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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 136. Le comité a examiné ce cas, qui concerne des restrictions à l’exercice par les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, de faire grève et de négocier collectivement, ainsi qu’un contrôle excessif des activités syndicales par l’Etat, pour la dernière fois à sa réunion de mars 2014. [Voir 371e rapport, paragr. 814-862.] A cette occasion, il a fait les recommandations suivantes:
- a) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires en vue de modifier le Code du travail (notamment par la révision de ses articles 3, 116, 119, 120, 123 et 130 et l’adoption de dispositions complémentaires pour leur application), conformément aux principes énoncés dans ses conclusions, afin d’assurer la mise en œuvre des principes fondamentaux que sont la liberté syndicale et le droit de négociation collective. Il s’attend à ce que les partenaires sociaux soient associés pleinement à ce processus de réforme de la législation du travail. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toutes les mesures adoptées ou envisagées à cet égard et il lui rappelle qu’il peut recourir à l’assistance technique du Bureau.
- b) Observant l’indication du gouvernement selon laquelle les travailleurs migrants représentent 93 pour cent de la population économiquement active du Qatar, le comité prie instamment le gouvernement d’éliminer toute restriction concernant la liberté syndicale des travailleurs migrants.
- c) Le comité prie le gouvernement de lui faire parvenir:
- – le texte des règlements régissant la constitution et les activités des organisations de travailleurs, ainsi que l’adhésion à de telles organisations, adoptés en application de la dernière phrase de l’article 116 du Code du travail;
- – le texte de la décision mentionnée dans l’article 127 du Code du travail, en lui indiquant comment celle-ci est mise en œuvre dans la pratique.
- 137. Dans sa communication en date du 20 février 2015, le gouvernement a réaffirmé que le Code du travail protège comme il convient le droit des travailleurs de constituer des syndicats pour défendre leurs intérêts et les représenter aux fins de la négociation collective avec les employeurs, et que la protection de ces activités syndicales est garantie par les articles 122 et 145 du Code du travail. Selon le gouvernement, les organisations de travailleurs jouissent d’une totale indépendance dans leurs activités touchant au travail, et la législation nationale garantit leur droit de définir leurs statuts et leur règlement de façon à pouvoir mener à bien leur mandat. Le gouvernement estime qu’il s’emploie à garantir les droits au travail de tous les travailleurs, aussi bien les nationaux que les migrants, qu’il applique une politique équilibrée en matière de recrutement et d’emploi de travailleurs migrants et qu’il s’attache à instaurer des conditions de travail sûres et confortables plutôt qu’à chercher des solutions à des problèmes qui ne se sont pas encore posés. Le gouvernement renvoie aux récentes modifications apportées à la législation du travail et à la législation relative aux travailleurs migrants en ce qui concerne l’admission sur le territoire, la sortie du territoire et la résidence, le logement, la protection des salaires et la sécurité et la santé au travail, et souligne que le ministère collabore avec les représentants des travailleurs et des employeurs sur les questions qui les concernent. Le gouvernement cite également plusieurs mesures prises depuis le dernier examen en vue de protéger les droits des travailleurs, notamment des campagnes de sensibilisation, la création de bureaux locaux du travail disséminés dans tout le pays qui sont chargés de recueillir les plaintes et le renforcement du service de l’inspection du travail en vue d’assurer une meilleure application de la loi. Pour ce qui est de recourir à l’assistance technique du BIT, le gouvernement indique que le ministère du Travail et des Affaires sociales collabore déjà avec le Bureau à l’élaboration d’un projet de stratégie pour l’emploi. Le gouvernement joint en outre une copie du décret no 10 de 2006 du ministère de la Fonction publique et du Logement, qui contient un modèle de statuts pour les organisations de travailleurs adopté en vertu de l’article 116, paragraphe 4, du Code du travail (ci-après décret no 10/2006), et indique qu’il n’a pas encore été émis de décision en vertu de l’article 127.
- 138. Le comité prend bonne note des renseignements fournis par le gouvernement au sujet de l’adoption de plusieurs mesures législatives et autres visant à protéger les travailleurs migrants. Il a toutefois le regret de constater que les mesures législatives prises récemment par le gouvernement, notamment les modifications apportées au Code du travail, ne remédient pas aux problèmes qu’il a signalés dans le domaine de la liberté syndicale. En ce qui concerne la déclaration du gouvernement selon laquelle il s’attache à instaurer des conditions de travail sûres et confortables plutôt qu’à chercher des solutions à des problèmes qui ne se sont pas encore posés, le comité rappelle que la liberté syndicale est l’une des garanties primordiales de la paix et de la justice sociale. Notant que le gouvernement a précédemment déclaré que la justice sociale constituait en vertu de l’article 30 de la Constitution de l’Etat du Qatar le fondement des relations entre employeurs et travailleurs, le comité souligne en outre que les Etats Membres de l’OIT se sont engagés, dans le cadre de la Déclaration de 2008 sur la justice sociale, à respecter, promouvoir et mettre en œuvre les principes et droits fondamentaux au travail, en insistant sur l’importance particulière de la liberté d’association et de la reconnaissance effective du droit de négociation collective pour atteindre les quatre objectifs stratégiques de l’Agenda du travail décent. Compte tenu de ce qui précède, le comité, soulignant la nécessité d’assurer la mise en œuvre des principes fondamentaux que sont la liberté syndicale et le droit de négociation collective, prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires en vue de modifier le Code du travail (notamment par la révision de ses articles 3, 116, 119, 120, 123 et 130 et l’adoption de dispositions complémentaires pour leur application), conformément aux principes énoncés dans ses précédentes conclusions. [Voir 371e rapport, paragr. 837-861.] Il s’attend fermement à ce que les partenaires sociaux soient associés pleinement à ce processus de réforme de la législation du travail.
- 139. En outre, relevant que le décret no 10/2006, dont le gouvernement a fourni le texte, prévoit que les statuts des organisations (comités) de travailleurs doivent être conformes au modèle figurant dans l’annexe du décret, le comité estime que toute obligation faite à un syndicat de calquer ses statuts sur un modèle imposé (mis à part certaines dispositions de pure forme) irait à l’encontre des règles à respecter pour que soit assurée la liberté syndicale. Il en va tout autrement lorsque le gouvernement se borne à mettre des statuts types à la disposition des organisations en voie de création sans leur imposer l’acceptation du modèle proposé. L’élaboration de statuts et de règlements types destinés à servir de guides aux syndicats, sous réserve que les circonstances soient telles qu’il n’existe en fait aucune obligation de les accepter ni aucune pression exercée à cette fin, n’implique pas nécessairement une ingérence dans le droit des organisations syndicales d’élaborer leurs statuts et règlements en toute liberté. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 384.] Le comité prie le gouvernement de modifier le décret no 10/2006 en vue d’établir le caractère purement illustratif du modèle de statuts qu’il contient.
- 140. De plus, le comité considère qu’un certain nombre de dispositions du modèle de statuts annexé au décret no 10/2006, par exemple celles qui prévoient la présence d’un représentant du ministère aux sessions de l’assemblée générale, constituent un risque grave d’ingérence par les autorités publiques. En ce qui concerne plus particulièrement la disposition selon laquelle ne peuvent s’affilier au syndicat que les travailleurs de nationalité qatarienne, le comité note que le paragraphe 4 du modèle de statuts prévoit que les membres du syndicat doivent être qatariens, et que les travailleurs non qatariens, même s’ils peuvent s’affilier au syndicat à condition d’être titulaires d’un permis de travail et de travailler dans le pays depuis au moins cinq ans, ne peuvent pas voter ni désigner de candidats ni assister aux assemblées générales, et qu’ils sont uniquement habilités à choisir un représentant chargé de transmettre leur point de vue au comité directeur. Face à ce refus de reconnaître pleinement les droits syndicaux des travailleurs non qatariens, le comité réaffirme que la liberté syndicale doit être reconnue sans discrimination d’aucune sorte tenant à la nationalité et qu’une telle restriction empêche les travailleurs migrants de jouer un rôle actif dans la défense de leurs intérêts, notamment dans des secteurs où ils constituent la principale source de main-d’œuvre. Le comité prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les travailleurs non qatariens exercent pleinement la liberté syndicale, notamment par la modification du paragraphe 4 du modèle de statuts ainsi que de l’article 116 du Code du travail. Il prie également le gouvernement de lui faire parvenir le texte de la décision mentionnée à l’article 127 du Code du travail lorsque celle-ci aura été adoptée.
- 141. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé de toutes les mesures prises ou envisagées à l’égard de ce qui précède et lui rappelle que, dans le cadre de sa collaboration en cours avec le BIT, il peut recourir à l’assistance technique spécifique du Bureau afin de rendre la législation et la pratique nationales pleinement conformes aux principes de la liberté syndicale.