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- 369. Le dernier rapport adressé par le gouvernement du Chili au titre de l'article 19 de la Constitution de l'OIT sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations de la Commission d'investigation et de conciliation a été examiné par le comité et le Conseil d'administration à leur session de mai-juin 1978. A cette occasion, le comité avait également examiné le cas no 8233. Il convient de rappeler en outre que le comité avait étudié les questions en instance en tenant compte des informations recueillies par le représentant du Directeur général au cours d'une mission de contacts directs effectuée du 8 au 15 mai 1978.
- 370. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes- 371. A cette session, le Conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, demandé au gouvernement de continuer à adresser des informations sur l'évolution de la situation syndicale pour le 15 octobre 1978 ainsi que des observations à propos d'allégations formulées dans le cadre du cas no 823.
- 372. Depuis le dernier examen du cas, le comité a reçu des communications émanant de la Confédération internationale des syndicats libres (6 septembre, 24 et 30 octobre 1978), la Fédération syndicale mondiale (9, 21, 26 septembre, 31 octobre 1978), la Confédération mondiale du travail (24 et 31 octobre 1978), l'Union internationale des syndicats des travailleurs de l'agriculture, des forêts et plantations (24 octobre 1978), l'Union internationale des syndicats des travailleurs des services publics et assimilés (24 octobre 1978), l'Union internationale des syndicats de travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (25 octobre 1978), la Centrale latino-américaine de travailleurs (26 octobre 1978), l'Union internationale des syndicats des travailleurs du textile, de l'habillement, des cuirs et peaux (30 octobre 1978). Pour sa part, le gouvernement a adressé, dans une communication du 30 octobre 1978, le texte de certaines déclarations faites récemment par le ministre du Travail. Le gouvernement a également adressé un rapport du 31 octobre 1978 ainsi qu'une communication du 6 novembre 1978. En raison de la date tardive à laquelle ces dernières communications ont été reçues, le comité n'a pas été en mesure de les examiner de façon approfondie à sa présente session. Il se propose d'étudier de façon plus détaillée à sa prochaine session les points traités dans ces dernières communications du gouvernement.
- 373. En raison du fait que les nouvelles allégations présentées par les organisations plaignantes dans le cadre du cas no 823 couvrent divers aspects importants de la vie syndicale, le comité a décidé d'examiner les questions relatives à l'évolution de la situation syndicale et le cas en instance concernant le Chili dans un seul document.
- I. Question relative à l'adoption d'une nouvelle législation en matière syndicale
- 374. Dans son rapport précédent, le gouvernement avait indiqué que le livre II du code du travail qui traite du droit syndical avait été soumis à l'examen du Conseil d'Etat qui s'était prononcé à ce sujet vers le milieu de 1977. Le gouvernement signalait également que le ministère du Travail donnait une forme définitive à ses dispositions. Les autorités avaient déclaré à cet égard au représentant du Directeur général que la promulgation d'une nouvelle législation syndicale s'inscrivait dans un processus évolutif dont la première étape serait l'adoption d'un nouveau système de négociation collective.
- 375. A sa session de mai 1978, le comité, tout en prenant note des développements en matière syndicale, et notamment -de l'intention du gouvernement d'instaurer le retour à la négociation collective, avait signalé qu'un système de négociation collective suppose l'absence de restrictions aux activités légitimes des organisations syndicales, notamment quant à leur gestion interne. Un tel système suppose en particulier, avait ajouté le comité, que les organisations syndicales puissent se réunir librement et soient représentées au cours des négociations par des dirigeants librement élus par leurs membres. Dans ces conditions, le conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, signalé au gouvernement qu'un de ses objectifs prioritaires devrait être d'abroger le décret-loi no 198 et de promulguer le plus tôt possible une législation conforme aux principes de l'OIT.
- 376. Dans la déclaration qu'il a prononcée le 27 octobre 1978, le ministre du Travail a réaffirmé que la liberté syndicale constitue l'une des principales orientations du nouveau système institutionnel en matière de travail et qu'elle ne peut être restreinte que pour des raisons d'intérêt général. La nouvelle conception du syndicalisme, a en outre déclaré le ministre, reconnaît pleinement le droit des organisations professionnelles de veiller à leurs intérêts légitimes dans le cadre d'une attitude responsable. Cette attitude inclut la nécessité de rendre compatibles leurs propres intérêts avec le bien commun général, ce qui élimine tout développement systématique d'antagonismes sociaux mais au contraire implique la recherche de solutions aux conflits sociaux par des moyens pacifiques et équitables.
- 377. Le ministre a annoncé que la rédaction du Code du travail était en voie d'achèvement et que le gouvernement avait adopté un décret-loi qui consacre la pleine liberté d'affiliation des travailleurs à un syndicat. La constitution d'un syndicat devra être décidée, à l'avenir, par plus de 30 pour cent des travailleurs permanents d'un établissement ou d'une entreprise. Ce pourcentage ne devra pas donner un nombre de travailleurs inférieur à 25. Les travailleurs non syndiqués seront représentés par le délégué du personnel et devront contribuer au financement des dépenses liées à la négociation collective. La distinction qui existait jusqu'à maintenant entre les syndicats d'ouvriers et d'employeurs sera éliminée. Un statut spécial sera adopté pour les fonctionnaires publics.
- 378. Le comité note la déclaration selon laquelle la rédaction du Code du travail se trouve en voie d'achèvement et que d'ores et déjà un décret-loi adopté par le gouvernement a consacré la liberté d'affiliation des travailleurs à un syndicat. Le comité exprime l'espoir qu'il sera à même d'examiner les dispositions du nouveau Code du travail dès sa prochaine session et que celles-ci seront pleinement conformes aux principes de la liberté syndicale et plus particulièrement aux recommandations de la Commission d'investigation et de conciliation.
- II. Activités syndicales dans le pays
- a) Négociation collective
- 379. Le gouvernement avait déclaré dans son précédent rapport que la situation économique du pays s'était considérablement améliorée. Toutefois, les conditions n'étaient pas encore réunies pour rétablir les mécanismes normaux de négociation collective qui étaient suspendus jusqu'au 1er mars 1979. Le gouvernement indiquait en outre qu'un nouveau système de négociation collective se trouvait à un stade avancé d'examen. Le système de réajustement automatique trimestriel des rémunérations continuait à être appliqué de même que les dispositions du décret-loi no 851 de 1975 qui étend l'application des constats d'accord, des conventions collectives, des sentences arbitrales et des résolutions des commissions tripartites aux travailleurs de la branche d'activité concernée.
- 380. Au sujet des commissions tripartites, le gouvernement avait rappelé les informations déjà communiquées en novembre 1977 quant au caractère désormais délibératif de leurs décisions. Il avait confirmé que les représentants du gouvernement au sein des commissions ont pour tâche de sauvegarder le bien commun en empêchant les excès préjudiciables à la communauté. Cependant, l'action de l'Etat aurait progressivement un caractère toujours plus secondaire.
- 381. Le ministre du Travail avait en outre signalé au représentant du Directeur général que le rétablissement de la négociation collective aurait peut-être lieu en 1979 et qu'on étudiait les dispositions qui devraient être adoptées. Il était prévu qu'au cas où les parties n'aboutiraient pas à un accord, soit directement, soit par la voie d'une médiation, il serait fait recours à l'arbitrage comme solution finale. Les arbitres seraient nommés d'un commun accord par les parties ou par des organismes indépendants tels que les tribunaux judiciaires.
- 382. A sa session de mai 1978, le comité avait observé avec intérêt l'évolution vers un retour à la négociation collective. Il avait cependant noté qu'il semblait être envisagé qu'en cas d'absence d'accord entre les parties dans le cadre de la négociation collective le conflit qui en résulterait serait résolu par arbitrage obligatoire. En d'autres termes, le recours à- la grève serait interdit. Le comité avait relevé la récente déclaration du ministre du Travail selon laquelle la reconnaissance de la grève serait également étudiée dans le cadre du processus de normalisation. A ce sujet, le comité avait rappelé que le droit de grève constitue un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels. Si une interdiction de la grève peut être acceptée pendant la négociation collective ou la validité d'une convention collective ou dans le cas des fonctionnaires publics ou des services essentiels, une interdiction générale du droit de grève serait en revanche contraire aux principes de la liberté syndicale.
- 383. Dans son discours du 27 octobre 1978, le ministre du Travail a indiqué que le pays s'apprête à réinstaurer la négociation collective, sous des formes modernes et rénovées qui favoriseront son efficacité dans une société réellement libre. Pour le ministre, ce progrès a été rendu possible grâce au succès avec lequel le gouvernement et le peuple chiliens ont surmonté la ruine économique du pays. La négociation collective se déroulera au niveau des entreprises. Le ministre a également déclaré que les élections syndicales permettraient à la négociation collective de se dérouler avec une représentativité plus solide pour les travailleurs chiliens.
- 384. Le comité note les déclarations effectuées sur ce point par le ministre du Travail qui confirment les informations déjà fournies par le gouvernement lors de la précédente session du comité. Le comité exprime l'espoir que le gouvernement tiendra compte, lors du rétablissement de la négociation collective, des principes et considérations exprimées par le comité à sa précédente session au sujet de l'arbitrage obligatoire, pour les conflits collectifs en général, qui serait contraire aux principes de la liberté syndicale.
- b) Conflits collectifs de travail
- 385. Certaines organisations plaignantes se sont référées à des conflits collectifs du travail qui se sont récemment produits au Chili. Ainsi, dans un télégramme du 6 septembre 1978, la CISL indique qu'à la suite d'une grève déclenchée par les mineurs de cuivre de Chuquicamata, les autorités ont institué l'état de siège dans la région et arrêté treize travailleurs alors que d'autres étaient licenciés.
- 386. Dans trois communications de septembre 1978, la FSM se réfère également à la situation dans le secteur minier de Chuquicamata. L'organisation plaignante explique qu'après deux années de démarches infructueuses en vue d'une amélioration des salaires, les travailleurs de Chuquicamata ont présenté, le 8 août 1978, un cahier de revendications socio-économiques concernant les points suivants: demande d'augmentation des traitements de 50 pour cent, demande d'augmentation de l'indemnité de résidence, augmentation de la prime de production et bourse pour les enfants étudiants. La direction de l'entreprise minière publique répondit en licenciant six dirigeants syndicaux qui avaient participé à l'assemblée au cours de laquelle le cahier de revendications avait été approuvé. Afin de protester contre ces mesures ainsi que contre les prix des repas dans l'entreprise, les mineurs entamèrent ce que l'on a appelé "la grève des cantines", c'est-à-dire qu'ils s'abstinrent de prendre leurs repas dans les cantines de l'entreprise.
- 387. A la suite de ce mouvement, le gouvernement décréta l'état de siège dans toute la province. Cette mesure entraînait diverses conséquences, en particulier le fait que toute réunion ou assemblée devait être soumise à une demande écrite dûment motivée, présentée 24 heures à l'avance au Commandant de garnison. La circulation des personnes à l'entrée et à la sortie de la province était contrôlée, ainsi que l'entrée dans les mines, seuls les travailleurs pouvant y pénétrer. En outre, dix travailleurs furent détenus et relégués dans un endroit éloigné du pays, alors que trois autres étaient mis sous contrôle domiciliaire. Le nombre de détentions, poursuit la FSM, augmenta jusqu'à atteindre le nombre de 72 le 16 septembre. Le plaignant fournit une liste de 35 détenus qui étaient accusés "d'activisme politique" et ajoute que de nouvelles mesures d'arrestation auraient été prises à l'encontre de mineurs supposés être militants des partis démocrate-chrétien et communiste. En outre, toujours selon la FSM, 300 mineurs ont été menacés de licenciement.
- 388. La FSM indique que les conversations entre le gouvernement et les dirigeants des travailleurs du cuivre ont été rompues alors que le président de l'entreprise publique du cuivre CODELCO ne s'était pas rendu à la réunion figée à Santiago avec les dirigeants syndicaux.
- 389. Enfin, l'organisation plaignante se réfère à une autre "grève des cantines" qui serait suivie par un millier des 3.500 travailleurs de l'entreprise publique Acier du Pacifique, usine de Huachipato, en vue d'obtenir une augmentation globale des traitements de 50 pour cent. Cette revendication avait été présentée à l'entreprise il y a quelques mois.
- 390. Le texte des communications transmis par les organisations plaignantes au sujet de ces questions a été communiqué au gouvernement qui a adressé certaines informations sur ce point dans son rapport du 31 octobre 1978. Il indique notamment que le conflit a été réglé par des négociations et que les travailleurs qui avaient été licenciés ont été réintégrés. En outre, les travailleurs qui avaient été arrêtés ont été relâchés.
- 391. Le comité prend note de ces informations. Il se propose d'examiner cette question de façon plus approfondie à sa prochaine session.
- 392. Plusieurs organisations plaignantes, en particulier la CISL, la CMT et la FSM, ont adressé, les 29, 30 et 31 octobre 1978, des télégrammes à l'OIT protestant contre la méthode d'organisation d'élections syndicales par le gouvernement, le 31 octobre 1978. La CISL et la CMT précisent à cet égard que les 35.000 dirigeants syndicaux actuellement en fonctions ne peuvent présenter leurs candidatures. Il s'agit, selon la CISL, d'une machination des autorités visant à contrôler le mouvement ouvrier. La FSM considère pour sa part que cette mesure viole les droits syndicaux.
- 393. Le Directeur général s'est adressé au gouvernement du Chili pour lui transmettre ces protestations récentes des organisations plaignantes. Dans sa communication du 6 novembre 1978, le gouvernement fournit le texte du décret-loi no 2376 sur le renouvellement des directions syndicales par élections et du décret d'application no 159 sur ces élections.
- 394. Le ministre avait annoncé, dans son discours du 27 octobre 1978, que des élections syndicales libres, directes et secrètes auraient lieu dans les entreprises du secteur privé le 31 octobre 1978. Si, dans l'avenir, un minimum de deux années d'affiliation sera exigé pour la participation aux élections des directions syndicales, cette fois, tous les travailleurs syndiqués pourront participer au vote pour leur propre organisation. Les nouvelles directions syndicales seront formées de trois personnes.
- 395. Afin que ces élections constituent le début d'une nouvelle phase du syndicalisme chilien, a poursuivi le ministre, des conditions d'éligibilité ont été établies notamment pour garantir une "dépolitisation" de la vie syndicale. A cet effet, il n'existera pas pour ces élections de présentation formelle de candidatures. Les travailleurs pourront voter pour tout membre ou syndicat ayant au moins cinq ans de présence dans l'entreprise (ou deux ans si l'entreprise a été constituée depuis moins de cinq ans). Ne pourront être élues les personnes ayant participé activement à des actions de politique partisane, ayant milité dans un parti politique ou ayant postulé à des charges publiques ou autres en représentation d'un parti politique au cours des dix dernières années. En outre, aucun dirigeant syndical actuellement en fonctions ne pourra être réélu à l'occasion des prochaines élections. Cette dernière règle ne signifie pas que les autorités méconnaissent le travail effectué par les dirigeants actuels, mais il est devenu impérieux de promouvoir une nouvelle génération de dirigeants syndicaux. Tout dirigeant syndical qui ne remplirait pas les conditions d'éligibilité cesserait ses fonctions. Toutes les questions liées aux inéligibilités ou à la cessation de fonctions des dirigeants syndicaux sont du ressort du directeur du travail avec recours en appel devant les tribunaux mentionnés dans le décret-loi. Les élections se dérouleront en présence d'un inspecteur du travail qui sera chargé d'en contrôler le déroulement. Les dirigeants nouvellement élus exerceront leur mandat pendant quatre ans. Enfin, le ministre a indiqué, en s'adressant aux employeurs, que les autorités sanctionneraient avec rigueur toute tentative tendant à dénaturer, entraver ou empêcher le déroulement des élections. Le gouvernement confirme les déclarations du ministre dans son rapport du 31 octobre 1978.
- 396. Le comité se propose d'examiner de façon approfondie cette question à sa prochaine session. Il a cependant d'ores et déjà relevé que le décret-loi sur les élections fixait certains cas d'inéligibilité. Le comité tient à formuler certains commentaires préliminaires à ce sujet. En principe, la levée de l'interdiction des élections syndicales jusqu'ici en vigueur en vertu du décret-loi no 198 de 1973 pourrait représenter un progrès, à condition toutefois que les principes de la liberté syndicale soient respectés, y compris le droit des travailleurs d'élire leurs représentants en toute liberté. Le comité souhaiterait que le gouvernement adresse des informations sur les motifs pour lesquels il a retenu ces cas d'inéligibilité.
- III. Mesures prises à l'encontre de dirigeants syndicaux ou d'organisations syndicales
- a) Destitution et licenciement de dirigeants syndicaux
- 397. A sa session de mai 1978, le comité avait examiné les plaintes relatives à la destitution et au licenciement de plusieurs dirigeants syndicaux. Il s'agissait de trois dirigeants des travailleurs du cuivre (Milton Puga, directeur du Syndicat professionnel des employés du cuivre d'El Teniente; Juan Fincheira, président du même syndicat et secrétaire général adjoint de la Commission latino-américaine des travailleurs des mines et de la métallurgie; Carlos Arellano, directeur du même syndicat); de deux dirigeants de la Confédération nationale des associations de travailleurs de la Banque de l'Etat du Chili, Andrés del Campo Hamel, président, et Arturo Moreno Patiño, vice-président; du président de la Fédération nationale des travailleurs portuaires du Chili, Carlos Frez Rojo, et du dirigeant de la Fédération nationale des employés maritimes, Domingo Sanchez Nuñez.
- 398. Les trois dirigeants des travailleurs du cuivre ainsi qu'Arturo Latuz, directeur du Syndicat professionnel de Caletones, avaient été licenciés de leur emploi. Il semble que, dans ces cas, l'entreprise ait eu recours à l'une des causes de licenciement introduites dans la législation par le décret-loi no 930 de 1975, à savoir la participation à des actes illicites ayant provoqué l'absence du travailleur. En effet, ces personnes avaient été assignées à résidence, alors que s'était produit un arrêt de travail ou un absentéisme d'une partie des ouvriers d'El Teniente (la mesure d'assignation à résidence avait été rapportée par la suite). Les intéressés avaient présenté un recours devant la justice du travail et l'affaire était encore en instance. Du fait de leur perte d'emploi, les personnes en cause avaient perdu automatiquement leurs charges syndicales et avaient été remplacées par des nouveaux dirigeants en vertu de la procédure prévue parle décret-loi no 198.
- 399. A sa session de mai 1978, le comité avait rappelé que les dispositions législatives qui exigent que tous les dirigeants syndicaux doivent appartenir à la profession dans laquelle l'organisation exerce son activité peuvent mettre en péril l'exercice des droits syndicaux. En effet, le licenciement d'un travailleur dirigeant syndical peut, en lui faisant perdre ainsi sa qualité de dirigeant syndical, porter atteinte à la liberté d'action de l'organisation et au droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants et, même, favoriser des actes d'ingérence de la part de l'employeur. En outre, le comité avait estimé que les cas relatifs à des dirigeants des secteurs bancaire et maritime révélaient l'existence d'une intervention discrétionnaire des autorités administratives dans les affaires internes des syndicats incompatible avec les principes de la liberté syndicale.
- 400. Le Conseil d'administration avait alors, sur recommandation du comité, demandé au gouvernement d'intervenir en vue de la réintégration des intéressés dans leurs fonctions syndicales et, en cas de licenciements, dans leurs emplois et d'adresser le texte du jugement qui serait prononcé dans le cas de MM. Juan Fincheira, Milton Puga, Carlos Arellano et Arturo Latuz.
- 401. Le gouvernement indique dans son rapport du 31 octobre 1978 que les quatre anciens dirigeants des travailleurs du cuivre ont abouti à un accord avec l'Entreprise nationale du cuivre devant le tribunal de Rancagua. Le gouvernement joint le texte de cet accord en annexe à son rapport. Le comité examinera les informations ainsi communiquées à sa prochaine session.
- b) Dissolution de plusieurs organisations syndicales
- 402. Peu de temps avant la session du comité, des allégations ont été présentées par plusieurs organisations plaignantes au sujet de la dissolution par le gouvernement de certaines organisations syndicales. Le texte des communications adressées à l'OIT sur cette question a été transmis au gouvernement qui n'a pas encore adressé d'observations sur cette question.
- 403. Le comité a pris connaissance des dispositions du décret-loi no 2346 du 17 octobre 1978 publié au Journal officiel qui a trait à la dissolution de sept organisations syndicales. L'exposé des motifs du décret indique, en premier lieu, qu'il est du devoir de l'état de veiller à ce que les "institutions intermédiaires" agissent dans le cadre de leur compétence et de protéger les citoyens contre les activités qui servent directement ou indirectement au développement d'antagonismes sociaux ou de doctrines subversives contraires à l'intérêt général. En second lieu, il est affirmé que la conduite des organisations auxquelles se réfère le décret-loi révèle que leurs moyens d'action et leurs objectifs coïncident avec les principes et les buts de la doctrine marxiste. De ce fait, poursuit l'exposé des motifs, ces organisations ont dénaturé leur fonction de façon grave et réitérée à tel point que leur existence et leur fonctionnement sont inconciliables avec la nécessaire sauvegarde de l'unité nationale.
- 404. En conséquence, sont interdites et considérées comme organisations illicites: la Confédération Ranquil, la Confédération Unité ouvrière paysanne, la Fédération nationale des syndicats de la métallurgie, le Syndicat professionnel des ouvriers de la construction de Santiago, la Fédération nationale du textile et de l'habillement, la Fédération industrielle du bâtiment, du bois et des matériaux de construction et la Fédération industrielle nationale minière. Ces organisations sont dissoutes et leur personnalité juridique est, le cas échéant, annulée. Il en est de même pour les organisations qui leur sont affiliées. Enfin, leurs biens sont transférés à l'état.
- 405. Quels que soient les motifs invoqués par le gouvernement dans le décret-loi portant dissolution de ces organisations, le comité doit constater que la procédure suivie dans le cas d'espèce pour la dissolution de ces organisations n'est pas compatible avec le principe selon lequel les organisations de travailleurs ne doivent pas être dissoutes par voie administrative. Ces mesures revêtent en outre une gravité particulière du fait qu'elles visent aussi les syndicats affiliés aux organisations mentionnées dans le décret-loi et que leurs biens ont été transférés à l'Etat en vertu de l'article 4 de celui-ci. En conséquence, le comité souhaite prier le gouvernement de fournir aussitôt que possible ses observations sur cet aspect du cas.
- IV. Libertés civiles liées à l'exercice des droits syndicaux
- 406. Dans son rapport précédent, le gouvernement avait indiqué que l'état de siège n'avait pas été prorogé le 11 mars 1978. Le pays était, de ce fait, régi par les dispositions relatives à L'état d'urgence, dispositions plus souples que celles sur l'état de siège. Le gouvernement avait en outre déclaré espérer que les restrictions liées à l'état d'urgence pourraient être éliminées autant que possible dans un proche avenir. Les autorités gouvernementales avaient signalé au représentant du Directeur général l'importance qu'il convient d'attribuer à l'amnistie accordée par le décret no 2191 du 18 avril 1978.
- 407. A sa session de juin 1978, le Conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, noté avec intérêt les mesures prises par le gouvernement, principalement au sujet de l'amnistie. Il avait en outre exprimé l'espoir que d'autres mesures seraient adoptées le plus tôt possible en vue de rétablir le plein exercice des droits civils et de permettre ainsi le retour à une situation syndicale normale.
- 408. Au sujet des allégations relatives à la détention ou à la disparition de syndicalistes ou d'anciens syndicalistes, le comité avait, en mai 1978, regretté que les indications fournies par le gouvernement ne permettaient pas d'observer de progrès quant aux informations attendues sur les personnes mentionnées dans le présent cas, et qui seraient détenues ou disparues. En outre, le comité avait relevé les contradictions qui existaient entre les déclarations du gouvernement et des plaignants, lesquels avaient fourni diverses précisions au sujet de la détention de nombreux syndicalistes ou anciens syndicalistes qui, par la suite, avaient disparu. Le comité avait également observé que divers recours d'habeas corpus se trouvaient en instance devant les tribunaux au sujet des personnes disparues et que les autorités informeraient l'OIT sur le cours de ces procédures judiciaires. Dans ces conditions, le Conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, demandé au gouvernement de poursuivre les recherches destinées à retrouver les personnes en question et d'adresser des informations sur le résultat des procédures judiciaires en cours.
- 409. Dans son rapport du 31 octobre 1978, le gouvernement fournit des informations sur 24 des 67 personnes mentionnées dans la dernière liste établie par le comité. Tout en notant ces informations, le comité souhaite demander au gouvernement de continuer à adresser des renseignements au sujet des personnes figurant dans cette liste.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 410. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
- a) au sujet de l'adoption d'une nouvelle législation syndicale, de noter que celle-ci est en voie d'achèvement et d'exprimer l'espoir que le comité sera à même de l'examiner dès sa prochaine session et qu'elle sera pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale;
- b) au sujet de la négociation collective, d'exprimer l'espoir que le gouvernement tiendra compte, lors de son rétablissement, des principes et considérations exprimées par le comité lors de sa précédente session en ce qui concerne l'arbitrage obligatoire pour les conflits collectifs;
- c) au sujet des allégations relatives à des conflits collectifs de travail, de noter que le comité examinera de façon plus approfondie à sa prochaine session les informations fournies par le gouvernement sur ce point;
- d) au sujet des allégations relatives aux élections syndicales, de signaler à l'attention du gouvernement les considérations exprimées au paragraphe 396 ci-dessus et de le prier d'adresser des informations sur les motifs pour lesquels le décret-loi sur les élections fixe certains cas d'inéligibilité;
- e) au sujet des allégations relatives à la destitution et au licenciement de dirigeants syndicaux, de noter que le comité examinera à sa prochaine session le texte du jugement concernant MM. Juan Fincheira, Milton Puga, Carlos Arellano et Arturo Latuz;
- f) au sujet des allégations relatives à la dissolution d'organisations syndicales, de signaler que la procédure suivie dans le cas d'espèce n'est pas compatible avec le principe selon lequel les organisations de travailleurs ne doivent pas être dissoutes par voie administrative et de prier le gouvernement de fournir ses observations sur cette question aussitôt que possible;
- g) au sujet des allégations relatives à la détention ou à la disparition de syndicalistes ou d'anciens syndicalistes, de noter les informations fournies par le gouvernement et de le prier de continuer à adresser des informations sur les personnes mentionnées dans la liste établie par le comité dans son 177e rapport;
- h) de prendre note de ce rapport intérimaire.
Z. ANNEXE
Z. ANNEXE- Dernières informations communiquées par le gouvernement au sujet des personnes qui auraient été arrêtées ou qui seraient disparues
- Informations communiquées par le gouvernement
- l. Sont en liberté:
- Gutierrez Ramirez, Mario Dirigeant de la Fédération du métal
- Le gouvernement a retrouvé Gutierrez Ramirez Mario, domicilié à Camino La Sierra, qui n'a jamais été détenu.
- Huainiquir Benavides, Joel Dirigeant national de la Confédération du cuivre
- A été remis en liberté en vertu du décret no 414 du 16 septembre 1976.
- Macaya Molina, Hector Ivan Secrétaire du Syndicat textile d'Oveja Tomé
- Réside actuellement dans le département de Tomé.
- Rodriguez Moya, Edmundo pour Ex-président national des travailleurs du cuir et de la chaussure
- A demandé un passeport l'Allemagne le 22 novembre 1977.
- 2 Ont quitté le pays:
- Araya Zuleta, Bernardo Ancien dirigeant de la CUT
- A quitté le pays pour l'Argentine le 7 avril 1976. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Berríos Cataldo, Lincoyán Dirigeant de l'Association nationale des employés municipaux
- A quitté le pays pour l'Argentine le 17 février 1977. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Cepeda Marinkovic, Horacio Dirigeant syndical
- A quitté le pays pour l'Argentine le 6 janvier 1977. N'a pas été détenu et on ignore son domicile actuel.
- Cruz Diaz, Lisandro Dirigeant syndical
- A quitté le pays pour l'Argentine le 11 janvier 1977. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Lazo Santander, Luis Ancien dirigeant de la Fédération des travailleurs des entreprises électriques
- A quitté le pays pour l'Argentine le 11 février 1977. Son retour au pays n'a pas été enregistré
- Orellana Catalan, Juan Ancien dirigeant de la Confédération Ranquíl
- A quitté le pays pour la Bolivie le 14 août 1973. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Pereira Plaza, Reinalda Dirigeante syndicale
- A quitté le pays pour l'Argentine le 21 décembre 1976. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Pinto Arroyo, Edras Dirigeant syndical
- A quitté le pays pour l'Argentine le 6 janvier 1977.
- Pizarro Molina, Waldo Dirigeant textile
- A quitté le pays pour l'Argentine le 21 décembre 1976. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Portilla Portilla, Armando Dirigeant textile
- A quitté le pays pour l'Argentine le 11 janvier 1977. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- Veliz Ramirez, Hector Délégué des ouvriers municipaux à la CUT
- A quitté le pays pour l'Argentine.
- Zamorano Donoso, Mario Ancien dirigeant de la Fédération du cuir et de la chaussure
- A quitté le pays pour l'Argentine le 13 mai 1976. Son retour au pays n'a pas été enregistré.
- 3 N'ont pas été arrêtés. Pas d'informations sur leur domicile actuel
- Atencio Cortes, Vicente Ancien président de l'Union des ouvriers municipaux d'Arica
- Le gouvernement avait indiqué, en janvier 1977, qu'il avait accompli une peine de détention pour des actions contraires à la sécurité de l'Etat et qu'il avait été remis en liberté le 11 septembre 1976.
- Cáceres Gonzalez, Jorge Dirigeant syndical
- Castillo Tapia, Gabriel Ancien dirigeant syndical des travailleurs du salpêtre
- Cerda Cuevas, Cesar Ancien dirigeant paysan
- Diaz Lopez, Victor Ancien dirigeant de la CUT
- Diaz Silva, Lenin Dirigeant syndical des mines "La Exótica"
- Leon Muñez, Gabriel Dirigeant syndical des crieurs de journaux de Talcahuano
- Lopez Suarez, Nicolas Ancien dirigeant national de la CUT