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- 133. Le comité a examiné ce cas à trois reprises (voir 281e, 284e et 286e rapport du comité, paragr. 420 à 441, 921 à 942 et 400 à 411, approuvés par le Conseil d'administration à ses 252e, 254e et 255e sessions (mars et novembre 1992, et mars 1993)), à l'occasion desquelles il a formulé des conclusions provisoires. Le gouvernement a adressé de nouvelles observations dans des communications datées des 9 et 13 mars 1993.
- 134. Le Nicaragua a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 135. Les questions demeurées en instance à la session de février 1993 du comité ont trait à divers actes de violence commis par la police à l'encontre de grévistes, dans le cadre des nombreuses grèves survenues durant les années 1990 et 1991.
- 136. Le gouvernement n'ayant pas fourni des observations suffisamment détaillées sur ces allégations, le comité a formulé, lors du dernier examen du cas, les recommandations suivantes (voir 284e rapport, paragraphe 942):
- "Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas fourni d'informations sur les actes de violence qui auraient été commis par la police contre les grévistes d'après les allégations des organisations plaignantes (grève de juillet 1990 (émeutes nationales): 4 morts et 49 blessés; grève du 9 avril 1991 (Banque immobilière): 7 blessés; grève du 11 avril 1991 (Banque nationale de développement): 5 blessés; et grève du 18 avril 1991 (Centre Olof Palme): 14 blessés). Il demande une nouvelle fois au gouvernement de lui faire savoir si des enquêtes judiciaires ont été ouvertes pour déterminer les circonstances dans lesquelles des travailleurs ayant participé aux grèves mentionnées ont été tués ou blessés.
- Le comité demande au gouvernement d'ouvrir des enquêtes judiciaires sur les circonstances dans lesquelles des personnes auraient été blessées le 27 mars 1992 (20 selon l'organisation plaignante et 2 selon le gouvernement), durant le conflit collectif survenu à l'Office national d'approvisionnement en céréales de base (ENABAS)."
- B. Réponse du gouvernement
- 137. Dans des communications en date des 9 et 13 mars 1993, le gouvernement répond comme suit aux allégations relatives aux actes de violence commis contre des grévistes lors de diverses grèves:
- - le 18 avril 1991, soixante employés en grève du Centre de congrès Olof Palme s'étaient regroupés et avaient installé des tentes devant le bâtiment; lorsque les forces de police ont essayé de les persuader de quitter les lieux, les grévistes les ont attaquées, et l'on a déploré des blessés des deux côtés. Le gouvernement signale que certaines des personnes impliquées ont été arrêtées, mais que, malgré le fait que les actes commis par les grévistes constituaient des délits d'atteinte à l'ordre public, aucun d'entre eux n'a été poursuivi ni traduit devant les autorités judiciaires compétentes. Le gouvernement précise que l'intervention de la police avait pour objet de garantir la sécurité des souverains espagnols, en visite dans la ville, et qui devaient passer par la rue occupée par les manifestants;
- - s'agissant de la grève de juillet 1990, celle-ci s'est transformée en émeute, telle que définie par le Code pénal, et la commission d'enquête, témoin des faits, n'a pu s'acquitter de sa tâche en raison de la violence déployée par les grévistes.
- 138. Le gouvernement indique que dans tous les cas mentionnés il s'est abstenu d'entamer une procédure judiciaire ou administrative contre les personnes ayant porté atteinte à l'ordre public et à la sécurité des personnes en vertu de sa politique de conciliation, et que les membres de la police nationale qui sont intervenus lors de ces événements avaient fait leur devoir conformément à leur mandat constitutionnel qui est de garantir l'ordre interne et la sécurité des citoyens. Le gouvernement précise que, malgré cela, il a été créé une commission de membres de la police afin d'étudier les faits et de déterminer les responsabilités éventuelles des forces de l'ordre, bien que, lors des enquêtes menées par cette commission, aucune responsabilité individuelle n'ait pu être établie car il s'agissait de faits tumultueux. Enfin, le gouvernement fait savoir que, soucieux du perfectionnement des procédures d'intervention de la police, il a décidé de faire une évaluation collective après chaque intervention pour déterminer les excès et les erreurs et que, de la même façon, il a décidé d'organiser des débats et des séminaires sur les droits de l'homme, les méthodes d'action et l'utilisation de la force.
- 139. Le gouvernement ajoute qu'il existe dans le pays deux corps législatifs (la loi sur l'organisation des juridictions militaires et des procédures pénales militaires provisoires, et la loi provisoire sur les délits militaires) qui délimitent la juridiction dont relèvent les forces armées du pays, et que le Code pénal est considéré par les deux textes comme un instrument supplémentaire sous révserve que ses dispositions ne soient pas incompatibles avec les lois susmentionnées. Le gouvernement précise que la police relève d'une juridiction spéciale et qu'il n'est donc pas possible de poursuivre ses membres devant les tribunaux de droit commun.
- 140. Enfin, le gouvernement déclare qu'il a signalé à diverses occasions par le passé que des procédures judiciaires avaient été entamées au sujet des faits survenus à l'ENABAS.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 141. S'agissant des allégations concernant les actes de violence commis par la police contre des grévistes (émeutes de juillet 1990: quatre morts et 49 blessés; grève des travailleurs de la Banque immobilière du 9 avril 1991: sept blessés; grève des travailleurs de la Banque nationale de développement du 11 avril 1991: cinq blessés; et grève au Centre de congrès Olof Palme du 18 avril 1991: 14 blessés), le comité observe que le gouvernement n'a répondu qu'en ce qui concerne les actes de violence pendant les émeutes nationales et la grève dans le Centre de congrès Olof Palme. Le comité prend note des observations du gouvernement selon lesquelles la police serait intervenue durant les événements mentionnés afin de garantir l'ordre public, que les personnes arrêtées ont été libérées quelques heures après et qu'aucune procédure pénale ou administrative n'a été engagée contre les grévistes. De même, le comité note qu'il a été constitué une commission de membres de la police chargée d'enquêter sur les événements, mais qu'en raison du caractère tumultueux de ceux-ci elle n'a pas pu désigner individuellement des responsables ou déterminer des responsabilités.
- 142. Tout en étant conscient des difficultés invoquées par le gouvernement dans la détermination des responsabilités pénales lors d'actes commis dans une situation confuse, le comité regrette de constater que les enquêtes menées par la police n'aient pas permis de faire la lumière sur les actes de violence au cours desquels des personnes ont été blessées. Il note que les forces de police relèvent de lois spéciales et que leurs membres ne sont pas jugés par les tribunaux ordinaires; il rappelle toutefois au gouvernement qu'à plusieurs reprises il a signalé que, dans les cas où la dispersion d'assemblées publiques par la police a entraîné la perte de vies humaines ou des blessures graves, le comité a attaché une importance spéciale à ce qu'on procède immédiatement à une enquête impartiale et approfondie des circonstances et à ce qu'une procédure légale régulière soit suivie pour déterminer le bien-fondé de l'action de la police et pour déterminer les responsabilités (voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 79) et punir les coupables. Dans ces conditions, le comité insiste sur la nécessité de mener des enquêtes judiciaires et de le tenir informé du résultat de celles-ci.
- 143. En ce qui concerne les allégations d'actes de violence commis durant le conflit collectif survenu à l'Office national d'approvisionnement des céréales de base (ENABAS), au cours duquel des personnes furent blessées, le comité note que le gouvernement déclare qu'il a déjà donné des informations sur l'ouverture de procédures judiciaires. Le comité rappelle au gouvernement que ses observations se réfèrent à l'ouverture de procédures relevant des tribunaux du travail, mais que, compte tenu de la gravité des faits (vingt personnes blessées selon les organisations plaignantes et deux selon le gouvernement), le comité a demandé l'ouverture des procédures judiciaires pénales qui s'imposent. Dans ces conditions, et tout en prenant note de la procédure en cours devant les tribunaux du travail, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement d'ouvrir des enquêtes judiciaires pénales afin de faire la lumière sur les actes de violence qui ont eu lieu durant le conflit collectif survenu à l'ENABAS, au cours duquel des personnes ont été blessées, et de punir les coupables. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de ces enquêtes judiciaires pénales ainsi que de celles qui relèvent des tribunaux du travail.
- 144. Enfin, le comité rappelle au gouvernement qu'"un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer dans un climat de violence et d'incertitude. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 75.)"
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 145. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui concerne les allégations relatives aux actes de violence commis par la police contre des grévistes, le comité regrette profondément de constater que les enquêtes menées par la police n'ont pas permis de faire la lumière sur les actes de violence au cours desquels plusieurs personnes ont été blessées. Déplorant ces décès et ces actes de violence, le comité insiste sur la nécessité de mener des enquêtes judiciaires afin d'infliger des sanctions pénales aux coupables, et de le tenir informé des résultats de celles-ci.
- b) En ce qui concerne les actes de violence qui auraient eu lieu durant le conflit collectif survenu à l'Office national d'approvisionnement en céréales de base (ENABAS) au cours duquel des personnes ont été blessées, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement d'ouvrir des enquêtes judiciaires pénales afin de faire la lumière sur les actes de violence qui ont eu lieu durant le conflit collectif survenu à l'ENABAS, au cours duquel des personnes ont été blessées, et de sanctionner les coupables. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des résultats des enquêtes judiciaires pénales ainsi que des autres enquêtes relevant des tribunaux du travail.