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Caso individual (CAS) - Discusión: 2015, Publicación: 104ª reunión CIT (2015)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - Guatemala (Ratificación : 1952)

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 2015-Guatemala-C87-Fr

Un représentant gouvernemental a souligné les efforts constants du gouvernement en faveur de relations de travail respectueuses de la loi, du dialogue social, de l’engagement envers la promotion du travail décent et de la liberté syndicale. S’agissant des morts de syndicalistes, depuis la signature de la feuille de route adoptée le 17 octobre 2013 par le gouvernement en concertation avec les partenaires sociaux du pays pour accélérer la mise en œuvre du protocole d’accord conclu le 26 mars 2013 entre le président du groupe des travailleurs du Conseil d’administration du BIT et le gouvernement du Guatemala (feuille de route), de nombreux progrès ont été réalisés dans la mise en œuvre et le respect de la liberté syndicale, le renforcement du syndicalisme et la protection des dirigeants syndicaux. Le représentant spécial du Directeur général du BIT au Guatemala a participé et a été témoin des processus d’assistance technique destinée à dispenser une formation aux agents de l’organe judiciaire, du ministère public et du ministère de l’Intérieur. Ils sont le fruit d’un travail soutenu et d’un engagement politique et institutionnel. Tous les cas ont été transmis à l’Unité spéciale de contrôle des délits commis contre les syndicalistes, qui relève du ministère public, en vue d’améliorer le contrôle et l’élaboration des critères d’enquête. A été adoptée «l’instruction générale du ministère public sur la conduite effective d’enquêtes et de poursuites relatives aux infractions visant des syndicalistes et des membres d’organisations de travailleurs et d’autres défenseurs des droits au travail et des droits syndicaux»; cette instruction est appliquée; 70 cas font l’objet d’une enquête par le ministère public, et il ne faut pas oublier que le pays souffre d’un problème de criminalité et de violence qui affecte toute la population. Dans un souci d’efficacité et pour contribuer à résoudre les 58 cas de mort violente de syndicalistes dénoncés devant le Comité de la liberté syndicale, le ministère public et la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) ont signé un accord de coopération en septembre 2013 afin de renforcer les capacités d’enquête. Aux dires de la CICIG, dans seulement 37 cas sur 56 qu’elle a examinés, la victime était bien membre d’une organisation syndicale. Le mobile des crimes est en outre différent, et il semble que seulement six personnes aient été assassinées pour raisons syndicales; au sujet de ces personnes, on ne sait pas clairement si elles étaient liées à un syndicat; les procès sont en cours et les résultats seront communiqués en temps opportun. Qui plus est, est appliqué aussi aux syndicalistes le mécanisme du protocole pour la mise en œuvre de mesures de sécurité immédiates et préventives en faveur des défenseurs des droits de l’homme au Guatemala; 25 demandes de protection ont été présentées devant le ministère public. Le groupe de travail syndical de protection se réunit tous les mois avec toutes les organisations syndicales, et toutes les semaines avec les représentants des syndicats et les enquêteurs du ministère public pour donner suite aux activités d’investigation. Le ministère de l’Intérieur a inauguré une ligne téléphonique d’assistance directe et, surtout, une Commission de règlement des conflits en matière de liberté syndicale et de négociation collective soumis à l’OIT a été établie. Cette dernière examine les cas présentés devant le Comité de la liberté syndicale, et le gouvernement fournira des informations sur les progrès réalisés. S’agissant des questions législatives, le gouvernement a présenté des projets de réforme à la Commission tripartite sur les questions internationales du travail, et les partenaires sociaux ont présenté leurs propres propositions. Aucun accord n’ayant été conclu, les propositions ainsi que les commentaires de la commission d’experts ont été transmis au Congrès. Le gouvernement entend poursuivre, avec l’assistance du BIT, les efforts entrepris pour que la liberté syndicale et le droit de négociation collective soient respectés, raison pour laquelle il est demandé que la présence de l’OIT soit renforcée dans le pays.

Les membres employeurs ont déclaré que ce cas a été traité à de nombreuses reprises et est en cours d’évaluation par différents organes de l’OIT au travers de divers mécanismes. Ils estiment donc que, tant qu’il sera examiné par le Conseil d’administration, ce cas ne devrait pas être traité par la Commission de l’application des normes. Une procédure de plainte est en cours en vertu de l’article 26 de la Constitution devant le Conseil d’administration. Outre les plaintes déposées devant le Comité de la liberté syndicale, parmi lesquelles de nombreuses questions ont été considérées comme graves et urgentes en ce qui concerne la liberté syndicale et les droits des travailleurs. Ce cas comporte plusieurs éléments au nombre desquels, en premier lieu, les assassinats de syndicalistes qui affectent l’exercice serein de ces libertés. De nouveaux assassinats ont été dénoncés ces dernières années. Ce cas comporte également des éléments à caractère législatif tenant à l’application de la convention dans la pratique, à l’enregistrement des organisations syndicales et aux droits dans le secteur des maquilas. S’agissant des assassinats, 58 cas sont actuellement examinés par le Comité de la liberté syndicale, dont 12 depuis 2013. Au niveau national, on trouve, en plus du ministère public, un organisme international d’enquête, la CICIG, qui a analysé 37 cas, dont six sont liés à des activités syndicales. La CICIG a formulé des suggestions afin d’améliorer les méthodes d’enquête. La plupart des assassinats ont été commis dans des parties du pays où règne une grande violence, et on n’a pas constaté, du moins dans les éléments à l’examen, des pratiques d’extermination de syndicalistes. L’Unité spéciale de contrôle des délits commis contre les syndicalistes qui dépend du ministère public a été renforcée, et il existe un mécanisme de protection de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. Le gouvernement a pris des mesures. En outre, une mission de haut niveau de l’OIT s’est rendue dans le pays, tandis qu’a été mise en place une représentation du Directeur général du BIT chargée d’assurer un accompagnement direct et immédiat des modifications à la législation et à la pratique. On notera en particulier qu’une demande d’établissement d’une commission d’enquête a été adressée au Conseil d’administration. Les membres employeurs ont aussi attiré l’attention sur le fait que les mêmes allégations font l’objet d’un suivi de cette commission. Il y a lieu de définir quels sont les meilleurs mécanismes et les formes que doit prendre un examen adéquat de l’application des conventions et des réponses fournies par les gouvernements aux organes de contrôle. Du côté législatif, plusieurs éléments sont à mettre en exergue, comme par exemple le nombre d’affiliés requis pour constituer un syndicat et l’obligation d’être guatémaltèque et travailleur de l’entreprise pour être élu dirigeant syndical. Il faut que ces restrictions soient revues. En ce qui concerne la question de la nationalité, il faut comprendre qu’il y a des motifs de souveraineté nationale pour limiter l’accès des étrangers aux organes de direction des syndicats. Les membres employeurs ont expliqué en détail, lors de leur intervention sur la discussion générale du rapport de la commission d’experts, leur désaccord avec les vues de la commission d’experts au sujet de la convention no 87 et du droit de grève. De plus, ils ont souligné que, tant qu’il n’y aura pas une norme spécifique de l’OIT sur la grève, la portée et les conditions d’exercice du droit de grève devront être réglées à l’échelle nationale, position que le groupe gouvernemental a soulignée dans un document qu’il a présenté à la réunion tripartite de février 2015, et réaffirmée à la session de mars 2015 du Conseil d’administration. Les membres employeurs ont réaffirmé leur position pendant la discussion de la partie générale du rapport à savoir que, tant qu’il n’y aura pas une norme spécifique sur la grève, les gouvernements pourront, légitimement, suivre une approche différente au sujet de la grève, suivant sa détermination à l’échelle nationale. S’agissant de la feuille de route et de l’application de la convention dans la pratique, des institutions existent et fonctionnent, et le dialogue social doit prévaloir pour la recherche de solutions. Quant au secteur des maquilas, il existe deux organisations syndicales et des campagnes de sensibilisation, et des informations ont été demandées à propos de leur impact. En conclusion, ce cas, qui sera inscrit au programme de la prochaine session du Conseil d’administration (324e session, juin 2015) devra être solutionné par ce dernier et non par cette commission.

Pour les membres travailleurs, le Guatemala s’est distingué pour avoir été amené à comparaître devant cette commission à 21 occasions au cours des vingt-cinq dernières années. L’inclusion aussi fréquente du pays dans la liste de la commission tient au fait que le gouvernement s’est systématiquement abstenu de prendre des mesures correctives en répondant aux observations et conclusions émanant des mécanismes de contrôle de l’OIT en matière de liberté syndicale et de négociation collective. Dans de nombreux cas, le gouvernement a tout simplement choisi de ne pas répondre. Malgré la signature d’un protocole d’accord et l’engagement du gouvernement à respecter une feuille de route en matière de politique du travail, ainsi que l’envoi de missions techniques et d’une mission de haut niveau de l’OIT, les membres travailleurs constatent qu’aucun progrès substantiel n’a été accompli. S’agissant des droits syndicaux et des libertés civiles, les membres travailleurs déplorent le fait qu’aucune lumière n’ait été faite sur les cas de 74 syndicalistes assassinés au cours des dix dernières années, y compris les cas de 16 syndicalistes assassinés entre 2013 et 2014. L’analyse du rapport présenté par le gouvernement à la commission d’experts confirme qu’aucun des auteurs de ces crimes n’a jusqu’ici été arrêté. De même, aucun progrès n’a été accompli envers la construction d’un cadre normatif et institutionnel pour protéger les travailleurs contre les violations de leurs droits. Par ailleurs, aucune mesure concrète n’a été prise pour garantir le libre exercice de la liberté syndicale dans un climat où les dirigeants syndicaux et leurs familles sont à l’abri de toute violence, de pressions et de menaces. Le gouvernement n’a pas prêté l’attention suffisante aux droits humains des travailleurs. Au lieu de concentrer ses efforts dans le sens de dispositions positives visant à la réalisation de ses engagements auprès de l’OIT, il a adopté des mesures qui vont à l’encontre du travail décent et des droits des travailleurs. Ces mesures ont été imposées en dehors de toute consultation avec les syndicats, ce qui constitue une violation claire des conventions relatives à la négociation collective et à la liberté syndicale. En outre, l’annonce faite unilatéralement par le gouvernement du non-renouvellement des conventions collectives dans le secteur public contrevient à la convention no 87 et à la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Bien que le gouvernement impute cette mesure à la nécessité de faire face au déficit budgétaire, il ne peut refuser de négocier, ce qui constituerait une violation flagrante des conventions de l’OIT. S’agissant des problèmes graves de discrimination antisyndicale dans le secteur des maquilas, les obstacles juridiques, le manque d’inspections et la lenteur des tribunaux du travail expliquent en partie pourquoi seuls trois syndicats d’entreprise existent dans ce secteur qui emploie approximativement 70 000 travailleurs, et une seule convention collective. Dans la majorité des cas, le gouvernement n’a pas garanti la réintégration des travailleurs licenciés illégalement alors qu’il dispose d’instruments complémentaires qui lui auraient permis de révoquer les incitations fiscales et autres avantages concédés aux exportateurs. Ainsi, la discrimination antisyndicale persiste dans ce secteur, malgré les déclarations du gouvernement. S’agissant des problèmes d’ordre législatif, les membres travailleurs regrettent que les membres employeurs du Guatemala ne soient pas d’accord avec les observations de la commission d’experts. Ils expriment leur inquiétude qu’une telle position soit utilisée comme prétexte par le gouvernement pour s’abstenir de soumettre les propositions de loi au Congrès de la république. Il est indispensable que les réformes législatives permettent à l’Inspection générale du travail de remplir son mandat. En ce qui concerne l’enregistrement des organisations syndicales, les membres travailleurs soulignent que les juges et magistrats du travail reconnaissent eux-mêmes le nombre extrêmement élevé de cas de non-respect des sentences judiciaires relatifs aux résolutions qui obligent les employeurs à réintégrer les personnes licenciées pour avoir formé des syndicats. Les obligations en question n’ont à aucun moment été remplies, au contraire, les processus de sélection des magistrats de la Cour suprême de justice et de la cour d’appel démontrent très clairement l’absence totale d’indépendance judiciaire. Ces processus ne se déroulent pas conformément aux normes internationales, notamment quant à leur objectivité et leur transparence. En conclusion, les membres travailleurs sont d’avis que le gouvernement a failli à tous les engagements souscrits dans le cadre de la feuille de route et a affiché une indifférence continue face aux recommandations réitérées des organes de contrôle de l’OIT. D’autre part, le gouvernement a été traduit devant un panel d’arbitrage pour non-respect systématique de son propre Code du travail. Les membres travailleurs déplorent le fait que l’absence de progrès significatifs ne soit pas imputable à une insuffisance d’instruments ou de ressources, mais bien à un manque de volonté persistant de la part du gouvernement. Ils estiment positive la présence au Guatemala du représentant spécial du Directeur général du BIT et considèrent le soutien de la communauté internationale d’une importance inestimable compte tenu de la gravité de la situation des droits syndicaux.

Le membre employeur du Guatemala a remis en question le fait que le cas soit étudié par la commission alors que les faits à l’examen constituent la base de la plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, qui sera examinée à nouveau par le Conseil d’administration. Les engagements pris dans la feuille de route sont respectés. Les employeurs du pays ont participé activement aux instances tripartites, en particulier dans le cadre de l’élaboration d’un projet de loi visant à répondre aux demandes de la commission d’experts. Le projet devrait être soumis prochainement au Congrès. L’autre point sur lequel les employeurs œuvrent activement est la campagne de sensibilisation à la liberté syndicale. En ce qui concerne les actes de violence, les missions de l’OIT ont pu constater que le ministère public est déterminé à résoudre les cas mentionnés dans le rapport de la commission d’experts. Cela dit, il ne faut pas perdre de vue les informations fournies par la CICIG qui montrent que la plupart des crimes dont on affirme qu’ils sont des actes de violence antisyndicale ont en fait d’autres causes. Cela n’est pas une excuse pour que ces crimes restent impunis. Il faut faire la lumière et les sanctionner, et reconnaître que cette commission pourra difficilement résoudre les problèmes provoqués par la vague de criminalité qui touche le pays, car elle va au-delà du domaine du travail. Il convient de saluer les efforts qui sont déployés par le représentant spécial du directeur général et par la Commission de règlement des conflits soumis à l’OIT.

Le membre travailleur du Guatemala a salué la nomination d’un représentant du Directeur général du BIT dans le pays, dont le rôle est primordial. Les observations de la commission d’experts se fondent non seulement sur les sources habituelles, mais également sur les informations recueillies par les missions de l’OIT. Les membres de la dernière mission à s’être rendue dans le pays en mai 2015 ont pu constater que les problèmes soulevés par la commission d’experts persistent. La violation des droits de l’homme et des droits civils dans le pays reste un grand problème. Jusqu’à présent, nul n’a été mis en prison pour les assassinats commis, et la demande d’accord avec la CICIG aux fins d’enquête sur ces crimes est restée sans réponse. En ce qui concerne la feuille de route, il n’y a pas eu de changement important méritant d’être souligné puisque le gouvernement n’est pas encore parvenu à passer de l’adoption de mesures formelles à celle de mesures concrètes afin de protéger les syndicalistes. S’agissant de la réforme de la loi qui limite la liberté syndicale, il n’y a eu aucune avancée. Concernant l’enregistrement des syndicats, la situation ne s’est pas améliorée, et il serait souhaitable d’obtenir des informations statistiques sur les enregistrements effectués et les conventions collectives conclues. La Commission de règlement des conflits en matière de liberté syndicale et de négociation collective soumis à l’OIT n’a pas abordé ces sujets et a tout juste commencé à analyser quelques cas, sans réel progrès. La violation des droits du travail et des droits syndicaux est grave et de plus en plus intolérable. La feuille de route est une opportunité que le gouvernement n’a pas su saisir pour prendre des mesures vraiment importantes sur ce point. Ces engagements, qui impliquent des changements sociaux et institutionnels, passent par une réelle implication des travailleurs à la détermination des problèmes, ainsi qu’à l’élaboration de solutions, à leur application et à leur suivi. Les syndicats sont prêts à se réunir pour avancer en ce sens puisque la situation du travail ne permet absolument pas d’attendre.

La membre gouvernementale de Cuba, s’exprimant au nom du groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a déclaré que le gouvernement s’était présenté à six sessions du Conseil d’administration et à la réunion de cette commission pour traiter de ce cas. Le gouvernement a réaffirmé son engagement envers les organes de contrôle de l’OIT et a fourni des informations périodiques sur l’évolution de la situation et le renforcement institutionnel dans le pays. La commission d’experts a pris note des informations selon lesquelles le gouvernement prend toutes les mesures en son pouvoir pour lutter contre la violence et l’impunité. Un appel est lancé à tous les secteurs pour continuer à travailler de manière conjointe pour la mise en œuvre des mesures prises et des autres mesures qui seront convenues de manière tripartite à l’avenir. Le GRULAC est convaincu que les mandants continueront à prendre les mesures nécessaires pour l’application de la convention et appuie la demande visant à renforcer la présence de l’OIT dans le pays. Enfin, l’utilisation simultanée de plusieurs mécanismes pour traiter les mêmes allégations reste préoccupante dans la mesure où cela peut affaiblir le fonctionnement des organes de contrôle de l’OIT.

Le membre employeur du Panama a indiqué qu’il n’y a pas de raison à l’inscription de ce cas sur la liste de discussion, puisqu’une procédure en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT est en cours depuis 2012 pour l’examen des mêmes questions. Depuis le dépôt de la plainte, des mesures ont été prises qui ont produit des résultats concrets, à savoir la signature du protocole d’accord, la désignation d’un représentant spécial du Directeur général du BIT dans le pays, l’élaboration d’une feuille de route adoptée en octobre 2013, la création de la Commission de règlement des conflits en matière de liberté syndicale et de négociation collective soumis à l’OIT, et la visite de la mission de haut niveau en septembre 2014. Le gouvernement a démontré sa volonté de respecter les engagements de la feuille de route. Les efforts accomplis par l’OIT pour encourager la création d’instances de dialogue et permettre au pays de résoudre ses problèmes sont très importants et se sont révélés fructueux. Le Guatemala est le troisième pays d’Amérique latine à se soumettre de bonne foi à l’exercice consistant à abandonner la culture de confrontation au profit du dialogue social, et il a apporté la preuve qu’il s’efforçait d’atteindre cet objectif. L’examen de ce cas est donc en contradiction avec les objectifs de l’OIT, d’autant plus que les mêmes questions font l’objet d’un examen par le Conseil d’administration.

La membre gouvernementale de la Norvège, s’exprimant également au nom des membres gouvernementaux du Danemark, de la Finlande, de l’Islande et de la Suède, a dit que les syndicalistes ne devraient en aucun cas être victimes de harcèlement ou d’intimidations, et encore moins être assassinés. Tout en prenant note des informations communiquées par le gouvernement, l’oratrice s’est dite sérieusement préoccupée par les menaces qui continuent de peser sur les syndicalistes et par le peu d’avancées concrètes réalisées. Au cours de la discussion qui a eu lieu à la 323e session du Conseil d’administration (mars 2015) sur la plainte déposée au titre de l’article 26, les gouvernements des pays nordiques ont soutenu l’établissement d’une commission d’enquête. L’oratrice a demandé au gouvernement de respecter ses engagements quant aux libertés individuelles, à la participation citoyenne, aux principes du droit et à la protection juridique. Elle l’a instamment prié de prendre des mesures pour enquêter sur l’assassinat de syndicalistes et d’autres actes de violence, ainsi que pour poursuivre et condamner les auteurs de tels actes. Le gouvernement devrait rapidement prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la protection des dirigeants syndicaux et des syndicalistes. L’oratrice a instamment prié le gouvernement d’adopter les réformes nécessaires pour aligner la législation nationale sur la convention. Le Congrès national devrait adopter de toute urgence les réformes législatives demandées par la commission d’experts. Bien que l’OIT ait joué un rôle important dans la mise en œuvre du protocole d’accord, le gouvernement n’a pas suffisamment tiré parti de cet appui. L’oratrice a instamment prié le gouvernement de mieux donner suite à l’engagement pris en faveur de la feuille de route et du protocole d’accord, et l’a invité à renforcer et à élargir sa coopération avec le BIT et les partenaires sociaux.

Un observateur représentant l’Internationale des services publics (ISP) a indiqué que, dans l’état actuel des choses, les crimes commis contre des dirigeants syndicaux restent impunis. Plusieurs de ces dirigeants font l’objet de menaces et ont déposé des plaintes laissées sans suite. L’impunité qui règne dans l’administration publique alimente la corruption, le népotisme et la dépossession des prérogatives et droits collectifs des travailleurs. Les contrats de courte durée et le travail précaire, sans la moindre forme de protection sociale ou de prestations, sont les instruments de choix auxquels le gouvernement a recours pour tenir les travailleurs sous sa coupe. Les conventions collectives sont interdites au motif de la nécessité de mesures d’austérité pour faire face à un déficit budgétaire démesuré. Les principaux syndicats du pays sont visés par une campagne médiatique qui s’attaque également à la négociation collective. Le gouvernement refuse d’appliquer les conventions collectives qui ont été signées et de participer aux commissions paritaires. Les «syndicats jaunes» posent aussi gravement problème du fait qu’ils concluent des conventions collectives qui réduisent la protection des travailleurs. Le climat politique est de plus en plus volatil et a un impact considérable sur l’offre de services publics, sur les conditions de travail et les droits syndicaux. La prévention de la violence, une culture de paix et de dialogue, la démocratie et des services publics de qualité sont des éléments essentiels pour donner à ce pays l’avenir qu’il mérite. Pour ces motifs, il est demandé la constitution d’un groupe de dialogue tripartite pour le secteur public au sein du ministère du Travail et la création d’un bureau permanent de l’OIT au Guatemala.

Le membre gouvernemental du Honduras a indiqué que son gouvernement s’associe à la déclaration du GRULAC. Ce cas fait l’objet de discussions pour la septième fois depuis novembre 2012. Il convient de saluer la coopération qui a lieu en permanence entre le gouvernement et les organes de contrôle de l’OIT. Il veut croire en l’ouverture et la volonté de dialogue du gouvernement avec tous les partenaires sociaux, ainsi qu’en son engagement à poursuivre son action avec l’assistance du BIT. Le gouvernement est donc encouragé à continuer de s’employer à donner effet à la convention.

Le membre travailleur de la Colombie a indiqué qu’au Guatemala l’antisyndicalisme était systémique. Par conséquent, les mesures à adopter ne doivent pas se borner à la création de groupes de dialogue et à la promesse de changements sur le plan législatif. Il convient de mettre au point un plan ambitieux pour établir la liberté syndicale. Dans ce cas comme dans nul autre, l’OIT démontre son efficacité et son utilité. Au Guatemala, les syndicats font face à l’impunité et à la persistance d’un climat généralisé de violence. Les enquêtes menées en ce qui concerne les actes de violence ne rencontrent pas de progrès significatifs et les mesures de protection qui ont été prises sont loin d’être à la hauteur de la gravité des circonstances et, partant, inefficaces. La liberté syndicale se heurte à un blocage juridique et institutionnel, et la commission d’experts insiste pour que le gouvernement adopte des mesures visant à modifier le Code du travail. Les obstacles juridiques rendent impossible l’exercice des droits syndicaux, notamment le droit de grève qui est indissociable du droit d’organisation, protégé par la convention. Les organisations syndicales sont un exemple de résistance démocratique et manifestent massivement, indignées par la violence et la corruption. Les conclusions de la commission doivent aller plus loin que les préoccupations exprimées à plusieurs reprises et que les appels lancés de manière générale au gouvernement afin de l’inciter à accepter l’assistance technique du BIT. Elles doivent en outre fixer les éléments ainsi que le calendrier précis relatif à un plan destiné à dépasser les problèmes recensés lors de la discussion.

Le membre employeur du Honduras a indiqué qu’il paraît curieux que ce cas soit de nouveau examiné alors que les faits sont soumis à l’examen du Conseil d’administration en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Par conséquent, ce cas ne devrait pas être examiné au sein de la commission. Le gouvernement respecte les engagements pris envers le représentant du Directeur général du BIT, et ce cas devrait être considéré comme un excellent cas de progrès et où l’action du BIT est appropriée, objective et permanente. Toutes ces informations sont connues des organisations de travailleurs et d’employeurs avec lesquelles une collaboration est à l’œuvre pour améliorer l’environnement du travail. Il convient d’appuyer le fonctionnement de la Commission de règlement des conflits en matière de liberté syndicale et de négociation collective soumis à l’OIT, qui travaille de manière tripartite et fait part de bons résultats.

La membre gouvernementale de la Suisse a déclaré que les actes graves de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, notamment les cas présumés d’assassinats, sont très préoccupants. Elle s’associe aux remarques de la commission d’experts qui regrette la situation et le climat de violence et d’impunité qui continuent de prévaloir au Guatemala. De nouvelles allégations d’assassinats de syndicalistes ont surgi depuis l’adoption en octobre 2013 de la feuille de route pour la mise en œuvre du protocole d’accord entre le gouvernement et le groupe des travailleurs du Conseil d’administration du BIT. Dans ce contexte, elle constate les efforts du gouvernement, notamment la création de la Commission de règlement des conflits en matière de liberté syndicale et de négociation collective soumis à l’OIT, établie avec l’assistance du représentant spécial du Directeur général du BIT au Guatemala, et qui contribue à l’application de la convention dans la pratique. Elle s’associe également pleinement à la demande faite par la commission d’experts au gouvernement d’enquêter sans tarder sur toutes ces allégations de violence et de prendre rapidement les mesures qui s’imposent afin d’assurer une protection adéquate aux dirigeants syndicaux et syndicalistes. En conclusion, elle salue le renouvellement du mandat de la CICIG et le signal positif qui en émane.

La membre travailleuse de l’Espagne, s’exprimant également au nom de la Centrale des travailleurs de l’Argentine (CTA des travailleurs), de la Centrale des travailleurs de l’Argentine (CTA autonome) et de la Confédération générale du travail de la République argentine (CGT RA), a déclaré que, depuis la date à laquelle il a ratifié la convention, le Guatemala n’en a pas permis l’application effective. Le rapport de la commission d’experts fait état de faits extrêmement graves, que l’on déplore depuis de nombreuses années et dont le nombre ne fait qu’augmenter. Les actes de violence épouvantables commis à l’encontre de syndicalistes, de dirigeants d’organisations de la société civile et de paysans, dont 70 homicides, ont eu lieu en totale impunité. La liberté syndicale est un droit inhérent à toute société démocratique, et les libertés publiques, en particulier celles relatives à la vie humaine, sont une condition indispensable au respect de ce droit. Le non-respect de la liberté syndicale met en danger d’autres garanties citoyennes se rapportant au travail. La distance qui sépare les normes juridiques de la réalité du pays est dramatique. Le gouvernement doit respecter les conclusions de la présente commission. Se référant aux conclusions des missions ainsi que des organes de contrôle sur la situation du pays, on ne peut que constater l’absence de progrès, ce qui est très préoccupant. Les assassinats continuent à être perpétrés et les violations des libertés publiques sont systématiques. Il n’existe pas d’état de droit ni de démocratie dans le pays. L’action de l’Etat fait obstacle à la négociation collective, lequel Etat retarde l’homologation des conventions collectives et refuse la négociation collective dans le secteur des maquilas. Cette politique continue d’élimination syndicale est à mettre en relation avec l’impunité des actes commis par les forces étatiques ou non étatiques, et avec l’inefficacité de la justice, dans la mesure où pratiquement aucun assassinat de dirigeants syndicaux n’a été élucidé. Pour conclure, il est proposé qu’une mission spéciale permanente de l’OIT soit créée pour fournir des conseils, prendre des mesures et venir en aide au gouvernement, aussi bien dans le cadre de l’adoption de réformes juridiques que dans leur mise en œuvre.

La membre gouvernementale des Etats-Unis a déclaré que persistent au Guatemala de graves violations de la liberté syndicale, notamment des actes de violence contre des syndicalistes, la nécessité de réformer le Code du travail et le non-respect des droits syndicaux dans le secteur des maquilas. Bien que le gouvernement ait régulièrement informé les organes de contrôle de l’OIT de son intention de mettre la législation et la pratique en conformité avec les normes internationales, tant le rapport de la commission d’experts que celui du Conseil d’administration du BIT montrent qu’un tel but n’a pas été atteint. S’agissant des enquêtes et des poursuites judiciaires concernant les meurtres et les autres actes de violence commis à l’encontre de syndicalistes, des mesures complémentaires et urgentes sont nécessaires. Certaines mesures ont déjà été prises pour améliorer l’efficacité des enquêtes, mais il est nécessaire d’aller plus loin pour identifier et poursuivre les auteurs de ces violences et protéger les syndicalistes en danger. Le contrôle de l’application de la législation du travail relative à la liberté syndicale et au droit de négociation collective demeure insuffisant. Il est préoccupant de constater que le gouvernement continue de ne pas procéder aux enquêtes et de ne pas sanctionner les représailles antisyndicales. Des mesures doivent être prises à cet égard. Il est également nécessaire de faire exécuter les décisions de justice, en particulier les décisions relatives à des discriminations antisyndicales et des licenciements injustifiés dans lesquelles le tribunal a ordonné le paiement des arriérés de salaire et la réintégration du travailleur. L’absence de protection du droit des travailleurs de constituer des syndicats et de négocier collectivement a un effet négatif sur la syndicalisation, en particulier dans le secteur des maquilas dans lequel il existe seulement trois syndicats. L’oratrice a exhorté le gouvernement à entreprendre les efforts nécessaires pour s’attaquer de toute urgence à ces questions et à fournir des informations au BIT sur toute mesure prise à cet égard. Elle a déclaré attendre avec intérêt l’examen du rapport du gouvernement sur la mise en œuvre de la feuille de route de 2013 au Conseil d’administration du BIT lors de sa 324e session (juin 2015).

Le membre travailleur du Honduras a déclaré que les travailleurs ne bénéficient pas du droit d’organisation, garanti par la convention, en raison des mesures d’intimidation et de répression du gouvernement qui empêchent la création de syndicats. La convention permet le droit de grève, mais, au Guatemala, faire grève met en danger la vie des travailleurs et peut donner lieu à des menaces et des persécutions, autant de méthodes visant à intimider ceux qui osent exercer leurs droits. L’orateur a exprimé l’espoir que les différentes interventions au cours de cette session seront traduites en actes visant à assurer le respect de la liberté syndicale et du droit de grève, tel que prévu par la convention. L’assistance du BIT a été significative, mais le gouvernement ne s’est pas conformé à toutes les résolutions. L’orateur a exhorté l’OIT à mettre en œuvre des mécanismes garantissant de bonnes pratiques dans les entreprises qui permettent l’existence de syndicats et respectent les activités des dirigeants syndicaux. Le droit à la vie est le droit humain le plus sacré, et rien ne peut justifier que les dirigeants syndicaux, qui défendent le droit du travail et améliorent la vie des travailleurs, en soient privés.

Le membre employeur d’El Salvador a estimé que les graves actes de violence qui ont eu lieu au Guatemala et en El Salvador sont dus pour l’essentiel au manque de politiques de sécurité appropriées, et surtout au manque de coordination entre les divers organismes publics concernés – la police, les procureurs et la CICIG. Ces problèmes sont également dus au manque de qualification des juges, des inspecteurs de police et des procureurs, notamment en ce qui concerne les sciences et la technologie qui, en dépit des avancées réalisées ces dernières années, ne sont toujours pas utilisées à bon escient dans les pays d’Amérique centrale. Ainsi les laboratoires d’étude de l’ADN, n’était le manque d’expérience du personnel chargé de réunir les preuves, pourraient contribuer grandement à lutter contre l’impunité. D’après de récentes études, plus de 93 pour cent des crimes les plus graves commis en El Salvador, au Guatemala et au Honduras ne sont pas résolus par les autorités, ce qui explique le manque de crédibilité de la justice pénale. Tout comme les membres travailleurs, l’orateur s’est indigné que les cas d’homicides examinés ne soient toujours pas résolus. Les pays d’Amérique centrale doivent se doter de politiques de sécurité plus efficaces, et une plus grande coordination entre la police, les procureurs, les juges et la police scientifique est nécessaire pour que le système des poursuites fonctionne. C’est d’autant plus important que cela se répercute sur les investissements privés, et par conséquent sur la création d’emplois. Certes, il faut reconnaître que le cas des dirigeants syndicaux du Guatemala est un problème qui touche également les pays du nord de l’Amérique centrale. L’orateur a appuyé le point de vue exprimé par les membres employeurs qui estiment que le rapport soumis au Conseil d’administration est la preuve que les enquêtes progressent. Une plainte ayant déjà été déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT concernant ce cas et la commission de règlement des conflits obtenant des résultats positifs, ce cas devrait continuer à être traité par le Conseil d’administration et non par cette commission.

Le membre gouvernemental de la Belgique s’est déclaré inquiet du climat de violence qui règne dans le pays. Une vingtaine d’assassinats de syndicalistes ne sont toujours pas élucidés et la situation d’impunité persiste, comme le confirme le rapport de la CICIG adressé au BIT. De plus, les différentes annonces d’ordre législatif, telles que le protocole pour la mise en œuvre des mesures de sécurité, ne sont pas concrétisées par le gouvernement. Bien que ce cas soit à l’ordre du jour de la présente commission depuis plusieurs années, et malgré l’adoption de la feuille de route en 2013, rien ne permet de constater des progrès susceptibles de mettre un terme aux assassinats et d’assurer la fin des violences. Un assassinat de syndicaliste est un assassinat de trop, et un climat de violence ne permet pas l’existence d’un état de droit. Le gouvernement doit mettre en œuvre des mesures concrètes et déterminées pour assurer le respect de la convention, lesquelles feront l’objet d’un examen attentif lors de la prochaine session du Conseil d’administration en novembre 2015.

Le membre travailleur des Etats-Unis a indiqué que deux raisons expliquent pourquoi le présent cas devrait être examiné par cette commission: le nombre d’assassinats de syndicalistes dans le pays et le manque d’efficacité des gouvernements à appliquer les normes de l’OIT pour protéger les droits des travailleurs dans le cadre du commerce. L’Accord de libre-échange avec l’Amérique centrale (CAFTA), signé entre le Guatemala et les Etats-Unis en 2006, exige des deux pays de reconnaître et de protéger la liberté syndicale et d’autres droits énoncés dans la Déclaration de l’OIT de 1998 relative aux principes et droits fondamentaux au travail. La présente commission avait exprimé sa profonde préoccupation concernant l’application de la convention au Guatemala, avant l’entrée en vigueur du CAFTA. Le Comité de la liberté syndicale a examiné 25 cas qui concernaient le Guatemala, et le groupe des travailleurs a présenté une plainte au titre de l’article 26. Le Guatemala a néanmoins continué de bénéficier d’avantages commerciaux sans pour autant démontrer qu’il se conformait à la convention. En 2008, les syndicats guatémaltèques et américains ont présenté une plainte pour violation des droits des travailleurs au titre du chapitre sur le travail du CAFTA. Depuis lors, des efforts ont été faits pour corriger la situation au Guatemala, au travers des consultations et des mécanismes de règlement des conflits prévus par le CAFTA. Tout au long des processus alors conduits, des éléments ont démontré que le gouvernement omettait systématiquement d’appliquer la législation sur la liberté syndicale. Un rapport de l’Accountability Office du gouvernement des Etats-Unis, publié en novembre 2014, fait état de violations de la liberté syndicale au Guatemala, entre autres les suivantes: tentatives de corruption de dirigeants syndicaux pour les encourager à quitter leur poste et décourager les travailleurs de s’affilier; licenciement de travailleurs en raison de leur affiliation syndicale ou pour ne pas avoir dissous de syndicats; non-respect de la législation concernée; budget inapproprié pour enquêter sur, poursuivre et condamner les auteurs d’actes de violation de la liberté syndicale; et non-réintégration des travailleurs illégalement licenciés. Pratiquement les mêmes informations ont été demandées via les mécanismes de l’OIT et du CAFTA, mais le gouvernement ne montre pas suffisamment qu’il cherche à remédier à ces violations dans le cadre des deux mécanismes. Aucun de ces deux mécanismes n’est parvenu à accorder des compensations aux travailleurs concernés. Pour conclure, l’orateur a rappelé que les instruments que supervise cette commission ont un rôle à jouer dans la protection des droits en dehors de l’OIT et de ses mécanismes de contrôle, et que les conventions fondamentales de l’OIT sont de plus en plus souvent intégrées aux accords sur le commerce entre les Etats Membres par le biais de chapitres sur les droits des travailleurs, à défaut d’offrir jusqu’à maintenant l’espoir d’une mondialisation fondée sur la justice sociale.

Le représentant gouvernemental a déclaré avoir pris note des points soulevés par les différents orateurs. La résolution des principaux problèmes structurels, auxquels doit faire face le pays, demande et demandera du temps, et implique la participation active des partenaires sociaux. Il est également nécessaire de voir le côté positif des mutations qu’appellent le phénomène de la mondialisation et l’ère technologique. Les questions du travail ne font pas exception à cette règle et restent une tâche en suspens qui a été délaissée par les gouvernements précédents. Le gouvernement actuel prend en charge ces questions de façon responsable, en dépit du contexte peu propice qui règne et des plaintes réitérées devant les organes de l’OIT. Il continuera à suivre les questions posées dans le cadre de cet examen et d’autres thématiques, afin d’améliorer les conditions de près de 80 pour cent de citoyens qui ne jouissent pas du plein emploi. La Constitution du Guatemala érige la liberté d’association au rang de droit de l’homme et de droit syndical. C’est la raison pour laquelle des dispositions juridiques assurant le respect de la liberté syndicale ont été adoptées. Il incombe au gouvernement de mettre en place les mécanismes nécessaires pour assurer sa protection. Les réformes du Code du travail visant à renforcer le pouvoir de sanction plus important sont entre les mains du Congrès de la République, qui est l’instance responsable de l’adoption d’un projet conforme à la Constitution du pays. Les résultats en termes de mise en œuvre des mécanismes garantissant la liberté syndicale sont visibles, et les juridictions compétentes en matière de travail se sont améliorées et ont réduit les délais de traitement des affaires, notamment en ce qui concerne les décisions renvoyant au ministère public les personnes ne s’étant pas conformées à des décisions judiciaires. Rien qu’en 2014, 987 certificats ont été émis et près de 476 depuis le début de l’année 2015, ce qui ouvre la porte aux poursuites pénales des personnes qui ne se conforment pas aux décisions judiciaires. Par ailleurs, grâce à des mécanismes de protection récemment mis en place, les dirigeants syndicaux bénéficient déjà de mesures de protection, et des condamnations ont déjà été prononcées à l’encontre de certains responsables des 58 cas de morts violentes de syndicalistes. Par exemple, cela a été le cas pour l’assassinat de Luis Arturo Quinteros Chinchilla, non syndicaliste, qui a été victime d’une attaque à main armée dans une dispute à cause d’une place de stationnement et de Luis Ovidio Ortiz Cajas, dirigeant syndical, assassiné par un mineur et deux jeunes délinquants. Le gouvernement assume de façon courageuse et responsable le travail qui reste à accomplir, avec les autres organismes de l’Etat, et espère que le dialogue social instauré ces dernières années sera durable. Enfin, puisque les travailleurs du Guatemala ont indiqué qu’ils étaient pleinement disposés à coopérer, il a été décidé de manière tripartite d’organiser le jour suivant cette séance de la commission une réunion rassemblant les délégués gouvernementaux, travailleurs et employeurs à la Conférence afin d’échanger sur les thèmes qui y ont été abordés.

Les membres travailleurs ont déclaré qu’ils auraient préféré ne pas avoir à évoquer les meurtres de syndicalistes, ce qui aurait signifié que le gouvernement met en œuvre l’ensemble des conclusions des organes de contrôle. Certains orateurs ont devant la commission posé la question de savoir si l’examen du cas, à la fois par cette commission et par le Conseil d’administration du BIT, est susceptible d’affaiblir le système de contrôle. Le problème réside dans le fait que le gouvernement ne fait preuve d’aucune volonté réelle d’avancer devant l’un ou l’autre de ces organes. Il n’y a pas d’autre choix que de demander l’approbation de la constitution d’une commission d’enquête en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. En octobre 2013, les membres travailleurs ont accepté d’accorder au gouvernement une dernière chance et ont donné leur accord à la feuille de route tripartite pour résoudre certaines des questions posées par les organes de contrôle. Plus de dix-huit mois se sont écoulés depuis et plus d’un an depuis l’expiration du délai accordé pour la mise en œuvre, mais aucun progrès n’est à relever sur le fond. Le temps accordé au Guatemala est désormais écoulé. Une importante assistance technique a été octroyée, le plus récemment au bénéfice du système judiciaire. Le gouvernement ne fait preuve d’aucune volonté politique pour mettre en place un état de droit, comme le démontre le fait que ses hauts fonctionnaires se livrent à des activités illégales. Des syndicalistes ont été assassinés et licenciés en raison de leurs activités syndicales. L’inspection du travail n’est pas efficace. Les rares décisions de justice rendues en faveur des droits des travailleurs sont ignorées en toute impunité. Il n’existe aucun syndicat dans le secteur de l’habillement. On ne peut pas continuer à examiner ce cas pendant les vingt-cinq prochaines années. Ils ont exhorté les membres travailleurs de cette commission qui sont également membres du Conseil d’administration à apporter leur soutien à la constitution d’une commission d’enquête lors de la session du Conseil d’administration de novembre 2015. Les membres travailleurs ont en outre recommandé que: le gouvernement mette en œuvre la feuille de route, notamment la modification des lois concernées, et accepte le soutien la CICIG dans la réouverture de l’enquête pour les crimes perpétrés à l’encontre des travailleurs et des dirigeants syndicaux; le gouvernement formalise les consultations tripartites sur toutes les questions relevant de la convention; et le représentant du Directeur général du BIT au Guatemala présente un rapport détaillé sur la mise en œuvre de la feuille de route, pour examen lors de la session du Conseil d’administration de novembre 2015. Les membres travailleurs ont demandé que les conclusions de ce cas figurent dans un paragraphe spécial du rapport de la présente commission.

Les membres employeurs, ayant pris note des différentes vues exprimées sur l’évolution de la situation dans le pays, ont estimé nécessaire que, par l’intermédiaire de son représentant spécial, l’OIT poursuive le processus d’observation, de soutien et d’assistance afin d’accroître l’efficacité des institutions. Au Guatemala, le système institutionnel est suffisant et il faut faire confiance aux autorités et leur fournir une assistance pour qu’elles disposent des mécanismes nécessaires. Tout en notant que le soutien apporté à la CICIG démontre la volonté du gouvernement d’avancer dans la résolution des actes criminels commis contre des syndicalistes, les membres employeurs ont demandé de renforcer l’action de la CICIG et ont appuyé les propositions des membres travailleurs à cet égard. Il est également important de poursuivre le dialogue social en renforçant ses instances afin de trouver conjointement des solutions. En particulier, il faudrait renforcer aussi la commission de règlement des conflits soumis à l’OIT, à laquelle l’expérience d’autres pays pourrait être utile. De même, il faut continuer de mettre en œuvre tous les éléments de la feuille de route, en tenant compte des observations et des commentaires formulés par les membres employeurs lors de leur première intervention. Il faut aussi toute la détermination du ministère public pour accélérer les enquêtes et progresser dans la coordination mise en place dans le cadre des accords interministériels, laquelle doit se traduire par des résultats concrets dans les enquêtes. Il faut aussi garantir la protection des syndicalistes en allouant les ressources nécessaires. Il est important également de poursuivre les programmes destinés aux enquêteurs et aux procureurs afin de faciliter les enquêtes sur ces questions. Quant aux questions législatives concernant le droit de grève, elles doivent être traitées par l’autorité compétente conformément au droit interne du Guatemala. Les membres employeurs ont exprimé l’espoir que le dialogue social permettra de définir les mécanismes les plus appropriés. Considérant le fait que les points traités font l’objet de plusieurs cas présentés devant le Comité de la liberté syndicale et qu’ils seront examinés à la prochaine session du Conseil d’administration, les membres employeurs ont estimé que c’est le Conseil qui devrait définir finalement la meilleure orientation pour en assurer le suivi.

Conclusions

La commission a pris note des informations que le ministre du Travail et de la Prévoyance sociale a fournies oralement sur les questions soulevées dans le rapport de la commission d’experts, et de la discussion qui a suivi.

La commission a constaté que les questions soulevées par la commission d’experts portaient principalement sur: i) les nombreux homicides et actes de violence dont étaient victimes les dirigeants syndicaux et les syndicalistes, et sur la nécessité de les élucider et de les sanctionner dûment, ainsi que sur la nécessité d’offrir une protection rapide et efficace aux dirigeants syndicaux et aux syndicalistes à risque; ii) la nécessité de mettre différents aspects de la législation nationale en conformité avec les dispositions de la convention, notamment les exigences relatives à la constitution de syndicats de branche, les conditions d’éligibilité des dirigeants syndicaux et l’exclusion de diverses catégories de travailleurs du secteur public du droit syndical; et iii) les observations récurrentes des organisations syndicales dénonçant, d’une part, des pratiques du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale qui entraveraient le libre enregistrement des organisations syndicales et, d’autre part, de graves problèmes d’application de la convention concernant les droits syndicaux dans les maquilas.

La commission a pris note de ce que le ministre du Travail a souligné l’engagement du gouvernement en faveur du travail décent et de la liberté syndicale, ainsi que des résultats obtenus suite à l’application de la convention: 1) l’Unité spéciale de contrôle des délits commis contre des syndicalistes centralise désormais les enquêtes sur ces cas (70 au total); 2) un consensus a été trouvé entre le ministère public et le groupe technique du secteur syndical sur une circulaire générale relative aux enquêtes sur ces cas et aux poursuites contre les auteurs de ces actes, circulaire actuellement appliquée; 3) sur les 58 enquêtes sur des morts violentes, huit ont abouti à la condamnation de l’assassin, dix mandats d’arrêt ont été délivrés dans d’autres cas et une demande de mandat d’arrêt a été déposée dans un autre cas; 4) au Guatemala, comme dans d’autres pays de la région, la criminalité et la violence sont des problèmes auxquels l’ensemble de la population est exposé; 5) le ministère public et la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) ont signé un accord de collaboration en 2013 pour renforcer les capacités d’enquête; 6) l’examen de 56 affaires pénales montre qu’un nombre important de victimes n’étaient pas membres d’organisations syndicales et que, la plupart du temps, le mobile des actes perpétrés n’était pas lié aux activités syndicales (activités de gangs, extorsion, etc.); 7) 25 demandes de protection immédiate ont été présentées dans le cadre du Protocole d’application des premières mesures de sûreté et des mesures préventives pour les défenseurs des droits de l’homme au Guatemala; 8) une ligne téléphonique d’urgence a été créée pour dénoncer les violences faites aux syndicalistes; 9) la non-exécution des condamnations peut actuellement entraîner des sanctions pénales et des centaines de cas de non-exécution ont été attestés; et 10) le Congrès tente de renforcer le pouvoir de sanction de l’inspection du travail en cas de non-respect du droit du travail. Par ailleurs, le dialogue tripartite a été renforcé. A cet égard, la Commission de traitement des différends soumis à l'OIT au sujet de la liberté syndicale et de la négociation collective a été créée et a déjà commencé ses travaux. De même, le gouvernement a présenté à la Commission tripartite nationale des projets de réforme législative liés aux commentaires de la commission d’experts. En l’absence d’accord, ces projets, ainsi que les commentaires des partenaires sociaux, ont été transmis au Congrès. La délégation tripartite guatémaltèque a décidé de se réunir durant la conférence pour aborder ces sujets et faire avancer les choses. Elle a remercié le représentant du Directeur général du BIT au Guatemala pour son appui technique et sa contribution au renforcement des institutions publiques. Elle a demandé que le bureau de ce représentant soit renforcé.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission a demandé au gouvernement:

    - de prendre note que la commission déplore les assassinats des syndicalistes auxquels se réfère l’observation;

    - d’appliquer la feuille de route pour lutter contre la violence et l’impunité, et notamment: i) d’établir un accord avec la CICIG pour les investigations en cas de mort de syndicalistes afin d’arrêter et de poursuivre en justice les responsables, y compris ceux qui en sont les instigateurs; ii) de renforcer l’Unité spéciale de contrôle des délits commis contre des syndicalistes; iii) d’assurer la participation des partenaires sociaux aux réunions du Groupe de travail technique pour une protection intégrale; iv) de renforcer le programme de protection des syndicalistes en le dotant de nouveaux moyens financiers pour assurer la protection de tous les dirigeants qui en font la demande; v) de garantir l’application de l’accord-cadre de coopération entre les différents organismes internationaux en vue de faciliter l’échange d’informations sur les délits commis contre des syndicalistes; vi) d’assurer la formation d’enquêteurs et de procureurs du ministère public avec la collaboration du BIT; et vii) de garantir la mise en œuvre de la ligne d’urgence établie en mai 2015 pour la présentation de plaintes en cas de non-respect de la liberté syndicale;

    - d’institutionnaliser la participation des partenaires sociaux dans l’élaboration de la politique au sein des différentes institutions pour le dialogue social, notamment le Conseil économique et social, la Commission tripartite sur les affaires internationales du travail et la Commission pour le traitement des différends soumis à l’OIT, dans le but d’apporter des solutions aux problèmes qui se posent dans la pratique en matière de questions liées au travail, ainsi que, en concertation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, de préparer et de soumettre de manière urgente au Congrès un projet de loi fondé sur les commentaires de la commission d’experts et qui mette en conformité la législation nationale avec la convention, comme le prévoit le point 5 de la feuille de route;

    - de poursuivre la collaboration avec le représentant spécial du Directeur général du BIT, tirant parti de sa coopération technique, ce dernier devant élaborer et présenter à la commission d’experts, à sa prochaine réunion, et au Conseil d’administration, avant sa session de novembre 2015, un rapport sur la mise en œuvre de la feuille de route.

La commission demande au BIT de continuer à apporter son aide au Bureau du représentant spécial du Directeur général du Guatemala.

Le représentant gouvernemental a pris note des conclusions de la commission. Il a rappelé la déclaration antérieure du ministre du Travail dans laquelle ce dernier a affirmé que le gouvernement continuera de suivre les questions à l’examen dans ce cas avec le sérieux que celui-ci mérite.

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