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Informe provisional - Informe núm. 233, Marzo 1984

Caso núm. 1213 (Grecia) - Fecha de presentación de la queja:: 15-JUN-83 - Cerrado

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  1. 593. L'Union panhellénique des mécaniciens de la marine marchande (PEMEN-PENEM) a déposé une plainte en violation de la liberté syndicale en Grèce par une communication télégraphique du 15 juin 1983. Par la suite, le 13 juillet, elle a fourni une documentation contenant des informations complémentaires à l'appui de sa plainte, informations qu'elle a adressées au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies à New York, à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies ainsi qu'au Directeur général du Bureau international du travail. Enfin la PEMEN-PENEM a adressé des télégrammes contenant de nouvelles allégations les 19 août et 23 septembre 1983.
  2. 594. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 10 octobre 1983.
  3. 595. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 596. Dans son télégramme initial du 15 juin 1983, l'Union panhellénique des mécaniciens de la marine marchande a dénoncé l'attaque, selon elle, sans provocation, que la police du port et la gendarmerie auraient lancée contre le président de la PEMEN (l'Union des mécaniciens) M. Thanasis Stamatopoulos, et son trésorier M. Nicos Stéfanis, et contre le président de la PENEM (l'Union des dockers) M. Gerasimos Destounis et son secrétaire général M. Stelios Sevastakis, alors qu'ils conduisaient une grève d'avertissement de 24 heures des navires côtiers grecs.
  2. 597. Ces dirigeants syndicaux, ainsi que 13 grévistes, auraient été frappés avec des matraques, arrêtés et emprisonnés. Le secrétaire général, M. Sevastakis, aurait même dû être hospitalisé.
  3. 598. Selon les plaignants, cette action brutale des autorités aurait visé à briser la grève des navires côtiers du 15 juin 1983 et la grève d'avertissement de 48 heures déclarée entre le 15 et le 30 juin 1983 sur les navires de croisière et les navires océaniques.
  4. 599. Dans sa communication ultérieure du 13 juillet 1983, les présidents de la PEMEN et de la PENEM fournissent des renseignements plus précis sur cette affaire.
  5. 600. Ils expliquent que les assemblées générales de leurs deux syndicats auraient voté la grève en juin 1983 pour deux motifs: d'une part, parce que la convention collective précédente les concernant était arrivée à expiration le 30 septembre 1982 et que les employeurs se refusaient à la renouveler et, d'autre part, parce qu'un projet de loi, visant à abaisser les salaires et les conditions de travail des marins grecs et à permettre leur licenciement, venait d'être introduit au Parlement.
  6. 601. Les points essentiels du projet de loi en question avait trait à la ratification d'accords bilatéraux signés entre l'Union des armateurs grecs (EEE) et certains syndicats des pays du tiers monde, à la réduction des équipages à bord des navires et à la retenue de 2,5 pour cent des allocations de congés payés des gens de mer.
  7. 602. Les accords bilatéraux contestés par les marins grecs accordent, expliquent les plaignants, aux marins étrangers de très bas salaires (70 dollars par mois). Les conditions d'embarquement (nourriture, logement, etc.) sont très inférieures à celles des marins grecs. Cela a eu pour conséquence, qu'en novembre 1982, 11.500 marins grecs étaient au chômage et que 12.000 marins étrangers étaient employés sur des navires grecs.
  8. 603. Pour ce qui est de la réduction des équipages, les plaignants estiment que de telles mesures qui ont déjà été prises en 1978, ne conduiront qu'à accroître le chômage et la détérioration des mauvaises conditions de sécurité sur les navires grecs, alors que ceux-ci détiennent déjà les records du monde des accidents et des naufrages.
  9. 604. Les plaignants donnent des renseignements détaillés sur les représailles qui ont été prises à l'encontre des grévistes. Ils expliquent que, non seulement ils ont été licenciés, frappés à l'aide de matraques, emprisonnés et condamnés, mais que certains ont même été inscrits sur des listes noires.
  10. 605. Ainsi, notamment à la Nouvelle-Orléans (Louisiane, Etats-Unis), 10 syndicalistes ont été interdits de débarquer sur le territoire des Etats-Unis et de monter sur un navire entrant dans un port américain. Selon les plaignants, les navires n'engageront plus ces syndicalistes puisque, s'ils le faisaient, ils seraient automatiquement empêchés d'entrer dans un port américain.
  11. 606. Des marins ont été licenciés pour avoir participé à cette grève d'avertissement de deux jours en juin 1983 alors qu'ils se trouvaient dans différents ports à travers le monde, notamment, outre les ports des Etats-Unis déjà mentionnés, dans des ports d'Algérie, de Côte-d'Ivoire, de Belgique et des Pays-Bas.
  12. 607. De plus, à Rhodes, les grévistes sont parvenus à empêcher leur navire de quitter le port malgré les intentions du capitaine qui entendait poursuivre le voyage et les briseurs de grève embauchés par lui. Les marins se sont jetés à la mer et ont nagé jusque devant l'hélice, alors que, peu auparavant, un homme de la capitainerie du port avait poussé à la mer l'un des grévistes qui ne savait pas nager et qui avait été repêché à temps par un autre marin.
  13. 608. Dans un télégramme du 19 août 1983, les plaignants communiquent de nouvelles informations. Ils annoncent qu'ils ont lancé le même jour une seconde grève d'avertissement de 48 heures pour réclamer des augmentations de salaire et des primes, étant donné que les négociations avec les armateurs, qui, selon eux, jouiraient de l'appui gouvernemental, avaient été rompues, deux jours auparavant. Dans un second télégramme du 23 septembre 1983, ils indiquent qu'un procès s'ouvrira devant le Tribunal du Pirée le 28 septembre 1983 et que les dirigeants syndicaux arrêtés le 19 août, premier jour de la seconde grève d'avertissement de 48 heures, encourent des peines de cinq ans de prison.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 609. Le 10 octobre 1983, le gouvernement envoie copie d'une communication datée du 12 août 1983 et signée du ministre de la Marine marchande où celui-ci répond à une pétition que lui avaient adressée différentes personnalités grecques dans cette affaire.
  2. 610. Le ministre explique qu'au cours de la grève de 48 heures de la PEMEN-PENEM, des syndicalistes des deux organisations s'étaient rassemblés soit à Akti Tzelepi soit à bord de plusieurs navires côtiers qui étaient à quai en vue de protéger leur grève. Ils ont essayé, dans un premier temps, d'influencer les marins et les mécaniciens pour qu'ils se mettent en grève.
  3. 611. Au soir du 15 juin 1983, lorsque les véhicules et les passagers sont arrivés pour monter à bord des navires, un certain nombre de grévistes se sont rassemblés pour les en empêcher et obtenir l'annulation du voyage.
  4. 612. Les navires prêts à partir étaient ceux pour lesquels le nombre des non-grévistes de l'équipage était suffisant pour répondre aux conditions de sécurité. Cependant, selon le ministre, les grévistes souhaitaient créer un climat psychologique tel que les non-grévistes décident de se joindre à eux.
  5. 613. Le ferry-boat Kydon à quai à Tzelepi était en partance pour la Crète. Or un certain nombre de grévistes en empêchaient l'embarquement. Les autorités du port du Pirée et le capitaine du port firent vainement appel aux grévistes pour qu'ils libèrent les accès aux navires. D'autres grévistes, mêlés à la foule, utilisèrent des porte-voix pour lancer des slogans sur leur lutte et contre les autorités qui, disaient-ils, les persécutaient. Ceci conduisit à une prétendue tension psychologique et à l'échauffement du climat.
  6. 614. Le ministre poursuit en expliquant que les autorités, face à ces provocations des grévistes et de la foule qui se solidarisait avec eux et qui, avec le temps, avait augmenté, évitèrent toute action intempestive, que ce soit pour leur faire dégager les accès aux navires, ou pour arrêter ceux qui les insultaient.
  7. 615. Souhaitant rester dans la légalité, elles appelèrent le procureur aux affaires pénales, M. Roussos et le procureur de la république, M. Bramis. Le premier convoqua le président de la PEMEN, M. Stamatopoulos et le secrétaire général de la PENEM, M. Stevastakis et leur expliqua que les grévistes étaient en infraction puisqu'ils empêchaient l'embarquement des passagers et des véhicules. Il donna également instruction au procureur de la république d'inviter les grévistes à se retirer immédiatement et de les avertir qu'en cas de refus ils seraient arrêtés. Le procureur, accompagné des autorités du port du Pirée, se dirigea vers le ferry-boat et demanda aux grévistes de se retirer. Ceux-ci continuèrent à crier des insultes à l'encontre des autorités du port. Le procureur donna alors l'ordre de les arrêter.
  8. 616. Lorsque les autorités du port procédèrent à l'arrestation des grévistes, ceux ci les attaquèrent, se débattirent pour éviter leur arrestation et blessèrent légèrement deux employés du port.
  9. 617. En tout 17 personnes furent arrêtées, dont les deux dirigeants de la PEMEN et de la PENEM qui avaient. participé à ces actions, et qui avaient incité les grévistes à ne pas dégager les accès au ferry-boat.
  10. 618. Le procureur les inculpa d'entrave aux communications, d'insultes aux autorités publiques et de résistance aux ordres des autorités. Sur les 17 personnes conduites devant le procureur, huit ont été condamnées à quatre mois de prison.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 619. Le comité observe que cette affaire a trait à l'arrestation et à la condamnation à quatre mois de prison de dirigeants syndicaux et de syndicalistes engagés dans une action de grève le 15 juin 1983.
  2. 620. Elle porte aussi sur des allégations de licenciement de syndicalistes et de listes noires qui auraient pour résultat d'empêcher les syndicalistes, licenciés pour avoir participé à une action de grève d'avertissement de 48 heures des navires océaniques entre le 15 et le 30 juin 1983, de retrouver du travail. Elle porte enfin sur d'autres allégations d'arrestations et d'emprisonnements de syndicalistes à la suite d'une deuxième grève d'avertissement de 48 heures le 19 août 1983.
  3. 621. Selon les plaignants, la grève d'avertissement de juin 1983 avait été votée par les deux assemblées générales de la PEMEN et de la PENEM, et elle avait pour motif des revendications économiques et d'ordre professionnel. La seconde grève d'avertissement du mois d'août avait également pour motif des revendications professionnelles.
  4. 622. Le gouvernement, quant à lui, ne communique aucune information sur le caractère légal de la grève et ne commente pas les motifs d'ordre professionnel invoqués par les plaignants qui auraient été à l'origine de ces mouvements de grève.
  5. 623. En revanche, le gouvernement donne des informations détaillées sur la manière dont les piquets de grève auraient empêché les non-grévistes de travailler, et auraient été arrêtés sur ordre de l'autorité judiciaire après une brève échauffourée au cours de laquelle deux employés du port du Pirée auraient été légèrement blessés.
  6. 624. Le gouvernement confirme en outre que huit des grévistes ont effectivement été condamnés à quatre mois d'emprisonnement pour entrave aux communications, insultes aux autorités publiques et résistance aux ordres des autorités à l'issue de la grève de juin 1983. Il ne commente pas l'allégation selon laquelle d'autres grévistes auraient été arrêtés et encourraient de longues peines de prison pour avoir participer à la grève du 19 août 1983. Il ne commente pas non plus les allégations de licenciements et de listes noires qui auraient pour incidence d'empêcher les marins licenciés pour avoir effectué une grève de retrouver du travail.
  7. 625. Au sujet de l'arrestation et de la condamnation à quatre mois de prison de syndicalistes engagés dans une action de grève le 15 juin 1983, le comité prend note des explications fournies par le gouvernement selon lesquelles ils ont été condamnés pour insultes aux autorités publiques, résistance aux ordres des autorités et entrave aux communications. D'une manière générale, le comité estime que les autorités ne devraient pas avoir recours aux mesures d'emprisonnement en cas de grève pacifique. Cependant, à la lumière des informations détaillées fournies par le gouvernement, le comité estime que dans le cas d'espèce les grévistes, en bloquant par la force l'accès aux navires prêts à appareiller, ont excédé ce qui pourrait être considéré comme l'exercice légitime et pacifique du droit de grève. Le comité considère dans ces conditions que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
  8. 626. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les allégations sur lesquelles il n'a pas répondu, à savoir licenciements de grévistes et inscriptions sur des listes noires empêchant les travailleurs licenciés pour fait de grève de retrouver du travail et arrestations de grévistes à la suite de la seconde grève du 19 août 1983.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 627. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et en particulier les conclusions suivantes:
    • a) Au sujet de l'arrestation et de la condamnation à quatre mois de prison de syndicalistes engagés dans une action de grève le 15 juin 1983, le comité estime que les grévistes ont excédé ce qui pourrait être considéré comme l'exercice légitime et pacifique du droit de grève et qu'en conséquence cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
    • b) Pour ce qui est des allégations de licenciements de grévistes, d'inscriptions sur des listes noires les empêchant de retrouver du travail et d'arrestations de grévistes à la suite d'une seconde grève le 19 août 1983, le comité prie le gouvernement de fournir ses observations à cet égard.
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