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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 380, October 2016

Case No 3106 (Panama) - Complaint date: 10-AUG-14 - Closed

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Allégations: Interdiction de faire grève aux travailleurs du canal de Panama sans assurer des garanties compensatoires adéquates, entraves à la jouissance de facilités dont devraient bénéficier les représentants des travailleurs, non-respect d’une convention collective et imposition unilatérale de conditions de travail, refus de négocier de bonne foi et harcèlement de syndicalistes

  1. 767. La plainte figure dans des communications datées du 10 août et du 20 novembre 2014 émanant de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF), de l’Union des capitaines et officiers de pont (UCOC), de l’Union des pilotes du canal de Panama (UPCP), de l’Union des ingénieurs maritimes (UIM) et du Syndicat du canal de Panama et des Caraïbes (SCPC).
  2. 768. Le gouvernement a envoyé ses observations par des communications datées des 24 et 27 février 2015, ainsi que du 24 octobre 2016.
  3. 769. Le Panama a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 770. Dans leurs communications datées du 10 août et du 20 novembre 2014, les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement refuse aux travailleurs du canal de Panama le droit de faire grève, ne fournit pas les garanties compensatoires adéquates à cet égard, entrave la jouissance de facilités dont devraient bénéficier les représentants des travailleurs, ne respecte pas certains engagements pris dans le cadre d’une convention collective, impose unilatéralement des changements de conditions de travail, ne négocie pas de bonne foi et harcèle les syndicalistes.
  2. 771. Les organisations plaignantes allèguent que le droit de grève n’existe pas pour les travailleurs du canal de Panama. Elles font valoir que l’article 92 de la loi organique de l’Autorité du canal de Panama (LOACP) stipule que le canal est un service public international et prévoit que son fonctionnement ne doit s’interrompre ni partiellement ni complètement, ni subir une altération quelle qu’en soit la cause, telles la grève, la grève du zèle ou toute autre suspension du travail injustifiée. Elles soulignent que cette interdiction se fonde sur le classement du canal comme service «public» international et non pas comme service public «essentiel». Les organisations plaignantes estiment que les conditions nécessaires décrites par le comité ne sont pas réunies pour imposer une interdiction totale du droit de grève aux travailleurs du canal de Panama.
  3. 772. Les organisations plaignantes allèguent par ailleurs que les garanties compensatoires en faveur des travailleurs privés du droit de grève sont inadéquates. Les plaignants indiquent aussi que la LOACP propose deux voies pour aborder les conflits du travail dans le canal de Panama, dont l’une et l’autre limitent les possibilités de faire appel des décisions ou sentences arbitrales: i) le recours au Conseil des relations professionnelles, qui est habilité à statuer de manière contraignante sur les différends dans la négociation ou en cas d’impasse et sur les plaintes pour pratiques du travail déloyales (ses décisions sont sans appel, à moins qu’elles ne soient contraires à la LOACP); ii) la négociation collective et les mécanismes de conciliation et d’arbitrage prévus (les sentences arbitrales qui en résultent ne peuvent faire l’objet d’un appel que lorsqu’il y a allégation d’interprétation erronée de la loi et des règlements, en cas de partialité manifeste de l’arbitre ou en cas de non-respect du processus applicable). Les organisations plaignantes allèguent que, bien que la LOACP prévoie ces limitations de la possibilité de faire appel, l’Autorité du canal de Panama (ACP) en appelle à la Cour suprême concernant toutes décisions et sentences arbitrales qui lui sont défavorables. Les plaignants allèguent que ces appels ont pour seul objectif de retarder l’application des décisions – car les procédures d’appel peuvent durer jusqu’à cinq ans et l’autorité refuse d’appliquer les décisions qui n’ont pas été confirmées par la Cour suprême. Les organisations plaignantes estiment par conséquent que les garanties compensatoires de la confiscation du droit de grève ne sont pas appropriées et que les principes de la liberté syndicale s’en trouvent affaiblis. A l’appui de cette allégation, les organisations plaignantes font état de six cas: i) la plainte 05/10, présentée le 26 janvier 2010 au Conseil des relations professionnelles pour pratiques de travail illégales et alléguant le refus de rémunérer des capitaines dans le cadre de la négociation collective en cas d’appels précoces au travail sans la notification préalable habituelle (le conseil a statué le 25 février 2011 en faveur de l’UCOC, l’ACP a fait appel immédiatement et on est encore en attente de la décision de la Cour suprême); ii) la plainte 11/10 présentée pour pratiques de travail déloyales le 10 mai 2010 au Conseil des relations professionnelles, alléguant l’absence du paiement d’heures supplémentaires à des ingénieurs maritimes tel qu’il était prévu par la convention collective (le conseil a statué en faveur de l’UIM le 20 juillet 2012, l’autorité a fait appel le 17 septembre 2012, et on est encore en attente de la décision de la Cour suprême à cet égard); iii) la plainte 18/10 pour pratiques de travail déloyales présentée le 27 août 2010, alléguant le non-respect de la convention collective pour ce qui est de l’obligation de fournir une collation aux ingénieurs maritimes (le conseil a statué en faveur de l’UIM le 17 janvier 2013, l’autorité a fait appel le 24 juin 2013, et on est toujours en attente de la décision de la Cour suprême); iv) la plainte concernant l’exclusion des capitaines de la convention collective conclue entre l’UCOC et l’autorité, au motif qu’il s’agit d’«employés de confiance»; l’autorité a saisi le conseil du cas le 7 avril 2009 (le conseil a statué en faveur de l’UCOC, l’autorité a fait appel immédiatement, et la Cour suprême a statué en faveur de l’UCOC en avril 2014); v) la plainte 34/06 pour pratiques de travail déloyales présentée en 2006, alléguant le non-respect des procédures de soins médicaux (le conseil a statué en faveur de l’UPCP le 31 mars 2014, et on est toujours en attente de la décision de la Cour suprême); et vi) les cas d’arbitrage 79/10 et 80/10, alléguant la privation infligée aux membres de l’unité de négociation de l’accès à des navires à bord desquels le travail donne droit à une indemnité supplémentaire (les audiences ont eu lieu en juillet 2011 et en juillet 2012, les arbitres ont statué en faveur de l’UPCP, l’autorité a fait appel et on est toujours en attente de la décision de la Cour suprême).
  4. 773. Les organisations plaignantes font également valoir que l’ACP empêche les représentants des travailleurs de jouir des facilités qui leur sont accordées. On se souviendra que la LOACP assigne la représentation des travailleurs à un «représentant exclusif» défini comme l’organisation syndicale qui représente les travailleurs d’une unité de négociation, et la loi prévoit que le «temps de représentation» est le temps accordé au travailleur désigné par le «représentant exclusif» afin de le représenter dans le cadre d’une activité légale. Par ailleurs, les organisations plaignantes font savoir qu’en décembre 2009, l’UCOC a signé un mémorandum d’entente pour compléter les dispositions relatives à la représentation, qui reconnaît aux trois représentants de secteur désignés un maximum commun de quarante heures de temps de représentation. Les organisations plaignantes expliquent que, en invoquant sciemment une interprétation erronée de ce mémorandum d’entente pour empêcher les travailleurs de jouir des facilités de représentation: i) l’ACP refuse à l’organisation syndicale le droit de décider des représentants qui pourront se prévaloir du temps de représentation (à cet égard, les organisations plaignantes donnent, à titre d’exemple, l’arbitrage 14-002, dans le cadre duquel ni le secrétaire général du syndicat ni son représentant et assesseur juridique ne s’est vu assigner un temps de représentation, ainsi qu’à la procédure disciplinaire contre deux capitaines, au cours de laquelle un temps de représentation a été refusé aux représentants syndicaux désignés pour représenter les travailleurs concernés); ii) pour ce qui est des réunions avec la participation d’autres représentants syndicaux, l’ACP affirme qu’elle n’a été en mesure de leur reconnaître un temps de représentation que lorsque c’est elle qui convoque la réunion (et elle le leur refuse lorsque ce sont les représentants syndicaux qui convoquent la réunion, conformément au mémorandum d’entente, alors que cette limitation n’est pas prévue par la LOACP). Pour illustrer les effets négatifs du refus de reconnaître un temps de représentation aux trois représentants de secteur, les organisations plaignantes précisent que le syndicat assigne les cas aux secrétaires syndicaux et les répartit en fonction des thèmes concernés et qu’il ne les assigne pas aux représentants de secteur. Cependant, les plaignants citent d’autres faits pour illustrer les entraves aux facilités consenties en principe aux représentants des travailleurs, alléguant que l’ACP: i) commence à suggérer que les réunions ne devraient avoir lieu que lorsque le représentant syndical prend un jour de repos; ii) a manipulé la liste des équipes afin que les représentants et/ou les travailleurs assujettis à des audiences disciplinaires ne bénéficient que d’un temps de repos minimum entre leur travail posté et les réunions; iii) n’autorise pas les supérieurs hiérarchiques immédiats à autoriser eux-mêmes un temps de représentation (ce qui était pourtant la pratique habituelle, notamment parce que les supérieurs hiérarchiques immédiats sont les mieux placés pour comprendre les besoins en matière de listes d’équipes et de représentation), de telle sorte que ceux-ci doivent suivre les instructions orales directes de leurs chefs hiérarchiques supérieurs; iv) concernant les négociations de mi-parcours prévues par la convention collective avec l’UPCP, l’autorité a concédé environ soixante-quinze jours civils de temps officiel à l’équipe de négociation du syndicat, alors que l’équipe de négociation de l’autorité a bénéficié de plus d’une année de temps rémunéré pour se préparer. Les organisations plaignantes allèguent que leurs représentants devraient avoir la possibilité d’entrer en communication avec la direction sans retard injustifié et de disposer du temps rémunéré nécessaire pour s’acquitter de leur tâches de représentation, de même que les syndicats devraient avoir le droit de décider qui seront leurs représentants et notamment qui aura accès aux facilités de représentation.
  5. 774. Les organisations plaignantes allèguent aussi que l’ACP ne respecte pas certains engagements pris dans le cadre des conventions collectives, qu’elle impose unilatéralement des changements aux conditions de travail et qu’elle ne négocie pas de bonne foi. S’agissant des relations entre les autorités du canal et l’UPCP, les organisations plaignantes font savoir qu’en premier lieu l’Autorité a répondu négativement à la demande du syndicat d’élaborer et de mettre en œuvre conjointement des programmes de formation destinés aux pilotes du canal qui seront aux commandes des navires naviguant sur les nouveaux canaux et écluses, bien qu’un mémorandum signé le 31 mai 2012 entre l’autorité et l’UPCP dans le cadre de la convention collective conclue avec ce syndicat fait état d’un engagement concernant cette élaboration conjointe. Les organisations plaignantes déclarent que l’UPCP a l’intention de présenter une plainte pour pratiques de travail déloyales contre l’autorité à cet égard. Deuxièmement, les organisations plaignantes font savoir que l’autorité a adressé une lettre à l’UPCP en date du 9 mai 2014 pour notifier le syndicat de changements dans les conditions de travail en vigueur (ainsi que de changements à venir du fait de l’ouverture du troisième ensemble d’écluses), tout en refusant implicitement à l’UPCP le droit à des négociations complètes sur ces changements apportés aux conditions de travail, y compris le droit reconnu par la LOACP de négocier concernant les voies et moyens pour les travailleurs d’accomplir leur travail. Dans la même veine, les plaignants allèguent que, pour ce qui est des conditions de travail couvertes par la convention collective: i) l’article 4 de la convention prévoit que ses dispositions ne peuvent être renégociées que par accord mutuel; ii) bien que l’UPCP n’ait pas donné son accord concernant la réouverture de négociations sur ces dispositions, l’autorité a insisté pour imposer de nouvelles règles, et c’est pour cette raison que l’UPCP a présenté une plainte pour pratiques de travail déloyales au Conseil des relations professionnelles.
  6. 775. Pour ce qui est des relations entre l’Autorité du canal de Panama et l’UCOC, les organisations plaignantes font savoir que l’autorité n’a pas négocié de bonne foi. Elles allèguent que l’UCOC tente de négocier une nouvelle convention collective depuis presque cinq ans, mais qu’en dépit de tous ses efforts depuis décembre 2012 elle n’a même pas été en mesure de négocier avec succès les règles fondamentales applicables à la négociation d’une nouvelle convention. Les organisations plaignantes allèguent que les négociations sur les règles fondamentales ont commencé en janvier 2013 et qu’après quelques réunions il a été constaté que l’autorité ne négociait pas de bonne foi. Plus précisément, les plaignants allèguent que: i) l’UCOC n’a pas été créditée d’un temps de représentation pour se préparer; ii) les capitaines qui ont participé aux négociations ont dû continuer d’assumer leur travail posté habituel, ce qui les a parfois obligés à assister à des réunions sans avoir pu respecter les temps de repos obligatoires; iii) l’autorité a continué d’envoyer travailler les membres de l’équipe des négociateurs de l’UCOC à son bon vouloir, ce qui a porté atteinte à la continuité des négociations (tandis que l’équipe des négociateurs de l’autorité disposait du temps libre dont elle avait besoin pour se concentrer sur les négociations); iv) l’UCOC n’a pas été autorisée à requérir l’aide d’avocats ou autres assesseurs à la table des négociations; v) l’autorité a multiplié par trois la liste succincte des thèmes proposés par le syndicat et en a introduit d’autres qui correspondaient à la négociation d’une convention collective et non pas à celle des règles de bases de la négociation; vi) l’équipe de l’autorité a fait savoir qu’elle n’avait pas mandat pour prendre des décisions et qu’elle recevait ses instructions de fonctionnaires de rang hiérarchique supérieur. Les organisations plaignantes déclarent que la négociation des règles de base a été interrompue définitivement en septembre 2013 et que l’UCOC a recouru au Conseil des relations professionnelles pour sortir de l’impasse.
  7. 776. Enfin, les organisations plaignantes allèguent que l’autorité harcèle les syndicalistes. Elles expliquent que, dans le cadre de la négociation des règles de bases relatives à la mise au point d’une convention collective avec l’UCOC, dans un cas où, exceptionnellement, l’équipe de négociation syndicale s’était vue octroyer une semaine de temps de représentation, les négociations ont été interrompues à la fin de la toute première séance, et l’autorité a ordonné aux membres de l’équipe syndicale de retourner à leur travail. Les organisations plaignantes font savoir que, lorsque les membres de l’équipe de négociation syndicale ont refusé de reprendre leur travail en faisant valoir qu’on leur avait concédé un temps de représentation, chacun d’eux a reçu le même jour un avis de sanction disciplinaire au motif qu’il avait refusé d’obéir à un ordre. Les organisations plaignantes ajoutent que, même si la menace de sanction disciplinaire a été finalement abandonnée, la démonstration de force et l’attitude de l’autorité ont conforté le sentiment que la direction n’avait pas la moindre intention de négocier une convention collective avec l’UCOC.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 777. Dans ses communications datées du 24 et 27 février 2015, le gouvernement transmet sa réponse, fondée sur les observations de l’ACP concernant les allégations des organisations plaignantes.
  2. 778. Pour ce qui est de l’interdiction de faire grève dans le canal, le gouvernement rappelle que ce n’est pas le gouvernement qui refuse le droit de faire grève aux travailleurs du canal de Panama; il s’agit d’une politique du travail qui est le fruit d’une décision tripartite à laquelle les syndicats (dont des membres des quatre organisations plaignantes) ont pris une part consciente et qui est à l’origine de l’article 322 de la Constitution politique. A cet égard, le gouvernement souligne que l’interdiction ne découle pas uniquement d’une disposition de la LOACP, mais aussi du fait qu’elle se fonde sur la Constitution du pays, dont l’article 322 prévoit que, compte tenu du service international essentiel qu’assure le canal, son fonctionnement ne saurait être interrompu pour quelque raison que ce soit. Le gouvernement communique à cet égard la déclaration du représentant de la Coalition des syndicats de travailleurs du canal de Panama (AFL-CIO) pendant la séance ordinaire de l’Assemblée législative du Panama du 22 décembre 1993, reconnaissant que «sur le canal de Panama, il ne saurait exister de droit de grève, et nous, la Coalition des syndicats, ne demandons en aucun cas que le droit de grève soit applicable». Le gouvernement ajoute que, pour que les attentes des travailleurs ne restent pas dépourvues de protection, il a été proposé que les conflits du travail entre les travailleurs du canal et leur administration soient résolus entre les travailleurs ou leurs syndicats et l’administration, en fonction des mécanismes de résolution de conflits prévus par la loi, l’arbitrage demeurant l’ultime recours administratif possible. Le gouvernement souligne que la LOACP a été le fruit de consultations innombrables et du consensus atteint par divers groupes politiques, civils, écologistes et de travailleurs de la société panaméenne, avec l’appui du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Le gouvernement ajoute que cette interdiction est donc d’abord le résultat d’une décision prise par le peuple panaméen et qu’elle a été en outre confirmée par les trois organes de l’Etat – à cet égard, le gouvernement rappelle que la question a été examinée par la Cour suprême de justice qui a fait connaître sa décision le 27 avril 2009, en vertu de laquelle l’assemblée plénière de la Cour suprême a jugé que, même si le droit des travailleurs de faire grève est un droit constitutionnel garanti, il faut prendre en compte prioritairement le principe de la concordance des normes constitutionnelles aux termes duquel la non-interruption du service public essentiel qu’assure le canal de Panama est expressément consacrée par la Constitution. Enfin, le gouvernement rappelle que la disposition constitutionnelle sur laquelle se fonde l’interdiction de faire grève est conforme aux dispositions de l’article II du traité concernant la neutralité permanente du canal et au fonctionnement du canal de Panama, qui établit la neutralité du canal afin qu’en temps de paix comme en temps de guerre, il demeure sûr et ouvert au transit pacifique des navires de tous les pays, dans des conditions d’égalité absolue. Le gouvernement précise que cet engagement (conclu entre le Panama et les Etats-Unis d’Amérique le 7 septembre 1977, et auquel ont adhéré 14 Etats) implique l’obligation de tenir le canal ouvert sans interruption aucune. Le gouvernement souligne qu’il ne s’agit pas d’un service ordinaire – qui pourrait être interrompu pour ne pas mettre en danger la vie ou la sécurité des personnes; en effet, la stabilité de nos sociétés, la durabilité du système mondial et, en dernière analyse, la paix dans le monde dépendent de sa continuité. A cet égard, le gouvernement estime qu’il s’agit d’un service d’intérêt mondial.
  3. 779. Pour ce qui est des allégations relatives à l’inadéquation des garanties compensatoires, le gouvernement déclare en premier lieu que les organisations plaignantes oublient d’indiquer que, outre l’accès au Conseil des relations professionnelles et aux procédures de négociation collective, les travailleurs du canal peuvent compter sur d’autres garanties compensatoires dont, notamment, le principe de la stabilité professionnelle garantie, le système de la liberté d’information, le droit des organisations syndicales de maintenir leur affiliation à des organisations syndicales internationales, le droit de présenter une plainte et, par conséquent, de demander un arbitrage, et la possibilité de constituer un conseil travailleurs-employeur, avec la participation de l’administration et des syndicats pour améliorer les relations professionnelles, identifier les problèmes et trouver des solutions. Par ailleurs, le gouvernement précise que les cas dans lesquels les syndicats ont exercé leur droit de faire recours contre des sentences arbitrales ou des décisions du Conseil des relations professionnelles sont plus nombreux que ceux dans lesquels ils ont fait recours contre l’administration, avec la même légitimité (pour illustrer ses propos, le gouvernement a fourni dans sa dernière communication des informations détaillées sur le nombre de procédures relatives au travail que l’ACP a entreprises entre 2000 et 2016, notamment le nombre de plaintes émises par chacune des parties: 36 par l’ACP et 55 par les syndicats). En outre, le gouvernement indique que, dans aucun des cas mentionnés par les organisations plaignantes, les recours de l’administration n’étaient motivés par un caprice de l’ACP pour éviter l’application de décisions défavorables et pour abuser de l’interdiction de la grève sur le canal; au contraire, dans chacun de ces recours en appel, l’administration s’est efforcée de respecter la garantie de la procédure et de la juridiction compétente après avoir légitimement invoqué la violation des dispositions légales. S’agissant des plaintes pour pratiques de travail déloyales 05/10, 11/10 et 18/10, le gouvernement déclare qu’en vertu de la loi ces plaintes n’étaient pas fondées sur des pratiques de travail déloyales et qu’elles auraient dû être présentées dans le cadre du recours à l’arbitrage, de sorte que la déclaration de leur recevabilité par le Conseil des relations professionnelles était en fait illégale. C’est pourquoi le gouvernement s’est vu contraint de faire appel des décisions du conseil afin de préserver l’intégrité du régime professionnel du canal. Le gouvernement indique que l’un de ces cas (plainte 05/10) a été tranché par la Cour suprême de justice le 5 février 2015, par l’annulation de la décision du Conseil des relations professionnelles au motif qu’il n’était pas compétent pour traiter cette plainte, la Cour suprême ayant jugé qu’il ne s’agissait pas là de pratiques de travail déloyales (le gouvernement estime que ce même critère devrait s’appliquer aux autres plaintes du même type, à savoir les 11/10 et 18/10, sur lesquelles la Cour suprême n’a pas encore statué). Pour ce qui est des deux cas d’arbitrage, le gouvernement fait savoir que l’administration s’est également vue contrainte de faire appel contre les sentences arbitrales (dans un des cas, parce que l’arbitre avait outrepassé sa compétence lors de la prise d’une décision et, dans l’autre, parce que l’arbitre s’était écarté de l’affaire pour laquelle il devait se prononcer).
  4. 780. Concernant les allégations relatives au refus d’accorder les facilités de représentation, le gouvernement indique que l’ACP s’est limitée à exercer sa fonction, à savoir respecter et faire respecter la loi, les conventions collectives et les accords d’entente entre les parties, afin de garantir l’efficacité et les performances du service assuré par le canal. L’autorité estime que le nouveau syndicat des capitaines de remorqueurs UCOC perturbe le bon fonctionnement des relations professionnelles en encourageant le non-respect des accords déjà signés. A cet égard, l’autorité rappelle que le mémorandum d’entente signé avec l’UCOC en 2009 prévoit que seuls trois représentants de secteur (qui seront désignés à raison d’un par secteur opérationnel) pourront bénéficier de temps de représentation. Par conséquent, l’autorité ne pouvait octroyer de temps de représentation à d’autres représentants des travailleurs dans le cadre des procédures d’arbitrage et disciplinaires mentionnées, car il aurait fallu pour cela que ces derniers soient désignés comme représentants de secteur par le syndicat. A titre d’exemple, le gouvernement indique que, dans le cadre de l’arbitrage 14-002, le syndicat a cessé d’assister à diverses réunions car, n’ayant pas satisfait à cette exigencepourtant prévue dans le mémorandum d’entente, il n’a pu bénéficier du temps de représentation qu’il avait sollicité.
  5. 781. Concernant l’allégation selon laquelle l’autorité ne négocierait pas de bonne foi avec l’UCOC, celle-ci allègue que c’est l’UCOC qui a fait preuve de mauvaise foi à la table des négociations. L’autorité fait savoir que, après avoir tenté pendant plus d’un an de s’accorder sur des règles de base concernant la négociation d’une convention collective avec l’UCOC, ce syndicat a présenté sept allégations d’impasse au Conseil des relations professionnelles, ce qui a abouti à la suspension des tentatives de négociation. Selon le gouvernement, le conseil a statué en faveur de l’autorité pour six des sept thèmes soulevés. Pour ce qui est du septième thème, il n’a obtenu que le droit de disposer de cinq négociateurs au lieu des quatre que proposait l’autorité. Cette dernière précise que, les allégations d’impasse ayant été rejetées, l’administration a invité à plusieurs reprises l’UCOC à revenir à la table des négociations.
  6. 782. Dans sa communication du 24 octobre 2016, le gouvernement présente des observations supplémentaires et communique de nouvelles informations fournies par l’ACP. D’une manière générale, il estime que la plainte n’est pas conforme aux prescriptions de base concernant l’identification précise de faits et de preuves établies, car, selon lui, la commission aurait du mal à présenter des recommandations sur des questions aussi délicates que les garanties compensatoires, alors que la certitude des faits allégués n’a pas été prouvée ou démontrée.
  7. 783. L’ACP fait savoir qu’elle entretient un dialogue constant avec les organisations de travailleurs, et en donne pour preuve la signature en 2016 de quatre conventions collectives, dont une avec l’UPCP et l’autre avec l’UCOC. De plus, elle négocie actuellement avec les ingénieurs techniques et les sapeurs-pompiers afin de convenir d’une nouvelle convention collective avec les travailleurs de ces unités de négociation.
  8. 784. L’ACP fait savoir qu’elle a signé le 9 mai 2016 une convention collective avec l’UPCP. Elle précise que, en ce qui concerne les allégations de la plainte relatives à l’UPCP, elle a pris les mesures suivantes: i) dans le cadre des négociations, le Conseil des relations professionnelles a, par la résolution no 35/2015 du 6 avril 2015, classé le processus d’impasse qu’avait invoqué l’UPCP; ii) dans le cadre de la nouvelle convention collective, les parties ont mis au point des dispositions générales relatives à la formation, s’étant déjà mises d’accord avec l’UPCP sur six formations rémunérées.
  9. 785. L’ACP indique qu’elle a signé une convention collective avec l’UPCP le 27 juin 2016. Elle précise que le mémorandum d’entente de 2009 (qui porte sur les questions des facilités de représentation que pose cette organisation) est toujours inscrit parmi les normes de représentation syndicale prévues dans la nouvelle convention collective.
  10. 786. L’ACP indique en outre que, en ce qui concerne la convention collective régissant les pratiques appliquées dans le cadre de l’exploitation du canal, les parties concernées reconnaissent que tous les travaux relatifs à l’Ecluse de Cocoli et celle d’Agua Clara (nouveau canal) sont nouveaux et que les parties réviseront les temps standard pour le calcul de rémunération d’une heure de travail, de manière à laisser ouvertes les voies de communication, dans le but d’améliorer leur fonctionnement et l’environnement de travail. De plus, l’ACP indique que les quatre dernières conventions collectives qui ont été signées offrent des avantages, notamment des avantages économiques importants, pour 97,5 pour cent des travailleurs du canal.
  11. 787. En ce qui concerne la rapidité des procédures de traitement des plaintes en matière de garanties compensatoires, l’ACP est d’avis que l’on pourrait envisager une surveillance accrue du travail qu’effectue le Conseil des relations professionnelles – rappelant que c’est lui qui est capable de satisfaire au mieux et au plus juste la réglementation du travail propre au canal – ainsi qu’une formation continue des arbitres.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 795. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement, à la lumière de données statistiques complètes sur la durée des procédures établies comme garanties compensatoires, y compris la fréquence des recours en appel au Tribunal suprême, de faciliter le dialogue avec les partenaires sociaux pour assurer l’efficacité et le caractère expéditif de ces procédures de traitement des plaintes en matière de garanties compensatoires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • b) Le comité invite le gouvernement à faciliter le dialogue entre les autorités compétentes et les partenaires sociaux sur les facilités de représentation existantes ainsi que leur application en pratique, conformément aux principes de la liberté syndicale.
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