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Allégations: L’organisation plaignante allègue des pratiques antisyndicales de la part de la direction de l’hôtel Pearl Continental de Karachi et le fait que le gouvernement ne veille pas à l’application de la liberté syndicale
- 573. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de juin 2015, à l’occasion de laquelle il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 375e rapport, paragr. 390 à 418, approuvé par le Conseil d’administration à sa 324e session (juin 2015).]
- 574. A sa réunion de mars 2016 [voir 377e rapport, paragr. 7], le comité a lancé un appel pressant au gouvernement indiquant que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d’administration, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l’affaire à sa prochaine réunion, même si les informations ou observations demandées n’étaient pas reçues à temps. A ce jour, le gouvernement n’a envoyé aucune information.
- 575. Le Pakistan a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 576. Lors de son dernier examen du cas, le comité a formulé les observations suivantes [voir 375e rapport, paragr. 418]:
- a) Le comité regrette profondément le fait que, en dépit du laps de temps écoulé depuis la présentation de la plainte en avril 2013, le gouvernement n’ait toujours pas répondu aux allégations de l’organisation plaignante, alors qu’il a été invité à plusieurs reprises à le faire, y compris par des appels pressants. [Voir 371e et 374e rapports, paragr. 6.] Le comité prie instamment le gouvernement de fournir ses observations sur les graves allégations de l’organisation plaignante sans autre délai.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de diligenter immédiatement une enquête indépendante au sujet des allégations suivantes: i) le harcèlement des syndicalistes; ii) les violences commises les 25 février et 13 mars 2013 à l’encontre de plusieurs membres du syndicat, de son secrétaire général, M. Ghulam Mehboob, et des travailleurs ayant participé à la grève; iii) la brève arrestation ultérieure de dirigeants et membres du syndicat et la mise en accusation pénale de 47 d’entre eux. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête ainsi que de toute mesure ou toute réparation qui pourra être décidée à l’issue de celle-ci.
- c) En ce qui concerne les mesures prises contre des dirigeants et des membres syndicaux, y compris des licenciements et le refus d’admettre des travailleurs réintégrés, le comité, prenant note de la décision définitive prise par la Cour d’appel du travail du Sindh le 15 janvier 2013 et des nombreuses ordonnances de la NIRC, y compris les ordonnances des 20 mars et 31 octobre 2013, s’attend fermement à ce que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour leur application immédiate, permettant ainsi la réintégration des travailleurs concernés et une indemnisation pour les pertes de salaires et tous dommages subis.
- d) Le comité attend du gouvernement qu’il s’efforce d’obtenir des commentaires de l’entreprise, via l’organisation d’employeurs concernée, de manière à lui permettre d’examiner les allégations dans le présent cas en toute connaissance de cause.
- 577. En juin 2015, le président du comité a rencontré un représentant du gouvernement, à la demande du comité, afin d’exprimer sa préoccupation devant le manque de coopération de la part du gouvernement concernant le présent cas. Le représentant du gouvernement a indiqué que la Commission nationale des relations professionnelles (NIRC) avait ordonné à la direction de l’hôtel Pearl Continental de réintégrer 32 des 62 travailleurs licenciés. Néanmoins, l’employeur a refusé de laisser entrer ces travailleurs dans ses locaux et obtenu de la Haute Cour du Sindh, la plus haute instance judiciaire de la province, un sursis à l’exécution de l’ordonnance de réintégration. Le représentant du gouvernement a fait savoir que le gouvernement du Sindh avait désigné un autre avocat général adjoint afin qu’il poursuive l’affaire devant la Haute Cour du Sindh, et que cette affaire était toujours en instance.
B. Conclusions du comité
B. Conclusions du comité- 578. Le comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis la présentation de la plainte, le gouvernement n’ait pas répondu aux allégations de l’organisation plaignante alors qu’il a été invité à plusieurs reprises à le faire, y compris par trois appels pressants et pendant une réunion entre le président du comité et l’un de ses représentants en juin 2015. Le comité note que l’objet du présent cas est étroitement lié à celui du cas no 2169 et que les faits signalés par l’organisation plaignante se situent dans le prolongement direct de ceux présentés dans cet autre cas, dont il a été saisi en 2002. Le comité tient donc à exprimer sa profonde préoccupation devant le fait que, après un laps de temps aussi long et malgré les questions en suspens, le gouvernement continue de ne pas coopérer.
- 579. Partant, conformément à la règle de procédure applicable [voir 127e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d’administration à sa 184e session], le comité se voit dans l’obligation de présenter un rapport sur le fond de l’affaire sans pouvoir tenir compte des informations qu’il espérait recevoir du gouvernement.
- 580. Le comité rappelle au gouvernement que l’ensemble de la procédure instituée par l’Organisation internationale du Travail pour l’examen d’allégations en violation de la liberté syndicale vise à assurer le respect de cette liberté en droit comme en fait. Le comité est convaincu que, si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci voudront bien reconnaître à leur tour l’importance qu’il y a à ce qu’ils présentent, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées et précises aux allégations formulées à leur encontre. [Voir premier rapport du comité, paragr. 31.]
- 581. Tout en observant que les questions spécifiques soulevées dans ce cas concernent la province du Sindh, le comité ne peut que rappeler au gouvernement fédéral que les principes de la liberté syndicale doivent être respectés sur la totalité de son territoire. Le comité prie instamment le gouvernement d’attirer sans délai l’attention des autorités compétentes de la province du Sindh sur ses conclusions et recommandations afin de résoudre les questions en suspens dans ce cas et d’obtenir des renseignements de la province du Sindh pour le prochain examen par le comité.
- 582. Le comité rappelle que le présent cas concerne de graves allégations de pratiques antisyndicales, comme le transfert et le licenciement, le harcèlement, l’arrestation et la poursuite pénale de syndicalistes et dirigeants syndicaux par la direction de l’hôtel Pearl Continental à Karachi, et le fait que le gouvernement ne veille pas à garantir la liberté syndicale.
- 583. Le comité rappelle que, dans les allégations examinées dans ses 372e et 375e rapports [paragr. 474 à 497 et 390 à 418 respectivement], il était dit, entre autres, que le 15 janvier 2013, la Cour d’appel du travail du Sindh avait confirmé l’ordonnance par laquelle le tribunal du travail avait imposé la réintégration du secrétaire général du syndicat et de 20 autres syndicalistes (ces licenciements ont également été examinés dans le cas no 2169, qui a précédé le présent cas et concernait le même hôtel). Même si cette décision est devenue définitive puisque l’employeur ne l’a pas contestée, ces travailleurs n’ont toujours pas été réintégrés dans leurs fonctions. Le comité rappelle en outre que, suite à l’action revendicative organisée en réponse à un conflit du travail le 13 mars 2013, 62 autres dirigeants et membres du syndicat se seraient vu refuser l’accès au lieu de travail, au mépris flagrant d’une ordonnance de la NIRC. Cependant, le 26 avril 2013, la direction a demandé à la NIRC l’autorisation de mettre 30 de ces 62 travailleurs en «congé spécial», autorisation qui a été accordée. Le contrat de six des 32 travailleurs restants a été résilié par communication verbale, et leur cas est en instance devant la NIRC. Le 19 mai 2014, 12 travailleurs ont été transférés vers d’autres villes. La NIRC a suspendu l’exécution des ordres de transfert et demandé à la direction de s’expliquer, mais celle-ci a refusé de verser le salaire de ces travailleurs ou de leur donner accès à l’hôtel.
- 584. Le comité note que le présent cas soulève de graves questions sur le caractère effectif des garanties juridiques existantes et des mécanismes judiciaires de protection contre la discrimination antisyndicale. Il rappelle que les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraire à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l’absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 826.] Le retard pris pour mener à bien les recours judiciaires qui donnent accès à la réparation réduit par lui-même l’efficacité de ces recours, étant donné que la situation ayant fait l’objet d’une plainte, souvent, peut avoir changé de manière irréversible, de sorte qu’il devient impossible d’ordonner une réparation appropriée ou de revenir à la situation antérieure. Plus inquiétant encore dans le présent cas, l’organisation plaignante a formulé des allégations, auxquelles le gouvernement n’a donné aucune réponse, selon lesquelles la décision de justice définitive rendue à l’issue d’une procédure excessivement longue n’a pas encore été appliquée et, plus de trois ans après avoir été prononcée, cinq travailleurs au moins ont atteint l’âge de la retraite et un travailleur est depuis décédé. [Voir 375e rapport, paragr. 396.] Le comité demande instamment au gouvernement de garantir sans autre délai l’application de la décision définitive rendue par la Cour d’appel du travail du Sindh, permettant ainsi la réintégration des travailleurs concernés et une indemnisation pour les pertes de salaires et tous dommages subis. S’agissant du syndicaliste qui est décédé après avoir attendu en vain l’application de la décision, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que ses héritiers reçoivent une indemnisation adéquate. Le comité prie également le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard.
- 585. Compte tenu des conclusions judiciaires qui ont confirmé l’existence d’une discrimination antisyndicale, le comité se voit contraint de constater que l’inefficacité de la protection juridique et judiciaire a eu un effet néfaste persistant sur les droits des employés de l’hôtel en matière de liberté syndicale et de négociation collective. Le comité croit comprendre, concernant les 62 travailleurs auxquels on aurait refusé l’accès au lieu de travail au lendemain de l’action revendicative du 13 mars 2013, que plusieurs procédures ont été engagées devant la NIRC pour les motifs suivants: la demande de l’employeur aux fins d’être autorisé à mettre 30 de ses salariés en congé spécial, le licenciement de six travailleurs dont le contrat a été résilié par simple communication verbale et le transfert de 12 travailleurs vers d’autres villes. Le comité croit comprendre à la lumière des informations fournies à son président [voir paragr. 5 du présent rapport], que la NIRC a ordonné la réintégration de 32 de ces travailleurs, mais que l’employeur a obtenu un sursis à l’exécution de l’ordonnance. Tout en comprenant que le cas est en cours d’examen devant la Haute Cour du Sindh, le comité ne peut qu’exprimer sa profonde préoccupation devant le fait que, une nouvelle fois, alors qu’une procédure d’appel est en cours pour une durée indéterminée, une ordonnance rendue en faveur des travailleurs n’a toujours pas été exécutée. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’évolution de la procédure concernant ces travailleurs et s’attend fermement à ce que la Haute Cour du Sindh se prononce sans autre délai et que l’arrêt rendu soit pleinement exécuté. Le comité prie en outre le gouvernement de communiquer une copie de l’arrêt définitif, une fois qu’il aura été prononcé.
- 586. En l’absence de toute réponse de la part du gouvernement à sa recommandation antérieure à cet effet, le comité demande une fois de plus instamment au gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante sur les allégations d’actes de violence, de harcèlement et d’arrestations de syndicalistes, et de le tenir informé de toutes les mesures prises à cet égard et du résultat de cette enquête.
- 587. Le comité rappelle que, selon l’organisation plaignante, les actes de violence et de discrimination antisyndicale ont été commis dans le cadre d’un conflit du travail et en réaction à une grève légale après l’échec de la procédure de conciliation en raison du manque de participation de l’employeur. L’organisation plaignante allègue en outre que, bien que le syndicat soit reconnu juridiquement comme le représentant des employés de l’hôtel pour la négociation, la direction de l’hôtel refuse toujours de reconnaître le syndicat et d’engager des négociations collectives de bonne foi avec lui. Le gouvernement refuse également de garantir de manière effective les droits fondamentaux et la reconnaissance du syndicat. Se référant au précédent examen du cas no 2169, le comité rappelle que, en 2011, les employés de l’hôtel étaient privés de convention collective depuis une dizaine d’années [voir 360e rapport, paragr. 88], et il croit comprendre que le lancement d’un processus de négociation collective à l’hôtel reste une tâche difficile. Le comité attire à nouveau l’attention du gouvernement sur l’article 4 de la convention no 98, selon lequel des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre des mesures visant à encourager et à promouvoir des négociations collectives libres et volontaires entre l’employeur et le syndicat à l’hôtel, en vue d’un règlement pacifique des questions en suspens et de la détermination des conditions d’emploi des travailleurs par des conventions collectives contraignantes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 588. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité regrette profondément le fait que, en dépit du laps de temps écoulé depuis la présentation de la plainte en avril 2013, le gouvernement n’ait toujours pas répondu aux allégations de l’organisation plaignante, alors qu’il a été invité à plusieurs reprises à le faire, y compris par trois appels pressants et pendant une réunion entre le président du comité et l’un de ses représentants. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir ses observations sur les graves allégations de l’organisation plaignante sans autre délai.
- b) Tout en observant que les questions spécifiques soulevées dans ce cas concernent la province du Sindh, le comité ne peut que rappeler au gouvernement fédéral que les principes de la liberté syndicale doivent être respectés sur la totalité de son territoire. Le comité prie instamment le gouvernement d’attirer sans délai l’attention des autorités compétentes de la province du Sindh sur ses conclusions et recommandations afin de résoudre les questions en suspens dans ce cas et d’obtenir des renseignements de la province du Sindh pour le prochain examen par le comité.
- c) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir sans autre délai l’application de la décision définitive rendue par la Cour d’appel du travail du Sindh, permettant ainsi la réintégration des travailleurs concernés et une indemnisation pour les pertes de salaires et tous dommages subis. S’agissant du syndicaliste qui est décédé après avoir attendu en vain l’exécution de la décision, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que ses héritiers reçoivent une indemnisation adéquate. Le comité prie également le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard.
- d) Le comité prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’évolution de la procédure concernant les travailleurs qui se seraient vu refuser l’accès au lieu de travail au lendemain des faits survenus en mars 2013. Le comité s’attend fermement à ce que la Haute Cour du Sindh se prononce sans autre délai et que l’arrêt rendu soit pleinement exécuté. Le comité prie en outre le gouvernement de communiquer une copie de l’arrêt définitif, une fois qu’il aura été prononcé.
- e) Le comité demande une fois de plus instamment au gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante sur les allégations suivantes: i) le harcèlement des syndicalistes; ii) les violences commises les 25 février et 13 mars 2013 à l’encontre de plusieurs membres du syndicat, de son secrétaire général, M. Ghulam Mehboob, et des travailleurs ayant participé à la grève; iii) la brève arrestation ultérieure de dirigeants et membres du syndicat et la mise en accusation pénale de 47 d’entre eux. Il prie le gouvernement de le tenir informé de toutes les mesures prises à cet égard et du résultat de cette enquête.
- f) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre des mesures visant à encourager et à promouvoir des négociations collectives libres et volontaires entre l’employeur et le syndicat à l’hôtel, en vue d’un règlement pacifique des questions en suspens et de la détermination des conditions d’emploi des travailleurs par des conventions collectives contraignantes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.