Allégations: L’organisation plaignante allègue que le Code du travail restreint
le droit des travailleurs de s’organiser librement et de négocier collectivement. Elle
allègue en outre des actes de discrimination antisyndicale, d’ingérence et de représailles
de la part du gouvernement contre les syndicats indépendants
- 513. La plainte figure dans des communications datées des 15 septembre et
28 décembre 2018, et du 30 juillet 2019 de la Fédération jordanienne des syndicats
indépendants (JFITU).
- 514. Le gouvernement a fourni ses observations dans des communications
datées des 15 janvier, 14 juillet, 28 août et 11 décembre 2019, et des 13 janvier et
20 février 2020.
- 515. La Jordanie a ratifié la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949. Elle n’a pas ratifié la convention
(no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 516. Dans ses communications datées des 15 septembre et 28 décembre 2018,
et du 30 juillet 2019, la JFITU allègue que le Code du travail restreint le droit des
travailleurs de s’organiser et de négocier librement. Elle allègue en outre des actes de
discrimination antisyndicale, d’ingérence et de représailles de la part du gouvernement
contre les syndicats indépendants dans la pratique.
- 517. La JFITU allègue, en particulier, des restrictions au droit
d’organisation de certaines catégories de travailleurs. À cet égard, selon la JFITU, si
le Code du travail a été modifié de manière à permettre aux travailleurs migrants
d’adhérer à des syndicats, il ne leur permet pas de constituer des syndicats ou
d’exercer des fonctions syndicales. Ainsi, selon l’organisation plaignante, il est très
peu probable que des syndicats soient constitués et que les travailleurs négocient
collectivement leurs conditions de travail dans les secteurs où les travailleurs
migrants prédominent. Selon l’organisation plaignante, la question de savoir si les
travailleurs migrants peuvent voter lors des élections des conseils exécutifs des
syndicats reste une question juridique.
- 518. En outre, selon l’organisation plaignante, bien que le Code du
travail ait été modifié en 2008 afin d’étendre certains droits aux travailleurs
domestiques et agricoles, la loi exige que ces travailleurs soient couverts par une
législation distincte. Bien qu’un règlement sur les travailleurs domestiques ait été
adopté en 2009, il n’a pas étendu le droit à la liberté syndicale à cette catégorie de
travailleurs. Selon la JFITU, il n’existe actuellement aucune réglementation régissant
les travailleurs agricoles. L’organisation plaignante allègue que, en 2008, un syndicat
agricole indépendant a tenté de s’enregistrer, mais que le gouvernement a refusé
d’examiner sa demande. Elle souligne toutefois que si la Fédération générale des
syndicats jordaniens (GFJTU) a créé un syndicat de travailleurs domestiques, malgré
l’absence de cadre juridique, ce dernier n’a pas été créé par des travailleurs
domestiques et il n’est pas non plus dirigé par des travailleurs domestiques. La GFJTU
estime que ce syndicat a été créé pour bloquer la création de tout futur syndicat
indépendant de travailleurs domestiques et rappelle que la loi interdit de constituer
plus d’un syndicat par secteur.
- 519. À cet égard, la JFITU indique que, en vertu de l’article 98 du Code
du travail, les syndicats ne peuvent être organisés que dans les secteurs désignés par
le gouvernement (actuellement fixés à 17) et qu’il ne peut y avoir qu’un seul syndicat
par secteur. La GFJTU elle-même n’a pas été en mesure non plus d’enregistrer des
syndicats en dehors des secteurs reconnus par le gouvernement, ce qui revient à un déni
du droit de négociation collective aux travailleurs employés dans ces secteurs. La
limitation à un seul syndicat par secteur sert également à empêcher les syndicats
indépendants d’organiser les travailleurs dans les secteurs reconnus. Selon cet article:
- A. Le syndicat doit être créé par au moins 50 travailleurs de l’industrie ou de
l’activité économique ou des industries et activités économiques qui sont identiques
ou liées entre elles dans une même production
- B. Les employeurs de toute industrie ou activité économique d’au moins 25
personnes ont le droit de créer un syndicat pour qu’ils puissent défendre leurs
intérêts professionnels liés aux dispositions de la présente loi.
- C. Aucun syndicat ou organisation d’employeurs ne peut être créé(e) en vue de
mener des activités fondées sur des motifs ethniques, religieux ou doctrinaux, et
il/elle ne peut être autorisé(e) à exercer aucune de ces activités après sa
création.
- D. Le ministre peut, par l’intermédiaire du registre des syndicats, classer les
industries et les activités économiques dans lesquelles des syndicats peuvent être
créés conformément aux dispositions des paragraphes A et B du présent article, de
sorte qu’aucune industrie ou activité économique ne puisse avoir plus d’un syndicat,
et en tenant compte des classifications arabes et internationales.
- 520. En outre, selon l’organisation plaignante, le Code du travail
autorise le ministre du Travail à demander la dissolution judiciaire d’un syndicat qui
ne se conforme pas à la loi. À cet égard, la JFITU se réfère à l’article 116 du Code du
travail, en vertu duquel:
- A. Si l’organe administratif d’un syndicat ou d’une organisation d’employeurs
viole les dispositions de la présente loi et des règlements émis en vertu de
celle-ci ou si les statuts de l’un d’entre eux sont en violation de la législation
en vigueur, le ministre doit émettre un avertissement écrit pour mettre fin à la
violation dans un délai n’excédant pas trente jours à compter du jour de
l’avis.
- B. Si la violation persiste, le ministre peut, sur recommandation du greffier des
syndicats, prendre une décision de dissolution de l’organe administratif. La
décision est susceptible de recours devant la Cour administrative suprême dans un
délai de trente jours à compter de la date de sa notification.
- C. Le ministre, en consultation avec la Fédération générale des syndicats et en ce
qui concerne les syndicats, nomme un organe d’administration intérimaire de
l’assemblée générale pour administrer le syndicat et organiser les élections pour un
nouvel organe administratif dans un délai maximum de six mois à compter de la date
de dissolution.
- L’organisation plaignante souligne que l’organe administratif du
syndicat ne devrait pas être dissous en premier lieu mais que, lorsque la direction est
dissoute, il devrait appartenir aux travailleurs de choisir la nouvelle direction et non
au gouvernement. La JFITU se demande également si la Cour administrative suprême (à qui
la compétence pour connaître du recours a été transférée, en lieu et place de la cour
d’appel) garantit le droit à une procédure régulière.
- 521. La JFITU se réfère également à l’article 119 du Code du travail,
selon lequel:
- L’organisation plaignante estime que les dispositions susmentionnées
constituent un sérieux revers pour les travailleurs qui souhaitent constituer des
organisations syndicales de leur choix et s’y affilier, car elles exposent les syndicats
à une dissolution arbitraire et leurs membres risquent d’être emprisonnés et de se voir
infliger des amendes.
- 522. La JFITU souligne que, dans la mesure où l’existence d’un syndicat
en dehors de la structure syndicale officielle constitue une violation, les syndicats
indépendants risquent une dissolution judiciaire. Ainsi, les syndicats sont tenus d’être
affiliés à la GFJTU, qui déduit également les cotisations syndicales des travailleurs
contre leur gré ou à leur insu. Selon l’organisation plaignante, la GFJTU fonctionne
selon un système unifié qu’elle impose à ses syndicats affiliés: il n’y a pas de
véritables élections; les réunions du conseil exécutif n’ont pas lieu; les négociations
collectives sont menées par le conseil exécutif de la GFJTU, tandis que les sections
syndicales, les comités syndicaux et les unités de travail au niveau du lieu de travail,
voire de l’établissement, se voient refuser le droit de participer aux négociations ou
de présenter des revendications.
- 523. Selon l’organisation plaignante, le gouvernement continue à
influencer les politiques et les activités du syndicat officiel – la GFJTU – et de ses
affiliés. En même temps, le gouvernement a refusé à plusieurs reprises de reconnaître
les syndicats indépendants organisés en dehors de cette structure; il ne rencontre pas
les syndicats indépendants, et l’absence de reconnaissance légale limite leur capacité à
collecter les cotisations, à régler les différends et à négocier collectivement.
- 524. En outre, l’organisation plaignante fait remarquer que si, aux
termes de l’article 98(f) du Code du travail, les membres des syndicats doivent avoir
atteint l’âge de18 ans, les personnes ayant atteint l’âge de 16 ans sont autorisées à
travailler dans le pays. L’organisation plaignante estime donc que le Code du travail
devrait être modifié pour permettre aux travailleurs âgés de 16 à 18 ans de devenir
membres de syndicats.
- 525. En outre, l’organisation plaignante invoque une protection
insuffisante contre les actes d’ingérence. Elle se réfère à cet égard à l’article 139 du
Code du travail et indique qu’une sanction de 50 à 100 dinars (62 à 124 euros) n’a pas
un effet suffisamment dissuasif.
- 526. La JFITU allègue également que la loi interdit aux travailleurs du
secteur public d’exercer le droit de négociation collective.
- 527. De plus, la JFITU allègue que, en vertu de l’amendement de 2008 au
Code du travail, l’expression «groupe de travailleurs» a été supprimée de l’article 2 du
Code du travail qui définit le «conflit du travail». Ce dernier, tel que défini après
l’amendement, n’est plus un conflit «entre un groupe de travailleurs ou le syndicat et
l’employeur ou l’organisation d’employeurs...», mais un conflit «entre un syndicat et
l’employeur ou l’organisation d’employeurs...».
- 528. L’organisation plaignante fait référence à plusieurs violations des
droits en matière de liberté syndicale dans la pratique. Elle allègue notamment que,
dans une note de service officielle (dont l’organisation plaignante transmet une copie
avec la plainte) envoyée à tous les départements et organismes du gouvernement, le
Premier ministre leur a conseillé de ne pas reconnaître les syndicats indépendants et
que le ministère du Travail a recommandé à son personnel de n’accepter aucune lettre ou
de ne répondre à aucune correspondance émanant de syndicats indépendants. Les demandes
d’enregistrement de syndicats auprès du ministère du Travail ont été soit rejetées, soit
ignorées.
- 529. Selon l’organisation plaignante, le président de la Commission
parlementaire du travail, qui était en même temps président de Syndicat général des
travailleurs miniers et vice-président de la GFJTU, a exigé dans un discours au
Parlement qu’il soit mis fin aux syndicats indépendants. La JFITU allègue que la
direction de la GFJTU attaque constamment les syndicats indépendants et les décrit comme
des mercenaires et exige qu’ils soient éliminés; elle allègue également que la direction
de la GFJTU a intensifié une campagne médiatique contre les syndicats indépendants par
des déclarations, des communiqués de presse, des interviews télévisées, des séminaires,
des conférences et des ateliers.
- 530. La JFITU allègue en outre que des abus ont été commis à l’encontre
des travailleurs de la Jordan Water Company «Miyahuna». Elle allègue notamment que,
lorsque la direction de la compagnie a appris que les travailleurs avaient l’intention
de constituer un syndicat indépendant, elle a publié une annonce officielle, en
référence à la lettre du ministre du Travail, avertissant les travailleurs que la
compagnie ne coopérerait pas avec aucun syndicat indépendant et qu’elle ne traite
qu’avec le Syndicat général des travailleurs des industries alimentaires, seul syndicat
reconnu. Les travailleurs ont reçu l’instruction de n’adhérer à aucun syndicat
indépendant. L’organisation plaignante allègue que, après la création d’un syndicat
indépendant de travailleurs au sein de l’entreprise, la direction de l’entreprise a
adopté diverses mesures abusives à l’encontre des militants syndicaux. La JFITU fait
notamment référence au transfert arbitraire du président du syndicat indépendant,
Mahmoud Shihada Al-Khateeb; au licenciement d’un travailleur, M. Khaled Hasan Ali; et
aux menaces proférées à l’encontre des travailleurs de l’entreprise souhaitant adhérer
au syndicat indépendant.
- 531. La JFITU allègue en outre que ceux qui tentent de faire fonctionner
un syndicat indépendant sont soumis à de fortes pressions et renvoie à cet égard aux
exemples suivants:
- • M. Mohamed Al Senaid, ancien président du Syndicat indépendant des travailleurs
agricoles, a été arrêté en raison de son activité syndicale.
- • M. Amin Ghanim, président du Syndicat indépendant des travailleurs artistiques,
a été détenu pendant plusieurs jours, et lui-même ainsi que d’autres membres du
syndicat ont été interrogés à la suite d’une plainte du président du Syndicat des
artistes (une association professionnelle).
- • M. Tayel Al Khamayseh, ancien président du Syndicat indépendant des travailleurs
des mines de phosphate, a été suspendu de son poste pour avoir formulé des
revendications syndicales.
- • Le gouvernement a fait pression sur le président et le secrétaire du Syndicat
indépendant des industries chimiques en leur demandant de démissionner du syndicat,
sous peine d’être licenciés. Cette intervention fait suite à des négociations menées
par les intéressés ayant abouti à la signature d’une convention collective. Ils ont
préféré démissionner plutôt que d’être licenciés.
- • M. Khalil Butros Wahhab, vice-président du Syndicat indépendant des travailleurs
de l’aviation civile, a été contraint de remettre sa démission.
- • M. Jalal El Harasees, président du Syndicat indépendant des travailleurs de
l’électricité de Jordanie, a pris la défense d’un collègue membre du syndicat
indépendant. Sa promotion annuelle a été reportée et son salaire a été retenu.
- • Le président du Syndicat indépendant des industries pharmaceutiques et les
membres de son comité exécutif ont été contraints à signer des engagements à ne pas
participer à des activités syndicales.
- • Le Syndicat indépendant des travailleurs de l’électricité a organisé une grève
de dix sept jours en 2012. Cependant, la GFJTU a négocié un accord pour mettre fin à
la grève sans que les revendications des travailleurs n’aient été prises en compte.
En 2013, le Syndicat indépendant des travailleurs de l’électricité a présenté une
nouvelle fois la liste de revendications qu’il avait présentée en 2012 et qui n’a
pas été prise en considération. Le syndicat a organisé une autre grève pendant cinq
jours jusqu’à ce qu’un protocole d’accord soit conclu entre le ministère du Travail,
la direction de l’entreprise et la Commission parlementaire du travail. Le syndicat
indépendant n’a pas été autorisé à signer le protocole. La condition de la signature
du protocole d’accord était que les revendications soient présentées en 2014 (deux
ans après l’accord de 2012). En 2014, le syndicat indépendant a présenté une
nouvelle fois ses revendications, qui ont été une fois de plus ignorées. La GFJTU a
été priée de limiter le nombre de ses revendications, à la suite de quoi un accord a
pu être signé. La compagnie d’électricité a déduit les salaires des grévistes pour
leur participation à une grève de cinq jours. Le syndicat s’est pourvu devant le
tribunal et a obtenu gain de cause, mais la compagnie a fait appel. L’affaire est
toujours en cours.
- • Les forces de sécurité ont empêché la réattribution des postes administratifs au
sein du Syndicat général des travailleurs de l’électricité/section syndicale
d’Amman.
532. L’organisation plaignante allègue également une ingérence dans des
réunions publiques. À cet égard, elle fait référence à une célébration qui a été
planifiée par un comité de femmes de la fédération syndicale indépendante à l’occasion
de la Journée de la femme 2017 à l’Université de Jordanie. La célébration a été
annulée deux jours seulement avant sa tenue. Le comité des femmes a décidé de déplacer
l’événement au Jérusalem International Hotel en lieu et place mais, une fois de plus,
il a été annulé par les responsables de la sécurité deux heures seulement avant le
début prévu, et ce alors que les autorisations avaient été accordées par deux
fois.533. 533. La JFITU fait également référence à une campagne de collecte
de sang qu’elle prévoyait de lancer conjointement avec la municipalité d’Amman pour
fournir 500 unités de sang à la banque du sang, qui a été annulée quelques heures
seulement avant l’heure du début malgré le fait que toutes les autorisations avaient
été obtenues à l’avance. Une autre manifestation, une cérémonie de plantation
d’arbres, que l’organisation plaignante prévoyait de lancer conjointement avec la
municipalité d’Amman à l’occasion de la Journée de l’arbre, a été annulée alors que
toutes les autorisations avaient été accordées.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 534. Dans ses communications des 15 janvier, 14 juillet, 28 août et
11 décembre 2019, et des 13 janvier et 20 février 2020, le gouvernement fournit les
informations suivantes.
- 535. Le gouvernement rappelle que les articles 16 et 23(2)f) de la
Constitution consacrent la liberté de créer des syndicats et de former des associations
et laissent aux lois et règlements pertinents le soin de déterminer la manière dont ils
sont créés et fonctionnent. Le Code du travail décrit la procédure d’enregistrement des
syndicats et des associations d’employeurs. Selon le gouvernement, les dispositions du
Code du travail s’appliquent aux travailleurs sans distinction et indépendamment du
sexe, de la nationalité, de la race, de la couleur ou de la religion.
- 536. En ce qui concerne les droits des travailleurs migrants, le
gouvernement indique que rien dans le Code du travail ne les empêche de voter au sein de
leurs syndicats respectifs. En outre, le Code permet à tout syndicat d’établir ses
propres statuts précisant son fonctionnement, ses procédures d’élection et de vote, sans
intervention du ministère.
- 537. Selon le gouvernement, les travailleurs agricoles sont soumis au
Code du travail et il n’y a pas de loi spéciale les concernant. Le gouvernement fait
savoir qu’un groupe de travailleurs du secteur agricole a présenté une demande de
création du Syndicat des travailleurs agricoles et que cette question sera portée devant
la commission tripartite pour examen et décision.
- 538. En ce qui concerne la situation des travailleurs domestiques, le
gouvernement indique que cette catégorie de travailleurs est soumise aux dispositions du
Code du travail. Toutefois, en raison de l’importance de ce secteur (il y a
48 000 travailleurs domestiques dans le royaume) et de la nature du travail, le
ministère a publié des règlements et des instructions spéciales pour ce secteur, qui
réglementent le processus de recrutement et accordent à cette catégorie de travailleurs
des privilèges supérieurs à ceux prévus par le Code du travail. Le gouvernement souligne
également que rien dans la loi n’empêche les travailleurs domestiques d’adhérer au
syndicat existant et enregistré – le Syndicat général des travailleurs des services
publics et des professions libérales.
- 539. En ce qui concerne l’article 98 du Code du travail, le gouvernement
indique que le ministre peut prendre, par l’intermédiaire du greffier des associations,
une décision visant à classer les industries et les activités économiques dans
différentes catégories afin d’obtenir plus de souplesse pour augmenter le nombre de
syndicats et d’ouvrir la porte à la création de nouveaux syndicats, y compris dans des
secteurs non représentés auparavant ou pour reclasser de grands secteurs rattachés à un
seul syndicat. Selon le gouvernement, la dernière modification de cette disposition
porte sur l’élargissement de la décision de classer les professions et a consisté à
transférer, de la commission tripartite au ministre, les pouvoirs de classification des
professions.
- 540. Le gouvernement indique en outre que les fonctionnaires sont exclus
des dispositions du code et sont soumis aux dispositions du système administratif de la
fonction publique.
- 541. En ce qui concerne la modification du Code du travail tendant à
supprimer l’expression «groupe de travailleurs», le gouvernement explique que, dans les
conflits du travail, la plupart des pays traitent avec les syndicats plutôt qu’avec des
groupes de travailleurs pour prévenir le chaos et organiser les activités syndicales. Le
gouvernement souligne que, plutôt que de permettre à n’importe quel travailleur de
négocier, il faut renforcer le rôle des syndicats dans la représentation des
travailleurs et la défense de leurs droits.
- 542. En ce qui concerne l’article 116 du Code du travail, le gouvernement
explique que les récents amendements permettent au ministre de dissoudre l’organe
administratif du syndicat, plutôt que le syndicat lui-même, lorsque ce dernier viole les
lois et règlements en vigueur. La décision finale est prise par le tribunal.
- 543. Le gouvernement souligne également que, conformément à la
législation nationale et à la convention pertinente ratifiée, l’âge minimum d’accès à
l’emploi en Jordanie est fixé à 18 ans.
- 544. Le gouvernement indique qu’il a prochainement l’intention de rouvrir
certains éléments de la législation et de mener des consultations avec les partenaires
sociaux en vue de préparer des amendements pertinents.
- 545. Le gouvernement indique en outre que les syndicats indépendants
mentionnés dans la plainte n’ont pas suivi les procédures d’établissement et de
fonctionnement décrites dans le Code du travail. Les syndicats indépendants ne sauraient
être constitués sans passage par la commission tripartite. Les membres des syndicats
indépendants peuvent adhérer aux syndicats existants dans la catégorie professionnelle
en cours. À cet égard, le gouvernement souligne qu’il existe un syndicat enregistré, le
Syndicat général des travailleurs de l’électricité, auquel tous les travailleurs des
secteurs de l’électricité ont le droit d’adhérer et auquel la plupart de ceux qui
cherchent à créer un syndicat indépendant sont membres à part entière. Il existe
également un syndicat enregistré, le Syndicat général des travailleurs des mines et des
métaux, auquel tous les travailleurs du secteur des phosphates ont le droit de
s’affilier. C’est pourquoi, quand un appel contre la décision de refuser d’enregistrer
des syndicats indépendants dans les secteurs de l’électricité et des phosphates a été
introduit devant le tribunal, ce dernier a confirmé la décision au motif qu’il n’y avait
aucune justification légale à la création d’un nouveau syndicat. Le gouvernement indique
que, en conséquence, il a émis une ordonnance générale pour prendre en charge les
syndicats légalement enregistrés et pour établir la distinction entre ceux qui sont
légalement enregistrés et ceux qui ne le sont pas.
- 546. En ce qui concerne les allégations de discrimination entre les
syndicats et d’intimidation des dirigeants de syndicats indépendants, le gouvernement
souligne que la Jordanie est un État de droit et que les relations entre les syndicats
et le ministère du Travail sont régies par la loi. Il indique en outre que ces
allégations sont fausses.
- 547. En ce qui concerne la détention alléguée des dirigeants de deux
syndicats indépendants, le gouvernement indique que cette question ne relève pas de la
compétence du ministère du Travail et qu’il ne dispose d’aucune information à ce
sujet.
- 548. En ce qui concerne l’allégation d’ingérence dans les activités d’un
syndicat du secteur de l’électricité à Amman, le gouvernement indique qu’il n’a pas
connaissance de l’existence de cette fédération, et souligne qu’il existe un syndicat
légitime dans le secteur, connu sous le nom de Syndicat général des travailleurs de
l’électricité.
- 549. En ce qui concerne l’allégation relative à l’annulation par les
autorités de réunions publiques, le gouvernement indique que le ministère du Travail n’a
connaissance d’aucune réunion et ne s’est adressé à aucune autorité à cet égard.
- 550. Enfin, en ce qui concerne les pratiques alléguées visant à empêcher
la création d’un syndicat de travailleurs à Miyahuna, le gouvernement indique qu’aucune
demande de création de syndicat n’a été soumise au ministère; il existe toutefois un
syndicat enregistré conformément aux dispositions du Code du travail pour représenter
les travailleurs de l’entreprise, à savoir le Syndicat général des travailleurs des
industries alimentaires.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 551. Le comité note que l’organisation plaignante, dans le présent cas la
JFITU, allègue que le Code du travail restreint le droit des travailleurs de s’organiser
librement et de négocier collectivement. Elle allègue en outre des actes de
discrimination antisyndicale, d’ingérence et de représailles du gouvernement contre les
syndicats indépendants dans la pratique.
- 552. Le comité note que, selon la JFITU, si les travailleurs migrants
peuvent adhérer à des syndicats, le Code du travail restreint leur droit de s’organiser
et d’exercer des fonctions syndicales. Par conséquent, leur droit de négociation
collective est également restreint. Selon l’organisation plaignante, il existe une
incertitude sur la question de savoir si les travailleurs migrants peuvent voter lors
des élections des conseils exécutifs des syndicats. Le comité prend note de l’indication
du gouvernement selon laquelle la Constitution consacre la liberté de créer des
syndicats et de former des associations et laisse aux lois et règlements pertinents le
soin de déterminer la manière dont les syndicats sont créés et fonctionnent. À cet
égard, le Code du travail décrit la procédure d’enregistrement des syndicats et des
associations d’employeurs. Selon le gouvernement, les dispositions du Code du travail
s’appliquent aux travailleurs sans distinction aucune et indépendamment de leur
nationalité. En outre, le Code du travail n’empêche pas les travailleurs migrants de
voter au sein de leurs syndicats respectifs.
- 553. Le comité note que le texte de l’article 98(e) du Code du travail,
tel que modifié en 2010, prévoit que la première condition requise pour fonder une
organisation de travailleurs ou d’employeurs est d’être jordanien. Le comité rappelle
que le droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des
organisations de leur choix et de s’y affilier, sans autorisation préalable, implique
que toutes les personnes résidant dans le pays jouissent des droits syndicaux, y compris
du droit de vote, sans aucune distinction fondée sur la nationalité. [Voir Compilation
des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 322.] Le
comité prie le gouvernement de modifier l’article 98(e) du Code du travail, en
consultation avec les partenaires sociaux, afin de supprimer la restriction imposée aux
droits d’organisation des travailleurs migrants et de le tenir informé de toutes les
mesures prises à cet égard.
- 554. En ce qui concerne l’interdiction alléguée d’exercer une fonction
imposée aux travailleurs migrants, le comité note l’absence d’observations du
gouvernement à cet égard et rappelle qu’il y aurait lieu de conférer une plus grande
souplesse aux dispositions législatives afin de permettre aux organisations d’élire
librement et sans entraves leurs dirigeants et aux travailleurs étrangers d’accéder aux
fonctions syndicales, du moins après une période raisonnable de résidence dans le pays
d’accueil. [Voir Compilation, paragr. 623.] Le comité prie le gouvernement de prendre
les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, pour faire en
sorte que les travailleurs étrangers puissent exercer leurs droits syndicaux, y compris
le droit d’être élu à des fonctions syndicales. Il prie le gouvernement de le tenir
informé des mesures prises à cet égard.
- 555. Le comité prend note en outre de l’allégation selon laquelle les
travailleurs domestiques et agricoles ne jouissent pas du droit de s’organiser.
L’organisation plaignante allègue en particulier qu’une demande d’enregistrement déposée
par un syndicat indépendant de travailleurs agricoles a été rejetée et que la GFJTU a
créé un syndicat de travailleurs domestiques, malgré l’absence de cadre juridique, dans
le but de bloquer la création de tout futur syndicat indépendant de travailleurs
domestiques. L’organisation plaignante souligne que le syndicat des travailleurs
domestiques de la GFJTU n’a pas été créé par des travailleurs domestiques, et qu’il
n’est pas dirigé par de tels travailleurs. Il note que, selon le gouvernement, les
travailleurs agricoles sont soumis au Code du travail et qu’il n’existe pas de loi
spéciale les concernant. Le gouvernement fait savoir qu’un groupe de travailleurs du
secteur agricole a présenté une demande de création du syndicat des travailleurs
agricoles et que cette question sera portée devant la commission tripartite pour examen
et décision. Quant à la situation des travailleurs domestiques, le gouvernement indique
que cette catégorie de travailleurs est soumise aux dispositions du Code du travail
ainsi qu’à des règlements et instructions spéciaux, qui réglementent le processus de
recrutement et accordent à cette catégorie de travailleurs des privilèges supérieurs à
ceux prévus par le Code du travail. Le gouvernement souligne également que rien dans la
loi n’empêche les travailleurs domestiques d’adhérer au syndicat existant et enregistré
– le Syndicat général des travailleurs des services publics et des professions
libérales.
- 556. Le comité note que, d’après les informations fournies par le
gouvernement à la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations (CEACR) dans le cadre de l’application de la convention no 98, malgré la
suppression de l’exclusion expresse des travailleurs domestiques et des travailleurs
agricoles du champ d’application du Code du travail, la législation et la réglementation
ne garantissent toujours pas clairement que ces travailleurs jouissent des droits
énoncés dans la convention. Le comité prie le gouvernement de fournir à la CEACR, dont
l’attention est attirée sur les aspects législatifs du présent cas, des informations sur
les mesures prises pour que les travailleurs agricoles et les travailleurs domestiques
puissent adhérer à l’organisation de leur choix.
- 557. Le comité estime que les restrictions alléguées ci-dessus aux droits
d’organisation des travailleurs migrants, domestiques et agricoles doivent être
considérées dans le contexte plus large allégué par l’organisation plaignante. Selon la
JFITU, en vertu de l’article 98 du Code du travail, les syndicats ne peuvent être
organisés que dans les secteurs désignés par le gouvernement et il ne peut y avoir qu’un
seul syndicat par secteur. Il y a actuellement 17 secteurs reconnus. Le comité note que,
selon la JFITU, non seulement la GFJTU n’a pas pu enregistrer de syndicats en dehors de
ces secteurs, mais que cette limitation à un syndicat par secteur sert également à
exclure les syndicats indépendants de toute initiative visant à organiser les
travailleurs dans les secteurs reconnus. Le comité note que la JFITU allègue un certain
nombre de cas où des syndicats indépendants n’ont pas pu être enregistrés parce que,
comme l’a confirmé le gouvernement, une structure GFJTU existait dans le secteur
concerné (par exemple, dans les secteurs de l’électricité, de l’alimentation et des
industries minières et métallurgiques). Le comité croit comprendre que, auparavant, la
Commission tripartite du travail était compétente pour reconnaître les professions et
les industries dans lesquelles un syndicat pouvait être créé et que, en vertu du dernier
amendement du Code du travail, ce pouvoir a été confié au ministre du Travail. Le
gouvernement explique que cela est justifié par l’intention de donner une plus grande
flexibilité, d’augmenter le nombre de syndicats et d’ouvrir la porte à la création de
nouveaux syndicats, y compris dans les secteurs qui ne sont pas représentés, ou de
reclasser de grands secteurs représentés par un seul syndicat.
- 558. Le comité note avec préoccupation que le système actuel risque
d’exclure des groupes entiers de travailleurs incapables d’exercer leur droit
d’organisation et de bénéficier des droits de négociation collective. Il rappelle que
dans le cas no 2977 concernant la Jordanie, il avait instamment prié le gouvernement de
prendre sans délai les mesures nécessaires pour faire en sorte que la législation du
travail et toutes les décisions d’application pertinentes soient revues et modifiées
afin de garantir aux travailleurs le libre exercice de leur droit de constituer des
organisations de leur choix et de s’y affilier. [Voir 367e rapport (mars 2013),
paragr. 860.] Le comité prie donc le gouvernement de prendre, en consultation avec les
partenaires sociaux, les mesures nécessaires, y compris d’ordre législatif, afin de
garantir que tous les travailleurs de tous les secteurs du pays, à la seule exception
possible des membres des forces armées et de la police, jouissent du droit de constituer
des organisations de leur choix et de s’y affilier. Le comité prie le gouvernement de le
tenir informé des mesures prises ou envisagées à cet égard.
- 559. Le comité se déclare en outre préoccupé par le fait qu’il ne peut
être créé plus d’un syndicat par branche d’activité ou par secteur. Il note également
avec préoccupation que la GFJTU est expressément mentionnée dans le Code du travail
comme une organisation que le ministre du Travail doit consulter en ce qui concerne la
nomination d’un organe administratif syndical intérimaire (article 116), ce qui
semblerait consolider davantage un monopole syndical dans le pays. Le comité rappelle
que l’existence d’une organisation dans une profession déterminée ne doit pas constituer
un obstacle à la création d’une autre organisation, si les travailleurs le souhaitent.
Il rappelle en outre que l’unité du mouvement syndical ne doit pas être imposée par une
intervention de l’État par voie législative, car celle-ci irait à l’encontre des
principes de la liberté syndicale. [Voir Compilation, paragr. 477 et 487.] Le comité
prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les
partenaires sociaux, pour modifier le Code du travail de manière à ce que plus d’une
organisation syndicale par secteur ou branche d’activité puisse être créée si les
travailleurs le souhaitent. Il prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution
de la situation à cet égard.
- 560. Le comité prend également note de l’allégation selon laquelle la
législation interdit aux travailleurs du secteur public de s’organiser et de négocier
collectivement. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les
fonctionnaires sont exclus des dispositions du Code du travail et sont soumis à celles
du système administratif de la fonction publique. Rappelant que les fonctionnaires
publics doivent bénéficier, comme tous les travailleurs, sans distinction d’aucune
sorte, du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, sans
autorisation préalable, afin de promouvoir et de défendre leurs intérêts [voir
Compilation, paragr. 336], le comité prie le gouvernement de fournir des informations, y
compris des dispositions législatives spécifiques, concernant le droit d’organisation et
de négociation collective dans le secteur public, y compris dans la fonction
publique.
- 561. Le comité note que l’organisation plaignante allègue en outre que,
en vertu de l’article 98(f) du Code du travail, les travailleurs doivent avoir atteint
l’âge de 18 ans pour pouvoir être membres d’un syndicat, tandis que les personnes âgées
de 16 ans sont admissibles à l’emploi. Le comité prend note de l’indication du
gouvernement selon laquelle l’âge d’admission à l’emploi est fixé à 18 ans. Le comité
observe toutefois que l’article 73 du Code du travail interdit l’emploi de mineurs de
moins de 16 ans. Le comité considère que les mineurs ayant atteint l’âge d’accès à
l’emploi devraient pouvoir constituer ou adhérer aux organisations de leur choix. En
conséquence, il prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation
avec les partenaires sociaux, pour modifier l’article 98(f) afin de garantir que les
mineurs ayant atteint l’âge minimum d’accès à l’emploi, qu’ils soient travailleurs ou
apprentis, sont pleinement protégés dans l’exercice de leurs droits en matière de
liberté syndicale. Il prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures
envisagées ou adoptées à cet égard.
- 562. Le comité note que l’article 116 du Code du travail confère au
ministre le pouvoir de dissoudre l’organe administratif d’un syndicat (ou d’une
organisation d’employeurs) si celui-ci ou celle-ci enfreint les dispositions du code,
les règlements pris en application de ce dernier ou si les statuts de l’organisation
sont en violation de la législation en vigueur. La décision du ministre peut faire
l’objet d’un recours devant la Cour administrative suprême. En outre, en vertu de la
même disposition, en consultation avec la GFJTU, le ministre nomme un organe
administratif intérimaire issu de l’assemblée générale pour administrer le syndicat et
pour organiser l’élection d’un nouvel organe administratif. Le comité note en outre que
l’article 119 du Code du travail prévoit une peine d’emprisonnement d’une durée maximale
de trois mois et/ou une amende pouvant atteindre 1 000 dinars (1 410 dollars des
États-Unis (dollars É.-U.)) pour toute personne qui continue à agir au nom d’une
organisation ou d’un conseil administratif dissous.
- 563. Le comité rappelle que la révocation par le gouvernement de certains
dirigeants syndicaux constitue une grave atteinte au libre exercice des droits
syndicaux. [Voir Compilation, paragr. 654.] Il considère en outre que le pouvoir du
ministre de révoquer un organe administratif librement élu d’une organisation sur la
base de critères aussi larges que «toute violation de la législation» constitue une
ingérence grave dans les activités syndicales, y compris le droit des syndicats d’élire
leurs propres représentants et d’organiser leur gestion, même s’il peut faire l’objet
d’un recours devant le tribunal administratif, car ce dernier fonde ses décisions sur la
législation en vigueur énonçant les mêmes critères larges. Le comité considère en outre
que la désignation par les autorités publiques de membres des comités exécutifs des
syndicats constitue une intervention directe dans les affaires intérieures des
syndicats. Le comité prie donc le gouvernement de modifier l’article 116 du Code du
travail en consultation avec les partenaires sociaux dans cette perspective et de le
tenir informé des mesures prises à cet égard.
- 564. Le comité note que l’organisation plaignante considère que la peine
de 50 à 100 dinars (70 à 140 dollars É.-U.) d’amende prévue à l’article 139 du Code du
travail n’est pas suffisamment sévère pour sanctionner les actes d’ingérence. Le comité
rappelle que la législation doit établir des sanctions suffisamment dissuasives contre
les actes d’ingérence des employeurs à l’égard des travailleurs et de leurs
organisations. Le comité prie le gouvernement de revoir les amendes avec les partenaires
sociaux afin de déterminer ce qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive et
de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article en conséquence. Il prie le
gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
- 565. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle
il a prochainement l’intention de rouvrir des éléments de la législation et de mener des
consultations avec les partenaires sociaux en vue de préparer les amendements
pertinents. Le comité veut croire que des mesures seront prises dans un avenir proche
pour modifier la loi et prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard. Il attire
en outre l’attention de la CEACR sur les aspects législatifs de ce cas.
- 566. Le comité prend note des violations alléguées des droits syndicaux
dans la pratique. La JFITU allègue en particulier que les personnes qui tentent de faire
fonctionner des syndicats indépendants subissent des pressions et se réfère à cet égard
à la détention de M. Muhamed Al Senaid, ancien président du Syndicat indépendant des
travailleurs agricoles, et de M. Amin Ghanim, président du Syndicat indépendant des
travailleurs de l’art. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon
laquelle cette question ne relève pas de la compétence du ministère du Travail, qui ne
dispose d’aucune information à cet égard. Le comité regrette qu’aucune information n’ait
été fournie par le gouvernement sur ces graves allégations. Il rappelle que la détention
de dirigeants syndicaux et de syndicalistes en raison de leur appartenance ou de leurs
activités syndicales est contraire aux principes de la liberté syndicale. [Voir
Compilation, paragr. 120.] Il rappelle en outre que la responsabilité d’appliquer les
principes de la liberté syndicale incombe en dernier ressort au gouvernement. [Voir
Compilation, paragr .46.] Le comité considère que, si la procédure met les gouvernements
à l’abri d’accusations non fondées, les gouvernements de leur côté reconnaîtront qu’il
est important de fournir des réponses complètes concernant les allégations formulées à
leur encontre, qui devraient inclure des informations obtenues auprès des autorités
nationales compétentes. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir sans plus
tarder des observations détaillées sur ces deux cas allégués de détention.
- 567. Le comité note en outre les cas suivants d’ingérence et de
discrimination dont auraient été victimes des dirigeants et des militants de syndicats
indépendants: licenciement (M. Khaled Hasan Ali, travailleur à la compagnie des eaux),
suspension (M. Tayel Al Khamayseh, ancien président du Syndicat indépendant des
travailleurs des mines de phosphate), pressions exercées pour obtenir la démission
(président et secrétaire du Syndicat indépendant des industries chimiques et M. Khalil
Butros Wahhab, vice-président du Syndicat indépendant des travailleurs de l’aviation
civile), report de promotion et retenue sur salaire (M. Jalal El Harasees, président du
Syndicat indépendant des travailleurs jordaniens de l’électricité), transfert
(M. Mahmoud Shihada Al-Khateeb, président du Syndicat indépendant des travailleurs de la
compagnie des eaux de Jordanie Miyahuna), enfin, menaces contre des travailleurs de la
compagnie souhaitant adhérer au syndicat indépendant et pressions exercées pour obtenir
la signature d’engagements à ne pas prendre part à des activités syndicales (président
du Syndicat indépendant des industries pharmaceutiques et membres de son conseil
exécutif, ainsi qu’à la compagnie des eaux). Le comité prend note des indications du
gouvernement selon lesquelles ces allégations sont fausses. Le comité prie le
gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute enquête menée sur les
allégations susmentionnées.
- 568. Le comité prie le gouvernement et l’organisation plaignante de
fournir des informations sur le résultat de l’appel dans le cas impliquant le Syndicat
indépendant des travailleurs de l’électricité en lien avec le refus allégué de
l’employeur de négocier collectivement.
- 569. En ce qui concerne l’allégation relative à l’annulation, par les
autorités, de réunions publiques organisées par des syndicats indépendants, le comité
prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère du Travail n’a
pas connaissance de telles réunions et ne s’est adressé à aucune autorité à cet égard.
Le comité prie le gouvernement d’examiner ces allégations avec les autorités compétentes
afin de donner des instructions appropriées au cas où elles se seraient ingérées dans
l’exercice du droit de tenir des réunions et de la liberté de réunion des syndicats
concernés et de tenir le comité informé des mesures prises à cet égard.
- 570. Le comité invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance
technique du Bureau pour ce qui concerne les questions soulevées dans le présent
cas.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 571. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité prie le gouvernement de modifier l’article 98(e) du Code du travail, en
consultation avec les partenaires sociaux, afin de supprimer la restriction imposée
aux droits d’organisation des travailleurs migrants et de le tenir informé de toutes
les mesures prises à cet égard.
- b) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation
avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les travailleurs étrangers
puissent exercer leurs droits syndicaux, y compris le droit d’être élu à des
fonctions syndicales. Il prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises
à cet égard.
- c) Le comité prie donc le gouvernement de prendre, en consultation avec les
partenaires sociaux, les mesures nécessaires, y compris d’ordre législatif, afin de
garantir que tous les travailleurs de tous les secteurs du pays, à la seule
exception possible des membres des forces armées et de la police, jouissent du droit
de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. Le comité prie le
gouvernement de le tenir informé des mesures prises ou envisagées à cet égard.
- d) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation
avec les partenaires sociaux, pour modifier le Code du travail de manière à ce que
plus d’une organisation syndicale par secteur ou branche d’activité puisse être
créée si les travailleurs le souhaitent. Il prie le gouvernement de le tenir informé
de l’évolution de la situation à cet égard.
- e) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations, y compris des
dispositions législatives spécifiques, concernant le droit d’organisation et de
négociation collective dans le secteur public, y compris dans la fonction
publique.
- f) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation
avec les partenaires sociaux, pour modifier l’article 98(f) du Code du travail afin
de garantir que les mineurs ayant atteint l’âge minimum d’accès à l’emploi, qu’ils
soient travailleurs ou apprentis, sont pleinement protégés dans l’exercice de leurs
droits en matière de liberté syndicale. Il prie le gouvernement de fournir des
informations sur les mesures envisagées ou adoptées à cet égard.
- g) Le comité prie le gouvernement de modifier l’article 116 du Code du travail en
consultation avec les partenaires sociaux et de le tenir informé des mesures prises
à cet égard.
- h) Le comité prie le gouvernement de revoir les amendes avec les partenaires sociaux
afin de déterminer ce qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive et de
prendre les mesures nécessaires pour modifier la disposition législative pertinente
en conséquence. Il prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet
égard.
- i) Le comité veut croire que des mesures seront prises dans un avenir proche pour
modifier la législation et prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard. Il
attire en outre l’attention de la CEACR sur les aspects législatifs de ce cas.
- j) Le comité prie instamment le gouvernement de fournir sans plus tarder des
observations détaillées sur les deux cas de détention allégués.
- k) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute
enquête menée sur les allégations d’actes de discrimination à l’encontre de
syndicalistes.
- l) Le comité prie le gouvernement et l’organisation plaignante de fournir des
informations sur le résultat de l’appel dans le cas impliquant le Syndicat
indépendant des travailleurs de l’électricité en lien avec le refus allégué de
l’employeur de négocier collectivement.
- m) Le comité prie le gouvernement d’examiner les allégations relatives à
l’annulation, par les autorités, de réunions publiques organisées par les syndicats
indépendants avec les autorités compétentes, afin de donner des instructions
appropriées au cas où elles se seraient ingérées dans l’exercice du droit de tenir
des réunions et de la liberté de réunion des syndicats concernés et de tenir le
comité informé des mesures prises à cet égard.
- n) Le comité invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du
Bureau pour ce qui concerne les questions soulevées dans le présent cas.