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- 86. La plainte de l'Union générale des travailleurs du Maroc (U.G.T.M.) est contenue dans une communication en date du 4 octobre 1963, adressée directement à l'O.I.T.; elle a été complétée par une communication en date du 6 mai 1964 contenant de nouvelles allégations. La plainte originale a été communiquée au gouvernement, pour observations, par une lettre en date du 14 octobre 1963 et les informations complémentaires venues l'appuyer par une lettre en date du 15 mai 1964. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par une communication en date du 9 septembre 1964.
- 87. Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il a ratifié par contre la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 88. Les plaignants allèguent qu'avec l'accord tacite des autorités, une politique systématique de discrimination s'exerçant à l'encontre de l'U.G.T.M se serait développée au Maroc. Cette politique aurait pour effet, par les avantages qu'elle lui accorde au détriment de l'U.G.T.M, de réserver à l'Union marocaine du travail (U.M.T.) un quasi-monopole syndical.
- 89. A l'appui de ces affirmations de caractère général, les plaignants allèguent, tout d'abord, qu'à Casablanca et dans le reste du Royaume, alors que l'U.M.T aurait reçu des subventions multiples dépassant des dizaines de milliers de dirhams, l'U.G.T.M, ses unions dans la plupart des régions du Maroc et ses fédérations nationales se seraient vu refuser toute aide depuis 1959.
- 90. Les plaignants allèguent également que de nombreux locaux, en particulier les bourses du travail de nombreuses localités, sont mis gratuitement à la disposition de la seule U.M.T, privant ainsi des milliers de travailleurs affiliés à l'U.G.T.M de locaux suffisamment spacieux pour y tenir leurs réunions et y exercer leurs activités syndicales ou obligeant l U.G.T.M à louer des locaux, ce qui implique pour elle des frais qui sont épargnés à l'U.M.T.
- 91. Dans sa réponse, le gouvernement indique, tout d'abord, que les subventions accordées aux organisations syndicales le sont soit par les collectivités locales, soit par le ministère de l'Intérieur. Jusqu'en 1960 - déclare-t-il - seule l'U.M.T a bénéficié de subventions; en 1960, l'U.G.T.M, ayant acquis une existence légale, s'est trouvée habilitée à demander les mêmes avantages en la matière.
- 92. En ce qui concerne les collectivités locales, poursuit le gouvernement, ce sont les conseils communaux qui votent le budget de leur commune. Les principes démocratiques qui régissent l'élection des conseils font que ceux-ci reflètent les tendances politiques pré dominant dans les diverses localités, ce qui les amène, selon le cas, à accorder des subventions soit à l'U.M.T, soit à l'U.G.T.M. A titre d'exemple de cet état de fait, le gouvernement cite le cas du conseil municipal de Fès: ce conseil, qui était de tendance Istiglal, avait décidé, lors de l'examen du budget de 1961, d'allouer à l'U.G.T.M. 4 000 dirhams de subvention et 500 dirhams à l'U.M.T, alors que cette dernière, avant l'installation des conseils communaux, recevait de la ville de Fès une subvention de 54 000 dirhams. Par contre, déclare, le gouvernement, le conseil municipal de la ville de Settat s'est opposé à l'inscription d'une subvention en faveur de la section locale de l'U.G.T.M.
- 93. Le ministère de l'Intérieur - poursuit le gouvernement - s'est efforcé d'apporter, chaque fois qu'il en a eu la possibilité, une correction sensible à une telle façon d'allouer des subventions. Pour ce faire, indique-t-il, le ministère a eu recours aux crédits inscrits à son budget. Ainsi, déclare le gouvernement, en 1960 l'U.M.T et l'U.G.T.M ont reçu chacune une subvention de 200000 dirhams alors qu'en 1962 seule l'U.G.T.M a bénéficié d'une subvention d'un montant de 100 000 dirhams.
- 94. En ce qui concerne les allégations relatives à l'usage des bourses du travail, le gouvernement indique tout d'abord qu'il y a lieu de distinguer, d'une part, les bourses du travail construites par les municipalités avec subvention de l'Etat, comme à Rabat et à Casablanca, d'autre part, les locaux mis gratuitement à la disposition des unions locales syndicales dans différentes communes urbaines.
- 95. Le gouvernement déclare que l'U.M.T ayant été l'unique centrale syndicale jusqu'à 1960, elle a occupé avant cette date et occupe encore les bourses du travail de Rabat et de Casablanca, de même qu'elle bénéficie encore de l'usage de locaux mis à sa disposition depuis 1957 par des municipalités et des centres.
- 96. Le gouvernement affirme que, de même qu'il s'efforce de régler le problème des subventions, le ministère de l'Intérieur recherche pour chaque cas une solution susceptible de maintenir les syndicats sur un pied d'égalité. Dans ce but - déclare-t-il - un recense ment des différents avantages matériels dont bénéficient les unions locales est en cours d'exécution. Il est prévu, ensuite, soit de retirer purement et simplement aux unions syndicales l'utilisation des locaux qu'elles occupent, mais cette formule risque de ne pas être acceptée par les conseils communaux, soit d'attribuer aux unions des avantages identiques. Le ministère de l'Intérieur étudie attentivement l'application pratique de cette solution, car les présidents des conseils communaux devront signer les baux de location des locaux et mandater les loyers et les fournitures, ce qui est susceptible de faire naître certaines difficultés. Quoi qu'il en soit, affirme le gouvernement, une décision sera bientôt prise en vue de donner satisfaction à toutes les parties intéressées.
- 97. Le gouvernement souligne en terminant que l'administration ne cherche, en aucune façon, à favoriser tel syndicat au détriment de l'autre ou n'admet que des atteintes soient portées à l'exercice des droits syndicaux; au contraire, elle déploie des efforts constants en vue de normaliser une situation née des circonstances.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 98. A l'occasion de son examen de cas antérieurs présentant, par certains côtés, des caractéristiques analogues à celles de la présente affaire, le Comité avait fait remarquer, d'une part, que, selon les circonstances, une aide financière accordée par les pouvoirs publics aux organisations syndicales pouvait avoir de sérieuses répercussions sur l'autonomie de ces organisations, d'autre part, que le fait, pour un gouvernement, d'accorder des avantages à une organisation déterminée ou de les lui retirer pour en faire bénéficier une autre, par exemple, risquait, même si tel n'était pas son dessein, d'aboutir à favoriser ou à défavoriser un syndicat par rapport aux autres et à constituer par là un acte de discrimination. Plus précisément - déclarait le Comité - en favorisant ou en défavorisant une organisation par rapport aux autres, un gouvernement peut influencer, directement ou indirectement, le choix des travailleurs en ce qui concerne l'organisation à laquelle ils entendent appartenir, tant il est vrai que ces derniers seront enclins à adhérer au syndicat le plus apte à les servir, alors que, pour des raisons d'ordre professionnel ou autre, leurs préférences les auraient portés à s'affilier à une autre organisation. Or, déclarait le Comité, la liberté de choix des intéressés en la matière constitue un droit expressément consacré par l'article 2 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. 1948.
- 99. Dans le cas d'espèce, loin de favoriser le maintien d'une situation où certaines organisations se voient avantagées par rapport à d'autres, il semblerait que le gouvernement s'efforce activement de rechercher des solutions permettant d'assurer que les diverses tendances du mouvement syndical bénéficient d'un traitement de stricte égalité en matière d'avantages matériels. Dans le domaine des subventions, il apparaît que, par son action, le gouvernement ait déjà réussi, partiellement tout au moins, à réparer les injustices qui avaient pu naître des circonstances et de la situation politique de fait des diverses régions du pays. En ce qui concerne l'utilisation des bourses du travail et autres locaux mis à la disposition des syndicats, le gouvernement affirme qu'une décision interviendra prochainement qui donnera satisfaction à toutes les parties intéressées.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 100. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de prendre note des déclarations du gouvernement selon lesquelles ce dernier met tout en oeuvre pour assurer aux syndicats des diverses tendances un traitement de stricte égalité en matière d'avantages matériels;
- b) de prier le gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant du résultat des efforts ainsi déployés par lui.