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- 435. Le comité a déjà examiné ce cas en novembre 1977 et il a présenté à cette session des conclusions intérimaires qui figurent aux paragraphes 272 à 287 de son 172e rapport. Le Conseil d'administration a approuvé ce rapport en novembre 1977 également (204e session).
- 436. Le Paraguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 437. Les plaignants ont déclaré que le mouvement syndical d'inspiration chrétienne faisait l'objet d'une véritable persécution au Paraguay. Ils ont affirmé également que la torture était pratiquée sans scrupules et estimaient qu'un accrochage survenu en avril 1976 entre les forces armées et un groupe de guérilleros avait servi de prétexte pour s'attaquer à toute organisation qui oeuvre en vue d'une réforme sociale et de l'amélioration du sort misérable des paysans.
- 438. Les allégations en suspens concernent d'abord les dirigeants syndicaux du secteur paysan José Gill Ojeda Falkan, José Parra Gaona et Pedro Fretez qui, selon les plaignants, avaient été arrêtés et torturés au début du mois de mai 1976. Ces derniers ont ajouté qu'un autre militant du secteur paysan, Severo Delgado, avait, à la même époque, été recherché et que sa maison avait fait l'objet d'une perquisition; il avait pu s'échapper au Brésil avec d'autres personnes. La Centrale latino-américaine de travailleurs (CLAT) a encore signalé la disparition, le 4 avril 1976, du dirigeant syndical paysan Martin Rolón Centurión. L'intéressé serait vivant: détenu dans une caserne de la garde nationale et soumis à des tortures, il n'a jamais été accusé d'un délit quelconque, ni jugé ni condamné. La CMT a précisé qu'il avait été blessé le jour de son arrestation en cherchant à défendre son foyer; il se trouvait au secret dans un état pitoyable. Les trois frères de Martin Rolón Centurión étaient également détenus: Domingo au Département des investigations (où se trouveraient des chambres de torture), Melchor et Santiago détenus au pénitencier d'Emboscada et poursuivis devant les tribunaux.
- 439. Le gouvernement affirmait qu'à aucun moment il n'avait été porté atteinte à la liberté syndicale; les véritables dirigeants syndicaux, anciens et actuels, n'avaient jamais été gênés dans l'exercice de leurs fonctions; quant aux autres, le gouvernement déclarait ne pas connaître leur sort et rejetait les allégations présentées: ceux qui agissaient en connaissance de cause dans le domaine du travail à l'intérieur du cadre établi par la Constitution et les lois nationales n'avaient jamais fait état de difficultés que ce fût à l'intérieur ou en dehors de leurs syndicats. Quant à MM. José Gill Ojeda Falkan, José Parra Gaona et Pedro Fretez, ils restaient incarcérés à la prison d'Emboscada, à la disposition de la justice ordinaire, et étaient accusés d'avoir enfreint la loi no 209 sur la défense de la paix publique et de la liberté des personnes. Ces faits démontraient, au dire du gouvernement, que ces personnes ne faisaient partie d'aucune organisation syndicale ou similaire opérant légalement dans le pays.
- 440. Le comité avait estimé nécessaire d'obtenir au sujet de ces différents points un complément d'informations. Sur ses recommandations, le Conseil d'administration avait demandé en particulier au gouvernement:
- - de fournir des informations détaillées sur les faits spécifiques reprochés à José Gill Ojeda Falkan, José Parra Gaona et Pedro Fretez et de communiquer, dès qu'ils seraient prononcés, le texte des jugements rendus à l'égard de ceux-ci, avec leurs attendus;
- - de communiquer des renseignements sur la situation et les faits précis reprochés à Severo Delgado et Martin Rolón Centurión, ainsi qu'aux frères de ce dernier, d'indiquer si des poursuites judiciaires avaient été engagées contre eux et, dans l'affirmative, de transmettre le texte des jugements prononcés avec leurs attendus;
- - de faire parvenir ses observations en réponse aux allégations concernant les mauvais traitements dont plusieurs détenus auraient été victimes.
- 441. Le gouvernement a répondu par une lettre du 19 septembre 1978. Il signale que José Gill Ojeda Falkan a fait l'objet d'un mandat d'arrêt par une décision du 7 décembre 1976; il est poursuivi dans une affaire "Carlos Guillermo Brañas et autres" pour infraction à la loi no 209/70 précitée: il est accusé d'être mêlé à un groupe subversif, l'Organisation politique militaire (OPM), qui menait des activités clandestines dans le pays. La découverte d'une de ses cellules par la police, ajoute-t-il, a provoqué un affrontement armé dans les premiers jours d'avril 1976. Trois membres de l'OPM, dont Martin Rolón Centurión, furent blessés et moururent par la suite; deux officiers de police furent également blessés. M. Ojeda Falkan a été incarcéré à la prison d'Emboscada. Le 15 mars 1978, il a subi un interrogatoire judiciaire qui a été joint à son dossier. Le gouvernement souligne que les informations sur Martin Rolón Centurión proviennent d'un rapport du tribunal pénal de première instance.
- 442. José Parra Gaona, Pedro Fretez et Severo Candia Delgado, poursuit le gouvernement, ont été libérés respectivement le 13 décembre 1977, le 20 avril 1978 et le 1er mars 1977. Il conclut qu'aucune des personnes citées n'a été poursuivie pour avoir exercé des activités syndicales puisque aucune d'elles n'appartient à un groupement syndical légalement constitué.
- 443. Sur ce dernier point, le comité désire souligner, comme il l'a déjà fait lors de son dernier examen de cette affaire, que l'absence d'une reconnaissance officielle d'organisations nationales de travailleurs ne peut justifier le rejet des allégations quand il ressort des plaintes que ces organisations ont pour le moins une; existence de fait.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 444. Le comité note les renseignements donnés par le gouvernement sur les circonstances de la mort de M. Martin Rolón Centurión. Il prend acte par ailleurs de la libération de MM. José Parra Gaona, Pedro Fretez et Severo Candia Delgado. Néanmoins, MM. Parra Gaona et Fretez en tout cas, arrêtés au début de mai 1976, ont passé de longs mois en prison sans qu'il ressorte des informations disponibles qu'ils aient été jugés; en outre, le gouvernement n'a pas indiqué les actes précis qui ont entraîné leur incarcération. Certes, le fait d'exercer une activité syndicale ou de détenir un mandat syndical n'implique aucune immunité vis-à-vis du droit pénal commun. Mais, sauf pour une infraction dûment établie en justice à cette législation, la détention prolongée de syndicalistes risque d'apparaître comme une entrave au bon fonctionnement d'une organisation syndicale et comme une mesure d'intimidation à l'égard de ses militants et même de ses adhérents.
- 445. Pour ce qui est de M. José Gill Ojeda Falkan, un long délai s'est également écoulé entre la décision d'émettre un mandat d'arrêt contre lui et son interrogatoire par un magistrat. Il se, trouve d'ailleurs toujours en instance de jugement. Le comité veut; croire que l'intéressé sera jugé rapidement par un tribunal ordinaire et que le gouvernement communiquera le texte du jugement prononcé avec ses attendus, afin que le comité puisse s'assurer que cette personne n'est pas détenue en raison d'activités syndicales légitimes.
- 446. Le gouvernement n'a pas enfin fait parvenir ses observations sur les allégations selon lesquelles plusieurs syndicalistes cités par les plaignants auraient subi de mauvais traitements.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 447. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de prendre note avec intérêt de la libération de MM. José Parra Gaona, Pedro Fretez et Severo Candia Delgado, tout en attirant l'attention du gouvernement sur les principes et considérations, exposés au paragraphe 444;
- b) de prendre note avec regret des faits relatés par le gouverne-, ment dans sa communication, à l'occasion desquels M. Martin Rolón Centurión a trouvé la mort, et de demander à nouveau au gouvernement de fournir des informations sur la situation des frères de ce dernier et d'indiquer si des procédures judiciaires ont été engagées contre eux;
- c) d'exprimer l'espoir que M. José Gill Ojeda Falkan sera jugé rapidement et que le gouvernement communiquera, dès qu'il sera prononcé, le texte du jugement avec ses attendus;
- d) de demander à nouveau au gouvernement de faire parvenir ses observations en réponse aux allégations concernant les mauvais traitements dont plusieurs détenus auraient été victimes;
- e) de prendre note de ce rapport intérimaire.