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Observation (CEACR) - adoptée 2001, publiée 90ème session CIT (2002)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Pakistan (Ratification: 1957)

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La commission a pris note du rapport du gouvernement.

Travail en servitude pour dettes

1. La commission a pris note des communications de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), datées du 29 août 2001 et du 18 septembre 2001, présentant des commentaires sur le respect de la convention, dont copie a été transmise au gouvernement, respectivement le 18 octobre 2001 et le 25 octobre 2001, pour tout commentaire qu’il jugerait opportun de formuler sur les points soulevés dans les communications. Dans sa communication du 18 septembre 2001, la CISL allègue que le travail forcé est interdit par la loi mais qu’il est très répandu en pratique. La CISL s’est référée à une estimation du programme focal sur le travail des enfants (IPEC) de l’OIT selon laquelle il y a plusieurs millions de travailleurs en servitude au Pakistan, dont un pourcentage important sont des enfants. La CISL mentionne que des études de syndicats ont dénombré 200 000 familles faisant du travail en servitude dans la seule industrie des fours à briques. Elle indique que la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude interdit le travail en servitude, mais est inefficace pour résoudre les problèmes en pratique.

2. La commission note également les indications de la CISL selon lesquelles la servitude pour dettes et le travail en servitude, par des adultes comme par des enfants, se retrouvent le plus souvent dans l’agriculture, la construction en zones rurales, les fours à briques et la manufacture de tapis. Les estimations du nombre de travailleurs forcés sont très variées, mais il n’est pas contesté que dans de nombreuses parties du Pakistan, la pratique de la servitude pour dettes et du travail en servitude existe depuis de nombreuses années et est toujours très fréquente. La CISL allègue que, même si les efforts fournis par des organisations non gouvernementales, telles que le «Bonded Labour Liberation Front», ont permis de libérer des milliers de travailleurs en servitude, ce n’est pourtant qu’une toute petite proportion par rapport au nombre total de travailleurs en servitude, et le problème reste endémique. La CISL allègue qu’en raison du manque d’alternatives certaines personnes libérées de la servitude pour dette seraient retournées au travail en servitude.

3. La commission note la communication de la CISL du 29 août 2001, dans laquelle un rapport d’Anti-Slavery International indique que des études récentes par l’organisation non gouvernementale «Pakistan Institute for Labour Education and Research» (PILER) estiment le nombre de métayers en servitude pour dettes pour l’ensemble du pays à plus de 1,8 million de personnes, pour l’année 2000. Selon le rapport, cette estimation n’inclut pas le travail forcé demandé par le propriétaire à ses locataires. Les études estiment que la limite supérieure de gens dans cette forme de servitude - utilisant la définition au sens large «d’imposition de travail forcé non payé ou seulement de manière insignifiante, par le propriétaire sur sa ferme ou sa maison (begar) indépendamment de l’importance de la dette»- serait de 6,8 millions de personnes à travers le Pakistan pour l’année 2000.

4. Le rapport communiqué par la CISL indique également que PILER a aussi fait une étude sur des groupes de hari en servitude dans la province de Sindha, dont 1 000 individus ont répondu (représentant plus de 6 000 personnes). Le rapport indique que les personnes qui ont répondu à l’étude indiquent que 2 226 hommes, femmes et enfants ont été sujets à des restrictions dans leur liberté de mouvement et que plus de 608 hommes et femmes ont été enchaînés. Selon le rapport, les informations démontrent clairement que le travail en servitude affecte des millions de personnes au Pakistan et est accompagné d’autres violations des droits de l’homme extrêmement sérieuses.

5. La commission note les indications du rapport d’Anti-Slavery International rapportant qu’en avril 2001 le gouvernement a publié une version révisée de l’avant-projet sur la politique nationale et plan d’action pour l’abolition du travail en servitude et la réhabilitation des travailleurs en servitude ayant été libérés. Le rapport indique qu’il s’agit d’un avant-projet et qu’il doit être approuvé par le cabinet fédéral. La commission prie le gouvernement de fournir une copie de l’avant-projet ainsi que des informations sur son approbation finale et sur l’application de la politique et la mise en oeuvre du plan d’action.

6. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les points soulevés dans les rapports communiquées par la CISL.

Accords spécifiques portant sur l’élimination
du travail des enfants en servitude

7. Dans son observation précédente, la commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès dans la mise en oeuvre de l’accord entre le Programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) et l’Association pakistanaise des fabricants et exportateurs de tapis (PCMEA), notamment à l’égard du but, à court terme, de retirer progressivement quelque 8 000 enfants du travail dans l’industrie du tapis sur une période de trente-six mois. La commission a également demandé au gouvernement de communiquer des informations sur les progrès de la mise en oeuvre de l’accord signé en 1997 avec la Commission européenne et l’OIT concernant l’élimination du travail des enfants en servitude. La commission exprime de nouveau son inquiétude face à l’inaction du gouvernement en ce qui a trait à la collecte de données statistiques fiables sur le nombre d’enfants travaillant en servitude.

8. La commission prie de nouveau le gouvernement de fournir des informations sur le progrès dans la mise en oeuvre de ces accords et sur les résultats obtenus, ainsi qu’un rapport contenant des données statistiques sur le nombre d’enfants travaillant en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’une étude empirique sera bientôt menée par le bureau fédéral des statistiques afin de déterminer le nombre d’enfants affectés à des travaux dangereux. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les résultats de l’étude, notamment sur l’incidence du travail en servitude.

Traite de personnes

9. La commission note les allégations de la CISL selon lesquelles la traite de personnes, comprenant la traite d’enfants, est un problème sérieux au Pakistan. La confédération affirme que certains rapports semblent indiquer que plus de 100 femmes font l’objet d’un trafic entre le Pakistan et le Bangladesh chaque jour, et sont vendues à des fins de prostitution ou à d’autres formes de travail forcé. D’après ces allégations, il a été reporté que des femmes arrivent également de Birmanie, d’Afghanistan, de Sri Lanka et d’Inde, et beaucoup d’entre elles sont achetées et vendues dans des commerces et maisons de tolérance de Karachi. Le nombre de femmes faisant l’objet d’un trafic au Pakistan est estiméà plusieurs centaines de milliers, et selon certains rapports leur nombre pourrait atteindre 1,2 million. La CISL indique également que les estimations du nombre d’enfants prostitués au Pakistan varient, mais que selon la plupart il se chiffrerait autour de 40 000.

10. La commission note les allégations de la CISL selon lesquelles il y aurait également des rapports indiquant que plusieurs centaines d’enfants pakistanais ont été kidnappés et envoyés dans les Etats du Golfe persique pour travailler comme jockeys de chameaux. D’après ces allégations, l’esclavage et le trafic d’enfants au Pakistan sont un problème majeur, et l’enlèvement d’enfants survient soit pour une rançon, soit à titre de revanche contre la famille de l’enfant ou simplement à des fins d’esclavage. Dans quelques régions rurales, des enfants sont vendus en servitude pour dette en échange d’argent ou de terre.

11. La commission espère que le gouvernement présentera ses commentaires sur les allégations à ce sujet contenues dans les rapports communiqués par la CISL.

Restrictions à la liberté de quitter son emploi

12. Dans sa précédente observation, la commission a noté que le représentant gouvernemental a informé la Commission de la Conférence en juin 1999 que l’amendement de la loi sur les services essentiels, en vertu de laquelle les personnes au service du gouvernement qui mettent fin à leur emploi sans le consentement de leur employeur se rendent passibles de peines d’emprisonnement, devait être examiné par la Commission tripartite sur la consolidation, la simplification et la rationalisation des lois du travail. La commission note que le rapport du gouvernement indique que le rapport final de la Commission était attendu pour la fin de septembre 2000. La commission prie le gouvernement de fournir une copie du rapport. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires afin de rendre les lois fédérales et provinciales sur les services essentiels conformes à la convention, et le prie de fournir des informations sur les progrès réalisés vers cet objectif.

13. A cet égard, la commission demande également au gouvernement de fournir le texte complet des textes législatifs suivants adoptés en 2000: l’ordonnance no XVII du 27 mai 2000 sur le renvoi du service (pouvoirs spéciaux); l’ordonnance no XX du 1er juin 2000 sur les fonctionnaires publics (amendements); et l’ordonnance no LXIII du 6 décembre 2000 sur le service obligatoire dans les forces armées (amendement).

Article 25 de la convention

14. La commission note l’allégation contenue dans le rapport d’août 2001 communiqué par la CISL, selon laquelle la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’a pas été mise en oeuvre, peu de fonctionnaires étant disposés à appliquer la loi de peur de s’attirer la colère des propriétaires, ce qui permet à ces derniers de faire usage de travail forcé en toute impunité. La commission note également l’allégation de la CISL contenue dans son communiqué du 18 septembre 2001 selon laquelle, malgré l’adoption de règlements d’application en 1995, la loi de 1992 sur l’abolition du système du travail en servitude n’est pas parvenue à s’attaquer efficacement au problème dans la pratique.

15. La commission a précédemment exprimé sa préoccupation en ce qui a trait aux inspections, poursuites et condamnations de contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude. Dans son observation précédente, la commission a demandé des informations sur les mesures prises pour renforcer l’efficacité des comités de vigilance, sur les méthodes de coopération et de communication entre les comités de vigilance et les magistrats, et sur le rôle des magistrats dans le processus d’identification, de libération et de réhabilitation des travailleurs en servitude. Dans son rapport, le gouvernement a indiqué qu’il était en consultation avec les secrétaires en chef provinciaux afin d’obtenir de plus amples informations sur ces questions. La commission en a pris bonne note et prie le gouvernement de faire suivre les informations sur chacune de ces questions.

16. La commission avait exprimé sa préoccupation à l’égard du rôle des magistrats dans le processus d’identification, de libération et de réhabilitation des travailleurs en servitude. Elle note qu’aucune information à ce sujet n’a été communiquée et demande, par conséquent, de nouveau au gouvernement de fournir des informations à ce sujet.

17. La commission a demandé précédemment des données statistiques sur le nombre d’inspections, de poursuites et de condamnations des contrevenants en vertu de la loi de 1991 sur le travail des enfants, du règlement de 1995 sur le travail des enfants, de la loi de 1992 sur l’abolition du système de travail en servitude et du règlement de 1995 sur l’abolition du système de travail en servitude. La commission note que les données fournies par le gouvernement dans son rapport ne concernent que la province de Sindha et n’indiquent pas en vertu de quelle loi les poursuites ont été prises. La commission demande au gouvernement de fournir des informations concernant chacune des provinces ainsi que sur chacune des lois concernées. Elle demande également que le gouvernement fournisse des informations sur la mise en application des lois ayant pour but la répression du travail forcé ou obligatoire et sur les mesures prises pour assurer que les sanctions pénales soient adéquates et strictement appliquées, tel que requis par la convention. La commission exprime l’espoir que le gouvernement présentera ses commentaires en réponse aux questions soulevées dans les rapports communiqués par la CISL.

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