’affaiblissement, voire à la disparition du mouvement syndical, compte tenu de la situation socio-économique des travailleurs albanais et du fait que les cotisations ne suffisent pas à financer les activités syndicales. L’acquisition de biens syndicaux constituerait une injustice sociale, ces biens n’ayant jamais appartenu à l’Etat mais à l’ancien syndicat professionnel sous la dictature; il serait donc légitime que les biens appartenant aux travailleurs albanais demeurent à leur disposition ou à celle de leurs syndicats. Qui plus est, aucun argument juridique probant ne justifie l’abrogation de la loi de 1998 qui proclamait les syndicats propriétaires de ces biens.
- 132. L’organisation plaignante fait également une évaluation juridique de la situation. En conséquence, les syndicats sont des personnes morales en vertu de la législation nationale en vigueur et ont donc le droit de posséder des biens, meubles et immeubles, et d’intenter toute action en justice s’y rapportant. Le décret de 1992 est la première tentative de règlement juridique des biens des syndicats, qui devait être ratifié par le parlement. Bien que le parlement albanais ait décidé de ne pas ratifier le décret de 1992, le syndicat est déjà (à compter de 1992) devenu propriétaire des biens de l’ancien syndicat professionnel et en jouit librement. Devant cette situation, le parlement, le jour même où il a renoncé à adopter le décret de 1992, a approuvé la loi de 1998 visant à transférer aux syndicats la propriété des biens de l’ancien syndicat professionnel. Les termes de plusieurs dispositions de la loi de 1998 l’illustrent clairement. L’article 1 dispose que les biens syndicaux acquis par la mise en œuvre du décret de 1992 comprennent tous les biens meubles et immeubles, ainsi que la valeur monétaire de l’ancien syndicat professionnel d’Albanie. En outre, l’article 3 traite de la redistribution des biens syndicaux dans l’éventualité de la création de syndicats autres que les syndicats existants; l’article 4 concerne les biens immeubles acquis par les syndicats; et l’article 5 se rapporte aux biens fonciers appartenant aux syndicats et à l’indemnisation des anciens propriétaires.
- 133. L’organisation plaignante est d’avis que le projet de loi qu’elle conteste viole des principes civils et constitutionnels pour les raisons suivantes. La terminologie utilisée dans la loi de 1998 prouve que les syndicats sont devenus les propriétaires des biens du syndicat professionnel, et non pas seulement les possesseurs, comme l’a affirmé le ministre de la Justice. En outre, la restriction juridique du droit de disposition/d’aliénation pour les biens immeubles du syndicat ne peut être invoquée pour affirmer que le syndicat n’a aucun droit de propriété. L’article 149 définit la propriété comme étant le droit de jouissance et de possession libre des biens, conformément aux dispositions de la loi. Le droit de possession est donc l’une des prérogatives du propriétaire, mais peut toutefois être restreint conformément aux dispositions de la loi. L’organisation plaignante invoque les lois albanaises limitant le droit de propriété, comme la loi concernant la vente et l’achat de terres (1995), qui limite le droit des étrangers naturalisés ou des personnes morales d’acheter des terres publiques ou privées pour investissement sous réserve de tripler la valeur des terres, et la loi concernant le transfert de propriété de terres agricoles, de forêts, de prairies et de pâturages (1998), qui ne reconnaît pas aux étrangers naturalisés ou aux personnes morales le droit d’acheter des terres agricoles, des forêts, des prairies et des pâturages. Une interprétation a contrario de ces dispositions donne à penser que les Albanais ne peuvent vendre des terres agricoles à des étrangers et peuvent seulement vendre des terres non agricoles à des étrangers, sous réserve que leur investissement équivaille au triple de la valeur des terres. En conséquence, le droit de propriété de tous les ressortissants de la République d’Albanie, entités publiques ou privées, personnes morales ou naturalisées, est limité en ce qui a trait aux étrangers. Selon l’argument avancé par le ministre de la Justice, cette restriction impliquerait la perte du droit de propriété pour les Albanais, qui ne seraient plus alors que de simples possesseurs de leurs biens. Cela montre que ce raisonnement est inacceptable et légalement absurde. L’organisation plaignante conclut que, tel qu’il est formulé, l’article 4 de la loi de 1998 vise plutôt à protéger les biens syndicaux de tout abus éventuel en attendant la consolidation financière de l’organisation, et non à nier le droit de propriété.
- 134. Un autre argument avancé par le ministre de la Justice concerne la décision no 85/2001 du tribunal supérieur, qui traite d’un conflit survenu en 1996 et règle les contradictions existant entre la loi no 7698 du 15 avril 1993 «sur la réparation et l’indemnisation d’anciens propriétaires» et la loi de 1998. Etant donné que, en 1996, la loi de 1993 sur la réparation et l’indemnisation d’anciens propriétaires était déjà en vigueur, le décret de 1992 n’avait pas été approuvé et la loi de 1998 n’avait pas encore été adoptée, il est normal que le droit des anciens propriétaires prime. Le tribunal supérieur conclut que, chaque fois que les intérêts d’anciens propriétaires bénéficiant de la restitution de bâtiments ou de terrains inoccupés en vertu de la loi de 1993 entrent en conflit avec les intérêts des syndicats qui ont acquis de tels bâtiments ou terrains inoccupés en vertu du décret de 1992 (dont les conséquences sont régies par la loi de 1998), la priorité doit être accordée aux intérêts des anciens propriétaires. La loi de 1998 est applicable dans la mesure où elle n’entre pas en conflit avec la loi de 1993 sur la réparation et l’indemnisation d’anciens propriétaires. Le tribunal souligne qu’il est entendu que la question n’est pas de savoir si les syndicats ont obtenu la propriété des biens que l’Etat a décidé de leur transférer.
- 135. Selon l’organisation plaignante, les syndicats, à titre de propriétaires des biens, ont signé des ententes à cet égard. En conséquence, tous les droits de crédit ou autres droits dont ils bénéficient sont des droits exclusifs, et l’Etat ne peut s’arroger ces droits comme il est prévu dans le projet de loi. En outre, le projet de loi crée une situation financière défavorable pour les syndicats (état de faillite) parce que, au nom du principe juridique de la représentation sans droits (non-autorisation par le créditeur), il les prive de l’une des principales sources de financement, soit les revenus tirés de biens immeubles, et stipule que l’Etat a le droit de se céder à lui-même le droit de crédit, alors que des obligations sont attribuées aux syndicats.
- 136. En outre, l’organisation plaignante considère que le projet de loi viole la Constitution de la manière suivante: i) l’article 11(2), selon lequel les biens privés et publics sont protégés par la loi. Dans le présent cas, les biens syndicaux échappent au projet de loi; ii) l’article 17, selon lequel les droits constitutionnels ne peuvent être limités qu’au nom de l’intérêt public ou de la protection des droits d’autrui, une telle restriction devrait être proportionnelle à la situation qui la dicte et ne pas toucher à l’essence même du droit. Dans le présent cas, il n’y a pas d’intérêt public en jeu; les intérêts concernés sont ceux des anciens propriétaires et des syndicats. Cette restriction prive les syndicats de leur droit de propriété et n’est pas proportionnel à l’objectif visé, puisque les droits des anciens propriétaires sont déjà protégés par les procédures de réparation et d’indemnisation, et que le cas d’un conflit entre ces deux catégories d’intérêts a déjà été tranché par le tribunal supérieur en faveur des anciens propriétaires. Le manque de fonds publics disponibles pour la réparation en cas d’impossibilité de restituer les biens ne devrait pas servir à justifier le bien-fondé du projet de loi; iii) l’article 41 garantissant le droit à la propriété privée et autorisant l’expropriation seulement dans l’intérêt public et à titre de juste indemnité. Dans le présent cas, aucun intérêt public n’a été relevé, et le projet de loi ne prévoit pas l’indemnisation du syndicat; iv) l’article 42 prévoyant l’application régulière de la loi. Dans le présent cas, le projet de loi ne prévoit aucun moyen d’introduire une réclamation; v) le principe de la sécurité juridique. Ce projet de loi prive les syndicats des droits de propriété acquis il y a environ onze ans, comme si ces droits n’avaient jamais existé auparavant, ce qui contribue à aggraver sérieusement leur situation. Dans sa décision no 9/2007, la Cour constitutionnelle a statué que la sécurité juridique présuppose la confiance des citoyens dans l’Etat et la constance de la loi dans les relations réglementées. Les personnes ne devraient pas se soucier constamment de divergences ou des conséquences négatives d’actes juridiques, susceptibles d’affecter leur vie privée ou professionnelle ou d’aggraver une situation engendrée par des actes antérieurs. L’Etat devrait s’employer à changer une situation antérieurement réglementée seulement si le changement apporté a des conséquences bénéfiques. Si les mesures prises ont contribué à détériorer indûment des situations juridiques, niant les droits acquis ou faisant abstraction d’intérêts ou d’attentes légitimes, le principe constitutionnel de l’égalité des droits s’en trouverait violé; vi) les articles 116 et 81 régissant la hiérarchie des normes légales. Dans le présent cas, le projet de loi modifie le Code civil (qui lui est supérieur dans la hiérarchie des normes) concernant le transfert de crédit.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 137. Dans une communication en date du 13 janvier 2010, le gouvernement indique que, premièrement, la conclusion des BSPSH est que, à compter de 1992 et jusqu’à maintenant, les syndicats sont devenus propriétaires des biens est incorrecte. Le décret de 1992 n’a pas été approuvé, pas même par la loi de 1998, et n’a jamais acquis force de loi. La loi no 7491 du 29 avril 1991 concernant les principales dispositions constitutionnelles dispose en tant qu’exigence constitutionnelle que, pour qu’un décret du Président de la République ait force de loi, il doit être contresigné par le président du Conseil des ministres ou par le ministre concerné, et il doit être débattu par le parlement à sa prochaine session. Il apparaît clairement, même conformément aux deux décisions unificatrices des chambres unies du tribunal supérieur nos 85/2001 et 5/2004, que ces exigences constitutionnelles n’ont pas été remplies. De l’avis du gouvernement, comme le décret de 1992 n’a jamais acquis force de loi, les syndicats n’ont pas obtenu le droit de posséder les biens visés.
- 138. Le jour même où il a abrogé le décret de 1992, le parlement a approuvé la loi de 1998. Cette loi dispose que les ententes conclues entre les syndicats concernant la répartition des biens jusqu’à la date de son entrée en vigueur devraient être juridiquement valables, sauf disposition contraire énoncée dans la loi, et que les litiges se rapportant à de telles ententes devraient être réglés par les tribunaux. Les biens immobiliers obtenus conformément à cette loi ne peuvent être vendus ni aliénés d’ici le 31 décembre 2020. Le gouvernement déduit de cette disposition que les syndicats ont le droit de jouissance et de possession des biens, mais ne sont pas propriétaires des biens immobiliers parce qu’il leur manque l’une des prérogatives du droit de propriété, soit le «droit d’aliénation». Selon le gouvernement, la loi de 1998 est de nature transitoire – son titre révèle que son objectif est de réglementer les conséquences du décret, sans constituer un règlement effectif et définitif à long terme. Aucun de ses articles ne prévoit un transfert de propriété de l’Etat aux syndicats et, à l’article 6, le législateur utilise explicitement l’expression «administration des biens». En outre, l’exemple donné dans le document présenté par les BSPSH, soit la loi concernant la vente et l’achat de terres (1995) et la loi concernant le transfert de propriété de terres agricoles, de forêts, de prairies et de pâturages (1998), ne s’applique pas à la même situation que la question des biens syndicaux. Les lois précitées nient aux étrangers naturalisés et aux personnes morales le droit d’acheter des biens immobiliers publics ou privés, au nom du principe de l’intérêt public. Cela n’affecte pas le droit des propriétaires légitimes de vendre leurs biens à des Albanais et ne limite donc pas leur droit de propriété.
- 139. Deuxièmement, le gouvernement souligne que la loi de 1998 interdit expressément aux syndicats d’aliéner des biens administrés par eux, d’ici le 31 décembre 2020, ce qui démontre la volonté du législateur de ne pas transférer le droit de propriété aux syndicats, mais seulement d’autoriser l’administration de certains biens de l’Etat. La raison en est qu’un pays démocratique a l’obligation d’appuyer le mouvement syndical en tant que pierre angulaire de la démocratie. Incapable de faire un apport financier, l’Etat albanais a choisi de confier aux syndicats l’administration de biens de l’Etat, dans l’espoir que cela générerait suffisamment de revenus pour le fonctionnement du mouvement syndical. Toutefois, l’administration de biens de l’Etat par les syndicats n’est pas conforme à la législation en vigueur, en particulier l’article 4 de la loi de 1998 (interdiction d’aliéner des biens). Il semble que, même selon les renseignements officiels demandés par le ministre de la Justice aux bureaux locaux d’enregistrement des biens immobiliers, les syndicats ont enfreint les principes d’administration de biens de l’Etat, comme il est énoncé à l’article 12 de la loi no 8743 du 22 février 2001 concernant les biens de l’Etat: (traduction) «L’administration de biens immobiliers publics doit viser à assurer: a) le maintien et la garantie de l’intérêt public; b) la protection des caractéristiques et des valeurs uniques des biens; c) la sauvegarde et l’accroissement de la valeur économique des biens; d) le maintien d’indices écologiques de l’unité immobilière, au nom du principe de l’utilité publique.» Le manquement à cette obligation a même été reconnu par les chambres unies du tribunal supérieur dans sa décision no 5/2004, selon laquelle les syndicats ont profité de l’administration des biens pour assurer les congés payés et les loisirs de travailleurs et, par la suite, comme dans le présent cas, une portion considérable des biens ont été vendus à des tiers qui en ont totalement changé la destination. Pour les raisons précitées, le ministère de la Justice a préparé le projet de loi, et l’Assemblée de l’Albanie a décidé d’approuver le projet de loi pour abroger la loi de 1998 et retirer aux syndicats le droit d’administrer des biens de l’Etat.
- 140. Troisièmement, le gouvernement évoque les décisions unificatrices nos 85/2001 et 5/2004 des chambres unies du tribunal supérieur et la décision no 24/2002 de la Cour constitutionnelle, qui a rejeté les réclamations des BSPSH visant à reconnaître d’éventuelles conséquences légales du décret de 1992. A son avis, cela signifie que les tribunaux ont fait une interprétation définitive selon laquelle les syndicats n’ont jamais acquis le droit de propriété et que l’Etat est le seul propriétaire de tels biens.
- 141. Quatrièmement, le gouvernement indique que le projet de loi régule les conséquences juridiques de l’abrogation de la loi de 1998. L’article 2 concerne les relations d’obligation créées par les syndicats avec des tiers, y compris des contrats signés entre eux, et évoque le Code civil concernant le droit de jouissance et de possession de biens immobiliers. Il s’agit d’une référence générale visant à signaler que l’objet du projet de loi n’est pas de contourner les règles générales existantes en vertu du Code civil, et qu’il n’enfreint aucun droit de propriété, pas même constitutionnel. Concernant l’article 466 du Code civil, qui autorise l’exécution de l’obligation envers une autre personne que le créditeur (substitution de créditeur), l’article 3 concerne les crédits syndicaux visant à assurer l’exécution de l’obligation par des tiers en faveur du propriétaire effectif, l’Etat. Jusqu’à maintenant, par le biais de la loi de 1998, l’Etat en tant que créditeur a autorisé les syndicats, en leur qualité de personnes autorisées par le créditeur, à toucher le revenu généré par les biens. Des cas de représentation sans droit par les syndicats sont pris en compte – cas dans lesquels les syndicats ont commis des actes juridiques au nom de l’Etat en outrepassant les droits qui leur sont conférés par la loi, générant ainsi des crédits auxquels l’Etat a droit. Les termes de l’article 3 équivalent en substance à une approbation subséquente des crédits et de leur perception. Concernant des cas où les syndicats sont les débiteurs, dans la mesure où les syndicats ne sont pas les propriétaires de droit des biens immeubles, chaque mesure prise par des tiers est invalide et n’a aucune conséquence légale pour l’Etat. Les obligations qui en résultent doivent être instruites au cas par cas par les tribunaux à l’endroit des syndicats, à la demande de tiers. Dans l’éventualité où l’Etat devrait comparaître devant un tribunal en tant que partie, la plainte serait irrecevable puisque l’action en justice générant l’obligation est contraire à la loi et donc frappée de nullité.
- 142. Cinquièmement, toutes les allégations de violation de la Constitution sont fondées sur l’affirmation selon laquelle les syndicats ont acquis le droit à la propriété, ce qui n’est pas le cas, comme l’indique la décision no 24/2002 de la Cour constitutionnelle, selon laquelle le décret de 1992 est inexistant et n’a donc pas d’effet légal. Selon le gouvernement, c’est le droit d’administrer les biens de l’Etat qui est retiré par l’Etat en tant que propriétaire légitime, pour mauvaise gestion. Les dispositions mentionnées dans la plainte concernent des droits de propriété et, de ce fait, ne peuvent être invoquées pour démontrer la non-conformité du projet de loi, qui ne traite pas du droit de propriété.
- 143. Concernant la violation présumée du principe de la sécurité juridique, le gouvernement renvoie à la loi de l’Union européenne, selon laquelle ce principe important est étroitement lié au principe de la confiance légitime et à l’interdiction de rétroactivité, et énumère certains cas reconnus de violation de ce principe: 1) manque de publicité de la loi; 2) abus de rétroactivité; 3) ambiguïté de la législation; 4) adoption de dispositions législatives conflictuelles; 5) adoption de dispositions législatives exigeant des contributions dépassant les moyens des personnes concernées; 6) modifications apportées fréquemment à la loi; 7) incompatibilité entre l’intention du législateur et les objectifs de ceux qui appliquent la loi; et 8) loi de nature temporaire. De l’avis du gouvernement, le projet de loi ne remplit aucun des critères précités.
- 144. La Cour constitutionnelle, dans sa décision no 26/2005, a estimé que le principe de la sécurité juridique présuppose la confiance des citoyens dans l’Etat et l’invariabilité des lois en ce qui a trait aux questions réglementées. Les citoyens ne devraient pas vivre dans la crainte constante que des actes normatifs soient changés pour le pire. Toutefois, le principe ne s’applique pas lorsque la certitude d’une situation légale n’est pas démontrée et ne peut l’être. En outre, la Cour constitutionnelle a souligné que le principe ne prévaut pas dans tous les cas – par exemple, l’intérêt public peut aisément l’emporter. Le principe de la sécurité juridique n’élimine certainement pas toutes les conséquences négatives que peuvent entraîner de nouvelles dispositions pour des individus parce qu’il est indissociable du principe de l’Etat providence. Le gouvernement conclut que le projet de loi n’est pas inconstitutionnel, en raison d’un intérêt public prioritaire et parce que le projet de loi ne contribue pas à aggraver la situation des syndicats en matière de propriété, puisqu’ils n’ont jamais acquis de droit de propriété mais ont seulement le droit d’administration de biens. Un droit conféré par une loi invalide n’est pas garanti par le principe de la sécurité juridique. L’Etat a simplement privé des sujets qui ont mal géré ses biens du droit d’administrer ces biens, conformément au principe de la sécurité juridique qui, en fait, exige le rétablissement des lois violées.
- 145. Sixièmement, le gouvernement réfute les allégations de violation des articles 116 et 81bis de la Constitution concernant la hiérarchie des actes normatifs, parce que l’article 3 du projet de loi renvoie aux dispositions du Code civil sans s’en écarter. Le renvoi est justifié puisque, du fait du retrait du droit d’administration, les syndicats ont perdu leur qualité de «personne autorisée par le créditeur» conférée par le Code civil et que, par le fait même, les obligations doivent être remplies en faveur du créditeur, soit l’Etat.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 146. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue que, en 2007, les deux confédérations syndicales albanaises ont été expulsées de leurs locaux et interdites d’activités. Elle allègue en outre qu’un projet de loi visant à confisquer leurs biens à tous les syndicats albanais a été approuvé par le Conseil des ministres et devait être présenté pour approbation au parlement en septembre 2009.
- 147. Le comité note que, le 5 juin 1992, le Président de la République a émis le décret no 204 concernant les biens des syndicats albanais (ci-après nommé le décret de 1992), qui devait être ratifié par le parlement. Selon ce décret, les biens meubles et immeubles de l’ancien syndicat professionnel, qui servaient aux activités syndicales et à la formation professionnelle des employés, appartiendraient aux syndicats, qui devaient s’entendre pour se les partager. Le 6 mai 1998, le parlement albanais a décidé de ne pas adopter le décret de 1992 et a approuvé la loi no 8340/1 relative au règlement des conséquences de la mise en œuvre du décret no 204 de 1992 (ci-après nommée la loi de 1998).
- 148. Le comité note également que, selon l’organisation plaignante, l’objectif du nouveau projet de loi est de confisquer leurs biens aux syndicats albanais. Les BSPSH soulignent que, même si le parlement albanais a décidé de ne pas ratifier le décret de 1992, les syndicats ont, à compter de 1992, eu la libre jouissance et possession des biens de l’ancien syndicat professionnel. Aux termes de l’article 149 du Code civil, le droit de libre jouissance et possession de biens, conformément aux dispositions de la loi, est la prérogative du propriétaire. Selon l’organisation plaignante, les syndicats sont donc devenus propriétaires des biens en 1992. Comme l’illustrent clairement les termes de plusieurs dispositions, la loi de 1998 transfère la propriété des biens de l’ancien syndicat professionnel aux syndicats albanais et les reconnaît comme seuls propriétaires de ces biens. L’organisation plaignante ajoute que la restriction juridique du droit d’aliénation des biens immeubles des syndicats (article 4 de la loi de 1998) n’élimine pas le droit de propriété des syndicats. Conformément à la définition de la propriété énoncée à l’article 149 du Code civil, le droit de possession peut être limité par la loi sans entraîner la perte du droit de possession. L’organisation plaignante conclut que l’article 4 vise plutôt à protéger les biens syndicaux de tout abus en attendant la consolidation financière de l’organisation. En outre, selon l’organisation plaignante, la décision no 85/2001 du tribunal supérieur prévoit que, lorsque les intérêts des anciens propriétaires bénéficiant de la restitution de bâtiments ou de terres en vertu de la loi de 1993 sont en conflit avec les intérêts des syndicats qui ont acquis ces bâtiments ou terres conformément au décret de 1992 (dont les conséquences sont réglementées par la loi de 1998), la priorité sera accordée aux intérêts des anciens propriétaires, ce qui signifie que la loi de 1998 est applicable dans la mesure où elle n’est pas en conflit avec la loi de 1993. L’organisation plaignante affirme que cette décision est fondée sur l’interprétation selon laquelle la question de la propriété des biens que l’Etat a décidé de transférer aux syndicats n’est pas en cause. Enfin, l’organisation plaignante affirme que le principe de la sécurité juridique est violé du fait que ce projet de loi prive les syndicats des droits de propriété acquis il y a onze ans, comme si ces droits n’avaient jamais existé auparavant, ce qui contribue à aggraver sérieusement leur situation. Les syndicats, en qualité de propriétaires des biens, ont signé des ententes leur accordant des droits de crédit ou d’autres droits qui sont exclusifs. Le projet de loi engendre une situation financière défavorable pour les syndicats (état de faillite) parce qu’il les prive de l’une de leurs principales sources de financement, soit les revenus tirés de biens immeubles, en prévoyant que l’Etat a le droit de se céder à lui-même le droit de crédit, alors que des obligations sont attribuées aux syndicats.
- 149. Le comité note, cependant, l’objection du gouvernement selon laquelle les BSPSH concluent à tort que les syndicats sont devenus propriétaires des biens. Le gouvernement ajoute que, aux termes des articles 28(19) et 29 de la Constitution de 1991, les décrets normatifs émis par le Président de la République dans des cas urgents doivent être soumis à l’approbation du président du Conseil des ministres ou du ministre concerné. Le gouvernement souligne qu’aucune des deux exigences constitutionnelles n’a été remplie dans le cas du décret de 1992. Ainsi, comme l’illustrent les décisions nos 85/2001 et 5/2004 du tribunal supérieur et la décision no 24/2002 de la Cour constitutionnelle, le décret n’a pas acquis force de loi. Les tribunaux ont donc tranché en statuant que les syndicats n’ont pas acquis le droit de propriété et que l’Etat est l’unique propriétaire de tels biens. En outre, le gouvernement conclut à la lumière de l’article 4 de la loi de 1998 que les syndicats, tout en ayant le droit de jouissance et de possession de biens immobiliers, n’en sont pas propriétaires parce qu’ils n’ont pas une prérogative liée au droit de propriété, soit le «droit d’aliénation». La loi est de nature transitoire puisque son objectif est simplement de réglementer les conséquences du décret, sans constituer un règlement effectif et définitif. Aucun de ses articles ne prévoit un transfert de propriété de l’Etat aux syndicats et, à l’article 6, le législateur utilise explicitement l’expression «administration des biens». Ces dispositions illustrent la décision du législateur de ne pas transférer le droit de propriété aux syndicats, mais seulement d’autoriser l’administration de certains biens de l’Etat à l’appui du mouvement syndical. De plus, l’administration des biens de l’Etat par les syndicats devait être conforme aux dispositions de l’article 4 de la loi de 1998 (interdiction d’aliéner les biens). Selon des renseignements officiels et la décision du tribunal supérieur no 5/2004, les syndicats ont enfreint les principes d’administration de biens de l’Etat en vendant une portion considérable de ces biens à des tiers qui en ont totalement changé la destination. En conséquence, l’Etat, en qualité de propriétaire légitime, retire aux syndicats le droit d’administrer ses biens pour mauvaise gestion. Selon le gouvernement, le projet de loi réglemente les conséquences juridiques résultant de l’abrogation de la loi de 1998. Dans les cas de crédits syndicaux, les obligations de tiers doivent être remplies en faveur du créditeur et seul propriétaire (l’Etat), puisque le retrait du droit d’administration fait perdre aux syndicats leur qualité de «personne autorisée par le créditeur». Dans les cas où les syndicats sont les débiteurs, toutes les mesures prises par des tiers sont frappées de nullité et n’ont aucun effet juridique pour l’Etat, les syndicats n’étant pas les propriétaires de droit des biens. Enfin, concernant l’allégation de violation du principe de la sécurité juridique, la Cour constitutionnelle a souligné que ce principe ne s’applique pas lorsque la certitude d’une situation légale n’est pas légitime, et qu’il ne l’emporte pas dans tous les cas, par exemple lorsque l’intérêt public est prioritaire. Le gouvernement conclut que ce principe n’est pas enfreint parce qu’il y a un intérêt public prioritaire et que le projet de loi ne contribue pas à aggraver la situation des syndicats, puisqu’ils n’ont pas acquis de droit de propriété des biens, mais ont seulement le droit de les administrer, et que le droit accordé par une loi invalide n’est pas garanti.
- 150. Bien que les deux parties à la plainte s’entendent pour dire que le décret de 1992 n’a pas été adopté par le parlement et n’a donc jamais acquis force de loi, comme l’illustrent les décisions nos 85/2001 et 5/2004 du tribunal supérieur et la décision no 24/2002 de la Cour constitutionnelle, leurs conclusions quant à savoir si les syndicats ont acquis les pleins pouvoirs sur les biens visés divergent. Le comité, toutefois, note l’indication des organisations plaignantes selon laquelle un certain nombre d’éléments peuvent donner matière à des attentes de la part des syndicats relativement à la validité de ce premier règlement juridique de la propriété des biens de l’ancien syndicat professionnel, qui a été dissous après la dictature, par exemple: aux termes de son article 4, le décret de 1992 entre en vigueur immédiatement; la présentation requise pour approbation au parlement à sa prochaine session n’a effectivement eu lieu que six ans plus tard; le titre de la loi de 1998 («sur le règlement des conséquences de la mise en œuvre du décret») reconnaît l’existence de certains effets provoqués par le décret pendant les six ans précédant son abrogation; et les syndicats ont eu la libre jouissance et possession des biens visés à compter de 1992.
- 151. A la lumière de l’exposé des faits à compter de la dissolution du syndicat professionnel en 1992, le comité souhaite rappeler qu’il a précédemment eu l’occasion d’examiner des questions concernant les biens de syndicats dissous après des périodes de transition. A cet égard, le comité a accepté le critère selon lequel, en cas de dissolution d’une organisation, ses biens doivent être placés provisoirement en dépôt et répartis, en définitive, entre les membres de l’organisation dissoute ou transférés à l’organisation qui lui succède. Il faut entendre par cette expression l’organisation ou les organisations qui poursuivent les buts pour lesquels les syndicats dissous se sont constitués et les poursuivent dans le même esprit. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 706.] Le comité a souligné à maintes reprises que, lorsqu’un syndicat cesse d’exister, ses biens peuvent être transférés à l’association qui lui succède ou répartis conformément à ses propres statuts; en l’absence de dispositions statutaires spécifiques, les biens des syndicats devraient être mis à la disposition des travailleurs concernés. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 707.] S’agissant du problème de la répartition des biens syndicaux entre différentes organisations syndicales à la suite du passage d’une situation de monopole syndical à une situation de pluralisme syndical, le comité a souligné l’importance qu’il attache au principe selon lequel la dévolution du patrimoine syndical (y compris les biens immobiliers) ou, dans l’hypothèse où des locaux syndicaux sont mis à disposition par l’Etat, la redistribution de ces biens doit avoir comme objectif de garantir, sur un pied d’égalité, à l’ensemble des syndicats, la possibilité d’exercer effectivement leurs activités en toute indépendance. Il serait souhaitable que le gouvernement et l’ensemble des organisations syndicales intéressées s’efforcent d’aboutir, dans les meilleurs délais, à un accord définitif qui réglerait l’affectation du patrimoine de l’ancienne organisation syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 708.]
- 152. Le comité relève de la réponse du gouvernement que, depuis le dépôt de la plainte, l’Assemblée de l’Albanie a approuvé le projet de loi dénoncé par l’organisation plaignante. Le comité note également que l’organisation plaignante et le gouvernement citent les décisions nos 85/2001 et 5/2004 du tribunal supérieur et la décision no 24/2002 de la Cour constitutionnelle pour leur pertinence dans le présent cas. Il demande au gouvernement de fournir le texte de la nouvelle loi telle qu’elle a été adoptée ainsi que les décisions judiciaires mentionnées.
- 153. De manière plus générale, toutefois, le comité ne peut qu’exprimer son regret devant le manque de consultations avant et pendant le processus d’adoption d’un projet de loi qui pourrait toucher les organisations de travailleurs et qui risque d’affecter leur stabilité et leur capacité d’exercer des activités syndicales. Malgré plusieurs tentatives que l’organisation plaignante affirme avoir faites pour amorcer le dialogue, les syndicats nationaux n’ont apparemment pas été en mesure de fournir leur point de vue sur le projet de loi ni de donner leur avis à l’occasion de la séance de la commission parlementaire qui s’est penchée sur le projet de loi. A cet égard, le comité souhaite souligner l’importance qui devrait être accordée à des consultations franches et approfondies sur les questions ou dispositions législatives proposées qui touchent les droits des syndicats [voir Recueil, op. cit., paragr. 1074].
- 154. Le comité rappelle que son mandat consiste à déterminer si, concrètement, telle ou telle législation ou pratique est conforme aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions portant sur ces sujets. Il n’a donc pas mandat de se prononcer sur la nature du droit de propriété acquis par l’organisation plaignante après la dissolution du syndicat professionnel, particulièrement concernant la question du droit d’aliénation des biens. Le comité souhaite souligner, toutefois, qu’il aurait été préférable, pour favoriser l’harmonie des relations de travail dans le pays et la stabilité du mouvement syndical dans son ensemble, de déterminer la nature exacte de ces droits au moment de la transition, au terme d’une consultation approfondie de toutes les parties intéressées.
- 155. Vu les contradictions entre l’organisation plaignante et le gouvernement concernant la nature des droits acquis sur les biens concernés, le comité prie instamment le gouvernement, au nom des principes du tripartisme et du dialogue social, d’entreprendre des consultations approfondies et probantes avec les partenaires sociaux concernés en vue de trouver une solution définitive et mutuellement acceptable concernant les biens visés, clarifiant ainsi les droits et les responsabilités et s’assurant que les syndicats du pays puissent exercer leurs activités en toute connaissance de cause. Etant donné que l’administration de la propriété semblait constituer un moyen important par lequel les syndicats étaient en mesure de fonctionner efficacement et de défendre les intérêts de leurs membres, comme l’a indiqué le gouvernement lui-même dans sa réponse, le comité s’attend à ce que la solution à l’égard de la question du droit de propriété des syndicats permette aux syndicats d’avoir à leur disposition tous les moyens nécessaires afin de poursuivre leurs activités syndicales légitimes. Compte tenu des conséquences extrêmement négatives qu’un retrait total et définitif des droits sur ces biens entraînera pour l’organisation plaignante et pour le mouvement syndical albanais dans son ensemble, le comité demande au gouvernement d’entreprendre sans délai les consultations nécessaires et de le tenir informé du résultat de ces discussions.
- 156. Le comité note par ailleurs que les BSPSH allèguent que, en août 2007, les deux confédérations syndicales albanaises ont été expulsées de leurs locaux et interdites d’activités. Vu le peu d’information dont il dispose en ce qui concerne l’expulsion présumée de 2007 ainsi que sur les mesures empêchant la confédération d’exercer ses activités syndicales légitimes, le comité ne peut déterminer si l’expulsion était d’une manière ou d’une autre liée à l’affirmation du gouvernement selon laquelle les confédérations auraient outrepassé leurs droits légitimes en vertu du décret de 1992 et de la loi de 1998. Vu la gravité de ces allégations et de leur pertinence pour le présent cas dans son ensemble, le comité demande à l’organisation plaignante de fournir des informations complémentaires et à jour en la matière et prie instamment le gouvernement de répondre de manière exhaustive à ces allégations.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 157. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de fournir le texte de la nouvelle loi concernant les biens syndicaux telle qu’elle a été adoptée, ainsi que les décisions nos 85/2001 et 5/2004 du tribunal supérieur et la décision no 24/2002 de la Cour constitutionnelle.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement, au nom des principes du tripartisme et du dialogue social, d’entreprendre des consultations approfondies et probantes avec les partenaires sociaux concernés en vue de trouver une solution définitive et mutuellement acceptable concernant les biens visés, clarifiant ainsi les droits et les responsabilités et s’assurant que les syndicats du pays puissent exercer leurs activités en toute connaissance de cause. Etant donné que l’administration de la propriété semblait constituer un moyen important par lequel les syndicats étaient en mesure de fonctionner efficacement et de défendre les intérêts de leurs membres, comme l’a indiqué le gouvernement lui-même dans sa réponse, le comité s’attend à ce que la solution à l’égard de la question du droit de propriété des syndicats permette aux syndicats d’avoir à leur disposition tous les moyens nécessaires afin de poursuivre leurs activités syndicales légitimes. Compte tenu des conséquences extrêmement négatives qu’un retrait total et définitif des droits sur ces biens entraînera pour l’organisation plaignante et pour le mouvement syndical albanais dans son ensemble, le comité demande au gouvernement d’entreprendre sans délai les consultations nécessaires et de le tenir informé du résultat de ces discussions.
- c) Vu la gravité des allégations selon lesquelles les deux confédérations syndicales nationales ont été expulsées de leurs locaux en 2007 et interdites d’activités, et leur pertinence pour le présent cas dans son ensemble, le comité demande à l’organisation plaignante de fournir des informations complémentaires et à jour en la matière et prie instamment le gouvernement de répondre de manière exhaustive à ces allégations.