ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 343, Noviembre 2006

Caso núm. 2440 (Argentina) - Fecha de presentación de la queja:: 31-JUL-05 - Cerrado

Visualizar en: Inglés - Español

  1. 230. La plainte figure dans une communication de l’Association des travailleurs de l’Etat (ATE) et de la Centrale des travailleurs argentins (CTA) datée de juillet 2005. Par des communications de juillet et d’août 2005, les organisations plaignantes ont envoyé des informations complémentaires et de nouvelles allégations.
  2. 231. Le gouvernement a envoyé ses observations par communication du 23 février 2006.
  3. 232. L’Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 233. Dans leur communication de juillet 2005, l’Association des travailleurs de l’Etat (ATE) et la Centrale des travailleurs argentins (CTA) déclarent que, le 29 juin 2005 vers 13 heures, les dirigeants suivants de l’ATE ont été privés de leur liberté: M. Fernando Rubén Cardozo, secrétaire général de la Commission interne syndicale de la Présidence de la nation, et M. Aldo Héctor Flores, délégué. Les faits se sont produits à la Casa de Gobierno (palais présidentiel) de la ville autonome de Buenos Aires, calle Balcare 50, dans le cadre du plan d’action pour la récupération du pouvoir d’achat des salaires lancé par l’ATE. La Commission interne syndicale de la Présidence de la nation a décidé d’entreprendre dans les services du palais présidentiel une action de protestation consistant à «lancer des tracts dans la cour des palmiers»; les revendications étaient les suivantes: récupération d’un supplément de 100 pesos habituellement versé dans le service et de 300 pesos au titre des augmentations futures des «sommes non rémunératrices». Les employés du palais présidentiel étaient déjà coutumiers de ce moyen d’action, qu’ils avaient utilisé à plusieurs reprises sous les gouvernements démocratiques depuis 1983.
  2. 234. Les organisations plaignantes ajoutent que le gouvernement a décidé d’interdire l’action de protestation des travailleurs de l’Etat au moyen du mémorandum A.S.I. no 1229/2005 daté du 28 février 2005, où il est indiqué que:
  3. Sur instruction du Secrétaire général de la Présidence de la nation, les membres du personnel qui mènent des activités au palais présidentiel sont informés que, pour des raisons de sécurité, les manifestations à l’intérieur du palais ne sont pas autorisées.
  4. (Signé) Le lieutenant César Pablo Yague,
  5. Direction de la sécurité,
  6. Casa militar (quartier militaire),
  7. Présidence de la nation».
  8. Les organisations plaignantes déclarent que, une fois arrêtés, les dirigeants syndicaux susmentionnés ont été conduits au deuxième commissariat de la Police fédérale et inculpés de désobéissance, un délit prévu à l’article 239 du Code pénal, qui dispose expressément ce qui suit:
  9. Est passible d’une peine de prison de quinze jours à un an quiconque résiste ou désobéit à un fonctionnaire de l’Etat dans l’exercice légitime de ses fonctions ou à la personne qui lui prête assistance à sa demande ou en vertu d’une obligation légale.
  10. 235. Les organisations plaignantes font remarquer que l’intervention de la police sur le lieu de travail pour restreindre une action de protestation constitue une violation d’autant plus grave de la convention no 87 qu’elle a eu lieu au siège du gouvernement national, lequel doit être le garant des droits fondamentaux en sa double qualité de chef de l’Etat et de chef de l’administration publique. L’ordre écrit interdisant la manifestation, qui émane du Secrétaire de la Présidence de la nation, implique une faute grave du gouvernement, qui a ordonné de restreindre le droit de manifestation des travailleurs affiliés à l’Association des travailleurs de l’Etat (ATE) soi-disant pour des motifs de «sécurité», sans indiquer de causes ni d’effets, alors même que ce moyen d’action est habituel pour les travailleurs de ces services et n’avait pas fait l’objet de restrictions depuis 1983.
  11. 236. La décision unilatérale de l’Etat de réprimer les protagonistes de ce conflit et d’engager des poursuites pénales à leur encontre ne peut qu’induire à penser que le véritable dessein de l’Etat est de faire taire les protestations en réduisant l’expression des travailleurs, un dessein manifestement illégitime au regard des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de la Déclaration universelle des droits de l’homme, de la Constitution de l’OIT et de la convention no 87. Quel que soit le dessein que le gouvernement pourra invoquer pour justifier une restriction des droits de manifestation et de protestation, il ne fait pas de doute que l’engagement de poursuites pénales à l’encontre des protagonistes des grèves et autres manifestations du conflit est illégitime, disproportionné et contraire aux normes universelles des droits humains.
  12. 237. Dans leur communication de juillet 2005, les organisations plaignantes font savoir que les dirigeants syndicaux MM. Cardozo et Flores ont bénéficié d’un non-lieu dans le procès opportunément engagé contre eux par le Secrétariat du gouvernement national. Les considérants de l’arrêt abordent la question de la violation présumée de l’article 239 du Code pénal par les personnes inculpées le 29 juin 2005, lors de la manifestation convoquée par l’ATE à l’intérieur du palais présidentiel pour revendiquer une augmentation de salaire. La justice a considéré que le rassemblement organisé par les inculpés visait, d’après les éléments réunis pendant l’instruction, à revendiquer un droit du travail, ce qui exclut toute sanction pénale, d’autant que la participation à ce rassemblement a été pacifique et n’a donné lieu à aucune violence physique (les organisations plaignantes joignent copie d’une notification de l’arrêt de non-lieu).
  13. 238. Dans leur communication d’août 2005, les organisations plaignantes déclarent que le secrétaire général du bureau provincial de l’ATE Santa Cruz, M. Gustavo Garzón, et les délégués de la municipalité de Pico Truncado, Mme Pilar Peralta et MM. David Esteré, Pedro Payaguala, Julio Pezolano et Belisario Seguel, ont été arrêtés le 24 juin 2005 à Pico Truncado, dans la province de Santa Cruz. Les plaignants ajoutent que le tribunal de première instance de Pico Truncado chargé de l’instruction a décidé, le 29 juillet 2005, de poursuivre les dirigeants syndicaux susmentionnés ainsi qu’une soixantaine de membres du syndicat pour les délits prévus aux articles suivants du Code pénal: chapitre II, article 194 relatif aux délits contre la sécurité des moyens de transport et de communication; chapitre I, articles 237 et 238, paragraphe 2, concernant les atteintes et la résistance à l’autorité; chapitre I, articles 149bis et 149ter, paragraphe 2 a), concernant les délits contre la liberté individuelle. (Les organisations plaignantes joignent le texte de la décision de mise en jugement sans détention préventive.)
  14. B. Réponse du gouvernement
  15. 239. Dans sa communication du 23 février 2006, le gouvernement indique, à propos des allégations concernant la province de Santa Cruz, que les arrestations ont été ordonnées par la justice locale, qui a compétence pour ce faire, dans le cadre du procès engagé suite aux dénonciations de diverses personnes et institutions (Centre local des étudiants, Distrigas SA, Bolland y Cía. SA, Transportadora de Gas del Sur (TGS) SA, etc.), dont le droit de circuler librement, de commercer, etc., a été restreint. Le 10 mai 2005 à 23 heures, l’ATE, qui jusque là ne s’était pas fait enregistrer en tant qu’association syndicale représentant les travailleurs municipaux, a décidé de lancer une action de protestation (arrêt de travail) qui s’est déroulée les 11, 12 et 13 mai 2005, mais dont la municipalité n’a reçu notification que le 11 mai, après le début de l’action. Le gouvernement fait observer que l’ATE a décidé de lancer cette action sans avoir reçu de réponse positive au cahier de revendications présenté la veille à la fin de la journée de travail, c’est-à-dire sans laisser la possibilité d’une analyse des revendications et d’un dialogue à ce sujet. En outre, l’action de protestation a été dénaturée dans la pratique en changeant de caractère et en prenant de l’ampleur, car les activités ont été suspendues sur le lieu de travail.
  16. 240. Le gouvernement déclare que, à la suite de diverses propositions faites par la municipalité dans le cadre des possibilités budgétaires et financières réelles – toutes rejetées par le syndicat –, le mouvement a pris de l’ampleur, tant et si bien que la ville a été bloquée par des barrages routiers pendant plus de trente jours, ce qui a motivé les dénonciations qui ont donné lieu au procès mentionné. Enfin, le gouvernement ajoute que les travailleurs Pilar Peralta, David Esteré, Pedro Payaguala, Julio Pezolano et Belisario Seguel n’étaient pas, à la date des faits, des délégués syndicaux de la municipalité de Pico Truncado, leur désignation comme membres normalisateurs de la délégation locale ayant été décidée le 27 juin 2005 et notifiée le 29 juin à la municipalité.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 241. Le comité note que, dans le présent cas, les organisations plaignantes déclarent que deux dirigeants syndicaux de l’ATE ont été arrêtés le 29 juin 2005 et inculpés du délit de désobéissance pour avoir lancé une action de protestation (distribution de tracts) au palais présidentiel, et que des dirigeants syndicaux et des membres de l’ATE ont été arrêtés le 24 juin 2005 et poursuivis en justice dans la province de Santa Cruz.
  2. 242. S’agissant de l’allégation relative à l’arrestation, le 29 juin 2005, des dirigeants syndicaux de l’ATE, MM. Fernando Rubén Cardozo et Aldo Héctor Flores, inculpés du délit de désobéissance pour avoir conduit une action de protestation au palais présidentiel dans la capitale fédérale, le comité a le regret de constater que le gouvernement n’a pas envoyé ses observations à ce sujet. Il relève cependant que les organisations plaignantes ont envoyé des informations complémentaires ainsi que le texte de la décision judiciaire, d’où il ressort que le tribunal a ordonné un non-lieu dans cette affaire, considérant que le rassemblement organisé par les personnes mises en examen visait à revendiquer un droit du travail et qu’il s’agissait d’une manifestation pacifique. A cet égard, le comité rappelle que «l’arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels aucun chef d’inculpation n’est relevé ultérieurement peut entraîner des restrictions de la liberté syndicale. Les gouvernements devraient prendre des dispositions afin que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le risque que comportent pour les activités syndicales les mesures d’arrestation». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 81.] Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de veiller au respect de ce principe.
  3. 243. Concernant l’arrestation alléguée, le 24 juin 2005, de dirigeants syndicaux et de membres de l’ATE et les poursuites engagées contre eux dans la province de Santa Cruz, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement, selon lesquelles: 1) les arrestations ont été ordonnées par la justice locale dans le cadre du procès engagé comme suite aux dénonciations de diverses personnes et institutions dont le droit de circuler librement et de commercer a été restreint; 2) l’ATE a décidé de lancer l’action de protestation au moment même où elle a informé la municipalité de Pico Truncado de la province de Santa Cruz de sa qualité de représentante des travailleurs municipaux; 3) l’ATE a décidé de lancer cette action de protestation en l’absence de réponse positive à un cahier de revendications, sans laisser la possibilité d’une analyse des revendications et d’un dialogue à ce sujet; 4) l’organisation syndicale a rejeté diverses propositions faites par la municipalité et a donné de l’ampleur au mouvement jusqu’à bloquer la ville par des barrages routiers pendant plus de trente jours, ce qui a motivé les dénonciations qui ont donné lieu au procès; et 5) les dirigeants mentionnés par les plaignants n’étaient pas, à la date des faits, des délégués syndicaux de la municipalité de Pico Truncado, leur désignation n’ayant été notifiée que le 29 juin 2005.
  4. 244. A cet égard, le comité note qu’il ressort d’une première décision du tribunal de première instance de Pico Truncado chargé de l’instruction, dont les plaignants joignent une copie à leur plainte, que le fait que les employés publics municipaux et provinciaux aient monté un piquet aux abords de Pico Truncado sur la route no 12 et bloqué la circulation à partir du 23 mai 2005 a fait l’objet de plusieurs dénonciations. Le comité note également que, en vertu de cette décision, un grand nombre de personnes ayant participé à l’action de protestation ont été mises en examen sans détention préventive et ont reçu l’injonction de participer à des séances de réflexion sur l’exercice des droits évoqués aux articles 14 et 14bis de la Constitution nationale coordonnées par les services judiciaires, faute de quoi elles perdront le bénéfice de la libération ou de l’exemption de la détention provisoire qui leur a été accordée.
  5. 245. Cependant, notant que le gouvernement ne reconnaît pas la qualité de délégués syndicaux aux personnes arrêtées au moment des faits, invoque des violations du droit des citoyens de circuler et de commercer et allègue un manque de volonté de dialogue de la part de l’ATE à Santa Cruz, tout en soulignant la gravité et la durée des voies de fait exercées par cette organisation et, entre autres, les barrages routiers, le comité considère que, pour déterminer si les faits qui ont donné lieu aux arrestations et aux poursuites s’inscrivent dans le cadre de l’exercice légitime et pacifique des droits syndicaux, au sens de l’article 8 de la convention no 87, ou s’ils ont occasionné des restrictions excessives, le comité a besoin de connaître la décision que rendra la justice quant au fond.
  6. 246. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la décision quant au fond qui sera rendue sur les délits imputés aux dirigeants syndicaux et aux membres de l’ATE qui ont été arrêtés et poursuivis dans la province de Santa Cruz en juin 2005.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 247. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) En ce qui concerne l’arrestation des dirigeants syndicaux de l’ATE, MM. Fernando Rubén Cardozo et Aldo Héctor Flores, inculpés du délit de désobéissance pour avoir conduit une action de protestation, qui ont par la suite bénéficié d’un non-lieu ordonné par la justice, le comité rappelle que l’arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels aucun chef d’inculpation n’est relevé ultérieurement peut entraîner des restrictions de la liberté syndicale, et il demande au gouvernement de veiller au respect de ce principe.
    • b) Le comité considère que, pour déterminer si les faits qui ont donné lieu aux arrestations et aux poursuites s’inscrivent dans le cadre de l’exercice légitime et pacifique des droits syndicaux, au sens de l’article 8 de la convention no 87, ou s’ils ont occasionné des restrictions excessives, le comité a besoin de connaître la décision que rendra la justice quant au fond.
    • c) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la décision quant au fond qui sera rendue sur les délits imputés aux dirigeants syndicaux et aux membres de l’ATE qui ont été arrêtés et poursuivis dans la province de Santa Cruz en juin 2005.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer