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Informe provisional - Informe núm. 239, Junio 1985

Caso núm. 1305 (Costa Rica) - Fecha de presentación de la queja:: 25-SEP-84 - Cerrado

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  1. 276. L'Association nationale des agents publics (ANEP) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux dans une communication datée du 25 septembre 1984; elle a envoyé des informations complémentaires dans des communications datées des 15 octobre et 22 novembre 1984. Le gouvernement a envoyé ses observations par des communications en date du 8 novembre 1984 et 21 février 1985.
  2. 277. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A.Allégations de l'organisation plaignante

A.Allégations de l'organisation plaignante
  1. 278. Dans sa communication du 25 septembre 1984, l'ANEP allègue que le gouvernement a enfreint les articles 3 et 4 de la convention no 87 lorsqu'il a suspendu cette organisation par voie administrative, bloqué ses avoirs et refusé de remettre les cotisations syndicales des membres de l'ANEP prélevées sur les salaires.
  2. 279. Selon l'ANEP, conformément à ses statuts dûment enregistrés, l'organisation a tenu, le 25 août 1984, son assemblée générale annuelle au cours de laquelle a été élu un nouveau comité exécutif national. Comme le prescrit la législation du travail, le nouveau comité a communiqué les résultats des élections au Département des organisations sociales du ministère du Travail et de la Sécurité sociale pour que ce dernier les enregistre et délivre le certificat de personnalité juridique correspondant. Le groupe qui a été battu aux élections a contesté auprès du département les résultats des élections et le département a décidé de faire une enquête sur leur validité.
  3. 280. L'ANEP déclare que les autorités ont alors suspendu l'enregistrement des résultats des élections en attendant qu'une décision soit prise au sujet du recours. Elles ont bloqué les comptes bancaires de l'ANEP et ont donné des instructions aux institutions autonomes et semi-autonomes et aux organes centraux pour qu'ils s'abstiennent de remettre les fonds provenant des cotisations syndicales payées par les adhérents de l'ANEP. Cette mesure, affirme l'ANEP, équivaut à une suspension par voie administrative de l'organisation syndicale. Elle souligne que le ministère n'est pas habilité à ce faire par la législation nationale et elle fait observer que les dispositions de la loi no 1860 sur les fonctions du ministère du Travail ne donnent pas aux autorités le pouvoir d'intervenir dans les affaires internes d'un syndicat, ni pendant le déroulement des élections syndicales, ni après les élections pour décider de la validité ou de la nullité de ces dernières.
  4. 281. Enfin, l'organisation plaignante cite plusieurs décisions antérieures du Comité de la liberté syndicale concernant l'intervention des pouvoirs publics dans les affaires internes des syndicats et les élections syndicales.
  5. 282. Dans sa communication du 15 octobre 1984, l'ANEP déclare que le 11 septembre 1984 elle a déposé officiellement un recours contre la décision du ministère de faire une enquête sur la validité des élections. Par une décision datée du 29 septembre, le ministre a rejeté ce recours et autorisé la poursuite de l'enquête.
  6. 283. Dans sa communication du 22 novembre 1984, l'ANEP allègue que des membres de la Direction du renseignement et de la sécurité du ministère de la Sécurité publique ont fait irruption de manière violente dans les bureaux de l'ANEP et se sont emparés de matériel appartenent à l'association. Selon l'ANEP, ces personnes ont également arrêté, sans donner de motif, cinq dirigeants du syndicat, à savoir le directeur exécutif et MM. Johnny García Campos, Franklin Benavides, Hermán Guardiola et Víctor Arce. Elle affirme que ces agissements font partie d'une politique visant à entraver le développement du mouvement syndical dans le pays.

B.Réponse du gouvernement

B.Réponse du gouvernement
  1. 284. Dans sa communication du 8 novembre 1984, le gouvernement déclare qu'il n'a pas enfreint la convention no 87 puisque la convention elle-même (aux articles 3.2 et 8) oblige les organisations de travailleurs à respecter la légalité. Le Code du travail du Costa Rica, ajoute le gouvernement, dispose à l'article 334, que les syndicats doivent être régis par les principes démocratiques de la règle de la majorité, du scrutin secret et du droit de vote égal pour tous, et, à l'article 337, que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale est habilité à exercer le contrôle le plus strict sur les organisations sociales à seule fin d'assurer que lesdites organisations fonctionnent conformément aux dispositions légales. Le gouvernement déclare que les autorités sont donc tenues d'inspecter, de contrôler et d'intervenir pour assurer le respect de la législation et des principes légaux qui régissent le fonctionnement des syndicats. Cette obligation est particulièrement importante lorsque la demande émane d'un membre d'un syndicat qui estime que ses droits ont été violés.
  2. 285. Selon le gouvernement, dans le cas d'espèce, le 30 août 1984, un membre de l'ANEP candidat malheureux au poste de secrétaire général lors des élections du 25 août 1984, M. José Gerardo Riba Bazo, a introduit un recours auprès du Département des organisations sociales demandant l'annulation de l'assemblée générale et, par conséquent, des résultats des élections. Le gouvernement fournit une copie du recours d'où il ressort que M. Riba Bazo conteste la procédure d'élection pour les raisons suivantes: la commission électorale a contesté les candidats présentés par la tendance de M. Bazo au sein de l'ANEP; la liste électorale présentée par l'autre tendance de l'ANEP contenait des candidats qui n'étaient pas des travailleurs au service de l'Etat, ce qui est contraire aux statuts de l'ANEP; certains dirigeants de l'ANEP ont différé l'examen des 450 demandes d'adhésion transmises par des représentants de la tendance de M. Bazo quinze jours avant la date fixée pour l'Assemblée générale; certains dirigeants de l'ANEP ont caché la liste générale des électeurs aux représentants de la tendance de M. Bazo jusqu'au 23 août 1984 et la liste additionnelle ne leur a été présentée que le 25 août; ces listes contenaient de graves erreurs comme la répétition du même nom ou numéro d'identité et l'inclusion de personnes qui n'avaient pas le droit de vote; les bureaux électoraux et les locaux de la commission électorale ont été assiégés notamment sur les lieux des élections.
  3. 286. Le gouvernement ajoute que la décision prise par le ministère du Travail le 29 septembre 1984 de rejeter le recours contre l'objection de M. Bazo est bien fondée car elle repose sur le principe de la légalité qui régit l'administration publique.
  4. 287. En conclusion, le gouvernement souligne que le Département des organisations sociales a agi à la demande d'un adhérent de l'ANEP et non d'office et que son enquête n'est nullement arbitraire. Il affirme qu'il respecte la liberté syndicale et que l'action des autorités ne vise pas à faire obstruction ou obstacle à la formation de syndicats ou à l'affiliation à des syndicats.
  5. 288. Dans sa communication du 21 février 1985, le gouvernement rappelle les circonstances de la plainte et ajoute que la tendance au sein de l'ANEP qui a remporté les élections a interjeté un recours (amparo) contre trois fonctionnaires du ministère du Travail dans le but de mettre fin à l'enquête sur les résultats des élections et a organisé des manifestations publiques critiquant le ministre. Selon le gouvernement, des tracts où il était dit que le ministre avait commis une série de "délits" ont été affichés. Sans que le ministre en ait fait la demande, les autorités ont décidé de surveiller les locaux de l'ANEP pour saisir cette propagande offensante. En conséquence, le 14 novembre 1984, les personnes suivantes ont été appréhendées alors qu'elles transportaient 500 affiches qui allaient être distribuées dans tout le pays: Víctor Arce Quesada, Franklin Benavides Flores, Rafael A. Cordero Herrera et Fidel Hermán Guardiola Solis. Le même jour, sur mandat délivré par le juge et conformément aux formalités légales, les locaux de l'ANEP ont été perquisitionnés. Diverses affiches ont été confisquées et M. Johnny García Campos a été arrêté. Le gouvernement nie que tout autre matériel appartenant au syndicat ait été emporté et souligne que toutes les personnes arrêtées ont été relâchées à 19 heures le même jour.

C.Conclusions du comité

C.Conclusions du comité
  1. 289. Le comité note que le présent cas concerne un différend relatif aux élections syndicales de l'ANEP qui auraient donné lieu à la suspension de cette organisation par voie administrative et, par la suite, à la perquisition de ses locaux par les autorités, ainsi que l'arrestation de cinq responsables de l'ANEP.
  2. 290. Le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle sa décision d'effectuer une enquête sur la validité des élections a été fondée sur l'obligation légale faite au ministère du Travail de veiller à ce que les syndicats fonctionnent conformément aux dispositions du Code du travail concernant les procédures de vote démocratiques. Il note aussi que la décision d'effectuer une enquête découle d'une plainte d'un candidat aux élections selon lequel des irrégularités ont eu lieu au cours des élections justifiant l'annulation de ces dernières.
  3. 291. Le Comité souligne tout d'abord que les organes de contrôle de l'OIT ont eu souvent l'occasion de formuler des principes et des considérations à propos de l'intervention des pouvoirs publics dans des questions concernant des élections syndicales contestées. En règle générale, il a été estimé que les principes de la liberté syndicale n'empêchent pas un contrôle extérieur des activités internes d'une organisation s'il est allégué que la loi ou les statuts ont été violés. Cependant, comme les mesures prises par les autorités administratives risquent d'être arbitraires, les organes de contrôle ont estimé que si des enquêtes sont parfois nécessaires dans les cas où des irrégularités se sont produites ou sont alléguées, ces questions doivent relever des autorités judiciaires qui devraient garantir une procédure impartiale, objective et rapide.
  4. 292. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les résultats des enquêtes qui ont été entreprises et d'indiquer s'il existe une procédure permettant de s'adresser aux tribunaux au sujet de toute décision administrative qui pourrait être prise en la matière.
  5. 293. Deuxièmement, en ce qui concerne les mesures provisoires prises contre le syndicat, le comité note qu'aucune disposition du Code du travail ou de la loi no 1860 sur les fonctions du ministère du Travail ne semble autoriser les autorités administratives à suspendre l'enregistrement des résultats des élections, à bloquer les comptes bancaires du syndicat et à différer le paiement des cotisations syndicales prélevées sur les salaires pendant que l'enquête est en cours. A cet égard, le comité a déclaré à de nombreuses occasions. (Voir, par exemple, 230e rapport, cas no 1134 (Chypre), paragr. 389.) qu'afin d'éviter le danger d'une limitation sérieuse au droit des travailleurs d'élire leurs représentants en toute liberté, les recours introduits contre les résultats des élections syndicales ne devraient pas - en attendant le résultat de la procédure judiciaire - paralyser le fonctionnement des organisations syndicales.
  6. 294. En conséquence, le comité espère que les mesures prises par le gouvernement seront levées et que les représentants élus des travailleurs seront autorisés à exercer leurs fonctions en toute liberté en attendant qu'une décision soit prise sur la validité des élections et qu'un recours auprès des tribunaux puisse être formé, si nécessaire, en vue de la décision définitive à ce sujet.
  7. 295. En ce qui concerne la persquisition par les autorités des locaux de l'ANEP le 14 novembre 1984, le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle cette perquisition a été effectuée sur mandat judiciaire et conformément aux formalités légales afin de saisir des documents de propagande jugés offensants. Etant donné que seules ont été confisquées les affiches jugées injurieuses et qu'aucun autre bien du syndicat n'a été saisi, le comité estime que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
  8. 296. En ce qui concerne l'arrestation, le 14 novembre 1984, de cinq dirigeants de l'ANEP expressément nommés, le comité note qu'ils ont été arrêtés en relation avec la confiscation légale de certains documents et que, selon le gouvernement, ils ont été libérés le même jour sans avoir été inculpés. Le comité appelle, de manière générale, l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel la détention de dirigeants syndicaux pour des raisons liées à l'exercice d'activités syndicales, contre lesquels aucune charge spécifique n'a été retenue, entrave l'exercice des droits syndicaux. (217e rapport, cas no 1031 (Nicaragua), paragr. 120.)

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 297. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
    • a) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel les cas de contestation des résultats des élections syndicales doivent relever des autorités judiciaires qui devraient garantir une procédure impartiale, objective et rapide.
    • b) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations complexes et détaillées sur les résultats des enquêtes qui ont été entreprises et d'indiquer s'il existe une procédure permettant de s'adresser aux tribunaux au sujet de toute décision administrative qui pourrait être prise en la matière.
    • c) Afin d'éviter le danger d'une limitation sérieuse au droit des travailleurs d'élire leurs représentants en toute liberté, les recours introduits contre les résultats des élections syndicales ne devraient pas - en attendant le résultat de la procédure - paralyser le fonctionnement des organisations syndicales.
    • d) Le comité espère que les mesures prises par le gouvernement seront levées et que les représentants des travailleurs qui ont remporté les élections de l'ANEP en août 1984 seront autorisés à exercer leurs fonctions en toute liberté en attendant qu'une décision soit prise sur la validité des élections et que, si nécessaire, un recours pourra être formé auprès des tribunaux en vue de la décision définitive en la matière.
    • e) Le comité estime que la perquisition des locaux de l'ANEP le 14 novembre 1984 n'appelle pas un examen plus approfondi.
    • f) En ce qui concerne la détention temporaire, le 14 novembre 1984, de cinq dirigeants de l'ANEP expressément nommés, en relation avec la confiscation légale de certains documents, le comité appelle, de manière générale, l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel la détention de dirigeants syndicaux pour des motifs liés à l'exercice d'activités syndicales, contre lesquels aucune charge spécifique n'a été retenue, entrave l'exercice des droits syndicaux.
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