National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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Convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947 (ratification: 1952) - Convention (nº 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969 (ratification: 1981)
Informations écrites communiquées par le gouvernement
Le gouvernement a fourni par écrit les informations suivantes ainsi que le Rapport annuel sur la protection et la supervision dans le domaine de la législation du travail et de la législation sociale, 2023.
Les résultats des groupes de travail des projets «SU.PR.EME.» et «A.L.T. CAPORALATO!» de 2020 à 2022, et des activités de lutte contre l’exploitation au travail sont exposés dans le Rapport annuel sur la protection et la supervision dans le domaine de la législation du travail et de la législation sociale, 2023. Le document en question fait état de 1 206 travailleurs non ressortissants de l’UE sans titre de séjour régulier qui ont été identifiés sur des lieux de travail lors d’inspections. Au cours des inspections, des informations sont fournies aux travailleurs migrants sur leurs droits – en particulier en leur remettant le formulaire adopté en vertu du décret interministériel (ministère de l’Intérieur, ministère du Travail et des Politiques sociales et ministère de l’Économie et des Finances) visé à l’article 1, paragraphe 3, du décret législatif no 109/2012 – avec, aussi et surtout, le soutien de médiateurs culturels. Ces derniers expliquent le rôle de l’inspection et précisent – dans une langue que les intéressés comprennent – que, lorsqu’une situation d’exploitation au travail est constatée, l’employeur est considéré responsable et que les victimes peuvent accéder à des mécanismes de protection spécifiques. Comme indiqué dans le rapport, dans le cadre des actions menées dans la mise en œuvre des projets susmentionnés, 598 travailleurs ont été aidés par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM, parmi lesquels 239 ont obtenu un permis de séjour en tant que victimes d’exploitation au travail et/ou sont en attente d’un avis favorable du ministère public (ils étaient trois en 2018).
En ce qui concerne plus particulièrement la demande relative au nombre de permis de séjour délivrés dans des «cas spéciaux», les données du ministère de l’Intérieur, mises à jour en juin 2022, sur les permis de séjour délivrés à des fins de protection sociale et en cas d’exploitation grave au travail, sont fournies dans les tableaux 1 et 2 ci-dessous. Des données actualisées sont en cours d’examen. Ces données seront transmises dès que l’autorité compétente les aura communiquées. En outre, dans le cadre des projets susmentionnés, des brochures d’information multilingues (en italien, anglais, français, arabe, ourdou, pashto, bengali, hindi, pendjabi, chinois et roumain) ont été élaborées et distribuées, afin d’aider les travailleurs étrangers présents sur le territoire italien à prendre conscience de leur éventuelle situation d’exploitation et de les informer des possibilités de signalement et de secours. Il convient également de noter qu’à ce jour, dans six inspectorats territoriaux (Bari, Cuneo, Ferrare-Rovigo, Foggia, L’Aquila et Reggio de Calabre), des guichets multilingues ont été mis en place à titre expérimental pour recevoir les plaintes pour irrégularité et exploitation au travail émanant de ressortissants étrangers et, plus généralement, pour leur apporter une aide et des informations sur leurs droits. Dans ces cas aussi, grâce à la collaboration avec l’OIM, le formulaire de demande d’inspection, disponible en ligne sur le site de l’inspectorat, a été traduit en neuf langues (anglais, français, roumain, chinois, arabe, bengali, pendjabi, ourdou et ukrainien).
Il est également confirmé que, en vertu de leur faculté de formuler des avis de constat (article 12 du décret législatif no 124/2004), les inspecteurs assurent aux travailleurs migrants une protection appropriée qui comprend un volet économique. Cela leur permet de faire respecter immédiatement et librement les droits financiers. Tout en soulignant que, ces dernières années, le nombre de données sur l’utilisation effective de cet instrument est globalement en hausse, il convient de rappeler que le système d’enquête qui est utilisé ne permet pas de disposer d’informations détaillées sur les avis de constat, sur les recouvrements de cotisations et sur les montants financiers spécifiquement liés à l’identification de travailleurs dépourvus de permis de séjour. Quant au temps que les inspecteurs consacrent à la vérification de la régularité du séjour de travailleurs migrants, il semble tout à fait marginal. En effet, en application de la loi no 286/1998, les inspecteurs qui constatent l’emploi de migrants sans permis de séjour sont tenus de signaler cette situation à la police, et c’est la police, et non l’inspecteur du travail, qui est chargée d’identifier les étrangers en situation irrégulière et de les inculper du délit d’entrée et de séjour illégaux sur le territoire de l’État, conformément à l’article 10bis.
[Tableaux non reproduits: Protection sociale (article 18 du Texte unique sur l’immigration (TUI)); Exploitation grave au travail (article 22 du TUI)]
Discussion par la commission
Président – Le dernier cas inscrit à notre ordre du jour concerne l’application par l’Italie de la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, et de la convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969. J’invite le représentant gouvernemental de l’Italie à prendre la parole.
Représentant gouvernemental – Nous accueillons avec une bienveillance particulière l’occasion offerte à l’Italie de démontrer son attachement ferme et concret en faveur de la mise en œuvre complète des conventions nos 81 et 129. Les éléments et les informations qui vont être présentés aujourd’hui, devant cette commission, pour répondre aux questions directement posées à l’Italie, figurent déjà dans le document qui a été soumis au Bureau le 22 mai.
L’Italie s’est toujours engagée fermement et concrètement à combattre le travail irrégulier et l’exploitation au travail. Ainsi, comme vous le savez probablement, une agence nationale – Ispettorato Nazionale del Lavoro, INL – a vu le jour en 2015 et est chargée de coordonner les inspections du travail sur notre territoire national pour en accroître l’efficacité. Mais, cet après-midi, je souhaite vous informer qu’en décembre 2022, dans le cadre du Plan national de relance et de résilience, la ministre du Travail et des Politiques sociales a adopté le Plan national de lutte contre le travail non déclaré. Il s’agit du premier document national pertinent dans ce domaine qui a été rédigé lors d’une table ronde technique réunissant plusieurs parties prenantes, dont des chercheurs et des experts en la matière. Avant son adoption, le plan a aussi été présenté aux partenaires sociaux.
Au travers de ce plan, qui sera mis en œuvre en Italie au cours des trois prochaines années, de 2023 à 2025, le gouvernement s’engage à mener des actions concrètes et efficaces pour combattre et prévenir le phénomène du travail non déclaré dans tous les secteurs économiques. Plus particulièrement, et pour répondre à l’une de vos questions, un volet important du Plan national de lutte contre le travail non déclaré concerne le renforcement de la collecte et du partage de données statistiques pour mieux comprendre le phénomène du travail irrégulier, sous toutes ses formes, pour planifier de meilleures activités et pour accroître l’efficacité des inspections. Nous disposons donc d’une ligne d’action précise pour la collecte de données statistiques.
Sur la base des informations dont nous disposons actuellement, il ressort de l’analyse de ce phénomène qu’il est nécessaire d’apporter une attention spéciale à certains secteurs particulièrement exposés, comme le travail domestique et l’agriculture, qui sont deux secteurs où sont occupés beaucoup de travailleurs migrants. En réorganisant les sanctions prévues, le Plan national de lutte contre le travail non déclaré entend aussi encourager une transition progressive mais constante des formes irrégulières de travail vers des emplois réguliers et transparents dans le pays.
Mes collègues de l’INL ont mis au point un portail national d’informations sur le travail non déclaré. Une nouvelle base de données peut s’avérer utile aux activités de l’agence. En avril dernier, la ministre du Travail et des Politiques sociales a institué un comité national pour prévenir et combattre le travail non déclaré, lequel est chargé de coordonner et de suivre le plan d’action, conformément à la réforme de notre Plan national de relance et de résilience dans le contexte de l’Union européenne (UE). Le comité est présidé par le ministère du Travail et des Politiques sociales et se compose de représentants de différentes institutions nationales et régionales, dont des experts dans le domaine qui sont désignés par la ministre, et dix représentants des partenaires sociaux.
Nous disposons de quelques informations pertinentes qui, à notre avis, peuvent être utiles à la discussion. Depuis 2020, il y a trois ans, le gouvernement adopte toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre le système d’inspection du travail; il s’agit de la Stratégie nationale de lutte contre l’exploitation au travail dans l’agriculture et le recrutement illégal de travailleurs agricoles.
Ce plan met en œuvre une loi nationale adoptée en 2016, la loi no 199. Elle marque un important changement de cap vers une approche plus complète et multidimensionnelle de l’inspection du travail et s’articule autour de quatre piliers stratégiques: la prévention, la protection, l’application et les voies de recours. De notre point de vue, ces piliers sont pleinement conformes aux deux conventions dont il est question aujourd’hui.
En décembre 2018, le gouvernement a mis en place un groupe d’experts spécial sur le recrutement illégal (caporalato, en italien) dans le secteur agricole dont la présidence est assurée par le ministère du Travail et des Politiques sociales. Ce groupe a pour mission d’élaborer une stratégie nationale dans l’agriculture pour y prévenir et combattre le travail irrégulier, et apporte une attention particulière aux catégories les plus vulnérables de travailleurs, comme les travailleurs migrants en situation irrégulière et en tenant compte des caractéristiques spécifiques de notre territoire national. L’approche suivie consiste à associer des sanctions à des actions concrètes visant à prévenir le phénomène et à assurer l’inclusion sociale de ces travailleurs migrants. Il convient de souligner que ce plan d’action national a été adopté conformément à l’action spéciale de la Commission européenne et est cofinancé par le Programme d’appui à la réforme structurelle. En outre, comme vous le savez probablement, le Bureau de l’OIT en Italie prodigue une assistance technique au ministère du Travail et des Politiques sociales pour cette stratégie nationale.
Un autre élément que nous estimons pertinent pour la discussion est que depuis 2020, dans le cadre de la stratégie nationale, le ministère du Travail et des Politiques sociales a lancé, en collaboration avec l’INL, une action commune pour mettre en place des groupes de travail spéciaux dont la mission est d’effectuer des inspections du travail en adoptant une approche novatrice. En effet, des inspecteurs du travail nationaux reçoivent le soutien de médiateurs culturels de l’OIM. Il s’agit donc d’une approche novatrice et interinstitutionnelle. Les groupes de travail ont été créés en suivant cette approche multidimensionnelle et en s’appuyant sur une coordination spéciale avec les autorités locales. Cette coopération entre inspecteurs du travail et médiateurs culturels s’établit lors des visites d’inspection sur le lieu de travail, mais aussi lors de la phase de planification et après, lors de la prise en charge des victimes de travail irrégulier.
Cette approche spécifique est désormais adoptée dans d’autres secteurs que l’agriculture: dans l’industrie manufacturière, la construction, les services et la logistique. Un autre point que nous tenons à souligner à propos du rôle des inspecteurs du travail est que dans notre système national d’inspection du travail, les visites d’inspection visent intégralement à assurer la protection de tous les travailleurs, y compris les travailleurs migrants. En outre, concernant cette catégorie de travailleurs, lors de leurs visites, les inspecteurs du travail leur prodiguent toutes les informations disponibles sur leurs droits. De même, ces travailleurs migrants reçoivent une brochure qui a été traduite dans leur langue avec l’aide des médiateurs sociaux. Ils y retrouvent des informations sur leurs droits, les responsabilités des employeurs et le mécanisme de protection spécifique auquel les victimes ont accès conformément à la législation italienne. C’est une façon d’apporter de l’aide aux travailleurs migrants.
Actuellement, nous sommes en mesure de distribuer ces brochures d’information dans 11 langues différentes pour aider les travailleurs migrants présents sur le territoire italien à faire valoir leurs droits, favoriser leur inclusion sociale et prévenir le risque d’exploitation. De plus, grâce à la collaboration des médiateurs culturels d’organisations internationales, le formulaire de demande d’inspection auquel les travailleurs ont accès, disponible en ligne sur le site de l’INL, a été traduit en neuf langues. Accessible aux travailleurs migrants, il peut ainsi être plus facilement et efficacement utilisé.
Ces quatre ou cinq dernières années, toutes ces activités ont été essentielles pour que les médiateurs culturels et les inspecteurs du travail gagnent la confiance des travailleurs migrants. Nous avons pu observer ce phénomène sur nos différents territoires. C’est surtout le cas grâce aux visites fréquentes dans des établissements informels et à une présence régulière dans une zone, ainsi qu’aux relations solides établies avec des associations de migrants et au suivi des travailleurs migrants et de leur famille. Forte de cette expérience positive, l’INL a commencé à renforcer ses bureaux territoriaux pour qu’ils soient plus proches des besoins des travailleurs migrants. Actuellement, nous disposons de l’expérience de six inspectorats territoriaux qui disposent de guichets multilingues à titre expérimental; ils sont destinés à recevoir les plaintes de travailleurs migrants pour des irrégularités et en cas d’exploitation au travail et, plus généralement, pour fournir des informations et faire valoir leurs droits. Le ministère et l’inspection du travail s’engagent à améliorer cette démarche pour disposer de plus de guichets de ce type dans toute l’Italie dans un avenir proche.
Enfin, à propos du rôle des inspecteurs du travail, il est de communiquer la présence de travailleurs migrants aux autorités chargées de la sécurité publique, d’apporter une attention particulière à l’identification et la description de tous éléments utiles obtenus, par exemple, avec la collaboration de la victime, en cas de situation de violence ou d’exploitation grave dans le but de favoriser la délivrance rapide de permis de séjour dans des cas spéciaux. Il est important de le rappeler, car notre approche est clairement d’apporter toute l’attention voulue aux travailleurs. Notre système est aujourd’hui plus clair. En veillant à assurer une protection aux travailleurs migrants dans toutes les situations et à faire valoir leurs droits, tant leurs droits sociaux que leurs droits au travail, nous sommes parfaitement conformes à l’article 3 de la convention no 81 et à l’article 6 de la convention no 129.
Enfin, je souhaite conclure mon intervention sur les permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux. La semaine dernière, dans notre document, nous vous avons communiqué des informations recueillies par le ministère de l’Intérieur concernant deux types de permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux: l’un l’est à des fins de protection sociale et l’autre en cas d’exploitation grave au travail. Nous avons reçu hier des données plus récentes et nous pouvons vous communiquer après cette discussion un nouveau document avec des informations plus précises et mises à jour.
Membres travailleurs – C’est la première fois que notre commission examine l’application par le gouvernement des conventions nos 81 et 129.
Dans ses commentaires, la commission d’experts a soulevé un certain nombre de questions qui portent spécifiquement sur les fonctions supplémentaires confiées aux inspecteurs du travail dans le domaine de l’immigration. Elle a noté que le personnel d’inspection doit informer les autorités chargées de la sécurité publique de la présence de tout travailleur migrant en situation irrégulière, étant donné que, selon la législation italienne, l’entrée et le séjour illégaux sur le territoire de l’État restent une infraction pénale. Le gouvernement a fourni des données actualisées qui indiquent que 1 206 travailleurs sans titre de séjour régulier ont été identifiés en 2022. D’après le rapport du gouvernement, ces travailleurs ont été informés de leurs droits.
Par ailleurs, l’OIM a aidé 598 travailleurs migrants à accéder à des mécanismes de protection spéciaux. Ainsi, 313 travailleurs migrants ont obtenu un permis de séjour à des fins de protection sociale et en cas d’exploitation grave. Des informations ont également été données sur les guichets multilingues installés à titre expérimental dans six inspections provinciales du travail pour recevoir des plaintes relatives à des irrégularités en matière de travail et à l’exploitation de travailleurs étrangers, et pour leur fournir un soutien et des informations.
Nous avons pris note des informations communiquées. Toutefois, nous exprimons notre inquiétude en raison de la criminalisation de l’immigration illégale sur le territoire italien, de son incidence sur l’accomplissement des obligations principales des inspecteurs du travail et de ses effets préjudiciables à la capacité des travailleurs étrangers de faire valoir leurs droits. Nous rappelons qu’en vertu du paragraphe 2 de l’article 3 de la convention no 81 et du paragraphe 6 de l’article 6 de la convention no 129, le principal devoir des inspecteurs du travail est de protéger les travailleurs et non d’appliquer la loi sur l’immigration.
Selon la commission d’experts, les travailleurs en situation de vulnérabilité peuvent ne pas être disposés à coopérer avec les services d’inspection du travail s’ils craignent des répercussions négatives des inspections, comme l’imposition d’une amende, la perte de leur emploi ou leur expulsion du pays. L’objectif de l’inspection du travail ne peut être atteint que si les travailleurs sont convaincus que la tâche principale de l’inspection est d’assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs. Par conséquent, l’obligation faite aux inspecteurs du travail de signaler aux autorités chargées de la sécurité publique la présence de travailleurs migrants en situation irrégulière n’est pas conforme aux prescriptions des conventions. Le gouvernement devrait prendre des mesures pour s’assurer qu’une distinction claire est établie entre les activités menées par l’inspection du travail, conformément à la convention, et les contrôles de l’immigration auxquels les inspecteurs du travail ne devraient pas participer.
En ce qui concerne la protection des travailleurs migrants, nous regrettons que le gouvernement ait supprimé cette année les permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux, ce qui expose les travailleurs migrants à encore plus de risques. Par ailleurs, nous constatons que les deux projets triennaux «SU.PR.EME» et «A.L.T CAPORALATO!», destinés à lutter contre l’exploitation et le caporalato dans l’agriculture, arrivent à leur terme. Nous regrettons que le gouvernement ait choisi d’utiliser des mesures limitées dans le temps pour s’attaquer à l’exploitation systémique et prolongée des travailleurs migrants dans l’agriculture, secteur qui emploie une proportion significative de travailleurs migrants et où la sous-traitance et les coopératives fantômes sont monnaie courante. Ces pratiques abusives requièrent une réponse constante et ciblée du gouvernement, et devraient relever de la stratégie d’inspection du travail qu’a élaborée le gouvernement. Nous notons également que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur le recouvrement des arriérés de salaires et de cotisations de sécurité sociale dus aux travailleurs ne disposant pas de permis de séjour et qu’il se contente d’indiquer que le système actuel de collecte de données statistiques ne permet qu’une vue d’ensemble des chiffres totaux.
Nous nous faisons l’écho de la commission d’experts qui demande que lui soit envoyé un ensemble complet de statistiques sur les activités que déploient les inspecteurs du travail pour informer les travailleurs migrants sur leurs droits au travail et pour faire appliquer ces droits, y compris des données améliorées sur le recouvrement des crédits de salaire et de sécurité sociale pour les travailleurs étrangers sans permis de séjour. De plus, nous notons que le travail sur les plateformes et le travail domestique, secteurs dans lesquels de nombreux travailleurs migrants sont occupés et où les abus et les violations des droits des travailleurs sont extrêmement fréquents, ne relèvent pas de la compétence de l’inspection du travail. Nous rappelons que la mission de l’inspection du travail doit s’appliquer de manière égale à tous les travailleurs et toutes les travailleuses ainsi qu’à tous les lieux de travail dans tous les secteurs, privés ou publics, dans les zones rurales ou urbaines, dans l’économie formelle et dans l’économie informelle, afin d’assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs. Le gouvernement devrait s’assurer sans délai que le domaine de compétence des inspections du travail couvre tous les travailleurs et tous les lieux de travail, y compris le travail sur plateforme et le travail domestique.
Enfin, nous notons que l’INL, créée en 2017, a absorbé l’Institut national de sécurité sociale (INPS), l’Institut national d’assurance contre les accidents du travail (INAIL) et les services d’inspection du ministère du Travail et des Politiques sociales. Dans le rapport annuel de 2022 sur l’inspection du travail, on note que, malgré cette réforme institutionnelle destinée à rationaliser les procédures d’inspection, les activités d’inspection du travail sont toujours menées par les mêmes entités susmentionnées et par les agences sanitaires locales, les agences régionales de protection de l’environnement et les forces de l’ordre (Carabinieri). Chacune de ces entités est investie d’une compétence spéciale, qu’il s’agisse de la sécurité et la santé au travail (SST), des salaires ou du temps de travail, et a un champ d’action géographique spécifique. Cependant, de sérieux doutes subsistent quant aux mesures prises pour assurer la coopération nécessaire entre ces différentes entités et la coordination de leurs activités. Ce manque de coordination est démontré dans le commentaire de la commission d’experts selon lequel la collecte et la publication de statistiques sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ne relèvent pas de la responsabilité de l’autorité centrale, l’INL, mais sont élaborées et publiées séparément par l’INAIL. La commission d’experts a demandé au gouvernement de communiquer des informations sur l’impact de la récente réforme organisationnelle des activités menées par l’INL, en particulier en ce qui concerne la coordination des inspections en matière de SST entre l’INL et les autorités sanitaires locales.
Les rapports des confédérations syndicales italiennes donnent aussi des exemples de situations dans lesquelles, en raison de la limitation de leurs compétences, les agents de l’INPS ne peuvent constater que les infractions concernant les cotisations de sécurité sociale, mais non l’absence de rémunération des travailleurs, alors que ces deux questions sont intrinsèquement liées. Il s’agit d’une situation perverse qui porte préjudice principalement aux travailleurs.
Nous rappelons qu’en vertu de l’article 5 de la convention no 81 et de l’article 12 de la convention no 129, l’autorité compétente devra prendre les mesures appropriées pour favoriser une coopération effective entre les services d’inspection, d’une part, et d’autres services gouvernementaux et les institutions publiques et privées exerçant des activités analogues, d’autre part. Le gouvernement doit donc prendre des mesures immédiates pour assurer cette coopération et le bon fonctionnement des services d’inspection du travail.
Membres employeurs – Le cas dont il est question porte sur les conventions nos 81 et 129. Ces deux instruments sont étroitement liés et font partie du corpus de normes internationales du travail destinées à garantir la protection des travailleurs dans les secteurs concernés. En premier lieu, les membres employeurs souhaitent souligner l’importance pour les États de se conformer aux conventions de l’OIT qu’ils ont ratifiées. En outre, ils souhaiteraient insister sur l’importance capitale de l’inspection du travail, tant pour la protection de travailleurs que pour le bon fonctionnement de l’économie.
Permettez-moi de vous donner quelques informations sur le contexte de ce cas: l’Italie a ratifié la convention no 81, qui est une convention de gouvernance prioritaire, en 1952. La convention no 129, qui est également une convention prioritaire, a été ratifiée par l’Italie en 1981. Nous notons également que, depuis 2007, la commission d’experts a émis six observations, dont la dernière date de 2022 et fait état d’un non-respect des engagements pris lors de la ratification des conventions. Aujourd’hui, toutefois, c’est la première fois que le cas du respect par l’Italie des conventions nos 81 et 129 fait l’objet d’une discussion au sein de ce comité. Concernant la situation du pays, il convient de noter qu’en juillet 2020, après la chute du gouvernement, le président a appelé à des élections générales en septembre 2022, à l’issue desquelles une nouvelle coalition a obtenu la majorité des sièges au Parlement.
Permettez-moi à présent d’aborder les questions clés de ce cas: dans son observation de 2022, la commission d’experts a relevé des sujets de préoccupation liés aux paragraphes 1 et 2 de l’article 3 de la convention no 81 et aux paragraphes 1 et 3 de l’article 6 de la convention no 129 concernant les fonctions additionnelles confiées aux inspecteurs du travail. Les membres employeurs notent que le gouvernement a indiqué dans son rapport que des activités d’inspection ont été menées dans le cadre du plan triennal contre l’exploitation dans l’agriculture, grâce à deux projets financés respectivement par la Commission européenne et le ministère du Travail et des Politiques sociales. Nous notons également que le gouvernement a indiqué que les inspecteurs du travail doivent signaler la présence de travailleurs migrants en situation irrégulière aux autorités chargées de sécurité publique. Il convient également de noter, qu’à ce jour, dans six inspectorats territoriaux, des guichets multilingues ont été mis en place pour recevoir les plaintes de travailleurs migrants pour des irrégularités et en cas d’exploitation au travail et, plus généralement, pour leur apporter une aide et des informations sur leurs droits.
En outre, conformément aux informations écrites fournies par le gouvernement en mai 2022, les résultats des groupes de travail des projets susmentionnés et des activités de lutte contre l’exploitation montrent que 1206 travailleurs non ressortissants de l’UE sans titre de séjour régulier ont été identifiés sur des lieux de travail lors d’inspections. Selon le gouvernement, au cours des inspections, des informations ont été fournies aux travailleurs migrants sur leurs droits et le rôle de l’inspection. Les membres employeurs prennent également note d’un décret législatif, selon lequel des permis de séjour ont été délivrés aux travailleurs concernés dans des cas spéciaux, à des fins de protection sociale et dans les cas d’exploitation. L’octroi de ces permis est soumis à la condition que le travailleur migrant en situation d’exploitation porte plainte et coopère aux poursuites pénales engagées contre l’employeur. Dans ce contexte, selon les informations du gouvernement, 230 permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux ont été accordés pour des cas de protection sociale et 83 pour des cas d’exploitation au travail.
Enfin, le gouvernement a indiqué que lorsque les inspections révèlent des manquements aux obligations contractuelles, dont la réparation se traduit par un crédit pécuniaire pour les travailleurs, les inspecteurs du travail peuvent assurer le recouvrement des crédits des travailleurs concernés. Le gouvernement a toutefois indiqué que le système actuel de collecte de données statistiques ne permet qu’une vue d’ensemble des chiffres totaux à cet égard et ne se réfère pas en particulier aux travailleurs sans permis de séjour. À la lumière des commentaires de la commission d’experts et des informations fournies par le gouvernement, les membres employeurs demandent au gouvernement, premièrement, de continuer à fournir des informations sur le nombre de travailleurs migrants en situation irrégulière dont les inspecteurs du travail ont constaté la présence et, deuxièmement, sur le rôle qu’ont les inspecteurs du travail d’informer les travailleurs migrants au sujet de leurs droits en matière de travail et de faire appliquer ces droits.
Nous demandons au gouvernement d’inclure dans ces informations des données sur le recouvrement des arriérés de salaires et de cotisation de sécurité sociale pour les travailleurs étrangers sans permis de séjour, ainsi que le nombre de permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux à la suite de la coopération de ces personnes avec les services d’inspection. Enfin, conformément aux observations de la commission d’experts, nous demandons au gouvernement de fournir des informations sur les ressources de l’inspection du travail qui sont consacrées à la vérification de la légalité du statut d’immigration dans la pratique, en proportion du temps et des ressources dont les inspecteurs disposent pour l’ensemble de leurs activités.
Membre travailleuse, Italie – Je m’exprime au nom des trois confédérations syndicales italiennes, la Confédération générale italienne du travail (CGIL), la Confédération italienne des syndicats de travailleurs (CISL) et l’Union italienne du travail (UIL). Les syndicats italiens considèrent les conventions nos 81 et 129 comme des normes indispensables au respect et à la mise en œuvre des droits fondamentaux en matière de SST. Comme l’a indiqué la commission d’experts, nous tenons à souligner que la défense de l’indépendance des inspecteurs du travail de la fonction publique revêt une importance capitale. En fait, nous nous félicitons du retrait de l’accord entre l’INL et les consultants en droit du travail qui aurait permis aux entreprises d’être informées avant une éventuelle inspection, et aux entreprises disposant d’un certificat de conformité délivré par ces consultants, évidemment contre rémunération, d’être exemptées d’éventuelles inspections.
Et ce dans le contexte d’une situation dramatique au regard du nombre d’inspecteurs et des ressources à leur disposition: une entreprise sait qu’elle a une chance d’être inspectée tous les 15 ans. Nous souhaitons faire quelques commentaires sur les informations complémentaires fournies par le gouvernement.
Le nombre de cas spéciaux signalés reste extrêmement bas, et une partie d’entre eux ont été notifiés par les syndicats eux-mêmes et dans le cadre de projets multipartites spécifiques, et non à la suite d’inspections nationales, comme on aurait pu le penser. En outre, nous souhaitons mettre en question la déclaration suivante du gouvernement: «en vertu de leur faculté de formuler des avis de constat (article 12 du décret législatif no 124/2004), les inspecteurs assurent aux travailleurs migrants une protection appropriée qui comprend un volet économique. Cela leur permet de faire respecter immédiatement et librement les droits financiers».
Comme nous l’avons souligné à plusieurs reprises, l’«avis de constat» émis par les inspecteurs du travail est un outil important qui, nous l’espérons, pourra être de plus en plus utilisé. Cependant, ce seul avis ne garantit absolument pas le recouvrement de ce que l’OIT et la commission d’experts ont défini comme un «vol de salaire» à l’encontre des travailleurs migrants et non migrants, en situation irrégulière ou non. La réforme de l’INL initiée en 2017, que nous avons saluée car elle a permis de renforcer son autonomie par rapport au ministère du Travail et des Politiques sociales, ne respecte toujours pas les articles 4, 5 et 16 de la convention no 81 et les articles 7, 12 et 21 de la convention no 129, concernant la coordination des activités d’inspection par une autorité centrale. Malgré les efforts déployés dans le cadre des programmes «SU.PR.EME» et «A.L.T CAPORALATO!» (caporalato est le mot italien pour «recrutement illégal de travailleurs») et quelques bonnes pratiques d’inspection et de coordination interinstitutions, dans la majorité des territoires touchés par le travail irrégulier et l’exploitation, les différents services d’inspection (INPS, INAIL, inspecteurs de l’autorité sanitaire locale, forces de l’ordre, dont les carabinieri, la guardia di finanza, etc.) agissent de manière autonome, sans aucune concertation et de manière fragmentée. Par exemple, les activités d’inspection promues par l’INPS (l’agence nationale d’assurance sociale) se concluent par des rapports qui ne concernent que les cotisations de sécurité sociale, sans tenir compte du phénomène croissant du «vol de salaire», car en fait, les inspecteurs de l’INPS ne délivrent pas d’avis de constat aux travailleurs dont il est établi qu’ils ont été payés en dessous du minimum contractuel.
Dans ce contexte, les syndicats italiens estiment que la création d’un «fonds de garantie» permettant d’assurer le caractère exécutoire des avis de constat et le recouvrement de ce que l’on appelle le «vol de salaire» aux travailleurs ferait que la responsabilité de recouvrer la valeur économique des avis n’incomberait plus aux travailleurs mais à l’INPS, sans pour autant retirer la responsabilité globale revenant aux employeurs.
Qui plus est, les projets «SU.PR.EME» et «A.L.T. CAPORALATO!» font partie du plan national de lutte contre le caporalato, préparé par le ministère du Travail et des Politiques sociales, et financé grâce à des fonds de l’UE. Mais ils vont bientôt prendre fin et, en tout état de cause, représentent une action de nature exceptionnelle qui ne saurait garantir la continuité ou la stabilité des interventions, comme devrait au contraire le faire une structure institutionnelle telle que l’inspection du travail.
Pour ce, et conformément à l’article 2.2.7 des Directives de l’OIT sur les principes généraux de l’inspection du travail, selon lequel «[l]’inspection du travail devrait collaborer avec les organisations de travailleurs et d’employeurs à la conception, à l’adoption et à la révision des politiques, stratégies ou programmes et plans d’inspection», les syndicats italiens estiment qu’il faut créer un organe tripartite institutionnalisé qui assure la planification et le suivi réguliers des inspections. Et que l’INL devrait mettre en place une base de données intégrée qui recueille des données désagrégées sur les inspections effectuées par tous les organismes d’inspection, aux niveaux local et régional.
L’article 8 de la loi italienne no 199/2016 contre le caporalato n’est pas pleinement mis en œuvre. Sur un total de 200 000 entreprises candidates, seules 6 000 sont inscrites au Réseau pour un travail agricole de qualité. Les bureaux territoriaux sont deux fois moins nombreux que prévu, ne sont pas pleinement opérationnels et ne bénéficient pas d’une participation homogène de la part de tous les services d’inspection. Dans ce contexte, nous saluons l’expérience pluridisciplinaire mise en place dans six provinces dont fait mention le gouvernement.
Les travailleurs en situation irrégulière et les formes modernes d’esclavage demeurent un phénomène très répandu dans le secteur agricole, comme l’ont montré les syndicats italiens. L’introduction du contrat occasionnel à durée déterminée dans l’agriculture favorise l’exploitation et le travail illégal, portant atteinte à la loi italienne n°199/2016. Cette situation sera encore aggravée par la récente réintroduction, par le biais du décret no 48/2023, du paiement sous forme de bons dans le secteur agricole, pour des montants allant jusqu’à 15 000 euros. Sur le terrain, nous avons observé une augmentation notable du nombre d’entreprises offrant des contrats semi-réguliers signés (appelés «contrats gris»), afin d’éviter les avis et les sanctions de l’INL.
Permettez-moi également de rappeler à cette commission qu’en Italie, les inspecteurs du travail doivent signaler la présence de travailleurs migrants en situation irrégulière aux autorités publiques et que l’entrée et le séjour illégaux dans le pays ainsi que l’emploi de travailleurs sans permis sont définis comme des infractions par les articles 10bis et 22(12) du décret législatif no 286/1998.
Comme l’a souligné à plusieurs reprises la commission d’experts, il convient d’éviter que les contrôles des services d’inspection n’aboutissent à l’expulsion immédiate des travailleurs en situation irrégulière. Nous devons établir une distinction claire entre les inspections du travail et les contrôles de l’immigration et renforcer l’indépendance et les ressources des premières. Tant que la situation irrégulière des migrants restera une infraction pénale, la convention no 81 ne sera pas pleinement respectée. Les sanctions à l’encontre des employeurs devraient s’accompagner de mesures de récompense en faveur des bonnes pratiques et des employeurs vertueux, qui désormais ne peuvent plus formaliser les travailleurs en raison de la loi italienne Bossi-Fini.
Dans le même temps, l’article 18 de la loi consolidée sur l’immigration devrait être modifié afin de garantir que les inspections puissent conduire à un processus de régularisation sûr pour les travailleurs migrants vulnérables, et ce de façon que tout le poids du processus de régularisation ne repose pas sur les épaules de ceux qui sont déjà exploités, c’est-à-dire les travailleurs.
La dimension de genre de l’exploitation ne doit pas être négligée. Le contact avec les personnes fortement exploitées, et en particulier avec les femmes, nécessite un travail de sensibilisation qui ne s’arrête pas à une seule inspection, mais requiert l’aide de médiateurs culturels. C’est pourquoi, conformément à la convention (no 190) et à la recommandation (no 206) sur la violence et le harcèlement, 2019, de l’OIT, les inspections nationales du travail devraient être mieux équipées pour prévenir et signaler de manière proactive la violence et le harcèlement fondés sur le genre dans le secteur agricole. Les inspections sont également particulièrement difficiles et inefficaces dans le contexte de la sous-traitance. Renforcer les inspecteurs du travail, en travaillant conjointement avec toutes les parties impliquées dans les contrôles, est la meilleure réponse pour apporter plus de légalité dans l’offre de services.
Enfin, permettez-moi d’aborder la question de l’accès aux voies de recours. Le recouvrement des salaires impayés et l’indemnisation des dommages subis du fait de l’exploitation sont des éléments clés pour combattre le travail irrégulier, en particulier pour les travailleurs migrants, qui n’auraient sinon aucun intérêt à signaler l’exploitation, ne pouvant s’attendre qu’à des conséquences négatives. Outre les voies de recours judiciaires, dont se méfient généralement les travailleurs vulnérables, les syndicats italiens estiment qu’il est nécessaire de poursuivre la voie de recours non judiciaires. Il s’agit de procédures caractérisées par leur rapidité, leur confidentialité et leur caractère informel, qui peuvent apporter des réponses positives aux besoins urgents des travailleurs, notamment en ce qui concerne les salaires impayés. Ces mécanismes de conciliation peuvent se dérouler par le biais des inspections du travail, être gérés conjointement par les syndicats et les employeurs ou encore organisés par les syndicats.
Membre employeuse, Italie – J’ai l’honneur de prendre la parole pour une brève intervention en ma qualité de déléguée employeuse de l’Italie et au nom de la Confédération des industries italiennes.
Nous saluons l’occasion qui nous est donnée d’examiner le cas de l’Italie s’agissant de l’application des conventions nos 81 et 129 sur le système d’inspection du travail, en particulier en ce qui concerne les fonctions liées à l’immigration. Nous sommes convaincus que cela nous donne la possibilité de réfléchir aux difficultés que rencontre tout pays lorsqu’il doit assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs migrants en situation irrégulière. Dans le même temps, nous pensons que cela permet également de montrer les progrès qui peuvent être faits sur ce point, en se fondant sur les mesures positives déjà prises pour s’attaquer aux faiblesses et aux lacunes. L’Italie fait partie des principaux pays d’arrivée des migrants en Europe et, bien évidemment, l’immigration illégale représente un défi considérable pour notre pays. Dans ce contexte, les migrants illégaux sont davantage exposés aux abus et à l’exploitation sur le marché du travail.
Nous souhaiterions exprimer notre ferme opposition à toute forme d’abus ou d’exploitation de travailleurs migrants. Il s’agit d’abord, bien entendu, d’une question de respect de la dignité humaine et des droits fondamentaux. Nous pensons que l’emploi de travailleurs migrants illégaux crée également une concurrence déloyale pour la plupart des entreprises qui respectent la législation et qu’il entraîne des pertes en matière de recettes fiscales et de sécurité sociale.
L’Italie dispose d’un cadre juridique moderne et très précis qui comporte des protections à l’égard des migrants qui vont beaucoup plus loin que les normes internationales et les dispositions de l’UE. En outre, je tiens à insister sur le fait que, dans notre système de négociation collective bien établi, les conventions collectives couvrent des questions clés pour les travailleurs migrants, par exemple la formation, le logement, les besoins alimentaires et les congés. Les employeurs collaborent avec les autorités publiques, conformément à la convention (no 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975, qui accorde une juste place aux partenaires sociaux, et sont engagés, souvent avec les syndicats, dans des projets qui combattent le travail non déclaré et favorisent l’inclusion sociale des migrants. Les aspects liés aux inspections et aux sanctions en cas d’emploi illégal, également s’agissant des éléments plus problématiques mis en lumière par la commission d’experts, continuent de poser problème en Italie. Toutefois, les informations fournies par le gouvernement aujourd’hui montrent que l’Italie a bien conscience des difficultés, qu’elle est engagée à s’y attaquer de manière structurelle et qu’elle a déjà pris des mesures importantes qui vont dans la bonne direction. Nous pensons que, compte tenu de la complexité du phénomène de la migration illégale, il s’agit de tendre vers une stratégie de grande ampleur susceptible de rassembler différents acteurs, du public et du privé, chacun avec ses propres responsabilités et outils. Nous, employeurs, sommes prêts à aller dans ce sens. Nous souhaiterions inviter la commission à tenir dûment compte des efforts déployés et des progrès accomplis par l’Italie pour préserver son attachement, ferme et concret, à la pleine application des conventions nos 81 et 129.
Membre travailleur, Espagne – De nombreux éléments peuvent être déduits de la plainte contre le gouvernement que cette commission, à très juste titre, a décidé d’examiner ici: ces éléments vont du manque de ressources de nombreuses inspections du travail, après des années de politiques d’austérité et de coupes, à l’interprétation de certaines des fonctions que le gouvernement confie à l’inspection du travail, en dehors des fonctions prévues par les articles 3 et 6 des conventions nos 81 et 129.
Je parlerai de l’un de ces éléments, déjà mentionné par la travailleuse italienne, à savoir le manque de garanties pour assurer une inspection approfondie et efficace du processus de recrutement et de sous-traitance dans l’agriculture ou dans le secteur de la logistique. Les recrutements et la sous-traitance que j’évoque ici cachent des pratiques frauduleuses et illégales qui consistent à utiliser de fausses coopératives et d’autres formes d’entreprise dans lesquelles les inspections en Italie ne font pas respecter la loi, les normes de l’OIT ou les conventions collectives, et où prédominent par conséquent les accidents du travail – souvent mortels –, les journées de travail interminables, l’insécurité de l’emploi et les réductions de salaire qui ne respectent pas les règles convenues entre les représentants des employeurs et ceux des travailleurs et des travailleuses. Le cas de l’Émilie-Romagne est bien connu, où des coopératives fantômes sous-traitent la main-d’œuvre et administrent des segments du cycle de production des entreprises clientes. De nombreux établissements d’élevage sous-traitent leur logistique à ces «coopératives fictives» qui, en réalité, gèrent entièrement les étables où l’on élève les animaux. Les travailleuses et travailleurs de la coopérative en sont prétendument membres mais ils sont souvent contraints de travailler dans des conditions terribles. Si la coopérative ferme ses portes à la suite d’une plainte, de pressions syndicales ou d’activités de surveillance, elle réapparaît sous un autre nom avec d’autres membres. Ce n’est pas un cas isolé: nous voyons que dans d’autres secteurs, comme la logistique, des fraudes fiscales complexes sont dissimulées – factures pour des transactions qui n’existent pas au regard de la loi ou pour des contrats fictifs – en violation de la législation applicable au secteur. La police des finances de Milan et l’administration fiscale ont constaté des relations de travail avec des établissements commissionnaires qui sont protégées par des sociétés-écrans, lesquelles à leur tour utilisent des coopératives (ou des sociétés-réservoirs). Sont impliquées dans cette exploitation au travail des plus faibles (dont des migrants) de très grandes entreprises de logistique, raison pour laquelle les trois principales centrales syndicales italiennes ont demandé la protection, dans ces entreprises, de presque 30 000 travailleurs qui ont proposé de collaborer avec la justice. Il ne pourra être mis un terme à ces situations que si l’inspection du travail, en collaboration avec les autres acteurs qui interviennent dans les contrôles, parvient à mettre fin à cette situation illégale.
À l’instar de la réforme perverse dans le domaine du travail qu’avait mise en œuvre en 2011 le gouvernement conservateur espagnol, la législation italienne actuelle permet de contraindre des travailleurs, qui de par nature devraient être des salariés, à être membres de pseudo-coopératives dont le seul objectif est de se soustraire à leurs obligations, de diminuer les salaires, de réduire la protection des travailleuses et des travailleurs et, en définitive, de les précariser, en ne tenant aucunement compte de l’article 4 de la convention no 129. L’inspection du travail italienne ne peut ni ne doit être une entité chargée de signaler la présence de travailleurs migrants en situation irrégulière. Cette commission a tout lieu de demander au gouvernement des informations sur le temps et les ressources que l’inspection consacre à cette fonction qui, comme le rappelle le paragraphe 2 de l’article 3 de la convention no 81, peut faire obstacle à l’exercice des principales fonctions des inspecteurs du travail qui, je cite, ne sont autres que «d’assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession, telles que les dispositions relatives à la durée du travail, aux salaires, à la sécurité, à l’hygiène et au bien-être».
Membre gouvernemental, Algérie – La délégation algérienne voudrait remercier le représentant gouvernemental pour avoir fourni à la commission les réponses aux questions soulevées par la commission d’experts sur l’application des conventions nos 81 et 129.
L’Italie est partie aux instruments juridiques internationaux relatifs à l’inspection du travail et s’acquitte dûment et de bonne foi de ses obligations internationales. Il convient de souligner que les services d’inspection du travail, grâce à leurs actions en matière de conseil, d’information, de contrôle et des constats d’infraction, surveillent le non-respect des droits fondamentaux dans les relations et conditions de travail et, partant, constituent un volet important dans la vérification du respect de ces droits.
C’est pourquoi ma délégation apprécie les informations pertinentes que nous a données le gouvernement dans le cadre de ses efforts visant à garantir l’accomplissement effectif des tâches de l’inspection du travail dans le secteur de l’agriculture et notamment pour relever les manquements aux obligations contractuelles des travailleurs concernés, y compris les travailleurs migrants, et pour que les lieux de travail soient inspectés aussi souvent et aussi scrupuleusement que nécessaire notamment en matière de SST.
En effet, il ressort des réponses du gouvernement que des actions majeures ont été engagées aux fins de la régularisation de la relation de travail et des conditions de travail des travailleurs migrants et au sujet des droits connexes qui leur sont reconnus.
Sur un autre plan, les mesures prises contre l’exploitation et l’intermédiation illégales du travail dans l’agriculture, le renforcement des capacités des services d’inspection du travail interprovinciaux, de leurs effectifs, et de leur système d’information et coordination avec les services publics de santé, de sécurité sociale et de gestion des flux migratoires, ainsi que l’amélioration des méthodes de travail, des techniques d’investigation et de prévention contre le travail illégal dans ce secteur particulier, contribuent, sans nul doute, à renforcer la protection de tous les travailleurs réguliers ou irréguliers, et par conséquent de faire valoir leurs droits que la législation du travail leur garantit.
Toutes ces actions traduisent les efforts de l’Italie pour donner plein effet aux conventions nos 81 et 129.
Enfin, mon pays estime qu’il convient d’aborder les questions relatives à l’amélioration générale des conditions de travail dans le cadre d’un dialogue constructif et mutuellement avantageux avec tous les acteurs y compris avec les exploitants agricoles et les organisations syndicales représentatives.
Compte tenu des engagements pris, la délégation algérienne félicite la République italienne pour les résultats obtenus à ce jour et encourage le gouvernement à poursuivre le processus visant le renforcement des moyens, des capacités et des prérogatives des services d’inspection du travail en conformité avec le système juridique national et les instruments internationaux du travail en vigueur.
Membre employeuse, République de Corée – Je voudrais insister sur l’importance de renforcer les capacités d’inspection et les outils de contrôle pour identifier les situations d’exploitation, de violence et de harcèlement à l’encontre des travailleurs, ainsi que de discrimination salariale fondée sur le genre, dans les secteurs de l’agriculture et du travail domestique, et pour lutter contre ce problème.
En matière d’exploitation, la dimension de genre ne peut être ignorée. La féminisation de la migration et de la pauvreté devient un phénomène mondial, alors que de plus en plus de femmes sont forcées de quitter leur foyer pour subvenir aux besoins de leur famille. Dans ces conditions, l’agriculture, le travail domestique et le travail sexuel sont les seules options qui s’offrent aux femmes, en particulier les femmes migrantes en situation irrégulière travaillant dans l’économie informelle, parfois dans des conditions inadmissibles. Les travailleuses en situation irrégulière sont vulnérables aux formes les plus graves d’exploitation et d’abus.
En Italie, on observe une féminisation croissante de l’exploitation dans le secteur agricole, non seulement parmi les travailleurs d’autres pays de l’UE, en particulier la Bulgarie et la Roumanie, mais aussi parmi les Italiens, dans une bien moindre mesure. Le cas tragique de Paola Clemente, une travailleuse morte de fatigue en 2015 alors qu’elle travaillait dans l’agriculture, nous le rappelle douloureusement. Paola est décédée dans le silence assourdissant de la campagne des Pouilles. Plus de 40 000 Italiennes victimes du caporalato des Pouilles ou de formes illégales de recrutement sont confrontées au même silence. La réalité de l’exploitation des travailleuses concerne l’ensemble du pays et d’autres secteurs.
Le gouvernement avait surtout exprimé des préoccupations concernant les conditions désastreuses des travailleurs domestiques et s’était engagé à renforcer l’inspection du travail dans ce secteur, ce dont nous avions pris bonne note. Je souhaiterais toutefois attirer l’attention de la commission sur l’absence d’inspections dans ce secteur. Les violations et les irrégularités dans le secteur domestique demeurent mal connues. En 2022, l’inspection nationale italienne n’a effectué que 1 055 inspections dans le secteur du travail domestique et a constaté des irrégularités dans 49,29 pour cent des cas. Toutefois, ce nombre est insignifiant si l’on considère qu’il y a environ un million d’employeurs de travailleurs domestiques, selon l’INPS. Le gouvernement, qui est l’un des premiers pays à avoir ratifié la convention no 190, devrait renforcer l’inspection nationale du travail afin qu’elle puisse prévenir et signaler de manière proactive la violence et le harcèlement fondés sur le genre dans le secteur agricole, et cette mesure devrait être étendue au travail domestique et à l’économie de plateforme. Il conviendrait d’élaborer une autre approche pour aborder ce domaine spécifique.
Membre travailleur, Argentine – Je m’exprime également au nom de la Centrale autonome des travailleurs du Pérou et souhaite débuter mon intervention en indiquant qu’en ce qui concerne le cas à l’examen, nous reconnaissons les efforts déployés par le gouvernement mais nous réaffirmons qu’ils ont été tout à fait insuffisants.
La mission des inspecteurs du travail est fondamentale pour garantir le respect des droits au travail prévus dans les conventions internationales. La situation dramatique que vivent les travailleurs, en particulier dans le secteur de l’agriculture et de l’élevage, et dont la réalité est encore pire pour les migrants, exige un soutien du gouvernement aux inspecteurs du travail, soutien qu’ils n’ont pas si l’on considère le nombre d’inspecteurs qui est actuellement insuffisant et les conditions d’exercice de leurs fonctions. L’exploitation au travail et l’économie souterraine sont des signes clairs et manifestes d’un système de production malsain et illégal qui, dans de nombreux cas, se perpétue, situation qui est aggravée par présence de la délinquance organisée.
Il convient de noter que la précarité des travailleurs migrants confirme la situation de violation des droits de l’homme, en particulier celle des travailleurs migrants en situation irrégulière, qui sont principalement des femmes et des enfants victimes du travail des enfants. Souvent, les personnes qui exploitent leur force de travail les cachent lors des contrôles. Ces travailleurs sont le reflet le plus douloureux des nouvelles formes d’esclavage moderne. À titre d’exemple, dans la région de la Capitanata, chaque été, quelque 7 000 travailleurs journaliers migrants, permanents ou saisonniers, constituent une main-d’œuvre bon marché, principalement pour la récolte des tomates, dont la production représente un tiers de l’ensemble de la production nationale. L’ampleur de l’exploitation de ces travailleurs et de leur situation irrégulière rend leurs conditions de travail d’autant plus dramatiques. Alors que le volume de production est important dans ce secteur, les moyens de mécanisation de la récolte sont tout à fait dépassés. Cette exploitation absolue se traduit non seulement par des irrégularités en ce qui concerne les salaires et par l’inobservation des obligations contractuelles, mais aussi par une pratique généralisée du caporalato. La délinquance organisée est fortement implantée tout au long de la chaîne d’approvisionnement, et touche tous les aspects de l’organisation du travail – recrutement, transport, logement, paiement des journées de travail. Qui plus est, les contrôles sont insuffisants dans tous ces domaines.
Les inspecteurs du travail n’ont pas les moyens nécessaires pour remplir efficacement leur fonction, ce qui permet aux exploiteurs de commettre des abus. Lors d’inspections qui visent des migrants en situation irrégulière, même lorsqu’ils constatent qu’ils sont exploités, les agents ne vérifient pas le bien-fondé des réclamations dans le domaine du travail ni n’émettent pas d’«avis de constat d’infraction», pas plus qu’ils ne les signalent, à notre connaissance, à des structures qui peuvent faire valoir une protection spéciale (cas spéciaux). Les inspecteurs se bornent à dénoncer brièvement les infractions, ainsi que l’employeur, aux autorités judiciaires pour qu’elles se prononcent sur l’expulsion de ces travailleurs.
Il faut des changements pour mettre un terme à la tension qui existe entre l’accomplissement du rôle de l’inspecteur du travail et la législation, laquelle oblige à déférer devant la justice pénale les personnes en situation irrégulière. La solution du gouvernement pour normaliser leur situation – à savoir, recourir au recrutement régulier – n’a été guère appliquée au regard du grand nombre des cas dans cette situation. Dans ces conditions, les inspecteurs du travail sont complètement dépassés et ne peuvent s’acquitter des obligations vastes qu’énonce l’article 6, en particulier à ses paragraphes 1 et 3, comme le souligne le rapport de la commission d’experts. Par conséquent, faute d’un renforcement suffisant des effectifs et des moyens de l’inspection, l’action de cette dernière n’atteint pas l’objectif fixé dans les conventions dont nous examinons l’application, de sorte que les violations des droits de l’homme à l’encontre des nombreux groupes de migrants vont au-delà de l’exploitation salariale et des conditions de travail que les migrants subissent chaque jour.
Tant que la situation irrégulière des migrants continuera de constituer un délit pénal, en vertu des articles 10bis et 22, 12 du décret législatif no 286/98, les conventions no 81 et 129 ne seront pas pleinement respectées, car l’action des inspecteurs sera inefficace. La présence irrégulière d’immigrants doit être dépénalisée.
Interprétation de l’arabe: Membre travailleur, Tunisie – Au nom de la Fédération générale des travailleurs en Tunisie, je vais parler des violations des conventions nos 81 et 129 par le gouvernement, dont sont victimes les étrangers de toutes nationalités qui arrivent en Italie et qui s’ajoutent aux souffrances de ceux qui ont eu la chance d’échapper à la noyade, à la mort et aux pratiques inhumaines dans les camps et au déplacement forcé. La situation devient encore pire dans les lieux de travail.
L’article 2 de la convention no 81 définit les fonctions de l’inspection du travail, chargée d’assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail, telles que les dispositions relatives à la santé, au travail et l’emploi des jeunes et autres questions. D’habitude, ces dispositions doivent être respectées et les inspecteurs du travail doivent vérifier qu’elles sont bien appliquées. En effet, plus de 97 000 Tunisiens habitent de façon régulière en Italie et 21 000 vivent en Sicile, où les travailleurs tunisiens sont exploités dans les secteurs de la santé et de l’agriculture. Ils souffrent de conditions de travail et de pratiques inhumaines dans le cadre du caporalato lorsqu’ils travaillent en Italie.
Lorsque le travail est irrégulier, ces travailleurs ont des contrats saisonniers qui sont renouvelés partiellement et qu’ils doivent signer à nouveau durant l’année. Lorsque ces salariés passent d’une entreprise à l’autre, ou d’une région à l’autre, les conditions de travail demeurent les mêmes avec des modes de travail instables.
Ce type d’emploi prévaut partout sur le territoire italien, car en plus d’un nombre limité de salariés permanents, des dizaines de milliers de salariés ont des contrats sur le point d’expirer. Parmi les cas examinés en Sicile, il y a souvent un salarié permanent pour 40 salariés saisonniers et les salaires ne sont pas suffisants. Cela survient souvent compte tenu de l’absence de reddition des comptes administratifs et de sanctions, notamment de sanctions pénales, imposées par les inspecteurs du travail en cas de contravention.
Partant de là, en cas d’inspection, les sanctions potentielles ne dépassent pas le minimum prévu, alors qu’il faudrait adopter des mesures différentes car c’est un secteur important. Il y a beaucoup de travail précaire et une grande partie des salaires est inférieure à la moyenne contractuelle, y compris le salaire minimum.
En même temps, à Syracuse, il y a 20 inspecteurs du travail pour environ 7 000 entreprises. Donc, le taux est d’un inspecteur pour 350 entreprises. En Sicile, il y a un inspecteur pour 443 entreprises, soit un total de 185 inspecteurs pour environ 80 000 entreprises, ce qui veut dire un inspecteur pour 900 entreprises. C’est pour cela qu’il est difficile de vérifier que les entreprises respectent les règles et les normes du travail décent. En effet, les chiffres indiquent qu’il n’y a pas assez d’actions de dissuasion ni de capacités pour modifier le comportement des entreprises vis-à-vis des travailleurs.
La ratification par l’Italie des deux conventions implique de prendre les mesures nécessaires pour mettre en application une législation nationale stricte sur les contrats de travail, y compris des dispositions sur des conditions de travail décentes, et de donner aux inspecteurs du travail les capacités pour accomplir leurs tâches avec transparence, professionnalisme et impartialité, sans discrimination aucune, entre les salariés locaux et les étrangers.
Nous devons donc améliorer la situation des travailleurs, surtout dans les pays du Sud. Il est nécessaire que nous soyons solidaires entre syndicats du monde entier pour ne pas perdre les acquis obtenus par les travailleurs grâce à des sacrifices importants et qui ont commencé dès 1886 à Chicago où des dizaines de personnes ont été tuées.
Membre travailleur, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord – Nous prenons note avec préoccupation des similitudes entre ce cas relatif à l’inspection du travail en Italie et les questions concernant le Royaume-Uni que le Congrès des syndicats (TUC) avait soulevées auprès de la commission d’experts et qui ont fait l’objet d’une observation détaillée en 2020. Nous avions fait remarquer qu’il ressortait de l’analyse des services publics chargés du contrôle de l’application des lois que les services chargés de protéger les victimes d’esclavage moderne communiquaient également les informations relatives à leur statut migratoire. Dans notre cas, nous craignions que cela ne menace l’application, par le Royaume-Uni, de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et le protocole de 2014 y relatif. Nous faisons observer que les principes et droits fondamentaux au travail et le travail des services chargés de protéger les victimes, y compris la mission des inspecteurs du travail, sont étroitement liés. En effet, au Royaume-Uni, la loi de 2016 sur l’immigration impose des portails d’information entre les services chargés du contrôle de l’application de la législation sur l’immigration et les services de police. Nous avons vu que cela nuit à l’efficacité de l’inspection du travail.
Notre expérience concrète, en tant que syndicats à l’appui des travailleurs de la confection dans la ville de Leicester, rongée par l’exploitation, montre bien qu’il est grave de corrompre ainsi le rôle de l’inspecteur. Tandis que les syndicats, les groupes communautaires, les ONG et les journalistes concluent qu’il y a de multiples victimes d’esclavage moderne et autres abus pendant une longue période, les pouvoirs publics ne font état que de quelques cas graves. Les travailleurs avouent à nos représentants que cela est dû à leur crainte de parler aux autorités au cas où leur statut, ou celui de leurs collègues, serait signalé aux autorités migratoires. Les employeurs le savent et les moins scrupuleux exploiteront la peur de parler aux inspecteurs pour enfreindre la législation du travail en toute impunité. En résumé, les inspecteurs ne peuvent pas mener à bien leur travail essentiel, car ils ont à la fois les fonctions d’inspecteur du travail et celles d’inspecteur de l’immigration, et les travailleurs en font les frais. Une inspection du travail efficace est indispensable à la réalisation des droits fondamentaux des travailleurs. L’obsession que nos deux gouvernements manifestent à l’égard de l’immigration porte préjudice à l’ensemble des travailleurs.
Et pourtant, en Italie, alors qu’on demande à tous les inspecteurs de faire état du statut migratoire, dans d’autres domaines, on leur interdit expressément d’intervenir. Un inspecteur de la santé et de la sécurité qui découvre des éléments attestant d’un vol de salaire n’a pas le pouvoir d’intervenir. Cela dit tout ce que nous devons savoir sur les priorités du gouvernement. Les lignes directrices de l’OIT reconnaissent le rôle central de l’inspection et son mandat clairement inclusif. Les dernières directives sur les principes généraux de l’inspection du travail insistent, au paragraphe 1.1.1., sur le fait que le mandat de l’inspection du travail devrait concerner uniformément tous les travailleurs, lieux de travail et secteurs d’activité, dans l’économie formelle et informelle. Au paragraphe 1.3.1., il est dit que l’inspection du travail devrait être chargée de contrôler «tous les aspects de la législation relative aux conditions de travail et à la protection des travailleurs, selon la définition qu’en donne la législation nationale, conformément à l’article 27 de la convention no 81, y compris […] l’économie informelle».
La gestion de la migration ne doit pas passer avant la réalisation des principes et droits fondamentaux au travail et la mise en œuvre des conventions de l’OIT. Les inspecteurs du travail doivent être autorisés à effectuer leur travail indispensable dans un environnement où les travailleurs sont en confiance. Seule la personne qui, délibérément, exploite ou met en danger des travailleurs, devrait craindre l’inspection. Nous prions donc instamment le gouvernement de changer radicalement d’approche et de permettre aux inspecteurs, comme énoncé au paragraphe 1 a) de l’article 3 de la convention no 81, «d’assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession».
Observateur, Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) – Dans le contexte de l’analyse à laquelle la commission d’experts a procédé sur l’application, par l’Italie, des paragraphes 1 et 2 de l’article 3 de la convention no 81 relatifs aux fonctions supplémentaires confiées aux inspecteurs du travail en matière migratoire, il conviendrait de se pencher sur un autre pan de l’économie dans lequel nombre de travailleurs migrants, dont certains se trouvent en situation de vulnérabilité, sont concentrés, à savoir l’économie des plateformes numériques, ou gig economy. S’il est difficile de trouver des données, les résultats de l’enquête de l’Institut syndical européen (ETUI) sur le travail sur Internet et les plateformes montrent qu’en Italie, environ 5 pour cent des travailleurs des plateformes numériques dans le secteur de la logistique sont nés à l’étranger. Il est également entendu que les travailleurs agricoles migrants dans le sud du pays se rendent souvent dans le nord après la saison des récoltes pour travailler dans d’autres secteurs tels que le tourisme, la logistique, le travail domestique et l’économie des plateformes numériques.
En octobre 2021, un tribunal de Milan a condamné pour recrutement illégal de travailleurs le responsable d’une agence d’emploi privée qui servait d’intermédiaire pour fournir des travailleurs à une grande multinationale de livraison de repas, pratique intolérable identique à celle qui ravage le secteur agricole italien depuis des années. En l’espèce, les enquêteurs ont conclu que les travailleurs étaient «soumis à des conditions de travail dégradantes et payés 3 euros la course» et qu’on leur confisquait les pourboires. Les procureurs ont dit que ces travailleurs étaient «des migrants et demandeurs d’asile extrêmement vulnérables venant de zones en conflit, dont le Mali, le Nigéria, la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Pakistan et le Bangladesh». Le procureur a établi qu’un livreur migrant qui avait travaillé 68 heures sur une semaine n’avait gagné que 179,50 euros. Il a également conclu que des migrants étaient «punis» par une «réduction arbitraire de leur indemnité s’ils ne respectaient pas les termes de l’accord».
Plus largement, après une autre enquête de 2021, menée conjointement par le ministère public et une branche spécialisée de l’inspection du travail (Comando carabinieri per la tutela del lavoro), quatre grandes multinationales de livraison de repas ont été condamnées à une amende colossale de 733 millions de dollars pour atteinte à la santé et à la sécurité et classification erronée des travailleurs. Ces entreprises ont été condamnées à recruter leurs 60 000 livreurs en tant que salariés ou travailleurs «parasubordonnés». Le travail accompli par le ministère public et la branche spécialisée de l’inspection du travail sur ces cas est louable. Une inspection du travail efficace et l’accès des autorités compétentes aux données et dossiers pertinents sont absolument indispensables pour garantir que les droits des travailleurs des plateformes, y compris des travailleurs migrants, sont protégés. C’est pour cela qu’il faudrait élargir le mandat de l’inspection du travail à l’économie des plateformes en dotant les inspecteurs du travail des ressources matérielles nécessaires à cette fin.
Comme le Groupe de travail sur les entreprises et les droits de l’homme des Nations Unies l’a dit, en 2021, à l’issue d’une visite officielle de dix jours en Italie: «les travailleurs migrants, notamment originaires de pays d’Afrique et d’Asie, qui travaillent dans des secteurs tels que l’agriculture, la confection et la logistique, sont piégés dans un cycle d’exploitation, de servitude pour dettes et de violations des droits de l’homme qu’il faut briser. Pour ce faire, il faut que le gouvernement et les entreprises s’emploient résolument à fournir des conditions de travail décent à tous les travailleurs.»
À ce sujet, tout en reconnaissant qu’il est possible d’accorder des permis de séjour pour des «cas spéciaux», à des fins de protection sociale ou en cas d’exploitation, nous sommes tenus de souligner les dangers que représente le fait que le personnel de l’inspection indique aux autorités chargées de la sécurité publique la présence de tout travailleur migrant en situation irrégulière, car «l’entrée illégale dans le territoire de l’État et le séjour illégal sur le territoire de l’État» constituent toujours une infraction pénale. Les travailleurs sans papiers, y compris ceux de l’économie des plateformes, sont moins susceptibles de se plaindre de pratiques d’emploi abusives s’ils risquent de se voir appliquer la législation sur l’immigration. En outre, les procureurs et l’inspection auront du mal à constituer un dossier contre un employeur abusif si les travailleurs ne dénoncent pas ces pratiques.
Nous voulons croire que le gouvernement collaborera de manière constructive avec les syndicats et les employeurs pour s’attaquer aux points soulevés par la commission d’experts afin de mettre sa législation en conformité avec les conventions en question.
Représentant gouvernemental – Je souhaite conclure ma précédente intervention en évoquant trois points et je passerai ensuite la parole à mon collègue.
Avant toute chose, en ce qui concerne les inspecteurs employés par l’INL, je peux vous confirmer qu’ils sont en nombre suffisant pour mener à bien toutes les fonctions prévues dans le cadre des inspections du travail et pour assurer la protection concrète et efficace de tous les travailleurs. Bien entendu, nous confirmons que tous les inspecteurs du travail en Italie sont des fonctionnaires, qu’ils jouissent d’une stabilité d’emploi et sont totalement indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence extérieure indue. Leur recrutement est régi par la législation nationale et ne s’effectue que sur la base de leurs aptitudes, comme c’est le cas en Italie pour tous les fonctionnaires. Pour ce qui est de leur nombre, à la fin du mois de décembre 2022, l’INL coordonnait un peu moins de 4 000 inspecteurs. Dans le cadre du Plan national de lutte contre le travail non déclaré, 2 412 nouveaux inspecteurs ont été recrutés au cours de l’année passée et dans le courant de cette année. Nous confirmons que tous les inspecteurs ont pour mission de vérifier le respect de la législation du travail et des dispositions relatives à la protection sociale à l’échelle nationale pour tous les travailleurs, sans aucune distinction.
Le deuxième point a trait à la question des données sur le recouvrement des crédits de salaire et de sécurité sociale pour les travailleurs étrangers sans permis de séjour. Actuellement, nous pouvons vous fournir de nouvelles informations sur les crédits de sécurité sociale dont le montant calculé par l’INPS est légèrement inférieur à 4 millions d’euros pour 2022. Il s’agit de la somme totale pour tous les travailleurs dépourvus de permis de séjour.
Enfin, il est important de souligner que conformément à la législation italienne, l’emploi régulier de travailleurs migrants ne porte pas atteinte aux droits de ces travailleurs sans permis de séjour de bénéficier d’un salaire correct, de la sécurité sociale et des dispositions relatives aux heures de travail, à la SST, et aux principes de non-discrimination en matière de protection des enfants et des mères qui travaillent. Pour des points précis et des commentaires techniques, je cède la parole à mon collègue de l’inspection nationale.
Un autre représentant gouvernemental – Mon collègue a déjà évoqué la question qui a été soulevée sur l’indépendance des inspecteurs du travail en Italie. La première chose à relever est que nous disposons d’une autorité spécialisée distincte et indépendante du gouvernement; c’est un fait.
L’objectif du système juridique relatif à l’inspection du travail en Italie est de protéger les travailleurs; il n’y a aucun doute à cet égard. Notre système se fonde traditionnellement sur des sanctions. Aucune sanction décidée à la suite d’un rapport d’inspection du travail n’est infligée à des travailleurs, qu’ils soient migrants ou non. En Italie, les sanctions s’appliquent toujours aux employeurs qui, dans ces cas, exploitent des travailleurs et plus précisément, des travailleurs migrants, qu’ils disposent ou non d’un permis de séjour. Il est important de le mentionner parce que j’ai entendu des affirmations fausses. Les inspecteurs du travail infligent des amendes aux employeurs, pas aux travailleurs. C’est un fait.
D’un point de vue plus technique, en ce qui concerne la coordination avec d’autres agences, j’ai entendu dire qu’il n’y avait aucune coordination, notamment avec les inspecteurs du régime de la sécurité sociale. Tous les mois, dans chaque province italienne, une réunion a lieu entre l’inspection du travail et l’INPS. La personne qui a fait cette déclaration ne le sait probablement pas, mais c’est ainsi dans toute l’Italie depuis 2015.
Pour ce qui est de la coordination avec le système de SST, c’est une nouveauté en Italie pour les inspections du travail. Auparavant, nous travaillions sur des questions de SST dans le secteur de la construction, mais dorénavant, nous sommes habilités à le faire dans tous les secteurs. Mais tout cela est très neuf, donc il est vrai que nous sommes occupés à mettre en place le système et que les inspecteurs de SST du système régional disposent de compétences et d’une très longue expérience, travaillant dans ce domaine depuis les années soixante-dix. Il existe donc une coordination régionale/locale entre l’Inspection nationale du travail – INL, qui est l’autorité nationale – et le système régional d’inspection de SST – qui sont les autorités régionales/locales chargées des inspections de SST. Ainsi, dans chaque région, il y a une coordination dans ce domaine précis. Donc ici aussi, il existe bel et bien une coordination.
Plus spécifiquement, concernant les remarques faites à propos des outils et des voies de recours, nous disposons d’un important instrument, en plus des amendes et des sanctions proprement dites, qui sont les injonctions de mise en conformité pour le paiement des arriérés de salaires qui sont des ordres émis par les inspecteurs du travail. Il s’agit d’un outil important qui permet de recouvrer les salaires, et plus particulièrement des salaires décents, car ils font référence au salaire fixé dans les conventions collectives au niveau national. Tous les travailleurs migrants peuvent bénéficier de cet outil et de cette voie de recours, qu’ils aient ou non un permis de séjour. C’est un autre point important, car tous les travailleurs migrants, ayant ou non un permis régulier, ont accès aux procédures de règlement des différends prévues par l’inspection du travail. Ces procédures sont également accessibles aux travailleurs migrants, qu’ils aient ou non un permis de séjour en règle en Italie. C’est également un point important à mentionner.
Un autre outil concernant cette question est l’évaluation administrative, dans les rapports d’inspection du travail, des cotisations de sécurité sociale auxquelles les travailleurs ont droit. Il s’agit d’une mesure à laquelle tous les travailleurs migrants ont droit, avec ou sans permis régulier en Italie, à savoir l’accès aux cotisations de sécurité sociale, même dans l’économie informelle. J’ai entendu un commentaire sur les chaînes de sous-traitants. En Italie, nous avons un système très étendu de responsabilité conjointe et solidaire qui porte sur l’ensemble de la chaîne. C’est une mesure très importante pour les salaires et les cotisations de sécurité sociale, et c’est une mesure dont l’INL est responsable. Une remarque très rapide sur l’économie des plateformes numériques pour laquelle nous disposons d’une législation manifestement novatrice. Très récemment, en Italie, nous avons étendu la protection que la législation prévoit pour les employés aux livreurs des plateformes, et c’est le système d’inspection du travail qui est chargé de sa mise en œuvre.
Enfin, il me reste moins d’une minute pour vous expliquer rapidement comment cela se passe dans la pratique. Je suis le directeur d’un petit bureau territorial de l’inspection du travail, dans le nord de l’Italie où vivent de nombreux travailleurs migrants. Pour nous, cette nouvelle approche avec la collaboration de l’OIM est très importante, non seulement dans les six provinces dans lesquelles elle est appliquée, mais aussi dans les autres, comme ma province, où ce n’est pas le cas. Nous avons rencontré des responsables de l’OIM et des médiateurs culturels qui participent aux groupes de travail dans d’autres régions et nous mettons en place ces réunions dans nos provinces et essayons de suivre de nouvelles approches, de façon bien plus informelle évidemment. Cela signifie que cette mesure, contrairement à ce qui a été dit auparavant, n’est pas appelée à disparaître, d’autant qu’elle a maintenant été renouvelée pour les deux prochaines années. Mais il s’agit d’une nouvelle approche qui est vraiment importante pour ceux d’entre nous qui travaillent sur le terrain en tant qu’inspecteur du travail, et qui implique de grands changements d’un point de vue culturel. La collaboration entre agences est très importante et modifie également l’approche culturelle des inspecteurs du travail.
Membres employeurs – Nous avons écouté attentivement les différents intervenants et nous les remercions pour leurs interventions et les informations détaillées qu’ils ont fournies. Nous répétons que les conventions nos 81 et 129 sont des conventions de gouvernance prioritaires qui requièrent alors une attention particulière des gouvernements, des travailleurs et des employeurs. Les membres employeurs souhaitent souligner une fois de plus l’importance pour les États de se conformer aux conventions de l’OIT qu’ils ont ratifiées. Compte tenu des commentaires de la commission d’experts qui sont évoqués lors de la discussion d’aujourd’hui, les membres employeurs recommandent au gouvernement de fournir des informations sur le nombre de travailleurs migrants en situation irrégulière dont les inspecteurs du travail ont constaté la présence et sur le rôle qu’ont les inspecteurs du travail d’informer les travailleurs migrants au sujet de leurs droits en matière de travail. Nous demandons au gouvernement d’inclure dans ces informations des données sur le recouvrement des arriérés de salaires et de cotisations de sécurité sociale pour les travailleurs sans permis de séjour, ainsi que le nombre de permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux et les résultats de la coopération avec les services d’inspection. Enfin, conformément à l’observation de la commission d’experts, nous prions le gouvernement de fournir des informations sur les ressources de l’inspection du travail qui sont consacrées à la vérification du statut d’immigration dans la pratique.
Membres travailleurs – Nous remercions le gouvernement pour les informations et les éclaircissements qu’il a fournis. Nous remercions aussi les autres intervenants.
Nous voudrions d’abord apporter trois précisions: premièrement, dans notre discours, nous n’avons jamais remis en question l’indépendance des inspecteurs; deuxièmement, il est étrange d’entendre que 4 000 inspecteurs suffisent alors que la membre travailleuse de l’Italie nous a rappelé que la probabilité pour une entreprise d’être inspectée est d’une fois tous les quinze ans; et troisièmement, nous n’avons jamais dit que les inspecteurs sanctionnent les travailleurs. Nous avons dit que le risque indirect est qu’à la suite de cette inspection, le travailleur en situation irrégulière soit expulsé du pays. Nous souhaitons donc répéter notre préoccupation quant à la criminalisation de l’immigration illégale et aux obligations supplémentaires qu’ont les inspecteurs du travail de signaler la présence de travailleurs immigrés en situation illégale aux autorités chargées de la sécurité publique. Nous rappelons encore que la mission première des inspecteurs du travail est de protéger les travailleurs et non d’appliquer la loi sur l’immigration. Par conséquent, ces obligations supplémentaires sont incompatibles avec les conventions no 81 et 129.
Nous demandons au gouvernement d’abroger la législation qui oblige les inspecteurs du travail à signaler aux autorités chargées de la sécurité publique la présence de tout travailleur migrant en situation irrégulière. Nous notons également avec regret l’interruption des permis de séjour délivrés dans des cas spéciaux aux travailleurs migrants en situation irrégulière et à ceux qui étaient exploités, ainsi que l’absence de données ventilées sur le recouvrement des salaires impayés et des cotisations de sécurité sociale dues aux travailleuses et travailleurs migrants. Au lieu d’éloigner davantage les travailleuses et les travailleurs migrants en situation irrégulière de la possibilité de la formalisation de leur travail, nous recommandons au gouvernement de prendre des mesures pour: faire appliquer les dispositions de la loi relatives aux conditions de travail et protéger les travailleurs migrants, notamment en facilitant leur accès à des voies de recours non judiciaires rapides, par exemple les procédures de conciliation; renforcer les sanctions infligées aux employeurs qui ont commis une infraction; créer un fonds de garantie pour assurer le respect des avis de constat des inspecteurs du travail et des sanctions imposées par les inspecteurs, ainsi que le versement en temps voulu des salaires impayés et des cotisations de sécurité sociale dues aux travailleuses et travailleurs migrants; et étendre le champ d’application des inspections du travail aux plateformes et au travail domestique. Des mesures spécifiques et à long terme devraient également être prises pour traiter les nombreuses violations des droits des travailleurs et des travailleuses et les cas d’exploitation, y compris des travailleurs migrants, dans l’agriculture.
Ainsi, nous encourageons le gouvernement à utiliser les différents moyens existants et, en particulier, l’analyse comparative réalisée en 2020 par le BIT et l’UE sur la protection et l’assistance apportées aux victimes de l’exploitation au travail. Par ailleurs, compte tenu du manque manifeste de coordination entre les différentes entités chargées de l’inspection du travail, le gouvernement devrait prendre des mesures immédiates, d’une part conformément à l’article 5 de la convention no 81, pour élaborer, en collaboration avec les partenaires sociaux, une stratégie d’inspection du travail qui définisse clairement les missions et les fonctions de chaque entité et service, et pour renforcer la coopération et la collaboration entre eux et, d’autre part, conformément au paragraphe 2.2.7 des Directives de l’OIT sur les principes généraux de l’inspection du travail, pour mettre en place un processus tripartite de planification et de suivi des inspections. Nous recommandons au gouvernement d’établir une base de données pour coordonner la collecte de statistiques entre les différentes entités et organismes responsables de l’inspection du travail. Nous prions instamment le gouvernement de solliciter l’assistance technique du BIT pour traiter les lacunes identifiées et veiller à l’application pleine et effective des conventions nos 81 et 129 dans le pays.
Conclusions de la commission
La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par le gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission a pris note avec préoccupation de plusieurs questions relatives au respect des conventions, essentiellement en rapport avec l’inspection du travail et s’agissant de l’emploi de travailleurs migrants en situation irrégulière.
Prenant en compte la discussion, la commission prie instamment le gouvernement, en concertation avec les partenaires sociaux, de:
- améliorer la collecte de données ventilées sur l’inspection du travail, notamment par la constitution d’une base de données intégrée en coordination avec les différentes agences et organismes investis de fonctions d’inspection du travail;
- envisager la création d’un mécanisme de consultation tripartite inspiré des Directives de l’OIT sur les principes généraux de l’inspection du travail afin de garantir une élaboration, une adoption et un réexamen efficaces des politiques, stratégies, programmes et plans en matière d’inspection, accompagné d’un renforcement des mesures de mises en application tenant compte des considérations de genre s’agissant des avis de constat et du recouvrement des arriérés de salaires et de cotisations;
- envisager la constitution d’un fonds de protection des salaires et des cotisations en concertation avec les partenaires sociaux afin de garantir le paiement des arriérés de salaires et de cotisations;
- étendre la collecte de données statistiques relatives aux cas de manquements aux obligations contractuelles vis-à-vis des travailleurs en situation irrégulière, afin d’assurer la récupération des sommes dues pour compte de ces travailleurs, provenant en particulier d’arriérés de salaires et de cotisations sociales; et
- donner à l’inspection du travail les ressources nécessaires à un fonctionnement efficace.
La commission prie également le gouvernement de continuer à fournir des informations sur:
- le nombre de travailleurs migrants en situation irrégulière constaté par les inspecteurs du travail;
- le rôle des inspecteurs du travail en matière d’information des travailleurs migrants sur leurs droits au travail et pour faire appliquer ces droits; et
- le nombre de permis de séjour délivrés dans des «cas spéciaux» à la suite de la coopération des intéressés avec les services de l’inspection.
La commission invite le gouvernement à solliciter l’assistance technique de l’OIT afin de mettre en œuvre toutes les recommandations de la commission.
La commission prie le gouvernement de soumettre à la commission d’experts pour le 1er septembre 2023, un rapport sur les mesures prises et les progrès accomplis pour être en totale conformité avec la convention.
Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:
Suite aux commentaires formulés par la commission d'experts, le gouvernement a envoyé au BIT la documentation qui constitue une réponse partielle à l'observation de la commission sur la présente convention.
En outre, une représentante gouvernementale a déclaré que son gouvernement a fourni, au début de la présente Conférence, au Bureau la documentation demandée par la commission d'experts relative à l'application de la convention. Le rapport général annuel de 1987 contient des renseignements détaillés sur les activités des services d'inspection. Ce rapport fournit la majorité des informations demandées au titre de l'article 16 de la convention, en ce qui concerne le nombre d'inspections effectuées et leur fréquence. Les données permettent aussi d'évaluer les types d'inspection par secteur d'activité. Le gouvernement a également fourni le texte de la loi portant statut du personnel des unités sanitaires locales affecté à des tâches d'inspection, en réponse à la demande de la commission d'experts à propos de l'article 6 de la convention. Le gouvernement, en étudiant le contenu du rapport sur les activités d'inspection, a constaté que, bien que dotés d'un personnel dûment qualifié, les services d'inspection devraient être renforcés pour faire face aux exigences croissantes en matière de contrôle et de surveillance. En ce qui concerne le problème de la coordination entre les divers services ayant des fonctions d'inspection, le gouvernement convient que cela rentre dans le champ d'application de l'article 5 de la convention. Un malentendu s'est cependant produit concernant les réponses fournies il y a quelques années par le gouvernement. Plusieurs institutions assurent la coordination aux différents niveaux: local, régional et national. Les unités sanitaires locales, bien qu'étant des entités juridiques jouissant d'une complète autonomie, dépendent, en ce qui concerne leur organisation, des structures locales et territoriales (c'est-à-dire régions et communes). Au niveau national, l'application et l'interprétation des normes relatives à la protection sur le lieu de travail relèvent de la compétence du ministère du Travail qui, sur demande ou de sa propre initiative, peut élaborer des directives et des instructions qui sont discutées au sein d'une commission permanente sur la prévention des accidents et l'hygiène du travail. Il y a manifestement certains problèmes de coordination quand il s'agit de questions relatives à la santé des travailleurs et au respect des normes techniques sur le lieu de travail. Concernant ces aspects, les unités sanitaires locales disposent d'un conseil interzonal ayant des ramifications dans les zones d'activité économique les plus importantes. En réponse au point soulevé dans le rapport de la commission d'experts concernant l'article 9 de la convention, le gouvernement a souligné que, dans la pratique, des techniciens spécialisés dans divers secteurs, tels qu'experts en hygiène du travail, ingénieurs et médecins, collaborent avec chaque comité. Le gouvernement a fourni régulièrement des rapports annuels au titre des articles 20 et 21 de la convention, à l'exception d'une certaine période où ont surgi des difficultés de fonctionnement dues à l'entrée en vigueur de la nouvelle législation. Le gouvernement demeure attentif aux problèmes de l'efficacité de l'inspection du travail. Ces dernières années, les mesures qui pourraient être adoptées en réponse à l'introduction massive de nouvelles technologies dans les processus de production ont fait l'objet d'intenses discussions. Des efforts ont été déployés pour rechercher des moyens plus efficaces de garantir une protection maximale des travailleurs et pour sauvegarder l'environnement. Le gouvernement s'engage à fournir toute autre documentation qui pourra servir à l'appréciation du niveau d'application de la convention.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental de sa déclaration. Pendant quelques années, on a constaté un certain nombre de lacunes eu égard à une série d'articles de cette importante convention. On manque encore d'informations suffisantes sur la fréquence des inspections, la coopération entre les services d'inspection du travail et les unités sanitaires locales, ainsi que sur le statut du personnel de ces dernières. Malgré les problèmes de coordination, la commission d'experts devrait pouvoir disposer des informations pertinentes, surtout lorsqu'il s'agit des importants rapports annuels concernant l'inspection; or tel n'est pas le cas depuis maintenant dix ans. Bien que le représentant gouvernemental semble dire que des rapports sont envoyés régulièrement, la commission d'experts fait observer qu'aucun rapport annuel n'a été reçu par le Bureau depuis 1978. Selon les informations écrites fournies récemment par le gouvernement, un rapport substantiel a maintenant été communiqué. Il est à espérer que celui-ci contiendra toutes les informations nécessaires, et que de telles données seront désormais fournies régulièrement, afin d'éviter une nouvelle coupure de plusieurs années où la commission d'experts ne dispose d'aucune information.
Les membres travailleurs se sont félicités des nouvelles informations fournies par le gouvernement. Une réponse partielle aux points soulevés par la commission d'experts est ainsi donnée, mais cela n'est encore pas tout à fait satisfaisant. Ils ont estimé que le fait de ne pas avoir envoyé de rapports depuis 1978 constitue une irrégularité et n'est pas normal. Cela les amène à redouter l'existence d'autres manquements, en ce qui concerne l'inspection du travail. Ils ont rappelé le rôle vital que l'inspection joue dans la vérification de l'application des lois dans les faits, par exemple dans le domaine de l'égalité des chances. Les membres travailleurs se sont réjouis de la déclaration du gouvernement selon laquelle celui-ci désire renforcer le personnel des services d'inspection afin de s'acquitter des obligations découlant de la convention.
Le membre travailleur de l'Italie s'est déclaré surpris tant de l'optimisme exprimé par le gouvernement que de l'annonce, qu'il a faite, selon laquelle il fournit désormais les informations requises par la commission d'experts. Il avait espéré entendre son gouvernement s'engager à essayer de prévenir le nombre important d'accidents du travail survenant en Italie. Il s'est demandé comment expliquer ces accidents, si tout va tellement bien. Il y a eu, en 1987, un million d'accidents du travail, provoquant 1500 morts et 50000 cas d'invalidité permanente. Il a exprimé l'espoir que le gouvernement renforcera les services d'inspection du travail avant 'qu'il ne soit trop tard pour d'autres travailleurs. L'absence d'inspection du travail fournit aux employeurs la possibilité de ne pas respecter la législation du travail. Les syndicats ont souvent demandé au gouvernement de prendre des mesures pour remédier à cette situation. L'orateur a ajouté, en conclusion, que le Sénat a récemment mis sur pied une commission d'enquête sur l'inspection du travail et les conditions prévalant sur le lieu de travail.
La représentante gouvernementale a admis que sa réponse n'était que partielle, mais elle a essayé de fournir des informations supplémentaires, notamment sur la coordination. Toutes les données requises sur la fréquence des inspections figurent dans le rapport dont elle a déjà fait mention. Malheureusement, on peut affirmer que le nombre des accidents du travail et des conséquences assez graves qu'ils provoquent est très élevé. Son gouvernement fait un effort pour trouver une solution aux problèmes de l'inspection. Malheureusement, le nombre de personnes qui y sont affectées est encore trop faible, et des inspections menées régulièrement et en temps voulu ne peuvent pas être assurées. La commission d'enquête à laquelle le membre travailleur de l'Italie témoigne des efforts déployés par les autorités de son pays pour garantir la pleine application de la convention.
Les membres travailleurs ont estimé que les commentaires formulés au cours de la discussion ont souligné la nécessité absolue de disposer de services d'inspection du travail fonctionnant correctement, et de fournir régulièrement des informations à cet égard. A la lumière des statistiques relatives aux accidents qui ont été mentionnés, il faut adopter des mesures en dehors du cadre de l'inspection du travail, telles qu'une meilleure protection pour les travailleurs aux termes des dispositions prévues dans la législation et des conventions collectives librement conclues.
La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par le gouvernement, ainsi que de la discussion qui a eu lieu. Elle a exprimé l'espoir que le gouvernement sera en mesure de fournir des informations détaillées sur l'ensemble des points soulevés par la commission d'experts, et que des progrès réels pourront être enregistrés à cet égard, notamment en ce qui concerne la publication régulière et la communication au BIT de rapports annuels sur l'inspection du travail - conformément aux exigences de la convention - ainsi que les mesures visant à renforcer les structures et le personnel des services de l'inspection du travail, tout comme à améliorer la prévention des accidents.
Commentaire précédent
La commission prend note du rapport du gouvernement reçu en juillet 2008, de ses réponses aux précédents commentaires et des nombreux documents en annexe concernant l’application du décret législatif no 124 du 23 avril 2004 sur la rationalisation des fonctions d’inspection relatives à la sécurité sociale et au travail.
Article 3, paragraphe 2, de la convention. Effets du contrôle et de la répression de l’emploi illégal et du travail clandestin sur le contrôle des conditions de travail. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que de nombreuses mesures à caractère structurel et législatif prises en application du décret législatif no 124/2004 étaient centrées sur le renforcement des pouvoirs du ministère du Travail et de la Politique sociale dans le domaine de la lutte contre le travail clandestin et l’emploi illégal, et que les inspecteurs du travail étaient des acteurs importants du dispositif mis en place à cette fin. La commission avait souligné la nécessité de rétablir les inspecteurs du travail dans les fonctions définies par la convention, et de limiter leur collaboration avec les services chargés du contrôle de l’immigration dans une mesure compatible avec l’objectif de la convention.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les prérogatives des inspecteurs ne se limitent pas au contrôle des travailleurs clandestins extracommunautaires, et qu’elles visent essentiellement à assurer le respect de la législation sur l’emploi et de la législation sociale. Le gouvernement énumère les fonctions des inspecteurs du ministère du Travail, de la Santé et de la Politique sociale prévues par la loi no 628 du 22 juillet 1961 et par le décret législatif no 124 du 23 avril 2004. Elles comprennent le contrôle de l’application de l’ensemble de la législation sur les droits civiques et sociaux, la protection des relations professionnelles et le contrôle occasionnel des accords contractuels, typiques ou atypiques; le contrôle de la bonne application des contrats et des conventions collectives; le contrôle de la sécurité au travail, limité au secteur de la construction; le contrôle du fonctionnement des caisses de retraite et des activités sociales menées par les associations professionnelles; la réalisation d’enquêtes à la demande du ministère du Travail et les fonctions requises par la législation et la réglementation ou déléguées par le ministère du Travail.
Le gouvernement ajoute que le suivi et le contrôle sont confiés aux inspecteurs du ministère du Travail, de la Santé et de la Politique sociale, mais également aux Carabinieri de la Divison de la protection du travail, aux inspecteurs des organismes de sécurité sociale et d’assurance et aux inspecteurs des autorités sanitaires locales. Les inspecteurs du ministère du Travail opèrent comme des fonctionnaires de la police criminelle, dans les limites des fonctions qui leur sont attribuées et en vertu de prérogatives conférées par la législation en vigueur. Les Carabinieri de la Division de la protection du travail remplissent des fonctions similaires à celles des inspecteurs du ministère du Travail et mènent eux aussi des activités de police criminelle. Toutefois, celles-ci ne sont pas menées dans les limites de fonctions attribuées et en vertu de prérogatives conférées par la législation en vigueur. Les inspecteurs de l’Institut national de sécurité sociale (INPS), de l’Institut national d’assurance contre les accidents du travail (INAIL) et d’autres organes, qui n’ont pas le statut de fonctionnaires ou d’agents de la police criminelle, exercent aussi des fonctions de suivi et de contrôle concernant les retraites et les questions sociales. Enfin, les autorités sanitaires locales ont également des agents chargés de suivre et de contrôler l’application de la législation sur la sécurité et la santé au travail. Comme les inspecteurs du travail, ces agents ont le statut d’officiers de la police criminelle.
La commission note également que, d’après les observations de la Confédération italienne des petites et moyennes entreprises (CONFAPI) concernant le rapport du gouvernement, la législation italienne est largement conforme à la convention dans ce domaine.
Enfin, la commission prend note des informations détaillées sur les résultats d’enquêtes spéciales effectuées au deuxième semestre des années 2006 et 2007, ainsi que de plusieurs circulaires prises par l’inspection générale du ministère du Travail depuis le 28 septembre 2006 en vue d’appliquer le décret législatif no 124. La commission relève que le contrôle du caractère légal de l’emploi, y compris de l’emploi de migrants clandestins, semble être le but principal de ces circulaires et enquêtes.
Comme la commission le soulignait dans ses commentaires antérieurs, en vertu des dispositions de la convention, le rôle de l’inspection du travail n’est pas de contrôler la légalité de la relation de travail mais les conditions dans lesquelles le travail est exécuté, et le système d’inspection du travail doit couvrir tous les travailleurs salariés ou apprentis, quels que soient leur mode de rémunération et le type, la forme ou la durée de leur contrat. La collaboration avec les services chargés du contrôle de l’immigration devrait être menée avec prudence, en gardant à l’esprit que le principal objectif de l’inspection du travail est la protection des droits et des intérêts de tous les travailleurs et l’amélioration des conditions de travail. Il y a lieu de souligner à cet égard que l’expression «pendant l’exercice de leur profession» employée à l’article 3, paragraphe 1 a), de la convention signifie que la protection de l’inspection du travail doit être assurée aux travailleurs pendant la période d’engagement.
La commission estime que le fait d’impartir aux inspecteurs du travail un rôle de Carabinieri de la police criminelle risque de compromettre considérablement l’accomplissement de leur mission originelle telle qu’elle découle de la convention, à savoir la protection des travailleurs contre l’imposition de conditions de travail contraires à la législation. Comme indiqué dans les précédents commentaires, l’association systématique des inspecteurs du travail aux opérations coordonnées de lutte contre l’emploi illégal ne favorise nullement l’établissement du climat de confiance nécessaire à la collaboration des travailleurs en situation irrégulière au regard du droit de séjour, cette collaboration s’effectuant en particulier par le biais de signalements et de plaintes auprès des inspecteurs du travail. L’association des inspecteurs à ces opérations constitue au contraire un obstacle à la possibilité des inspecteurs d’obtenir des informations sur les conditions de travail de ces travailleurs.
En conséquence, la commission souligne à nouveau que le gouvernement doit prendre des mesures visant à distinguer de manière suffisamment claire les prérogatives et les méthodes de travail des inspecteurs du travail de celles des autres corps de fonctionnaires chargés de lutter contre l’emploi et l’immigration illégaux. Une telle dissociation n’exclut nullement la possibilité d’établir une forme de collaboration consistant de la part des inspecteurs du travail à appeler l’attention des autorités compétentes sur les employeurs qui contreviennent à la législation relative aux conditions de travail et à la protection des travailleurs, notamment en ce qui concerne les abus constatés à l’encontre de travailleurs en situation irrégulière. La commission souligne à nouveau que les conséquences pécuniaires (amendes et créances dues aux travailleurs) résultant des actions de l’inspection du travail peuvent constituer un moyen de dissuasion efficace pour lutter contre l’emploi de personnes en situation irrégulière au regard de la législation du travail. La commission prie le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, toute mesure prise ou envisagée pour rétablir les inspecteurs du travail dans les fonctions définies par la convention et limiter leur collaboration avec les services chargés du contrôle de l’immigration dans une mesure compatible avec l’objectif de la convention. Elle saurait gré au gouvernement de tenir le Bureau informé de tout progrès réalisé dans ce sens ou de lui faire part, le cas échéant, de toute difficulté rencontrée.
Articles 20 et 21. Publication et communication au BIT d’un rapport annuel d’inspection. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note de la décision du gouvernement de ne pas publier de rapport annuel dans l’immédiat en raison de réformes institutionnelles qui concernaient pour l’essentiel les méthodes de collecte de statistiques. Or la commission note que, d’après le dernier rapport du gouvernement, les résultats des activités des services d’inspection sont publiés sur le site Internet du ministère du Travail, ou rendus publics au cours de conférences de presse. La commission rappelle que l’article 20, paragraphes 1 et 2, de la convention prescrit la publication d’un rapport annuel d’inspection et prie à nouveau le gouvernement de publier, dans un proche avenir, un tel rapport contenant des informations détaillées sur chacun des points mentionnés à l’article 21, et de veiller à ce qu’une copie en soit communiquée au BIT dans les délais prévus par l’article 20, paragraphe 3.
La commission prend note du rapport du gouvernement reçu en octobre 2006, des réponses à ses commentaires antérieurs, ainsi que de la documentation abondante jointe en annexe, dont les circulaires explicatives prises en application du décret législatif no 124 du 23 avril 2004 sur la rationalisation des fonctions d’inspection relatives à la sécurité sociale et au travail.
1. Article 3, paragraphe 2, de la convention. Contrôle des conditions de travail, et contrôle et répression de l’emploi illégal et du travail clandestin. Ainsi que la commission le soulignait dans ses commentaires antérieurs, le rôle de l’inspection du travail, en vertu des dispositions de la convention, n’est pas de contrôler la légalité de la relation de travail mais les conditions dans lesquelles le travail est exécuté. Au paragraphe 77 de son étude d’ensemble de 2006 sur l’inspection du travail, la commission a rappelé que ni la convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947, ni la convention (nº 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969, ne contiennent de disposition suggérant l’exclusion de quelque travailleur que ce soit de la protection de l’inspection du travail en raison du caractère irrégulier de sa relation de travail. Elle s’est fondée à cet égard sur l’article 4 de la convention no 129 en vertu duquel le système d’inspection doit couvrir dans le secteur agricole tous les travailleurs salariés ou apprentis, quels que soient leur mode de rémunération et le type, la forme ou la durée de leur contrat. La commission a en effet relevé qu’au cours des travaux préparatoires de l’adoption de cette disposition, la plupart des Membres qui se sont exprimés étaient d’avis que l’existence d’une relation salariale avec l’exploitant agricole devait être le critère déterminant pour identifier les travailleurs couverts. La commission a observé, au paragraphe 161 de son étude d’ensemble précitée, qu’en raison du nombre croissant de travailleurs étrangers et de migrants dans de nombreux pays l’inspection du travail est fréquemment appelée à collaborer avec les autorités chargées de l’immigration et qu’il convenait que cette collaboration soit menée avec prudence, en gardant présent à l’esprit que le principal objectif de l’inspection du travail est de protéger les droits et les intérêts de tous les travailleurs et d’améliorer leurs conditions de travail. Il y a lieu de souligner à cet égard que l’expression «pendant l’exercice de leur profession» employée dans l’article 3, paragraphe 1 a), de la convention indique que la protection de l’inspection du travail doit être assurée aux travailleurs tout au long de la période au cours de laquelle ils sont engagés dans leur relation de travail. La commission note que de nombreuses mesures à caractère structurel et législatif prises en application du décret législatif no 124/2004 sont centrées sur le renforcement des pouvoirs du ministère du Travail et de la Politique sociale dans le domaine de la lutte contre le travail clandestin et l’emploi illégal et que les inspecteurs du travail sont des acteurs importants du dispositif mis en place à cette fin. Elle estime que le rôle imparti aux inspecteurs du travail dans cette perspective peut compromettre sévèrement la réalisation de l’objectif de leur mission originelle telle qu’elle découle de la convention, à savoir d’assurer la protection des travailleurs contre l’imposition de conditions de travail contraires aux dispositions légales. La réalisation de cet objectif par les inspecteurs dépend en effet dans une large mesure de la collaboration, notamment par des signalements et des plaintes aux inspecteurs du travail, de tous les travailleurs, sans distinction fondée sur le type ou la forme de leur contrat de travail. L’association systématique des inspecteurs du travail aux opérations coordonnées de lutte contre l’emploi illégal ne favorise nullement l’établissement du climat de confiance nécessaire à une telle collaboration de la part des travailleurs en situation irrégulière au regard du droit de séjour et de travail. Elle constitue au contraire un obstacle aux opportunités pour les inspecteurs d’obtenir des informations quant aux conditions de travail vécues par les travailleurs des établissements les plus concernés.
La commission ne saurait donc trop insister auprès du gouvernement pour qu’il prenne des mesures visant à distinguer de manière suffisamment claire les compétences et méthodes de travail des inspecteurs du travail de celles des autres corps de fonctionnaires chargés de la lutte contre l’emploi illégal. Une telle dissociation n’exclut nullement au demeurant la possibilité d’établir une forme de collaboration consistant de la part des inspecteurs à appeler l’attention des autorités compétentes sur les employeurs en infraction à la législation sur les conditions de travail et la protection des travailleurs, notamment, en ce qui concerne les abus constatés à l’encontre de travailleurs en situation irrégulière. L’action des inspecteurs devrait permettre, pour rester conforme à l’objectif de leur mission, la mise en œuvre de poursuites légales à l’encontre des employeurs en infraction, impliquant non seulement l’application de sanctions appropriées en fonction des diverses catégories d’infractions constatées, mais également la condamnation au versement des sommes qui resteraient dues aux travailleurs concernés pour la durée effective de leur relation de travail. Les conséquences pécuniaires (amendes et créances dues aux travailleurs) résultant des actions de l’inspection du travail peuvent constituer un moyen efficace de dissuasion pour lutter contre le phénomène d’emploi de personnes en situation irrégulière au regard de la législation relative à l’emploi. La commission espère que le gouvernement ne manquera pas de prendre des mesures visant à rétablir les inspecteurs du travail dans les fonctions définies par la convention et à limiter leur collaboration avec les services chargés du contrôle de l’immigration dans une mesure compatible avec l’objectif de la convention. Elle lui saurait gré de tenir le Bureau informé de tout progrès à cet égard ou de lui faire part, le cas échéant, de toute difficulté rencontrée.
2. Articles 20 et 21. Publication et communication au BIT d’un rapport annuel d’inspection. La commission note qu’en raison de la mise en œuvre des réformes institutionnelles de l’inspection du travail, y compris des méthodes de collecte des statistiques, le gouvernement estime qu’il n’est pas approprié d’assurer dans l’immédiat la publication d’un rapport annuel. Elle espère que ce rapport pourra néanmoins être publié dans un proche avenir, qu’il contiendra des informations détaillées sur chacune des questions visées par l’article 21 et qu’une copie en sera communiquée au BIT dans les délais requis par l’article 20.
La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que de la documentation jointe. Elle note avec intérêt que, selon le gouvernement, des mesures ont été prises pour renforcer et rationaliser le contrôle relatif aux conditions de travail, en particulier l’article 8 de la loi no 30 du 14 février 2003 annonçant des décrets portant création d’une direction générale chargée de la coordination des activités de différents services de contrôle, ainsi que des directions régionales. Des décrets sont également prévus dans les domaines de la prévention des conflits individuels, des relations de travail, de la sécurité sociale, des procédures administratives ainsi que pour préciser la fonction de conseil de l’inspection. La commission saurait gré au gouvernement de communiquer copie des textes adoptés.
1. Article 3, paragraphe 2, de la convention. La commission note que des visites d’inspection relatives à la fiscalité seront combinées avec celles de l’Institut national de l’assurance des accidents du travail (INPS et INAIL) pour combattre l’emploi clandestin. La commission souligne que les dispositions légales couvertes par la convention sont celles relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession. Le rôle de l’inspection du travail, en vertu des dispositions de la convention, n’est pas de contrôler la légalité de la relation de travail mais les conditions dans lesquelles le travail est exécuté. Il est extrêmement important que les inspecteurs du travail ne soient pas confondus avec les contrôleurs du fisc. Une telle assimilation aurait pour effet de compromettre gravement, sinon de détruire, le climat de confiance minimum qui devrait exister dans leurs rapports avec les employeurs et les travailleurs. Or les opérations de localisation et de poursuite des infractions à la législation sur l’emploi conduisent généralement, aussi bien de la part des employeurs ciblés que des travailleurs qu’ils occupent en raison de la réciprocitéévidente de leurs intérêts, à des manifestations d’hostilité, voire d’agressivité et de violence, vis-à-vis des contrôleurs. Qu’ils soient en situation régulière ou non, les travailleurs couverts par la convention ont des droits en matière de conditions de travail et devraient pouvoir bénéficier de la même protection dans certains domaines, tels ceux relatifs au salaire, à la durée du travail, à la santé et à la sécurité sur les lieux de travail. Les travailleurs constituent une source essentielle d’informations sur la manière dont la loi est appliquée et sur les violations perpétrées dans les établissements assujettis et ne devraient pas hésiter à s’adresser aux inspecteurs en raison du flou éventuel de leur situation juridique.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour éviter, conformément au paragraphe 2 de l’article 3, que les fonctions additionnelles qui sont confiées aux inspecteurs du travail ne portent pas préjudice à l’exercice de leurs fonctions principales définies par le paragraphe 1 (contrôle de la législation sur les conditions de travail; conseils et avis techniques sur son application et participation à son amélioration) ou à l’autorité et l’impartialité nécessaire dans leurs relations avec les employeurs et les travailleurs.
Article 5 a). La commission note que l’inspection du travail est chargée du contrôle de la santé et de la sécurité du travail dans des secteurs spécifiques tels que le secteur de la construction, le secteur ferroviaire, les travaux publics en sous-sol et sous l’eau, les explosifs et les installations hydrauliques. La commission note également que les régions sont en charge d’assurer des mesures préventives en matière d’accidents de travail et d’hygiène au travail à travers des unités locales de santé, auxquelles sont conférés des pouvoirs d’inspection. Selon le gouvernement, les pouvoirs de contrôle en matière de sécurité au travail sont exercés conjointement par les inspecteurs du travail et par les communes à travers des unités de santé. La commission prie le gouvernement de fournir les textes régissant ce partage de compétence ainsi que les procédures de collaboration susmentionnées.
Articles 6 et 7. La commission note avec intérêt les dispositions législatives prévoyant l’allocation de ressources financières pour l’amélioration de la formation des inspecteurs du travail, l’organisation d’ateliers d’inspection du travail et l’augmentation des moyens techniques des services d’inspection, y compris pour la formation à distance, destinés à leur permettre d’accomplir les tâches supplémentaires qui leur seront confiées.
Articles 10 et 16. Selon le gouvernement, le nombre de visites d’inspection a augmenté, entre 2002 et 2004, passant de 143 336 à 178 637, et le nombre d’établissements inspectés de 125 576 à 157 194. La commission saurait gré au gouvernement de fournir des précisions sur la répartition des visites par type et par objet, distinguant notamment celles qui ciblent les conditions de travail de celles relatives à d’autres domaines.
Articles 20 et 21. La commission prend note des données concernant les accidents du travail et les cas de maladie professionnelle, le personnel et les inspections effectuées conjointement avec le service ferroviaire de l’Etat. Elle relève néanmoins qu’un rapport annuel d’inspection du travail conforme quant à la forme et au fond aux dispositions susvisées de la convention n’est pas communiqué. Elle prie en conséquence le gouvernement de veiller à l’exécution par l’autorité centrale d’inspection du travail de son obligation de publication et de communication d’un tel rapport au BIT, dans les délais requis. Des orientations sur les informations qui devraient être contenues dans le rapport annuel sont données par le point 9 de la recommandation no 81 qui complète la convention.
Faisant référence à ses précédents commentaires, la commission prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement dans son rapport ainsi que de l’abondante documentation jointe.
Articles 4 et 5 de la convention. Dans sa précédente observation, la commission a noté que l’organisme d’inspection du travail agit en tant qu’autorité centrale et coordonne divers services engagés dans des activités ayant trait à la sécurité et à la santé au travail. A cet égard, elle note avec intérêt que la programmation et la coordination de la surveillance intégrée ont donné une nouvelle impulsion aux services d’inspection et que, notamment, les inspecteurs du travail de différentes autorités ont déployé des activités dans le domaine de la sécurité comptable, fiscale et sociale, respectivement, sous la coordination du comité central créé par le décret ministériel du 23 septembre 1998. La commission espère que le gouvernement continuera de fournir des informations sur toutes les nouvelles mesures prises pour renforcer l’inspection du travail.
La commission constate que le rapport du gouvernement ne contient aucune réponse à son précédent commentaire sur la manière dont les organisations d’employeurs et de travailleurs ont réagi aux textes législatifs récemment adoptés au sujet des devoirs de l’organisme d’inspection du travail dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail. Elle saurait gré au gouvernement de fournir cette information dans son prochain rapport.
Se référant également à son observation, la commission saurait gré au gouvernement de fournir des informations complémentaires sur les points suivants.
Article 3, paragraphe 2, et articles 9 et 10 de la convention. La commission note que les services de l’inspection du travail assurent en plus des fonctions prévues par l’article 3, paragraphe 1, diverses autres tâches au titre des nouveaux textes légaux: coordination et contrôle dans le domaine des activités du travail en immersion (loi du 23 décembre 1998); liaison entre employeurs et demandeurs d’emploi au niveau provincial (décret-loi du 23 décembre 1997); contrôle des transferts de travailleurs entre les entreprises pour l’exécution de contrats de travail temporaire (loi no96-97); conduite de la procédure de conciliation préalable obligatoire en matière de conflit de travail (décret-loi no80 du 31 mars 1998), cette procédure concernant des milliers de cas par an; vérification des «accords provinciaux de réalignement» (loi no 448-98); approbation des programmes d’amélioration de la sécurité au travail (décrets-lois nos626/94 et 242/96 d’application des directives européennes). Par ailleurs, l’inspection est désormais chargée, aux lieu et place de l’autorité judiciaire, d’effectuer, dans des délais très courts, à la demande de l’Autorité de la sécurité publique, des enquêtes sur les causes des accidents du travail ayant entraîné le décès d’un travailleur ou une incapacité de travail de plus de 30 jours (décret-loi no51 du 19 février 1998). De l’avis même du gouvernement, cette dernière fonction implique, à elle seule, au regard de la complexité des textes et normes applicables, une surcharge de travail justifiant l’augmentation non seulement quantitative, mais également qualitative du personnel technique et administratif de l’inspection du travail. La commission estime pour sa part que la mission de contrôle de la sécurité et de la santé au travail dans les secteurs d’activité particulièrement exposés aux risques, tels la construction, l’air comprimé, le génie civil et les travaux souterrains, impartie aux inspecteurs du travail par le décret du 14 octobre 1997, exige une connaissance approfondie de domaines techniques et scientifiques qui ne font pas forcément partie des programmes de formation générale des inspecteurs du travail et rappelle au gouvernement que, suivant l’article 9, des mesures devraient être prises pour assurer la collaboration d’experts et de techniciens dûment qualifiés, y compris des techniciens en médecine, en mécanique, en électricité et en chimie, au fonctionnement de l’inspection, selon les méthodes jugées les plus appropriées afin d’assurer l’application des dispositions légales relatives à l’hygiène et à la sécurité des travailleurs dans l’exercice de leur profession, et de s’enquérir des effets et des procédés employés, des matières utilisées et des méthodes de travail, sur l’hygiène et la sécurité des travailleurs. Notant que le gouvernement envisage, pour faire face à la diversité et à la complexité des fonctions mises à la charge des inspecteurs du travail, un renforcement des services d’inspection notamment par de nouveaux recrutements et par des transferts de fonctionnaires exerçant dans d’autres services de l’administration du travail, la commission le prie de tenir le BIT informé des progrès accomplis à cet égard en précisant la nouvelle répartition par catégorie et par qualification des personnels de l’inspection du travail à travers le territoire.
Coopération entre les services d’inspection, d’une part, et d’autres services gouvernementaux et les institutions publiques et privées exerçant des activités analogues, d’autre part (article 5, paragraphe 1). Le gouvernement souligne que l’informatisation poussée du système d’inspection du travail est un facteur important de son efficacité et que la coordination au sein de l’administration centrale et entre celle-ci et les différentes autorités de contrôle est une condition essentielle de l’application correcte des dispositions législatives récemment adoptées en matière d’inspection du travail. Il signale que c’est au sein de ces commissions de coordination (CC) instituées par le décret-loi no126 de 1994 et dont la structure et les fonctions sont définies par le décret du 5 décembre 1997 que s’effectue la coordination au niveau régional et que l’inspection du travail et les conseils locaux de la santé collaborent à l’établissement des programmes de travail. Le gouvernement signale en outre les échanges périodiques d’informations entretenus entre les différents acteurs intervenant dans des missions relevant de fonctions définies par la convention comme des fonctions principales de l’inspection. La commission saurait gré au gouvernement d’indiquer de manière précise le ou les organes désormais chargés aux niveaux local, régional et central de communiquer au service central d’inspection du travail les informations chiffrées devant figurer dans le rapport annuel d’inspection sur les questions définies à l’article 21 b), c), d), e), f) et g) de la convention et concernant tous les établissements couverts par la convention. Elle le prie également de fournir des détails sur la manière et la périodicité de la communication de ces informations.
La commission prend note avec satisfaction du rapport du gouvernement, des informations détaillées fournies en réponse à ses commentaires antérieurs ainsi que de la documentation abondante attestant des efforts législatifs déployés et de mesures d’ordre pratique prises en vue d’une amélioration substantielle dans l’application de la convention.
1. Rôle de l’inspection du travail en matière de contrôle et de coordination des services exerçant des activités liées au contrôle de la législation relative aux conditions de travail. La commission note les informations et documents indiquant que l’inspection du travail est à nouveau chargée de fonctions relatives au contrôle de la santé et de la sécurité au travail, fonctions qui avaient été préalablement transférées aux unités locales sanitaires, ce qui avait fait l’objet de critiques de la part des organisations d’employeurs et de travailleurs. Tout en notant que les attributions de l’inspection du travail dans ce domaine restent limitées et ne s’exercent que dans les établissements de travail caractérisés par des risques majeurs à la santé et à la sécurité, la commission constate toutefois que, conformément aux dispositions des articles 4 et 5 de la convention, l’inspection du travail agit en tant qu’autorité centrale et assure la coordination entre les différentes entités exerçant des fonctions liées à la santé et à la sécurité au travail dans tous les secteurs d’activité. La commission saurait gré au gouvernement d’indiquer de quelle manière les organisations d’employeurs et de travailleurs ont accueilli les textes législatifs récemment adoptés pour rétablir les fonctions de l’inspection du travail en matière d’hygiène et sécurité au travail.
2. Travail des enfants. Se référant également à son observation générale de 1999 concernant l’inspection du travail et le travail des enfants, la commission relève avec un intérêt particulier les initiatives récemment mises en œuvre pour lutter contre le travail infantile, notamment l’adoption de dispositions législatives relatives au renforcement de l’instruction obligatoire et la préparation d’un décret visant à donner effet aux dispositions de la Directive européenne no 94/33/CE sur la protection des jeunes travailleurs. Elle espère que le gouvernement communiquera au BIT copie dudit décret dès sa publication.
La commission a pris note du rapport du gouvernement. Elle a également noté les commentaires de l'Association syndicale des entreprises de crédit sur la manière dont la convention est appliquée.
Articles 3 et 5 de la convention. La commission a noté que, suivant le décret législatif no 687 du 7 novembre 1996 relatif à l'unification des services périphériques et à la réorganisation des directions régionales et provinciales du travail, les directions régionales du travail comportent un secteur inspection du travail auquel sont attribuées les fonctions techniques précédemment exécutées par les inspections régionales du travail, et les directions provinciales du travail comportent un secteur inspection du travail chargé des fonctions techniques de nature juridique liées aux activités d'inspection précédemment remplies par les inspections provinciales du travail. La commission note en outre, selon les informations fournies par le rapport du gouvernement, que les fonctions principales du système d'inspection du travail prescrites par l'article 3, paragraphe 1, de la convention sont exercées par différentes structures publiques dont les services de l'inspection du travail. Elle a également noté que les services de l'inspection du travail exercent des attributions dans de nombreux domaines connexes. L'Association syndicale des entreprises de crédit (ASSICREDITO) évoque pour sa part la question du transfert aux unités sanitaires locales, en vertu de la loi no 833 du 23 décembre 1978, des compétences de l'inspection du travail en matière de prévention et d'hygiène du travail. La commission avait déjà exprimé dans son observation antérieure ses préoccupations quant aux problèmes de coordination qu'un tel transfert pouvait générer et fait référence à cet égard au commentaire de l'Association syndicale des entreprises pétrochimiques et connexes (ASAP). La commission relève cependant que les modifications de la législation, annoncées dans le rapport du gouvernement communiqué en 1991, en vue de restituer aux services de l'inspection une grande partie de leurs attributions pour permettre une meilleure coordination des organes concourant au contrôle, n'ont pas atteint leur objectif. La commission rappelle que, suivant l'alinéa a) de l'article 5, l'autorité compétente devra prendre les mesures appropriées pour favoriser une coopération effective entre les services d'inspection, d'une part, et les services gouvernementaux et les institutions publiques et privées exerçant des activités analogues, d'autre part. Elle espère que le gouvernement ne tardera pas à mettre en oeuvre les mesures visant à faire porter effet à cette disposition et qu'il fournira dans son prochain rapport des informations détaillées sur tout progrès réalisé à cet égard.
Article 4. Notant l'indication du gouvernement selon laquelle des réformes visant à la décentralisation de certaines fonctions sont en cours mais que l'inspection du travail continuerait à être assurée par l'administration centrale, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l'évolution des réformes et sur son incidence éventuelle sur l'inspection du travail.
Articles 20 et 21. La commission note que le dernier rapport annuel d'inspection communiqué au BIT concerne l'année 1992. Les rapports du gouvernement successifs subséquents relatifs à l'application de la convention font état de modifications substantielles à caractère législatif et réglementaire dans les domaines de l'organisation et de la répartition des compétences inhérentes aux fonctions de l'inspection du travail. La commission regrette du fait de l'absence de rapports annuels d'inspection depuis cinq ans de ne pas être en mesure d'apprécier les effets de ces modifications sur l'évolution en pratique de l'application de la convention. La commission rappelle au gouvernement qu'une copie de rapports annuels à caractère général sur les travaux des services d'inspection placés sous le contrôle de l'autorité centrale d'inspection du travail devrait être communiquée au Directeur général du BIT dans un délai ne dépassant pas trois mois après leur parution (article 20, paragraphe 3). Soulignant que les rapports annuels d'inspection constituent une documentation indispensable pour l'appréciation du fonctionnement effectif du système d'inspection prévu par la convention, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soit assurée, à l'avenir, dans les délais prescrits, la communication au BIT desdits rapports, lesquels devront porter sur chacun des sujets énumérés par l'article 21.
1. Article 5 de la convention. Dans des commentaires précédents, la commission s'est référée aux problèmes de coordination entre l'inspection du travail et les unités sanitaires locales, auxquelles ont été attribuées des responsabilités en ce qui concerne la sécurité et l'hygiène du travail. Elle note à présent qu'un projet de loi en discussion au Sénat permettra de rendre à nouveau aux inspecteurs du travail une grande partie des compétences attribuées à ces unités, permettant ainsi une meilleure coordination de l'activité de contrôle. Cela paraît répondre au point soulevé par l'Association syndicale des entreprises pétrochimiques et connexes (ASAP), selon laquelle l'abolition de la centralisation des inspections a eu des conséquences négatives: les accords entre les partenaires sociaux n'ont pu, en l'absence d'un schéma de référence sûr et de caractère national, combler les lacunes apparues. La commission espère que les progrès entrevus suivront et que le gouvernement fournira tous détails voulus à cet égard.
2. Articles 20 et 21. Compte tenu de ses demandes précédentes, la commission a noté la teneur du rapport annuel d'inspection pour 1990, encore que le rapport pour 1989 n'ait pas été reçu. Elle espère que des futurs rapports annuels seront publiés et communiqués au BIT conformément à la convention. Elle émet l'espoir qu'ils porteront sur tous les sujets énoncés à l'article 21, notamment des statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles.
3. Article 3, paragraphe 2. La commission relève qu'aux termes de l'article 14 de la loi no 146 de 1990 l'inspection du travail compétente contrôle le déroulement du scrutin pouvant être ordonné en cas de controverse sur l'exercice du droit de grève. Elle veut croire que les fonctions ainsi confiées aux inspecteurs du travail ne feront pas obstacle à l'exercice de leurs fonctions principales, ni ne porteront préjudice à l'autorité ou à l'impartialité nécessaires aux inspecteurs dans leurs relations avec les employeurs et les travailleurs. Elle espère que le gouvernement indiquera toutes difficultés d'ordre pratique qui se sont manifestées à cet égard.
4. Articles 16, 17 et 18. La commission a noté les commentaires du Syndicat bancaire autonome (FABI) quant aux problèmes portant sur l'application et le contrôle des dispositions qui visent la durée du travail et les heures supplémentaires à Salerne. Elle a pris connaissance également des informations transmises par le gouvernement à cet égard concernant les mesures prises par l'inspection du travail. La commission rappelle qu'il incombe aux inspecteurs du travail comme fonction principale d'assurer l'application sans faille des dispositions légales en matière de travail et espère que le gouvernement continuera de fournir tous détails voulus portant sur les problèmes constatés dans ce domaine.
5. La commission a également noté les commentaires de la Confédération générale italienne du commerce, du tourisme et des services (CONFCOMMERCIO).
Se référant à ses commentaires antérieurs, la commission a pris note des informations communiquées par le gouvernement concernant l'application des articles 9, 10 et 16 de la convention.
Article 5 a). En réponse aux commentaires de la commission concernant des problèmes de coordination entre l'inspection du travail et les unités sanitaires locales quand il s'agit des questions relatives à la santé des travailleurs et au respect des normes techniques sur le lieu de travail, le gouvernement déclare qu'il étudie actuellement certaines mesures destinées à rationaliser le contrôle de la sécurité et de l'hygiène du travail. La commission a pris note de ces indications et prie le gouvernement de la tenir informée de toutes les mesures prises à cet effet.
Articles 20 et 21. La commission a pris note du rapport annuel sur les activités de l'inspection du travail pour 1988 et des données statistiques relatives aux accidents du travail et des maladies professionnelles pour les années 1979-1987. Elle veut croire qu'à l'avenir des informations précises sur tous les sujets énumérés à l'article 21 seront incluses dans les rapports annuels d'inspection.
La commission a pris note avec intérêt des informations communiquées par le gouvernement en réponse à ses observations précédentes. Par ailleurs, elle adresse au gouvernement une demande directe sur certains points concernant l'application des articles 5 et 21 de la convention.