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Informe definitivo - Informe núm. 335, Noviembre 2004

Caso núm. 2345 (Albania) - Fecha de presentación de la queja:: 11-MAY-04 - Cerrado

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  1. 187. La plainte figure dans une communication du Conseil des organisations d’employeurs (KOP) en date du 11 mai 2004.
  2. 188. Le gouvernement a répondu dans une communication en date du 29 juin 2004.
  3. 189. L’Albanie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 190. Dans sa communication en date du 11 mai 2004, le Conseil des organisations d’employeurs (KOP) allègue que le ministère du Travail et des Affaires sociales de l’Albanie s’est immiscé dans ses activités en essayant de créer et en soutenant activement une organisation concurrente qui utilise le même nom; cette situation crée une confusion chez les membres en violation des articles 2, 3, 4 et 8 de la convention no 87.
  2. 191. L’organisation plaignante précise qu’elle a été créée le 17 novembre 2000 et compte à ce jour 11 organisations membres. Au cours de l’assemblée générale de janvier 2004, un nouveau conseil et un nouveau comité directeur ont été élus, et les nouveaux statuts approuvés. Les nouvelles désignations et modifications dans les statuts ont été notifiées au ministère du Travail et des Affaires sociales par lettre en date de janvier 2004, conformément au Code du travail. La nouvelle présidente et le conseil ont rencontré le ministre du Travail et des Affaires sociales. L’organisation plaignante ajoute que le KOP est représenté depuis l’année 2000 au Conseil national tripartite du travail par quatre délégués comme principale organisation d’employeurs.
  3. 192. L’organisation plaignante allègue qu’à la suite de l’assemblée générale de janvier 2004 le nouveau conseil a décidé d’enregistrer officiellement le KOP en tant que confédération auprès de la Cour de justice, alors que 11 de ses membres avaient déjà été inscrits et étaient considérés comme représentatifs par le ministère du Travail. Pour être inscrite comme confédération, l’organisation devait présenter une lettre de recommandation du ministère du Travail et des Affaires sociales. Ce dernier a refusé de fournir une telle lettre mais, après deux mois d’insistance, a envoyé une lettre indiquant que le KOP était enregistré auprès du ministère du Travail et des Affaires sociales en tant que groupement constitué de six organisations, et que les conseils régionaux de KOP-Tirana, KOP-Fier et KOP-Gjirokaster ont été créés ultérieurement. Enfin, la lettre indique que le droit de créer le KOP relève uniquement de M. Vladimir Koka, à savoir le président de KOP-Tirana qui a participé à la création d’un nouveau KOP. L’organisation plaignante joint la lettre en date du 8 mars 2004 à la plainte.
  4. 193. L’organisation plaignante indique qu’elle a rejeté cette lettre au motif qu’elle ne reflète pas la réalité et a proposé une autre lettre de recommandation libellée comme suit: «Les documents portant création du KOP en tant qu’organisation faîtière regroupant six organisations d’employeurs ont été déposés auprès du ministère du Travail et des Affaires sociales depuis l’année 2000. A l’heure actuelle, le KOP compte cinq organisations de plus, et a déposé les nouveaux documents. Nous soutenons la demande du KOP visant à obtenir une reconnaissance légale en tant que personne morale, en tant que confédération.» Selon l’organisation plaignante, le ministère a rejeté ce projet; un fonctionnaire du ministère a même refusé de rencontrer une délégation de l’organisation plaignante.
  5. 194. Dans l’intervalle, selon l’organisation plaignante, la Cour de justice de Tirana a accordé la reconnaissance légale à un nouveau KOP en tant que confédération de conseils régionaux d’employeurs d’Albanie. Immédiatement, un haut fonctionnaire du ministère a supprimé le KOP existant sur les registres depuis l’année 2000 pour le remplacer par le nouveau KOP. Entre-temps, la Cour de justice de Tirana a fait savoir à l’organisation plaignante que la procédure d’enregistrement avait été annulée. La présidente de l’organisation plaignante, Mme Ngjela, a rencontré un représentant du ministère du Travail et des Affaires sociales qui a déclaré que le ministère avait reçu l’enregistrement du nouveau KOP, et qu’il le respecterait. L’organisation plaignante note qu’il en résulte que le premier KOP n’existe plus pour le ministère du Travail.
  6. 195. En ce qui concerne le nouveau KOP, l’organisation plaignante allègue qu’il a été créé par deux organisations régionales, à savoir KOP-Tirana et KOP-Gjirokaster. L’enregistrement du nouveau KOP auprès de la Cour de justice a été demandé par KOP-Tirana, sous la présidence de Vladimir Koka.
  7. 196. L’organisation plaignante considère que l’attitude du ministère du Travail et des Affaires sociales, et en particulier la rédaction d’une lettre de recommandation déclarant que le droit d’établir des organisations de KOP appartient uniquement à M. Vladimir Koka, est une ingérence et une atteinte aux garanties prévues aux articles 3 et 8 de la convention no 87. L’organisation plaignante demande donc au comité de prendre les mesures appropriées pour que le ministère du Travail et des Affaires sociales cesse de s’ingérer dans les activités du KOP et des organisations d’employeurs en général. L’organisation plaignante demande également que le gouvernement délivre une nouvelle lettre de recommandation conforme à la réalité afin que l’ancien KOP puisse être enregistré, en conformité avec la législation de l’Albanie. Enfin, elle demande au gouvernement de poursuivre les bonnes relations qu’il entretenait avec le KOP par le passé.
  8. B. Réponse du gouvernement
  9. 197. Dans une communication en date du 29 juin 2004, le gouvernement indique qu’il est vivement attaché au développement de relations fructueuses avec les partenaires sociaux et qu’il a pris toutes les mesures législatives, institutionnelles et administratives appropriées pour garantir la liberté syndicale et l’indépendance des organisations professionnelles, en s’abstenant de s’immiscer dans leurs activités. Le gouvernement indique qu’au cours de l’année 2000 six organisations d’employeurs qui avaient déjà été légalement reconnues ont décidé de coopérer et d’être représentées ensemble sous le nom de Conseil des organisations d’employeurs. Le groupement de ces organisations n’a pas obtenu une reconnaissance juridique spécifique.
  10. 198. En 2003, KOP-Tirana a été créé et légalement reconnu de manière spécifique comme membre du Conseil des organisations d’employeurs. A la fin de 2003 cependant, des désaccords ont surgi entre les deux groupes au sein du KOP en raison de retards dans la convocation de la Conférence nationale. Le groupe représenté par Mme Shefikat Ngjela avait l’intention de créer une confédération KOP regroupant plusieurs organisations professionnelles. Il a donc adressé à la Cour une demande à cet effet, qui a été rejetée sur la base de l’article 176 du Code du travail, qui stipule que deux organisations, au moins, ont le droit de créer des fédérations et que deux fédérations, au moins, ont le droit de créer une confédération.
  11. 199. L’autre groupe, représenté par M. Anesti Decka et M. Vladimir Koka, a décidé de créer les organisations régionales d’employeurs et a créé KOP-Gjirokaster, KOP-Fier, KOP-Elbasan, sur la base des décisions pertinentes de la Cour. Ces organisations, ensemble avec KOP-Tirana, ont fondé deux fédérations KOP sur la base d’une décision de la Cour. Les deux fédérations ont conduit à la création de la confédération KOP, sur la base d’une décision de la Cour.
  12. 200. Le gouvernement note que le ministère du Travail et des Affaires sociales a considéré ces allégations comme un conflit interne du KOP et a choisi de rester impartial et en même temps d’encourager les parties à trouver un accord. Le gouvernement explique par ailleurs que la Cour a adressé au ministère du Travail et des Affaires sociales une simple demande visant à confirmer si une organisation ayant déposé une demande auprès du ministère figurait dans les registres de celui-ci sous ce nom. Le ministère a répondu à la demande de la Cour d’une manière objective et appropriée. Le ministère n’a jamais délivré de lettre de recommandation à aucune des parties afin de ne pas influencer la décision de la Cour.
  13. 201. Le gouvernement insiste enfin sur l’attachement qu’il a à trouver la meilleure solution au conflit et à renforcer ses rapports et sa collaboration avec les partenaires sociaux.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 202. Le comité note que l’organisation plaignante allègue que le gouvernement s’est ingéré dans ses activités en essayant de créer et en soutenant activement une organisation concurrente qui utilise le même nom, situation qui a conduit la Cour de justice de Tirana à refuser d’enregistrer l’organisation plaignante et à accepter d’inscrire la nouvelle organisation. De l’avis du comité, il s’agit ici d’un conflit entre deux comités directeurs rivaux de la même organisation. Selon les allégations, le gouvernement se serait immiscé dans le conflit en favorisant un comité directeur aux dépens d’un autre; le comité directeur supposément favorisé aurait pu obtenir l’enregistrement du KOP comme confédération au détriment de l’autre comité (l’organisation plaignante).
  2. 203. Le comité note que le KOP a été créé le 17 novembre 2000 en tant que conseil regroupant six organisations d’employeurs, sans demander la reconnaissance juridique. Selon l’organisation plaignante, le KOP a fonctionné de manière régulière depuis lors et compte aujourd’hui cinq organisations supplémentaires. L’organisation plaignante allègue en outre que, durant l’assemblée générale de janvier 2004, le KOP a élu un nouveau conseil et un nouveau comité directeur et approuvé les nouveaux statuts; ces désignations et changements ont été notifiés au ministère du Travail et des Affaires sociales, et la nouvelle présidente et le conseil ont rencontré le ministre. L’organisation plaignante déclare qu’elle a décidé de demander son enregistrement en tant que confédération auprès de la Cour de justice après la tenue de l’assemblée générale de janvier 2004. A cette fin, elle a sollicité une lettre de recommandation auprès du ministère du Travail et des Affaires sociales, conformément aux exigences de la Cour, mais le ministère a rédigé une lettre qui semble favoriser un autre comité directeur qui a également demandé l’enregistrement du KOP en tant que confédération auprès de la Cour de justice. Il en résulte que la procédure d’enregistrement de l’organisation plaignante a été rejetée et que le comité directeur rival a obtenu l’enregistrement du KOP en tant que confédération.
  3. 204. Le comité prend note de l’enregistrement du KOP en tant que confédération d’employeurs. Il note également que, comme indiqué par le gouvernement, cet enregistrement s’est déroulé dans un contexte de désaccords entre deux groupes au sein du KOP. En particulier, l’un des groupes était représenté par Mme Shefikat Ngjela. Ce groupe, qui est l’organisation plaignante dans le présent cas et qui constitue apparemment le comité directeur élu durant l’assemblée générale de janvier 2004, avait pour objectif de créer une confédération KOP réunissant plusieurs organisations professionnelles. Il a donc adressé à la Cour une demande à cet effet. Cette demande a toutefois été rejetée par la Cour sur la base de l’article 176 du Code du travail, apparemment parce que le groupe n’est composé que d’organisations primaires et non pas de fédérations, ce qui l’empêche de constituer une confédération. Le comité note également qu’un autre groupe dirigé par M. Vladimir Koka, président d’une organisation KOP régionale, a entrepris de créer d’autres organisations KOP régionales en constituant ainsi KOP-Gjirokaster, KOP-Fier, KOP-Elbasan, sur la base de décisions pertinentes de la Cour. Ces organisations, alliées à KOP-Tirana, ont créé deux fédérations qui ont conduit à la création de la confédération KOP, dans le respect de la décision de la Cour.
  4. 205. Le comité prend également note de la déclaration du gouvernement selon laquelle il s’agit d’une question interne à propos de laquelle il est resté impartial et a encouragé les deux parties à trouver un accord, et n’a fourni aucune lettre de recommandation à aucune des parties, se bornant simplement à répondre à une demande d’information de la Cour de justice visant à savoir si l’organisation en question figurait dans les registres du ministère sous ce nom. Le comité note à cet égard que dans la lettre en date du 8 mars 2004, jointe à la plainte, le ministère du Travail et des Affaires sociales répond comme suit à la Cour de justice:
  5. En réponse à votre lettre no 1772 du 17 février 2004 nous demandant la confirmation d’autres mesures prises par les parties ayant demandé une inscription auprès de la Cour, nous vous faisons parvenir les informations suivantes:
  6. 1. Des organisations d’employeurs ont décidé, en signant un accord entre elles, d’être représentées collectivement comme le Conseil des organisations d’employeurs (KOP) dirigé par Mme Shefikat Ngjela, sans reconnaissance juridique.
  7. 2. Par ailleurs KOP-Tirana dont la personnalité juridique a été enregistrée, KOP-Fier, KOP-Elbasan et KOP-Gjirokaster ont déposé différents documents, à savoir leurs statuts, leur reconnaissance légale et leur acte constitutif, et ont été enregistrés auprès du ministère. Nous avons été informés que des procédures sont en cours pour la création d’autres organisations en vue de créer une confédération conforme à la législation. Au nombre des initiateurs de la création du KOP en conformité avec la loi figure M. Vladimir Koka.
  8. Je vous remercie de votre collaboration.
  9. 206. Le comité est d’avis que les deux comités directeurs ne sont pas traités entièrement sur un plan d’égalité dans la lettre susmentionnée. Les faits indiqués dans le paragraphe 1 de la lettre concernant le comité directeur plaignant sont rédigés dans des termes plutôt vagues. L’organisation est présentée comme un groupe d’organisations d’employeurs quelconque, sans aucune référence à ses organisations membres ou aux cinq nouveaux membres qui l’auraient rejoint dans l’intervalle. En outre, la référence à l’organisation plaignante se termine par «sans reconnaissance juridique». En revanche, le paragraphe 2 concernant l’autre comité directeur mentionne expressément des noms et des documents, en faisant allusion non seulement à des faits réels, mais aussi à des informations concernant l’enregistrement à venir d’organisations régionales supplémentaires. La référence à ce comité directeur se termine par la phrase «en vue de créer une confédération conforme à la législation». Enfin, la phrase concernant M. Koka de la fin du paragraphe 2 peut raisonnablement donner l’impression qu’il est la seule personne à disposer du droit légal de créer d’autres organisations de KOP, à l’exclusion d’autres parties.
  10. 207. Le comité estime donc que la lettre envoyée par le ministère du Travail et des Affaires sociales à la Cour de justice a pu influencer la décision de la Cour en indiquant quelle est la partie qui est la mieux placée pour créer une confédération. Sans remettre en question l’enregistrement actuel du KOP en tant que confédération, le comité note que la lettre susmentionnée a pu implicitement influencer la question liée mais distincte de la direction du KOP, qui devrait normalement être résolue en recourant à une autorité judiciaire sans aucune intervention du gouvernement et en tenant compte de la volonté des membres. Le comité note aussi que la volonté des membres semble avoir été récemment exprimée dans les élections qui ont eu lieu durant l’assemblée générale du KOP de janvier 2004. Le comité rappelle que, lorsque deux comités directeurs se déclarent légitimes, le conflit devrait être tranché par l’autorité judiciaire ou un médiateur indépendant, et non par l’autorité administrative. Dans le cas de dissensions intérieures au sein d’une même fédération [d’employeurs], un gouvernement n’est lié, en vertu de l’article 3 de la convention no 87, que par l’obligation de s’abstenir de toute intervention de nature à limiter le droit des organisations professionnelles d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action, ou de toute intervention de nature à entraver l’exercice légal de ce droit. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 966 et 970.] Le comité estime donc qu’il appartient aux tribunaux de décider de la question de la direction et de la représentation du KOP en tenant compte du résultat des élections qui ont eu lieu durant l’assemblée générale du KOP en janvier 2004, et demande au gouvernement de s’abstenir de toute action pouvant donner lieu à une ingérence dans ce cadre.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 208. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité estime qu’il devrait appartenir aux tribunaux de décider de la question de la direction et de la représentation du KOP, en tenant compte du résultat des élections qui ont eu lieu durant l’assemblée générale du KOP en janvier 2004, et demande au gouvernement de s’abstenir de toute action pouvant donner lieu à une ingérence dans ce cadre.
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