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Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Mali (Ratification: 2000)

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La commission prend note du rapport du gouvernement. La commission prend bonne note des informations communiquées par le gouvernement sur les mesures qu’il a prises dans le cadre du projet OIT/IPEC/LUTRENA pour interdire et éliminer la vente et de la traite des enfants, en particulier les activités de sensibilisation et de formation sur la traite des enfants, notamment par les débats éducatifs et la projection de films.

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa a). Toutes les formes d’esclavage ou de pratiques analogues. 1. Vente et traite d’enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que le gouvernement avait indiqué au Comité des droits de l’enfant que des enfants maliens étaient amenés en Côte d’Ivoire pour travailler dans des plantations ou comme domestiques et qu’ils étaient soumis à des conditions de travail déplorables, souvent non rémunérés. Certains groupes ethniques, tels les Bambara, Dogon et Sénoufo, étaient particulièrement vulnérables. La commission avait en outre noté les efforts déployés par le gouvernement pour lutter contre la traite d’enfants mais avait constaté que, malgré tous ces efforts, le Comité des droits de l’homme s’était dit préoccupé par la traite d’enfants maliens vers les pays de la région, notamment la Côte d’Ivoire, et leur soumission à l’esclavage et au travail forcé (document CCPR/CO/77/MLI, 16 avril 2003, paragr. 17). La commission avait constaté que la traite des enfants constituait toujours un problème dans la pratique, et ce bien qu’elle ait été interdite par l’article 244 du Code pénal et l’article 63 du Code de la protection de l’enfant.

La commission note que, selon le rapport de l’UNICEF publié en 2006 et intitulé «La traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre», les enfants maliens sont victimes de traite dans les pays suivants: Côte d’Ivoire, Gambie, Guinée, Ghana et Nigéria. La commission observe à nouveau que, bien que le gouvernement ait pris plusieurs mesures afin de lutter contre la vente et la traite d’enfants à des fins d’exploitation de leur travail, le problème existe toujours dans la pratique. Elle exprime à nouveau sa vive préoccupation sur la situation des enfants victimes de traite dans le pays et encourage le gouvernement à redoubler d’efforts pour améliorer la situation et à prendre, dans les plus brefs délais, les mesures nécessaires pour éliminer la traite des enfants à des fins d’exploitation de leur travail. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’application des dispositions de la législation nationale sur la traite dans la pratique, en communiquant notamment des statistiques sur le nombre et la nature des infractions signalées, les enquêtes menées, les poursuites, les condamnations et les sanctions pénales appliquées.

2. Travail forcé ou obligatoire.Mendicité. La commission note que, selon le rapport de l’UNICEF de 2006 «La traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre», dans les rues de Dakar, par exemple, on trouve des garçons talibés originaires des pays frontaliers, dont le Mali, que des maîtres coraniques (marabouts) ont amené en ville. Ces enfants se retrouvent dans des conditions de servitude, obligés de mendier quotidiennement. L’étude mentionne également l’implication de marabouts dans la traite des enfants aux fins d’exploitation de jeunes travailleurs burkinabès talibés dans les rizières du Mali. Ces enfants sont placés auprès de grands exploitants qui reversent leur salaire aux marabouts. La commission note également que, dans ses observations finales de mai 2007 (document CRC/C/MLI/CO/2, paragr. 62), le Comité des droits de l’enfant a noté les efforts faits par le Mali pour réduire la mendicité infantile, en mettant en place, notamment, des programmes de formation professionnelle à leur intention. Il s’est toutefois dit profondément préoccupé par le nombre élevé, et croissant, d’enfants vivant dans la rue ou s’adonnant à la mendicité parmi lesquels certains, appelés garibous, sont des élèves sous la garde des marabouts. Le comité s’est dit également préoccupé par leur vulnérabilité à l’égard, entre autres, de toutes les formes de violence, d’exploitation et de sévices sexuels ainsi que d’exploitation économique.

La commission note que l’article 62 du Code de protection de l’enfant définit la mendicité comme étant une activité exercée à titre exclusif ou principal qui revêt un caractère déshumanisant et s’oppose à la réalisation des droits de l’enfant. La commission note également que l’article 183 du Code pénal dispose que la personne qui aura incité à la mendicité un enfant mineur sera punie de trois mois à un an d’emprisonnement. La commission se dit très préoccupée de «l’instrumentalisation» des enfants à des fins purement économiques, à savoir le fait d’utiliser les enfants à des fins d’exploitation de leur travail, par certains marabouts. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour appliquer la législation nationale sur la mendicité et punir les marabouts qui utilisent les enfants à des fins purement économiques. En outre, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures efficaces prises dans un délai déterminé pour protéger ces enfants contre le travail forcé et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale.

Article 5. Mécanisme de surveillance. 1. Comités de vigilance. La commission note les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles, dans le cadre de la mise en œuvre du projet LUTRENA, des comités locaux de vigilance contre la traite des enfants ont été créés dans les cercles de Kangala (région de Koulikoro), Bougouni, Kolondiéba et Koutiala (région de Sikasso) alors que d’autres comités ont été renforcés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les activités de ces comités de vigilance, notamment au moyen d’extraits de rapports ou de documents, ainsi que les résultats obtenus par ces comités pour prévenir la traite des enfants de moins de 18 ans.

2. Equipe spéciale nationale sur la traite des enfants. La commission note que, selon les rapports d’activité de l’OIT/IPEC sur le projet LUTRENA, une Equipe spéciale nationale sur la traite des enfants a été formée. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur le fonctionnement de cette équipe spéciale en fournissant des rapports de ses activités.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. La commission note avec intérêt les efforts du gouvernement quant à la mise en œuvre du projet OIT/IPEC/LUTRENA. Elle note particulièrement que, selon les rapports d’activité de ce projet, depuis ses débuts en 2001, plus de 26 730 enfants ont bénéficié de celui-ci. De ce nombre, 14 790 enfants ont été retirés de cette pire forme de travail des enfants et 11 940 ont été empêchés d’y être engagés. Elle note également que, entre septembre 2006 et mars 2007, 92 enfants victimes de la traite ont été retirés de cette pire forme de travail des enfants et ont bénéficié de services d’éducation ou de formation.

Alinéas a) et b). Empêcher que les enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et aider à les soustraire de ces pires formes de travail. 1. Vente et traite des enfants. Se référant à ses commentaires précédents, la commission prend bonne note des informations communiquées par le gouvernement concernant la mise en œuvre du projet LUTRENA dans le pays. Elle note particulièrement que, dans le cadre de ce projet, plus de 3 830 enfants, dont 1 851 filles et 1 979 garçons, ont été réinsérés à travers l’éducation formelle ou informelle, la formation professionnelle et les activités génératrices de revenus. Elle note également que trois centres d’accueil et de transit pour les enfants victimes de traite ont été créés à Sikasso, Sögou et Mopti. En outre, la commission note que des activités génératrices de revenus ont été prises au profit de 30 enfants et de 1 076 parents, dont 422 femmes et 654 hommes. Finalement, elle note que plus de 1 500 personnes des relais sociaux travaillent à identifier les enfants et les éventuels trafiquants d’enfants, à prévenir les services de sécurité concernant les personnes suspectes, ainsi qu’à informer les parents et les enfants sur les modalités de voyage des enfants en dehors du pays. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises dans le cadre de la mise en œuvre du projet LUTRENA pour empêcher que les enfants de moins de 18 ans ne soient victimes de vente ou de traite et pour soustraire les enfants de cette pire forme. En outre, elle prie le gouvernement de fournir des informations sur: 1) le nombre et l’emplacement des centres d’accueil des enfants victimes de la traite qui ont été créés dans le pays afin de recueillir les enfants victimes de la traite; et 2) les programmes de suivi médico-social spécifique élaborés et mis en œuvre en faveur des enfants victimes de traite.

2. Accès à l’éducation de base gratuite. La commission avait noté avec intérêt que le gouvernement avait mis en place le Programme décennal de développement de l’éducation (PRODEC) dont l’objectif était d’augmenter le taux de scolarisation au niveau primaire à 95 pour cent d’ici à 2010, tout en améliorant les niveaux d’apprentissage, d’éducation des filles, de santé et d’hygiène. La commission note les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles un cadre de dépenses à moyen terme (CDMT) a été prévu et devrait permettre d’accroître les capacités de pilotage du PRODEC en liaison avec les objectifs du cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP) et les objectifs du Millénaire (OMD). Elle note également les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles des résultats appréciables ont été réalisés en matière de scolarisation des filles, d’éducation informelle, d’éducation spécialisée et d’allocation de fonds destinés à l’éducation. De plus, 1 880 enseignants ont été recrutés pour les deux cycles de l’enseignement primaire et des manuels scolaires ont été achetés et distribués.

La commission note toutefois que, selon le rapport d’enquête nationale sur le travail des enfants réalisé en 2005, 41 pour cent des enfants de 5 à 14 ans exercent une activité économique à plein temps, 25 pour cent combinent le travail et les études et 17 pour cent vont uniquement à l’école. Le taux net de scolarisation au premier cycle (7-12 ans) pour 2004-05 est de 56,7 pour cent, à savoir 48,9 pour cent chez les filles et 64,8 pour cent chez les garçons, alors que celui pour le second cycle (13-15 ans) est de 20,6 pour cent, à savoir 15,4 pour cent chez les filles et 26 pour cent chez les garçons. La commission note également que le Comité des droits de l’enfant, dans ses observations finales de mai 2007 (document CRC/C/MLI/CO/2, paragr. 60), s’est dit préoccupé par les forts taux d’analphabétisme parmi les enfants, le bas niveau de qualification et le faible nombre des enseignants, le grand nombre d’élèves par enseignant, le nombre insuffisant d’installations adéquates, les forts taux d’abandon et de redoublement scolaires, en particulier chez les filles, le manque d’information sur la formation professionnelle et le type d’enseignement dispensé dans les écoles coraniques. Malgré les efforts réalisés par le gouvernement, la commission se dit profondément préoccupée par la persistance des faibles taux de scolarisation. Considérant que l’éducation contribue à prévenir l’engagement des enfants dans les pires formes de travail des enfants, la commission encourage fortement le gouvernement à redoubler d’efforts afin d’améliorer le fonctionnement du système éducatif, notamment en augmentant le taux d’inscription scolaire et en diminuant le taux d’abandon scolaire, en particulier chez les filles, ainsi qu’en adoptant des mesures pour intégrer les écoles coraniques à l’éducation nationale. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les résultats obtenus.

Article 8. Coopération. 1. Coopération régionale. Se référant à ses commentaires précédents, la commission note que le gouvernement a signé des accords de coopération bilatéraux sur la traite transfrontalière des enfants avec le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée et le Sénégal. Elle note également que, outre l’Accord multilatéral de coopération en matière de lutte contre la traite des enfants en Afrique de l’Ouest signé en juillet 2005, le Mali a également signé l’Accord multilatéral de coopération d’Abuja en 2006. La commission note les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles des patrouilles de brigades mobiles de la sécurité ont effectué des rondes dans les régions frontalières entre le Mali et le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et le Sénégal. En outre, elle note que, selon les rapports d’activité de l’OIT/IPEC de 2007 sur le projet LUTRENA, les commissions permanentes responsables de la surveillance des accords bilatéraux entre le Mali et le Burkina Faso et le Mali et la Guinée se sont rencontrées en novembre 2006. Ces commissions ont notamment recommandé: la tenue de campagnes de sensibilisation autour des deux côtés des régions frontalières endémiques, l’adoption de documents de voyage identiques et le développement d’un manuel de procédures pour le rapatriement commun et les mesures de réhabilitation. La commission prie le gouvernement d’indiquer si, dans le cadre de la mise en œuvre de ces accords, des échanges d’informations avec les autres pays signataires ont permis: 1) d’appréhender et d’arrêter des personnes œuvrant dans des réseaux s’adonnant à la traite d’enfants; et 2) de détecter et d’intercepter les enfants victimes de traite autour des frontières.

2. Réduction de la pauvreté. La commission note les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles un CSLP a été adopté. La problématique du travail des enfants y est prise en compte au titre des questions transversales, l’intégrant dans le cadre global de l’amélioration de la situation des enfants et du rôle de la famille. Notant que les programmes de réduction de la pauvreté contribuent à briser le cycle de la pauvreté, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises dans le cadre de la mise en œuvre du CSLP pour éliminer les pires formes de travail des enfants, particulièrement en ce qui concerne la réduction effective de la pauvreté parmi les enfants victimes de la vent, de la traite et de la mendicité forcée.

La commission adresse par ailleurs une demande directe au gouvernement sur certains autres points.

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