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Informe definitivo - Informe núm. 138, 1973

Caso núm. 631 (Türkiye) - Fecha de presentación de la queja:: 15-JUN-70 - Cerrado

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  1. 15. La plainte de la Confédération syndicale progressiste de Turquie (DISK) figure dans un télégramme en date du 15 juin 1970 adressé directement à l'OIT. La plainte a été communiquée au gouvernement, qui a présenté certaines observations préliminaires sur cette question, dans une communication en date du 9 janvier 1971.
  2. 16. A sa 57e session (février 1971), le comité a ajourné l'examen du cas et demandé au Directeur général de prier le gouvernement et les plaignants de fournir certaines informations relatives à cette plainte; le gouvernement a transmis ces informations par une communication en date du 11 mai 1971.
  3. 17. A sa 58e session (mai 1971), le comité a de nouveau ajourné l'examen du cas, étant donné que les informations communiquées par le gouvernement lui étaient parvenues trop tard pour lui permettre de les étudier quant au fond et que, d'autre part, les informations qu'il avait demandées aux plaignants ne lui étaient pas parvenues. Dans une communication en date du 15 juillet 1971, les plaignants ont fourni des informations détaillées à l'appui de leur plainte. Cette information a été communiquée au gouvernement, qui a formulé certaines observations dans une communication en date du 31 octobre 1972. Les plaignants ont également adressé à l'OIT deux autres communications, en date respectivement des 18 mars et 6 octobre 1972, contenant des informations relatives à leur plainte.
  4. 18. La Turquie n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 19. Les plaignants allèguent que la loi no 1317 du 29 août 1970, qui modifie la loi no 274 de 1969, n'est pas conforme aux conventions relatives à la liberté syndicale et constitue une menace pour l'existence de leur organisation. Les plaignants indiquent que le Parti républicain populaire, le Parti travailliste et d'autres partis ont déposé une requête devant la Cour constitutionnelle turque, pour demander l'annulation des amendements apportés par la loi no 1317, qu'ils estiment contraires à la Constitution.
  2. 20. Pour les plaignants, les amendements apportés aux articles 1er, 13 (paragraphes 3, 4 et 6) et 32 de la loi no 274 sont de nature à empêcher la création de conseils syndicaux régionaux. Selon eux, le but de ces amendements est d'empêcher la création de nouvelles fédérations ou confédérations, en vue de créer un monopole, et en particulier d'empêcher la création de "birliks", ou de conseils régionaux de syndicats dans la même branche d'activité ou dans des branches différentes.
  3. 21. Toujours selon les plaignants, du fait de l'amendement à l'article 5 (paragraphe 1) de la loi no 274, l'affiliation à un syndicat est soumise à l'acceptation de l'organe représentatif agréé du syndicat. Si donc le comité exécutif d'un syndicat n'aime pas un travailleur, ou le considère comme un rival, il se peut que l'intéressé ne soit pas agréé comme membre.
  4. 22. De l'avis des plaignants, l'amendement à l'article 9 (paragraphe 2) de la loi no 274 rend pratiquement impossible l'établissement de nouveaux syndicats nationaux ou de nouvelles fédérations ou confédérations nationales. Les plaignants font observer qu'aux termes de cet amendement, pour qu'un syndicat ou une fédération puisse exercer ses activités à l'échelle nationale, il ou elle doit représenter au moins le tiers des travailleurs assurés dans une branche d'activité déterminée et que, s'il s'agit de confédérations, celles-ci doivent être créées par le tiers au moins des syndicats et des fédérations constitués ainsi qu'il est dit plus haut, et grouper au moins le tiers des travailleurs organisés de Turquie. Les organisations existantes qui ne remplissent pas ces conditions devront être dissoutes ou fractionnées en petits syndicats locaux.
  5. 23. Les plaignants déclarent également qu'en vertu de 18 amendement apporté à l'article 11 (paragraphe 1) de la loi no 274, un travailleur doit, pour pouvoir créer un syndicat, avoir été employé au moins pendant trois ans dans la branche d'activité où le syndicat sera constitué. De même, l'amendement au paragraphe 3 de l'article 11 dispose que le droit d'établir des organisations internationales de travailleurs doit être accordé à la confédération qui représente la majorité des travailleurs en Turquie ou aux syndicats qui lui sont affiliés. Ces amendements, font observer les plaignants, présentent un caractère discriminatoire et sont contraires aux conventions.
  6. 24. Les plaignants déclarent qu'en vertu de l'amendement à l'article 22 (paragraphe 2), les travailleurs doivent payer des cotisations au syndicat qui est déclaré agent de négociation, même s'ils n'en font pas partie. Les cotisations des mêmes travailleurs aux syndicats auxquels ils sont affiliés ne peuvent être retenues à la source.
  7. 25. Les plaignants ajoutent que les amendements aux articles 5, 6, 11, 21 et 23 de la loi no 274 limitent fortement le droit des travailleurs de constituer des syndicats et des fédérations de leur choix et de s'y affilier, et que les travailleurs sont maintenant contraints de s'affilier à l'organisation qui jouit de la faveur du parti politique au pouvoir.
  8. 26. Dans ses communications en date du 18 mars 1972, le plaignant signale que la Cour constitutionnelle de la Turquie a décidé d'annuler, totalement ou partiellement, les articles 1er, 5, 6, 9, 11, 13, 14, 15, 23, 29 et 32 de la loi no 274, modifiée par la loi no 1317, mais que cette décision ne deviendra définitive que lorsque la Cour l'aura motivée. Dans sa communication du 31 octobre 1972, le gouvernement indique que la Cour constitutionnelle de la Turquie vient d'adopter une décision, publiée dans le Journal officiel du 19 octobre 1972, qui annule certaines dispositions de la loi no 1317, notamment les articles 5, 9 et 11 que mentionne la plainte. Le gouvernement ajoute que les articles 6, 13 et 32 n'ont pas été estimés contraires à la Constitution par la Cour et qu'ils n'ont pas été annulés.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 27. Compte tenu des explications fournies par le gouvernement et des renseignements communiqués par les plaignants, le comité estime que, les articles 5, 9 et 11 de la loi no 1317 ayant été annulés par la Cour constitutionnelle de la Turquie, il est inutile qu'il poursuive l'examen de la plainte pour ce qui est des allégations relatives aux articles en question. Il lui reste à déterminer dans quelle mesure les autres articles de la loi no 1317 au sujet desquels des allégations ont été présentées (à savoir les articles 1er, 6, 13, 23 et 32 de la loi no 1317) sont conformes aux principes de la liberté syndicale.
  2. 28. Après avoir examiné les amendements apportés par la loi no 1317 aux articles 1er, 13 et 32 de la loi no 274 (relatifs à la définition de l'organisation de travailleurs ou d'employeurs, au quorum, à l'affiliation, à la démission ou au retrait et à l'application d'autres lois), le comité constate que le terme "unions" ("birliks") a disparu de ces articles. Selon les plaignants, cet amendement a pour objet d'empêcher la création de nouvelles fédérations ou confédérations, et en particulier de "birliks" ou de conseils régionaux de syndicats dans la même branche d'activité ou dans des branches différentes, tels que le "Conseil syndical régional de l'Egée" ou le "Conseil régional des syndicats des ouvriers du textile de la Marmara". Les raisons données par la Cour constitutionnelle pour rejeter l'argument selon lequel cette omission est contraire à la Constitution sont d'une part que les associations syndicales prennent en fait ou la forme d'une fédération ou celle d'une confédération et qu'il est donc inutile aujourd'hui de définir un autre type d'association. En outre, la Cour constitutionnelle fait observer que rien ne limite la création d'autres types d'associations. Si les conditions économiques et sociales l'exigent, l'organe législatif adoptera les dispositions voulues concernant cette question.
  3. 29. Le comité relève également à cet égard que la Cour constitutionnelle a déclaré contraire à la Constitution l'amendement à l'article 9 de la loi no 274 et que, en conséquence, l'article 9 de ladite loi semble demeurer en vigueur. Si le terme "unions" (ou "birliks") a été supprimé dans certains autres articles de cette loi, l'article 9 (paragraphe 2) prévoit toutefois que les unions de syndicats sont constituées par la réunion, en qualité de membres, de deux syndicats au moins existant dans une localité ou dans des limites régionales déterminées, même s'ils appartiennent à des branches n'ayant aucune connexion entre elles. D'autre part, le paragraphe 2 b) du même article prévoit que les fédérations sont constituées par la réunion de deux syndicats au moins de la même branche ou de branches d'activité connexes.
  4. 30. Il semblerait donc, d'après les dispositions de l'article 9 de la loi no 274 et d'après la décision de la Cour constitutionnelle, que la création d'associations régionales de syndicats ne soit limitée en rien, bien que les associations de cette nature ne tombent plus dans ce cas sous le coup des dispositions stipulées dans les articles 13 et 32 de la loi relative à la création et au fonctionnement général des organisations. Les plaignants allèguent que l'omission du terme "unions" (ou "birliks") dans les articles 1er, 13 et 32 est délibérée et a pour but de supprimer la possibilité de créer des associations régionales de syndicats; à cet égard, le comité fait observer que toute restriction, directe ou indirecte, au droit des syndicats de créer des associations régionales de syndicats de la même branche d'activité ou de branches différentes ne serait pas conforme aux principes de la liberté syndicale.
  5. 31. Les plaignants déclarent également que l'article 6 de la loi no 274, modifié par la loi no 1317, n'est pas conforme au droit des travailleurs de s'affilier à des organisations de leur choix. Le comité relève que, par suite de la modification de cet article, tout membre d'un syndicat qui désire se retirer de ce syndicat ne peut le faire qu'en présence d'un notaire qui doit vérifier l'identité et certifier la signature de l'intéressé. La date de la démission doit être consignée dans le registre des membres du syndicat. Selon le gouvernement, la Cour constitutionnelle estime que cet amendement n'est pas contraire à la Constitution. Les dispositions fixées dans l'article modifié ont trait à la procédure et ont pour objet d'assurer que le travailleur a effectivement présenté sa démission, ce qui lui garantit la pleine jouissance de ses droits syndicaux. La Cour a fait observer que l'amendement n'empêche en aucune manière les travailleurs de faire usage de leur droit de démissionner d'un syndicat.
  6. 32. A cet égard, le comité estime qu'une condition telle que celle qui est définie dans l'article 6 de la loi no 274, dans sa teneur modifiée, ne constitue pas en soi une atteinte aux droits syndicaux, à condition qu'il s'agisse d'une formalité qui, dans la pratique, puisse être remplie facilement et sans délai. Par contre, si une condition de cette nature peut, dans certaines circonstances, poser des difficultés d'ordre pratique aux travailleurs qui désirent se retirer d'un syndicat, elle peut limiter le libre exercice de leur droit d'adhérer à des organisations de leur choix. Pour éviter une telle situation, le comité estime que le gouvernement devrait étudier la possibilité d'adopter une autre modalité de démission d'un syndicat qui n'entraîne aucune difficulté d'ordre pratique ou financier pour les travailleurs concernés. Conformément au règlement intérieur établi par le Comité à sa 59e session, en novembre 1971 (127e rapport, paragraphe 251), le comité recommande au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement à faire connaître, avant la session de novembre 1973 du comité, les mesures qu'il aura prises, ou qu'il envisage pour mettre en oeuvre un autre système de retrait d'un syndicat.
  7. 33. Le comité note que les plaignants allèguent qu'aux termes de l'amendement à l'article 22 (paragraphe 2) de la loi no 274, les travailleurs doivent maintenant payer des cotisations au syndicat déclaré agent de négociation, même s'ils n'en font pas partie, faute de quoi ils ne peuvent bénéficier de la convention collective. Les cotisations de ces travailleurs au syndicat auquel ils sont affiliés ne peuvent être retenues à la source.
  8. 34. Le comité note, d'après les informations dont il dispose, que l'article 22 de la loi no 274 n'a pas été modifié par la loi no 1317 et que l'article 23 concernant les cotisations ne semble avoir été modifié que dans sa forme seulement. Ce dernier article prévoit, notamment, le prélèvement d'une cotisation de solidarité, selon un système de retenue à la source; aux termes de l'article 7 (3) de la loi no 275 sur les conventions collectives de travail, cette cotisation de solidarité doit être payée par les travailleurs qui ne sont pas membres de l'organisation partie à une convention collective, mais qui désirent bénéficier des dispositions de ladite convention. La cotisation ne peut dépasser les deux tiers de la cotisation syndicale payée par les travailleurs de même catégorie et, de mêmes qualifications qui sont employés dans l'établissement et qui sont membres de l'organisation de travailleurs ayant signé la convention. Le comité estime que ce système, dans le cas présent, s'il n'est pas couvert pas les normes internationales du travail, n'apparaît pas en soi incompatible avec les principes de la liberté syndicale et recommande en conséquence au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi de sa part.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 35. Dans ces conditions, et pour ce qui est du cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) en ce qui concerne les allégations relatives aux amendements apportés par la loi no 1317 aux articles 5, 9 et 11 de la loi no 274, de prendre note de la décision de la Cour constitutionnelle selon laquelle ces amendements sont contraires à la constitution;
    • b) en ce qui concerne les allégations relatives à l'article 23 de la loi no 274 concernant le paiement des cotisations syndicales et des cotisations de solidarité, de décider, pour les raisons exposées ci-dessus au paragraphe 34, que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi de sa part;
    • c) en ce qui concerne les allégations relatives aux amendements apportés aux articles let, 13 et 32 de la loi no 274, concernant la définition des organisations de travailleurs et d'employeurs et la création et le fonctionnement des organisations, de prendre note des motifs donnés par la Cour constitutionnelle en ce qui concerne la création d'organisations régionales et d'appeler l'attention du gouvernement sur les considérations exposées ci-dessus au paragraphe 30;
    • d) en ce qui concerne les allégations relatives à l'amendement à l'article 6 de la loi no 274 concernant la démission d'un syndicat, d'inviter le gouvernement, pour les raisons exposées ci-dessus au paragraphe 32, et conformément au règlement intérieur défini au paragraphe 25 du 127e rapport du comité, à faire connaître avant la session de novembre 1973 du comité les mesures qui ont été prises, ou qui sont envisagées, pour l'adoption d'un autre système de retrait d'un syndicat.
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