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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 302, Marzo 1996

Caso núm. 1856 (Uruguay) - Fecha de presentación de la queja:: 25-SEP-95 - Cerrado

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415. La plainte figure dans une communication conjointe de la Fédération uruguayenne de la santé (FUS) et de l'Association des fonctionnaires de Perses S.A. (AFP) en date du 25 septembre 1995. Le gouvernement a envoyé une réponse dans une communication datée du 29 décembre 1995.

  1. 415. La plainte figure dans une communication conjointe de la Fédération uruguayenne de la santé (FUS) et de l'Association des fonctionnaires de Perses S.A. (AFP) en date du 25 septembre 1995. Le gouvernement a envoyé une réponse dans une communication datée du 29 décembre 1995.
  2. 416. L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 417. Dans leur communication conjointe du 25 septembre 1995, la Fédération uruguayenne de la santé (FUS) et l'Association des fonctionnaires de Perses S.A. (AFP) allèguent qu'à la mi-avril 1995 un conflit du travail a débuté à la suite du licenciement injustifié d'un de ses membres employé par Perses S.A., après un accident avec un véhicule sans qu'aucune responsabilité puisse être établie. Le conflit a connu différentes étapes, il a atteint son apogée lorsque l'assemblée générale des travailleurs de santé a décidé le 1er août 1995 de déclencher une grève générale à partir du 9 août. Un préavis de dix jours a été communiqué au ministère du Travail et de la Sécurité sociale en vue d'épuiser les voies de recours en conciliation avant de déclencher la grève. L'assemblée générale a décidé des gardes d'urgence de façon à garantir la prestation d'un service minimum. A ce sujet, il importe de préciser que l'entreprise utilise un code de différentes couleurs, rouge, jaune et vert, selon la gravité du cas, et que le rouge correspond à la situation la plus grave et signifie qu'une vie est en danger (d'après les appels quotidiens d'usagers, l'entreprise estime que 20 pour cent des appels correspondent au code rouge, les autres pouvant être qualifiés d'"ordinaires").
  2. 418. Les plaignants ajoutent que le ministère du Travail a pris un décret déclarant le caractère essentiel des services prêtés par l'entreprise (en vue de fixer les services minima) qu'ils critiquent car, d'après eux, il vise un élément fondamental du droit collectif du travail, le droit à l'autonomie, privant de la sorte les travailleurs tant de la faculté de protéger leurs propres intérêts que de la protection des règles constitutionnelles. En l'absence d'un de ces éléments fondamentaux (l'autonomie), il n'y a pas de droit collectif qui puisse exister ni de liberté syndicale effective; s'il y a modification de cet élément, la liberté syndicale est complètement faussée.
  3. 419. Par ailleurs, le décret faisant l'objet de la présente plainte manque d'objectivité car les services considérés comme essentiels sont définis de façon démesurément ample. Les organisations plaignantes contestent notamment le caractère essentiel des services techniques d'urgence, des polycliniques, du personnel auxiliaire, de l'atelier d'entretien, de la comptabilité et de l'économat. Une telle énumération inclut pratiquement tous les fonctionnaires de Perses S.A.
  4. 420. Bien que les plaignants se déclarent conscients du fait que le droit d'autonomie, protégé par la Constitution, entre en conflit avec d'autres droits fondamentaux, comme le droit à la santé, ils estiment que le décret du ministère du Travail, fondé sur une loi dont la constitutionnalité est douteuse, amène l'Etat à prendre le parti de l'entreprise et nuit de la sorte au droit de grève consacré par la Constitution. La faculté que confère à l'Etat l'article 4 de la loi no 13720 est de nature exceptionnelle et ne saurait, partant, être utilisée sans discrimination.
  5. 421. Les plaignants ajoutent que, du fait de l'existence dudit décret, l'AFP a décidé de révoquer les mesures et, dix jours plus tard, de mettre un terme au conflit. Néanmoins, quatre jours après l'arrêt du conflit, l'entreprise, qui n'est pas déficitaire, a décidé de renvoyer 39 travailleurs en invoquant des difficultés financières provoquées par le conflit.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 422. Dans sa communication datée du 29 décembre 1995, le gouvernement déclare que l'entreprise Perses S.A., où s'est produit le conflit évoqué par les plaignants, s'occupe d'assistance médicale sous la forme de la prestation de soins d'urgence, d'envois d'ambulances pour les premiers soins à domicile, dans des entreprises ou sur la voie publique, et de soins dans des polycliniques. Ces services sont destinés aux membres de l'Unité cardio mobile et ils permettent d'intervenir en cas d'arrêts respiratoires et cardiaques, d'infarctus, d'accidents sur la voie publique, etc. Les services en question couvrent 340 000 membres, soit plus de 30 pour cent de la population de la capitale, et le personnel médical qui en est directement chargé est hautement qualifié. Il découle de ce qui précède que, si la mesure prise par le syndicat AFP s'était concrétisée, un fort pourcentage de la population métropolitaine se serait trouvée sans protection en cas d'urgence et de situation mettant en danger la vie, la santé, etc.
  2. 423. Le gouvernement explique que, le 27 avril 1995, une négociation tripartite a commencé au ministère du Travail et de la Sécurité sociale avec la participation de représentants de Perses S.A. et de l'Association des fonctionnaires de Perses ainsi que de la Fédération uruguayenne de la santé en vue d'examiner des plaintes relatives au licenciement d'un salarié ayant six mois d'ancienneté dans l'entreprise, aux sanctions, au règlement du personnel et aux conditions de travail. Après plusieurs réunions tripartites consignées dans des procès-verbaux, dont copies ont été envoyées par le gouvernement, l'entreprise s'est montrée disposée à traiter de tous les points sauf du renvoi d'un salarié. Le syndicat n'a pas accepté cette proposition et, bien que les négociations se soient poursuivies, il a lancé différentes formes de lutte (par exemple: plus de réponse aux appels téléphoniques pendant la demi-heure de pause, ce qui constitue un manquement à la convention collective). A la suite de cela, l'entreprise n'a pas prélevé la cotisation syndicale sur les salaires des adhérents au syndicat, ne respectant pas non plus cette même convention.
  3. 424. Différentes formules ont été envisagées, toujours avec la médiation de techniciens du ministère, qui prévoyaient notamment des augmentations salariales extraordinaires, mais le syndicat les a repoussées et a décidé d'appeler à la grève générale à partir du 9 août 1995 avec, pour conséquence, la non-exécution d'activités essentielles (dont les soins d'urgence).
  4. 425. Le procès-verbal de la réunion du 3 août 1995 à laquelle ont participé des représentants de l'AFP, de la FUS, de l'entreprise et du ministère du Travail, montre qu'après que le ministère du Travail eut présenté différentes formules d'accord celles-ci ont été acceptées par les représentants de l'entreprise, mais pas par ceux des travailleurs qui ont fait savoir de façon expresse que le 9 août 1995 ils déclencheraient une grève générale, comme en avait décidé l'assemblée générale des travailleurs.
  5. 426. Les jours suivants, diverses démarches ont été effectuées par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale auprès de chacune des parties en vue de dégager un accord et d'éviter la concrétisation des mesures prévues par le syndicat.
  6. 427. D'après le procès-verbal du 8 août 1995, une convocation a été envoyée le 7 août à l'Association des fonctionnaires de Perses leur proposant une formule de négociation en vue de mettre fin au conflit; les représentants des travailleurs ont fait savoir que cette formule serait soumise à l'appréciation de l'assemblée des travailleurs du 8 août 1995. Comme le montre le procès-verbal susmentionné, le ministère du Travail a reçu communication téléphonique, trois heures et demie avant son début, de la décision de l'assemblée d'appeler à la grève générale à partir du 9 août.
  7. 428. Face à l'imminence du commencement de cette grève qui priverait 310 000 personnes de protection sanitaire, le ministère du Travail a convoqué les deux parties en vue de déterminer quels seraient les services minima d'urgence à maintenir. Les représentants de l'entreprise ont répondu à la convocation mais pas ceux du syndicat. En leur absence, le ministère du Travail "a demandé à Perses S.A. de préciser quels étaient, à son avis, les services qu'il convenait d'assurer pour protéger la vie et la santé des membres de l'Unité cardio mobile" (procès-verbal du 8 août 1995). Eu égard à la nature des services fournis par l'entreprise (secours en cas d'urgence, d'infarctus, d'arrêts respiratoires, d'accidents sur la voie publique, etc.), il s'est révélé difficile de déterminer à priori quels services ne présentaient pas un caractère essentiel, et leur énumération aurait été plus facile si l'on avait pu obtenir l'opinion des représentants du syndicat intéressé.
  8. 429. Enfin, à la suite des faits évoqués précédemment, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a décidé de prendre le décret du 8 août 1995 qui déclare services essentiels ceux fournis par l'Unité cardio mobile et ordonne que soit assurée une permanence limitée en vue de fournir un service d'urgence minimum, conformément aux données fournies par l'entreprise, retenues par le ministère du Travail, et ce pour une période déterminée - tout en respectant les principes et les critères des organes de contrôle de l'OIT en matière de services essentiels.
  9. 430. Pour le cas qui fait l'objet de cette plainte, conformément aux avis du Comité de la liberté syndicale, des négociations et des procédures de conciliation ont eu lieu au ministère du Travail et de la Sécurité sociale en vue de résoudre le conflit, mais elles n'ont abouti qu'au retrait des représentants des travailleurs au moment même où la grève a été déclarée.
  10. 431. La lecture du préambule du décret ministériel du 8 août 1993, dont copie est jointe par le gouvernement, permet de voir qu'il a été édicté après avoir épuisé différents moyens de conciliation, conformément aux dispositions constitutionnelles qui prescrivent à l'Etat l'obligation de protéger la santé et la sécurité des habitants, en respectant les engagements internationaux contractés en qualité de Membre de l'OIT ainsi que les directives de ses organes relatives à la limitation du droit de grève. Le dispositif du décret ministériel déclare la nature essentielle des services fournis par l'Unité cardio mobile, sans pour autant imposer cette mesure restrictive à l'ensemble du personnel, mais en exigeant seulement le maintien d'un service minimum précisé au no 2 et pour une durée déterminée.
  11. 432. Par ailleurs, il est nécessaire dans ce cas de faire observer le caractère disproportionné de la mesure adoptée par l'AFP qui déclenche une grève générale à la suite du renvoi, qu'elle considère injuste, d'un travailleur alors qu'il existe, pour des cas semblables, des procédures de réparation qui relèvent, en dernière instance, du pouvoir judiciaire. De même, l'Etat ne peut, pour une question aussi importante que la santé ou, en définitive, la vie humaine, qualifier d'"ordinaires", comme le font les plaignants, les demandes de prestation de soins médicaux adressées à l'Unité cardio mobile. C'est seulement après avoir posé un diagnostic, qui exige évidemment la présence d'un médecin, que l'on pourra préciser l'ampleur ou la gravité du mal auquel il faudra, de toute façon, prêter toute l'attention voulue.
  12. 433. En outre, le gouvernement réfute l'affirmation des plaignants selon laquelle "il n'y a ni application du droit collectif ni liberté syndicale effective en l'absence d'un des éléments fondamentaux (l'autonomie)". A ce sujet, le gouvernement fait valoir qu'en 1986 la mission de l'OIT chargée d'étudier le système de relations professionnelles uruguayen a précisé que "différents syndicats ont eu recours à l'autonomie; néanmoins, d'après nos informations, cela ne s'est pas traduit jusqu'à présent par un ensemble de règles autonomes, élaborées de façon expresse et acceptable pour tous les intéressés. Nous estimons donc souhaitable que l'effort d'autonomie soit d'abord accompli par le PIT-CNT et revête, par exemple, la forme d'un code de conduite syndicale applicable aux grèves principales, qui pourrait comprendre des directives relatives au préavis, à l'épuisement des procédures de recours, à l'information du public quant aux causes de la grève, au vote par les intéressés et aux propositions de services minima à assurer...".
  13. 434. En guise de conclusion, le gouvernement déclare avoir agi à tout moment conformément aux principes du Comité de la liberté syndicale et de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT, c'est-à-dire en respectant les procédures de négociation et de conciliation en vue de résoudre les conflits, en invitant les travailleurs à participer à la détermination des services qu'il convient d'assurer une fois commencée la grève générale, et, finalement, en déclarant essentiels les services de l'Unité cardio mobile, et en n'exigeant que le seul maintien d'une permanence minimum dans certains secteurs et pour un laps de temps déterminé. Dans le présent cas, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a observé les principes constitutionnels précis (Carta Magna, article 7), qui prescrivent de préserver les conditions de santé et de vie de la population. Vu ce qui précède, le gouvernement demande au Comité de la liberté syndicale de rejeter la plainte.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 435. Le comité observe que, dans le cas présent, les organisations plaignantes allèguent qu'en raison d'une grève générale déclenchée dans le secteur de la santé le ministère du Travail n'a pas accepté les permanences d'urgence fixées par la FUS et a déclaré essentiels les services prêtés par l'Unité cardio mobile (Perses S.A.) en fixant, par un décret ministériel, les services minima à assurer qui, au dire des organisations plaignantes, auraient été excessivement étendus. Ces mêmes organisations allèguent que, quatre jours après la révocation du conflit, l'entreprise, qui n'est pas déficitaire, a décidé le licenciement de 39 travailleurs en invoquant des difficultés financières provoquées par le conflit.
  2. 436. S'agissant de la détermination des services minima à assurer par l'Unité cardio mobile par décret ministériel (sans accepter les services de garde fixés par l'AFP), le comité a indiqué, lors d'occasions précédentes, que pour déterminer les services minima et le nombre de travailleurs qui en garantissent le maintien, il importe que participent non seulement les organisations d'employeurs et les pouvoirs publics, mais aussi les organisations de travailleurs concernées. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 560.) Dans le présent cas, le comité prend note de la déclaration du gouvernement - confirmée dans le texte du décret ministériel du 8 août 1995 - selon laquelle le ministère du Travail a convoqué le syndicat afin de déterminer les services minima d'urgence qu'il conviendrait d'assurer, et que les représentants syndicaux ne se sont pas rendus à la réunion. Par conséquent, le comité ne poursuivra pas l'examen de cette allégation.
  3. 437. S'agissant de l'allégation selon laquelle les services minima fixés pour l'Unité cardio mobile (entreprise Perses S.A.) ont été excessivement étendus, le comité note que le gouvernement déclare que l'entreprise fournit des soins dans des situations critiques (urgences, infarctus, arrêts respiratoires, accidents, etc.), et que ce n'est qu'après diagnostic médical (ce qui demande évidemment la présence d'un médecin) que l'on peut préciser la gravité des maux. Le comité note également que, selon le décret ministériel, il convenait d'assurer à titre de service minimum, ceux figurant sur la liste ci-après.
    • - services d'urgence et de pointe;
    • - polycliniques - garde minimum;
    • - bloc opératoire central;
    • - personnel auxiliaire - garde minimum;
    • - atelier d'entretien - garde minimum;
    • - comptabilité - garde minimum;
    • - économat - garde minimum;
    • - pharmacie - garde minimum;
    • - centre de contrôle et de fournitures.
      • A ce sujet, le comité a estimé, lors d'occasions précédentes, qu'"une opinion définitive fondée sur tous les éléments d'appréciation pour savoir si le niveau des services minima a été ou non le niveau indispensable ne peut être émise que par l'autorité judiciaire, étant donné que pour la formuler cela suppose, en particulier, une connaissance approfondie de la structure et du fonctionnement des entreprises et des établissements concernés, ainsi que des répercussions effectives des actions de grève". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 562.) Toutefois, à première vue, la liste de services minima contenue dans le décret ministériel ne semble pas excessive, surtout si l'on tient compte du fait que l'entreprise en question prête un service essentiel au sens strict du terme.
    • 438. Enfin, en ce qui concerne le licenciement de 39 travailleurs par l'entreprise Perses S.A., qui serait intervenu pour motifs financiers, quatre jours après la fin du conflit collectif, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas envoyé d'observations à ce sujet. Le comité demande donc au gouvernement de diligenter une enquête sur les raisons de ces licenciements et, s'il est démontré qu'il s'agissait de motifs antisyndicaux, de prendre les initiatives nécessaires pour réintégrer les intéressés à leur poste de travail. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 439. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
    • Pour ce qui est du licenciement de 39 travailleurs, qui serait intervenu pour raisons financières, quatre jours après la fin du conflit collectif à l'entreprise Perses S.A., le comité prie le gouvernement de diligenter une enquête sur les motifs de ces licenciements et, s'il est démontré qu'il s'agissait de motifs antisyndicaux, de prendre les initiatives nécessaires pour que les intéressés soient réintégrés à leur poste de travail. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
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