National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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1. La commission a pris note du rapport très complet et détaillé du gouvernement pour la période se terminant le 30 juin 1992, qui transmet des commentaires relatifs à l'application de la convention émanant de l'Union générale des travailleurs (UGT) et de la Confédération syndicale des commissions ouvrières (CC.OO.). Elle est particulièrement reconnaissante au gouvernement d'avoir fourni des réponses substantielles et précises à ses commentaires antérieurs, ainsi qu'aux points soulevés par les deux organisations syndicales.
2. La commission note les données statistiques et les analyses détaillées relatives à l'évolution de la population active, de l'emploi, du sous-emploi et du chômage qui portent sur les années 1990 et 1991. Complétées, pour 1992, par les données figurant dans les études de l'OCDE, ces informations font état de la persistance d'une situation préoccupante de l'emploi, caractérisée notamment par le maintien d'un niveau élevé de chômage. A la vive croissance de l'économie enregistrée au cours de la période antérieure a succédé, depuis 1990, un ralentissement de l'activité qui s'est encore accentué depuis le début de 1992, et qui a défavorablement affecté la création d'emplois. Malgré une plus faible croissance de la population active, le taux de chômage, qui s'était stabilisé à 16,3 pour cent en 1990 et 1991, a repris sa progression et était estimé à près de 18 pour cent en 1992. La situation de l'emploi reste caractérisée par d'importantes disparités entre les régions, les sexes et les groupes d'âge, qui continuent d'être affectés très inégalement par le chômage et le sous-emploi. La dispersion régionale du chômage demeure considérable, avec des taux variant entre 10 pour cent (La Rioja) et 26 pour cent (Andalousie). La baisse des taux de chômage des femmes et des jeunes au cours de la période s'est accompagnée d'une montée du chômage des hommes appartenant aux groupes d'âge de plus forte activité. En outre, la progression de l'emploi temporaire, qui représente désormais plus du tiers de l'emploi total, témoigne de la confirmation d'une tendance à la précarisation de l'emploi déjà relevée par la commission. L'UGT et les CC.OO. se déclarent préoccupées par les données sur l'évolution de l'emploi et du chômage, et soulignent, notamment, les effets pernicieux du développement de la précarité non seulement pour les travailleurs mais aussi pour l'économie nationale.
3. Le gouvernement indique qu'afin de lutter plus efficacement contre cette progression du chômage qui affecte particulièrement certaines catégories de la population active, il a procédé à l'unification et à la rationalisation de l'ensemble des dispositifs publics d'incitation à l'embauche. Il mentionne à cet égard l'adoption de la loi no 22/1992 du 30 juillet 1992 relative aux mesures d'urgence de promotion de l'emploi et de protection du chômage, dont les dispositions visent, notamment, à renforcer les mesures actives d'incitation à l'embauche à temps complet et pour une durée indéterminée des chômeurs ayant des difficultés particulières d'insertion dans le marché du travail, tels que les jeunes, les travailleurs âgés, les femmes et les chômeurs de longue durée. Afin d'éviter que ces mesures soient détournées de leur objectif, le bénéfice de l'incitation est subordonné à la création nette d'emplois par l'entreprise, qui doit également s'engager à maintenir le niveau d'emploi pendant trois ans. En outre, la durée minimum des contrats de promotion de l'emploi passe de six à douze mois et les contrats d'insertion ou de formation à temps complet cessent d'emporter exonération ou réduction de la cotisation patronale à la sécurité sociale. Le gouvernement fait par ailleurs état de la poursuite d'autres programmes de promotion de l'emploi, tels que notamment les programmes spéciaux d'emploi dans le secteur public et le Plan d'emploi rural. Il se réfère également au Plan national de formation et d'insertion professionnelle dont les actions prioritaires portent désormais sur la formation pour l'emploi des jeunes en échec scolaire, des chômeurs de longue durée et des femmes peu qualifiées.
4. L'UGT et les CC.OO. présentent un ensemble d'allégations portant notamment sur les dispositions et les circonstances de l'adoption du décret-loi no 1/1992 du 3 avril 1992 relatif aux mesures d'urgence de promotion de l'emploi et de protection du chômage. La commission a examiné celles de ces allégations qui portent sur les conditions d'ouverture du droit aux prestations de chômage et les modalités de leur calcul au regard des dispositions pertinentes de la convention no 102, et renvoie à ses commentaires sur l'application de cette convention. Elle relève toutefois que, s'agissant des circonstances entraînant l'extinction ou la réduction du droit à ces prestations, les CC.OO. estiment que la nouvelle définition de l'emploi convenable donne à la notion une extension excessive susceptible de recevoir, en pratique, une application contraire à l'objectif de libre choix de l'emploi tel qu'il est défini par l'article 1, paragraphe 2 c), de la convention. Le gouvernement déclare pour sa part que cette définition reste, pour l'essentiel, inchangée et répond à la nécessité de réserver le bénéfice de la protection au seul chômage temporaire et involontaire. La commission invite le gouvernement à fournir des informations sur la mise en oeuvre de cette disposition en relation avec le principe de libre choix de l'emploi.
5. Les deux organisations font également grief au gouvernement d'avoir, par ce même décret-loi, supprimé la possibilité qui était offerte aux chômeurs souhaitant créer leur propre entreprise de percevoir leurs indemnités de chômage sous la forme d'un capital. Elles estiment qu'il est ainsi revenu sur une importante mesure de promotion de l'emploi indépendant. Le gouvernement justifie cette suppression par sa préoccupation de réviser régulièrement les différents programmes de promotion de l'emploi en tenant compte des résultats qu'ils ont permis d'atteindre. Il indique qu'en l'espèce la proportion élevée d'abandons rapides des activités entreprises grâce à cette mesure a suffisamment démontré son inefficacité et précise que de nouveaux instruments de promotion de l'emploi indépendant sont à l'étude. Rappelant à toutes fins utiles les conclusions concernant l'emploi indépendant adoptées par la Conférence (77e session, juin 1990), la commission saurait gré au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur toute nouvelle mesure adoptée à cet effet.
6. Plus généralement, l'UGT estime que le décret-loi no 1/1992 consacre une régression par rapport à l'objectif de promotion d'une politique active de l'emploi au sens de l'article 1 de la convention. Selon elle, l'emploi est considéré comme une variable résiduelle, et le marché du travail supporte le coût des ajustements structurels. La centrale syndicale fait observer que la part des dépenses consacrées aux mesures actives demeure relativement faible par rapport à la plupart des autres pays d'Europe, surtout si on la pondère avec le taux de chômage. Elle conclut à la nécessité d'une réorientation de la politique de l'emploi, la flexibilité accrue du marché du travail n'ayant pas eu les effets positifs escomptés sur la création d'emplois. Le gouvernement souligne, de son côté, que les nouvelles dispositions visent à mieux garantir l'insertion des intéressés sur le marché du travail et à s'assurer qu'il ne soit pas recouru aux différents programmes dans le seul but de réduire les coûts de main-d'oeuvre. Il indique qu'une part importante des contrats temporaires assortis de mesures d'incitation donnent lieu à leur transformation en contrats à durée indéterminée ou à leur reconduction. La commission saurait gré au gouvernement de préciser dans quelle mesure les différents programmes contribuent à l'insertion effective et durable des bénéficiaires dans l'emploi. En outre, eu égard à la progression du chômage parmi les catégories de la population active qui ne sont pas visées par les mesures d'incitation à l'embauche, elle prie le gouvernement d'indiquer par quelle méthode il entend s'assurer que ces mesures ne conduisent pas à une redistribution des emplois existants entre les différents groupes d'actifs plutôt qu'à la création de nouveaux emplois.
7. Par ailleurs, de l'avis de l'UGT et des CC.OO., le recours du gouvernement à la procédure inhabituelle du décret-loi pour adopter ces mesures témoignerait de sa volonté d'échapper tant au dialogue tripartite préalable requis par l'article 3 de la convention qu'au nécessaire débat démocratique. Le gouvernement estime qu'il a satisfait à cette dernière exigence en soumettant le décret-loi au Parlement, selon la procédure qui a conduit à l'adoption de la loi no 22/1992 du 30 juillet 1992. Il précise en outre qu'il n'a dû recourir à une procédure d'urgence qu'en raison du rejet par les organisations de travailleurs de sa proposition de juin 1991 d'ouvrir une vaste négociation tendant à réviser l'ensemble des modalités d'embauche, des ordonnances du travail, des systèmes de protection du chômage et de formation professionnelle, en vue de la conclusion d'un "pacte social de progrès" avec les partenaires sociaux. La commission ne peut qu'exprimer sa préoccupation quant aux difficultés que semble rencontrer l'établissement d'un dialogue tripartite au sujet des mesures de politique de l'emploi. Elle note à cet égard la récente institution du Conseil économique et social et saurait gré au gouvernement d'indiquer si cette institution a été saisie de questions relatives à la politique de l'emploi, ou s'il est envisagé qu'elle le soit.
8. Enfin, la commission rappelle qu'aux termes de l'article 2 les mesures à adopter en vue d'atteindre ces objectifs doivent s'inscrire "dans le cadre d'une politique économique et sociale coordonnée". Afin de lui permettre d'apprécier l'effet donné à cette disposition fondamentale de la convention, la commission saurait gré au gouvernement d'inclure dans ses prochains rapports les informations requises à cet égard par le formulaire de rapport.