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Observation (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Maroc (Ratification: 2001)

Autre commentaire sur C182

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Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéas a) et d). Travail forcé ou obligatoire et travail dangereux. Travail domestique des enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté les indications de la Confédération syndicale internationale (CSI) selon lesquelles le travail domestique des enfants, dans des conditions de servitude, est courant dans le pays, des parents vendant leurs enfants, parfois âgés de 6 ans seulement, pour qu’ils travaillent comme domestiques. La CSI avait également indiqué qu’environ 50 000 enfants, majoritairement des filles, travaillaient comme domestiques dans la ville de Casablanca. La commission avait noté que l’article 10 du Code du travail interdit le travail forcé et qu’en vertu de l’article 467-2 du Code pénal le travail forcé des enfants de moins de 15 ans est interdit. Elle avait également noté qu’un projet de loi sur le travail domestique avait été élaboré en juin 2011 mais que l’instauration d’un nouveau gouvernement avait retardé le processus de validation en entraînant le retrait du projet de loi du Parlement et une nouvelle soumission au Conseil du gouvernement en 2012 pour examen approfondi. Ce projet de loi fixe l’âge minimum d’admission à ce type d’emploi à 15 ans, établit les conditions de travail et prévoit les mesures de contrôle ainsi que les sanctions applicables allant jusqu’à des peines d’emprisonnement à l’encontre des employeurs occupant des enfants de moins de 15 ans. La commission avait également noté qu’une liste spécifique fixant les travaux dangereux interdits dans le secteur du travail domestique serait élaborée et adoptée en conjonction avec la future loi relative aux conditions d’emploi et de travail des salariés domestiques. Par ailleurs, la commission avait noté qu’une première enquête qualitative et quantitative sur les filles domestiques de moins de 18 ans avait été réalisée dans la région du Grand Casablanca, selon laquelle près de 23 000 jeunes filles âgées de moins de 18 ans travaillaient dans la région du Grand Casablanca en tant que domestiques, parmi lesquelles 59,2 pour cent ont moins de 15 ans. L’enquête a révélé qu’un nombre important de ces filles étaient soumises à des abus.
La commission note les informations du gouvernement selon lesquelles le projet de loi sur le travail domestique a été adopté par la Chambre des conseillers le 27 janvier 2015 et est actuellement devant la Chambre des représentants pour adoption finale. Le gouvernement indique que l’âge minimum retenu dans la version finale du projet de loi est de 16 ans. Le gouvernement indique également que la liste spécifique fixant les travaux dangereux interdits dans le secteur du travail domestique a été préparée et sera mise dans les circuits d’approbation après la promulgation du projet de loi susmentionné. Il indique que cette liste fera l’objet d’une consultation avec les partenaires sociaux. La commission note également l’information du gouvernement selon laquelle l’enquête nationale annuelle sur le travail réalisée par le Haut-Commissariat au plan en 2013 démontre que 86 000 enfants sont touchés par le travail des enfants, dont 6 000 par le travail domestique. La commission précise cependant que, selon cette même enquête, le nombre d’enfants touchés par le travail des enfants correspond à la tranche d’âge de 7 à 15 ans et ne couvre pas la totalité des enfants travailleurs. Le gouvernement indique en outre qu’une étude sur l’identification du travail inacceptable dans le travail domestique ménager a été réalisée avec l’OIT en 2013-14, dont les résultats seraient prévus au deuxième semestre de 2015 et envoyés lors du prochain rapport. Tout en prenant dûment note des récents avancements du processus d’adoption de la loi sur le travail domestique, la commission note cependant avec préoccupation que, dans ses observations finales du 14 octobre 2014 (CRC/C/MAR/CO/3-4, paragr. 64), le Comité des droits de l’enfant a constaté que les autorités n’ont pas pris suffisamment de mesures pour retirer les filles, dont certaines ont à peine 8 ans, des maisons dans lesquelles elles sont employées comme domestiques dans des conditions très précaires. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de s’assurer que ce projet de loi et cette liste de travaux dangereux seront adoptés de toute urgence. La commission prie également le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces pour lutter contre le travail domestique des enfants. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir les résultats de l’étude sur le travail domestique ménager. Dans la mesure du possible, toutes ces informations devraient être ventilées par sexe et par âge.
Article 3 a). Traite des enfants. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que le gouvernement n’avait pas de législation nationale sur la traite des enfants.
La commission note les observations finales du 14 octobre 2014, selon lesquelles le Comité des droits de l’enfant a noté avec préoccupation que le Maroc demeure un pays d’origine, de destination et de transit pour les enfants, surtout ceux originaires d’Afrique subsaharienne et d’Asie du Sud, qui sont soumis à un travail forcé, notamment en tant qu’employés domestiques, ainsi qu’à la traite à des fins d’exploitation sexuelle et à la mendicité forcée, deux tiers des victimes de la traite étant des enfants (CRC/C/MAR/CO/3-4, paragr. 68). La commission note en outre les informations contenues dans l’Etude sur la traite des femmes et des enfants au Maroc (2015) réalisée conjointement par ONU-Femmes, le Maroc et la Confédération suisse, qui précise l’existence du travail forcé des garçons dans l’artisanat et l’agriculture ainsi que la traite à des fins d’exploitation sexuelle dans la prostitution ou la pornographie (p. 97). La commission note enfin que, d’après le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, du 1er avril 2014 (A/HRC/26/37/Add.3, paragr. 25), un projet d’amendement au Code pénal relatif à la traite serait probablement en vigueur en 2015. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’adoption d’une loi couvrant l’interdiction de la traite des enfants et de fournir une copie de la loi une fois adoptée. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures développées pour lutter contre la traite des enfants, le nombre d’enfants victimes de la traite et le nombre de poursuites des auteurs de traite.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéas a) et b). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et les soustraire de ces pires formes et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Prostitution infantile et tourisme sexuel. Dans ses précédents commentaires, la commission s’était dite préoccupée par la persistance de la prostitution infantile et du tourisme sexuel impliquant de jeunes Marocains et immigrés, notamment des garçons, et ce malgré la modification du Code pénal de 2003 qui a introduit le crime de tourisme sexuel. Elle avait noté les informations du gouvernement selon lesquelles le fléau de l’exploitation sexuelle des enfants demeure invisible et méconnu au Maroc, raison pour laquelle le gouvernement ne ménage pas ses efforts. La commission avait aussi noté que cinq unités de protection de l’enfance (UPE) ont été mises en place depuis 2007, à Marrakech, Casablanca, Tanger, Meknès et Essaouira, pour assurer une meilleure prise en charge médicale, psychologique et légale des enfants victimes de violence ou de maltraitance, y compris les enfants victimes d’exploitation sexuelle ou économique, et dont des centaines d’enfants ont pu bénéficier.
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle le Plan d’action national pour l’enfance 2006-2015 (PANE) prévoit des mesures de protection spécifiques à l’exploitation sexuelle des enfants. Le gouvernement indique que, dans l’évaluation à mi-parcours du PANE en 2011, des acquis notables ont été enregistrés tels que la création de nouvelles structures publiques en matière de protection des enfants victimes de violences sexuelles, des cellules de prise en charge dans les tribunaux, dans les hôpitaux, des cellules d’écoute au niveau de la Direction générale de la sûreté nationale, des unités de protection de l’enfant, des cellules d’orientation et d’écoute dans les établissements scolaires, le téléphone vert ONDE et des espaces d’accueil aux enfants dans les commissariats. Le gouvernement indique également avoir élaboré une politique publique intégrée de protection de l’enfance en 2013 visant notamment la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle. Le gouvernement indique que, en 2010, les trois UPE de Casablanca, Marrakech et Tanger ont été entravées dans leur fonctionnement par le manque de statut juridique et que le MSFFDS a procédé à la mise en place de huit UPE à Sidi Kacem, Oujda, Tétouan, Agadir, Beni Mellal, Salé tout en veillant au redémarrage de l’UPE de Tanger et à l’appui de l’UPE de Casablanca. La commission prend également note de l’Etude sur la violence sexuelle à l’encontre des enfants au Maroc développée conjointement par le Conseil national des droits de l’homme, l’UNICEF et une ONG (étude «Violence sexuelle 2014»), selon laquelle l’exploitation sexuelle à des fins commerciales au Maroc demeure présente mais très peu documentée. La commission note que le gouvernement indique que cette étude servira à mieux orienter les actions futures. La commission note cependant que, selon l’étude sur la violence sexuelle susmentionnée, les UPE n’ont pas bénéficié du soutien nécessaire pour être efficaces (p. 70). La commission note finalement que, dans ses observations finales du 14 octobre 2014 (CRC/C/MAR/CO/3-4), le Comité des droits de l’enfant a exprimé sa préoccupation concernant l’expansion du tourisme sexuel (paragr. 40) ainsi que le fait qu’aucun budget n’a été prévu pour l’exécution du PANE et a regretté que l’évaluation du plan en 2011 n’a pas donné lieu au suivi requis (paragr. 12), ne pouvant ainsi pas répondre à la problématique de l’exploitation sexuelle. Tout en prenant bonne note des efforts du gouvernement, la commission le prie instamment de prendre des mesures immédiates et efficaces pour lutter contre l’exploitation sexuelle commerciale des enfants. La commission prie également le gouvernement de communiquer des informations sur la mise en œuvre du plan d’action national et de la politique publique intégrée de protection de l’enfance concernant l’exploitation sexuelle ainsi que des informations sur le nombre d’enfants qui sont prévenus ou retirés de la prostitution par le biais des UPE.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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