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Informe provisional - Informe núm. 233, Marzo 1984

Caso núm. 1209 (Uruguay) - Fecha de presentación de la queja:: 02-JUN-83 - Cerrado

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  1. 425. La plainte figure dans une lettre de la Confédération mondiale du travail (CMT) du 2 juin 1983 à laquelle est jointe une communication signée par MM. Juan Pedro Ciganda et Richard Read, dirigeants syndicaux, au nom de la Plénière internationale des travailleurs d'Uruguay. Par la suite, dans une communication en date du 15 novembre 1983, la Fédération syndicale mondiale s'est associée aux allégations contenues dans la communication de la Plénière internationale des travailleurs d'Uruguay. Le gouvernement a répondu par des communications datées des 31 octobre et 15 novembre 1983 et du 6 février 1984.
  2. 426. L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 427. Les plaignants allèguent que la législation uruguayenne sur les syndicats, à savoir la loi no 15137 du 21 mai 1981 sur les associations professionnelles et son décret d'application no 513 du 9 octobre 1981, ainsi que la loi no 15328 du 1er octobre 1982 sur les conventions collectives du travail et son décret d'application no 390 du 3 novembre 1982, contient des dispositions qui sont contraires aux conventions de l'OIT dans le domaine de la liberté syndicale et de la négociation collective.
  2. 428. Les plaignants ajoutent que, malgré les déclarations faites précédemment par le gouvernement suivant lesquelles les agents de l'Etat jouissent du droit d'organisation en vertu du Statut des fonctionnaires de 1943, ledit statut ne reconnaît tout au plus que le droit d'association puisqu'il ne se réfère ni au droit de coalition ni au droit de grève, ni à la possibilité de négocier des conventions collectives qui régissent les relations de travail. Quant au droit de grève, les plaignants indiquent que, bien qu'il soit garanti par l'article 57 de la Constitution, il n'est pas possible de l'exercer dans la pratique, et le gouvernement s'est borné à annoncer qu'il publierait un texte réglementaire à ce sujet.
  3. 429. Les plaignants allèguent, par ailleurs, que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale n'a pas autorisé l'élection de dirigeants permanents de sorte que les différentes associations de travailleurs enregistrées fonctionnent encore avec des dirigeants provisoires.
  4. 430. Les plaignants ajoutent que le ministère de l'Intérieur a interdit toute activité syndicale à MM. José Custodio, Asdrúbal Gadea, Nelson Curbelo et Julio Alonso, qui sont tous membres de la commission provisoire de l'Union des ouvriers, des employés et des cadres de la FUNSA. En outre ont été licenciés Roberto Mouriño, Miguel Miraballes, Daniel Buscarona, Hugo Nicola, Doroteo Díaz, Anselmo Oyarzábal, Enrique Larnaudie et César Martínez Yaquelo, militants syndicaux de l'organisation en question. De plus, Daniela Amoroso, membre de la commission provisoire de la Trade Development Bank, a été licenciée parce qu'elle avait protesté contre le congédiement d'un dirigeant syndical. Par ailleurs ont été frappés d'une interdiction d'exercer des activités syndicales MM. Carlos Larraya (Association des fonctionnaires du centre d'assistance du Syndicat des médecins d'Uruguay), Andrés Brun, Emeli Landriel et Julio Betervide (Association des permanents de l'Association des employés de banque d'Uruguay), José Curbelo, Milton Antognazza [le comité a déjà examiné l'allégation relative à l'interdiction qui concerne M. Antognazza dans le cadre du cas no 1153 (voir 226e rapport, paragr. 174 et 180)] (Association des employés de la Banque Caja Obrera), Gonzalo Rodríguez (Association des employés de la Banque de crédit), Joaquín Pau (Association des employés du Banco exterior de España), Francisco Rama (Association des employés de la Banque de Londres et d'Amérique du Sud), Daniel González Mazzei et Roberto E. Miranda (Association des employés de la Banque de Santander), Luis Becerra et Edgar Covagnaro (Association des travailleurs et employeurs des fabriques nationales de bière) et Mario Carbajal (Association des employés de la Banque SUDAMERIS).
  5. 431. Les plaignants indiquent aussi que le gouvernement ne s'est pas acquitté des obligations prévues à l'article 19, paragraphes 5 b) et 6 b), de la Constitution de l'OIT car il n'a soumis aux autorités compétentes ni la convention no 154 ni la recommandation no 163 sur la promotion de la négociation collective. La CMT signale enfin que le gouvernement ne reconnaît pas la représentativité de la Plénière intersyndicale des travailleurs d'Uruguay. [Les plaignants ont formulé en outre une série d'allégations qui avaient déjà été présentées dans le cadre d'autres cas (cas nos 763, 1153 et 1207).]

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 432. Le gouvernement déclare que, contrairement au dire des plaignants, le pouvoir exécutif a soumis la convention no 154 et la recommandation no 163 au Conseil a'Etat par un message en date du 19 mai 1982 dans lequel il demandait audit organisme de ne pas ratifier la convention en question. Le 31 mai 1982, en application des dispositions de l'article 19, paragraphes 5 c) et 6 c) de la Constitution de l'OIT, l'Organisation fut informée de la soumission desdits instruments par l'envoi du texte du message du pouvoir exécutif, étant précisé que, simultanément, une copie du message avait été adressée aux organisations représentatives reconnues, conformément à l'obligation prévue à l'article 23, paragraphe 2, de la Constitution de l'OIT.
  2. 433. Pour ce qui est de la loi no 15137 du 21 mai 1981 et du décret d'application no 513/81, le gouvernement signale que les rapports du Comité de la liberté syndicale et de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations s'accordent à reconnaître les améliorations apportées dans la loi sur les associations professionnelles, relativement aux projets à propos desquels l'avis du Bureau avait été sollicité. Le gouvernement se réfère également à la recommandation que le Comité de la liberté syndicale avait formulée dans son 214e rapport (mars 1982) à l'intention du Conseil d'administration et que ce dernier avait approuvée à sa 219e session et qui était ainsi conçue: "a) En ce qui concerne l'allégation relative à la loi sur les associations professionnelles, ayant déjà procédé à l'examen de cette loi lors de sa réunion de mai 1981 et ayant formulé ses conclusions quant au fond, le comité considère que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi."
  3. 434. S'agissant des dispositions du décret no 390, le gouvernement déclare qu'il reconnaît le droit de négociation collective, outre aux syndicats, aux délégués du personnel élus au vote secret (articles 3 et 4). Le gouvernement estime que ceci est conforme aux principes de l'OIT en matière de négociation collective et que la convention no 154 sur la promotion de la négociation collective, 1981, estime licite le recours aux représentants des travailleurs dans la mesure où ils ne servent pas à affaiblir la situation des organisations syndicales.
  4. 435. Le gouvernement déclare également que la loi no 15328 et le décret no 390 n'interdisent pas la négociation collective au niveau des fédérations et des confédérations mais qu'ils réglementent simplement la négociation collective au niveau de l'entreprise. Le gouvernement souligne qu'il n'est pas impossible qu'à mesure que des associations d'un grade supérieur se constituent on étudie la possibilité d'étendre la réglementation du droit de négociation collective au niveau supérieur.
  5. 436. Au sujet de l'approbation obligatoire d'une convention collective par la majorité absolue des travailleurs concernés (articles 4 b) de la loi et 11 b) du décret), le gouvernement signale qu'il ne s'agit pas d'une mesure de défiance mais d'une garantie pour s'assurer de l'appui des travailleurs pour l'instrument qu'ils approuvent. Il ne faut pas oublier qu'une convention collective lie tous ceux qui participent à une unité de négociation, y compris ceux qui ne sont pas affiliés au syndicat qui l'a conclue et même ceux qui s'y opposent.
  6. 437. Le gouvernement ajoute que le contrôle du ministère du Travail et de la Sécurité sociale sur les conventions collectives (articles 4 a) de la loi et 11 a) du décret) n'est qu'un contrôle formel de légalité. Il n'a pour objet que de vérifier que les normes accordées n'établissent pas des niveaux de protection inférieurs à ceux fixés par la loi. Il ne s'agit pas d'une vérification à la lumière de la politique économique du gouvernement. Il indique aussi que depuis le 3 novembre 1982 le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a enregistré 794 conventions collectives, ce qui entre strictement dans l"'obligation de promouvoir" inscrite dans l'article 4 de la convention no 98.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 438. Le comité observe que les allégations se réfèrent, d'une part, à la législation syndicale et, d'autre part, à des licenciements pour motifs antisyndicaux, à des interdictions d'exercer des fonctions syndicales et à la non-reconnaissance de la représentativité d'une organisation syndicale.
  2. 439. Pour ce qui est de la législation syndicale, le comité observe qu'il a déjà eu l'occasion d'examiner la loi no 15137 sur les associations professionnelles et de se prononcer à son sujet. Le comité renvoie donc aux commentaires qu'il a émis à propos de cette loi dans son 209e rapport (mai 1981) [voir 209e rapport, paragr. 5 à 82], qui sont également valables pour les dispositions du décret d'application no 513 de la loi sur les associations professionnelles, qui reprennent les dispositions de la loi à propos desquelles le comité avait formulé des objections. Le comité relève, cependant, que le décret no 513 a introduit certaines dispositions nouvelles relativement à la loi sur les associations professionnelles qui sont contraires aux principes de la convention no 87. En particulier, l'exigence, pour pouvoir être élu dirigeant syndical, de ne pas avoir occupé de poste de direction dans des organisations déclarées illégales et de ne pas avoir été frappé d'une incapacité juridique comme le prévoit la Constitution (articles 39 d) et 46 e)); l'exigence d'un certain délai pour la réélection des membres du comité directeur d'une association (article 19) et les conditions d'affiliation à des organisations professionnelles du deuxième ou du troisième degré ou à des organisations internationales, ainsi que celles qui se rapportent à l'élection et à la composition des comités des organisations du deuxième ou du troisième degré (articles 22 à 27).
  3. 440. A cet égard, le comité signale à l'attention du gouvernement que ces dispositions comportent des limitations excessives du droit syndical particulièrement en ce qui concerne le droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants. Le comité tient à souligner en outre que les articles 39 d) et 46 e) du décret no 513 permettent légalement d'interdire à des dirigeants syndicaux d'exercer leurs fonctions, même pour des raisons syndicales comme celle d'avoir occupé un poste de direction dans des organisations syndicales déclarées illégales.
  4. 441. A propos de la loi no 15328 du 1er octobre 1982 sur les conventions collectives et de son décret d'application no 390 du 3 novembre 1982, le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, les dispositions sur le contrôle des conventions par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale (articles 4 a) de la loi et 11 a) du décret) prévoient un simple contrôle de légalité (pour vérifier que les normes des conventions n'établissent pas des niveaux de protection inférieurs à ceux fixés par la loi).
  5. 442. Le comité note également, au sujet de la loi et du décret en question, que le gouvernement déclare qu'il n'est pas impossible qu'il étudie la possibilité d'étendre la réglementation du droit de négociation collective aux fédérations et confédérations à mesure qu'elles se constitueront. Le comité prend également note de ce que, selon le gouvernement, l'approbation d'une convention collective par la majorité des travailleurs (articles 4 b) de la loi et 11 b) du décret) n'est pas une mesure de défiance à leur endroit, mais une garantie afin de s'assurer du soutien des travailleurs à l'instrument qu'ils approuvent. Le comité observe enfin que le gouvernement invoque l'article 3, paragraphe 2, de la convention no 154 pour justifier la conformité des articles 3 et 4 du décret (possibilité tant pour les syndicats que pour les représentants des travailleurs de conclure chacun pour soi des conventions collectives dans une même entreprise) avec les normes internationales du travail.
  6. 443. Le comité doit signaler que les fédérations et confédérations devraient pouvoir conclure des conventions collectives et que la possibilité pour les délégués du personnel qui représentent 10 pour cent des travailleurs de conclure des conventions avec l'employeur (articles 3 et 4 du décret), même au cas où il existerait déjà une ou plusieurs associations de travailleurs, ne favorise pas la négociation collective au sens de l'article 4 de la convention no 98, à savoir: "entre les employeurs et les organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part"; en outre, compte tenu du faible pourcentage susmentionné, cette possibilité peut affaiblir la situation des organisations de travailleurs contrairement à ce qui est prévu à l'article 3, paragraphe 2, de la convention no 1.54. Le comité considère en outre que, dans la mesure où ce sont les représentants syndicaux qui concluent les conventions collectives, la condition requise de l'approbation par la majorité absolue des travailleurs intéressés (articles 4 b) de la loi et 11 b) du décret) peut constituer un obstacle à la négociation collective incompatible avec les dispositions de l'article 4 de la convention susmentionnée.
  7. 444. Le comité observe que, par ailleurs, vu que la loi no 15137 sur les associations professionnelles et son décret d'application excluent pratiquement la constitution d'organisations de base par branche d'activité et que les fédérations et confédérations ne peuvent conclure de conventions collectives, il est impossible en fait de conclure des conventions collectives en dehors du cadre de l'entreprise et de la sorte au niveau de la branche d'activité, ce qui restreint beaucoup les droits syndicaux des travailleurs et de leurs organisations, contrairement aux principes de la négociation collective.
  8. 445. Le comité invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour modifier les dispositions législatives qui sont contraires aux conventions nos 87 et 98 en tenant compte des principes soulignés.
  9. 446. Quant à l'exercice du droit de grève et des droits syndicaux des employés et agents de l'Etat, le comité observe que le gouvernement a déclaré à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations que les autorités nationales étaient en train d'étudier un avant-projet sur l'exercice du droit de grève et que le Conseil de la sécurité nationale avait recommandé au pouvoir exécutif de réviser et d'adapter la législation relative aux agents de l'Etat et de réglementer le droit d'association desdits agents. Le comité exprime sa préoccupation devant les divergences qui subsistent depuis de nombreuses années entre la législation et les principes de la liberté syndicale. Le comité tient à souligner l'importance qu'il attache à ce que ces questions soient réglées au plus tôt. Il exprime l'espoir que la future législation sera pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale et demande au gouvernement de le tenir informé de tout développement à cet égard. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'aspect législatif du cas.
  10. 447. Enfin, le comité relève que le gouvernement n'a répondu ni aux allégations selon lesquelles les autorités n'ont pas encore autorisé l'élection de dirigeants permanents des associations de travailleurs, ni à celles qui ont trait à des licenciements pour raisons syndicales, à l'interdiction qui frappe certaines personnes d'exercer des fonctions syndicales et à la non-reconnaissance, de la part des autorités, de la représentativité de la Plénière intersyndicale des travailleurs d'Uruguay. Le comité prie le gouvernement de lui transmettre ses observations sur ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 448. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire, et notamment les conclusions suivantes:
    • a) Le comité observe que le décret no 513 (décret d'application de la loi sur les associations professionnelles), la loi no 15328 sur les conventions collectives du travail et le décret no 390 (décret d'application de ladite loi) contiennent des dispositions qui sont contraires à celles des conventions dans les domaines de la liberté syndicale et de la négociation collective.
    • b) Le comité invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour modifier les dispositions législatives qui sont contraires aux conventions nos 87 et 98 en tenant compte des principes soulignés.
    • c) Le comité exprime sa préoccupation devant les divergences qui subsistent depuis de nombreuses années entre la législation et les principes de la liberté syndicale en matière d'exercice du droit de grève et de droits syndicaux des employés et agents de l'Etat. Le comité souligne l'importance qu'il attache à ce que ces questions soient réglées au plus tôt. Il exprime l'espoir que la future législation pertinente sera pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale et demande au gouvernement de le tenir informé de tout développement à cet égard.
    • d) Le comité demande au gouvernement de lui transmettre ses observations sur les allégations selon lesquelles les autorités n'ont pas encore autorisé l'élection de dirigeants permanents des associations de travailleurs et sur celles qui se rapportent à des licenciements pour des raisons syndicales, à l'interdiction faite à certaines personnes d'exercer des fonctions syndicales et à la non-reconnaissance, de la part des autorités, de la représentativité de la Plénière intersyndicale des travailleurs d'Uruguay.
    • e) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'aspect législatif de ce cas.
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