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Observation (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Sénégal (Ratification: 1960)

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La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que de sa réponse aux commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datés du 31 août 2005.

La commission note également les commentaires de la CISL en date du 10 août 2006, ainsi que des commentaires de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (CNES), la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS) et l’Union nationale des syndicats autonomes du Sénégal (UNSAS) transmis par le gouvernement le 26 octobre 2006, qui se réfèrent à des questions d’ordre législatif ou d’application pratique de la convention déjà soulevées par la commission. La CISL souligne également que les travailleurs du secteur agricole et du secteur informel ne sont pas couverts par le Code du travail, y compris du point de vue des droits syndicaux, et que des travailleurs grévistes des industries minières et du ciment ont fait l’objet de représailles. La commission prie le gouvernement de communiquer dans son prochain rapport ses observations à ce sujet.

Article 2 de la convention. Droit syndical des mineurs. La commission souligne depuis plusieurs années que l’article L.11 du Code du travail (dans sa teneur modifiée en 1997), qui prévoit que les mineurs âgés de plus de 16 ans peuvent adhérer aux syndicats sauf opposition de leur père, mère ou tuteur, n’est pas conforme à l’article 2 de la convention.

Le gouvernement dans son rapport précise qu’une telle mesure vise uniquement à protéger le jeune travailleur de moins de 18 ans contre d’éventuels abus ou privations de droits de la part du syndicat, mais que tout sera mis en œuvre pour modifier la législation nationale conformément aux dispositions de la convention. Rappelant que les organisations de travailleurs ont pour but de défendre les intérêts de leurs membres, la commission prend note de ces informations et prie le gouvernement de la tenir informée de toute mesure prise ou envisagée afin de garantir le droit syndical aux mineurs ayant accès au marché du travail, tant comme travailleurs que comme apprentis, sans que l’autorisation parentale soit nécessaire.

Articles 2, 5 et 6. Droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix sans autorisation préalable. Faisant référence à ses commentaires précédents concernant la nécessité d’abroger la loi no 76-28 du 6 avril 1976 et de modifier l’article L.8 du Code du travail (dans sa teneur modifiée en 1997) afin de garantir aux travailleurs et aux organisations de travailleurs le droit de constituer des organisations de leur choix sans autorisation préalable, la commission note que, selon le gouvernement, l’autorisation gouvernementale vise non pas à limiter le droit syndical mais uniquement à permettre à l’Etat d’exercer un contrôle sur la moralité et la capacité des personnes chargées de la direction et de l’administration d’un syndicat, ainsi que d’obtenir des statistiques précises sur le nombre de syndicats existants. Le gouvernement précise que, si le récépissé de l’existence légale d’un syndicat devait être refusé, ce refus se fonderait sur la seule moralité et la capacité juridique des dirigeants du syndicat et non sur un autre motif. Le gouvernement déclare néanmoins étudier la manière de modifier le Code du travail et d’abroger toute disposition législative et réglementaire contraire à la convention dans les plus brefs délais. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement adoptera des mesures afin d’abroger les dispositions législatives qui restreignent la liberté des travailleurs de former leurs propres organisations, particulièrement les dispositions concernant la moralité et la capacité des dirigeants syndicaux. Elle demande au gouvernement de la tenir informée de toute modification législative adoptée en la matière.

Article 3. Réquisition. La commission souligne depuis plusieurs années que l’article L.276 confère aux autorités administratives de larges pouvoirs de réquisition des travailleurs des entreprises privées et des services et établissements publics qui occupent des emplois indispensables à la sécurité des personnes et des biens, au maintien de l’ordre public, à la continuité des services publics ou à la satisfaction des besoins essentiels de la nation. La commission souligne qu’à maintes reprises elle a rappelé que le recours à ce genre de mesures devait se limiter exclusivement au maintien des services essentiels au sens strict du terme (dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne) aux fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou aux cas de crise nationale aiguë. A cet égard, la commission avait prié le gouvernement de communiquer le décret d’application de l’article L.276 contenant la liste des services essentiels, afin de s’assurer de sa compatibilité avec les dispositions de la convention.

La commission note d’après les informations fournies par le gouvernement que le décret d’application de l’article L.276 n’ayant pas encore été adopté, c’est le décret no 72-017 du 11 janvier 1972 fixant la liste des postes, emplois ou fonctions dont les occupants peuvent faire l’objet de réquisitions qui continue à s’appliquer en vertu de l’article L.288 du Code du travail. Selon le gouvernement, l’objet de la réquisition concerne aussi bien les travailleurs des secteurs public que privé qui occupent des emplois indispensables à la sécurité des personnes et des biens, au maintien de l’ordre public, à la continuité des services publics ou à la satisfaction des besoins essentiels de la nation. La commission note cependant que le décret en question prévoit la réquisition des travailleurs en cas de grève pour de nombreux postes, emplois ou fonctions auxquels ne s’applique pas la définition des services essentiels au sens strict du terme (c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne). Considérant dans ces conditions que le recours au remplacement des grévistes porte sérieusement atteinte au droit de grève et entrave le libre exercice des droits syndicaux, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour que le décret d’application de l’article L.276 du Code du travail n’autorise la réquisition des travailleurs que pour assurer le fonctionnement des services essentiels au sens strict du terme.

En outre, la commission avait noté dans ses commentaires antérieurs que, en vertu de l’article L.276 in fine, l’occupation des locaux ou des abords immédiats ne peut avoir lieu pendant l’exercice du droit de grève, sous peine de sanctions prévues aux articles L.275 et L.279. La commission note que, selon le gouvernement, les dispositions relatives à la non-occupation des lieux et des alentours n’ont pas d’autre objet que de garantir la sécurité publique en cas de grève non pacifique. Tout en prenant note de ces informations, la commission estime qu’il serait préférable d’inclure une disposition expresse, par voie législative ou réglementaire, prévoyant que les restrictions prévues à l’article L.276 in fine ne s’appliquent que dans les cas où les grèves perdraient leur caractère pacifique.

Article 4. Dissolution par voie administrative. Enfin, la commission rappelle depuis plusieurs années la nécessité de modifier la législation nationale afin de protéger les organisations syndicales contre la dissolution par voie administrative (loi no 65-40 du 22 mai 1965), conformément à l’article 4 de la convention. La commission avait relevé que l’article L.287 du Code du travail n’abrogeait pas expressément les dispositions relatives à la dissolution administrative prévue par la législation de 1965. La commission note les informations fournies par le gouvernement selon lesquelles ce dernier étudie la manière de modifier ou compléter le Code du travail en vue d’inclure dans la législation nationale une disposition expresse prévoyant que la dissolution des associations séditieuses prévue par la loi no 65-40 ne peut en aucune façon s’appliquer aux organisations syndicales professionnelles. La commission prie le gouvernement de la tenir informée de toute modification législative adoptée en la matière.

La commission exprime à nouveau le ferme espoir que les mesures nécessaires pour donner pleinement effet aux dispositions de la convention seront prises dans un très proche avenir et prie le gouvernement de la tenir informée à ce sujet.

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