ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Rwanda (Ratification: 1962)

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Article 1 a) de la convention. Imposition de peines de prison comportant une obligation de travailler en tant que sanction pour la manifestation d’opinions politiques ou d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. 

Dans ses précédents commentaires, la commission avait rappelé que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire, y compris sous la forme de travail pénitentiaire obligatoire, en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou qui manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle avait noté que les personnes condamnées à une peine de prison ont l’obligation de travailler, conformément à l’article 39 du Code pénal et à l’article 40 de l’ordonnance no 111/127 du 20 mai 1961 relative à l’organisation pénitentiaire. La commission avait constaté à cet égard que les dispositions de la législation mentionnées ci-dessous permettaient d’incriminer et de sanctionner par une peine de prison des activités pouvant concourir à l’expression d’opinions politiques ou à la manifestation d’une opposition à l’ordre politique, social ou économique établi:

-         les articles 166 et 167 du Code pénal en vertu desquels peut être punie d’une peine d’emprisonnement toute personne qui, par des discours, des écrits ou des imprimés, excite ou tente d’exciter les populations contre les pouvoirs publics ou alarme les populations ainsi que toute personne qui attaque la force obligatoire des lois;

-         l’article 83 de la loi no 18/2002 du 11 mai 2002 régissant la presse, selon lequel sont complices des crimes ou délits prévus par le Code pénal et punis des peines prévues par ledit Code ceux qui, par voie de presse, incitent un auteur de ces crimes ou délits, si l’incitation a été suivie d’effet ou de tentative (ceci compte tenu des dispositions des articles 166 et 167 du Code pénal précitées);

-         l’article 46 de la loi no 16/2003 du 27 juin 2003 régissant les formations politiques et les politiciens, en vertu duquel, sans préjudice des dispositions pénales, quiconque crée ou dirige une formation politique en violation des dispositions de la loi sera puni d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende allant de 500 000 à 1 million de francs rwandais ou de l’une de ces peines seulement, et quiconque dirige ou se réclame d’une formation politique ayant poursuivi ses activités malgré sa suspension ou d’une formation politique qui s’est reconstituée après sa dissolution sera puni des mêmes peines.

Afin de pouvoir apprécier la portée de ces dispositions et leur incidence sur l’application de la convention, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur leur application dans la pratique ainsi que copie des jugements qui s’y réfèrent.

Dans son dernier rapport, le gouvernement indique que les copies des jugements qui auraient éventuellement été rendus ont été demandées à la Cour suprême et seront transmises dès leur réception. La commission prend note de cette information et réitère sa demande précédente. En effet, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions précitées sont nécessaires afin que la commission puisse apprécier leur portée et s’assurer que les actes permettant d’exprimer certaines opinions politiques ou de manifester une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, sans recours à la violence, ne sont pas sanctionnés par une peine de prison comportant du travail obligatoire.

Article 1 c). Imposition de travail forcé en tant que mesure de discipline du travail. 

Depuis de nombreuses années, la commission attire l’attention du gouvernement sur les dispositions de l’article 29 du décret du 1er avril 1983, portant réglementation du contrat d’engagement fluvial, et des articles 13 et 14 du décret du 11 mai 1921, portant Code disciplinaire et pénal de la navigation fluviale, qui sont contraires à cette disposition de la convention dans la mesure où elles permettent d’imposer aux marins des peines d’emprisonnement, comportant l’obligation de travailler, pour manquement à la discipline du travail. A cet égard, le gouvernement avait précédemment précisé qu’aucun cas d’emprisonnement de marin pour manquement à la discipline du travail ne s’était produit, ceci compte tenu du trafic presque inexistant sur le lac Kivu. Dans son dernier rapport, le gouvernement confirme l’absence d’emprisonnement et de jugement rendu en la matière, et indique que les dispositions en question sont caduques et qu’une nouvelle législation tenant compte des réalités actuelles devra être mise sur pied. Compte tenu de ces informations, la commission veut croire que le gouvernement ne manquera pas de prendre les mesures nécessaires pour modifier ou abroger ces dispositions de manière à s’assurer qu’aucune peine de prison comportant du travail obligatoire ne sera imposable aux marins en cas de manquement à la discipline du travail.

Article 1 d). Imposition de peines de prison comportant une obligation de travailler en tant que punition pour avoir participé à des grèves. 

1. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté qu’en vertu de l’article 191 du Code du travail (loi no 51/2001 du 30 décembre 2001) le droit de grève des travailleurs occupant des emplois indispensables au maintien de la sécurité des personnes et des biens et des travailleurs occupant des emplois dont l’arrêt compromettrait la sécurité et les vies humaines s’exerce selon les modalités fixées par arrêté du ministre ayant le travail dans ses attributions. Elle avait demandé au gouvernement de communiquer copie de cet arrêté. Dans son rapport, le gouvernement indique que l’arrêté est en cours de préparation, mais qu’il n’a pas encore été adopté. La commission prie le gouvernement de communiquer copie de ce décret dès qu’il aura été adopté afin qu’elle puisse examiner sa conformité avec la convention.

2. La commission avait également demandé au gouvernement d’indiquer la nature des peines encourues par les travailleurs poursuivis en justice par leur employeur, en vertu de l’article 190 du Code du travail, lequel permet à l’employeur d’intenter une action en justice contre les travailleurs ayant participé à une grève considérée comme illégale par l’autorité compétente. Elle avait à cet égard noté les préoccupations exprimées par l’Association des syndicats chrétiens (UMURIMO) selon lesquelles il était presque impossible d’aboutir à une grève légale, dans la mesure où, d’une part, la procédure de règlement des conflits collectifs prévue dans le Code du travail était très lourde et, d’autre part, l’arrêté ministériel visant à mettre en place le conseil de conciliation prévu à l’article 183 du Code du travail n’avait toujours pas été adopté.

Dans son rapport, le gouvernement confirme qu’aucun jugement n’a été rendu suite à une action intentée par un employeur contre un travailleur ayant participé à une grève considérée comme illégale par l’autorité compétente. Il souligne la nécessité de préciser la nature des peines encourues par les grévistes dans le cadre d’une action intentée à leur encontre en vertu de l’article 190 du Code du travail, et indique qu’à l’occasion de la future révision du Code du travail, une solution sera trouvée. La commission prend note de ces informations. Elle relève par ailleurs que, dans ses commentaires sur l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, elle a considéré que la juxtaposition des articles 183 et 189 du Code du travail semble constituer une forme d’arbitrage obligatoire restreignant de manière excessive le droit de grève des organisations syndicales. Compte tenu de ces restrictions, une grève pourrait très facilement être considérée comme étant illégale par l’autorité compétente.

La commission espère qu’à l’occasion de la révision du Code du travail à laquelle il se réfère le gouvernement examinera la question des peines encourues, suite à une action intentée contre les travailleurs en vertu de l’article 190 du Code du travail, à la lumière de l’article 1 d) de la convention en vertu duquel aucune forme de travail forcé - y compris sous la forme de travail pénitentiaire obligatoire - ne peut être imposée en tant que punition pour avoir participé à des grèves.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer