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Demande directe (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011 - Madagascar (Ratification: 2019)

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La commission se félicite du premier rapport du gouvernement. Elle prend également note des observations formulées par la Confédération des syndicats des travailleurs révolutionnaires malagasy (FISEMARE), reçues le 1er septembre 2022. La commission demande au gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations formulées.
Article 1 de la convention. Définitions. Le gouvernement indique que la législation malgache ne contient pas de définition du travail domestique et des travailleurs domestiques. Le gouvernement ne fournit pas d’information sur le statut des travailleurs qui effectuent un travail domestique de manière occasionnelle ou sporadique. La commission note que dans son Étude d’ensemble de 2022 «Garantir un travail décent au personnel infirmier et aux travailleurs domestiques, acteurs clés de l’économie du soin à autrui», elle a observé que «afin de garantir la protection efficace des droits des travailleurs domestiques, la législation pertinente doit garantir la clarté de la terminologie juridique, de la définition des termes et du champ d’application des lois et des réglementations spécifiques qui régissent le travail domestique» (paragr. 555). La commission demande au gouvernement d’indiquer toute mesure prise ou envisagée pour incorporer dans la législation nationale ou dans les conventions collectives les définitions du travail domestique et du travailleur domestique. Elle demande également au gouvernement de communiquer des informations sur la manière dont il garantit la protection des personnes qui accomplissent un travail domestique de manière occasionnelle ou sporadique.
Article 3, paragraphe 1. Protection effective des droits humain. Le gouvernement indique que les services régionaux d’inspection du travail ont pour attribution de veiller au respect de la législation du travail, y compris les droits humains et les droits fondamentaux, à travers des actions de conseils, de règlement des différends et de contrôle. Le gouvernement précise néanmoins qu’en matière de travail domestique, les inspecteurs et les contrôleurs du travail sont confrontés à des difficultés voire à l’impossibilité d’accéder aux lieux de travail des travailleurs domestiques. Tout en étant consciente de ces difficultés, la commission rappelle que l’article 3, paragraphe 1, de la convention exige que l’État prenne des mesures pour assurer la protection effective des droits humains de tous les travailleurs domestiques, la commission note que des solutions existent et ont déjà été mises en œuvre de manière satisfaisante dans divers pays. Elle invite le gouvernement à se référer au guide publié par le Bureau en la matière intitulé «Labour inspection and other compliance mechanisms in the domestic work sector» (https://www.ilo.org/public/libdoc/ilo/2015/487119.pdf) ou encore au module du Centre de formation de l’OIT intitulé «Labour inspection in domestic work» (Domestic Work and LI module EN (ilo.org)). La commission demande par conséquent au gouvernement de fournir avec son prochain rapport des informations détaillées sur les mesures discutées au plan national et envisagées pour assurer dans la pratique que les travailleurs domestiques jouissent de tous les droits fondamentaux du travail auxquels ils ont droit.
Article 3, paragraphe 2 b).Élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire. Le gouvernement indique que le Code du travail interdit le travail forcé ou obligatoire. Le gouvernement précise que, pour donner application à la loi no 2014-040 sur la lutte contre la traite des êtres humains, il a mis en place un Bureau national de lutte contre la traite des êtres humains. Il ajoute voir procédé à la mise en place d’un numéro de signalement pour les cas de traite. Le gouvernement liste également les mesures préventives suivantes: sensibilisation de la population sur la traite des personnes, vulgarisation de la loi no 2014-040 sur la lutte contre la traite des êtres humains et formation des acteurs de prise en charge des victimes (100 acteurs formés en 2019). Le gouvernement mentionne par ailleurs plusieurs actions visant à prendre en charge les victimes de traite des personnes. La commission se réfère à cet égard à ses commentaires de 2022 concernant l’application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, dans lesquels elle a pris note du communiqué de presse de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en date du 30 juillet 2019, selon lequel la traite des êtres humains reste un défi considérable à Madagascar, notamment pour les femmes dans le secteur domestique. La commission demande au gouvernement de fournir des informations détaillées et actualisées sur les mesures prises ou envisagées pour s’assurer de la mise en œuvre des dispositions nationales prohibant le travail forcé ou obligatoire, y compris dans le secteur du travail domestique, en particulier s’agissant des femmes.
Article 3, paragraphe 2 c), et article 4, paragraphe 1.Travail des enfants. Âge minimum. Le gouvernement indique que l’article 100 du Code du travail fixe l’âge minimum d’admission au travail à Madagascar à 15 ans. De plus, l’article 10 du décret no 2018-009 prévoit que le travail domestique ayant un caractère dangereux et abusif, susceptible de nuire à la santé et au développement de l’enfant, leur est interdit. S’agissant de la mise en œuvre de ces dispositions, le gouvernement indique que l’article 29 du décret no 2018-009 prévoit qu’«un recensement par famille, par foyer ou par maison doit être effectué par le chef du village (Fokontany) afin de cibler et soustraire immédiatement les enfants engagés dans les pires formes de travail». La commission se réfère à cet égard à ses commentaires de 2022 concernant l’application de la convention (no 138) sur l’âge minimum, 1973, dans lesquels elle a pris note de la préoccupation exprimée par le Comité des droits de l’enfant selon lequel 4 pour cent des enfants à Madagascar ont une activité économique ou exécutent des travaux domestiques, surtout dans les zones rurales. Dans ses commentaires, la commission a constaté que cela faisait plus de dix ans que le gouvernement discutait d’une réforme de l’âge de fin de scolarité obligatoire, sans que celle-ci aboutisse. La commission a rappelé que lorsque la scolarité obligatoire se termine avant l’âge auquel la loi autorise les jeunes à travailler, il peut s’ensuivre un vide qui ouvre la porte à l’exploitation économique des enfants. La commission demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour s’assurer de la mise en œuvre des dispositions nationales prohibant le travail des enfants, y compris dans le secteur du travail domestique. Rappelant que la scolarité obligatoire est l’un des moyens les plus efficaces de lutte contre le travail des enfants, notamment le travail domestique, la commission demande au gouvernement de fournir des informations détaillées et actualisées sur les mesures prises pour fixer un âge de fin de scolarité obligatoire correspondant à l’âge minimum d’admission à l’emploi au travail, afin de diminuer les risques accrus d’exploitation domestique des enfants et de s’assurer que les activités économiques des travailleurs domestiques de moins de 18 ans ne compromettent pas leurs chances de poursuivre des études ou une formation professionnelle.
Article 5. Protection efficace contre toutes les formes d’abus, de harcèlement et de violence. Le gouvernement se réfère aux dispositions du Code du travail prohibant et sanctionnant le harcèlement sexuel ou moral (notamment les articles 5, 23, 261 et 262), ainsi qu’à la loi no 2019-008 relative aux violences basées sur le genre et à la loi n° 2014-040 sur la lutte contre la traite des êtres humains. Le gouvernement ajoute qu’un numéro vert a é été mis en place pour les cas de violence basée sur le genre. Il réitère qu’en matière de travail domestique, des difficultés pratiques empêchent les inspecteurs du travail d’inspecter le lieu de travail des employés. Concernant les observations des partenaires sociaux, la FISEMARE dénonce la pratique courante à Madagascar du harcèlement moral et sexuel des salariés. La FISEMARE observe que, par peur des conséquences, les employés ne portent pas plainte. La FISEMARE invite le gouvernement à améliorer et préciser les textes normatifs afin de faciliter leur mise en œuvre, notamment s’agissant des preuves à apporter. La commission rappelle que le paragraphe 7 de la recommandation (no 201) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011, dispose que les États membres devraient envisager de mettre en place des mécanismes destinés à protéger les travailleurs domestiques des abus, du harcèlement et de la violence, notamment en créant des mécanismes de plaintes accessibles pour que les travailleuses et travailleurs domestiques signalent tout cas d’abus de cette nature. La commission demande au gouvernement de communiquer des informations détaillées et actualisées sur les mesures adoptées, y compris moyennant les moyens de communication, pour assurer que les travailleuses et les travailleurs domestiques bénéficient d’une protection effective contre toutes les formes d’abus, de harcèlement et de violence. Elle lui demande également de communiquer des informations statistiques sur le nombre de plaintes déposées, en ce qui concerne le domaine du travail domestique, pour harcèlement, abus ou violence, auprès des différentes instances compétentes, et l’issue qui a été réservée à ces plaintes, les sanctions imposées aux auteurs de tels actes et les réparations accordées.
Articles 6 et 9. Travailleurs domestiques logés au sein du ménage pour lequel ils travaillent. Conditions de vie décentes qui respectent leur vie privée. La commission constate que le gouvernement n’a pas communiqué d’information quant à l’existence de dispositions régissant les conditions de vie et le respect du droit à la vie privée dont devraient jouir les travailleurs domestiques logés au sein du ménage pour lequel ils travaillent (article 6). Le gouvernement a par ailleurs indiqué qu’aucune disposition n’a été adoptée pour appliquer l’article 9 de la convention. La commission rappelle que, lorsqu’ils sont logés au sein du ménage, les normes relatives à leurs conditions de vie constituent un axe essentiel de la promotion du travail décent pour ces travailleuses et ces travailleurs. Il est dès lors important que la législation énonce clairement les obligations des employeurs à cet égard. La commission demande au gouvernement de préciser les mesures prises ou envisagées afin d’assurer que les travailleuses et les travailleurs domestiques: a) sont libres de parvenir à un accord avec leur employeur potentiel sur le fait de loger ou non au sein du ménage; b) ne sont pas obligés de rester au sein du ménage ou avec les membres du ménage pendant les périodes de repos journalier ou hebdomadaire ou de congés annuels; c) ont le droit de garder en leur possession leurs documents de voyage et leurs pièces d’identité, d) jouissent de conditions de vie décentes qui respectent leur vie privée lorsqu’ils résident au sein du ménage de leur employeur.
Article 7. Information compréhensible sur les conditions d’emploi. Le gouvernement indique que, conformément à l’article 6 du Code du travail, le contrat de travail doit être constaté au moment de l’embauche, par un écrit précisant au moins la fonction, la catégorie professionnelle, l’indice minimum de classification, le salaire du travailleur et la date d’effet du contrat. Le contrat doit être rédigé en malgache ou en français et être établi en double exemplaire: le premier étant tenu par l’employeur tandis que le second est remis immédiatement au travailleur après signature des deux parties. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures adoptées ou prévues pour assurer, dans la pratique, que les travailleurs domestiques aient véritablement les moyens d’être informés, d’une manière appropriée, vérifiable et facilement compréhensible, en particulier pour les travailleurs domestiques migrants, des termes et conditions de leur emploi, y compris des conditions de rapatriement, le cas échéant, et des conditions relatives à la cessation de la relation de travail, y compris le préavis à respecter par les deux parties
Article 8, paragraphe 3.Coopération en matière d’application de la convention. Le gouvernement indique que, pour le moment, aucune mesure n’a été prise en coopération avec d’avec d’autres États Membres de l’OIT afin d’assurer l’application effective des dispositions de la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations actualisées sur le nombre de travailleurs domestiques migrants recrutés localement pour effectuer un travail domestique dans un autre pays et d’indiquer les mesures prises ou envisagées afin d’assurer, en coopération avec d’autres États Membres de l’OIT, l’application effective des dispositions de la convention aux travailleurs migrants.
Article 10. Égalité de traitement concernant la durée de travail, les heures supplémentaires, le temps de repos et les congés. Rémunération des périodes à disposition du ménage. Le gouvernement indique que les informations concernant l’application de l’article 10, paragraphes 1 et 2, ne sont pas disponibles (durée normale de travail, la compensation des heures supplémentaires, les périodes de repos journalier et hebdomadaire et les congés annuels payés; repos hebdomadaire doit être d’au moins 24 heures consécutives). S’agissant de l’article 10, paragraphe 3, le gouvernement indique que l’arrêté no 551-IGT du 10 mars 1954, précisant la classification professionnelle des travailleurs occupant les emplois dits de «gens de maisons», lui donne effet. Toutefois, cet arrêté ne contient pas de disposition concernant la rémunération des périodes pendant lesquelles les travailleurs domestiques restent à la disposition de leur employeur. La commission demande au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer l’égalité de traitement entre les travailleuses et travailleurs domestiques, y compris ceux logés chez l’employeur, et l’ensemble des travailleurs en ce qui concerne la durée de travail, la compensation des heures supplémentaires, les périodes de repos journalier et hebdomadaire ainsi que les congés annuels payés. De plus, elle demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur la manière dont il est garanti que les périodes pendant lesquelles les travailleuses et travailleurs domestiques ne disposent pas librement de leur temps et restent à la disposition du ménage sont considérées comme du temps de travail rémunéré, comme visé à l’article 10, paragraphe 3.
Article 12, paragraphe 2. Paiement en nature. L’article 62, alinéa 2, du Code du travail limite le paiement du salaire en nature aux «cas où l’employeur serait tenu de fournir au travailleur un logement et des denrées alimentaires». Le gouvernement indique que, en application de l’arrêté no 688-IGT du 23 mars 1954, les retenues à effectuer au titre du loyer sont d’un demi-salaire horaire par jour. S’agissant des denrées alimentaires, le gouvernement indique que, en vertu du décret no 58-031 du 26 décembre 1958, les retenues sont de deux salaires horaires par jour, sans que le petit déjeuner soit pris en compte. La commission demande gouvernement d’indiquer les mesures prises afin d’assurer que les paiements en nature sont librement acceptés par le travailleur domestique, visent son usage et son intérêt personnels et que la valeur monétaire qui leur est attribuée est juste et raisonnable. La commission demande également au gouvernement de communiquer une copie de l’arrêté no 688IGT du 23 mars 1954 et du décret no 58-031 du 26 décembre 1958 mentionnés dans son rapport.
Article 13. Santé et sécurité au travail. Le gouvernement indique que les informations concernant l’application de l’article 13 de la convention ne sont pas disponibles. La commission rappelle que le droit à un environnement de travail sûr et sain a récemment été intégré à la Déclaration de l’Organisation internationale du travail (OIT) relative aux principes et droits fondamentaux au travail de 1998. Elle demande par conséquent au gouvernement de ne ménager aucun effort afin de communiquer avec le prochain rapport des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées, en consultation avec les partenaires sociaux, pour garantir la santé et la sécurité au travail des travailleurs domestiques, en tenant dûment compte des caractéristiques spécifiques à ce travail.
Article 15. Agences d’emploi privées. Le gouvernement indique que les conditions d’exercice des activités des agences d’emploi privées sont déterminées par l’arrêté no 20.307/2015 MEETFP du 11 juin 2015. Le gouvernement souligne que, conformément à l’article 249 du Code du travail, aucun droit ni frais ne peut être imputé aux travailleurs ayant recours à un établissement privé de placement. Le gouvernement précise que les conditions d’exercice des agences privées s’appliquent au recrutement et au placement de tout travailleur, y compris les travailleurs domestiques. Le gouvernement indique toutefois que, pour donner suite à des abus, un arrêté no 20.308/2015/MEETFP a été adopté le 11 juin 2015, qui est venu abroger les agréments de toutes les agences d’emploi privées à Madagascar. S’agissant des conditions d’exercice des agences d’emploi privées, la commission renvoie à ses commentaires concernant la convention (no 181) sur les agences d’emploi privées, 1997 (commentaires en suspens). La commission demande par ailleurs au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour garantir l’existence de mécanismes appropriés pour instruire les plaintes concernant des pratiques abusives ou frauduleuses des agences d’emploi privées en rapport avec les travailleurs domestiques. La commission demande également au gouvernement de communiquer de l’information sur toutes consultations tenues avec les organisations les plus représentatives d’employeurs et de travailleurs et, lorsqu’elles existent, avec les organisations représentatives des travailleurs domestiques, concernant la mise en œuvre de l’article 15, paragraphe 1, de la convention.
Article 17, paragraphes 1 et 2. Mécanismes de plaintes. Inspection du travail. Le gouvernement indique que les inspecteurs et les contrôleurs du travail n’ont pas la qualité requise pour accéder aux domiciles des particuliers car ils ne sont pas officier de police judiciaire. Se référant à ses commentaires au titre de l’article 3 de la convention, la commission demande au gouvernement de communiquer des informations actualisées et détaillées sur les mesures adoptées ou envisagées pour des mécanismes de plainte garantissant le respect de la législation nationale relative à la protection des travailleurs domestiques. La commission demande également au gouvernement de préciser les suites données aux plainte reçues de travailleurs domestiques concernant le respect de la législation nationale relative à la protection des travailleurs. La commission demande par ailleurs au gouvernement de communiquer des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées en vue de l’élaboration et de l’application pratique d’une stratégie d’inspection du travail dans le secteur domestique.
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