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Informe definitivo - Informe núm. 397, Marzo 2022

Caso núm. 3387 (Grecia) - Fecha de presentación de la queja:: 07-JUL-20 - Cerrado

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent qu’une nouvelle disposition législative (article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020) viole les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective ainsi que les conventions nos 87 et 98 en confiant aux employeurs le soin d’établir la réglementation des conditions d’emploi des travailleurs du transport. Elles dénoncent également le fait que les syndicats n’aient pas été consultés avant l’adoption de cette disposition

  1. 365. La plainte figure dans des communications de la Confédération générale grecque du travail (GSEE) et de la Fédération grecque des syndicats des transports (OSME) datées des 7 et 22 juillet 2020.
  2. 366. Le gouvernement présente ses observations dans une communication en date du 5 mars 2021. Il soumet également la réponse de l’organisation d’employeurs concernée, la Fédération panhellénique des conducteurs d’autobus interurbains, en date du 8 septembre 2020.
  3. 367. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 368. Dans leurs communications en date des 7 et 22 juillet 2020, les organisations plaignantes allèguent qu’une nouvelle disposition législative – l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020 – a été adoptée sans aucune concertation préalable avec les syndicats et que ladite disposition viole à la fois les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective et les conventions nos 87 et 98 en confiant aux employeurs le soin d’établir la réglementation des conditions d’emploi des travailleurs des compagnies de transport (KTEL).
  2. 369. Les organisations plaignantes indiquent que les KTEL – entreprises de transports urbains et interurbains – ont été fondées en 1952 en tant que personnes morales privées chargées d’assurer un service exclusivement public (au sens fonctionnel), à savoir le transport de passagers sur la plupart des lignes urbaines et interurbaines du pays. En 2001, les KTEL ont été transformées en sociétés anonymes et relevaient dès lors des dispositions législatives sur les sociétés anonymes (droit privé) qui leur étaient applicables. Toutefois, dans le souci de garantir la qualité et la sécurité du service de transport, les principaux paramètres touchant aux conditions de fourniture du service (tarifs, localisation des arrêts de bus, billetteries, etc.) ont été déterminés par des actes réglementaires de l’administration. Compte tenu de la nature de l’activité (l’exécution d’un service public), le Règlement général du personnel était également défini par des actes réglementaires de l’administration à partir de 1956, le dernier des actes en question étant le décret présidentiel no 246/2006. Ce décret déterminait des aspects importants des conditions d’emploi, notamment les qualifications requises pour le recrutement, les tâches générales et spécifiques assignées aux travailleurs, les congés, les infractions disciplinaires, les périodes de travail, les pauses, les congés, les heures supplémentaires, etc. Les organisations plaignantes font observer que l’État a toujours considéré que la prérogative attribuée au gouvernement de définir le Règlement général du personnel des KTEL constituait une limitation légale du droit de négociation collective, limitation due au fait que, si le règlement en question concernait effectivement les conditions de travail de base des travailleurs des entreprises privées, il avait également une incidence sur divers aspects de la prestation du service de transport, notamment la qualité du service et la sécurité des passagers. Selon les organisations plaignantes, une telle prérogative fixe les limites entre l’intervention de l’État et la négociation collective puisque, en l’occurrence, ce sont des biens publics (la sécurité et la qualité des transports publics) qui sont en jeu, dans la mesure où ils dépendent directement des conditions de travail des employés.
  3. 370. Les organisations plaignantes allèguent cependant que le nouvel article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020, promulgué sans que les syndicats de base ou l’OSME aient été informés ou consultés, a pour effet d’abolir le décret présidentiel no 246/2006 et modifie l’article 14, paragraphe 3, de la loi no 2963/2001, qui autorisait la promulgation du décret présidentiel susmentionné, en déléguant aux employeurs le pouvoir exclusif et unilatéral de réglementer les conditions fondamentales régissant l’exécution des services fournis par les travailleurs. Elles indiquent que l’article 33, paragraphe 3, est libellé comme suit: «Le règlement intérieur établi par les prestataires de services de transport, après approbation par l’assemblée générale de chaque entité juridique, détermine les qualifications requises pour le recrutement, les motifs et procédures de licenciement, le statut officiel, le comportement et les obligations du personnel, le temps de travail et de repos, la responsabilité disciplinaire, les sanctions disciplinaires, les commissions chargées de l’application des sanctions et la procédure à suivre en la matière, ainsi que toute autre réglementation pertinente, conformément aux dispositions de la législation du travail en vigueur et de la législation sur les sociétés anonymes. Le règlement intérieur doit impérativement être soumis à l’Agence des transports et des communications de la région ou de la circonscription administrative concernée dans un délai de trois mois à compter de la publication du présent acte législatif. En cas de non-respect du délai susmentionné, par décision du gouverneur régional compétent, les activités du conseil d’administration de la KTEL PLC ou de la KTEL seront suspendues jusqu’à la transmission du règlement intérieur.»
  4. 371. Selon les organisations plaignantes, en adoptant cette disposition, le législateur a choisi de ne pas maintenir la capacité d’édicter les règlements généraux du personnel des KTEL; mais au lieu de confier cette mission aux syndicats au nom de l’autonomie collective, le législateur a emprunté la voie législative pour déléguer cette compétence à l’employeur. Selon les organisations plaignantes, la loi dispose que, dans le cadre de la détermination unilatérale du règlement opérationnel, les entreprises ne sont pas tenues de délibérer avec les syndicats ni d’informer ces derniers, en méconnaissance du fait que ces entreprises sont chargées d’assurer un service public et rompant avec la pratique traditionnelle voulant que les conditions de travail des KTEL garantissent les éléments fondamentaux de la sécurité et de la qualité des transports. Le règlement intérieur est l’ensemble des règles qui constituent l’ordre interne de l’entreprise et régissent les relations qui naissent dans le cadre du recrutement, de l’emploi et de la cessation d’activité. Les organisations plaignantes font valoir que, en matière réglementaire, le fait d’octroyer directement une compétence unilatérale à l’employeur, et cela pour tous les aspects des conditions d’emploi, enfreint l’article 22 de la Constitution grecque, qui fait de la négociation collective le principal outil institutionnel de réglementation des conditions d’emploi, outre le niveau minimal de protection assuré par la législation nationale. Elles affirment également que, en vertu de la législation grecque, les seuls cas dans lesquels l’édiction unilatérale du règlement du personnel par l’employeur est acceptable sont ceux où il n’existe ni syndicat qui soit en mesure de négocier collectivement ni comité d’entreprise, ceux où il n’est pas possible de conclure une convention collective dans les entreprises qui comptent moins de 50 travailleurs, ou encore ceux où les représentants syndicaux sont totalement inactifs (loi no 1767/1988 et loi no 1876/1990). Il importe de noter que cette disposition viole le droit fondamental des employés des KTEL et de leurs syndicats de négocier collectivement et de déterminer au moyen de conventions collectives le cadre général appelé à régir leurs relations de travail, contrevenant ainsi à l’article 4 de la convention no 98 et à l’article 11 de la convention no 87. Qui plus est, cette limitation du droit de négocier collectivement les conditions fondamentales d’emploi n’est pas mise en œuvre pour des raisons touchant à la sécurité des transports ou d’un autre service public, mais est conférée aux employeurs de manière à leur permettre de modifier à leur avantage les conditions d’emploi. Les organisations plaignantes concluent en affirmant que, lorsque le législateur a choisi d’abdiquer sa compétence pour l’établissement du règlement régissant le personnel des KTEL, reconnaissant par là-même que ces questions ne relèvent pas de l’intérêt public, la compétence pertinente en matière de réglementation aurait automatiquement dû être transférée à la négociation collective, et non pas aux employeurs.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 372. Dans sa communication du 5 mars 2021, le gouvernement indique que les services de transports interurbains sont assurés par des entreprises d’autobus – les KTEL – ou, dans certains cas, par des conducteurs individuels, et que ce cadre institutionnel est régi par la loi no 2963/2001 et les instruments réglementaires dont elle est assortie. Conformément aux dispositions de cette loi, la majorité des KTEL ont été transformées en sociétés anonymes et privées, titulaires de droits de transport exclusifs dans les limites géographiques de leur région. Le ministère des Infrastructures et des Transports était chargé d’établir les règles juridiques internes et les régions supervisaient l’exploitation des services de transport routier de passagers. C’est dans ce contexte qu’a été publié le décret présidentiel no 246/2006, qui contient le règlement du personnel des KTEL et spécifie les qualifications requises pour l’embauche, les motifs et procédures de licenciement, le statut des membres du personnel, le comportement et les responsabilités, le temps de travail et les périodes de repos, les responsabilités et sanctions disciplinaires et autres questions. Le gouvernement indique que, en vertu de la nouvelle loi no 4663/2020, qui a été mise en consultation pendant deux semaines en décembre 2019, le décret présidentiel no 246/2006 a été abrogé et l’article 14 de la loi no 2963/2001 a été modifié, instituant l’obligation pour chaque KTEL de publier son règlement intérieur, dont le contenu doit être équivalent à celui du décret présidentiel de 2006 et conforme aux dispositions du droit du travail et de la loi no 2190/1920 sur les sociétés anonymes. Selon le gouvernement, le cadre réglementaire des KTEL est considéré comme équivalent à celui des autres entreprises de transport, ce qui signifie que l’État ne traite pas les questions qui font l’objet du règlement intérieur, à l’exception de celles qui sont déjà régies par des dispositions générales et spécifiques du droit du travail.
  2. 373. Le gouvernement fait par ailleurs observer que, si l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020 stipule que les entreprises KTEL sont tenues d’établir et d’appliquer un règlement intérieur du personnel, il ne définit pas la manière dont ce règlement doit être établi, cette question relevant du droit général du travail. Le gouvernement fournit diverses précisions à ce sujet et indique notamment que: i) selon le décret législatif no 3789/1957, les entreprises, établissements ou activités en général – indépendamment de la forme juridique qu’ils revêtent ou de la personne physique ou morale dont ils sont la propriété – qui emploient plus de 70 travailleurs doivent élaborer un règlement intérieur pour réglementer les relations qui se nouent, pendant la durée d’exécution du travail, entre eux et les membres du personnel liés par une relation de travail de droit privé; ii) la note explicative qui accompagne le décret législatif no 3789/1957 stipule que le règlement intérieur d’une entreprise est un corpus de règles adaptées aux conditions spécifiques de son fonctionnement, dont l’application vient s’ajouter à celle de la législation en vigueur, dans le but de garantir équité et uniformité en matière de conditions de travail, de pouvoir disciplinaire et d’égalité de traitement des travailleurs; c’est la raison pour laquelle le règlement intérieur comporte des dispositions régissant les relations entre l’entreprise et ses employés, notamment les questions relatives à l’exécution du travail, l’évolution du personnel, l’organisation de l’entreprise ainsi qu’aux relations entre les travailleurs; iii) la loi no 1876/1990 stipule que les questions relatives à l’élaboration du règlement intérieur des entreprises, sans préjudice des compétences dévolues aux comités d’entreprise, peuvent faire l’objet d’une convention collective de travail; et iv) la loi no 1767/88, telle que modifiée par la loi no 2224/1994, dispose que, s’il n’existe pas de syndicat au sein de l’entreprise et si ces questions ne sont pas réglementées par une convention collective de travail, le règlement intérieur doit faire l’objet d’une décision commune de l’employeur et du comité d’entreprise, et accorde ainsi la priorité aux organisations syndicales pour ce qui est de la gestion des règles internes. Le gouvernement affirme par conséquent que l’élaboration du règlement intérieur constitue pour l’employeur une obligation, dont l’exécution nécessite généralement: i) la conclusion d’une convention collective de travail, si l’entreprise possède un syndicat opérationnel; ii) une décision conjointe de l’employeur et du comité d’entreprise, s’il n’existe pas de syndicat dans l’entreprise et si les questions ne sont pas traitées dans une convention collective d’entreprise; ou iii) une décision unilatérale de l’employeur, si le syndicat ne s’emploie pas à réglementer le contenu des règles dans le cadre d’une convention collective et si un comité d’entreprise n’a pas été élu au sein de l’entreprise. Par conséquent, lorsque l’entreprise est dotée d’un syndicat, ce dernier a le droit d’élaborer un règlement intérieur en collaboration avec l’employeur, moyennant la conclusion d’une convention collective d’entreprise. Le gouvernement affirme que les dispositions du droit général du travail applicables à l’élaboration du règlement intérieur, y compris pour les KTEL, garantissent donc pleinement les droits syndicaux, dans la mesure où le règlement intérieur du personnel est le fruit d’une négociation collective.
  3. 374. Le gouvernement communique également les observations formulées par l’organisation d’employeurs concernée – la Fédération panhellénique des conducteurs d’autobus interurbains. La fédération fait valoir que la plainte repose sur une hypothèse erronée, à savoir que les KTEL seraient des entreprises publiques, alors que, conformément à la loi no 2963/2001 et à l’appréciation de la Haute Cour de cassation du pays, il s’agit en fait d’entités privées, principalement des sociétés anonymes, qui distribuent des bénéfices à leurs actionnaires. La participation de l’État à la gestion des KTEL se limite aux questions visées par les articles 8, 10 et 16 de la loi no 2963/2001, notamment l’approbation des itinéraires, les tarifs et la supervision générale du service de transport routier de voyageurs, toutes les autres questions relevant quant à elles du droit privé. La fédération fait donc valoir que, puisque le législateur et la jurisprudence nationale assignent tous deux aux KTEL le statut d’entreprises privées, ne relevant pas du secteur public au sens large, l’adoption de la loi no 4663/2020 et l’abrogation du décret présidentiel no 246/2006, qui avait établi le règlement intérieur du personnel des KTEL, s’imposaient dans la mesure où ce décret était incompatible avec la loi no 2190/1920, avec la loi no 4548/2018 régissant les sociétés anonymes ainsi qu’avec les dispositions du droit général du travail régissant les relations professionnelles dans toutes les catégories d’entreprises.
  4. 375. La fédération soutient par ailleurs que les garanties en matière de sécurité publique et de protection des travailleurs mentionnées par les organisations plaignantes sont déjà assurées par le législateur, puisque l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020 (article qui fait l’objet du litige) stipule que le règlement intérieur du personnel doit être établi conformément au droit du travail en vigueur ainsi qu’à la loi sur les sociétés anonymes, la note explicative accompagnant ce décret précisant que le contenu du règlement doit être équivalent à celui du décret présidentiel abrogé. Par conséquent, en se référant expressément à ces lois et à ces réglementations, qui comprennent également l’ensemble des conventions collectives et des sentences arbitrales, dont plusieurs s’appliquent spécifiquement aux KTEL, et en maintenant le règlement interne du personnel dans les limites qu’elles fixent, le législateur n’a nullement laissé la réglementation des relations professionnelles du personnel des KTEL entre les mains des employeurs mais, bien au contraire, assuré la protection des travailleurs et mis ces garanties en conformité avec les impératifs de la libre entreprise et de la concurrence.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 376. Le comité rappelle que le présent cas concerne des allégations selon lesquelles, par le biais d’une nouvelle disposition législative – l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020 – promulguée en l’absence de consultation préalable avec les syndicats, le législateur a confié à l’employeur le soin de réglementer les conditions d’emploi des travailleurs des KTEL, restreignant ainsi les droits de négociation collective des syndicats concernés et violant les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective, ainsi que les conventions nos 87 et 98.
  2. 377. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles la loi de 2020 restreint les droits de négociation collective, le comité note tout d’abord que de nombreux aspects du cas ne présentent pas de caractère litigieux pour les parties. Le comité relève ainsi, sur la base des informations qui lui ont été communiquées, que les KTEL sont des personnes morales, pour la plupart des sociétés anonymes, régies par le droit privé et assurant un service de transports urbains et interurbains de passagers dans le pays, que les organisations plaignantes considèrent comme un service public. Le comité constate qu’il n’existe aucun litige entre les organisations plaignantes et le gouvernement quant à la nature juridique de ces sociétés, quant à l’établissement du règlement intérieur tel qu’il se faisait avant 2020 et quant au fait que les conditions d’emploi de base des KTEL étaient déterminées par des actes administratifs, ce qui, selon les organisations plaignantes, se justifiait par la nature de service public de l’activité exercée et constituait une limitation légale du droit de négociation collective. Le comité note en outre que le fait que le législateur, en promulguant l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020, a choisi de ne pas maintenir la capacité d’établir le règlement intérieur des KTEL par voie réglementaire et a délégué cette prérogative à l’employeur ne suscite également aucun différend. De même, ni le gouvernement ni la fédération d’employeurs concernée ne remettent en cause le droit des travailleurs des KTEL de négocier collectivement. Le comité n’examinera donc pas de manière approfondie ces questions non controversées.
  3. 378. Le comité observe toutefois que les organisations plaignantes et le gouvernement sont en désaccord au sujet de l’incidence de la loi de 2020 sur les mécanismes effectivement utilisés pour déterminer le règlement intérieur des KTEL et, partant, les conditions d’emploi de base. D’une part, les organisations plaignantes allèguent que, puisque le législateur a refusé de déterminer le règlement intérieur des KTEL, cette mission aurait dû être confiée aux syndicats, par le biais de la négociation collective, et non déléguée par voie législative à l’employeur. Selon elles, la loi permet désormais aux employeurs de réglementer les conditions fondamentales d’emploi de manière unilatérale, sans concertation avec les syndicats, et viole donc le droit fondamental des employés des KTEL et de leurs syndicats de négocier collectivement et de déterminer leurs relations de travail dans le cadre de conventions collectives. Le gouvernement considère d’autre part que, en vertu de la loi de 2020, le cadre réglementaire des KTEL est désormais considéré comme équivalent à celui des autres entreprises de transport, dont l’État n’édicte pas les règles internes, et fait observer que, si la loi stipule que les KTEL sont tenues d’établir et d’appliquer des règlements intérieurs, elle ne définit pas la manière dont ces règlements doivent être élaborés, cette question étant régie par la législation générale du travail, et sauvegarde entièrement les droits syndicaux, sachant que les règlements intérieurs constituent généralement l’aboutissement de négociations collectives. Le comité relève que le gouvernement renvoie aux dispositions pertinentes en la matière et indique que l’élaboration d’un règlement intérieur constitue pour l’employeur une obligation dont l’exécution nécessite: i) la conclusion d’une convention collective de travail si un syndicat existe et exerce ses activités au sein de l’entreprise; ii) une décision conjointe de l’employeur et du comité d’entreprise s’il n’existe pas de syndicat dans l’entreprise et si les questions ne sont pas traitées dans une convention collective d’entreprise; ou iii) une décision unilatérale de l’employeur si le syndicat ne s’emploie pas à définir le contenu du règlement par voie de convention collective et si un comité d’entreprise n’a pas été élu dans l’entreprise. Le comité note que la fédération patronale concernée convient elle aussi que la protection des travailleurs est garantie, puisque la disposition contestée et la note explicative qui l’accompagne stipulent que le règlement intérieur du personnel est édicté conformément au droit du travail en vigueur et à la loi sur les sociétés anonymes et que son contenu est équivalent à celui du décret présidentiel abrogé.
  4. 379. Le comité croit comprendre, sur la base des éléments susmentionnés, que le litige en cause porte en définitive sur la question de savoir si l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020 permet aux employeurs d’établir unilatéralement le règlement intérieur des KTEL et si, ce faisant, la loi restreint le droit des organisations plaignantes de déterminer les conditions d’emploi de leurs membres par voie de négociation collective. À ce sujet, le comité tient à rappeler d’ores et déjà que des mesures devraient être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1231.] Le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale, et les syndicats devraient avoir le droit, par le moyen de négociations collectives ou par tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu’ils représentent, et les autorités publiques devraient s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal.
  5. 380. Tout en observant par ailleurs à cet égard que l’article 33, paragraphe 3 de la loi no 4663/2020 confie effectivement à l’employeur l’adoption du règlement intérieur des KTEL et ne prévoit pas expressément la participation des syndicats à l’établissement dudit règlement, ce que dénoncent les organisations plaignantes, le comité croit comprendre, sur la base des informations qui lui ont été communiquées par le gouvernement, que la législation générale du travail à laquelle la disposition se réfère prévoit la participation des organisations de travailleurs à cet exercice. Le comité croit notamment comprendre que le règlement intérieur est généralement adopté par voie de négociation collective conclue entre l’employeur et le syndicat de l’entreprise, ou conjointement par l’employeur et un comité d’entreprise, et que les cas où le règlement intérieur est déterminé unilatéralement par l’employeur sont uniquement ceux où le syndicat ne s’emploie pas à édicter le contenu du règlement au moyen d’une convention collective et où un comité d’entreprise n’a pas été élu dans l’entreprise. Il semble par conséquent que l’article 33, paragraphe 3, de la loi no 4663/2020 ne contrevient pas aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective dans la mesure où, par une référence explicite à la législation générale du travail, il permet aux syndicats de participer à la détermination du règlement intérieur des KTEL et, de ce fait, de négocier et de déterminer par voie de négociation collective les conditions fondamentales de travail et d’emploi. Compte tenu de ce qui précède, rappelant l’importance qu’il attache à la négociation collective en tant que moyen essentiel pour l’établissement des conditions de travail et d’emploi, et compte tenu de l’affirmation du gouvernement selon laquelle les règlements intérieurs des entreprises privées du pays sont généralement établis au moyen de conventions collectives, le comité veut croire que les syndicats représentant les travailleurs des KTEL seront en mesure de participer, en collaboration avec l’employeur, à la détermination des conditions de travail et d’emploi de leurs membres par voie de négociation collective. Le comité veut croire que les parties s’engageront de bonne foi dans cet exercice et contribueront ainsi à l’harmonie des relations professionnelles dans le secteur des transports.
  6. 381. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la loi de 2020 aurait été élaborée en l’absence de tout processus de consultation, le comité note que, si les organisations plaignantes dénoncent le fait que les syndicats de base ou l’OSME n’ont pas été préalablement informés ou consultés au sujet de l’élaboration de la loi no 4663/2020, le gouvernement soutient quant à lui que le projet de loi avait été mis en consultation pendant deux semaines en décembre 2019. Reconnaissant qu’une consultation publique ne constitue pas l’équivalent d’une information et d’une consultation préalables des parties directement concernées, le comité a tenu à souligner l’importance d’une consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs lors de la préparation et de la mise en œuvre d’une législation touchant leurs intérêts.
  7. 382. Compte tenu de ce qui précède, le comité estime que ce cas n’appelle pas un examen plus approfondi et qu’il est clos.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 383. Au vu des conclusions précédentes, le comité recommande au Conseil d’administration de décider que le présent cas n’appelle pas un examen plus approfondi.
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