National Legislation on Labour and Social Rights
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Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Obligation d’effectuer des heures supplémentaires sous la menace d’une peine. Dans son observation précédente, la commission a rappelé qu’aux fins de la convention l’expression «travail forcé ou obligatoire» désigne tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de son plein gré. Elle a noté que, selon les allégations de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA), dans certains cas, des travailleurs du secteur public qui refusent de faire des heures supplémentaires en plus de leur journée ordinaire de travail peuvent perdre leur emploi et, dans le secteur privé, des entreprises fixent la rémunération par référence à un objectif de production, si bien que le travailleur se trouve dans l’obligation de travailler bien au-delà de la journée ordinaire de travail pour obtenir un salaire assurant sa subsistance. La commission a relevé que ces deux situations avaient pour dénominateur commun l’imposition d’un travail ou d’un service, et que le travailleur ne peut se «libérer» de cette situation qu’en quittant son emploi ou en étant licencié, le licenciement sanctionnant son refus. Le travailleur a théoriquement la possibilité de se soustraire à l’obligation de travailler au-delà de la journée ordinaire de travail mais, dans la pratique, il n’a pas réellement d’option, puisqu’il lui faut gagner au moins le salaire minimum ou conserver son emploi, ou les deux. La commission a considéré que, dans ces deux situations, le travail ou service est imposé sous la menace d’une peine et a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer le respect de la convention à cet égard.
La commission prend note du rapport détaillé du gouvernement, en réponse aux différentes questions soulevées par l’UNSITRAGUA et aux demandes qu’elle avait formulées, comme détaillées ci-après.
1. Secteur public: juges de paix – organisme judiciaire; Police civile nationale; entreprise municipale de l’eau (EMPAGUA) – municipalité de la capitale du Guatemala. a) Juges de paix. Selon l’UNSITRAGUA, «dans la plupart des communes du pays, il existe seulement un juge de paix, qui doit assurer un service 24 heures sur 24, tous les jours de l’année. Le personnel auxiliaire du juge doit assurer des permanences par rotation sous la forme d’heures supplémentaires s’ajoutant à la journée ordinaire de travail. Les permanences assurées les jours fériés, les samedis et les dimanches sont compensés en temps, mais celles qui sont assurées après la fin de la journée ordinaire de travail ne sont ni compensées en temps ni rémunérées. Le refus d’accomplir les permanences susvisées constitue une infraction qui peut être sanctionnée par le licenciement.» La commission a demandé au gouvernement de communiquer des informations sur le cas, cité à titre d’exemple par l’UNSITRAGUA, d’un travailleur licencié pour avoir refusé de travailler 24 heures sans interruption (affaire no 25-04, contre la Cour suprême de justice). La commission a également demandé des informations sur une autre affaire évoquée par l’UNSITRAGUA (affaire no 566-2003, contre le ministère de la Santé publique et de l’Assistance sociale), dans laquelle le travailleur avait été démis de ses fonctions pour avoir manqué trois journées de travail complètes le même mois. Dans ses attendus, la cinquième Chambre du travail et de la prévoyance sociale a considéré que, «de fait, le travailleur s’était placé dans une situation justifiant le licenciement puisqu’il n’était pas venu à son travail le 23 septembre 2001 et que, puisqu’il lui incombait de travailler 24 heures sans interruption ce jour-là, cette absence équivalait à une absence de trois journées de travail complètes». La commission note que, selon les informations données par le gouvernement dans son rapport, les deux affaires ne sont pas encore closes. La commission prie le gouvernement de communiquer copie des jugements définitifs prononcés.
b) Travailleurs d’EMPAGUA. Selon l’UNSITRAGUA, dans l’affaire concernant l’entreprise EMPAGUA, les travailleurs sont tenus de travailler 24 heures consécutives, suivies de 48 heures de repos, et cette organisation du travail permet d’éviter le paiement des heures effectuées en sus de la journée ordinaire de travail. Le refus de travailler suivant ces conditions peut donner lieu à un licenciement et à des poursuites pénales, compte tenu du statut de fonctionnaire public conféré à ces travailleurs. La commission a pris note des commentaires communiqués par le Syndicat des opérateurs des installations et puits de l’entreprise municipale de l’eau et ses annexes (SITOPGEMA). S’agissant des limites concernant la prestation d’heures supplémentaires et des conditions dans lesquelles ces heures s’effectuent, la commission renvoie aux observations qu’elle formule au titre de l’application de la convention (nº 1) sur la durée du travail (industrie), 1919. La commission renvoie également aux paragraphes 132 et 133 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour s’assurer que cette pratique ne relève en aucun cas du travail forcé ou obligatoire.
c) Police civile nationale. Selon l’UNSITRAGUA, les repos et congés des agents de la Police civile nationale sont, dans bien des cas, suspendus. Ils sont contraints de travailler par rotation en plus de la journée ordinaire de travail, sans rémunération et sous peine de sanctions – y compris pénales – en cas de refus. Dans les cas où une sanction autre que le licenciement est infligée, conformément aux règlements de l’institution, cette sanction empêche l’agent d’accéder ultérieurement à un poste plus élevé. Le gouvernement indique à ce propos que, selon l’accord ministériel no 301-97 portant «régime des congés, permissions et repos dans la police nationale», l’octroi de tous types de congés, permissions ou repos reste toujours subordonné aux nécessités du service, telles que déterminées par les agents responsables de leur administration. La commission prend également note du rapport de la sous-direction générale de la sécurité publique de la Police nationale du Guatemala relatif à la suspension des congés et permissions et à l’organisation des tours de service dans la police nationale, rapport communiqué par le gouvernement dans lequel il est indiqué que les congés, permissions et repos n’ont été suspendus qu’à des périodes déterminées (fêtes de fin d’année par exemple) ou dans des situations présentant un risque pour la sécurité publique, et que, dans tous les cas, le travail est organisé par tour de huit heures, suivi de huit heures de repos. Le gouvernement a également communiqué un rapport circonstancié reproduisant les dates auxquelles les congés et vacances ont été suspendus en 2004, 2005 et 2006.
La commission prend dûment note de ces informations. Sur la base de ces éléments, la commission exprime l’espoir que le gouvernement veillera à ce que, dans la pratique, quelle que soit l’organisation des heures de travail imposée par les nécessités du service, il ne soit pas recouru abusivement à une suspension des congés et repos qui pourrait aboutir à des pratiques pouvant relever du travail forcé.
d) Travailleurs de l’Etat (catégorie 029). Dans ses précédents commentaires, l’UNSITRAGUA a également évoqué la situation des travailleurs de l’Etat appartenant à la catégorie 029. Les conditions d’emploi des employés de l’Etat se définissent suivant la catégorie budgétaire à laquelle ceux-ci appartiennent. La catégorie 029 a été créée pour permettre d’engager du personnel professionnel et technique qualifié pour des prestations définies et temporaires, ces travailleurs ne bénéficiant pas du statut d’employés publics. Leurs contrats sont renouvelés tant que des crédits sont alloués pour cela, et ces travailleurs ne bénéficient pas des prestations reconnues de droit au personnel permanent. L’UNSITRAGUA a allégué que les travailleurs recrutés selon ce système ne perçoivent pas de rémunération pour le travail effectué au-delà de la journée de travail ordinaire, mais que tout refus de leur part de travailler en plus de cette journée ordinaire a une incidence sur l’évaluation de leurs performances et peut entraîner la rupture de leur contrat sans que la responsabilité de l’Etat ne soit engagée.
La commission avait pris note de la réponse du gouvernement selon laquelle «les personnes dont la prestation de services est financée par la ligne budgétaire 029 du budget général de la Nation ne sont pas dans une relation d’emploi mais sont liées par un contrat civil, si bien que ces personnes n’ont pas la qualité de travailleurs mais de prestataires de services». Dans son dernier rapport, le gouvernement précise que, en raison de ses caractéristiques particulières, ce contrat ne comporte pas de relation de dépendance et n’est pas sujet à des limitations d’horaire et que, de surcroît, il est exceptionnel, se distinguant par son caractère temporaire. La commission a fait observer que la convention s’applique quelle que soit la nature de la relation juridique et même en l’absence de toute relation juridique. En effet, la convention protège contre l’imposition de travail forcé dans toute relation de travail, y compris dans celle qui ne découle pas d’un contrat de travail. La commission relève en outre que les faits allégués se caractérisent par un recours indu à des contrats ayant pour objet d’assurer une charge de travail inhérente à des fonctions intrinsèquement permanentes et ce, de manière à éluder la protection prévue par la législation du travail. La commission exprime l’espoir que le gouvernement communiquera des informations sur les mesures prises ou envisagées afin de protéger cette catégorie de travailleurs contre l’imposition de travail obligatoire en dehors de la journée ordinaire de travail.
2. Secteur privé: Plantations. Dans ses précédentes observations, la commission a pris note des commentaires de l’UNSITRAGUA concernant le cas d’entreprises qui fixent à leurs travailleurs des objectifs de production tels que ceux-ci doivent, pour percevoir le salaire minimum, travailler au-delà des limites de la journée ordinaire de travail, ce temps de travail supplémentaire n’étant pas rémunéré. Selon l’UNSITRAGUA, «ces situations se rencontrent le plus fréquemment dans les exploitations qui produisent en tant que producteurs indépendants des bananes pour la multinationale fruitière américaine “Chiquita”, présentes sur la commune de Morales, département d’Izabal, et sur la côte sud du Guatemala». L’UNSITRAGUA cite en outre l’exemple des exploitations «El Real et El Atlántico, situées dans le district de Bogos, commune de Morales, département d’Izabal, où les exploitants refusent toute négociation si leur interlocuteur n’admet pas comme préalable que le travail à la pièce ne relève pas du régime de la journée de travail [ordinaire], au mépris des dispositions en vigueur». La commission a également pris note des rapports sur la responsabilité sociale de Chiquita Brands International selon lesquels, au Guatemala, «les travailleurs rémunérés à l’heure et les administrateurs travaillent parfois plus de 60 heures (par semaine)» et «les travailleurs dépassent le plafond fixé pour les heures supplémentaires».
La commission prend note de la réponse détaillée que le gouvernement apporte à ces questions dans son dernier rapport. S’agissant des exploitations El Real et El Atlántico, situées sur la commune de Morales, les syndicats de travailleurs des deux établissements, conseillés par la commission juridique de l’UNSITRAGUA, sont engagés depuis trois ans dans la négociation d’une convention collective sur les conditions de travail, et notamment la forme de rémunération, en s’appuyant sur les dispositions du Code du travail. Selon le gouvernement, dans la majorité des exploitations de production de bananes, il a été convenu de calculer la rémunération en s’appuyant sur des barèmes basés sur une rémunération à la pièce ou à la journée. Lorsque les travailleurs conviennent de faire des heures supplémentaires au-delà d’une journée de travail diurne de huit heures, d’une journée mixte de sept heures ou d’une période nocturne de six heures, ces heures supplémentaires sont rémunérées à un taux majoré de 50 pour cent. Le gouvernement indique également que la durée de la journée de travail s’applique quelle que soit la forme de paiement convenu entre les travailleurs et les employeurs. Il indique en outre que, dans le cas des exploitations El Real et El Atlántico, le salaire versé se situe aux alentours de 2 500 quetzales, le salaire minimum étant de 1 273,80 quetzales (1 dollar = 7,5 quetzales). La commission note avec intérêt qu’il a été créé une commission de suivi des conflits dans les exploitations de production de bananes. La commission a pris dûment note de ces informations et exprime l’espoir que le gouvernement continuera de fournir des informations sur les mesures prises pour garantir qu’il ne soit pas imposé de travail en sus de la journée ordinaire sous la menace d’un licenciement, dans le secteur des plantations. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les travaux menés par la commission de suivi des conflits dans les exploitations bananières.
Article 25. La commission prend note avec intérêt des statistiques communiquées par le gouvernement dans son rapport en ce qui concerne les plaintes enregistrées et considérées comme des plaintes pour travail forcé, alléguant le non-versement du salaire ou de la rétention de la rémunération des heures normales ou des heures supplémentaires. La commission exprime l’espoir que le gouvernement communiquera des informations sur l’issue de ces procédures, en précisant les sanctions infligées dans les cas où l’imposition d’un travail forcé aura été avérée.