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Allégations: Déclaration d’illégalité d’une grève au sein de l’entreprise LIDO
S.A. de C.V.; détention de son dirigeant syndical et licenciement de représentants des
travailleurs
- 157. Le comité a examiné le présent cas à sa réunion de novembre 2012 et
présenté un rapport intérimaire. [Voir 365e rapport, paragr. 603 à 623, approuvé par le
Conseil d’administration à sa 316e session (novembre 2012).]
- 158. Dans une communication en date du 9 juillet 2013, les organisations
plaignantes (la Confédération syndicale des travailleuses et des travailleurs d’El
Salvador (CSTS), la Fédération syndicale des travailleurs salvadoriens du secteur des
produits alimentaires, des boissons, de l’hôtellerie et de la restauration, et de
l’industrie agroalimentaire (FESTSSABHRA) et le Syndicat de l’entreprise LIDO S.A. de
C.V. (SELSA)) ont adressé des informations complémentaires.
- 159. A sa réunion de mars 2014 [voir 371e rapport, paragr. 6], le comité
a lancé un appel pressant au gouvernement et attiré son attention sur le fait que,
conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport,
approuvé par le Conseil d’administration à sa 184e session, il pourrait présenter un
rapport sur le fond de ce cas, même si les informations ou observations du gouvernement
n’étaient pas renvoyées à temps. A ce jour, aucune information du gouvernement n’a été
reçue.
- 160. El Salvador a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (nº 135) concernant les
représentants des travailleurs, 1971, et la convention (nº 151) sur les relations de
travail dans la fonction publique, 1978.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 161. Dans son examen antérieur du cas, le comité a formulé les
conclusions et recommandations suivantes sur les questions en suspens [voir
365e rapport, paragr. 618 à 622]:
- – Le comité note que dans le
présent cas l’organisation plaignante allègue: 1) la décision de l’entreprise de
mettre 17 travailleurs, puis ultérieurement 15 autres travailleurs, en congé annuel
imposé, cela en violation flagrante du droit de grève; 2) la détention du 8 au
12 juillet 2011 de M. Guadalupe Atilio Jaimes Pérez, secrétaire général du SELSA, et
des poursuites pénales à son encontre en raison d’une plainte fallacieuse du
sous-directeur de la production de l’entreprise LIDO S.A. de C.V. alléguant des
menaces; 3) la déclaration d’illégalité de la grève, le 17 juillet 2011, par
l’autorité judiciaire qui ordonne sa levée malgré le fait qu’elle avait pour objet
des augmentations salariales; 4) le lancement d’une procédure de licenciement à
l’encontre de représentants des travailleurs de l’entreprise LIDO S.A. de C.V. et de
l’entreprise sous-traitante FAMOLCAS S.A. de C.V. (Mmes Ana María Barrios Jiménez et
María Isabel Oporto Jacinta, et M. Oscar Armando Pineda).
- – Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles l’autorité
judiciaire a ordonné la remise en liberté du dirigeant syndical, M. Guadalupe Atilio
Jaimes Pérez (qui avait été inculpé du délit de menaces au sein de l’entreprise LIDO
S.A. de C.V. à l’encontre du sous-directeur de la production; il avait été détenu du
9 au 12 juillet 2011). Le comité prie le gouvernement de préciser si ce dirigeant
syndical fait toujours l’objet de poursuites et, dans l’affirmative, de lui
communiquer le jugement qui sera prononcé.
- – Le comité
prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle le dirigeant
susmentionné du SELSA s’est formellement désisté du conflit collectif auprès du
ministère du Travail et de la Prévoyance sociale qui a archivé le dossier relatif au
conflit du travail, et qu’il s’est désisté pour pouvoir procéder à la révision de la
convention collective du travail du fait de l’expiration de son délai de validité.
Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- – En ce qui concerne les allégations relatives aux congés annuels
imposés par l’entreprise aux travailleurs durant la grève, le comité note
l’indication du gouvernement selon laquelle selon la compagnie le congé annuel payé
des travailleurs a été avancé à la requête d’un dirigeant syndical. Le comité prie
les organisations plaignantes de répondre à cette affirmation. S’agissant de
l’allégation relative à la déclaration d’illégalité de la grève, le comité observe
que la grève a conduit à l’octroi d’une augmentation des salaires et qu’ainsi la
déclaration d’illégalité de la grève sur cette base ne paraît pas justifiée. Le
comité exprime sa préoccupation et prie le gouvernement de communiquer la décision
judiciaire déclarant illégale la grève des travailleurs de l’entreprise LIDO S.A. de
C.V.
- – Enfin, le comité note que le gouvernement n’a pas
répondu à l’allégation relative au licenciement des syndicalistes, Mmes Ana María
Barrios Jiménez et María Isabel Oporto Jacinta, et M. Oscar Armando Pineda, et le
prie de lui faire parvenir ses observations sans délai.
B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes
B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes- 162. Dans leur communication en date du 9 juillet 2013, les organisations
plaignantes réfutent catégoriquement, en ce qui concerne les déclarations précédentes du
gouvernement qui figurent dans l’avant-dernière recommandation du comité, l’information
du gouvernement selon laquelle le congé annuel payé a été avancé à la requête d’un
dirigeant syndical. Elles affirment qu’aucun document ne permet de constater que le
congé annuel payé a été avancé à la requête d’un dirigeant syndical. Les organisations
plaignantes qualifient de mesure antisyndicale le fait que le congé annuel payé ait été
avancé.
- 163. En ce qui concerne la négociation collective, les organisations
plaignantes déclarent que le 2 septembre 2011 la convention collective étant arrivée à
expiration, le SELSA a prié le ministère du Travail de demander à l’entreprise de
participer aux étapes de négociation directe et de conciliation.
- 164. Par ailleurs, l’article 1 de l’avant-projet de convention collective
que le SELSA voulait négocier incluait toutes les personnes qui travaillaient
directement ou indirectement pour l’entreprise LIDO S.A. de C.V. sur le site de
production Boulevard et qui étaient engagées en sous traitance par l’entreprise FAMOLCAS
S.A. de C.V. (qui appartient aux propriétaires de LIDO S.A. de C.V.), ce qui a suscité
l’intransigeance de l’entreprise. En effet, elle a toujours appliqué deux poids et deux
mesures en rémunérant moins les travailleurs en sous-traitance. Les salaires des
travailleurs de l’entreprise font partie des plus faibles à l’échelle nationale dans
l’industrie. Ils ne représentent que 281,40 dollars par mois et sont assortis de
certaines des prestations prévues dans la convention collective. Les salaires des
travailleurs engagés en sous-traitance par FAMOLCAS sont encore plus bas – entre 229 et
240 dollars par mois, sans aucune prestation supplémentaire.
- 165. Selon les organisations plaignantes, les 15 et 19 décembre 2011, le
ministère du Travail a convoqué l’entreprise afin de passer à l’étape de négociation
directe, mais celle-ci n’a pas répondu à la convocation. Par conséquent, le 3 janvier
2012, cette étape s’est achevée. Puis, le 20 janvier 2012, l’étape de la conciliation
est arrivée à son terme sans que l’entreprise ne se présente aux trois réunions
organisées par le ministère du Travail. L’entreprise n’a répondu à aucune des
convocations formelles. Dans ces circonstances, cherchant à éviter la grève, le syndicat
a proposé la solution d’un arbitrage. L’entreprise n’a pas répondu non plus à cette
proposition, ce qui autorisait légalement le syndicat à déclarer la grève à partir du
21 février et avant le 20 mars 2012. En intervenant personnellement, le ministre du
Travail a obtenu que l’entreprise participe à la réunion de dialogue, mais les
représentants de LIDO ne s’y sont rendus que pour arguer que, en raison de différends
familiaux, les entreprises qui sont contrôlées par des membres des familles qui en sont
propriétaires leur doivent 5 millions de dollars. Pour résorber cette dette, ils
projetaient de diminuer les dépenses de 1,2 million de dollars par an, pendant quatre
ans entre 2010 et 2014, période pendant laquelle ils ne seraient pas en mesure
d’accroître les salaires. Autrement dit, les propriétaires de LIDO ont demandé aux
travailleurs d’accepter un gel des salaires qui, à ce moment-là, avait commencé quatre
ans auparavant et qui durerait deux ans de plus, pour payer les coûts du différend
familial.
- 166. Etant donné l’intransigeance de l’entreprise quant à sa
participation aux étapes de la négociation collective, le SELSA a intenté toutes les
procédures prévues par la loi et informé la Directrice générale du travail que la grève
avait été déclenchée le 19 mars 2012. Les 22 mars et 9 avril, le SELSA a demandé par
écrit au ministère du Travail d’intenter la procédure établie à l’article 532 du Code du
travail afin de déterminer quels travailleurs devraient rester sur le lieu de travail
étant donné que l’entreprise avait empêché les grévistes de se rendre sur le lieu de
travail et commencé à engager des briseurs de grève, dans le cadre d’une procédure qui
était loin de respecter l’article 532. La Directrice générale du travail a demandé le
21 mars à l’entreprise d’indiquer si, dans les délais prévus par la loi, elle se
prévaudrait du droit établi à l’article 532 du Code du travail afin de prévenir le
syndicat et de déterminer le nombre, la catégorie et le nom des travailleurs qui
resteraient dans l’entreprise pour effectuer les tâches mentionnées dans cet article.
Presque aussitôt, par le biais de son secrétaire général, le SELSA a demandé que son
action soit qualifiée de grève étant donné que la direction de LIDO ne voulait pas le
faire. Ainsi, le quatrième tribunal du travail de San Salvador a entamé la procédure. Le
différend qui avait entraîné la grève avait donné lieu, conformément à la loi, à la mise
en place d’une unité de négociation. Cette unité comptait 151 travailleurs de
l’entreprise LIDO S.A. de C.V., dont 57 pour cent ont approuvé l’accord de grève, soit
un pourcentage supérieur à celui prévu par la loi (51 pour cent). Néanmoins, le trafic
d’influence de l’entreprise a fait que le quatrième tribunal du travail a inclus
illégalement dans le décompte des effectifs de l’entreprise les travailleurs engagés en
sous-traitance. L’intention était de les inclure à l’avenir dans l’unité de négociation
mais, à ce moment-là, ils n’en faisaient pas partie. Par ailleurs, le tribunal en
question a inclus dans le décompte des effectifs 14 dirigeants de l’entreprise qui sont
inscrits sur les registres de l’assurance sociale de l’entreprise, mais qui sont les
propriétaires de l’entreprise. Sans tenir compte de toutes ces irrégularités, le juge a
déclaré la grève illégale. Voilà qui montre à nouveau les déficiences des mécanismes en
place dans la législation salvadorienne.
- 167. Les organisations plaignantes précisent que, dans son action de
lutte, le syndicat a inclus précisément, à tout moment, les travailleurs occupés en
sous-traitance puisque, dès l’article 1 de l’avant projet de convention collective
(avant-projet qui n’a jamais été examiné au-delà de cet article), le syndicat voulait
que l’ensemble des prestations s’appliquent à tous les travailleurs qui, de manière
éventuelle, sporadique, occasionnelle, accidentelle ou permanente, effectuent leurs
tâches sur le site de production ou dans l’une quelconque des succursales de LIDO.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 168. Le comité regrette que, en dépit du temps écoulé depuis le début de
l’affaire, le gouvernement n’ait pas fourni les informations demandées, bien qu’il y ait
été invité par le biais d’un appel pressant (en mars 2014). Le comité espère que le
gouvernement sera plus coopératif à l’avenir en adressant les informations
demandées.
- 169. Dans ces circonstances, conformément à la règle de procédure
applicable [voir 127e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d’administration], le
comité se voit dans l’obligation de présenter un rapport sur le fond de l’affaire sans
pouvoir tenir compte des informations qu’il espérait recevoir du gouvernement.
- 170. Le comité rappelle que l’objet de l’ensemble de la procédure
instituée par l’Organisation internationale du Travail pour l’examen des allégations de
violation de la liberté syndicale vise à assurer le respect de cette liberté en droit
comme en fait. Le comité est convaincu que, si la procédure protège les gouvernements
contre les accusations déraisonnables, ceux-ci doivent, à leur tour, reconnaître
l’importance de présenter, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées et
précises aux allégations formulées à leur encontre.
- 171. Le comité prend note du complément d’information en date du
9 juillet 2013 que les organisations plaignantes ont adressé en réponse à ses
recommandations. Dans ce complément d’information, les organisations plaignantes:
1) nient que le congé annuel payé des travailleurs ait été avancé à la requête d’un
dirigeant syndical et qualifient de mesure antisyndicale le fait que le congé annuel
payé a été avancé; et 2) expliquent les raisons et irrégularités, à leur avis, de la
déclaration de l’illégalité de la grève de 2011. Le comité demande au gouvernement
d’adresser sans délai ses observations au sujet de la nouvelle communication des
organisations plaignantes.
- 172. Par ailleurs, en l’absence totale d’informations du gouvernement, le
comité réitère les recommandations qu’il a formulées à sa réunion de novembre 2012 et
lui demande, lorsqu’il adressera les informations demandées lors de cette réunion,
d’obtenir des commentaires de l’entreprise par le biais de l’organisation d’employeurs
concernée.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 173. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le
comité regrette que le gouvernement n’ait pas adressé sa réponse aux allégations,
alors qu’il a été contraint de reporter l’examen du cas à plusieurs reprises et
d’adresser au gouvernement un appel pressant. Le comité espère que le gouvernement
sera plus coopératif à l’avenir.
- b) Le comité prie à nouveau le gouvernement
de le tenir informé du cours de la révision de la convention collective demandée par
le syndicat du fait de l’expiration de son délai de validité au sein de l’entreprise
LIDO S.A. de C.V.
- c) Le comité prie à nouveau le gouvernement de préciser si
le dirigeant syndical, M. Guadalupe Atilio Jaimes Pérez (dont la remise en liberté a
été ordonnée par l’autorité judiciaire), fait toujours l’objet de poursuites et,
dans l’affirmative, de communiquer le jugement qui sera prononcé.
- d)
S’agissant de l’allégation relative à la déclaration d’illégalité de la grève, le
comité a observé, lors d’un examen précédent du cas, que la grève a conduit à
l’octroi d’une augmentation des salaires et qu’ainsi la déclaration d’illégalité de
la grève sur cette base ne paraît pas justifiée. Le comité exprime de nouveau sa
préoccupation et prie le gouvernement de communiquer la décision judiciaire
déclarant illégale la grève des travailleurs de l’entreprise LIDO S.A. de
C.V.
- e) Le comité note une nouvelle fois que le gouvernement n’a toujours
pas répondu à l’allégation relative au licenciement des syndicalistes, Mmes Ana
María Barrios Jiménez et María Isabel Oporto Jacinta, et M. Oscar Armando Pineda, et
le prie à nouveau d’envoyer ses observations sans délai.
- f) Le comité
demande au gouvernement d’adresser ses observations sur le complément d’information
des organisations plaignantes en date du 9 juillet 2013.
- g) Le comité
demande au gouvernement d’obtenir des commentaires de l’entreprise sur les questions
en suspens par le biais de l’organisation d’employeurs concernée.