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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 295, Noviembre 1994

Caso núm. 1792 (Kenya) - Fecha de presentación de la queja:: 05-JUL-94 - Cerrado

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  1. 519. Par une communication du 5 juillet 1994, l'Internationale des services publics (ISP) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Kenya. Par une communication du 20 juillet 1994, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à cette plainte.
  2. 520. Le gouvernement a envoyé ses observations sur ce cas dans une communication du 28 septembre 1994.
  3. 521. Le Kenya n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 522. Dans sa communication du 5 juillet 1994, l'Internationale des services publics (ISP) se réfère à un cas précédent de violation des droits syndicaux des fonctionnaires, examiné par le comité dans son 241e rapport (cas no 1189); et affirme que les recommandations du comité à cette occasion n'ont toujours pas été mises en oeuvre par le gouvernement et que la situation s'est en fait aggravée.
  2. 523. L'organisation plaignante allègue que de hauts dirigeants du Syndicat du personnel enseignant des universités (UASU) ont été arrêtés par la police. Par ailleurs, en ce qui concerne le Syndicat des médecins et dentistes du Kenya, elle indique que les médecins sont en grève malgré un avertissement du ministère de la Santé leur rappelant qu'ils assurent un service essentiel, et que leur grève est donc illégale, et ce en dépit de la menace proférée par le Président d'engager des travailleurs étrangers.
  3. 524. Le 15 juin 1994, le greffier des syndicats a refusé d'enregistrer le Syndicat des médecins et dentistes. Cette décision fait l'objet d'un appel et les responsables du syndicat en question ont engagé une action devant la Cour supérieure contre le ministre de la Santé pour s'être prétendument rendu coupable d'outrage à magistrat en ayant soi-disant anticiper sur la décision de la Cour dans le procès introduit par le syndicat tendant à contraindre le gouvernement à enregistrer le syndicat.
  4. 525. La Constitution garantit la liberté syndicale, et le parti au pouvoir a appuyé dans son programme pour les élections de 1992 le rétablissement des syndicats de fonctionnaires et des associations de personnel universitaire. Le 1er mai 1992, le Président Moi a annoncé la levée de l'interdiction qui avait frappé l'ancien Syndicat des agents de la fonction publique du Kenya, et il a institué le 8 mai une commission chargée d'étudier l'éventualité de la constitution d'un syndicat de fonctionnaires. Le 13 octobre 1993, le Parlement a voté à l'unanimité, avec le soutien gouvernemental, une motion tendant à rétablir le syndicat.
  5. 526. Le 28 avril 1994, le gouvernement a approuvé le rapport du comité précité, qui recommandait la création immédiate du Syndicat des agents publics du Kenya. Selon un communiqué de presse signé par le Directeur de la fonction publique, le syndicat reconstitué devait se voir attribuer l'actif et le passif de l'ancien Syndicat des fonctionnaires du Kenya et l'ex-Association d'entraide des fonctionnaires du Kenya devait cesser d'être enregistrée. Certaines catégories d'agents publics devaient être exemptées de l'affiliation syndicale, notamment les enseignants relevant de la Commission des enseignants et les personnes chargées de faire des recommandations et de prendre des décisions en matière de nominations, de promotions, de cessations d'emploi et autres mesures disciplinaires. Le Président a donné instruction au greffier des syndicats de veiller à l'application immédiate de cette mesure.
  6. 527. Le 3 mai 1994, la demande d'enregistrement du nouveau Syndicat des agents publics du Kenya a été déposée; cependant, le 11 mai, le Président Moi est revenu sur son autorisation de créer immédiatement un syndicat en déclarant qu'il avait autorisé seulement la création d'une association d'entraide.
  7. 528. La CISL s'est associée à la présente plainte dans une communication du 20 juillet 1994.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 529. Dans sa communication du 28 septembre 1994, le gouvernement rappelle tout d'abord sa détermination à appliquer de bonne foi les normes internationales du travail, comme en témoigne le fait qu'il a déjà ratifié 46 conventions.
  2. 530. Sur le fond de la plainte, il confirme que certains enseignants universitaires et que certains médecins fonctionnaires ont "boycotté" leurs fonctions après que les demandes d'enregistrement de leur syndicat respectif eurent été refusées. Il déclare que ces cas ont été transmis à la Cour supérieure, et qu'ils ne peuvent donc être débattus. Le gouvernement s'interroge sur les raisons qui ont conduit les intéressés à avoir recours au boycott alors que le litige est encore en instance devant la justice. Il ajoute que les syndicats et les organismes similaires ne se sont pas joints à ce boycott, et que ceux qui y ont recouru ont agi individuellement. Leur action n'est rien d'autre qu'une rupture du contrat de travail.
  3. 531. Le gouvernement rappelle qu'il n'a ratifié ni la convention no 87 ni la convention no 151, mais il ajoute qu'il n'entend pas enfreindre délibérément l'une quelconque de leurs dispositions. Il affirme au contraire avoir autorisé la syndicalisation des agents locaux et même de ceux de l'administration centrale jusqu'en 1982, et rappelle qu'il a déjà informé l'OIT des raisons des mesures prises.
  4. 532. Il affirme avoir respecté strictement l'accord sur la syndicalisation conclu par les partenaires tripartites et qui figure dans la Charte des relations professionnelles du Kenya signée en 1962 et modifiée en 1980; il ajoute que cette charte ne s'oppose en rien à la Constitution du Kenya et aux conventions nos 87, 98 et 151 de l'OIT.
  5. 533. Le gouvernement indique aussi qu'il lui appartient de décider lui-même des mesures à prendre et de les appliquer à son rythme. Il ne ferme nullement les portes à la syndicalisation et continuera à examiner régulièrement chaque cas et à décider en conséquence. Il continuera aussi à consulter ses partenaires tripartites sur l'avenir des syndicats.
  6. 534. Le gouvernement affirme qu'il accorde beaucoup d'attention à la question de la syndicalisation des fonctionnaires et qu'il continuera à le faire. S'il prend une décision à ce sujet, il le fera alors savoir. Jusqu'à nouvel ordre, cependant, les fonctionnaires disposent d'une association qui gère leurs intérêts et s'occupe de leur bien-être.
  7. 535. En conclusion, le gouvernement déclare solennellement qu'il représente un pays démocratique, respectueux des droits syndicaux et des conventions de l'OIT comme de sa propre Constitution et de sa propre législation. Il exprime sa ferme volonté d'améliorer sans cesse le sort non seulement des travailleurs, mais de l'ensemble de la population du pays. Il continuera d'ailleurs à défendre les droits des travailleurs et des employeurs dans l'intérêt de la nation.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 536. Le comité note que le présent cas concerne à la fois la question du refus d'enregistrer deux syndicats, le Syndicat du personnel enseignant des universités et le Syndicat des médecins et dentistes du Kenya, et le maintien du refus d'enregistrer l'Association des fonctionnaires du Kenya; l'annulation de l'enregistrement de cette dernière avait fait l'objet d'une plainte soumise au Comité de la liberté syndicale il y a plus de dix ans. (Voir cas no 1189, 230e rapport, paragr. 679 à 688, 238e rapport, paragr. 248 à 260 et 241e rapport, paragr. 387 à 395.)
  2. 537. Le comité note avec regret que le gouvernement n'a pas formulé de commentaires sur l'allégation précise de l'organisation plaignante selon laquelle de hauts responsables du Syndicat du personnel enseignant des universités ont été arrêtés par la police. Il note que le gouvernement déclare que certains enseignants universitaires ont "boycotté" leurs fonctions après que la demande d'enregistrement de leur syndicat eut été refusée et que le litige eut été transmis à la Cour supérieure. Il note également l'affirmation du gouvernement selon laquelle ces travailleurs ont agi individuellement et n'ont reçu aucun soutien des syndicats ou organismes similaires.
  3. 538. Tout d'abord, en ce qui concerne l'existence d'un syndicat, et donc la question des mesures individuelles ou collectives prises à l'égard de l'UASU, le comité fait remarquer que le droit de créer des organisations et d'y adhérer pour la défense des intérêts des travailleurs sans autorisation préalable est un droit fondamental qui appartient à tous les travailleurs sans aucune distinction, y compris aux enseignants qui assurent un service public. Le comité note que la question de l'enregistrement de ce syndicat est en instance devant la justice, et à cet égard il prie instamment le gouvernement de garantir le respect de ce principe. Il demande au gouvernement de le tenir informé de la décision de la Cour dans cette affaire.
  4. 539. En ce qui concerne la grève déclenchée par l'UASU, le comité rappelle qu'il a toujours considéré le droit de grève comme un moyen légitime de défense des intérêts économiques et sociaux des travailleurs et de leurs organisations. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 362.) Le fait d'avoir recours à la grève pour obtenir la reconnaissance d'un syndicat est, de l'avis du comité, un intérêt légitime qui peut être défendu par les travailleurs et leurs organisations.
  5. 540. En ce qui concerne l'arrestation alléguée des dirigeants de l'UASU, le comité rappelle l'importance qu'il attache au principe selon lequel l'arrestation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l'exercice d'activités syndicales légitimes (même si c'est pour une courte période) constitue une violation des principes de la liberté syndicale. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 88.) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que, dans l'avenir, les dirigeants syndicaux et les syndicalistes ne soient pas arrêtés dans l'exercice d'activités syndicales légitimes.
  6. 541. Le comité note que la question du refus de l'enregistrement du Syndicat des médecins et dentistes du Kenya a été soumis à la Cour supérieure et est actuellement en instance. Il rappelle à ce sujet, comme il l'a fait pour la question du Syndicat du personnel enseignant des universités, que le droit de créer des syndicats et d'y adhérer pour la défense des intérêts des travailleurs sans autorisation préalable est un droit fondamental qui appartient à tous les travailleurs sans aucune distinction, y compris au personnel hospitalier. Le comité prie instamment le gouvernement de garantir le respect de ce principe et demande au gouvernement de le tenir informé de la décision de la Cour dans cette affaire.
  7. 542. En ce qui concerne le Syndicat des médecins et dentistes du Kenya, le comité note que, selon le plaignant, les médecins ont poursuivi leur grève, malgré un avertissement du ministère de la Santé selon lequel cette grève était illégale parce que les tâches qu'ils assuraient étaient considérées comme un service essentiel. Le comité rappelle à cet égard qu'il a estimé que le secteur hospitalier est un service essentiel et qu'il a admis que le droit de grève pourrait y faire l'objet de restrictions, voire d'interdictions, dans la mesure où la grève pourrait y provoquer de graves préjudices pour la collectivité nationale à la condition que ces limitations soient accompagnées de certaines garanties compensatoires. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 409 et 393.)
  8. 543. Enfin, en ce qui concerne le Syndicat des agents publics du Kenya, le comité note l'information fournie par l'organisation plaignante et non contestée par le gouvernement selon laquelle, après avoir approuvé les recommandations de la commission nommée par le gouvernement en vue de la constitution immédiate du syndicat, le Président était revenu sur son autorisation d'enregistrement en disant qu'il avait autorisé seulement la création d'une association d'entraide. Le comité rappelle à cet égard qu'il a déjà eu à examiner la question de la validité de l'Association d'entraide des fonctionnaires du Kenya dans son étude du cas no 1189. Le gouvernement avait alors déclaré que l'association en question n'avait pas été autorisée à participer à des activités de type syndical. Dans ses conclusions, le comité avait alors regretté que le gouvernement n'ait pas fourni d'informations sur les mesures qui avaient été prises ou qui étaient envisagées pour autoriser la constitution d'organisations permettant aux travailleurs intéressés d'exercer normalement leurs activités syndicales, et il avait jugé particulièrement regrettable la déclaration du gouvernement selon laquelle l'Association d'entraide des fonctionnaires du Kenya n'avait pas été autorisée à participer à des activités de type syndical. (Voir 241e rapport, paragr. 390 et 392.)
  9. 544. Le comité déplore profondément que la situation des fonctionnaires du Kenya dans ce domaine n'ait apparemment pas changé en plus de dix ans et que, dans ce laps de temps, le gouvernement n'ait pas tenu compte des recommandations qu'il avait formulées lors de l'examen du cas no 1189. Il doit rappeler une nouvelle fois l'importance qu'il attache au principe selon lequel les fonctionnaires, comme tous les autres travailleurs sans distinction, ont le droit de créer les organisations de leur choix et d'y adhérer sans autorisation préalable pour la défense de leurs intérêts professionnels. Tout en se félicitant des mesures prises par le gouvernement pour rétablir l'ancien syndicat, le comité note que la commission nommée par le gouvernement pour examiner cette question s'est prononcée expressément en faveur de la création immédiate du Syndicat des agents publics du Kenya. Le comité souhaite rappeler à cet égard que le droit de tous les travailleurs de créer les organisations de leur choix et d'y adhérer implique nécessairement que les lois garantissant ce droit leur laissent le libre choix de l'organisation. Il demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir aux agents publics le droit de créer les organisations de leur choix et d'y adhérer sans autorisation préalable, et lui demande de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
  10. 545. Le comité rappelle également ses conclusions antérieures au sujet des avoirs de l'Association des fonctionnaires du Kenya qui ont été saisis lors de l'annulation de son enregistrement et demande instamment au gouvernement d'assurer leur dévolution à l'organisme qui lui succédera dans ses fonctions syndicales. Il lui demande de le tenir informé des mesures prises en ce domaine.
  11. 546. En ce qui concerne les exemptions relevées par l'organisation plaignante dans la recommandation initiale de la commission nommée par le gouvernement, exemptions qui portent sur le droit syndical des fonctionnaires, le comité rappelle que, ce droit devant être garanti à tous les travailleurs sans aucune distinction, elles doivent se limiter à la police et aux forces armées. En ce qui concerne les personnes exerçant des fonctions de responsabilité ou de décision, le comité estime qu'interdire aux agents publics le choix de s'affilier à des syndicats qui représentent les autres travailleurs n'est pas nécessairement incompatible avec la liberté syndicale à la condition que ces restrictions soient strictement limitées à cette catégorie et que les intéressés soient autorisés à créer leurs propres organisations. (Voir Etude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, CIT, 81e session, 1994, paragr. 57.)

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 547. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité déplore profondément que le gouvernement n'ait pas tenu compte des recommandations faites il y a plus de dix ans et adoptées par le Conseil d'administration à sa 231e session (novembre 1985) au sujet de la création d'une organisation permettant aux agents publics de mener des activités syndicales normales.
    • b) Rappelant l'importance qu'il attache au principe selon lequel les agents publics, comme tous les autres travailleurs sans distinction, ont le droit de créer des organisations de leur choix et d'y adhérer sans autorisation préalable pour la défense de leurs intérêts professionnels, le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir aux fonctionnaires le droit de créer des syndicats de leur choix et de s'y affilier, et de prendre les mesures nécessaires pour mettre en oeuvre ce principe dans l'examen de la demande d'enregistrement du Syndicat des agents publics du Kenya. Il demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
    • c) Rappelant ses conclusions précédentes au sujet des avoirs de l'Association des fonctionnaires du Kenya, qui ont été saisis lors de l'annulation de son enregistrement, le comité demande instamment au gouvernement d'assurer leur dévolution à l'organisme qui lui succédera dans ses fonctions syndicales. Il lui demande de le tenir informé des mesures prises à cet égard. d) Rappelant également le droit qu'ont tous les travailleurs, sans aucune distinction, de se syndiquer, le comité veut croire que le gouvernement garantira rapidement le respect de ce principe et prendra les mesures nécessaires pour assurer l'enregistrement du Syndicat du personnel enseignant des universités et du Syndicat des médecins et dentistes. Il demande au gouvernement de le tenir informé des décisions de la Cour sur ces cas.
    • e) En ce qui concerne l'arrestation alléguée des responsables du Syndicat du personnel enseignant des universités, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que, dans l'avenir, les dirigeants syndicaux et les syndicalistes ne soient pas arrêtés dans l'exercice de leurs activités syndicales légitimes, et demande la libération immédiate de tous les membres de l'UASU qui seraient encore détenus.
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