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- 307. Le comité a déjà examiné ce cas à quatre occasions
- 251e et 256e rapports du comité approuvés par le Conseil
- d'administration,
- respectivement, en novembre 1984, février 1986, mai 1987 et
- mai 1988) où il a
- abouti à des conclusions intérimaires. Le présent cas figure
- également parmi
- les dix cas présentés contre le gouvernement d'El Salvador et
- examinés
- conjointement par la mission de contacts directs qui s'est
- rendue dans le pays
- en janvier 1986. La Fédération syndicale mondiale (FSM) a
- présenté de
- nouvelles informations concernant ce cas dans une
- communication datée du 25
- mai 1988. Le gouvernement a transmis ses observations sur
- cette affaire dans
- une lettre du 8 juillet 1988.
- 308. El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la
- liberté
- syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la
- convention (no 98)
- sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 309. Après le dernier examen du cas no 1273 (voir 256e
- rapport du comité,
- paragr. 238 à 254), les questions suivantes restaient en
- instance devant le
- comité:
- - Le comité demandait au gouvernement de fournir des
- informations
- supplémentaires sur les allégations relatives à l'assassinat des
- syndicalistes
- Francisco Méndez (le 11 octobre 1986) et Marco Antonio
- Orantes (le 29 janvier
- 1985), et de faire procéder à une enquête judiciaire à ce sujet.
- Le comité
- demandait également des informations sur l'évolution du
- procès de deux
- inculpés déférés devant le quatrième tribunal pénal pour
- assassinat du
- dirigeant syndical José Arístides Mendez, qui avait
- commencé en juillet
- 1986.
- - Le comité priait le gouvernement de fournir des informations
- supplémentaires sur les arrestations de Adalberto Martínez (23
- juin 1986),
- Andrés Miranda (27 juin 1986), Gregorio Aguillón Ventura (1er
- février 1986) et
- José Antonio Rodríguez (18 août 1986), ainsi que sur la
- descente effectuée par
- les forces armées dans les locaux d'ANDES et sur la
- confiscation des documents
- de cette organisation en date du 29 avril 1986, et sur le
- licenciement de six
- dirigeants syndicaux du secteur des télécommunications à la
- suite de la grève
- du 15 avril 1986.
- - Le comité déplorait vivement les actes de violence qui
- 8 juillet 1987 entre les forces militaires et policières et les
- travailleurs
- de l'Institut de la sécurité sociale; il demandait instamment au
- gouvernement
- de faire procéder à une enquête judiciaire indépendante afin
- de déterminer les
- responsabilités, de punir les coupables et d'empêcher le
- renouvellement de
- tels actes, et de le tenir informé de toutes mesures prises en
- rapport avec le
- déroulement de l'enquête.
- - Le comité demandait au gouvernement de communiquer
- ses observations sur
- les allégations présentées par la Fédération unitaire syndicale
- d'El Salvador
- (FUSS) et la Fédération syndicale mondiale (FSM) les 11 et 27
- avril 1988,
- respectivement. Dans sa communication, la FUSS alléguait
- que le 10 avril la
- maison de Mme Marta Castaneda, membre du Syndicat du
- café (SICAFE) et
- dirigeante du Comité des femmes de ce syndicat (sise au no
- 21, cité Lamatepec,
- passage F, zone D, dans la ville de Santa Ana), avait été
- dynamitée et que,
- cinq minutes après cet attentat, un contingent de la deuxième
- brigade
- d'infanterie, accompagné de policiers, était arrivé sur les lieux;
- que les 7
- et 8 avril cette cité avait été encerclée et perquisitionnée par
- des éléments
- de la deuxième brigade d'infanterie qui avaient encerclé les
- lieux jusqu'au 8
- avril à 14 heures, heure à laquelle la syndicaliste Castaneda
- avait été
- autorisée à quitter la localité; que la syndicaliste Marta Alicia
- Sigüenza,
- membre du conseil directeur du SICAFE, n'avait pas pu se
- présenter à son lieu
- de travail et qu'elle avait dû se cacher pour ne pas être tuée
- par les forces
- gouvernementales. Dans sa communication, la FSM, quant à
- elle, dénonçait les
- persécutions subies par des membres du Syndicat des
- travailleurs salvadoriens
- des télécommunications (ASTTEL), notamment son secrétaire
- général, M. Raphael
- Sanchez, licencié le 10 janvier 1986, et le secrétaire général
- actuel, M.
- Humberto Centeno, arrêté et battu le 10 mars 1988. La FSM
- faisait également
- état de la détention des deux fils de M. Centeno et de tortures
- qui leur
- auraient été infligées pour faire pression sur le syndicat,
- comme du décès par
- balles, aux mains de brigades de la mort, des syndicalistes
- Victor Manuel
- Hérnandez Vasquez (le 13 janvier 1988), Medardo Ceferino
- Ayala (le 18 décembre
- 1987) et José Herbert Guardado (le 1er mars 1988).
- B. Informations complémentaires transmises par la FSM
- 310. Le 25 mai 1987, la FSM a fourni de nouvelles
- informations concernant la
- persécution de membres du Syndicat des travailleurs
- salvadoriens des
- télécommunications (ASTTEL) dont elle avait déjà fait état
- dans sa
- communication d'avril 1988 mentionnée ci-dessus. Elle déclare
- ce qui suit:
- - le 13 avril 1988, Manuel de Jesus Rodas Barahona a été
- tué par balles
- devant sa maison par deux hommes portant des vêtements
- civils du style
- "brigade de la mort";
- - le 15 avril, José Mazariego a été enlevé par la police et
- interrogé sur
- son travail syndical pendant trente-six heures;
- - le 19 mars, L.W. Barrios et Misael Flores ont été enlevés
- par la première
- brigade d'infanterie, puis battus et menacés avant d'être
- libérés dans une
- tentative de les obliger à quitter l'ASTTEL;
- - le 17 mars, Alberto Luis Alfaro a disparu aux alentours de 6
- h 30 du
- matin alors qu'il se rendait au travail et il n'a pas encore été
- retrouvé;
- - depuis janvier 1986, le Syndicat des travailleurs
- salvadoriens des
- télécommunications (ASTTEL) exerce ses activités en dehors
- de toute convention
- collective puisque la société des télécommunications (ANTEL)
- a dénoncé la
- précédente convention collective et que, malgré les
- demandes réitérées du
- syndicat et la grève de cinquante et un jours survenue en avril
- 1986, qui a
- déjà été mentionnée lors d'examens antérieurs du présent cas,
- la société
- refuse de négocier une nouvelle convention collective ou de
- rencontrer
- l'ASTTEL.
- 311. D'une manière générale, la FSM fait observer que,
- malgré l'article 47
- de la Constitution d'El Salvador qui garantit aux agents publics
- le droit
- d'organisation et de négociation collective, les autorités
- arguent du Code du
- travail pour refuser à l'ASTTEL le statut de "syndicat", lui
- reconnaissant
- exclusivement celui d'"association"; les travailleurs de la
- société des
- télécommunications se voient refuser le droit de grève, et toute
- absence du
- travail est sanctionnée en application de l'article 433 du Code
- pénal ou du
- décret no 296; le décret no 162 de 1985 autorisant la mutation
- des agents
- publics est utilisé pour briser les sections syndicales et éloigner
- leurs
- dirigeants.
- 312. En outre, la FSM allègue que la société des
- télécommunications est
- contrôlée par les militaires (le ministre de la Défense, le général
- Eugène
- Casanova, qui aurait fondé les brigades de la mort et nommé
- son frère, le
- colonel Mauricio Casanova, à la présidence de ces brigades).
- La fédération
- plaignante cite le rapport américain de WATCH, établi en mars
- 1988, sur les
- "droits du travail en El Salvador" selon lequel: "La répression
- gouvernementale contre les travailleurs organisés en El
- Salvador ... est de
- vaste portée, systématique et souvent brutale ... Bien
- qu'aucune organisation
- particulière ne puisse se prévaloir d'être la seule à être
- persécutée,
- l'ASTTEL s'est, ces dernières années, révélée être la cible
- privilégiée des
- forces de sécurité."
- C. Réponse du gouvernement
- 313. Dans sa lettre du 8 juillet 1988, le gouvernement déclare
- qu'il n'y a
- pas, dans l'administration nationale des télécommunications,
- de syndicat du
- type prévu par la législation d'El Salvador. Le "syndicat de
- facto" décrit
- dans la présente plainte n'a aucune des caractéristiques
- connues dans la loi
- ou la pratique des relations professionnelles salvadoriennes, et
- il est donc
- tout à fait inapproprié d'appeler l'ASTTEL (Asociación
- Salvadoreña de
- Trabajadores de Telecomunicaciones) un "syndicat". Selon le
- gouvernement, il
- ne s'agit pas là d'une simple question de forme mais d'un point
- d'importance
- capitale pour ce qui est de la représentation légitime des
- travailleurs. En
- tant qu'"association" relevant de l'article 540(2) du Code civil,
- l'ASTTEL
- dépend du ministère de l'Intérieur, alors que les "syndicats"
- sont régis par
- le Code du travail et administrés par le ministère du Travail.
- 314. D'après le gouvernement, l'ASTTEL s'arroge des droits
- et des
- compétences dont elle ne peut pas jouir puisqu'elle n'est pas
- un syndicat; de
- la même façon, ses dirigeants n'étant pas des dirigeants
- syndicaux n'ont aucun
- droit au privilège syndical contre le licenciement. Le
- gouvernement relève
- que, malgré cela, l'employeur a permis aux associations de
- travailleurs
- d'exercer des activités et que l'ASTTEL a, dans le passé,
- bénéficié d'une
- liberté totale sur ce plan. Néanmoins, sa liberté de mouvement
- a été quelque
- peu limitée en raison de l'agitation constante et des violations
- de la loi
- dont s'est rendue coupable cette association. Chaque fois que
- les dirigeants
- de l'ASTTEL ont recouru auprès de diverses instances
- judiciaires (tribunaux du
- travail, Cour suprême) contre des mesures disciplinaires
- adoptées par
- l'employeur, ils ont échoué.
- 315. Le gouvernement ajoute qu'il y a un deuxième
- organisme semblable dans
- la société des télécommunications, à savoir l'Association
- salvadorienne des
- travailleurs de l'ANTEL (ASTA), qui jouit également de la liberté
- d'action et
- de mouvement. La différence fondamentale entre ces deux
- associations tient à
- ce que l'ASTA n'a pas d'objectifs politiques. En revanche, fait
- remarquer le
- gouvernement, l'ASTTEL a déclaré 45 grèves illégales rien
- qu'entre 1987 et
- 1988 et a pris part à des troubles et à des violences dans la
- rue, ainsi qu'à
- une douzaine de manifestations sur la voie publique à la suite
- desquelles les
- bâtiments et les véhicules de l'employeur ont été
- endommagés.
- 316. C'est dans ce contexte que le gouvernement donne des
- précisions sur
- certaines allégations de la FSM. Par exemple, trois travailleurs
- des
- télécommunications ont été licenciés après une grève illégale
- déclarée en
- novembre 1985 pour obtenir la libération de deux fils d'un
- dirigeant de
- l'ASTTEL (M. José Humberto Centeno), qui étaient en
- détention criminelle;
- l'employeur avait obtenu du tribunal du travail une déclaration
- selon laquelle
- la grève était illégale et avait prévenu les grévistes qu'ils
- s'exposaient à
- des sanctions pour absence injustifiée du travail; le
- gouvernement fait
- toutefois observer que les meneurs de la grève n'ont pas été
- licenciés mais
- n'ont simplement pas été payés pour les jours pendant lesquels
- ils n'ont pas
- travaillé. Le gouvernement fait d'ailleurs observer que l'article
- 221 de la
- Constitution d'El Salvador interdit les grèves dans les services
- publics et
- les services municipaux. En outre, le Code du travail (articles
- 527, 528, 547,
- 553 et 555) prévoit les modalités juridiques de l'exercice du
- droit de grève,
- et le décret no 296 du 24 juin 1980 interdit également la grève
- des agents
- publics. Il est donc incompréhensible que l'ASTTEL
- revendique des droits dont
- elle ne peut pas se prévaloir aux termes de la loi.
- 317. D'après le gouvernement, la lettre de la FSM du 27 avril
- 1988 contient
- des assertions inexactes dans la mesure où elle allègue que
- les deux fils de
- M. Centeno étaient encore détenus "pour faire pression sur le
- syndicat", étant
- donné que José et Jaime Centeno ont bénéficié en novembre
- 1987 du décret
- d'amnistie qui a permis de libérer tous les détenus poursuivis
- pour délit
- politique. Le gouvernement souligne que la grève déclarée par
- l'ASTTEL en
- novembre 1987 n'avait rien à voir avec des questions de
- travail mais visait à
- la libération de ces deux individus qui n'étaient pas liés à
- l'employeur en
- cause.
- 318. Le gouvernement déclare que, l'année dernière, les
- dirigeants de
- l'ASTTEL ont introduit un nouvel élément dans la confrontation
- systématique de
- cette association avec l'employeur, l'entreprise publique
- ANTEL; il s'agit de
- l'accusation fausse et malveillante rendant le président
- d'ANTEL responsable
- de la mort de trois travailleurs tués par des inconnus. Bien que
- le
- gouvernement ait répondu de façon complète à divers
- organismes nationaux et
- étrangers sur ce point, il a demandé au procureur de clarifier
- les faits. Le
- gouvernement souligne que même la veuve de feu José
- Herbert Guardado a
- demandé, par le truchement de la presse nationale, que
- l'ASTTEL cesse de
- manipuler la mort tragique de son mari à des fins politiques et
- de propagande.
- Le gouvernement a joint une copie de la coupure de presse
- reproduisant la
- lettre adressée par la veuve à l'employeur en date du 14 mars
- 1988, dans
- laquelle elle déclare que les dirigeants de l'ASTTEL "...
- essaient - sans
- aucune raison et dans le but exclusif de leurs propres intérêts -
- de montrer
- que la mort (de son mari) résulte de luttes syndicales dans le
- cadre
- desquelles ils formulent à nouveau de fausses accusations
- contre les autorités
- de l'ANTEL, qui méritent notre respect et notre gratitude".
- 319. D'après le gouvernement, le fait de lier ces morts à des
- problèmes
- entre les travailleurs et la direction prouve la mauvaise foi
- flagrante des
- personnes intéressées; en effet, étant donné que l'entreprise
- est énorme et
- occupe presque 6.000 travailleurs, et compte tenu des
- circonstances qui
- règnent dans le pays, il y a de fortes probabilités pour que
- quelques
- travailleurs d'ANTEL se trouvent dans une situation
- susceptible d'entraîner
- une mort tragique. Le gouvernement donne les informations
- précises suivantes
- sur les décès cités par les plaignants:
- - M. Guardado a été, d'après les informations contenues
- dans la presse,
- attaqué par des voleurs dans un autobus;
- - M. Victor Manuel Hernandez Vasquez, fils d'un des
- dirigeants de section
- d'ANTEL, suivait un stage en entreprise de quinze jours quand
- il est mort; on
- ne saurait donc le qualifier de salarié permanent ou de membre
- de l'ASTTEL;
- - M. Medano Ceferino Ayala n'a jamais été un dirigeant de
- l'ASTTEL, et il
- n'était pas connu qu'il avait adhéré à cette association ou
- participé à ses
- activités.
- 320. En conclusion, le gouvernement déclare que les
- plaintes d'ASTTEL contre
- la société de télécommunications font partie d'une campagne
- orchestrée de
- désinformation au niveau international et débordent le cadre
- des intérêts
- légitimes de la protection des travailleurs. Il rappelle que
- certains
- dirigeants de l'ASTTEL, comme M. J.H. Centeno, sont
- membres de l'Union des
- travailleurs salvadoriens (Unitad de los Trabajadores
- Salvadorenos - UNTS) qui
- soutient et promeut des actes de provocation et d'irrespect à
- l'encontre des
- forces de l'ordre. Il explique que, lors de la grève qui a eu lieu
- en mars
- 1988 au ministère du Travail et de la Sécurité sociale, M.
- Centeno a frappé
- des membres des forces armées, raison pour laquelle il a été
- détenu puis
- relâché. Selon des coupures de presse de "Latino" et "La
- Prensa Grafica"
- fournies par le gouvernement, le 10 mars 1988, quelque 200
- personnes venues en
- autobus se sont groupées autour du ministère en injuriant et en
- menaçant le
- personnel militaire chargé de protéger les bâtiments; l'attaque
- de M. Centeno
- contre un soldat a engendré une agitation générale au cours
- de laquelle
- diverses personnes ont été blessées et qui a entraîné
- l'arrestation de M.
- Centeno. Il a été conduit au poste de police, puis la police l'a
- emmené dans
- une clinique privée pour faire soigner les blessures qu'il avait
- reçues
- pendant les troubles au ministère.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité
- 321. Avant d'examiner les diverses allégations en instance
- dans le présent
- cas qui se rapportent au harcèlement antisyndical dont se
- serait rendue
- coupable la société des télécommunications ANTEL, le comité
- rappelle au
- gouvernement qu'il n'a pas répondu aux récentes allégations
- relatives aux
- graves menaces dont auraient été victimes deux femmes
- membres du Syndicat du
- café (SICAFE) en avril 1988, et qu'il n'a pas non plus fourni
- d'informations
- sur le déroulement du procès de deux personnes accusées de
- l'assassinat du
- dirigeant syndical José Arístides Mendes, procès qui a débuté
- en juillet 1986.
- En conséquence, il prie le gouvernement de répondre aussi
- rapidement que
- possible, particulièrement sur l'issue du procès en cours
- devant le quatrième
- tribunal pénal, et il rappelle à cet égard que les gouvernements
- doivent
- s'efforcer d'éviter les lenteurs excessives dans l'administration
- de la
- justice. Le comité a, dans des cas antérieurs, déclaré que tout
- gouvernement
- devrait avoir pour politique de veiller au respect des droits de
- l'homme et,
- en particulier, au droit de toutes les personnes détenues ou
- accusées d'être
- jugées équitablement et le plus rapidement possible. (Voir, par
- exemple, 236e
- rapport, cas no 963 (Grenade), paragr. 78, et 247e rapport,
- cas nos 997, 999
- et 1029 (Turquie), paragr. 20.)
- 322. S'agissant de la question encore en instance (voir 243e
- rapport,
- paragr. 408, fév. 1986) de l'assassinat qui aurait été commis
- sur la personne
- des syndicalistes Francisco Méndez (le 11 octobre 1986) et
- Marco Antonio
- Orantes (le 29 janvier 1985), le comité rappelle que le
- gouvernement avait
- répondu précédemment que lui-même - et les divers organes
- de sécurité - ne
- disposaient d'aucune information sur ce sujet mais qu'ils
- s'efforçaient de
- découvrir où se trouvait M. Méndez et de clarifier la situation
- de M. Orantes.
- Etant donné que le comité n'a reçu aucune information plus
- récente que ces
- dénégations générales et ces protestations d'ignorance, il ne
- peut que
- déplorer vivement la disparition, dans des circonstances
- suspectes, de ces
- deux dirigeants syndicaux. Il appelle l'attention du
- gouvernement sur
- l'importance qu'il y a à enquêter sur de tels cas avec vigilance,
- étant donné
- qu'un climat de violence comme celui qui entoure l'assassinat
- ou la
- disparition de dirigeants syndicaux constitue une grave
- entrave à l'exercice
- des droits syndicaux. (Voir, par exemple, 236e rapport, cas nos
- 1157 et 1192
- (Philippines), paragr. 299.)
- 323. Pour ce qui est de la demande qu'il a formulée pour
- obtenir des
- informations supplémentaires sur les raisons ayant motivé
- l'arrestation de
- quatre syndicalistes nommément cités en février, en juin et en
- août 1986 (voir
- 251e rapport, paragr. 332, mai-juin 1987), le comité ne peut
- que regretter
- l'absence de coopération dont a fait preuve le gouvernement
- pour suivre ces
- événements et appeler son attention sur le principe selon
- lequel l'arrestation
- et la détention de syndicalistes, même pour des raisons de
- sécurité
- intérieure, risquent d'impliquer une grave ingérence dans
- l'exercice des
- droits syndicaux si une telle mesure ne s'accompagne pas de
- garanties
- judiciaires appropriées telles qu'un jugement prompt et
- équitable. (Voir, par
- exemple, 233e rapport, cas no 1211 (Bahreïn), paragr. 589.)
- 324. De même, en ce qui concerne le silence du
- gouvernement au sujet de la
- descente que les forces armées auraient opérée au siège de
- l'Association
- nationale des éducateurs d'El Salvador (ANDES) le 20 avril
- 1986 (mentionnée
- pour la première fois dans le 251e rapport du comité, paragr.
- 355, mai-juin
- 1987), le comité ne peut que conclure que cette perquisition et
- la
- confiscation de biens syndicaux qui l'a suivie enfreignent les
- principes de la
- liberté d'association. Il appelle l'attention du gouvernement sur
- le fait que
- la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations
- avec les
- libertés civiles, adoptée par la Conférence internationale du
- Travail à sa 54e
- session (1970), déclare que le droit à une protection adéquate
- des biens des
- syndicats constitue l'une des libertés civiles essentielles à
- l'exercice
- normal des droits syndicaux. (Voir, par exemple, 230e rapport,
- cas no 1160
- (Suriname), paragr. 548.)
- 325. Abordant ce qui maintenant reste le groupe central des
- allégations dans
- le cas no 1273, à savoir les diverses mesures de harcèlement
- perpétrées à
- l'encontre de membres et de dirigeants de l'Association des
- travailleurs
- salvadoriens des télécommunications (ASTTEL), le comité
- note avec
- préoccupation que la direction - agissant, selon les allégations,
- en collusion
- avec les forces armées - est accusée par les organisations
- plaignantes d'un
- nombre important d'actes antisyndicaux. Ceux-ci s'étendent de
- la dénonciation
- de la convention collective en janvier 1986 à des
- licenciements (six après une
- grève ayant eu lieu le 15 avril 1986 et un autre le 10 janvier
- 1986),
- arrestations et violences en cours de détention, disparition (de
- M. Alberto
- Luis Alfaro, le 17 mars 1988) et assassinats de quatre
- syndicalistes (M. M.C.
- Ayala, le 18 décembre 1987; M. M.H. Vasquez, le 13 janvier
- 1988; M. J.H.
- Guardado, le 1er mars 1988; et M. M. de Jesus Rodas
- Barahona, le 13 avril
- 1988).
- 326. Le comité note que le gouvernement réfute le caractère
- d'organisation
- syndicale de l'ASTTEL et qu'il estime que les plaintes que
- celle-ci présente
- concernant les conventions collectives et l'absence de
- protection contre les
- licenciements antisyndicaux sont légalement infondées, étant
- donné que cette
- association n'est pas un "syndicat" et, partant, ne jouit pas
- des droits et
- protections accordés aux syndicats. En outre, d'après le
- gouvernement,
- l'ASTTEL poursuit des objectifs politiques en recourant à la
- violence.
- 327. Bien qu'il soit difficile au comité de se prononcer face à
- des
- descriptions directement contradictoires du climat des relations
- professionnelles dans un secteur donné, il n'en est pas moins
- en mesure
- d'orienter les parties dans le présent cas puisqu'il a décidé à
- plusieurs
- reprises que, quand les fonctionnaires publics - surtout dans
- des entreprises
- publiques et des entreprises nationalisées - exercent des
- activités qui ne
- sont pas directement liées à l'administration de l'Etat, la
- législation
- nationale doit leur permettre de négocier collectivement leurs
- conditions
- d'emploi (voir, par exemple, 211e rapport, cas no 965
- (Malaisie), paragr.
- 206). Le comité a en effet expressément fait observer dans
- des cas antérieurs
- que les salariés des services des télécommunications doivent
- jouir de cet
- aspect des droits syndicaux (voir 139e rapport, cas no 725
- (Japon), paragr.
- 278). En conséquence, le comité demande au gouvernement
- de revoir la situation
- des salariés d'ANTEL en vue de garantir la protection de leur
- droit de créer
- des organisations de travailleurs et d'exercer des activités,
- telles que la
- négociation collective, pour promouvoir et défendre leurs
- intérêts
- professionnels.
- 328. Le comité ajoute que la révision mentionnée devra
- comporter en
- particulier l'inclusion des travailleurs en question dans le
- champ
- d'application des textes législatifs appropriés relatifs à la
- protection
- contre la discrimination antisyndicale en matière d'emploi. En
- effet, le
- comité a eu à plusieurs reprises l'occasion d'indiquer qu'un des
- principes
- fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs
- doivent
- bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de
- discrimination
- tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière
- d'emploi - tels
- que le licenciement - et que cette protection est
- particulièrement souhaitable
- en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que,
- pour pouvoir
- remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance,
- avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison
- du mandat
- syndical qu'ils détiennent. Le comité estime que la garantie de
- semblable
- protection dans le cas de dirigeants syndicaux est en outre
- nécessaire pour
- assurer le respect du principe fondamental selon lequel les
- organisations de
- travailleurs doivent avoir le droit d'élire librement leurs
- représentants.
- (Voir, par exemple, 236e rapport, cas no 1113 (Inde), paragr.
- 130, cas no 1272
- 329. En ce qui concerne la disparition et les décès dont font
- état les
- plaignants, le comité note que des informations doivent encore
- être fournies
- sur la disparition de M. Alberto Luis Alfaro et la mort de M. M.
- de Jesus
- Rodas Barahona; il demande au gouvernement d'envoyer ses
- observations le plus
- tôt possible. Quant aux trois autres décès, le comité note que,
- selon le
- gouvernement, l'assassinat de M. Guardado aux mains de
- voleurs était sans
- aucun rapport avec ses activités syndicales et que la mort de
- MM. Vasquez et
- Ayala ne saurait être liée à des fonctions ou à des activités
- syndicales
- puisqu'ils n'ont jamais été membres de syndicats. Etant donné
- que les
- organisations plaignantes ne fournissent pas de précisions
- supplémentaires à
- l'appui de leurs allégations selon lesquelles ces morts aux
- mains de bandits
- armés dont l'identité est inconnue constitueraient des
- représailles motivées
- par les troubles sociaux dans la société des
- télécommunications, le comité ne
- peut que regretter ces pertes de vies humaines et souligner
- qu'un mouvement
- syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer
- que dans un
- climat exempt de violence et d'incertitude. (Voir, par exemple,
- 205e rapport,
- cas no 983 (Bolivie), paragr. 33.)
- 330. Enfin, en ce qui concerne l'arrestation de syndicalistes
- et les
- violences qu'ils auraient subies pendant qu'ils étaient détenus
- par la police,
- le comité attend les observations du gouvernement sur les
- arrestations qui
- auraient, en mars et en avril 1988, frappé MM. L.W. Barrios,
- Misael Flores et
- José Mazariego, tous membres de l'ASTTEL. Il note la
- description faite par le
- gouvernement de la remise en liberté des deux fils Centeno et
- de la violence
- déclenchée par M. Humberto Centeno le 10 mars 1988. Il note
- en particulier que
- la détention de M. Centeno avait été motivée par la fureur de
- son
- comportement, que ses blessures étaient directement liées à
- son attaque contre
- des gardes militaires, qu'elles se sont produites avant son
- arrestation et
- que, après avoir été soigné dans une clinique privée, il a été
- remis en
- liberté. En conséquence, le comité rappelle que les travailleurs
- et leurs
- organisations, à l'instar des autres citoyens, doivent respecter
- les lois du
- pays et il considère que cet aspect du cas n'appelle pas un
- examen plus
- approfondi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 331. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le
- comité invite le
- Conseil d'administration à approuver les recommandations
- suivantes:
- a) Le comité doit à nouveau regretter que le gouvernement
- n'ait pas envoyé
- toutes les informations demandées concernant les allégations
- en instance et il
- demande au gouvernement de fournir ses observations sur: i)
- les graves menaces
- perpétrées contre deux femmes membres du Syndicat du café
- (SICAFE) en avril
- 1988; ii) le déroulement de la procédure concernant
- l'assassinat de José
- Arístides Mendez, qui a commencé en juillet 1986; iii) la
- disparition de M.
- Alberto Luis Alfaro le 17 mars 1988 et la mort de M. de Jesus
- Rodas Barahona
- le 13 avril 1988; iv) l'arrestation de courte durée des membres
- de l'ASTTEL,
- MM. L.W. Barrios, Misael Flores et José Mazariego, en mars et
- en avril 1988.
- b) En ce qui concerne les diverses mesures de harcèlement
- antisyndical
- visant l'Association des travailleurs salvadoriens des
- télécommunications, le
- comité prend note avec préoccupation du mauvais climat des
- relations
- professionnelles qui sévit dans la société des
- télécommunications (ANTEL) et
- il rappelle qu'un mouvement syndical réellement libre et
- indépendant ne peut
- se développer que dans un climat exempt de violence et
- d'incertitude.
- c) Pour ce qui est de l'aspect législatif du cas, le comité
- demande au
- gouvernement d'adopter des dispositions législatives pour
- assurer aux
- travailleurs de la société des télécommunications (ANTEL)
- leurs droits de
- s'organiser en syndicats et d'exercer des activités, telles que la
- négociation
- collective, tendant à promouvoir et à défendre leurs intérêts,
- ainsi qu'une
- protection contre les actes de discrimination antisyndicale en
- matière
- d'emploi.