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- 4. Depuis plusieurs années, le Comité de la liberté syndicale est saisi de diverses plaintes en violation du droit d'association et de la liberté syndicale au Nicaragua. Cinq cas sont actuellement en instance devant le comité, dont deux (1129 et 1298) présentés par des organisations internationales de travailleurs (CLAT, CMT et CISL) et trois (1344, 1351 et 1372) par l'Organisation internationale des employeurs.
- 5. Les cas nos 1298 et 1344 ont été examinés pour la dernière fois par le comité à sa réunion de novembre 1986 et les cas nos 1129 et 1351 en février 1987. (Voir respectivement 246e rapport, paragr. 197 à 265, et 248e rapport, paragr. 421 à 436, approuvés par le Conseil d'administration à ses 234e et 235e session (nov. 1986 et fév.-mars 1987).) En l'absence de réponse du gouvernement, le comité n'a pas encore examiné le cas no 1372.
- 6. Depuis lors, le gouvernement a fourni des observations dans des communications des 5 mai 1987 (pour le cas no 1129), 14 août 1987 (pour les cas nos 1129, 1298, 1344 et 1351), 13 janvier 1988 (pour les cas nos 1129 et 1298) et 3 février 1988 (pour les cas nos 1298, 1344 et 1372).
- 7. En outre, par une communication du 17 juin 1987, plusieurs délégués employeurs à la 73e session (1987) de la Conférence internationale du Travail ont présenté une plainte en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Nicaragua pour violation des conventions (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, toutes trois ratifiées par le Nicaragua. Le gouvernement a fourni ses observations sur cette plainte dans des communications des 5, 19 et 28 janvier 1988.
A. Plaintes déposées par des organisations de travailleurs
A. Plaintes déposées par des organisations de travailleurs
- a) Examens antérieurs des cas par le comité
- 8 Dans le cas no 1129 présenté par la CLAT et la CMT, les allégations portaient sur la condamnation de syndicalistes par les tribunaux populaires antisomozistes, la perquisition avec mise à sac des archives de la Centrale des travailleurs du Nicaragua (CTN), l'arrestation de syndicalistes accompagnée de perquisition aux domiciles de certains d'entre eux et de menaces de mort.
- 9 A sa réunion de février 1987, la comité avait prié le gouvernement d'envoyer ses observations sur ces allégations et, en particulier, de fournir le texte des jugements rendus par les tribunaux populaires antisomozistes à l'encontre des syndicalistes mentionnés par les plaignants.
- 10 Dans le cas no 1298 présenté par la CISL, les allégations portaient sur l'arrestation de syndicalistes, la suspension de la revue syndicale de la Confédération d'unification syndicale (CUS), des mesures d'intimidation et des menaces proférées par la Sûreté de l'Etat et des fonctionnaires à l'encontre de syndicalistes de la CUS.
- 11 A sa réunion de novembre 1986, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution du procès actuellement en cours contre certains syndicalistes pour le délit de vol de bétail et d'envoyer ses observations au sujet des syndicalistes auxquels il ne s'était pas référé et qui, selon la CISL, seraient détenus (Eduardo Gutiérrez, Juan Gaitán et Enrique Flores). Le comité avait demandé également au gouvernement de répondre à l'allégation selon laquelle les filles, femmes et mères de syndicalistes détenus avaient été menacées de prison si leurs pères, maris et fils ne renonçaient pas à leur affiliation à la CUS. Enfin, le comité avait déploré que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations contenues dans les communications de la CISL des 14 et 23 janvier 1986 (suspension de la revue syndicale de la CUS; convocations par la sécurité de l'Etat de syndicalistes de la CUS, accompagnées d'actes d'intimidation et de menaces). Le comité avait demandé au gouvernement d'envoyer des informations sur ces aspects du cas.
- b) Réponses du gouvernement
- 12 Dans sa réponse du 5 mai 1987, le gouvernement fournit le texte d'un arrêt rendu par le tribunal populaire antisomoziste d'appel le 26 juin 1985 à l'encontre de diverses personnes mentionnées dans le cas no 1129. L'arrêt rendu par le tribunal indique que les intéressés sont membres d'une organisation contre-révolutionnaire, le Front démocratique nicaraguayen. Certains d'entre eux ont voyagé clandestinement au Honduras où ils ont eu des contacts avec des dirigeants de l'organisation et où ils ont été chargés de missions de renseignements militaires et économiques. Ils ont également participé au recrutement de personnes pour l'organisation, ainsi qu'à des réunions de caractère subversif. Considérant, à l'encontre des demandes formulées par les défenseurs, que le tribunal de première instance avait réuni les preuves suffisantes pour condamner les personnes en cause, le tribunal d'appel confirme leur condamnation à une peine de prison, en réduisant cependant cette peine de huit à six ans pour MM. Narciso, Silva Gaitan, Arcadio Antonio Ortiz Espinoza et Milton Silva Gaitan et de cinq à quatre ans pour MM. Orlando Antonio Napoleon Molina Aguilera, Orlando Antonio Mendoza Laguna et Daniel Antonio Aguilar Zapata.
- 13 Le gouvernement fournit également dans ses communications des 13 janvier et 3 février 1988 des textes de deux autres arrêts rendus par des tribunaux populaires antisomozistes d'appel. Un de ces arrêts prononce un non-lieu en faveur de personnes mentionnées comme syndicalistes par les plaignants qui étaient accusées de vol de bétail. L'autre arrêt confirme la peine de cinq ans de prison et deux ans de détention avec travaux forcés pour violation de la loi sur le maintien de l'ordre et de la sécurité publics prononcée à l'encontre de Ricardo Efrain Cervantes Rizo en raison de son appartenance à une organisation contre-révolutionnaire, le Mouvement démocratique nicaraguayen, de sa participation à des réunions subversives destinées à planifier des assauts et localiser un local d'entraînement militaire et de l'élaboration de tracts appelant à boycotter le quatrième anniversaire de la révolution et à saboter les pompes à essence de l'entreprise ENABUS.
- 14 Dans sa communication du 14 août 1987, le gouvernement explique que les tribunaux populaires antisomozistes ont été créés conformément au droit international et à la législation nationale pour connaître des délits qui portent atteinte à l'ordre public et à la sécurité de la nation. Il ne s'agit donc pas, selon le gouvernement, de tribunaux appelés à juger une classe sociale déterminée ou des personnes ayant une idéologie particulière. Au contraire, leur compétence est déterminée objectivement et tout citoyen, quelles que soient sa condition sociale, sa religion, sa couleur, sa race, qui commet un délit contre l'ordre et la sécurité publics sera jugé par ces tribunaux. La compétence du tribunal est déterminée par la nature du délit et non par la qualité des personnes.
- 15 Pour ce qui est des perquisitions effectuées au siège de la CTN, le gouvernement réaffirme que ces événements ont été motivés par une division interne de cette centrale syndicale qui persiste encore et dans laquelle le gouvernement ne s'est pas ingéré. Le gouvernement indique que le développement du mouvement syndical dans le pays est si large qu'il se produit des divergences au sein même des centrales syndicales. Le gouvernement veille uniquement à ce que ces divergences, naturelles dans une société d'ouverture, se maintiennent dans un cadre qui n'altère pas l'ordre public et ne nuise pas aux tiers.
- 16 Le gouvernement nie également que des détenus ou familles de détenus aient fait l'objet de tortures ou de menaces de mort. A cet égard, le gouvernement estime que le comité devrait demander les éléments de preuve nécessaires à l'organisation plaignante. Le gouvernement affirme que jamais l'élimination physique et les tortures n'ont constitué une pratique délibérée et que, depuis le triomphe de la révolution, le gouvernement a montré une profonde préoccupation et un intérêt pour le respect scrupuleux à la vie et à l'intégrité des personnes. Selon le gouvernement, si quelques cas d'irrégularités se sont produits, ils sont exceptionnels, ont fait l'objet d'enquêtes et ont été punis avec toute la rigueur judiciaire nécessaire.
- 17 Pour ce qui est des problèmes relatifs à la CUS, le gouvernement réaffirme que ceux-ci - et notamment l'assaut donné au siège de la centrale - ont été motivés par des divergences en son sein quant à son affiliation ou non à un groupement politique déterminé. On ne peut interpréter comme "passivité" de la police une attitude de non-ingérence dans ce type de conflits.
- 18 Le gouvernement rejette catégoriquement les allégations relatives aux menaces proférées à l'encontre de familles de syndicalistes pour obliger ces derniers à se désaffilier. Le gouvernement déclare ne pas faire usage de ce type de chantage. Il affirme qu'il n'est pas intéressé à détruire ou à porter atteinte à l'existence d'une organisation syndicale quelle qu'elle soit, car il est partisan d'un pluralisme politique et syndical. La preuve de cette affirmation, ajoute-t-il, est donnée par le fait que la CUS et les autres organisations syndicales continuent de fonctionner librement.
- 19 Au sujet de la suspension de la revue de la CUS, le gouvernement indique, dans sa communication du 3 février 1988, que cette revue a été éditée et mise en circulation 19 fois sans avoir accompli les formalités d'inscription prévues par la loi générale des moyens de communication. Cette obligation n'ayant pas été remplie, la revue a fait l'objet d'une sanction de la Direction des moyens de communication. Le gouvernement ajoute qu'avec la levée de l'état d'urgence il a autorisé le fonctionnement d'une série de moyens de communication, parmi lesquels la revue de la CUS.
B. Plaintes déposées par l'Organisation internationale des employeurs
B. Plaintes déposées par l'Organisation internationale des employeurs
- a) Examens antérieurs des cas
- 20 Dans le cas no 1344, l'OIE avait allégué que plusieurs dirigeants du Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP), dont son président, M. Enrique Bolaño, avaient vu leurs biens, leurs terres ou leurs entreprises confisqués. La Direction des moyens de communication avait, en outre, interdit de publier dans le journal La Prensa une lettre ouverte du COSEP ainsi que les réactions de M. Bolaños à la confiscation des terres et à des accusations diffamatoires prononcées contre lui. L'OIE faisait également état de l'expulsion du pays de M. Frank Bendaña, vice-président du COSEP, et de la fomentation de désordres par des travailleurs venant de l'extérieur et utilisant des véhicules de l'armée dans l'entreprise Bolaños-Saimsa.
- 21 A sa réunion de novembre 1986, le comité avait noté que le gouvernement n'avait envoyé des informations que sur une seulement des nombreuses allégations (à savoir la confiscation des terres de M. Bolaños). Etant donné que toutes les allégations avaient pour objet de démontrer une attitude discriminatoire à l'égard du COSEP, le comité avait demandé au gouvernement d'envoyer de toute urgence une réponse à cet égard.
- 22 Dans le cas no 1351, l'OIE avait allégué que, le 7 septembre 1985 (Journée de l'entreprise privée), le président du COSEP avait été assigné à résidence à son domicile. Par la suite, l'OIE s'était référée au rétablissement de l'état d'urgence le 9 janvier 1987 pour une période d'un an et sur tout le territoire, ainsi qu'à la suspension de 13 dispositions de la nouvelle Constitution, parmi lesquelles l'inviolabilité du domicile, de la correspondance et des communications (art. 26); le droit d'exprimer des opinions en public et en privé, individuellement ou collectivement, verbalement, par écrit ou par tout autre moyen (art. 30); le droit de circuler dans le pays, d'entrer et de sortir (art. 31); la garantie contre la détention arbitraire (art. 33); le droit à l'habeas corpus (pour des actes contraires à l'ordre public) et l'amparo (art. 45); le droit des travailleurs de constituer des organisations pour la défense de leurs intérêts (art. 49); le droit de réunion sans autorisation préalable (art. 53); le droit de procéder à des manifestations publiques (art. 54); le droit à une information exacte, de chercher, recevoir et diffuser des informations et des opinions, verbalement, par écrit ou par tout autre moyen (art. 66); la garantie contre la censure (art. 67 et 68 (deuxième partie)); le droit de grève (art. 83).
- 23 A sa réunion de février 1987, le comité avait demandé au gouvernement de lever l'état d'urgence dans un proche avenir. Dans cette attente, il avait demandé au gouvernement de limiter l'application de l'état d'urgence à certaines zones géographiques du pays. De toute manière, avait-il ajouté, il serait nécessaire de sauvegarder l'exercice des droits spécifiquement syndicaux tels que le droit de constituer des organisations, le droit de réunion dans les locaux syndicaux et le droit de grève dans les services non essentiels. Dans cette perspective, le comité avait demandé au gouvernement de recourir dans ses rapports avec les organisations professionnelles à des mesures prévues par le droit ordinaire plutôt qu'à des mesures d'exception.
- 24 Dans le cas no 1372, l'OIE avait allégué que le gouvernement avait ordonné la fermeture pour une durée indéterminée du quotidien La Prensa, organe de presse utilisé régulièrement par le COSEP pour diffuser des informations concernant les employeurs et les problèmes que rencontrent ces derniers et leurs organisations.
- 25 A sa réunion de mai 1987, le comité avait lancé un appel pressant au gouvernement pour qu'il fournisse d'urgence ses observations sur ce cas.
- b) Réponse du gouvernement
- 26 Dans sa communication du 14 août 1987, le gouvernement réaffirme que les expropriations de propriétés agraires répondaient aux besoins d'importants secteurs de la population rurale concentrée de façon très dense dans quelques zones. Ces affectations de terres ont été faites conformément à la loi. Il ne s'agit pas, selon le gouvernement, d'une volonté discriminatoire à l'encontre du COSEP puisqu'une bonne partie des membres de cet organisme se livrent normalement à leurs activités de production et exercent pleinement leurs droits, tant dans leurs relations avec le gouvernement que dans la défense de leurs intérêts particuliers. De nombreux affiliés du COSEP reçoivent un financement direct de l'Etat pour leurs activités économiques.
- 27 Le gouvernement fournit dans sa communication du 3 février 1988 des informations complémentaires au sujet des allégations concernant la confiscation de biens de dirigeants du COSEP. Dans les cas de MM. Bendaña et Lanzas, leurs sociétés agricoles ont fait, conformément à la loi de réforme agraire, l'objet d'une mesure d'expropriation après qu'il eut été constaté que l'exploitation en était déficiente. Des recours ont été présentés devant le Tribunal agraire qui a confirmé les résolutions du ministère du Développement agricole et de la Réforme agraire. L'entreprise agricole de M. Gurdián se trouvait dans une situation difficile vis-à-vis des banques, qui faisait l'objet d'une instance devant les tribunaux pendant le somozisme. L'entreprise a été occupée par les travailleurs de la société qui étaient exploités depuis de nombreuses années. Cette opération s'est effectuée indépendamment du gouvernement qui n'a confisqué cette propriété à aucun moment. Pour ce qui est de M. Reyes, le gouvernement indique qu'en 1983 cette personne a été déclarée absente par résolution du ministère de la Justice, conformément au décret no 760 de 1981. Ce décret prévoyait la confiscation des biens nécessaires à la reconstruction nationale, appartenant à des propriétaires qui avaient abandonné le pays. Ces absences pouvaient être justifiées devant le ministère de la Justice, et les intéressés pouvaient faire une déclaration de non-abandon de leurs biens, mais M. Reyes n'a jamais fait usage de ces droits. Enfin, selon le gouvernement, l'allégation concernant la fomentation de désordres dans l'entreprise Bolaños-Saimsa est dénuée de fondement.
- 28 Pour ce qui est des allégations concernant l'expulsion du pays de M. Bendaña, le gouvernement indique qu'il n'y a aucune trace d'une telle mesure dans les archives du ministère de la Justice.
- 29 Au sujet des événements liés à la Journée de l'entreprise privée, le gouvernement réaffirme, dans sa communication du 14 août 1987, qu'aucun citoyen n'a été privé de liberté à cette occasion.
- 30 Concernant la fermeture du journal La Prensa, le gouvernement indique, dans sa communication du 3 février 1988, que ce journal a été de nouveau autorisé à circuler, sans aucune censure, à partir de la mi-octobre 1987. Dans ces éditions, ont paru des articles et entrevues de dirigeants du COSEP, dont MM. Bolaños et Gurdián.
C. Plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution
C. Plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution
- a) Allégations contenues dans la plainte
- 31 Cette plainte, datée du 17 juin 1987, est signée de MM. Henri Georget, délégué employeur, Niger, Johan von Holten, délégué employeur, Suède, Hiroshi Tsujino, délégué employeur, Japon, Javier Ferrer Dufoll, délégué employeur, Espagne, Arthur Joao Donato, délégué employeur, Brésil, Raoul Inocentes, délégué employeur, Philippines, Wolf Dieter Lindner, délégué employeur, République fédérale d'Allemagne, Tom D. Owuor, délégué employeur, Kenya, et Ray Brillinger, délégué employeur, Canada. Par des communications séparées, M. Roberto Favelevic, délégué employeur, Argentine, et M. Vincente Bortoni, délégué employeur, Mexique, se sont associés à la plainte.
- 32 Dans leur communication, les plaignants rappellent que, depuis 1981, 21 plaintes au moins ont été déposées au BIT par des organisations de travailleurs et d'employeurs relatives à des violations par le gouvernement du Nicaragua de ses obligations en vertu de la convention no 87. Les violations ont consisté en meurtres (cas no 1007), agressions physiques (cas nos 1031, 1129, 1169, 1185 et 1298), tortures (cas nos 1283 et 1344), arrestations arbitraires (cas nos 1007, 1031, 1047, 1084, 1129, 1148, 1169, 1185, 1208, 1283, 1298, 1344 et 1351), violations de domiciles (cas nos 1129 et 1148), pillages de bureaux (cas nos 1129 et 1298), confiscation de propriétés (cas no 1344), restrictions à la liberté de mouvement (cas nos 1103, 1114, 1129, 1317 et 1351), violations de la liberté d'expression (cas nos 1084, 1129 et 1283) et nombre d'autres questions comprenant la non-reconnaissance d'organisations de travailleurs indépendants jusqu'à ce que des plaintes puissent être présentées au BIT. Toute organisation professionnelle d'employeurs ou de travailleurs qui ne se soumet pas à l'autorité du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) est, selon les plaignants, l'objet de répression par le gouvernement soit par l'intermédiaire de ses fonctionnaires, soit par celui de gangs organisés. Dans les faits, le Nicaragua est en état d'urgence depuis plusieurs années. Cet état d'urgence a été continuellement prolongé, le plus récemment par le décret no 245 du 9 janvier 1987. Les plaignants ajoutent que l'état d'urgence est utilisé par le gouvernement pour supprimer tous les droits et libertés essentiels à l'exécution satisfaisante de la convention no 87 et pour supprimer toute opposition aux intérêts de l'autorité. Par ailleurs, une nouvelle Constitution a été promulguée en janvier 1987 qui dénie implicitement aux employeurs le droit de s'associer dont ils jouissaient précédemment, tout en l'accordant à beaucoup d'autres catégories de personnes, ce qui est, pour les plaignants, une violation évidente de l'article 2 et de l'article 8, paragraphe 2, de la convention no 87.
- 33 Les plaignants allèguent en outre que le décret no 530, édicté par le gouvernement le 24 septembre 1980, a, depuis son application, subordonné les conventions collectives à l'approbation du ministère du Travail pour des raisons de politique économique, ce qui, en réalité, rend la liberté de négocier collectivement sans aucune signification. Les plaignants estiment que, nonobstant le fait que les organes compétents de l'OIT ont répété que cela est une violation de la convention no 98, le gouvernement n'a rien fait pour corriger la situation. En particulier, les salaires ne peuvent être l'objet de négociations collectives puisqu'ils sont déterminés par le Système national de travail et d'organisation des salaires (SNOTS) qui classifie chacune des formes concevables d'emploi et fixe les salaires leur correspondant. Les plaignants remarquent que cette violation de l'article 4 de la convention a été le sujet d'une recommandation de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
- 34 Les plaignants affirment en outre que l'organisation la plus représentative d'employeurs au Nicaragua est le Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP). Le COSEP est couvert par l'article 1 de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. Pourtant, selon les plaignants, le gouvernement n'a pas consulté le COSEP sur les procédures visant à assurer des consultations efficaces, tel qu'envisagé à l'article 2 de l'instrument. A l'inverse de ce qu'il a déclaré dans son rapport sur l'application de la convention, le gouvernement a aussi négligé de consulter le COSEP sur les questions couvertes par l'article 5 de la convention et en conséquence, d'après les plaignants, le gouvernement n'a respecté aucune de ses obligations au regard de la convention, dans la mesure où elles se rapportent aux consultations avec le COSEP.
- 35 En conclusion, les plaignants demandent qu'il soit procédé à l'examen de cette plainte et qu'un rapport soit établi par une commission d'enquête comme prévu à l'article 26, paragraphe 3, de la Constitution de l'OIT, puisque, en particulier, le gouvernement ignore les recommandations du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration et de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui, eux, se sont déjà prononcés sur les questions mentionnées ci-dessus.
- b) Décision du Conseil d'administration
- 36 A sa session de novembre 1987, le Conseil d'administration, sur proposition de son bureau, avait pris les décisions suivantes au sujet de la plainte en question:
- a) le gouvernement du Nicaragua, en tant que gouvernement contre lequel la plainte a été déposée, devrait être invité par le Directeur général à lui communiquer ses observations sur la plainte pour le 15 janvier 1988 au plus tard;
- b) à sa 239e session, le Conseil d'administration devrait déterminer à la lumière i) des recommandations du Comité de la liberté syndicale au sujet des aspects de la plainte reçue relatifs à la liberté syndicale, ii) des informations qui pourraient être fournies par le gouvernement du Nicaragua, iii) des recommandations du Comité de la liberté syndicale sur les cas encore en instance, si la plainte dans son ensemble doit être renvoyée à une commission d'enquête.
- c) Réponse du gouvernement
- 37 Dans sa réponse du 5 janvier 1988, le gouvernement affirme que, s'il est vrai que plusieurs plaintes pour prétendue violation de la liberté syndicale ont été présentées, il est également vrai que les plaintes ont été closes car le gouvernement a démontré qu'elles n'avaient rien à voir avec des affaires syndicales, mais qu'il s'agissait de délits de droit commun punis par la loi.
- 38 Le gouvernement déclare que le 9 janvier 1987, par le décret no 245, il a rétabli l'état d'urgence en tant que mécanisme juridique de défense face à la guerre menée par les Etats-Unis contre le Nicaragua, de sorte que son application est destinée à affronter les conduites contre-révolutionnaires en préservant ainsi les droits des Nicaraguayens. Selon le gouvernement, l'affirmation selon laquelle le décret no 245 suspend plusieurs droits syndicaux est totalement fausse puisque, parmi les droits suspendus, aucun n'est strictement syndical. Le seul droit suspendu en matière de travail est le droit de grève qui n'est pas un droit des syndicats mais un droit des travailleurs syndiqués ou non.
- 39 Le gouvernement ajoute que l'établissement de l'état d'urgence est conforme aux dispositions contenues à l'article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à l'article 27 de la Convention américaine des droits de l'homme.
- 40 Selon le gouvernement, l'état d'urgence n'a empêché, en aucune circonstance, le développement du mouvement syndical et la libre affiliation des travailleurs à leurs organisations professionnelles. De 1980 à 1986, les travailleurs de la campagne et de la ville ont constitué un total de 1.203 syndicats.
- 41 Le gouvernement estime qu'il est important de rappeler que l'arrêt rendu par la Cour internationale de Justice le 27 juin 1986 accorde un appui juridique fondamental au gouvernement et à son droit de défendre sa souveraineté, son intégrité territoriale et son indépendance économique et politique à travers l'ordre juridique international. C'est, selon le gouvernement, la politique d'agression menée contre le Nicaragua et non l'état d'urgence qui est à l'origine des circonstances difficiles et exceptionnelles que traverse la société nicaraguayenne dans son ensemble. Le gouvernement souligne qu'il a l'espoir de suspendre l'état d'urgence quand cesseront les causes qui l'ont motivé.
- 42 Le gouvernement poursuit en indiquant que l'absence d'inscription du droit des employeurs de s'organiser dans la Constitution ne doit pas être comprise comme une interdiction puisque l'article 49 de la Constitution politique énonce le principe général du droit d'organisation de toutes les personnes en vue de défendre leurs intérêts. En outre, le droit des employeurs de s'organiser est inscrit dans le code du travail et le règlement des associations syndicales.
- 43 Pour ce qui est du décret no 530 de 1980, le gouvernement estime que les dispositions en question ne portent en aucune manière atteinte au droit des organisations d'employeurs et de travailleurs de négocier des conventions collectives et, conformément au principe du tripartisme de l'OIT, on prévoit l'intervention du ministère du Travail. En ce qui concerne les conditions d'emploi, celles-ci sont négociées au moyen d'une procédure de conciliation. En cas d'échec, le ministère du Travail ne peut imposer aux parties les clauses d'une convention collective. L'affaire doit être résolue, en période d'état d'urgence, par le tribunal d'arbitrage, organe du pouvoir judiciaire, et, en période normale, par la procédure relative au droit de grève.
- 44 Le système national d'organisation du travail et des salaires permet aux employeurs et aux travailleurs de participer à la discussion des bases du contenu du travail pour fixer les salaires, selon la quantité et la complexité.
- 45 Enfin, le gouvernement estime que la convention no 144 n'a pas été enfreinte, car les consultations ont été effectuées avec les organisations que le gouvernement a considérées, dans un acte souverain, comme les plus représentatives. Cependant, il ne voit aucun inconvénient à consulter aussi le COSEP en temps opportun.
- 46 Dans sa communication du 19 janvier 1988, le gouvernement fournit le texte d'un communiqué déclarant qu'à compter du 19 janvier l'état d'urgence est suspendu sur tout le territoire. Le gouvernement affirme également dans ce communiqué qu'il a l'intention d'appliquer la loi d'amnistie no 33 lorsqu'un cessez-le-feu interviendra et que les groupes qui ont pris les armes réintégreront la vie civile. Si un tel cessez-le-feu n'est pas décidé, le gouvernement libérera les intéressés si le gouvernement des Etats-Unis ou un gouvernement d'Amérique centrale décide de les accueillir sur son territoire. Ils seront autorisés à rentrer au Nicaragua quand la guerre sera terminée.
- 47 Dans une communication postérieure du 28 janvier 1988, le gouvernement fournit le texte des décrets no 296 qui supprime les tribunaux populaires antisomozistes et no 297 qui lève l'état d'urgence sur tout le territoire national et rétablit les droits et garanties reconnus dans la Constitution du Nicaragua.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité
- 48. Les cas en instance présentés par des organisations de travailleurs devant le comité portaient sur la condamnation et l'arrestation de syndicalistes dont certains avaient été torturés, des menaces proférées à l'encontre de syndicalistes et de leurs familles, des perquisitions effectuées au siège d'une centrale syndicale et la suspension d'une revue syndicale.
- 49. Au sujet de la condamnation de syndicalistes, le gouvernement a fourni le texte d'arrêts rendus par des tribunaux populaires antisomozistes d'appel à l'encontre de diverses personnes qui avaient été mentionnées comme syndicalistes dans les communications des plaignants. D'après le texte des arrêts, ces personnes auraient été condamnées pour leur appartenance à une organisation de nature subversive, des voyages clandestins à l'étranger et la réalisation de missions de renseignements militaires et économiques. Les arrêts ne font mention en aucune manière d'appartenance à une organisation syndicale ou à des activités qui pourraient être considérées comme de nature syndicale.
- 50. Le comité relève que le gouvernement n'a toujours pas répondu à certaines allégations concernant l'arrestation des syndicalistes Eduardo Aburto, Eric González, Carlos Herrera, Sergio Rosa et Eugenio Membreño.
- 51. Pour ce qui est des tortures ou menaces qui auraient été exercées ou proférées contre des syndicalistes ou leurs familles, le comité note que le gouvernement rejette en bloc ces allégations en indiquant que, si des cas exceptionnels ont pu se produire, ils ont fait l'objet d'enquêtes et de sanctions. Relevant la contradiction entre les allégations des plaignants et la réponse du gouvernement sur ce point, le comité se doit de rappeler que les gouvernements devraient donner des instructions nécessaires pour faire en sorte qu'aucun détenu ne fasse l'objet de mauvais traitements et prévoir l'application de sanctions efficaces dans le cas où des mauvais traitements ont été démontrés.
- 52. Quant à la perquisition effectuée dans les locaux de la Centrale des travailleurs du Nicaragua, le comité note que, selon le gouvernement, cette mesure était motivée par les dissensions internes existant au sein de l'organisation. Toutefois, le gouvernement ne précise pas si la perquisition a été effectuée sur mandat judiciaire. Le comité demande donc au gouvernement d'indiquer si tel a été le cas. Le comité rappelle en effet que les locaux syndicaux ne devraient faire l'objet de perquisitions que sur mandat de l'autorité judiciaire ordinaire. (Voir, par exemple, 236e rapport, cas no 1269 (El Salvador), paragr. 536.) Le comité estime en outre que, même si une perquisition avait été autorisée par un mandat délivré par l'autorité judiciaire ordinaire, ceci ne justifiait en rien la mise à sac des locaux de la CTN dont ont fait état les plaignants.
- 53. Le comité prend note des motifs à l'origine de la suspension de la revue de la Confédération d'unification syndicale (CUS), à savoir le non-respect de certaines obligations légales découlant de la loi générale des moyens de communication. Il note également que cette revue est à nouveau autorisée. Il doit, cependant, rappeler que le droit d'exprimer des opinions sans autorisation préalable par la voie de la presse syndicale est l'un des éléments essentiels des droits syndicaux.
- 54. Les plaintes déposées devant le comité par l'OIE portaient sur une campagne exercée contre des dirigeants du Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP), notamment par la confiscation de biens, de terres et d'entreprises leur appartenant et l'expulsion du pays de l'un d'entre eux, l'assignation à résidence du président du COSEP lors de la Journée de l'entreprise privée célébrée en septembre 1985, le rétablissement de l'état d'urgence qui suspendait pendant un an certaines libertés constitutionnelles et la fermeture pour une durée indéterminée du journal La Prensa qui était utilisé par le COSEP pour diffuser des informations concernant les employeurs.
- 55. En ce qui concerne l'expropriation de terres et de biens des dirigeants du COSEP, le comité note l'explication du gouvernement selon laquelle la plupart de ces mesures répondaient à des besoins de réforme agraire. Tout en étant conscient que les personnes mentionnées dans la plainte de l'OIE ne peuvent se prévaloir de leur qualité de dirigeants du COSEP pour échapper aux conséquences d'une politique de réforme agraire, le comité doit, cependant, relever avec préoccupation que ces mesures auraient frappé de façon discriminatoire un nombre important de dirigeants de l'organisation des employeurs. Il exprime l'espoir que les personnes en question seront justement indemnisées des pertes qu'elles ont subies, comme prévu par la loi.
- 56. Le comité note que, selon le gouvernement, il n'existe aucune trace d'une mesure d'expulsion qui aurait été prise à l'encontre de M. Frank Bendaña, vice-président du COSEP. Devant la contradiction des allégations des plaignants et de la réponse du gouvernement, le comité ne peut que rappeler de façon générale que l'expulsion de dirigeants d'organisations d'employeurs ou de travailleurs de leur pays, pour avoir mené des activités liées à l'exercice de leurs fonctions, non seulement est contraire aux droits de l'homme, mais constitue aussi une ingérence dans les activités de l'organisation à laquelle ils appartiennent. (Voir, par exemple, 236e rapport, cas no 963 (Grenade), paragr. 78.)
- 57. Le gouvernement ne répond pas spécifiquement aux demandes d'information concernant l'assignation à résidence du président du COSEP lors de la Journée de l'entreprise privée. Il se borne à indiquer qu'aucun citoyen n'a été privé de liberté à cette occasion. Le comité prend note de cette information mais déplore que les autorités aient interdit la célébration de cette Journée de l'entreprise privée.
- 58. Le comité note que le journal La Prensa circule librement à nouveau. Il exprime l'espoir que cette mesure sera définitive. Il tient en effet à rappeler que le droit d'une organisation d'employeurs ou de travailleurs d'exprimer ses opinions sans censure par le truchement de la presse indépendante ne doit pas être différencié du droit d'exprimer ses opinions dans des journaux exclusivement professionnels ou syndicaux. (Voir, par exemple, 217e rapport, cas no 963 (Grenade), paragr. 538.)
- 59. Enfin, pour ce qui est de la suspension de l'état d'urgence, le comité se réfère aux considérations exprimées ci-après à propos de la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT.
- 60. Le Conseil d'administration doit examiner, dans la présente affaire, l'opportunité de créer une commission d'enquête en vertu de l'article 26 de la Constitution. Cette plainte contient des allégations concernant la non-application de la convention no 87, fondées notamment sur les vingt et une plaintes examinées par le comité, la suspension de certaines libertés consitutionnelles et la non-reconnaissance dans la Constitution nationale du droit d'organisation des employeurs; la non-application de la convention no 98, fondée sur l'absence de libre négociation collective, et la non-application de la convention no 144, fondée sur l'absence de consultations du COSEP par le gouvernement.
- 61. En ce qui concerne les allégations relatives aux violations de la convention no 87, le comité rappelle qu'il a adopté sur chacun des cas cités par les plaignants des conclusions qui ont été approuvées par le Conseil d'administration et qui contiennent des recommandations précises adressées au gouvernement. Les réponses fournies par le gouvernement à l'occasion de l'examen de nombreux cas sont très souvent contradictoires avec les allégations de fait des auteurs des plaintes. Le comité n'est donc pas actuellement en mesure de tirer de l'ensemble de ces cas une conclusion sur la situation générale qui règne au Nicaragua en matière de liberté syndicale.
- 62. En ce qui concerne les allégations concernant l'inobservation de la convention no 98, le comité note que la commission d'experts s'est interrogée sur la conformité du système de détermination des salaires avec l'article 4 de la convention.
- 63. Enfin, en ce qui concerne l'application de la convention no 144, le comité rappelle qu'il a indiqué que des critères objectifs précis et préétablis pour déterminer la représentativité d'une organisation d'employeurs ou de travailleurs doivent exister dans la législation, et que cette appréciation ne saurait être laissée à la discrétion des gouvernements.
- 64. Le comité note que le gouvernement a indiqué que le seul droit en matière de travail, suspendu par l'état d'urgence, est le droit de grève. En ce qui concerne le droit d'organisation des employeurs, le gouvernement a signalé que ce droit est reconnu par le code du travail et le règlement des associations syndicales, et il se dit prêt à consulter, en temps opportun, le COSEP sur les questions relatives aux normes internationales du travail.
- 65. En outre, dans une communication plus récente, le gouvernement a annoncé la suspension effective de l'état d'urgence et sa volonté d'appliquer, sous certaines conditions, la loi d'amnistie. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les conséquences de la suspension de l'état d'urgence quant aux activités des organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que sur l'évolution de la situation quant à une éventuelle application de la loi d'amnistie. Le comité, tout en prenant note de cette évolution favorable, constate cependant qu'il subsiste une contradiction substantielle entre les allégations des auteurs de la plainte et les réponses du gouvernement dans les domaines couverts par les conventions nos 87, 98 et 144. Ces contradictions portent sur la conformité de certains textes avec les instruments cités et sur des questions de fait.
- 66. Par ailleurs, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations doit examiner, lors de sa prochaine session de mars 1988, l'application des conventions nos 87 et 98 par le Nicaragua sur la base, notamment, des informations fournies par le gouvernement lors de la dernière session de la Conférence devant la Commission de l'application des normes et des derniers développements intervenus dans le pays.
- 67. Le comité estime que la réponse du gouvernement pour sa prochaine réunion de mai de même que les commentaires de la commission d'experts constituent des éléments qui devraient être pris en considération pour déterminer quelles suites donner à la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution. Le comité décide donc qu'il examinera à sa prochaine session de mai 1988, sur la base de ces informations, la question de l'opportunité de constituer une commission d'enquête.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 68. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de fournir ses observations sur les allégations concernant l'arrestation de syndicalistes, auxquelles il n'a pas encore répondu.
- b) Le comité insiste auprès du gouvernement pour que des instructions soient données, afin qu'aucun détenu ne fasse l'objet de mauvais traitements et que des sanctions efficaces soient prévues dans le cas où de tels traitements auraient été démontrés.
- c) Le comité demande au gouvernement de s'assurer que des perquisitions dans les locaux syndicaux ne soient effectuées que sur mandat de l'autorité judiciaire ordinaire. Il lui demande d'indiquer si un mandat judiciaire avait été délivré dans le cas de la perquisition effectuée dans les locaux de la CTN.
- d) Le comité, tout en notant que l'expropriation de terres et de biens des dirigeants du COSEP s'inscrit, selon le gouvernement, dans le contexte d'une réforme agraire, relève avec préoccupation que ces mesures auraient frappé de façon discriminatoire un nombre important de dirigeants du COSEP. Il exprime l'espoir que les intéressés seront justement indemnisés des pertes qu'ils ont subies, comme prévu par la loi.
- e) Le comité déplore à nouveau que les autorités aient interdit la célébration de la Journée de l'entreprise privée, organisée par le COSEP.
- f) Le comité note que la revue syndicale de la CUS et le journal La Prensa peuvent à nouveau paraître et circuler et exprime l'espoir que ces mesures seront définitives. Il signale en effet à l'attention du gouvernement que le droit d'exprimer des opinions sans autorisation préalable par la voie de la presse est l'un des éléments essentiels des droits des organisations d'employeurs et de travailleurs.
- g) Le comité note que le gouvernement a annoncé la suspension effective de l'état d'urgence. Il demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les conséquences de cette suspension quant aux activités des organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que sur l'évolution de la situation quant à une éventuelle application de la loi d'amnistie. Le comité constate cependant qu'il subsiste une contradiction substantielle entre les allégations des auteurs de la plainte et les réponses du gouvernement dans les domaines couverts par les conventions nos 87, 98 et 144. Ces contradictions portent sur la conformité de certains textes avec les instruments cités et sur des questions de fait.
- h) Le comité décide qu'il examinera à sa prochaine session de mai 1988 la question de l'opportunité de constituer une commission d'enquête pour faire suite à la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution, sur la base des informations qui seront fournies par le gouvernement et des commentaires qui seront formulés par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'application des conventions nos 87 et 98 par le Nicaragua.