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Observation (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

Convention (n° 81) sur l'inspection du travail, 1947 - Luxembourg (Ratification: 1958)

Autre commentaire sur C081

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La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas de réponse à ses commentaires antérieurs. Elle se voit donc obligée de renouveler ses précédents commentaires.
Répétition
La commission prend note du rapport du gouvernement pour la période s’achevant le 30 juin 2010, ainsi que des rapports annuels de l’Inspection du travail et des mines (ITM) pour 2007, 2008 et 2010 reçus au BIT le 21 avril 2011. Elle note la publication, via le site Internet de l’ITM http://www.itm.lu/itm-rapport annuel, du rapport annuel à compter de celui concernant 2004, ce qui permet d’apprécier l’évolution du fonctionnement de l’inspection du travail dans chaque domaine.
La commission prend note également de l’inclusion, dans le rapport annuel, du Code de déontologie de l’inspection du travail, adopté le 11 juin 2008 et présenté comme un document visant à permettre à l’Inspection du travail et des mines, en tant qu’organisation, et à son personnel d’appliquer des normes de qualité dans le domaine de la conduite professionnelle et éthique.
De même, la commission prend note de la mise en place du «Help center» de l’ITM en octobre 2009. Il s’agit d’un service informatique national de conseil et d’assistance ayant pour but de répondre à toutes les questions que peuvent se poser les salariés, ainsi que les employeurs sur la législation nationale. Suivant les informations contenues dans le rapport annuel d’inspection pour 2010, le Help center accessible, via le portail Internet www.guichet.lu, a déjà permis aux membres de l’inspectorat du travail, qui agissent de manière déconcentrée à partir des agences régionales, de se concentrer sur l’accueil des usagers ainsi que sur les enquêtes en entreprises.
Articles 3, paragraphe 1 a), et 5 de la convention. Modalités de contrôle des conditions de travail des travailleurs détachés. La commission relève que le Code du travail, adopté en vertu de la loi du 31 juillet 2006, a été modifié notamment par l’inclusion des nouvelles dispositions objet de la loi du 21 décembre 2007 portant réforme de l’Inspection du travail et des mines. Le Code du travail dans sa nouvelle teneur est entré en vigueur le 13 juin 2011.
La commission note la modification de l’article 142-3 du code en vertu duquel les entreprises étrangères ayant des activités au Luxembourg sans y avoir d’établissement stable et y employant un ou plusieurs travailleurs sont désormais tenues de fournir à l’ITM, dans les plus brefs délais (et non plus à la demande de cette dernière, comme c’était le cas sous l’ancienne disposition), les documents visés à l’article 142-2 et concernant l’entreprise et les travailleurs y occupés. La commission croit comprendre que cette modification législative donnera à l’ITM la possibilité de contrôler les conditions de travail des salariés concernés dès le démarrage des activités menées par l’entreprise sur le territoire, et de faire ainsi échec aux éventuelles tentatives d’abus au détriment de travailleurs employés pour de courtes durées.
La commission relève toutefois dans le rapport annuel de l’ITM pour 2010, que 30 injonctions de mise en conformité avec le nouvel article 142-3 ont été délivrées, dont neuf par les agents du Bureau luxembourgeois de liaison détachement (BLLD) (entité résultant de la fusion du Service détachement et travail illégal (SDTI) et du Bureau de liaison luxembourgeois), et 21 par les agents de l’administration des accises. Le BLLD assume une fonction motrice et organisatrice dans le cadre de la Cellule inter-administrative de lutte contre le travail illégal (CIALTI), structure à géométrie variable non institutionnalisée, capable de mobiliser des agents issus de six à huit ministères ou administrations, et contribue ainsi activement, selon le rapport annuel, aux actions dites «coup de poing» organisées sur des chantiers ou dans des entreprises déjà évoquées dans les commentaires antérieurs de la commission. En 2010, 17 actions de contrôle en matière de «travail clandestin organisé» pendant les week-ends et trois actions «after-work», c’est-à-dire entre 17 heures et 21 heures, ont été effectuées. Les contrôles ont porté sur le travail clandestin ainsi que sur les heures supplémentaires. Le rapport annuel signale par ailleurs que, dans le cadre des activités de la division ASCAB de l’Administration des douanes et accises menées en coopération avec l’ITM, 792 contrôles ont eu lieu au cours desquels 204 infractions ont été constatées et sanctionnées. Quarante-huit sanctions ont été prononcées pour travail clandestin, et huit procès-verbaux ont été dressés pour infraction à la législation relative au détachement. La commission note, par ailleurs, que la coopération transfrontalière à laquelle participe le BLLD a pour objectif de combattre efficacement les nombreuses variantes, sans cesse plus ingénieuses, de travail illégal, et de contribuer concrètement à une mission de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles des travailleurs migrants.
La commission demande au gouvernement de préciser le rôle des agents de contrôle de l’ITM dans la préparation et le déroulement des actions dites «coup de poing».
Se référant à ses commentaires formulés en 2007 et réitérés en 2010, et constatant que le gouvernement n’a pas fourni les informations demandées au sujet de la situation des travailleurs étrangers trouvés en situation irrégulière au cours des contrôles, notamment en ce qui concerne la protection des droits découlant de leur qualité de salariés pendant leur période effective d’emploi, la commission le prie de fournir ces informations.
La commission prie le gouvernement de préciser de quelle manière la coopération transfrontalière en matière de contrôle du détachement des travailleurs participe à une mission de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles des travailleurs migrants.
Articles 2 et 3. Champ d’application de la convention et attributions du personnel d’inspection du travail. En vertu de l’ancien article L.611-1 du Code du travail, «sans préjudice d’autres attributions qui lui ont été réservées par les dispositions légales, réglementaires ou administratives, l’Inspection du travail et des mines est chargée notamment: 1) d’assurer l’application des dispositions légales, réglementaires, administratives et conventionnelles relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs salariés dans l’exercice de leur profession, telles que les dispositions relatives à la durée du travail, aux salaires, à la sécurité, à l’hygiène et au bien-être, à l’emploi des enfants et des adolescents, à l’égalité de traitement entre femmes et hommes, à la protection contre le harcèlement sexuel à l’occasion des relations de travail, et d’autres matières connexes, dans la mesure où le personnel de l’Inspection du travail et des mines est chargé d’assurer l’application desdites dispositions [...]». Cette disposition était en pleine conformité avec les articles 2 et 3, paragraphe 1, de la convention en ce qui concerne le champ d’application de la convention et les attributions du système d’inspection du travail (centrés sur les conditions de travail et la protection des travailleurs).
La commission relève que, aux termes du nouveau texte sur la question (art. 612-1 du code), l’Inspection du travail et des mines est chargée notamment de veiller et de faire veiller à l’application de la législation «dont notamment» les conditions de travail et la protection des salariés, ce qui, du moins dans la lettre, relègue au plan secondaire du champ de compétence de l’inspection du travail les missions de l’inspection du travail telles que définies par l’article 3, paragraphe 1, de la convention. Elle constate que les agents de l’inspection du travail sont chargés, outre des fonctions définies par l’article 3, d’un certain nombre d’autres fonctions de contrôle n’ayant pas de rapport avec celles-ci, telles notamment la surveillance et le suivi de la mise sur le marché et de l’utilisation de produits dans le pays (ascenseurs, appareils sous pression en général, appareils à gaz, appareils de levage), qui mobilisent une grande part des ressources humaines et moyens logistiques de l’institution.
Dans son étude d’ensemble de 2006 sur l’inspection du travail, la commission a rappelé et souligné que les fonctions d’inspection (contrôle des dispositions légales visées par l’article 3, paragraphe 1; fourniture d’informations et conseils techniques aux employeurs et aux travailleurs ainsi qu’à leurs organisations; contribution à l’amélioration de la législation pertinente) sont complexes et requièrent une formation, du temps, des moyens et une grande liberté d’action et de mouvement (paragr. 69). Elle souligne à nouveau à l’attention du gouvernement que, suivant l’article 3, paragraphe 2, de la convention, si d’autres fonctions sont confiées aux inspecteurs du travail, celles-ci ne devraient pas faire obstacle à l’exercice de leurs fonctions principales ni porter préjudice d’une manière quelconque à l’autorité ou à l’impartialité nécessaires aux inspecteurs dans leurs relations avec les employeurs et les travailleurs. La commission invite, en conséquence, le gouvernement à prendre les mesures nécessaires visant à rétablir sur une base légale le système d’inspection du travail dans ses fonctions principales définies aux articles 2 et 3, paragraphe 1, de la convention et à fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées à cette fin.
Elle prie le gouvernement d’indiquer en outre la proportion du temps et des moyens dévolus par les agents d’inspection du travail à l’exercice des autres fonctions au regard du temps et des moyens dévolus à celles définies à l’article 3, paragraphe 1.
Article 12, paragraphe 1. Portée du droit d’entrée des inspecteurs dans les établissements assujettis à leur contrôle. La commission constate que, aux termes de l’article L.614-3.(1) alinéa 1 du nouveau code, «S’il existe des indices suffisants ou des motifs légitimes de considérer qu’un contrôle du respect des dispositions légales soumises à la compétence de l’Inspection du travail et des mines s’impose dans les chantiers, établissements et immeubles ainsi que leurs dépendances respectives, les membres de l’inspectorat du travail doivent y avoir accès librement et sans avertissement préalable, ceci à toute heure du jour et de la nuit. Les actions de contrôle ou de perquisition entreprises sur place respecteront le principe de proportionnalité par rapport aux motifs invoqués.» La commission note que cette disposition marque une régression au regard de la législation nationale antérieure. En effet, suivant l’article 13 (1) de la loi du 4 avril 1974 portant réorganisation de l’Inspection du travail et des mines, conforme à l’article 12, paragraphe 1 a), de la convention, avait été reconduit par l’article 612-1 (1) de la loi du 31 juillet 2006, prévoyait que «le personnel d’inspection et de contrôle muni de pièces justificatives de ses fonctions est autorisé: 1) à pénétrer librement sans avertissement préalable […]».
La commission estime que la subordination des visites d’inspection par le nouveau code à l’existence d’indices suffisants ou de motifs légitimes limite de manière contraire à la convention la portée du droit d’entrée des inspecteurs du travail dans les établissements et lieux de travail assujettis. L’unique condition à ce droit devrait résider, suivant l’article 12, paragraphe 1, dans l’obligation pour les inspecteurs d’être munis de pièces justificatives de leurs fonctions. L’assujettissement d’un établissement ou d’un lieu de travail est une raison suffisante en soi au plein exercice de ce droit qui permet par ailleurs une application efficace de l’article 16, en vertu duquel «les établissements devront être inspectés aussi souvent et aussi soigneusement qu’il est nécessaire pour assurer l’application effective des dispositions légales […]». La commission voudrait souligner par ailleurs que la reconnaissance aux inspecteurs d’un droit de libre entrée tel que défini par la convention permet en outre aux inspecteurs du travail de garantir le respect de leur obligation de confidentialité quant à la source de toute plainte mais également quant à un lien éventuel entre la visite et une plainte (article 15 c)).
La commission prie, en conséquence, le gouvernement de prendre des mesures visant à rétablir dans la législation le droit d’entrée des inspecteurs du travail dans les lieux de travail et établissements assujettis dans toute la mesure prévue à l’article 12, paragraphe 1 a), de la convention et d’indiquer les mesures prises à cet effet.
La commission rappelle qu’elle soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
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