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- 485. La plainte figure dans une communication du Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé (SIGPTEES) en date du 20 mai 2010.
- 486. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication en date du 5 octobre 2010.
- 487. El Salvador a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 488. Dans sa communication en date du 20 mai 2010, le Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé (SIGPTEES) fait savoir qu’il dépose une plainte formelle contre le gouvernement d’El Salvador en raison des restrictions imposées à son droit d’élaborer librement ses statuts.
- 489. L’organisation plaignante indique que, comme publié dans le Journal officiel, elle a obtenu la personnalité juridique le 25 avril 2008 en tant que syndicat corporatif. Elle ajoute que le 27 mars 2010 une assemblée générale extraordinaire a été convoquée dans le but de réviser les statuts du syndicat et, à l’unanimité des voix du quorum, un amendement à l’article 2 a été approuvé, dont le texte est le suivant: «Toute personne qualifiée dans le domaine de la santé, technologues, infirmiers, techniciens et auxiliaires de la santé, qui sont dûment enregistrés auprès du Comité de contrôle de la profession de la santé du Conseil supérieur de la santé et qui, en outre, offrent leurs services où que ce soit sur le territoire de la république d’El Salvador, dans des établissements publics, privés ou des établissements officiels autonomes, peuvent adhérer au Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé d’El Salvador.»
- 490. L’organisation plaignante indique avoir soumis, le 5 mars 2010, un document écrit au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, dans lequel elle demande une modification de l’article susmentionné des statuts pour pouvoir inclure dans l’organisation tant les travailleurs du secteur public que du secteur privé.
- 491. Le 25 mars 2010, les représentants de l’organisation plaignante, accompagnés du secrétaire en charge des conflits du syndicat et d’un juriste de l’Institut des droits de l’homme de l’Université centraméricaine «José Simeón Canas», présent en qualité d’observateur, se sont présentés à un rendez-vous convoqué par la directrice de la section des droits collectifs des travailleurs, au sein du ministère du Travail. L’organisation plaignante indique qu’à cette occasion la directrice leur a fait savoir que les amendements aux statuts demandés ne pouvaient être approuvés au motif qu’un même syndicat ne pouvait avoir pour membres à la fois des travailleurs du secteur public et du secteur privé.
- 492. Le 8 avril 2010, les représentants susmentionnés et leurs accompagnateurs ont rencontré le conseiller juridique de la ministre du Travail et de la Prévoyance sociale, qui leur a confirmé que l’organisation plaignante ne pouvait procéder à l’amendement souhaité en raison du fait que la loi sur la fonction publique dispose en son article 76 que, aux termes de cette loi, le terme de «syndicat» s’entend de toute association permanente de fonctionnaires publics travaillant dans un même organisme de l’administration publique. De ce fait, on ne saurait mêler dans un syndicat professionnel des travailleurs du secteur public et des travailleurs du secteur privé.
- 493. L’organisation plaignante conclut en indiquant qu’à ce jour la question du refus ou de l’approbation de l’amendement à l’article 2 des statuts du syndicat n’a pas été réglée officiellement puisque aucune communication écrite à ce sujet n’a été reçue. Le conseiller juridique de la ministre a promis de faire parvenir, dans un délai de quinze jours, une décision indiquant le refus d’amendement, mais l’unique indication reçue est que l’investigation se poursuit afin de fournir une réponse correcte.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 494. Dans sa communication en date du 5 octobre 2010, le gouvernement confirme que, par l’arrêté no 08/2008 du 28 mars 2008, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a octroyé la personnalité juridique au Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé (SIGPTEES), lequel, en vertu de l’article 204 du Code du travail, s’est constitué en tant que syndicat professionnel.
- 495. Le gouvernement indique que la demande soumise le 3 mars 2010 au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale en vue d’amender l’article 2 des statuts du syndicat est irrecevable en raison du fait qu’il est impossible d’accepter au sein d’un syndicat professionnel des travailleurs du secteur public et du secteur privé, en vertu de l’article 76 de la loi sur la fonction publique qui prévoit que, «aux termes de la présente loi, l’expression “syndicat” s’entend de toute association permanente, composée d’au moins 35 fonctionnaires publics travaillant dans un même organisme de l’administration publique, pour l’étude, l’amélioration et la protection de leurs intérêts économiques et sociaux communs».
- 496. Le gouvernement souligne l’existence d’une restriction claire, de nature juridique, qui empêche la constitution de syndicats mixtes, c’est-à-dire composés de travailleurs du secteur public et de travailleurs du secteur privé, étant donné que l’article 76 susmentionné dispose explicitement que les syndicats de fonctionnaires publics doivent être composés d’employés qui travaillent «dans un même organisme de l’administration publique». Le gouvernement ajoute que, dans le pays, l’exercice des droits des travailleurs relève de la tutelle de différentes institutions: dans le cas de travailleurs du secteur privé, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale et, dans le cas d’employés publics, le tribunal de la fonction publique. Cette situation tient à ce qu’il existe des différences importantes entre les syndicats du secteur public et ceux du secteur privé comme, par exemple, les aspects suivants: i) en cas de conflit collectif du travail dans le secteur privé, c’est le ministère du Travail et de la Prévention sociale qui intervient en vertu des articles 467 à 470 du Code du travail; lorsqu’il s’agit du secteur public, c’est le tribunal de la fonction publique qui suit la procédure, en vertu des articles 120 à 123 de la loi sur la fonction publique; ii) l’article 221, paragraphe 1, de la Constitution interdit le droit de grève dans le secteur public («Il est interdit aux travailleurs du secteur public et des municipalités de faire grève, de même que d’abandonner collectivement leurs fonctions…»); iii) les conventions collectives du secteur public sont soumises à des restrictions qui n’existent pas pour le secteur privé, et les conventions collectives conclues dans le secteur public font notamment intervenir le ministère des Finances, ce qui n’est pas le cas pour le secteur privé. En outre, l’article 246 de la Constitution dispose que «l’intérêt public prime sur l’intérêt privé», ce qui justifie les restrictions à l’exercice de la liberté syndicale en vigueur dans le secteur public.
- 497. Après avoir mentionné les principes des organes de contrôle concernant l’application de la convention no 87, tant aux travailleurs du secteur public qu’à ceux du secteur privé, le gouvernement indique que: 1) il a la ferme volonté de respecter les principes de la convention no 87, et des efforts en ce sens ont été faits, même si le système juridique en vigueur ne permet pas de respecter certaines dispositions de la convention en raison notamment de l’impossibilité de constituer des syndicats composés de fonctionnaires travaillant dans divers organismes publics; 2) une proposition de réforme de la loi sur la fonction publique est en cours d’élaboration en vue d’être soumise à l’organe législatif. En outre, depuis la réforme, en 2009, de l’article 47 de la Constitution, on reconnaît aux fonctionnaires, aux employés publics et aux employés municipaux le droit de s’associer librement pour la défense de leurs intérêts respectifs en constituant des associations professionnelles ou des syndicats, bien qu’il demeure interdit d’accepter comme membres de tels syndicats des travailleurs du secteur privé en vue de constituer des syndicats mixtes.
- 498. Le gouvernement affirme que, tout en respectant les règles institutionnelles du pays, l’attitude du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale est conforme aux prescriptions de la convention no 87. De même, on peut en conclure que, en ce qui concerne le Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé (SIGPTEES), il n’a, à aucun moment, été commis d’actes attentatoires à la liberté syndicale des secteurs public et privé ni au droit de constituer des associations professionnelles énoncé à l’article 11 de la convention no 87.
- 499. Cela étant, le gouvernement ajoute que, s’il est vrai que l’article 47, paragraphe 1, de la Constitution dispose que: «Les patrons et les travailleurs privés, sans distinction de nationalité, de sexe, de race, de croyance ou d’idées politiques, et quelle que soit leur activité ou la nature du travail qu’ils accomplissent, ont le droit de s’associer librement pour défendre leurs intérêts respectifs, en formant des associations professionnelles ou des syndicats; les travailleurs des institutions officielles autonomes, les fonctionnaires et agents publics ainsi que les agents municipaux ont le même droit»; l’exercice de ce droit doit s’inscrire dans le cadre des dispositions légales pertinentes, à savoir l’article 76 de la loi sur la fonction publique, et il n’est pas possible, du point de vue juridique, d’appliquer simultanément deux textes législatifs à une même association professionnelle (la loi sur la fonction publique et le Code du travail).
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 500. Le comité note que dans le présent cas l’organisation plaignante dénonce des restrictions au droit qu’elle a d’élaborer librement ses statuts, ainsi qu’à l’adhésion de personnels de la santé et connexes appartenant aux secteurs tant privé que public.
- 501. Le comité note que, selon l’organisation plaignante: i) une assemblée générale extraordinaire s’est tenue le 27 mars 2010 dans le but d’amender les statuts du syndicat et, à l’unanimité des voix du quorum, l’amendement de l’article 2 a été approuvé; ii) dans un document écrit soumis le 5 mars 2010 au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, celle-ci aurait demandé que l’article susmentionné des statuts soit amendé pour que l’organisation puisse accepter des travailleurs des secteurs tant public que privé; iii) à deux occasions, le ministère du Travail a fait savoir que les amendements aux statuts ne pouvaient être effectués en raison du fait qu’un même syndicat ne pouvait comporter à la fois des travailleurs des secteurs public et privé; iv) à ce jour, la question du refus ou de l’approbation de l’amendement de l’article 2 n’a pas été réglée officiellement, puisque aucune communication écrite n’a été émise à ce sujet.
- 502. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: i) la demande soumise le 3 mars 2010 au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale en vue d’amender l’article 2 des statuts est irrecevable, en raison du fait qu’il n’est pas possible d’enregistrer dans un même syndicat professionnel des travailleurs du secteur public et des travailleurs du secteur privé, conformément à ce que prévoit l’article 76 de la loi sur la fonction publique; ii) il existe des restrictions claires, de nature juridique, à la constitution de syndicats mixtes; iii) cela tient au fait qu’il existe des différences importantes entre les syndicats du secteur public et ceux du secteur privé; iv) une proposition de réforme de la loi sur la fonction publique est en cours d’élaboration en vue d’être soumise à l’organe législatif; v) depuis la réforme, en 2009, de l’article 47 de la Constitution, on reconnaît aux fonctionnaires, aux employés publics et aux employés municipaux le droit de s’associer librement pour la défense de leurs intérêts respectifs en constituant des associations professionnelles ou des syndicats, bien qu’il demeure impossible d’accepter dans ces organisations des travailleurs du secteur privé en vue de constituer des syndicats mixtes; vi) s’il est vrai que l’article 47, paragraphe 1, de la Constitution établit que les patrons et les travailleurs du privé ont le droit de s’associer librement pour défendre leurs intérêts respectifs, en constituant des associations professionnelles ou des syndicats, il n’en demeure pas moins qu’il existe des restrictions de nature juridique qui interdisent la formation de syndicats mixtes, c’est-à-dire de syndicats composés de travailleurs du secteur public et de travailleurs du secteur privé, puisque l’article 76 de la loi sur la fonction publique dispose explicitement que les syndicats de fonctionnaires publics doivent être composés d’employés travaillant «dans un même organisme de l’administration publique»; vii) sans enfreindre les règles institutionnelles du pays, l’attitude du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale reste conforme aux prescriptions de la convention no 87.
- 503. Le comité conclut que l’état actuel de la législation ne permet pas à un syndicat d’être composé à la fois de travailleurs du secteur privé et du secteur public. Par ailleurs, il ressort de la réponse du gouvernement qu’il existe des problèmes techniques étant donné que l’exercice des droits des travailleurs (constitution de syndicats, régime des conflits collectifs et des conventions collectives, droit de grève (interdit dans le secteur public), etc.) sont régis par différentes lois (le Code du travail et la loi sur la fonction publique) et par différentes institutions, à savoir, dans le cas des travailleurs privés, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale et, dans le cas des employés publics, le tribunal de la fonction publique. De l’avis du comité, la revendication du Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé (SIGPTEES) de pouvoir être composé de professionnels, de techniciens et d’auxiliaires de la santé du secteur public et du secteur privé est tout à fait légitime et, à cet égard, il rappelle que, pour ce qui est des restrictions limitant l’affiliation de tous les agents de la fonction publique à un syndicat réservé à cette seule catégorie de travailleurs, on peut admettre que les organisations de base des agents de la fonction publique puissent être limitées à cette catégorie de travailleurs à condition, toutefois, qu’il ne soit pas prévu simultanément que ces organisations doivent se limiter aux agents d’un ministère, département ou service particulier et que les organisations de base d’agents de la fonction publique puissent s’affilier librement aux fédérations et confédérations de leur choix. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 337.]
- 504. Le comité note avec intérêt que le gouvernement fait part de sa ferme volonté de respecter les principes de la convention no 87, étant donné l’impossibilité juridique de constituer des syndicats mixtes de travailleurs du secteur privé et du secteur public, et fait savoir à cet égard qu’une proposition de réforme de la loi sur la fonction publique est en cours d’élaboration en vue d’être soumise à l’organe législatif. Le comité demande au gouvernement, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, d’accélérer le processus de réforme de la législation tout en s’assurant qu’il garantisse le plein exercice des principes de liberté syndicale aux fonctionnaires, et exprime le ferme espoir que, dans un futur très proche, le Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé pourra procéder à la modification de ses statuts et de ce fait représenter non seulement les professionnels, les techniciens et les auxiliaires de la santé du secteur privé, mais également ceux du secteur public. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de ce processus de réforme et, dans l’intervalle, d’autoriser le syndicat, en pratique, à représenter les professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé travaillant dans les secteurs privé et public.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 505. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
- Le comité note avec intérêt que le gouvernement fait part de sa ferme volonté de respecter les principes de la convention no 87, étant donné l’impossibilité juridique de constituer des syndicats mixtes de travailleurs du secteur privé et du secteur public, et fait savoir à cet égard qu’une proposition de réforme de la loi sur la fonction publique est en cours d’élaboration en vue d’être soumise à l’organe législatif. Le comité demande au gouvernement, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, d’accélérer le processus de réforme de la législation, tout en s’assurant qu’il garantisse le plein exercice des principes de liberté syndicale aux fonctionnaires, et exprime le ferme espoir que, dans un futur très proche, le Syndicat corporatif des professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé pourra procéder à la modification de ses statuts et de ce fait représenter non seulement les professionnels, les techniciens et les auxiliaires de la santé du secteur privé, mais également ceux du secteur public. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de ce processus de réforme et, dans l’intervalle, d’autoriser le syndicat, en pratique, à représenter les professionnels, techniciens et auxiliaires de la santé travaillant dans les secteurs privé et public.