Allégations: L’organisation plaignante dénonce des violations des droits
syndicaux de la part du gouvernement, en particulier l’émission d’une décision unilatérale
de confiscation de locaux et de biens syndicaux, en l’absence de mandat
judiciaire
- 54. Le comité a examiné ce cas (soumis en mars 2017) pour la dernière
fois à sa réunion de juin 2022 et, à cette occasion, il a présenté un rapport
intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 399e rapport, approuvé par le Conseil
d’administration à sa 345e session (juin 2022), paragr. 43 à 59 .]
- 55. À sa réunion de mars 2023 [voir 401e rapport, paragr. 6], le comité a
lancé un appel pressant aux autorités de facto indiquant que, conformément à la règle de
procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil
d’administration (1971), il pourrait présenter un rapport sur le fond de l’affaire à sa
prochaine réunion, même si les informations ou observations demandées n’étaient pas
reçues à temps. À ce jour, le gouvernement n’a envoyé aucune information.
- 56. L’Afghanistan n’a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le
droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 57. À sa réunion de juin 2022, le comité a formulé les recommandations
suivantes [voir 399e rapport, paragr. 59]:
- a) Le comité exhorte le gouvernement à
faire en sorte que les problèmes à l’origine de cette plainte, en particulier la
confiscation des biens du syndicat, soient traités sans délai. Le comité s’attend à
une décision rapide des tribunaux concernant le recours en justice du Syndicat
national des travailleurs et des employés d’Afghanistan (NUAWE) à cet égard et prie
le gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’état d’avancement de la
procédure judiciaire et d’indiquer les mesures prises pour donner effet à leur
décision finale une fois qu’elle sera rendue.
- b) Le comité prie instamment
le gouvernement de diligenter une enquête sur les allégations formulées par la
Confédération syndicale internationale (CSI) dans sa communication d’avril 2018 à
propos des tentatives de prise de contrôle et d’occupation des bureaux du NUAWE par
la police et les forces armées, afin d’établir les faits et d’identifier les
responsables pour faire en sorte que de tels actes ne se reproduisent pas. Il prie
en outre instamment le gouvernement de communiquer des observations détaillées sur
les allégations concernant le gel des comptes bancaires du syndicat sans
autorisation judiciaire, le non-renouvellement de son enregistrement rendant ses
activités illégales, ainsi que les allégations graves contenues dans la
communication de mai 2022 de la CSI concernant les menaces à l’encontre de
syndicalistes les contraignant à l’exil, et la confiscation, en mars 2022, des biens
et des documents du NUAWE, y compris dans les provinces.
- c) Le comité prie
instamment le gouvernement de préciser si le décret de 2016 conduit effectivement à
l’intervention des autorités dans les affaires syndicales ou à l’exercice de
contrôle sur ces activités et si, en particulier, l’examen conduit pourrait
entraîner la dissolution ou la suspension d’un syndicat par voie administrative et,
si tel est le cas, invite le gouvernement à modifier le décret de 2016 afin
d’assurer que cela n’est pas possible.
- d) Compte tenu de la situation
actuelle dans le pays, le comité prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises
pour veiller à ce que toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs
puissent exercer leurs activités syndicales légitimes dans un climat exempt de
violence, de pressions ou menaces de toutes sortes.
- e) Compte tenu également
des circonstances prévalant dans le pays, le comité rappelle que l’assistance
technique du Bureau est disponible pour mettre en œuvre les recommandations a)
à d).
- f) Le comité attire l’attention du Conseil d’administration sur le
caractère grave et urgent du présent cas.
B. Conclusions du comité
B. Conclusions du comité- 58. Le comité regrette que les autorités de facto à ce jour n’aient
toujours pas fourni de réponse à ses recommandations, alors qu’elles ont été invitées à
le faire à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant.
- 59. Dans ces conditions, et conformément à la règle de procédure
applicable [voir 127e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d’administration à sa
184e session], le comité se voit dans l’obligation de présenter un nouveau rapport sur
le fond de l’affaire, sans pouvoir tenir compte des informations qu’il espérait
recevoir.
- 60. Le comité rappelle aux autorités de facto que l’ensemble de la
procédure instituée par l’Organisation internationale du Travail pour l’examen
d’allégations en violation de la liberté syndicale vise à assurer le respect des droits
syndicaux en droit comme en fait. Le comité est convaincu que, si la procédure protège
les gouvernements contre les accusations déraisonnables, ceux-ci doivent à leur tour
reconnaître l’importance de présenter, en vue d’un examen objectif, des réponses
détaillées aux allégations formulées à leur encontre. [Voir premier rapport du comité,
1952, paragr. 31.] Le comité prie les autorités de facto de faire preuve de plus de
coopération à l’avenir.
- 61. Le comité rappelle que ce cas concerne des allégations de
confiscation par les autorités, en l’absence de mandat judiciaire, de locaux et de biens
syndicaux légitimement acquis, en particulier des tentatives de prise de contrôle et
d’occupation violentes des bureaux du NUAWE par la police et les forces armées, ainsi
que le gel des comptes bancaires du syndicat, le non-renouvellement de son
enregistrement et des obstacles à la liberté d’expression et à la liberté de la
presse.
- 62. Le comité rappelle qu’il a précédemment noté avec préoccupation
l’absence de décision finale des tribunaux concernant le recours en justice présenté par
le syndicat pour réclamer certaines propriétés. Le comité attend également le rapport
sur la tenue du congrès du syndicat conformément à la décision de mars 2019 de la Cour
d’appel de Kaboul en ce qui concerne sa direction. Dans ce contexte, le comité a
également noté qu’un certain nombre de représentants du NUAWE, y compris le signataire
de la plainte, M. Qaderi, ont depuis lors fui le pays et sont en exil. Le comité attend
des autorités de facto qu’elles s’engagent à assurer à la direction du NUAWE en exil,
y compris à M. Qaderi, la possibilité d’un retour au pays pour exercer ses activités
syndicales dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces.
- 63. Tout en étant conscient de la complexité de la situation nationale,
le comité rappelle que le développement d’organisations libres et indépendantes et la
négociation avec l’ensemble des composantes du dialogue social sont indispensables pour
permettre à un gouvernement d’affronter les problèmes économiques et sociaux et de les
résoudre au mieux des intérêts des travailleurs et de la nation. [Voir Compilation des
décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 62.] À cet
égard, le comité souligne que tous les travailleurs, femmes et hommes, bénéficient de
tels développement et négociation. Il se voit obligé à nouveau d’inviter toutes les
autorités responsables à fournir des informations sur les mesures prises pour donner
suite à ses précédentes conclusions dont il rappelle ci-dessous le caractère
général.
- 64. Le comité exhorte les autorités de facto à faire en sorte que les
problèmes à l’origine de cette plainte, en particulier la confiscation des biens du
syndicat, soient traités sans délai. À cet égard, le comité s’attend à une décision
rapide des tribunaux concernant le recours en justice du NUAWE et prie les autorités de
facto de fournir des informations détaillées sur l’état d’avancement de la procédure
judiciaire et d’indiquer les mesures prises pour donner effet à leur décision finale une
fois qu’elle sera rendue.
- 65. Le comité rappelle en outre que la Confédération syndicale
internationale (CSI), qui s’est associée à la plainte en avril 2018, a dénoncé: i) des
tentatives de prise de contrôle et d’occupation violentes des bureaux du NUAWE par la
police et les forces armées; ii) le gel des comptes bancaires du syndicat sans
autorisation judiciaire; iii) le non-renouvellement de l’enregistrement du syndicat; et
iv) l’absence de dialogue avec le syndicat, ainsi que les obstacles à la liberté
d’expression et à la liberté de la presse. Le comité note avec préoccupation les
allégations de la CSI contenues dans sa communication en date du 17 mai 2022, selon
lesquelles, depuis l’arrivée au pouvoir des nouvelles autorités en août 2021, les
dirigeants syndicaux sont directement menacés et ainsi contraints à l’exil. Certains
dirigeants du NUAWE, dont M. Qaderi, se sont installés à l’étranger, tandis que d’autres
dirigent l’équipe dans le pays. Le comité note l’indication selon laquelle, malgré une
demande officielle du syndicat, les autorités ont refusé de rouvrir ses locaux et de
renouveler son enregistrement. Le comité note avec une vive préoccupation l’allégation
selon laquelle les autorités ont saisi les propriétés du syndicat dans les provinces,
confisquant du matériel et des documents, et expulsant son personnel. À cet égard, le
comité rappelle que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne
peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de
toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il
appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. Il rappelle
également que la confiscation des biens des organisations syndicales par les autorités,
en l’absence de mandat judiciaire, constitue une atteinte au droit de propriété des
organisations syndicales et une ingérence indue dans les activités des syndicats. Enfin,
le comité considère que le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs
d’exprimer des opinions par la voie de la presse ou autrement est l’un des éléments
essentiels des droits syndicaux. [Voir Compilation, paragr. 84, 288 et 239.] Le comité
prie à nouveau les autorités de facto de communiquer des observations détaillées sur les
allégations formulées par la CSI dans sa dernière communication de mai 2022 concernant
les menaces à l’encontre de syndicalistes les contraignant à l’exil, le refus de
renouvellement de l’enregistrement du syndicat et la confiscation des biens et des
documents du syndicat, y compris dans les provinces.
- 66. Le comité rappelle également que ses précédentes conclusions
concernaient aussi le texte du décret de 2016 qui, outre qu’il ordonne le transfert à
l’État de la propriété des biens de l’organisation plaignante, charge également le
ministère de la Justice d’examiner, à la lumière de la législation applicable, si le
NUAWE et deux autres syndicats peuvent poursuivre leurs activités, et d’agir en
conséquence. À cet égard, le comité a souligné que les organisations de travailleurs ont
le droit d’organiser librement leur gestion et leur activité, sans ingérence des
autorités. Il a rappelé en outre que les mesures de suspension ou de dissolution par
voie administrative constituent de graves violations aux principes de la liberté
syndicale. [Voir Compilation, paragr. 986.] Le comité prie instamment les autorités de
facto de préciser si le décret de 2016 conduit effectivement à l’intervention des
autorités dans les affaires syndicales ou à l’exercice de contrôle sur ces activités et
si, en particulier, l’examen conduit pourrait entraîner la dissolution ou la suspension
d’un syndicat par voie administrative et, si tel est le cas, invite les autorités de
facto à modifier le décret de 2016 afin d’assurer que cela n’est pas possible.
- 67. Compte tenu de la situation actuelle dans le pays, le comité prie les
autorités de facto de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que toutes les
organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités
syndicales légitimes dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de
toutes sortes.
- 68. Le comité rappelle à nouveau que l’assistance technique du Bureau est
disponible pour mettre en œuvre ses recommandations.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 69. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le
Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité
exhorte les autorités de facto à faire en sorte que les problèmes à l’origine de
cette plainte, en particulier la confiscation des biens du syndicat, soient traités
sans délai. Le comité s’attend à une décision rapide des tribunaux concernant le
recours en justice du Syndicat national des travailleurs et des employés
d’Afghanistan (NUAWE) à cet égard et prie les autorités de facto de fournir des
informations détaillées sur l’état d’avancement de la procédure judiciaire et
d’indiquer les mesures prises pour donner effet à leur décision finale une fois
qu’elle sera rendue.
- b) Le comité prie instamment les autorités de facto de
communiquer des observations détaillées sur les allégations concernant le gel des
comptes bancaires du syndicat sans autorisation judiciaire, le non-renouvellement de
son enregistrement rendant ses activités illégales, ainsi que les allégations graves
contenues dans la communication de mai 2022 de la Confédération syndicale
internationale (CSI) concernant les menaces à l’encontre de syndicalistes les
contraignant à l’exil, et la confiscation, en mars 2022, des biens et des documents
du NUAWE, y compris dans les provinces.
- c) Le comité prie instamment les
autorités de facto de préciser si le décret de 2016 conduit effectivement à
l’intervention des autorités dans les affaires syndicales ou à l’exercice de
contrôle sur ces activités et si, en particulier, l’examen conduit pourrait
entraîner la dissolution ou la suspension d’un syndicat par voie administrative et,
si tel est le cas, les invite à modifier le décret de 2016 afin d’assurer que cela
n’est pas possible.
- d) Compte tenu de la situation actuelle dans le pays, le
comité prie les autorités de facto de prendre toutes les mesures nécessaires pour
veiller à ce que toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent
exercer leurs activités syndicales légitimes dans un climat exempt de violence, de
pressions ou menaces de toutes sortes.
- e) Le comité attend des autorités de
facto qu’elles s’engagent à assurer à la direction du NUAWE en exil, y compris à
M. Qaderi, la possibilité d’un retour au pays pour exercer ses activités syndicales
dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces.
- f) Le comité
rappelle que l’assistance technique du Bureau est disponible pour mettre en œuvre
les recommandations a) à d).
- g) Le comité attire l’attention du Conseil
d’administration sur le caractère grave et urgent du présent cas.