Visualizar en: Inglés - Español
- 124. Le Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de l'Institut national de coopération éducative du District fédéral et de l'Etat de Miranda (SUTDI) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Venezuela dans des communications des 6 janvier et 2 mars 1989. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 30 mai 1989 et 12 janvier 1990.
- 125. A sa session de novembre 1989, le comité a ajourné l'examen du cas "dans l'attente du texte de la décision de la Cour suprême de justice concernant l'enregistrement du Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de l'Institut national de coopération éducative" (voir 268e rapport, paragr. 10), question centrale du présent cas.
- 126. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du syndicat plaignant
A. Allégations du syndicat plaignant
- 127. Le Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de l'Institut national de coopération éducative du District fédéral et de l'Etat de Miranda (SUTDI), dans une communication du 6 janvier 1989, indique qu'il a été légalisé le 4 février 1987 par l'Inspection du travail et que cette légalisation a été confirmée par deux avis du ministère du Travail. Or, le 20 octobre 1988, le président de l'Institut national de coopération éducative (INCE), organisme dépendant de l'Etat, a introduit devant la Cour suprême de justice un recours en annulation de la légalisation du SUTDI.
- 128. Le syndicat plaignant indique que ce recours auprès de la Cour suprême est l'aboutissement d'une série d'actions contraires à la liberté syndicale menées par les dirigeants de l'INCE au mépris des conventions nos 87 et 98 ratifiées par le Venezuela, ainsi que de la loi organique d'éducation qui protège les enseignants et de la Constitution de la République. Le SUTDI ajoute que pendant deux ans le Comité directeur de l'INCE a enfreint impunément les droits syndicaux de libre association et de pétition des enseignants de l'INCE, allant jusqu'à refuser de respecter une décision judiciaire du 23 novembre 1988 prononcée par le Tribunal de première instance du travail enjoignant au Comité directeur de l'INCE de rétablir la constitutionnalité du syndicat plaignant.
- 129. Dans sa communication du 2 mars 1989, le SUTDI joint en annexe copie des documents du ministère du Travail déclarant sans fondement les allégations des autorités de l'Institut national de coopération éducative (INCE), qui demandaient l'annulation de la légalisation du SUTDI. (La communication souligne que les autorités du ministère du Travail ont mis l'accent sur le fait que l'annulation de la légalisation de l'organisation syndicale porterait atteinte aux conventions nos 87 et 98.) En outre, le syndicat plaignant joint aussi copie des documents de défense présentés par le syndicat au ministère du Travail et des documents déposés devant la Cour suprême de justice concernant l'introduction du recours en nullité contre le SUTDI.
- 130. Il ressort des annexes fournies par le syndicat plaignant que l'INCE refuse des autorisations d'absence aux dirigeants et aux délégués syndicaux en arguant de l'illégalité du syndicat, qu'il n'effectue pas la retenue des cotisations syndicales et ne donne pas suite aux pétitions et demandes du syndicat. A l'appui de sa demande de reconsidération de l'enregistrement du syndicat ordonné par la Direction générale sectorielle du travail, l'INCE fait valoir que les fonctionnaires de l'enseignement, en particulier ceux qui sont au service de l'INCE, relèvent de la loi sur la carrière administrative (et non de la loi organique de l'éducation), et qu'en conséquence ils n'ont droit de former des syndicats que dans les conditions et modalités prévues dans ladite loi et dans le Règlement des syndicats de fonctionnaires publics, sans possibilité de conclure des contrats collectifs.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 131. Dans une première communication du 30 mai 1989, le gouvernement avait déclaré que pour se conformer à l'injonction d'amparo constitutionnel en faveur du SUTDI (Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de l'INCE du District fédéral et de l'Etat de Miranda), émise par le Tribunal de première instance du travail de la circonscription judiciaire du District fédéral et de l'Etat de Miranda le 23 novembre 1988, l'Institut national de coopération éducative (INCE) avait effectué les démarches suivantes: une réunion avait été convoquée le 25 janvier 1989, à laquelle avaient assisté des représentants de haut niveau des deux parties; le procès-verbal de la réunion rendait compte des accords conclus selon lesquels, notamment, la retenue des cotisations syndicales se faisait depuis le 15 janvier 1989, et les questions concernant les autorisations d'absence pour les dirigeants et délégués syndicaux devaient être discutées au cours de réunions ultérieures; il avait également été admis au cours de la réunion et dans des communications ultérieures que l'Institut national de coopération éducative (INCE) se conformerait à l'obligation de répondre à la correspondance du syndicat.
- 132. Le gouvernement avait indiqué que le syndicat en cause agissait librement, qu'il entretenait sans aucune restriction des relations avec les enseignants tant de Caracas que des différentes provinces, et qu'il exprimait ses points de vue par les organes ordinaires d'opinion et par la presse nationale. D'après le gouvernement, l'Institut national de coopération éducative (INCE) respectait les normes constitutionnelles concernant le droit syndical et le droit de pétition.
- 133. Le gouvernement avait ajouté que, selon l'Institut national de coopération éducative (INCE), les adhérents du syndicat avaient le statut de fonctionnaires publics; raison pour laquelle l'INCE avait demandé l'annulation de l'enregistrement que l'association syndicale avait obtenue du ministère du Travail, étant donné que l'enregistrement aurait dû être obtenu, selon l'INCE, devant le Bureau central du personnel (OCP). En effet, le droit syndical des fonctionnaires publics au Venezuela relève de la loi sur la carrière administrative et de son règlement d'application. Ces textes régissent les procédures d'enregistrement des syndicats de fonctionnaires publics auprès du bureau susmentionné, qui dépend de la présidence de la République.
- 134. Le gouvernement avait déclaré que la Cour suprême était saisie du cas. Cependant, avait-il précisé par un premier arrêt du 9 mars 1989, la Cour suprême avait déjà rejeté la demande de suspension provisoire des effets de l'enregistrement du SUTDI auprès du ministère du Travail interjetée par l'INCE. Le gouvernement avait envoyé en annexe copie des décisions, avis et accords pertinents dans le présent cas.
- 135. Dans sa nouvelle communication du 12 janvier 1990, le gouvernement indique à nouveau que la Cour suprême est toujours saisie du cas, qu'elle n'a pas encore rendu son arrêt et qu'un magistrat rapporteur a été nommé à la Chambre administrative. Quand la sentence sera rendue, il en sera dûment tenu compte et elle sera communiquée au comité. Le gouvernement signale que l'INCE, qui est une personne morale distincte de l'administration publique, a introduit un recours, devant la Chambre du contentieux politico-administratif de la Cour suprême, contre l'enregistrement et la légalisation du SUTDI et qu'elle a demandé la suspension des effets de l'acte administratif portant légalisation du SUTDI. La Cour a rejeté cette dernière demande, estimant que le SUTDI devait pouvoir continuer à jouir de tous ses droits jusqu'au prononcé de l'arrêt définitif sur le fond de la plainte. Le gouvernement, se déclarant respectueux des décisions du pouvoir judiciaire, explique que le SUTDI exerce actuellement tous les droits que lui confèrent la Constitution et la loi, comme le prouve le fait qu'en octobre dernier ce syndicat a lancé un mouvement de grève reconnu par les autorités du travail, mouvement qui s'est terminé par une négociation sur les conditions de travail (le gouvernement joint à sa communication les pièces pertinentes). Il convient de relever qu'à l'occasion de cette grève les autorités du travail et l'INCE ont mené, avec les dirigeants du SUTDI, des négociations qui ont abouti à des accords concernant la reconnaissance dudit syndicat par l'institut, comportant l'insertion de clauses syndicales et concédant aux travailleurs les conditions de travail qu'ils revendiquaient.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 136. La présente plainte a pour origine un recours judiciaire introduit par l'Institut de coopération éducative (INCE) auprès des tribunaux en annulation de l'enregistrement que le Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de cet institut avait obtenu du ministère du Travail, au prétexte, selon ledit institut, que l'enregistrement aurait dû être effectué au Bureau central du personnel et non au ministère du Travail. Il ressort des documents fournis au comité que la question à trancher est celle de savoir si le régime juridique applicable aux travailleurs en question est uniquement la loi sur la carrière administrative (auquel cas lesdits travailleurs seraient des fonctionnaires publics dont les syndicats doivent s'inscrire auprès du Bureau central du personnel), ou si ces travailleurs relèvent de la loi organique d'éducation, auquel cas ils pourraient former des syndicats conformément à la loi du travail et conclure des contrats collectifs de travail, et leurs syndicats devraient être enregistrés par le ministère du Travail.
- 137. Le comité note que cette question est examinée actuellement par la Cour suprême, et il observe avec intérêt que, selon la réponse du gouvernement, le syndicat de l'INCE peut agir librement, qu'il a déclaré la grève et s'est engagé dans une négociation collective qui lui a permis d'aboutir à un accord avec l'INCE pour la retenue des cotisations syndicales, et que des réunions ont lieu sur d'autres questions. Pour sa part, la Cour suprême, quoi qu'elle n'ait pas encore rendu son arrêt définitif, s'est opposée à la suspension de l'acte par lequel le ministère du Travail avait enregistré le syndicat en question.
- 138. Le comité observe que la principale question qui se pose ici est de déterminer si le personnel enseignant, représenté par le SUTDI, doit jouir du droit de négociation collective en vertu de conventions collectives. Or, selon la législation nationale, le SUTDI n'en jouit pas si l'on s'en tient à la loi sur la carrière administrative, et devrait par conséquent s'inscrire au Bureau central du personnel, tandis qu'il en jouirait si on s'en rapportait à la loi organique d'éducation et si son enregistrement au ministère du Travail (actuellement contesté en justice) était considéré comme valable. A cet égard, le comité souligne que du point de vue de la convention no 98, ratifiée par le Venezuela, le personnel enseignant ne doit être exclu en aucun cas du droit de négocier ses conditions d'emploi par des contrats collectifs. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 601, et 202e rapport, cas no 871 (Colombie), paragr. 99.)
- 139. Le comité prie le gouvernement de lui envoyer le texte de la décision de la Cour suprême de justice concernant l'enregistrement du Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de l'INCE.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 140. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité rappelle que du point de vue de la convention no 98, ratifiée par le Venezuela, le personnel enseignant ne doit être exclu en aucun cas du droit de négocier ses conditions d'emploi par des contrats collectifs.
- b) Le comité prie le gouvernement de lui envoyer le texte de la décision de la Cour suprême de justice concernant l'enregistrement du Syndicat unitaire des travailleurs de l'enseignement de l'INCE.