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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 408, October 2024

Case No 3436 (Republic of Korea) - Complaint date: 20-OCT-22 - Follow-up

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement, appliquant de manière détournée plusieurs lois nationales, a qualifié d’illégales certaines activités du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KCWU) – un syndicat industriel affilié à la KFCITU – et a infligé des sanctions civiles et pénales à ce syndicat, alors que les activités en question visent à fournir des emplois aux membres syndiqués dans un secteur caractérisé par l’intermittence de l’emploi, constituent des pratiques syndicales courantes dans le monde entier, et sont conformes aux normes internationales du travail

  1. 600. La plainte figure dans une communication en date du 20 octobre 2022 présentée par la Fédération coréenne des syndicats de l’industrie de la construction (KFCITU), la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) et l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB). Par une communication en date du 12 septembre 2023, les organisations plaignantes ont adressé des informations complémentaires.
  2. 601. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications en date des 28 février et 10 septembre 2024.
  3. 602. La République de Corée a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 603. Dans leurs communications, la KFCITU, la KCTU et l’IBB allèguent que le gouvernement, appliquant de manière détournée plusieurs lois nationales, a qualifié d’illégales certaines activités du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KCWU) – un syndicat industriel affilié à la KFCITU – et a infligé des sanctions civiles et pénales à ce syndicat, alors que les activités en question sont des pratiques syndicales courantes dans le monde entier et sont conformes aux conventions no 87 et no 98 de l’OIT. Les organisations plaignantes affirment que ces mesures affaiblissent les droits du KCWU en matière de liberté syndicale, d’organisation et de négociation collective et qu’elles ont, d’une manière générale, un effet dissuasif sur les activités syndicales en République de Corée.
  2. 604. Les organisations plaignantes déclarent que le KCWU présente les caractéristiques d’un syndicat de métier constitué de travailleurs ayant des compétences professionnelles spécifiques. Les syndicats de métier, qui représentent des travailleurs qualifiés, ont été les premiers types de syndicats créés et ils aident traditionnellement leurs membres à trouver un emploi. Les emplois dans le secteur de la construction sont irréguliers et divers types de travailleurs spécialisés sont embauchés sur la base de contrats à court terme dans le cadre de projets spécifiques. Une fois le projet terminé, les travailleurs restent au chômage jusqu’à leur recrutement suivant dans un autre projet. Dans ce contexte, les syndicats, notamment le KCWU, s’attachent à garantir davantage d’opportunités d’emploi à leurs membres en menant des négociations avec les employeurs. Selon les organisations plaignantes, les chantiers de construction et les ports, sur lesquels les travailleurs proposent des services de chargement et de déchargement, présentent des caractéristiques analogues en termes d’intermittence de l’emploi. Les syndicats maritimes de la République de Corée sont autorisés à demander l’embauche de leurs membres dans le cadre de négociations collectives. Il est tout aussi important que le KCWU puisse en faire autant pour protéger les droits de ses membres. Les organisations plaignantes affirment en outre que les employeurs de l’industrie de la construction suivent une stratégie qui consistent à refuser d’embaucher des membres syndiqués. Par conséquent, la garantie d’opportunités d’emploi par voie de négociation collective revêt une importance accrue car, à défaut, les travailleurs confrontés à des refus d’embauche quitteront les syndicats qui, de leur côté, auront de grandes difficultés à survivre. Selon les organisations plaignantes, tel est le but recherché par le gouvernement et les employeurs de l’industrie de la construction.
  3. 605. Les organisations plaignantes indiquent que, fin 2021, le gouvernement a constitué une équipe spéciale pour l’éradication des activités illégales sur les sites de construction afin de donner suite à la persécution syndicale, et ce en recourant à trois procédés courants: i) la Commission des pratiques commerciales loyales (FTC) a considéré que les membres de la division des équipements de construction du KCWU, tels que les conducteurs de camions à benne et les opérateurs d’excavateurs – classés dans la vaste catégorie des «personnes occupant des types d’emploi spéciaux» (personnes ayant des emplois déguisés) – étaient des entités commerciales et leurs syndicats, des associations commerciales relevant du droit de la concurrence. D’après les organisations plaignantes, la FTC a affirmé que les syndicats se livraient à des pratiques anticoncurrentielles, telles que des ententes sur les prix; elle estimait que les demandes d’embauche émanant du KCWU constituaient une activité interdite pour une «association commerciale», et elle enquêtait actuellement sur 20 cas en la matière. Les organisations plaignantes allèguent que les enquêtes menées par la FTC ont, pour ainsi dire, étouffé les activités des syndicats; ii) le ministère de l’Emploi et du Travail a infligé une amende de pas moins de 60 millions de wons sud-coréens au KCWU pour violation de la loi sur les pratiques d’embauche équitables dans quatre cas liés à deux sites de construction, tandis que six autres sites faisaient l’objet d’une enquête. Dans ce cadre, 103 personnes au total auraient été poursuivies et une autre aurait été arrêtée; et iii) le gouvernement a mené des enquêtes et intenté des poursuites à l’encontre du KCWU pour coercition ou menace au simple motif que le syndicat avait demandé à l’employeur d’embaucher des syndicalistes lors de revendications de négociation collective. Selon les organisations plaignantes, cela contraste avec la pratique mondiale des syndicats de l’industrie de la construction, qui négocient avec les employeurs l’embauche de leurs membres afin de «mettre en place un syndicat» dans le cadre d’un projet de construction.
  4. 606. Les organisations plaignantes font valoir que la FTC applique la loi sur la réglementation des monopoles et les pratiques commerciales loyales (FTA) à la branche régionale du KCWU à Busan qui s’occupe des équipements de construction, au motif que ses membres sont des entités commerciales actives dans la location d’équipements de construction qui, par conséquent, constituent une association commerciale au sens de l’article 2 de cette loi. Elles allèguent que des activités syndicales telles que la négociation collective, la fixation de certaines conditions dans la convention collective et l’exigence du respect de la convention collective sont susceptibles d’être qualifiées de pratiques collectives illégales en application de l’article 40 (1) de la FTA ou de pratiques commerciales déloyales en application de l’article 45 (1) de cette même loi. Elles renvoient à un cas particulier (2021Gusa1312), dans lequel la FTC a adressé une ordonnance corrective datée du 14 janvier 2021 à la section locale à Ulleung de la branche régionale du KCWU qui s’occupe des équipements de construction de Daegu & Gyeongbuk, pour avoir fixé des lignes directrices sur les négociations salariales avec les employeurs, engagé des négociations sur les salaires et les tarifs de location conformément à ces lignes directrices et établi des directives pour prévenir la détérioration des conditions de travail causée par une concurrence exacerbée entre les membres. Ces actes étaient qualifiés de détermination, maintien ou modification des prix en violation de l’article 19 de la FTA et de limitation déloyale de la concurrence par les prix en violation de l’article 40 (1) 1 de cette même loi. Les organisations plaignantes allèguent également que, dans trois autres cas (2020Busa1323, 2021Busa1173 et 2021Busa1625), la FTC a mené des enquêtes sur certaines activités de la branche régionale du KCWU à Busan qui s’occupe des équipements de construction. L’enquêteur a finalement émis un avis en date du 11 avril 2022 énumérant les mesures correctives applicables au syndicat. Cet avis qualifiait des activités telles que les protestations contre un sous-traitant ayant résilié unilatéralement des contrats d’embauche de syndicalistes, les demandes faites à des sous-traitants d’embaucher des membres du syndicat, ou encore la participation à une campagne contre un sous-traitant ayant réduit unilatéralement les taux de location convenus précédemment, d’actes visant à forcer un tiers à refuser de traiter avec des entités commerciales non membres d’une association commerciale spécifique, interdits en vertu des articles 51 (1.4) et 45 (1.1) de la FTA. Dans leur communication de septembre 2023, les organisations plaignantes allèguent que, le 28 février 2023, la FTC a rendu la décision no 2023 042 en l’espèce, selon laquelle le syndicat ne devait plus adopter de comportements conduisant un entrepreneur en construction à refuser arbitrairement de traiter avec un loueur de matériel de construction non membre du défendeur et à arrêter de traiter, ou à ne pas traiter, avec un tel loueur en cessant l’exploitation du matériel de construction, en organisant des rassemblements sur le site ou en le signalant à l’entrepreneur en construction. La décision de la FTC prévoyait en outre des majorations à hauteur de 100 millions de wons, à payer dans un délai de soixante jours, comme indiqué dans l’avis de paiement des astreintes.
  5. 607. Les organisations plaignantes fournissent la liste suivante, qui répertorie les procédures engagées par la FTC contre des organisations affiliées au KCWU: i) section locale à Ulleung de la branche des équipements de construction de Daegyeong (2021Gusa1312); ii) branche des équipements de construction de Busan (2020Busa1323, 2021Busa1173, 2021Busa1625); iii) branche des équipements de construction de Busan (2021Busa1275); iv) section locale des opérateurs de pelleteuses de la branche des équipements de construction de Busan (2022Gusa0280, 2022Gusa0281); v) section locale des grutiers de la branche des équipements de construction de Daejeon (2022Jeonsa0329); vi) branche des équipements de construction d’Ulsan (2021Busa1078, 2022Busa0517, 2022Busa1753); vii) branche des équipements de construction de Busan (2021Busa2451, 2022Busa0523, 2022Busa0557, 2022Busa0527, 2022Busa0878); et viii) section locale à Hapcheon de la branche des équipements de construction de Gyeongnam (2022Busa0882).
  6. 608. Les organisations plaignantes indiquent que même des personnes enregistrées en tant qu’entités commerciales dans le système fiscal peuvent être des travailleurs au sens de la loi sur les syndicats et l’administration des relations professionnelles (Trade Unions and Labour Relations Adjustment Act, TULRAA) puisque, conformément à une série d’arrêts de la Cour suprême, l’élément déterminant permettant d’établir qu’une personne peut être considérée comme un travailleur est la dépendance économique et organisationnelle. Par exemple, selon la Cour suprême, les acteurs sont des travailleurs au sens de la TULRAA, car ils doivent être en mesure de négocier leurs conditions de travail avec l’aide des syndicats sur un pied d’égalité avec les entreprises de télédiffusion. Par conséquent, les organisations plaignantes considèrent que les membres de la division des équipements de construction du KCWU sont également des «travailleurs» qui entrent dans le champ d’application de la TULRAA et que leurs droits syndicaux devraient, de ce fait, être reconnus en vertu de la législation nationale. Selon les organisations plaignantes, bien que les membres de la branche régionale du KCWU qui s’occupe des équipements de construction ne relèvent pas de la définition des employés visée dans la loi sur les normes du travail, ce sont des travailleurs au sens de la TULRAA, qui mènent des activités syndicales de longue date. Qualifier cette branche d’entité commerciale au sens de la FTA reviendrait à nier les droits fondamentaux de ses membres en matière de travail, en particulier les droits à la négociation et à l’action collectives. En outre, des activités syndicales courantes visant à faire en sorte que les membres se conforment à des normes fixées en interne seraient considérées comme des violations de la FTA.
  7. 609. En ce qui concerne l’imposition d’amendes pour violation de la loi sur les pratiques d’embauche équitables, les organisations plaignantes allèguent que le KCWU a été condamné à une amende pour avoir négocié des opportunités d’emploi et organisé des actions visant à encourager la mise en œuvre d’un accord entre la direction et le personnel. Elles indiquent que le gouvernement a qualifié ces actes de pression et de coercition illégales en matière d’emploi en violation de l’article 4 (2) 1 de la loi sur les pratiques d’embauche équitables. Elles renvoient à un cas particulier, dans le cadre duquel le Bureau régional de l’emploi et du travail à Daejeon a infligé une amende de 15 millions de wons à M. Ahn Ik-bong, le président de la branche régionale des grues à tour du KCWU à Daejeon (dans la province de Chungcheong), parce que le syndicat avait organisé un rassemblement devant un chantier de construction pour protester contre la révocation unilatérale d’un accord conclu avec une entreprise de location de grues à tour, qui avait accepté d’embaucher des membres du syndicat pour des grues à tour installées sur le chantier. Elles allèguent que l’imposition de sanctions civiles au titre de la loi sur les pratiques d’embauche équitables pour de telles activités constitue une violation du droit à la liberté syndicale, notamment le droit de mener des actions syndicales et de ne pas faire l’objet de discrimination antisyndicale.
  8. 610. S’agissant des accusations pénales de coercition (article 324 de la loi pénale) portées contre le KCWU, les organisations plaignantes indiquent que les procureurs et les tribunaux coréens ne considèrent pas les demandes d’emploi de syndicalistes comme des revendications appropriées dans le cadre de la négociation collective, car elles ne concernent pas les conditions de travail et empiètent sur les droits de gestion des employeurs. En outre, la négociation au niveau du site et des actions collectives telles que l’organisation de rassemblements ou la dénonciation de violations de la loi sur la sécurité et la santé au travail pour faire pression sur l’employeur sont qualifiées de menace, ce qui est l’une des composantes de la coercition. Les organisations plaignantes renvoient à des actions intentées entre avril 2014 et février 2015 par l’entreprise de location de grues à tour Junkyung Tower Crane Services contre plusieurs membres et responsables de la division des grutiers du KCWU. L’entreprise s’était plainte que des responsables syndicaux s’étaient rendus coupables de coercition en demandant l’embauche de membres du syndicat. Ses plaintes faisaient suite à un rassemblement organisé par le syndicat pour faire pression sur l’entreprise afin qu’elle embauche des membres syndiqués. Ces actions ont débouché sur l’arrestation du président de la division des grutiers et de 4 autres responsables syndicaux le 27 novembre 2015 et sur la mise en examen de 15 membres de la division le 8 décembre 2015. Le 31 mai 2017, la Haute Cour de Séoul a rendu un verdict de culpabilité pour actes de coercition, qualifiant de menace – composante essentielle de la coercition – les actes suivants: recours à la pression verbale par des responsables syndicaux pour que l’entreprise fasse droit à leurs demandes lors de négociations collectives concernant l’embauche de syndicalistes; organisation de rassemblements; et accusation, portée contre des entrepreneurs principaux qui avaient un contrat avec la société, de violation de la loi sur la sécurité et la santé au travail au cours de la période de négociation collective. Ce verdict a été confirmé par la Cour suprême de Corée le 31 octobre 2019.
  9. 611. Les organisations plaignantes affirment que, de leur point de vue, les travailleurs de la construction concernés en l’espèce ont été classés à tort dans la catégorie des entrepreneurs indépendants. Elles ajoutent néanmoins que même des entrepreneurs indépendants ne devraient pas être privés de l’exercice des droits fondamentaux au travail et que, par conséquent, la FTA devrait être modifiée afin que tous les travailleurs protégés par la TULRAA soient exclus de son champ d’application. De surcroît, les organisations plaignantes allèguent que, en considérant que la demande du KCWU d’embaucher des membres du syndicat était illégale, le gouvernement coréen et les autorités judiciaires ont fixé unilatéralement la portée des questions négociables par voie de négociation collective, en violation de l’article 4 de la convention no 98. Elles font valoir que le litige ne porte pas sur la mise en place d’un système de sécurité syndicale, puisque la demande du syndicat n’était pas d’employer uniquement des membres du syndicat, et que des modalités telles que le nombre et les procédures d’emplois ainsi que la responsabilité du syndicat en matière de compétences pouvaient faire l’objet de discussions entre les travailleurs et la direction dans le cadre des négociations collectives.
  10. 612. Les organisations plaignantes soulignent également que l’interdiction faite aux syndicats de fixer des règles internes de négociation salariale en vue de prévenir une concurrence exacerbée entre les travailleurs porte atteinte à la liberté d’organiser des activités syndicales et de formuler des programmes garantie par l’article 3 de la convention no 87. Enfin, elles affirment que l’application de sanctions pénales pour l’infraction de coercition et l’application de sanctions civiles en vertu de la loi sur les pratiques d’embauche équitables suite aux tentatives du syndicat de faire valoir ses revendications par des pressions verbales sur les employeurs, par l’organisation de rassemblements et par la dénonciation d’atteintes à la loi sur la sécurité et la santé au travail, constituent des violations du droit à la liberté syndicale et du droit d’organisation. Elles allèguent que le gouvernement, contrairement à l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 11 de la convention no 87, a élaboré un plan avec une équipe spéciale, en collaboration avec l’industrie de la construction, afin de rendre illégal le syndicalisme dans le secteur en appliquant la loi à son détriment.
  11. 613. En conclusion, les organisations plaignantes affirment que les enquêtes menées sur les activités syndicales par les procureurs et par la FTC, ainsi que les amendes infligées par le ministère de l’Emploi et du Travail, mettent en péril les activités et l’existence du KCWU. Les employeurs refusent d’embaucher des membres syndiqués (contrats), rejettent la négociation collective avec le syndicat et ne respectent pas les conventions collectives. Les demandes d’embauche de membres des syndicats étant proscrites, des affrontements éclatent entre les travailleurs et la direction sur les chantiers de construction en raison du blocage de la négociation collective, susceptible de servir d’exutoire aux tensions. Les organisations plaignantes demandent que le gouvernement coréen cesse la répression du KCWU et veille à ce que les demandes d’embauche formulées par le syndicat soient traitées dans le cadre d’une négociation collective autonome entre la direction et les travailleurs, en tenant compte de la structure de l’emploi et des caractéristiques des chantiers de construction, où l’emploi à court terme est prédominant. Le gouvernement devrait également s’efforcer de mettre en place les réglementations et institutions nécessaires au soutien de la négociation collective autonome.
  12. 614. Dans leur communication datée du 12 septembre 2023, les organisations plaignantes fournissent des informations complémentaires, alléguant qu’entre janvier et le 17 août 2023 plus de 1 700 membres du KCWU ont été convoqués par la police, 20 perquisitions ont été effectuées dans les locaux du syndicat, y compris son bureau central, et 37 personnes ont été arrêtées ou incarcérées. Des membres du syndicat ont fait l’objet d’enquêtes et de poursuites pour avoir demandé l’embauche de syndicalistes, la négociation avec des entreprises de construction et l’octroi de congés payés conformément à la convention collective. Ces activités syndicales ont été qualifiées pénalement d’intimidation, de coercition et d’extorsion. Les autorités ont fait porter leurs efforts sur l’interdiction des dispositions relatives aux congés payés, recourant fréquemment aux accusations d’extorsion pour octroi de congés payés; 465 syndicalistes ont fait l’objet d’enquêtes et 523 ont été accusés d’intimidation. Les organisations plaignantes soulignent que l’octroi de congés payés relève d’un accord entre l’employeur et le syndicat dans le cadre du processus de négociation, citant une clause d’un accord qui dispose ce qui suit:
    • Article 2 (congés payés)
    • 1. Aux fins de gestion et d’administration d’un syndicat reposant sur des bases solides, l’entreprise dispense le personnel désigné par le syndicat de travailler pendant une durée de 48 heures par mois et par site, dans le cadre décrit dans la loi sur les syndicats et l’administration des relations professionnelles, établit un contrat de travail pour le personnel et verse des primes au titre des quatre assurances sociales. Néanmoins, les entreprises non membres de l’Association des employeurs de la construction en béton armé de Séoul-Gyeonggi-Incheon détermineront des modalités distinctes.
    • 2. L’entreprise garantit la liberté d’action des syndicats en ce qui concerne l’utilisation des congés payés conformément au paragraphe 1 et n’y fait pas obstacle.
    • 3. L’entreprise verse des salaires correspondant aux congés payés en vertu du paragraphe 1 comme s’il s’agissait d’une période travaillée et ne défavorise pas le personnel en termes de salaires, de prestations sociales, de primes de rendement spéciales ou autres au motif qu’il bénéficie d’une dispense de travail.
  13. Les organisations plaignantes allèguent à cet égard que l’octroi de congés payés aux permanents syndicaux est légitime au sens de la TULRAA, y compris lorsque les congés payés sont accordés à la condition que des membres syndiqués soient embauchés. Selon elles, les autorités partent du principe que les demandes d’embauche de membres syndiqués ont été faites pour obtenir des congés payés, mettant ainsi la charrue avant les bœufs, alors que l’octroi de congés payés fait l’objet d’un accord commun entre l’employeur et le syndicat dans le cadre du processus de négociation.
  14. 615. Les organisations plaignantes allèguent que les motivations politiques qui sous-tendent les poursuites engagées contre des membres du syndicat sont manifestes au vu de la campagne de diffamation menée contre les syndicats de la construction par le Président Yoon Seok-yul, des ministres et d’autres hommes politiques du parti au pouvoir. Le KCWU a été accusé à plusieurs reprises d’immoralité et, lors d’une réunion du cabinet retransmise en direct le 21 février 2023, le Président a qualifié les syndicats de la construction de gangsters de la construction («geon pok»), les comparant à des organisations criminelles qui recourent à la violence à des fins de profit et d’enrichissement. Le Président a demandé à des autorités compétentes, telles que l’Agence nationale de la police et le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et des Transports, de prendre des mesures de répression spéciales à l’encontre des syndicats du secteur de la construction. Le 9 mars 2023, le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et des Transports a adressé un mémorandum à des entreprises de construction leur demandant de signaler tout acte répréhensible présumé du syndicat, en utilisant des termes désobligeants à propos d’un responsable du KCWU qui laissaient entendre qu’il devait être dénoncé. Le 8 décembre 2022, l’Agence nationale de la police a annoncé le lancement d’une campagne de 200 jours visant à réprimer les activités illégales organisées, telles que l’extorsion et la violence sur les chantiers de construction. Dans ce cadre, des policiers se sont vus promettre des promotions, les poussant à considérer toutes les allégations comme des infractions, à les traiter comme des infractions graves et à arrêter les suspects. Les organisations plaignantes indiquent que c’est dans ces circonstances que M. Hoe-dong Yang, un syndicaliste qui faisait l’objet d’une enquête pour extorsion et intimidation, s’est donné la mort par auto-immolation. La durée de la répression a été prolongée à deux reprises et s’est étendue sur neuf mois environ. À son issue, aucun cas de comportement délictueux de la part d’employeurs n’a été retenu; en revanche, le nombre des membres du KCWU a baissé de plus de 10 000, ce qui représente une chute de plus de 15 pour cent de ses effectifs.
  15. 616. En résumé, les organisations plaignantes font observer que, étant donné que les dispositions relatives à la sécurité syndicale sont proscrites dans les conventions collectives, le seul moyen dont disposent les syndicats de la construction pour garantir les droits syndicaux est de veiller à l’embauche de membres syndiqués par voie de négociations au niveau du site. Au vu des poursuites engagées contre des responsables et des membres du syndicat pour avoir participé à de telles négociations, il n’existe actuellement aucune garantie effective au droit des travailleurs de la construction à s’organiser, alors que les employeurs ont toute liberté de ne pas embaucher de syndicalistes. Étant donné la situation, de nombreux membres quittent le syndicat et, si rien n’est fait rapidement, les organisations subiront des dommages irréparables.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 617. Dans sa communication du 28 février 2024, le gouvernement indique que les allégations des organisations plaignantes ne sont pas fondées et souligne son engagement à mettre en œuvre les conventions de l’OIT qu’il a ratifiées. Il renvoie aux dispositions du droit national qui garantissent le droit d’association et de négociation collective et précise que, conformément à l’article 29 de la TULRAA, les thèmes de la négociation collective s’étendent aux questions relatives à la détermination des conditions de travail et à celles liées au fonctionnement des syndicats, en particulier en ce qui concerne leurs activités et les responsables syndicaux à plein temps. Conformément à la Constitution et à la TULRAA, la Cour suprême coréenne a considéré que les questions sur lesquelles l’employeur peut se prononcer, telles que les conditions de travail et d’autres questions relatives au traitement des employés et à la gestion des relations collectives de travail, sont susceptibles de faire l’objet de négociations collectives. Toutefois, les questions relevant de décisions de haut niveau en matière de gestion, telles que les licenciements ou les fusions, en sont en principe exclues. Le gouvernement souligne qu’il est inévitable de restreindre les thèmes soumis à la négociation collective, et ce pour les raisons suivantes: i) du libellé des dispositions constitutionnelles et de la nature même des droits fondamentaux du travail, il ressort que toutes les questions sans lien avec les conditions de travail et l’amélioration du statut social et économique des travailleurs ne relèvent pas forcément de la garantie du droit à la négociation collective; ii) les droits fondamentaux en matière de travail doivent être compatibles avec d’autres droits fondamentaux, tels que le droit de gestion et le droit à l’égalité; iii) un employeur qui refuse ou retarde sans raison une négociation collective peut en être tenu pénalement responsable; la revendication faisant l’objet d’une action syndicale doit être similaire à l’objet de la négociation collective; et la TULRAA prévoit l’immunité civile et pénale dans le cadre d’une négociation collective légitime; et iv) enfin, le fait de ne pas restreindre le champ de la négociation collective peut conduire à une inefficacité criante et à des conflits permanents entre les travailleurs et la direction.
  2. 618. Le gouvernement rejette l’affirmation des organisations plaignantes selon laquelle la demande du KCWU concernant l’embauche de membres du syndicat est légitime dans le cadre d’une négociation collective, car les thèmes de la négociation doivent être déterminés de manière autonome par les parties. À cet égard, il fait valoir que, en vertu des règles du droit national mentionnées ci-dessus, les questions liées à l’embauche, qui sont traitées avant l’établissement du contrat de travail, ne concernent pas les conditions de travail mais le droit de gestion du personnel, qui revient exclusivement aux employeurs, et relèvent du droit inhérent à l’employeur de gérer et d’exercer les droits de propriété garantis par la Constitution; par conséquent, elles ne s’inscrivent pas dans le cadre d’une négociation collective en vertu de la TULRAA. Le gouvernement cite à ce sujet la décision du tribunal du district d’Ulsan (décision 2017NO316 en date du 8 juin 2017), confirmée par la Cour suprême: puisqu’en principe les questions touchant à l’essence des droits de gestion de l’employeur, telles que l’embauche de travailleurs, ne peuvent pas faire l’objet d’une négociation collective – même si le syndicat demande à l’employeur de l’industrie de la construction d’embaucher ses membres et que l’employeur refuse de le faire –, le syndicat n’est pas autorisé à lancé une action syndicale pour obtenir gain de cause, car l’objectif n’est pas fondé. Il ajoute que l’embauche prioritaire de syndicalistes serait contraire à la Constitution et à la législation, car elle reviendrait à une discrimination à l’encontre d’autres candidats et de non-membres du syndicat, sans motif raisonnable.
  3. 619. Le gouvernement rejette également la comparaison établie par les organisations plaignantes entre les syndicats de manutentionnaires et le KCWU. Il souligne la distinction suivante entre le KCWU et la Fédération coréenne des syndicats des travailleurs portuaires et des transports (KFPTWU): cette dernière a obtenu l’autorisation du ministre de l’Emploi et du Travail d’exercer une activité de fourniture de main-d’œuvre, tandis que le KCWU n’a pas reçu cette autorisation, ni aucune autre. Le gouvernement explique que, en vertu de l’article 33 de la loi sur la sécurité de l’emploi, seuls les syndicats qui ont obtenu une autorisation spécifique du ministre de l’Emploi et du Travail peuvent se lancer dans un processus de recrutement en tant que tierce partie à l’intérieur du pays. La KFPTWU avait reçu l’autorisation d’opérer en tant qu’entreprise de fourniture de main-d’œuvre, mais avait dû faire face à de nombreux problèmes de corruption et de détournement de fonds, principalement en raison de son monopole dans le domaine de la fourniture de main-d’œuvre. Malgré les mesures prises par le gouvernement pour y remédier, ces problèmes ont persisté, poussant le gouvernement à faire preuve de prudence dans la délivrance des autorisations en la matière. Le gouvernement précise que le ministre du Travail et de l’Emploi a le pouvoir discrétionnaire d’accorder de telles autorisations, ce qu’il fait à l’issue d’un examen approfondi portant sur la capacité du syndicat à répondre aux conditions requises, sur l’étendue de son activité, sur la situation concernant l’offre de main-d’œuvre dans la région et la profession, et sur la stabilité des relations de travail. Il indique en outre que la Cour suprême de Corée a considéré qu’aucun syndicat ne pouvait revendiquer pour ses membres le droit de réaliser des travaux de chargement et de déchargement sur la base d’une convention collective, sans contrat de fourniture spécifique conclu en vertu d’une autorisation d’activités de fourniture de main-d’œuvre. La Cour suprême a également estimé que le fait d’empêcher une entreprise fournissant de la main-d’œuvre de conclure un contrat avec un homologue sur la base d’une convention collective constituait une violation de la FTA. Enfin, le gouvernement précise que rien ne prouve que le KCWU, tout comme la KFPTWU, a exercé la fonction de syndicat de métier, c’est-à-dire de fournisseur de main-d’œuvre.
  4. 620. Le gouvernement indique que, de ce qu’il comprend, les organisations plaignantes soutiennent que le KCWU devrait pouvoir exiger l’embauche de ses membres par voie de négociation collective sous la forme d’une convention d’exclusivité syndicale («closed shop»). À cet égard, il renvoie à l’Étude d’ensemble de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, qui prévoit que l’article 2 de la convention no 87 laisse à la pratique et à la réglementation de chaque État le soin de décider s’il convient de garantir le droit des travailleurs de ne pas s’affilier à une organisation professionnelle ou, au contraire, d’autoriser et, le cas échéant, de réglementer l’usage de clauses de sécurité syndicale dans la pratique. Le gouvernement précise que, selon son système juridique, les conventions d’exclusivité syndicale portent atteinte au droit constitutionnel des travailleurs à s’organiser (à choisir) et ne sont pas des pratiques courantes. Il ajoute néanmoins que la clause restrictive de l’article 81 (1) de la TULRAA ne permet qu’un recours limité à cette pratique.
  5. 621. Le gouvernement affirme que l’allégation des organisations plaignantes concernant la tendance des employeurs à éviter la négociation collective dans le secteur de la construction est dépourvue de fondement et sans lien avec le cas en l’espèce. Selon lui, les questions liées à l’embauche ne font pas l’objet de négociations collectives et le présent cas porte sur le fait que le KCWU a recours à la pratique illégale de la coercition en matière de recrutement, pratique face à laquelle le gouvernement exerce légitimement son autorité administrative; ceci n’a aucun rapport avec les relations entre travailleurs et employés sur les chantiers de construction, où des violations des horaires de travail et des normes de sécurité au travail ont lieu et sont signalées par le syndicat aux autorités administratives. La plupart des employeurs mènent en toute bonne foi des négociations collectives légitimes, ainsi que la loi l’exige. Le fait de ne pas donner suite à la demande de négociation collective formulée par un syndicat constitue une pratique déloyale de la part de l’employeur (article 81 (1) 3 de la TULRAA), passible d’une sanction pénale. Un mécanisme institutionnel permet aux syndicats de déposer une demande de réparation pour pratique de travail déloyale auprès de la Commission des relations professionnelles, et le gouvernement veille à ce que les employeurs remplissent leurs obligations à cet égard. Le gouvernement indique enfin que les quatre branches du KCWU participent librement à des négociations collectives au titre de la TULRAA ou à des négociations sur les coûts avec les employeurs: la division du génie civil et de la construction a conclu avec succès des conventions collectives avec les employeurs, y compris un accord sur les salaires signé le 19 mars 2024; la division des équipements de construction, qui est principalement composée d’entités commerciales individuelles, a participé à des négociations sur les coûts avec les employeurs qui se poursuivent en 2024 dans chaque branche régionale; et la division des grutiers a signé une convention collective avec un employeur le 7 novembre 2023 et conclu un accord sur les salaires avec un autre employeur après avoir accepté la proposition de médiation de la Commission nationale des relations de travail (NLRC) le 1er août 2024. La division de l’électricité du KCWU a une tradition de négociations bisannuelles et n’a donc pas engagé de négociations collectives en 2024. Le gouvernement ajoute qu’il fournit des conseils sur place, notamment par le biais de réunions avec les associations d’employeurs, afin de s’assurer que les employeurs répondent de manière appropriée aux demandes légitimes de négociation des syndicats.
  6. 622. Le gouvernement fait savoir que la création de l’équipe spéciale pour l’éradication des activités illégales sur les sites de construction était une mesure légitime et nécessaire pour mettre un terme aux pratiques illégales des syndicats de la construction et faire régner l’ordre et l’équité sur les chantiers. Il soutient que le KCWU s’est livré à de nombreuses activités illégales sur les chantiers, notamment: entrave à l’accès au site, atteinte aux travaux de construction, organisation de vastes rassemblements et manifestations, provocation de perturbations par l’utilisation de haut-parleurs, revendication de salaires pour les responsables syndicaux à temps plein, sollicitation de sommes d’argent au titre de présentations de félicitations ou de condoléances et de défraiement d’activités, demande d’enquête sur les antécédents des membres non syndiqués, et manquement à ses devoirs en poussant au recrutement de membres syndiqués et à l’utilisation de machines et d’équipements de l’entrepreneur affilié au KCWU. De surcroît, les conflits entre la KCTU et la Fédération des syndicats coréens (FKTU) ont dégénéré en violences et en litiges au sujet de l’attribution d’emplois à leurs membres dans le secteur de la construction. En octobre 2021, constatant que les activités illégales se renforçaient sur les chantiers de construction, portant ainsi gravement préjudice à l’industrie, le gouvernement s’est penché sur l’état des conflits liés au recrutement sur les chantiers de construction et sur les contre-mesures avec les ministères concernés, avant de former l’équipe spéciale destinée à cerner les problèmes et à les résoudre. Le gouvernement souligne que l’équipe spéciale a été créée pour permettre aux travailleurs de la construction de travailler en toute sécurité et de bénéficier d’opportunités équitables, en s’employant à garantir les activités légitimes des syndicats de la construction, mais aussi en prenant des dispositions rigoureuses et légales face aux activités illégales.
  7. 623. Le gouvernement rejette l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle la règle de droit dans les relations de travail ne s’applique pas également aux actes illégaux des employeurs et il fait savoir que l’équipe spéciale a pour tâche d’éliminer les actes illégaux et déloyaux tant des travailleurs que des employeurs sur les chantiers de construction. Les mesures visant à faire disparaître les activités illégales et déloyales sur les chantiers, annoncées le 21 février 2023, incluent des mesures de protection des travailleurs de la construction, mettant fin à la sous-traitance illégale et aux retards de paiement des salaires par les employeurs. De plus, le plan de suivi annoncé le 11 mai 2023 inclut un programme d’amélioration des conditions de travail par la réduction de la sous-traitance illégale, qui vise à restreindre les activités illégales des employeurs. En 2023, le gouvernement a mené des inspections sur des chantiers de construction soupçonnés de différer régulièrement le paiement des salaires et a recensé des violations, telles que la sous-traitance illégale et le non-respect de l’obligation de payer les salaires directement sur six chantiers, ce qui a débouché sur des actions, notamment judiciaires. En 2024, des inspections sur la sous-traitance illégale, les retards de paiement des salaires et l’embauche forcée sur les chantiers de construction ont été menées en mars et avril. Par la suite, le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et des Transports, le ministère de l’Emploi et du Travail, l’Agence nationale de la police et d’autres organismes compétents ont mené conjointement une campagne intensive de répression ciblant 155 lieux de travail soupçonnés d’activités illégales. Le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et des Transports a également révisé sa directive intitulée «Lignes directrices sur l’établissement et le fonctionnement d’un centre de soutien à la construction équitable». La version révisée a augmenté la récompense pour le signalement d’actes illégaux afin d’encourager le signalement d’activités illégales sur les sites de construction et a élargi le champ des signalements pour inclure tous les actes illégaux, qu’ils impliquent la main-d’œuvre ou la direction.
  8. 624. En réponse à l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle la FTC a classé à tort des membres de la division des équipements de construction du KCWU, tels que les conducteurs de camions à benne et les opérateurs d’excavateurs, en tant qu’entités commerciales et associations commerciales, alors qu’ils devraient être considérés comme des travailleurs en vertu de la TULRAA, le gouvernement indique que la TULRAA et la FTA ont des buts et objets distincts et portent sur des sujets spécifiques; en conséquence, le champ d’application de la FTA n’est pas conditionné à la question de savoir si une personne est un syndicat ou un travailleur dans le cadre de la TULRAA. La FTA s’applique aux entités commerciales et aux associations commerciales, et la FTC détermine si une personne entre dans son champ d’application au regard du type de son activité, de la forme de son organisation et de sa participation à des activités qui fournissent des biens et services et en échange desquels un avantage est reçu, que ce soit à des fins lucratives ou non. Le gouvernement indique que, dans le cas concernant la division des équipements de construction du KCWU, la FTC a appliqué les critères de la FTA de manière cohérente, considérant que les membres composant les organisations concernées avaient enregistré leur activité de fabrication de machines de construction auprès des autorités administratives compétentes et qu’ils exerçaient une activité de location de machines de construction. Ils étaient donc considérés comme des entités commerciales ou des associations commerciales au sens de l’article 2 de la FTA. Dans sa décision, la FTC a conclu qu’il était malaisé de déterminer si l’association commerciale en question était un syndicat au sens de la TULRAA. Cependant, même si les membres de l’association commerciale étaient des travailleurs occupant des types d’emploi spécifiques (travailleurs indépendants économiquement dépendants) et que l’association présentait certaines caractéristiques d’un syndicat, cela n’excluait pas qu’ils relèvent de la FTA. Selon le gouvernement, il est légitime que la FTC prenne les mesures administratives nécessaires en vertu de la FTA en cas de violations présumées par une association concernée. Enfin, le gouvernement indique que, dans un arrêt en date du 31 juillet 2023 concernant le syndicat des travailleurs du port d’Ulsan, la Cour suprême a estimé que la sanction retenue par la FTC pour ingérence dans les opérations de chargement et de déchargement d’un syndicat concurrent était légale, car le défendeur était une association commerciale. Selon l’arrêt, un syndicat autorisé à exercer des activités de fourniture de main-d’œuvre bénéficie à la fois du statut de syndicat et d’exploitant d’entreprise et continue de relever de la FTA. Le gouvernement émet l’opinion que cet arrêt peut également s’appliquer au cas de la division des équipements de construction du KCWU.
  9. 625. Par ailleurs, le gouvernement précise que l’article 116 de la FTA dispose que:
    • Cette loi ne s’applique à aucun acte légitime accompli par une entité commerciale ou une association commerciale en vertu d’autres lois.
  10. Selon les termes de cette disposition, la FTA ne s’applique pas aux actes légitimes qui respectent les exigences de procédure et de fond fixées par la législation du travail. Le gouvernement soutient que la FTA a été appliquée à des actes du KCWU, tels que l’exclusion déloyale de concurrents ou la restriction de la concurrence, car ils ne pouvaient pas être considérés comme constituant une convention collective légitime ou un conflit du travail relevant de la législation du travail. À la lumière de l’objectif législatif et du contenu de la FTA, même si le protagoniste est un syndicat, il est parfaitement raisonnable d’appliquer la loi sur les pratiques commerciales loyales ou d’autres lois connexes lorsque l’acte incriminé correspond en substance à une infraction générale sans lien avec les activités légitimes d’un syndicat.
  11. 626. S’agissant de l’ordonnance corrective de la FTC adressée à la section locale du KCWU à Ulleung (cas 2021Gusa1312), le gouvernement indique que la FTC a appliqué les critères énoncés à l’article 51 (1) 1 de la FTA concernant les éléments constitutifs d’une entente prohibée sur les prix (acte consistant à restreindre de manière déloyale la concurrence par la fixation, le maintien ou la modification de prix) et qu’elle a estimé que les activités du syndicat constituaient des atteintes à la loi. Le gouvernement met en exergue le fait que l’ordonnance corrective n’a pas restreint les activités de négociation collective du syndicat puisque, dans ce cas précis, la section locale d’Ulleung a dressé une liste de prix unitaires pour la location de machines de construction et l’a envoyée unilatéralement aux entreprises locales de construction et au bureau du gouvernement du comté d’Ulleung, dans le but de déclencher une hausse abusive du prix du marché des machines de construction. Les caractéristiques de ce cas et la situation n’avaient aucun lien avec l’exercice par le syndicat de ses droits de négociation collective, étant donné que le syndicat et les entreprises locales de construction n’avaient pas entamé de négociations collectives.
  12. 627. S’agissant des trois cas concernant la branche régionale du KCWU à Busan qui s’occupe des équipements de construction (cas 2020Busa1323, 2021Busa1173, 2021Busa1625) et de l’ordonnance corrective connexe rendue le 28 février 2023, le gouvernement précise que la FTC a scrupuleusement appliqué les critères fixés dans la FTA pour qualifier de «refus de traiter» un acte de pratique commerciale déloyale. Le gouvernement explique, à propos de ces cas, que les représentants de la branche de Busan qui s’occupe des équipements de construction se sont rendus sur les chantiers et ont exigé que les entreprises de construction cessent de traiter avec d’autres entités; ils ont également organisé un rassemblement sur les sites de construction et en ont informé leurs membres par l’intermédiaire de médias sociaux; ils ont mobilisé la section locale du béton prêt à l’emploi de la branche des machines de construction de Busan et d’autres sections locales de machines de construction pour communiquer leur intention de cesser le transport de béton prêt à l’emploi et l’exploitation d’autres machines de construction; enfin, le transport du béton prêt à l’emploi a été suspendu. Le gouvernement ajoute que la branche des machines de construction de Busan est une association commerciale qui compte parmi ses membres plus de 3 000 entreprises de location de machines de construction actives à Busan et dans certaines parties de la province de Gyeongsangnam-do, et qu’elle est à même d’exercer une influence notable sur les entreprises de construction de la région, en particulier dans le cas des camions malaxeurs – équipements essentiels pour les chantiers de construction –, puisqu’elle représente environ 97,6 pour cent du marché dans la région. Par conséquent, lorsque cette branche a demandé aux entreprises de construction de cesser de traiter avec les entreprises de location non affiliées, les entreprises de construction ont accepté et ont donné suite à cette demande alors que, selon le gouvernement, elles auraient dû pouvoir décider par elles-mêmes de traiter ou non avec une entreprise de location en tenant compte de leur stratégie et de leur situation. En imposant sa revendication, la branche des machines de construction de Busan a porté atteinte à la liberté des entreprises de construction de choisir leurs partenaires commerciaux et a compliqué les activités commerciales des entreprises de location non affiliées, limitant potentiellement la concurrence sur le marché de la location de machines de construction dans la région où la branche est active, et contraignant de fait les entreprises de construction à refuser de traiter avec d’autres entités. Enfin, le gouvernement indique que le fait d’obliger les entreprises de construction à cesser de traiter avec des entreprises de location non membres du KCWU va à l’encontre des objectifs de la TULRAA, tels que le maintien et l’amélioration des conditions de travail. Il souligne que non seulement le syndicat s’est employé à entraver les activités de construction en arrêtant le transport du béton prêt à l’emploi, en cessant l’exploitation des machines de construction et en organisant des rassemblements sur le site, mais qu’en outre il n’a pas respecté les procédures minimales, telles que la médiation, imposées par la TULRAA. Partant, ses actes ne pouvaient être considérés comme une activité syndicale légitime ou un conflit du travail ni justifier l’application de l’article 116 (1) de la FTA.
  13. 628. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle le gouvernement a infligé une amende au KCWU pour avoir négocié, avec des employeurs, des opportunités d’emploi pour ses membres et avoir organisé des activités poussant à la mise en œuvre d’un accord de gestion du travail en la matière, le gouvernement confirme que cette décision a été prise en violation de l’article 4 (2) 1 de la loi sur les pratiques d’embauche équitables, qui dispose que nul ne peut se livrer à des actes portant atteinte à l’équité du recrutement par des sollicitations abusives, des pressions ou des coercitions liées au recrutement en violation de la loi, et qu’une amende de 30 millions de wons au maximum peut être infligée en cas d’infraction. Selon le gouvernement, cette disposition a pour objectif de prévenir et de sanctionner les irrégularités en matière de recrutement qui empêchent chacun de bénéficier d’opportunités d’emploi équitables et nuisent au bon ordre de l’emploi, et son champ d’application ne se limite pas aux employeurs. Le gouvernement renvoie également aux dispositions de la loi-cadre sur la politique de l’emploi, dont l’article 5 (3) dispose que les syndicats et les organisations d’employeurs doivent coopérer activement aux efforts visant à promouvoir la sécurité de l’emploi et l’égalité des travailleurs en matière d’emploi. L’article 7 (1) de cette loi dispose que les employeurs ne doivent pas pratiquer de discrimination sans motif raisonnable lors du recrutement et de l’embauche de travailleurs et qu’ils doivent garantir l’égalité d’accès aux emplois.
  14. 629. Le gouvernement fournit des précisions au sujet des faits qui sont à l’origine de la décision administrative du ministère de l’Emploi et du Travail d’infliger une amende de 15 millions de wons à M. Ahn Ik-bong, le président de la branche régionale des grues à tour du KCWU à Daejeon (Chungcheong). Il indique que le 15 octobre 2021, une plainte a été déposée auprès du Bureau régional de l’emploi et du travail de Daejeon, alléguant la violation de la loi sur les pratiques d’embauche équitables par M. Ahn Ik-bong ainsi que par M. Lee Ki-jung, le responsable du siège régional du Syndicat coréen des travailleurs des grues à tour de la FKTU à Daejeon et Sejong (Chungcheong). Selon les organisations plaignantes, après que Dongyang Tower, une société de location de grues à tour, a embauché un membre de la section locale à Jungbu de la branche des grues à tour de la KFCITU – affiliée à la FKTU (ci-après la FKTU2) – pour travailler sur un nouveau complexe résidentiel, le KCWU et la FKTU ont fait pression sur Dongyang Tower pour qu’elle exclue du chantier le membre de la FKTU2 en question et qu’elle embauche des membres du KCWU et de la FKTU. Après avoir enquêté, le Bureau régional de l’emploi et du travail du ministère de l’Emploi et du Travail à Daejeon a conclu à l’existence de circonstances suffisantes pour considérer que les défendeurs avaient contraint Dongyang Tower à recruter des membres du syndicat en violation de la législation applicable. Plus précisément, le membre de la FKTU2 a été embauché le 13 octobre 2021 pour travailler sur la grue à tour de l’unité 2 du site. Immédiatement après, entre le 14 et le 16 octobre, l’exploitation de 13 grues à tour de Dongyang Tower sur des sites de construction de Daejeon et de Chungcheong (Asan et Cheongju) a cessé. Selon le témoignage d’un directeur de Dongyang Tower, les défendeurs ont demandé à deux reprises, les 14 et 17 octobre, l’embauche de membres de leurs syndicats respectifs. Le 17 octobre, la société, faisant suite aux avis (pressions) du KCWU et de la FKTU, a conclu un contrat de travail avec les défendeurs et, par la suite, des membres du KCWU et d’autres personnes ont été embauchés pour travailler sur la grue à tour n° 2 du site. Le gouvernement ajoute qu’à l’époque la FKTU2 a porté plainte contre les défendeurs auprès des services de police pour «coercition» et qu’une enquête est en cours.
  15. 630. Le gouvernement indique que M. Ahn Ik-bong et M. Lee Ki-jung ont tous deux été condamnés à une amende et qu’ils ont fait appel de la décision administrative. Le 17 février 2023, l’affaire concernant M. Ahn Ik-bong a été tranchée en première instance par le tribunal de district de Daejeon (2022Gwa84), qui a confirmé la décision administrative contestée, estimant que le fait d’exercer des pressions pour obliger l’employeur à recruter des membres d’un seul et unique syndicat, à l’exclusion des membres d’autres syndicats, constituait une infraction à la loi. Dans sa décision, le tribunal a également rejeté la possibilité de justifier l’acte du défendeur comme l’exercice légitime du droit à l’action collective, étant donné que l’ordre d’arrêt de travail et la demande de recrutement ne visaient pas à améliorer les conditions de travail. M. Ahn Ik-bong est décédé avant l’issue de l’appel interjeté en première instance et l’amende a été annulée à la suite de ce décès. Le gouvernement ajoute que la procédure d’appel de M. Lee Ki-jung est en cours devant le tribunal de district de Cheongju.
  16. 631. Le gouvernement précise que, en sus des rassemblements, les syndicats de la construction ont recouru à d’autres moyens de pression illégaux contre des employeurs, tels que le blocage de la circulation sur le site, l’occupation des grues à tour et l’arrêt d’envoi de main-d’œuvre sur ce site et sur d’autres, ce qui correspond aux types d’actes (pression, coercition, etc.) interdits en vertu de l’article 4 (2) 1 de la loi sur les pratiques d’embauche équitables.
  17. 632. Le gouvernement ajoute que la contrainte à l’embauche porte atteinte à la liberté de choix professionnel et à la liberté des employeurs en matière d’embauche sur la base de la garantie du droit de propriété, en application des articles 15 et 23 (1) de la Constitution, ainsi qu’au droit à l’égalité garanti par l’article 11 de la Constitution, car elle correspond à une discrimination injuste à l’égard des travailleurs non membres d’un syndicat. En outre, la contrainte à l’embauche peut également, selon les circonstances de l’affaire, constituer une infraction pénale en vertu des articles 283 (intimidation), 314 (entraves à des activités économiques) et 324 (coercition) de la loi pénale. Le gouvernement indique qu’en janvier 2024 des responsables syndicaux qui avaient entravé des activités de construction pour revendiquer l’embauche de membres du syndicat ont été condamnés à un an d’emprisonnement assorti d’un travail obligatoire et que, en juin 2016, 15 responsables de la KCTU qui avaient recouru à la menace pour exiger l’embauche de membres syndiqués ont eux aussi été condamnés à une peine d’emprisonnement assortie d’un travail obligatoire. En 2024, les tribunaux ont continué à condamner les auteurs d’actes tels que la tenue de rassemblements et l’obstruction de l’accès aux sites pour obtenir l’embauche de membres du syndicat et ont confirmé l’imposition d’amendes administratives à cet égard, considérant que ces actes constituaient une pression ou une coercition injuste en matière d’emploi, en violation de la loi: (décision du tribunal de district de Suwon dans la division d’Ansan (2023Gwa61), datée du 1er février 2024 et décision (2023Gwa41), datée du 2 février 2024; de même que décision du tribunal de district de Suwon dans la division de Yeoju (2024Gwa10204), datée du 5 juin 2024).
  18. 633. En ce qui concerne l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle le ministère public et les tribunaux ont qualifié de «communication préjudiciable» équivalant à une infraction de coercition des actions collectives légitimes, telle que la dénonciation de violations de la loi sur la sécurité et la santé au travail, le gouvernement indique que la Cour suprême coréenne a estimé que quand bien même la «communication préjudiciable» est utilisée comme un moyen d’exercer des droits légitimes, si la méthode d’exercice de ces droits dépasse les limites ou la portée de ce qui est acceptable d’après les normes sociales, la qualification d’infraction de coercition peut être retenue. Il précise que le KCWU commet une infraction de coercition aux termes de l’article 324 de la loi pénale non seulement lorsqu’il émet l’idée de déposer plainte et d’organiser un rassemblement ou parle d’inculpation pénale pour violation de la loi, mais aussi lorsqu’il évoque des «préjudices» spécifiques afin d’amener l’autre partie à accomplir – par crainte de subir des «préjudices» de la part du KCWU – un acte non obligatoire, tel que le recrutement de membres du syndicat, l’utilisation des machines de construction du syndicat ou la signature d’un accord prévoyant le versement d’un salaire aux responsables syndicaux à temps plein et la contribution à des fonds d’aide sociale. Comme le fait valoir le gouvernement, les tribunaux coréens ont estimé que des déclarations faites par les responsables du KCWU au cours du processus de négociation collective – indiquant qu’ils porteraient plainte contre le chantier pour infraction à la loi sur la sécurité et la santé au travail, qu’ils organiseraient de manière ininterrompue un rassemblement avec le plus grand nombre de personnes possible (jusqu’à 800 ou 1 000 personnes sur le chantier), qu’ils feraient tomber le responsable du chantier si les choses tournaient mal, ou encore qu’ils organiseraient un rassemblement devant le chantier et porteraient plainte pour faire entrave aux travaux de construction – constituaient des actes d’intimidation. Les tribunaux ont également considéré que l’objectif principal de ces déclarations était de faire pression pour que des membres du syndicat soient embauchés, alors que l’entreprise victime était uniquement tenue de coopérer aux fins de soutenir l’emploi et qu’elle n’avait aucune obligation légale d’embaucher des membres du syndicat, de sorte que la dénonciation d’un tel préjudice ne constituait pas une méthode acceptable d’exercice des droits selon les normes sociales. La contrainte à l’embauche d’un membre syndiqué ne saurait passer pour une activité syndicale légitime, car elle peut difficilement être considérée comme relevant de la négociation collective. Pour ces motifs, la Haute Cour de Séoul a déclaré les responsables coupables d’extorsion et de coercition dans l’action intentée par Junkyung Tower Crane Services (décision 2016 no 1781 en date du 31 mai 2017). Le gouvernement affirme sur cette base que la contrainte exercée par le KCWU pour pousser au recrutement de ses membres dépasse le cadre de la négociation collective légitime et ne saurait être considérée comme une activité syndicale légitime, et que l’application de lois et sanctions pénales en matière de coercition pour pression sur des employeurs, rassemblement et dénonciation de violations de la loi sur la sécurité et la santé au travail dans le but de faire embaucher ses membres est sans rapport avec l’application dans le pays des conventions de l’OIT sur la liberté syndicale et le droit à la négociation collective.
  19. 634. Dans sa dernière communication, le gouvernement indique que l’examen des chantiers de construction mené par le ministère de l’Emploi et du Travail a révélé que les syndicats ont déposé 40 requêtes civiles contre des entreprises de construction pour violation de la loi sur la sécurité et la santé au travail et de la loi sur la conservation de la pureté de l’air au cours d’une période de trois mois. Selon le gouvernement, une fois que les syndicats ont trouvé un accord avec l’employeur pour l’embauche de certains de leurs membres, ils retirèrent les plaintes civiles. Dans certains cas, les syndicats ont été soupçonnés de déposer des plaintes civiles dans le but d’exiger l’embauche de leurs membres.
  20. 635. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle le gouvernement a fait porter ses efforts sur l’interdiction des dispositions relatives aux congés payés dans les conventions collectives en qualifiant les demandes de congés payés de délits d’extorsion, le gouvernement renvoie à la définition visée à l’article 24 de la TULRAA et indique que, étant donné que le dispositif des congés payés permet à des travailleurs de percevoir des salaires tout en se consacrant entièrement à des activités syndicales sans remplir leurs obligations professionnelles contractuelles, le fait qu’une personne sans contrat de travail conclut un tel contrat dans le seul but de percevoir un salaire au titre de congés payés constituerait une manipulation du système juridique et serait contraire à l’esprit du dispositif. Le gouvernement ajoute à cet égard que la NLRC a statué en faveur des entreprises de construction dans dix cas soumis par le KCWU qui portaient sur des demandes de réparation dans le cadre de pratique déloyale de travail pour non-paiement de salaires à des travailleurs en congé. Dans ces cas, la NLRC a jugé que l’arrêt de paiement des salaires aux travailleurs en congé, qui étaient des responsables syndicaux du secteur de la construction, ne constituait pas une pratique déloyale de domination et d’ingérence, car il n’y avait là aucune intention de se livrer à des pratiques de travail déloyales.
  21. 636. En réponse au rejet par les organisations plaignantes de l’hypothèse des autorités selon laquelle les demandes d’embauche de membres du syndicat visaient en fait l’obtention de congés payés, le gouvernement déclare que, au vu d’articles de presse et de décisions de justice, le KCWU a bien exigé l’embauche de membres syndiqués auprès d’entreprises de construction, l’octroi de sommes d’argent et de biens en guise de rémunérations pour des responsables syndicaux à temps plein, le versement de cotisations mensuelles, ainsi qu’un fonds de développement pour le syndicat. Le gouvernement cite une décision du tribunal de district de Daejeon dans la division de Nonsan (2023GoDan293), datée du 25 août 2023, selon laquelle les défendeurs ont menacé les victimes dans le but de leur extorquer des concessions pour compenser le fait qu’elles ne recrutaient pas leurs membres syndiqués, exigeant d’elles qu’elles signent une convention collective, augmentent le nombre d’heures de travail ou prolongent la durée des paiements à la place de l’embauche de leurs membres, payent des frais de convention collective et contribuent au fonds de développement du syndicat. Par conséquent, les victimes ont été contraintes de signer une convention collective sur les salaires, qui imposait des versements à hauteur de 3 millions de wons au titre de salaires pour congés payés et de 200 000 wons au titre de prestations sociales pour non-recrutement de membres syndiqués.
  22. 637. De surcroît, le gouvernement mentionne l’existence de cas dans lesquels des membres de bandes criminelles, se faisant passer pour des syndicalistes, ont menacé des entreprises de construction et leur ont extorqué des biens et de l’argent. Il fait valoir que les tactiques illicites consistant à exiger de l’argent et des biens prétendument au titre de rémunérations pour congés payés et de fonds de développement du syndicat ne relèvent pas du soutien autorisé aux syndicats dans le cadre juridique actuel, et il confirme que les tribunaux ont tenu le KCWU responsable de ces pratiques, les qualifiant d’infractions graves. Les tribunaux ont déclaré que ces actes se traduisaient non seulement par une augmentation des coûts de construction, mais également par une qualité de construction inférieure aux normes, ce qui était préjudiciable à la société. Selon le gouvernement, entre septembre et novembre 2023, le ministère de l’Emploi et des Affaires sociales a mené une inspection du travail planifiée sur la gestion de l’aide aux congés payés et aux frais de fonctionnement auprès de 202 lieux de travail, dont des organisations publiques, qui a révélé que 109 de ces lieux étaient en infraction avec les lois applicables; 94 d’entre eux ont rectifié leurs pratiques et les 15 autres ont reçu des ordonnances correctives en janvier 2024. En 2024, les médias ont continué à signaler des cas d’extorsion par des «syndicats fantômes» sur des sites de construction, ce qui a conduit à la poursuite et à la condamnation de membres et de responsables du KCWU et de la KCTU. Le gouvernement indique que, lorsque le paiement illégal de salaires à des responsables syndicaux à temps plein ou le paiement illégal de cotisations mensuelles ont été sanctionnés, l’extorsion s’est produite sous le nouveau couvert de l’inflation des salaires pour les heures supplémentaires. Par exemple, les médias ont signalé un cas où, sur un chantier de construction à Ulsan, quatre grutiers affiliés au FKTU et à la KCTU ont reçu jusqu’à six fois la rémunération des heures supplémentaires qui auraient dû être payées pour les heures supplémentaires travaillées.
  23. 638. Le gouvernement rappelle qu’il a apporté des modifications à la TULRAA en 2021, en supprimant l’interdiction et les peines criminelles liées au paiement de salaires pour les responsables syndicaux à temps plein, ainsi que les interdictions et les sanctions pénales relatives aux actions syndicales qui revendiquaient le versement de salaires aux responsables syndicaux à temps plein et des heures de congé dépassant la limite prévue. De plus, la TULRAA protège désormais plus activement les droits des syndicats, en qualifiant de pratique de travail déloyale toute action qui limite les activités légitimes des travailleurs percevant des congés payés ou qui vise à leur porter préjudice pour l’exercice de ces activités. Le gouvernement souligne toutefois que le KCWU a fait pression sur des entreprises de construction en perturbant des activités sur des sites de construction et qu’il a revendiqué le paiement de salaires au titre de congés payés et de fonds de développement pour le syndicat pour compenser le non-recrutement de membres du syndicat – des pratiques non conformes à l’article 24 de la TULRAA. Le gouvernement indique en outre que, entre septembre et novembre 2023, il a mené des inspections du travail sur 202 lieux de travail en rapport avec cette question et a émis des ordonnances correctives concernant 109 lieux de travail. Ces ordonnances ont été respectées dans 107 lieux de travail, tandis que deux faisaient l’objet d’une enquête pour accusations pénales et non-respect des ordonnances correctives.
  24. 639. En réponse à l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle, le 9 mars 2023, le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et des Transports a adressé un mémorandum aux entreprises de construction leur demandant de signaler les actes répréhensibles présumés des syndicats, en utilisant des termes désobligeants à propos d’un responsable du KCWU qui laissaient entendre qu’il devait être dénoncé, le gouvernement indique que la communication en question ne faisait pas partie du document officiel; elle figurait dans un texto envoyé depuis un téléphone portable par un responsable du ministère, qui visait à encourager le signalement des activités illégales sur les chantiers de construction, car à l’époque les activités illégales étaient rarement signalées par crainte de perturbations plus importantes. Dans sa dernière communication, le gouvernement indique que, grâce aux efforts qu’il a déployés, les activités illégales sur les chantiers de construction sont en baisse, bien qu’il y ait encore des cas sur certains lieux de travail, comme le montre une enquête de situation menée par le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et des Transports en mars 2024, qui a révélé 285 cas d’actes illégaux commis par des syndicats dans 45 entreprises, dont la plupart concernaient des demandes de paiement de cotisations syndicales mensuelles.
  25. 640. En ce qui concerne les mesures de répression spéciale menée par la police contre des activités illégales organisées sur les chantiers de construction, la portée de cette opération, les promotions promises aux agents y participant et la chute de 15 pour cent des effectifs du KCWU pendant la période de répression, le gouvernement indique que les enquêtes ont été réalisées conformément à la loi et que rien ne prouve que la baisse des effectifs syndicaux y soit liée; il ajoute qu’il ne dispose pas encore des données nécessaires pour confirmer cette baisse. Le gouvernement rappelle que des activités syndicales telles que la revendication de l’embauche de membres du syndicat, l’utilisation exclusive de machines appartenant à des membres affiliés, l’octroi de congés payés et le versement d’un fonds d’aide sociale, assorties de la menace de «préjudices» spécifiques au point de susciter la peur, ne sont pas des activités syndicales légitimes et sont constitutives d’infractions telles que l’intimidation, l’extorsion et la coercition. Les enquêtes concernant des membres du KCWU s’inscrivaient dans le cadre de la répression visant des activités illégales organisées, telles que des extorsions et des agressions sur des chantiers de construction, en particulier des activités liées aux revendications du KCWU en matière d’embauche de ses membres. Ces enquêtes ont été menées en application de la loi indépendamment des organisations et groupes concernés, et elles n’avaient pas pour but de détruire les syndicats. En novembre 2023, les 144 personnes inculpées à la suite de ces enquêtes ont été reconnues coupables en première instance. Parmi elles, 49 ont été condamnées à des peines de prison allant de dix mois à deux ans et six mois, assorties d’un travail obligatoire, 88 ont bénéficié d’une mise à l’épreuve et 7 ont été condamnées à une amende. Le gouvernement ajoute que, en 2024, des opérations spéciales de répression ont été menées par la police du 29 juillet au 31 octobre et qu’elles ont porté non seulement sur les actes de violence, mais aussi sur la corruption dans le secteur de la construction, comme la mauvaise construction et la sous-traitance illégale. En août 2024, l’opération avait permis d’ouvrir 140 dossiers impliquant 685 personnes. Ces affaires comprennent 59 cas d’extorsion et de violence impliquant 215 personnes et 81 cas de corruption impliquant 470 personnes. Dans ce contexte, 288 personnes ont été déférées au parquet, dont deux individus en garde à vue, et 316 personnes faisaient encore l’objet d’une enquête au 10 septembre 2024.
  26. 641. Le gouvernement confirme que des postes au titre de promotion spéciale ont été attribués aux agents de police ayant participé aux répressions, précisant que les activités ciblées étaient des problèmes graves qui suscitaient de longue date une vive inquiétude de la part du public ainsi que des appels à l’action. C’est pourquoi l’Agence nationale de la police a tenu compte de facteurs tels que l’opinion publique, l’ampleur et la complexité des cas examinés ou encore la taille des organisations impliquées lors de l’attribution de ces promotions. Le gouvernement ajoute que le système de notation mentionné par le KCWU n’est qu’une norme interne servant à évaluer le niveau de difficulté et l’importance de l’enquête, rejetant ainsi l’allégation selon laquelle les promotions ont été utilisées comme un moyen de réprimer le syndicat.
  27. 642. En conclusion, le gouvernement fait part de sa ferme volonté d’éradiquer les activités illégales et les pratiques déloyales sur les chantiers de construction, par une application équitable de la loi dans les cadres juridiques établis; il précise que toutes ses procédures d’application se sont révélées à la fois nécessaires, justifiées et conformes à ses obligations au titre des conventions nos 87 et 98 et demande que la plainte soit rejetée.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 643. Le comité note que les allégations en l’espèce portent sur les points suivants: i) la question de savoir si l’accès à l’emploi des membres des syndicats des travailleurs de la construction est un sujet légitime de négociation collective; ii) la limitation de certaines activités de la branche des équipements de construction du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KCWU) par l’application du droit de la concurrence; et iii) l’imposition de sanctions administratives et pénales suite à des accusations de coercition, d’intimidation et d’extorsion en rapport avec certaines activités des affiliés du KCWU, telles que des revendications présentées à l’employeur portant sur l’accès à l’emploi pour des membres syndiqués, les congés payés et la création d’un fonds de développement syndical, ainsi que des actions collectives à l’appui de ces revendications et la dénonciation de violations de la loi sur la sécurité et la santé au travail en tant que moyen de pression sur l’employeur au cours des négociations. Le comité note que le premier point, en l’occurrence la question de savoir si l’accès à l’emploi des membres syndiqués peut relever de la négociation collective, est l’aspect central qui sous-tend toutes les autres allégations en l’espèce.
  2. 644. Le comité note l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle le KCWU, en tant que syndicat de métier organisant diverses catégories de travailleurs qualifiés dans une industrie caractérisée par l’intermittence de l’emploi, s’attache à obtenir davantage d’opportunités d’emploi pour ses membres par voie de négociations avec les employeurs. Les organisations plaignantes ajoutent que, étant donné que les employeurs du secteur ont tendance à refuser d’embaucher des membres syndiqués, il devient pour ainsi dire vital pour les syndicats de garantir l’emploi de leurs membres par la négociation collective, faute de quoi ils risquent de perdre leurs affiliés et d’avoir du mal à survivre. Elles allèguent que les syndicats de manutentionnaires, qui opèrent sur un marché du travail analogue à celui de l’industrie de la construction en termes d’intermittence de l’emploi, sont autorisés à revendiquer l’embauche de leurs membres dans le cadre de la négociation collective. En revanche, dans les affaires concernant le KCWU, les procureurs et les tribunaux coréens ne considèrent pas les demandes d’emploi de syndicalistes comme des revendications appropriées dans le cadre de la négociation collective, car elles ne concernent pas les conditions de travail et empiètent sur les droits de gestion des employeurs. Le comité note que les organisations plaignantes font spécifiquement référence à la «négociation au niveau du site», alléguant que, étant donné que les dispositions relatives à la sécurité syndicale sont proscrites dans les conventions collectives, le seul moyen dont disposent les syndicats de la construction de garantir les droits syndicaux est d’assurer l’embauche de leurs membres par voie de négociations au niveau du site. Il note de surcroît que les organisations plaignantes soulignent que le litige ne porte pas sur la mise en place d’un système de sécurité syndicale, puisque la demande du syndicat n’était pas d’employer uniquement des membres du syndicat ou de conclure une convention d’exclusivité syndicale, et que des modalités telles que le nombre et les procédures d’emploi ainsi que la responsabilité du syndicat en matière de compétences pouvaient faire l’objet de discussions entre les travailleurs et la direction dans le cadre de négociations collectives. En résumé, les organisations plaignantes allèguent qu’en considérant que la demande du KCWU d’embaucher des membres du syndicat était illégale, le gouvernement coréen et les autorités judiciaires ont fixé unilatéralement la portée des questions négociables dans la négociation collective, en violation de l’article 4 de la convention no 98.
  3. 645. Le comité note que le gouvernement confirme à cet égard que, de son point de vue, conformément aux règles du droit national, les questions liées à l’embauche, qui sont traitées avant l’établissement du contrat de travail, ne concernent pas les conditions de travail mais le droit de gestion du personnel, qui revient exclusivement aux employeurs, et qu’elles relèvent du droit inhérent de l’employeur de gérer et d’exercer les droits de propriété garantis par la Constitution; par conséquent, ces questions ne s’inscrivent pas dans le cadre d’une négociation collective en vertu de la loi sur les syndicats et l’administration des relations professionnelles (Trade Unions and Labour Relations Adjustment Act, TULRAA). Le gouvernement renvoie également à des décisions de justice exprimant cette position en ce qui concerne la question de faire droit aux demandes des syndicats de la construction en matière d’embauche (décision 2017NO316 du tribunal de district d’Ulsan en date du 8 juin 2017 et décision 2016NO1781 de la Haute Cour de Séoul en date du 31 mai 2017, toutes deux confirmées par la Cour suprême). Néanmoins, le comité note que le gouvernement confirme que la Fédération coréenne des syndicats des travailleurs portuaires et des transports (KFPTWU), un syndicat de manutentionnaires, peut tenir des négociations collectives sur l’emploi de ses membres, mais qu’il qualifie sa situation d’exceptionnelle, précisant que la KFPTWU est titulaire d’une autorisation d’activités de fourniture de main-d’œuvre délivrée par le ministère de l’Emploi et du Travail conformément à l’article 33 de la loi sur la sécurité de l’emploi. Le comité note en outre les indications du gouvernement concernant les problèmes de corruption liés au monopole de la fourniture de main-d’œuvre et la prudence dont il fait preuve dans la délivrance d’autorisations d’opérer en tant qu’entreprise de fourniture de main-d’œuvre. Le comité note également que, selon le gouvernement, les quatre branches du KCWU participent régulièrement à des négociations collectives avec les employeurs sur des questions telles que les salaires.
  4. 646. Le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle, de ce qu’il comprend, les organisations plaignantes allèguent que le KCWU devrait pouvoir exiger l’embauche de ses membres par voie de négociation collective sous la forme d’une convention d’exclusivité syndicale; il note également le rejet de cette allégation par le gouvernement, qui précise que le système juridique coréen n’autorise pas les conventions d’exclusivité syndicale, sauf dans les cas limités visés à l’article 81 (1) de la TULRAA. Le comité note que cette disposition prévoit ce qui suit:
    • 1) Les employeurs ne doivent pas se livrer à l’un des actes suivants (ci-après dénommés pratiques déloyales de travail): [...] 2. L’embauche d’un travailleur à la condition qu’il ne s’affilie pas à un syndicat ou qu’il s’en retire, ou à la condition qu’il s’affilie à un syndicat particulier, pour autant que, lorsqu’un syndicat représente 2/3 ou plus des travailleurs employés dans l’établissement concerné, la conclusion d’une convention collective en vertu de laquelle une personne est employée à condition qu’elle s’affilie au syndicat soit autorisée à titre exceptionnel [...].
  5. 647. Le comité note cependant une divergence entre le point de vue du gouvernement concernant la demande des organisations plaignantes et la déclaration de ces dernières selon laquelle la demande du syndicat n’était pas d’embaucher uniquement des membres du syndicat, mais seulement que le gouvernement veille à ce que ces demandes d’embauche soit traitées dans le cadre d’une négociation collective autonome entre la direction et les travailleurs – compte tenu de la structure de l’emploi et des caractéristiques des chantiers de construction, où l’emploi à court terme est prédominant –, et qu’il s’efforce de mettre en place les réglementations et institutions nécessaires au soutien à des négociations collectives autonomes en la matière. Le comité note en outre que les organisations plaignantes et le gouvernement font tous deux référence aux tensions et aux conflits liés au recrutement sur les chantiers de construction, mais que si les organisations plaignantes considèrent que les affrontements qui éclatent sur les chantiers entre les travailleurs et la direction sont dus au blocage de la négociation collective – susceptible de servir d’exutoire aux tensions –, le gouvernement considère quant à lui que le fait de ne pas restreindre le champ de la négociation collective conduit à une inefficacité criante et à des conflits permanents entre les travailleurs et la direction et indique qu’il a créé l’Équipe spéciale pour l’éradication des activités illégales sur les sites de construction afin de cerner les problèmes et de les résoudre.
  6. 648. Au vu des allégations des organisations plaignantes et de la réponse qui leur a été faite par le gouvernement, le comité note que si, au moins dans le cas des syndicats de manutentionnaires, la négociation collective sur l’accès à des opportunités d’emploi est autorisée en République de Corée, le gouvernement ne juge pas approprié d’autoriser l’élargissement de cette pratique à l’industrie de la construction et se montre déterminé à ne reconnaître aucune négociation collective ni aucun accord entre les syndicats et les employeurs sur cette question dans le secteur de la construction. Le comité rappelle à cet égard qu’il a toujours considéré qu’il «revient aux parties de déterminer les questions à négocier» et que «les mesures prises unilatéralement par les autorités pour restreindre l’étendue des sujets négociables sont souvent incompatibles avec la convention no 98; des discussions tripartites visant à élaborer sur une base volontaire des lignes directrices en matière de négociation collective constituent une méthode particulièrement appropriée pour y remédier». [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1289 et 1290.] Le comité prie donc le gouvernement de prendre des mesures pour engager des consultations avec les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs de l’industrie de la construction pour répondre aux préoccupations concernant l’instabilité de l’emploi dans le secteur et préviendrait les conflits liés au recrutement sur les chantiers de construction. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise à cet égard.
  7. 649. En ce qui concerne les restrictions imposées aux activités de la division des équipements de construction du KCWU dans le cadre de l’application de la loi sur la réglementation des monopoles et les pratiques commerciales loyales (FTA), le comité note l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle les membres de cette division, tels que les conducteurs de camions à benne, les conducteurs de bétonnières et les opérateurs d’excavateurs, sont des travailleurs et sont impliqués de longue date dans des activités syndicales. Cependant, la Commission des pratiques commerciales loyales (FTC) les considère comme des entités commerciales – ce qui fait du syndicat une association commerciale relevant de la FTA – et a lancé des enquêtes sur le syndicat dans le cadre de huit cas, sur la base d’allégations de violations de la FTA. Les organisations plaignantes allèguent que, dans deux de ces cas, des activités telles que la fixation de lignes directrices pour les négociations salariales avec les employeurs, le lancement de négociations sur les salaires et les tarifs de location conformément à ces lignes directrices, et l’établissement de directives pour prévenir la détérioration des conditions de travail causée par une concurrence exacerbée entre les membres ont été qualifiées d’entente sur les prix et de limitation de la concurrence, et que des protestations contre un sous-traitant qui avait résilié unilatéralement des contrats d’embauche de membres syndiqués ont été qualifiées d’actes visant à forcer un tiers à refuser une transaction. Les organisations plaignantes déclarent que qualifier cette branche d’entité commerciale au sens de la FTA reviendrait à nier ses droits fondamentaux en matière de travail, en particulier les droits à la négociation collective et à l’action collective. En outre, des activités syndicales courantes visant à faire en sorte que les membres se conforment à des normes fixées en interne seraient considérées comme des violations de la FTA.
  8. 650. Le comité note à cet égard que, selon le gouvernement, une organisation peut être à la fois un syndicat et une association commerciale et relever tant de la TULRAA que de la FTA. D’après le gouvernement, dans les cas concernant la division des équipements de construction du KCWU, la FTC a appliqué les critères de la FTA de manière cohérente, puisque les membres qui composent les organisations concernées sont enregistrés en tant qu’entreprises de fabrication de machines de construction. Le gouvernement indique également que la FTC a rendu une décision concluant qu’il était malaisé de déterminer si l’association commerciale en question était un syndicat au sens de la TULRAA, mais que, même si les membres de l’association commerciale étaient des travailleurs occupant des types d’emploi spécifiques (travailleurs indépendants économiquement dépendants) et si l’association présentait certaines caractéristiques d’un syndicat, cela n’excluait pas qu’ils relèvent de la FTA. Le comité note le renvoi du gouvernement à l’article 116 (1) de la FTA, qui exclut l’application de la FTA aux actes légitimes respectant les exigences de procédure et de fond fixées par la législation du travail, ainsi que l’indication selon laquelle, dans les cas concernant la division des équipements de construction, la FTA a été appliquée à des actes tels que l’exclusion déloyale de concurrents ou la restriction de la concurrence, qui ne pouvaient être considérés comme constituant une convention collective légitime ou un conflit du travail relevant de la législation du travail, mais qui représentaient des infractions générales sans lien avec les activités légitimes d’un syndicat.
  9. 651. Le comité note les précisions apportées par le gouvernement concernant l’affaire qui a donné lieu à l’ordonnance corrective de la FTC adressée à la section locale du KCWU à Ulleung (cas 2021Gusa1312), la section locale d’Ulleung ayant dressé une liste de prix unitaires pour la location de machines de construction et l’ayant envoyée unilatéralement aux entreprises locales de construction et au bureau du gouvernement du comté d’Ulleung dans le but de déclencher une hausse abusive du prix du marché des machines de construction. Selon le gouvernement, les caractéristiques de ce cas et la situation n’avaient aucun lien avec l’exercice des droits en matière de négociation collective, étant donné que le syndicat et les entreprises locales de construction n’avaient pas entamé de négociations collectives. Le comité note également les informations fournies par le gouvernement au sujet de trois cas concernant la branche régionale des équipements de construction à Busan, selon lesquelles le syndicat a organisé un rassemblement sur des sites de construction et a suspendu le transport du béton prêt à l’emploi, exigeant que les entreprises de construction cessent de traiter avec les loueurs non affiliés. Le gouvernement indique que les entreprises ont fait droit à cette revendication en raison du fort impact de l’action organisée par le syndicat. Le comité note que le gouvernement considère qu’en imposant sa revendication le syndicat a potentiellement limité la concurrence sur le marché de la location de machines de construction dans la région et que non seulement il s’est employé à entraver les activités de construction en arrêtant le transport du béton prêt à l’emploi, en cessant l’exploitation de machines de construction et en organisant des rassemblements sur le site, mais qu’en outre il n’a pas respecté les procédures minimales, telles que la médiation, imposées par la TULRAA. Partant, ses actes ne pouvaient être considérés comme une activité syndicale légitime ou un conflit du travail ni justifier l’application de l’article 116 (1) de la FTA.
  10. 652. Le comité rappelle qu’il a précédemment examiné des cas concernant la reconnaissance de la liberté syndicale et des droits de négociation collective d’organisations de conducteurs de camion indépendants en République de Corée. [Voir le cas n° 3439, 405e rapport, paragr. 510 à 565, et le cas n° 2602, 359e rapport, paragr. 342 à 370.] Plus récemment, lors de l’examen du cas n° 3439 en mars 2024, le comité a prié instamment le gouvernement «de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que tous les travailleurs, y compris les “travailleurs indépendants”, comme les conducteurs de véhicules de transport de charges lourdes, peuvent jouir pleinement des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective [...] en vue de promouvoir et de défendre leurs intérêts». [Voir 405e rapport, paragr. 565 a).] Le comité note que, d’après les informations fournies par les organisations plaignantes et le gouvernement, dans les trois cas portés à la connaissance de la FTC concernant la branche régionale du KCWU à Busan qui s’occupe des équipements de construction (cas 2020Busa1323, 2021Busa1173, 2021Busa1625), le syndicat a organisé une action collective, avec des rassemblements sur les sites de construction et un arrêt de travail, qui a abouti à un accord entre le syndicat et les entreprises du secteur de la construction. Il note également que, si d’après les organisations plaignantes la mobilisation a été déclenchée par la résiliation unilatérale, par un sous-traitant, d’un accord antérieur avec des membres du syndicat, le gouvernement fait savoir que le syndicat demandait que les entreprises de construction cessent de traiter avec des loueurs non affiliés. Il note que dans cette affaire la FTC a infligé une pénalité de 100 millions de wons sud-coréens (72 000 dollars des États-Unis) au syndicat.
  11. 653. Le comité note à cet égard que, selon les indications du gouvernement, la FTC a précisé dans l’une de ses décisions qu’il était malaisé de déterminer si «l’association commerciale en question» était un syndicat au sens de la TULRAA. Il note également l’indication du gouvernement selon laquelle, si l’association en question est un syndicat et si elle mène des actions légitimes en vertu de la TULRAA, ces actions ne relèvent pas de la loi sur les pratiques commerciales loyales en tant «qu’actions légitimes en vertu d’autres lois» (article 116 (1) de la FTA). Il note de surcroît que l’application de l’article susmentionné peut potentiellement résoudre la question du conflit entre, d’une part, la FTA et, d’autre part, la liberté syndicale et les droits de négociation collective des syndicats qui sont également qualifiés «d’associations commerciales», à condition que le statut syndical des organisations de travailleurs indépendants soit reconnu sans équivoque et que les termes «négociation collective légitime» et «action syndicale légitime» soient interprétés conformément aux principes de la liberté syndicale et de la reconnaissance effective du droit à la négociation collective. Le comité note qu’en l’espèce, étant donné que le statut syndical de la division des équipements de construction du KCWU n’a pas été clairement établi et que l’action collective visait à soutenir un accord entre le syndicat et les employeurs concernant l’accès à l’emploi qui, selon le gouvernement, ne relève pas de la négociation collective légitime, les droits du défendeur à la négociation collective et à l’action collective n’ont pas été considérés comme pertinents.
  12. 654. Compte tenu de ce qui précède, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que la FTC, lorsqu’elle enquête et se prononce sur la conduite des représentants des branches de la division des équipements de construction du KCWU, ne s’ingère pas dans des activités syndicales légitimes. Le comité s’attend à ce que l’établissement de lignes directrices pour la négociation collective établisse un cadre clair pour l’exercice de la liberté syndicale et la reconnaissance effective du droit de négociation collective.
  13. 655. Le comité note les allégations des organisations plaignantes concernant la répression policière à l’encontre du KCWU et l’imposition de sanctions administratives et pénales aux membres du syndicat, suite à des accusations de coercition, d’intimidation et d’extorsion dans le cadre de l’exercice des droits à l’action collective et à la négociation collective et de la revendication de congés payés et d’autres fonds adressée à l’employeur. Le comité note également l’indication du gouvernement selon laquelle une autre opération de répression policière a été menée en 2024, qui visait les actes d’extorsion et de violence sur les chantiers de construction, ainsi que les activités illégales des employeurs telles que la mauvaise construction et la sous-traitance illégale, et, en août 2024, cette opération de police avait conduit à l’ouverture de 140 dossiers. En ce qui concerne les sanctions administratives (amendes) infligées en vertu de la loi sur les pratiques d’embauche équitables, le comité note que, selon les indications des organisations plaignantes, le président de la branche régionale des grues à tour du KCWU à Daejeon (Chungcheong) a reçu une amende de 15 millions de wons, parce que le syndicat avait organisé un rassemblement devant un chantier de construction pour protester contre la révocation unilatérale d’un accord conclu avec une entreprise de location de grues à tour, qui avait accepté d’embaucher des membres du syndicat pour travailler sur des grues à tour installées sur le chantier. Le comité note l’indication du gouvernement concernant le même cas, selon laquelle le KCWU et la Fédération des syndicats coréens (FKTU) avaient demandé à l’entreprise de location de grues à tour d’embaucher leurs membres, et non le membre d’une autre branche de la FKTU, et avaient réussi à contraindre l’entreprise à accepter leurs revendications en organisant un rassemblement et en suspendant pendant trois jours l’exploitation des grues à tour sur plusieurs chantiers de construction. Le gouvernement précise que les représentants de la branche concernée du KCWU et de la FKTU ont été condamnés à une amende et qu’ils ont fait appel de la décision. Le comité note que, d’après les indications du gouvernement, le tribunal de première instance a rejeté l’argument selon lequel l’acte du défendeur pouvait se justifier en tant qu’exercice légitime du droit à l’action collective, étant donné que «l’ordre d’arrêt de travail et la demande de recrutement ne visaient pas à améliorer les conditions de travail». Il note en outre que, dans ce cas également, l’accès à l’emploi n’ayant pas été considéré comme une question relevant du champ de la négociation collective légitime, une action collective visant à soutenir une telle demande a été qualifiée d’acte illégal de coercition.
  14. 656. Le comité note le renvoi des organisations plaignantes à la condamnation de responsables de la division des grutiers pour coercition (article 324 de la loi pénale) par la Haute Cour de Séoul le 31 mai 2017, pour avoir demandé l’embauche de membres du syndicat, dénoncé des violations de la loi sur la sécurité et la santé au travail et organisé un rassemblement à l’appui de cette demande. Il note également les indications du gouvernement à cet égard, selon lesquelles l’objectif principal de ces déclarations était de faire pression pour que des membres du syndicat soient embauchés, alors que l’entreprise victime était seulement tenue de coopérer aux fins de soutenir l’emploi et qu’elle n’avait aucune obligation légale d’embaucher des membres du syndicat. La contrainte à l’embauche d’un membre syndiqué ne saurait passer pour une activité syndicale légitime, car elle peut difficilement être considérée comme relevant de la négociation collective. Le comité note également l’indication du gouvernement selon laquelle, après que les syndicats ont conclu un accord avec l’employeur pour l’embauche de certains de leurs membres, ils retirèrent leurs plaintes civiles déposées pour violation de la loi sur la sécurité et la santé au travail et de la loi sur la conservation de l’air pur, et que, par conséquent, les syndicats sont soupçonnés d’avoir déposé des plaintes civiles dans le but d’exiger l’embauche de leurs membres.
  15. 657. En ce qui concerne les «mesures de répression spéciale menée par la police» entre janvier et août 2023, le comité note avec préoccupation les allégations de convocation de 1 700 membres du KCWU accusés de coercition et d’intimidation, et en particulier «d’extorsion» pour avoir demandé ou reçu des salaires au titre de congés payés (465 enquêtes). Il note l’indication du gouvernement à cet égard selon laquelle, en novembre 2023, les 144 personnes inculpées à la suite des enquêtes menées dans le cadre de la répression contre des «activités illégales sur les sites de construction» ont été reconnues coupables en première instance; 49 d’entre elles ont été condamnées à des peines de prison allant de dix mois à deux ans et six mois, assorties d’un travail obligatoire, 88 ont bénéficié d’une mise à l’épreuve et 7 ont été condamnées à une amende. Le comité déplore que, dans ce contexte, M. Hoe-dong Yang, un syndicaliste qui faisait l’objet d’une enquête pour extorsion et intimidation, se soit donné la mort par auto-immolation le 1er mai 2023.
  16. 658. Le comité note l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle des délégués syndicaux ont fait l’objet de poursuites pour avoir demandé l’embauche de syndicalistes, la négociation avec des entreprises de construction et l’octroi de congés payés conformément aux conventions collectives conclues, et la réponse du gouvernement selon laquelle des activités syndicales telles que la revendication de l’embauche de membres du syndicat, l’utilisation exclusive de machines appartenant à des membres affiliés, l’octroi de congés payés et le versement d’un fonds d’aide sociale, assorties de la menace de «préjudices» spécifiques au point de susciter la peur, ne sont pas des activités syndicales légitimes et sont constitutives d’infractions telles que l’intimidation, l’extorsion et la coercition. Il note également l’indication du gouvernement selon laquelle les tribunaux coréens ont estimé que des déclarations de responsables du KCWU au cours du processus de négociation collective – indiquant qu’ils porteraient plainte contre le chantier pour infraction à la loi sur la sécurité et la santé au travail, qu’ils organiseraient de manière ininterrompue un rassemblement avec le plus grand nombre de personnes possible (jusqu’à 800 ou 1 000 personnes sur le chantier), qu’ils feraient tomber le responsable du chantier si les choses tournaient mal, ou encore qu’ils organiseraient un rassemblement devant le chantier et porteraient plainte pour faire entrave aux travaux de construction – constituaient des actes d’intimidation. Il note en outre l’indication du gouvernement selon laquelle les enquêtes portant sur des membres du KCWU s’inscrivaient dans le cadre de la répression visant «des activités illégales organisées, telles que des extorsions et des agressions sur des chantiers de construction», en particulier des activités liées aux revendications du KCWU en matière d’embauche de ses membres, et que dans certains cas des membres de bandes criminelles, se faisant passer pour des syndicalistes, ont menacé des entreprises de construction et leur ont extorqué des biens et de l’argent. Enfin, le comité note que le gouvernement indique que, à la suite d’inspections menées en septembre-novembre 2023, des ordonnances correctives ont été émises à l’encontre de 109 lieux de travail en ce qui concerne les dispositions relatives aux congés syndicaux payés.
  17. 659. En ce qui concerne les accusations d’extorsion liées à la demande de salaires au titre de congés payés, le comité note le renvoi du gouvernement à une décision du tribunal de district de Daejeon dans la division de Nonsan (2023GoDan293), en date du 25 août 2023, indiquant que «les défendeurs ont menacé les victimes dans le but de leur extorquer des concessions pour compenser le fait qu’elles ne recrutaient pas leurs membres syndiqués, exigeant d’elles qu’elles signent une convention collective, augmentent le nombre d’heures de travail ou prolongent la durée des paiements à la place de l’embauche de leurs membres, payent des frais de convention collective et contribuent au fonds de développement du syndicat. Par conséquent, les victimes ont été contraintes de signer une convention collective sur les salaires, qui imposait des versements à hauteur de 3 millions de wons au titre de salaires pour congés payés et de 200 000 wons au titre de prestations sociales pour non-recrutement de membres syndiqués.» Le comité note avec préoccupation que ce passage semble ériger en infraction le fait de revendiquer le paiement de salaires aux responsables syndicaux à temps plein pendant des négociations collectives. Il note également l’indication du gouvernement selon laquelle le fait qu’une personne sans contrat de travail conclut un tel contrat dans le seul but de percevoir un salaire au titre de congés payés constituerait une manipulation du système juridique et serait contraire à l’esprit du dispositif des congés payés. Il note en outre que, dans leur communication du 12 septembre 2023, les organisations plaignantes rejettent l’hypothèse des autorités selon laquelle les demandes d’embauche de membres du syndicat visaient en fait l’obtention de congés payés, hypothèse qu’elles considèrent trompeuse, car l’octroi de congés payés fait l’objet d’un accord commun entre l’employeur et le syndicat dans le cadre du processus de négociation. Le comité rappelle à cet égard que, dans le cas no 1865 concernant la République de Corée, le gouvernement avait également indiqué qu’en vertu de la TULRAA un délégué syndical à plein temps était un délégué syndical employé par une entreprise; ainsi, si un dirigeant syndical n’était pas employé par une entreprise responsable du chantier, il ne pouvait pas lui demander de le considérer comme un délégué syndical à plein temps. À l’époque, le comité avait exprimé sa profonde préoccupation quant au fait que le «défraiement d’activités» en faveur de délégués syndicaux à plein temps, qui semblait découler de négociations volontaires, puisse être considéré comme un acte délictueux et il avait estimé «qu’une entreprise principale sur un chantier de construction devrait pouvoir reconnaître volontairement un travailleur sur ce chantier en tant que délégué syndical à plein temps même si ce travailleur ne travaille pas directement pour cette entreprise». [Voir 340e rapport, paragr. 773 et 776.] Le comité note par ailleurs que, selon le gouvernement, les tactiques illicites consistant à exiger de l’argent et des biens prétendument au titre de salaires pour congés payés et de fonds de développement du syndicat ne relèvent pas du soutien autorisé aux syndicats dans le cadre juridique actuel, mais que le gouvernement ne fournit pas plus de détails sur ces «tactiques illicites». Le gouvernement confirme en outre que les tribunaux ont tenu le KCWU responsable de ces pratiques, les qualifiant d’infractions graves sans toutefois expliquer les circonstances permettant de les qualifier comme telles, hormis le fait qu’elles étaient liées à des demandes d’emploi de membres du syndicat.
  18. 660. Le comité rappelle que «[l]a question du paiement d’un salaire par l’employeur aux permanents syndicaux devrait être tranchée par les parties et le gouvernement devrait autoriser la négociation sur la question de savoir si les activités syndicales des permanents devraient être considérées comme s’inscrivant dans le cadre d’un congé sans traitement.» [Voir Compilation, paragr. 1296.] Il note qu’en l’espèce les efforts du gouvernement visant à interdire la négociation collective sur l’accès à l’emploi dans l’industrie de la construction ont abouti à la criminalisation des tentatives de présenter des demandes de négociation à cet effet. Il note également que même des revendications distinctes, portant par exemple sur les congés payés ou la création de fonds de développement syndical, semblent avoir été érigées en infraction parce qu’elles étaient liées à des demandes d’embauche de membres du syndicat.
  19. 661. En ce qui concerne le fait que le gouvernement a qualifié de tactique de négociation les demandes du syndicat faites à l’employeur, lors de la négociation collective, d’accepter d’embaucher de sa propre initiative des membres du syndicat, faute de quoi ses violations de la loi sur la sécurité et la santé au travail seraient signalées aux autorités, et le fait que les tribunaux ont qualifié ces demandes de «communication préjudiciable» ou de menaces constitutives d’une infraction de coercition, le comité rappelle qu’il a déjà considéré, dans un autre cas concernant la République de Corée, que «le fait de dénoncer aux autorités compétentes des mesures d’hygiène et de sécurité insuffisantes constitue une action syndicale légitime en même temps qu’un droit des travailleurs qui doit être garanti par la loi». [Voir le cas no 1865, 340e rapport, paragr. 774.] Le comité note en outre que, dans le même contexte de négociation avec l’employeur, des déclarations de représentants syndicaux indiquant qu’ils auraient recours à une action collective ont été considérées comme une communication préjudiciable et que, dans nombre des cas invoqués en l’espèce, les actions collectives et les arrêts de travail organisés à l’appui de revendications d’accès à l’emploi pour des membres du syndicat ont été qualifiés d’activités constitutives d’une infraction de coercition. Si le comité note comme il se doit que le gouvernement a qualifié de menaces constitutives de l’infraction de coercition d’autres déclarations, telles que celle selon laquelle le responsable du chantier tomberait si les choses tournaient mal, il considère que les activités syndicales légitimes mentionnées ci-dessus ne devraient pas être traitées de la même manière. Il rappelle à cet égard que «le comité a signalé le danger que représentent pour le libre exercice des droits syndicaux des inculpations prononcées à l’encontre de représentants de travailleurs dans le cadre d’activités liées à la défense des intérêts de leurs mandants». [Voir Compilation, paragr. 154.] Compte tenu de ce qui précède, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que nul ne soit arrêté, poursuivi ou condamné pour avoir organisé une action collective pacifique pour négocier ses revendications, comme dans le présent cas, ou pour avoir affirmé que les manquements en matière de sécurité et de santé au travail seraient dénoncés.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 662. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures pour engager des consultations avec les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs de l’industrie de la construction pour répondre aux préoccupations concernant l’instabilité de l’emploi dans le secteur et préviendrait les conflits liés au recrutement sur les chantiers de construction. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise à cet égard.
    • b) Le comité prie le gouvernement de veiller à ce que la Commission des pratiques commerciales loyales (FTC), lorsqu’elle enquête et se prononce sur la conduite des représentants des branches de la division des équipements de construction du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KCWU), ne s’ingère pas dans des activités syndicales légitimes. Le comité s’attend à ce que l’établissement de lignes directrices pour la négociation collective établissent un cadre clair pour l’exercice de la liberté syndicale et de la reconnaissance effective du droit de négociation collective.
    • c) Le comité prie le gouvernement de veiller à ce que nul ne soit arrêté, poursuivi ou condamné pour avoir organisé une action collective pacifique pour négocier ses revendications, comme dans le présent cas, ou pour avoir affirmé que les manquements en matière de sécurité et de santé au travail seraient dénoncés.
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