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Une représentante gouvernementale s'est référée à l'observation formulée par la commission d'experts dans laquelle il est indiqué que la référence à la Centrale des travailleurs de Cuba dans la législation constitue une limitation à la liberté syndicale. Les droits de réunion, de manifestation et d'association exercés par les travailleurs, ainsi que la reconnaissance de l'autonomie des organisations syndicales, sont d'ordre constitutionnel. Si à Cuba il existe seulement une centrale syndicale à laquelle adhèrent les 19 syndicats nationaux pour toutes les branches d'activité, ce n'est pas par l'imposition du gouvernement ni des dispositions législatives, mais en raison de la tradition d'unité du mouvement ouvrier à Cuba qui remonte à la fin du XIXe siècle. Ce mouvement a été renforcé par les luttes et les revendications des ouvriers à travers de plus d'un siècle, jusqu'à ce qu'ait été constituée, en 1939, avec la volonté des travailleurs, la Centrale des travailleurs de Cuba. Cette volonté d'unité du mouvement ouvrier a été réitérée et renforcée lors des congrès organisés par les organisations syndicales. La législation s'est seulement limitée à reconnaître une situation de faits existants.
Le décret-loi no 67 de 1983 sur l'organisation et le fonctionnement des organismes de l'administration centrale de l'Etat a été amendé, en ce qui concerne le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par le point 6 du décret-loi no 147 du 21 avril 1994, lequel a été envoyé au Bureau avec le rapport de cette année. Ce que la commission nomme "monopole syndical" dénature la réalité du syndicalisme à Cuba. S'il est vrai qu'il existe une seule centrale syndicale, en raison de la volonté des travailleurs, il existe d'autres instances où le mouvement syndical peut participer et prendre des décisions sur des questions qui intéressent les travailleurs. Les 19 syndicats participent par branche d'activité à ces différents niveaux de structure, depuis le niveau national jusqu'aux entités de base, de façon permanente et sans interférence quelconque ni interdiction, dans tout le processus de prise de décisions qui affecte les travailleurs, et ce depuis les organismes de l'administration centrale de l'Etat jusqu'au niveau des entreprises.
Le décret-loi no 229 du 1er avril 2002 a abrogé le décret-loi no 74 de 1983 sur les conventions collectives de travail. Il établit des dispositions qui confèrent à l'administration des entreprises et à l'organisation syndicale une participation décisive dans la détermination d'aspects essentiels, tels que l'emploi et autres conditions de travail. Ainsi, des conventions collectives de travail sont adoptées dans toutes les entités de travail, incluant les entreprises mixtes et les entreprises de capitaux étrangers. Ces conventions collectives sont adoptées après discussion et approbation par l'Assemblée des travailleurs, au sein de laquelle sont discutés le contenu, les obligations et les droits des parties.
Ni le Code du travail et ni la législation complémentaire n'établissent de règles ni de conditions pour la création de syndicats. Ces derniers existent et obtiennent la reconnaissance des travailleurs et des directions patronales par l'activité qui se déroule quotidiennement dans les centres de travail. Il n'existe aucun organisme ou département de l'administration de l'Etat qui enregistre ou approuve la création de syndicats. Le Code du travail établit que tous les travailleurs, sans autorisation au préalable, ont le droit de s'associer de façon volontaire et de constituer des organisations syndicales, ce qui est conforme à la convention no 87. La structure, les principes, les statuts et règlements qui régissent l'activité syndicale sont discutés et approuvés par les syndicats eux-mêmes, selon leurs intérêts et sans ingérence aucune, lors des congrès qui ont lieu périodiquement. Les travailleurs proposent et élisent leurs propres dirigeants lors de réunions qui ont lieu dans les centres de travail. Le syndicalisme à Cuba est enraciné dans la conscience de l'unité entre les travailleurs. Il n'est pas imposé ni modifié par la législation.
Le processus de révision du Code du travail a été engagé en raison de la nécessité de l'adapter aux changements et conditions socio-économiques qui affectent l'activité productive. Le XVIIIe congrès de la Centrale des travailleurs de Cuba a adopté une résolution, dans laquelle il est prévu qu'une discussion aura lieu dans les centres de travail du pays par le biais des assemblées de travailleurs, à propos d'une consultation sur le contenu et les propositions de modifications du Code du travail. Le gouvernement respecte le droit des travailleurs à être consultés sur le nouveau Code du travail qui régira leurs droits et obligations, ainsi que ceux des entreprises, et qui établira les principes qui sous-tendent les relations de travail dans le pays.
Le cas du Comité de la liberté syndicale, auquel fait référence la commission d'experts, a fait l'objet d'un suivi au Conseil d'administration du mois de mars 2003 et la réponse a été formulée de façon adéquate. Les personnes auxquelles se réfère le cas mentionné n'exercent aucune activité syndicale dans aucun centre de travail du pays. Ce ne sont pas des travailleurs car, de leur propre volonté et depuis plusieurs années, ils n'ont aucun lien de travail avec aucune entité dans le pays. Ils n'ont pas été proposés ni élus dans aucun centre de travail et ils ne représentent aucun groupe de travailleurs, ils ne peuvent donc pas être considérés comme des syndicalistes.
Les membres travailleurs ont indiqué que le mouvement syndical cubain jouit d'une longue et riche expérience et a joué un rôle fondamental dans l'avènement des droits sociaux à Cuba. Toutefois, depuis de nombreuses années, la commission d'experts dénonce avec insistance le non-respect des principes garantis en matière de liberté syndicale et souligne particulièrement le fait qu'il existe à Cuba un monopole syndical. De plus l'adoption du décret-loi no 67 de 1983 et du Code du travail de 1985 n'a fait qu'aggraver la situation. A plusieurs reprises, le Comité de la liberté syndicale s'est également prononcé sur le fait que l'existence, en fait comme en droit, d'un monopole syndical est contraire aux principes garantis en matière de liberté syndicale, a fortiori lorsque le pluralisme syndical est dénié. Il y a quelques années, le Comité avait pris connaissance de faits qui se répètent aujourd'hui, à savoir le refus de reconnaître et d'accréditer un syndicat indépendant, la perquisition du domicile de syndicalistes, l'intimidation, l'emprisonnement, etc. En effet, depuis mars dernier, trois dirigeants syndicaux liés au Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC) sont emprisonnés, et l'état de santé de l'un d'entre eux est sérieux. Le matériel de formation syndicale ainsi que certains biens ont été saisis. Ces dirigeants ont été emprisonnés en raison de l'expression de leur conviction qu'une société plus juste et respectueuse des droits des travailleurs permet la constitution d'organisations syndicales pouvant s'exprimer librement. A ce sujet, le Comité de la liberté syndicale a d'ailleurs rappelé que le CUTC avait fait une demande d'accréditation aux autorités cubaines.
Les principes garantis en matière de liberté syndicale sont universels. Depuis plusieurs années, tant la commission d'experts que le Comité de la liberté syndicale ont demandé au gouvernement de modifier la législation afin de la rendre conforme à l'esprit de la convention no 87. Si les principes en matière de liberté syndicale ne sont pas protégés, les autres droits fondamentaux garantis par les conventions de l'OIT ne pourront être que difficilement appliqués. La discussion qui a eu lieu lors de la session du Conseil d'administration de mars dernier a permis de réaffirmer que le gouvernement de Cuba ne respecte pas ces principes. Le gouvernement doit modifier la législation de manière à ce que soit garantie l'existence du pluralisme syndical à Cuba. Les menaces et les intimidations envers les dirigeants syndicaux cubains doivent cesser, les principes garantis en matière de liberté syndicale, y compris la reconnaissance de toute organisation syndicale, doivent être respectés et les dirigeants syndicaux détenus doivent être immédiatement libérés. En rappelant que la commission d'experts formule des commentaires depuis plusieurs années sur la non-application par Cuba de la convention no 87, les membres travailleurs ont insisté pour qu'une mission de contacts directs se rende à Cuba.
Les membres employeurs ont rappelé que la commission a discuté ce cas à plusieurs occasions au cours des années passées. Ils ont observé que le problème du monopole syndical était un problème commun à plusieurs Etats, lorsque le monde a été divisé en deux blocs. Néanmoins, il existe encore des poches de résistance. Le monopole syndical consacré par la loi constitue une violation de la liberté syndicale selon les organes de supervision de l'OIT. Le fait de se référer à un syndicat précis, en le nommant, empêche la création, en fait comme en droit, de nouveaux syndicats. La déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle la loi reflète la volonté des travailleurs est une vieille excuse et ne justifie pas la référence faite par la loi à une seule centrale. La convention exige que les travailleurs aient toujours la possibilité de constituer d'autres organisations, s'ils le souhaitent, pour que le pluralisme syndical demeure possible dans tous les cas. Le monopole syndical qui existe depuis plusieurs décennies, dans la loi cubaine et dans la pratique, ainsi que dans le décret no 67 de 1983, confère à la Centrale des travailleurs de Cuba le droit de représenter les travailleurs dans les organes gouvernementaux. Il s'agit d'un cas évident de violation de la liberté syndicale. Etant donné que le problème persiste depuis plusieurs années, il serait approprié d'envoyer une mission de contacts directs, afin d'examiner les moyens visant à résoudre le problème.
Le membre employeur de Cuba, se référant aux expériences du groupe des armateurs de Navires Antares, a manifesté sa volonté d'informer la commission avec honnêteté sur la manière de faire de son pays. Il a indiqué que son groupe patronal comprend six entreprises et cinq compagnies navales, lesquelles comptent 5 900 marins et 700 travailleurs de terre, tous affiliés librement au Syndicat de la marine marchande, des ports et de la pêche. L'un des droits fondamentaux dans le pays est la garantie de l'emploi. Dans tous les cas, l'accès à un travail s'effectue par la signature d'un contrat de travail réglementé par le Code du travail cubain. Tous les travailleurs du groupe des armateurs ont un contrat de travail à durée indéterminée qui tient compte de leurs compétences. Les dirigeants syndicaux et le directeur de chaque entreprise ont signé et approuvé une convention collective dans laquelle sont énoncés, en conformité avec les caractéristiques de chaque entité, les devoirs et droits des employeurs et travailleurs. Ceci n'implique pas seulement le respect formel de la loi cubaine mais également que, lorsque les prémices sont analysées et discutées avec les travailleurs, il en découle que les travailleurs sont bien informés et travaillent avec efficacité de manière à ce que tout le monde en bénéficie à la fin du compte.
Le membre employeur a indiqué qu'il a décidé de faire cette intervention en réponse aux allégations de violation de la liberté syndicale dans son pays. Lorsque l'un des marins ou sa famille ont eu besoin d'aide au moment des cyclones qui se sont abattus sur l'île ces dernières années, seulement le Syndicat de la marine marchande, des ports et de la pêche a été présent parce qu'il s'agit de l'unique groupe auquel sont affiliés les travailleurs. Aucun autre syndicat ne s'est présenté.
Plusieurs groupes anticubains créent et financent des supposées associations dans le but de faire la propagation d'informations fausses et dénaturées sur des présumées violations de tout type à Cuba, de façon à justifier la prolongation de l'embargo qui affecte le pays depuis plus de quarante ans. Les entreprises de navigation ont eu beaucoup de difficultés économiques et commerciales en raison de cet embargo. Le membre employeur a exprimé l'espoir que les membres de la commission sauront la vérité.
Le membre travailleur de Cuba a indiqué que le Code du travail de son pays fait référence à la Centrale des travailleurs de Cuba puisqu'il s'agissait, lors de son adoption, de la seule centrale syndicale existante. Cette situation est toujours la même aujourd'hui. Cette centrale fut créée en 1939, c'est à dire vingt ans avant le triomphe de la révolution. Il ne s'agit donc pas d'une création de cette dernière ou du socialisme cubain. Le gouvernement a proposé de réviser l'actuel Code du travail pour l'adapter aux changements économiques et sociaux qui se sont produits et aux recommandations de la commission d'experts relatives à différentes conventions. En ce sens, dans son pays, l'approbation par les travailleurs des principales lois et règlements qui les concernent constitue une pratique habituelle. Les travailleurs ont accepté la proposition de révision du code. Il faut toutefois tenir compte qu'il s'agit d'un processus long et complexe. A Cuba, les syndicats fonctionnent dans tous les centres de travail et les travailleurs jouissent du droit de créer des syndicats sans l'autorisation du gouvernement ni nécessité de les enregistrer dans un quelconque ministère. De même, aucun organe n'intervient ou ne contrôle leurs élections. La reconnaissance des organisations syndicales émane du droit à la représentation qui s'obtient par le biais d'élections par les travailleurs, d'abord en assemblée et puis par vote secret. Tous les travailleurs peuvent être proposés mais ceux qui n'ont pas été proposés ni élus ne peuvent pas représenter les travailleurs. Les dirigeants syndicaux auxquels il a été fait référence dans la discussion n'ont été élus par aucun travailleur à Cuba. En conséquence, ils ne se retrouvent pas en prison parce qu'ils sont des dirigeants syndicaux mais pour avoir violé des lois adoptées par le peuple cubain pour défendre la souveraineté et l'autodétermination.
Le membre gouvernemental du Zimbabwe a soutenu la déclaration faite par le représentant gouvernemental de Cuba. Il a noté que de grands progrès ont été faits en ce qui a trait aux problèmes soulevés par la commission d'experts. Par exemple, Cuba procède à la révision de sa législation afin de s'occuper des préoccupations soulevées par rapport au monopole syndical. En ce qui a trait à la CUTC, il a pleinement soutenu le point de vue du gouvernement selon lequel ce groupe ne représente aucun travailleur cubain, et que ses activités ne concernent pas des problèmes liés au travail. A la lumière de l'information fournie, il semble qu'une mission de contacts directs serait inappropriée puisque Cuba prépare une législation visant à remédier à tout défaut.
Le membre travailleur de la Colombie a indiqué que la liberté syndicale est intimement liée à l'exercice effectif des droits de l'homme et a demandé au gouvernement cubain d'assurer le respect du droit de constituer de nouvelles organisations de travailleurs à côté de la centrale existante. En effet, de nombreux travailleurs ont constitué leurs propres organisations et réclament le droit d'être reconnus, de représenter leurs affiliés et de disposer d'un espace politique organisé dans le pays sans craindre d'être taxés de contre-révolutionnaires. L'orateur a souligné que, même si par le passé son organisation a exprimé de la sympathie pour les avancées sociales à Cuba, il est absurde que le droit de s'organiser démocratiquement soit nié à un groupe de travailleurs et, plus grave encore, que certains dirigeants aient été condamnés à des peines de prison de 25, 20 et 15 ans, comme par exemple MM. Pedro Pablo Alvarez Ramos, Oscar Espinosa Chepe et Carmelo Días Fernández, dirigeants du Conseil unitaire des travailleurs cubains. Le gouvernement de Cuba doit reconnaître le Conseil unitaire des travailleurs cubains, libérer les syndicalistes détenus ainsi que les autres prisonniers politiques et revoir les politiques antidémocratiques qui, avec des actes comme les récentes exécutions, créent un climat de profonde controverse avec ceux qui, comme l'orateur, considèrent que le recours à la peine de mort n'est en aucun cas justifiable.
Le membre travailleur de l'Uruguay, se référant aux commentaires de la commission d'experts concernant le supposé monopole syndical à Cuba, a indiqué qu'en réalité il s'agit d'une libre décision des travailleurs cubains qui considèrent la Centrale des travailleurs de Cuba comme leur représentant légitime. Il a expliqué que dans son pays, l'Uruguay, où la liberté syndicale n'existe pas, il est considéré que les syndicats se construisent à partir de la base, à partir des travailleurs. Le défi principal auquel font face les nouvelles prétendues organisations syndicales à Cuba n'est pas de nature légale mais consiste à obtenir l'adhésion des travailleurs cubains, situation très éloignée de la réalité. Ceci, indépendamment de la révision du Code du travail, que les travailleurs cubains sont en train d'examiner. Il a souligné la large participation des travailleurs dans des assemblées et a conclu en déclarant qu'il s'agit d'un aspect que le mouvement syndical mondial devrait développer. C'est-à-dire la participation dans les décisions.
La membre travailleuse du Brésil a émis l'avis que la liberté syndicale existe à Cuba. Les travailleurs cubains peuvent élire leurs organisations syndicales, faire de la propagande, choisir leurs représentants, réaliser des consultations sur les plans économiques et présenter des revendications. Les organisations syndicales ont une force effective, un espace politique et économique et elles jouissent de la liberté d'expression. Un système unitaire ne va pas à l'encontre de la démocratie ni de la liberté syndicale. Elle a estimé qu'il n'y a pas de liberté syndicale s'il n'y a pas d'unité des travailleurs. La liberté syndicale existe lorsqu'il y a des opinions différentes et qu'on choisit la volonté de la majorité par le biais d'un vote. C'est ce qui a lieu dans toutes les démocraties. Plusieurs représentations équivalent à ne pas avoir de démocratie, cela revient au même que de n'avoir aucune représentation. Les travailleurs sont ainsi divisés face au patronat et au gouvernement. La CGT du Brésil défend la représentation unitaire des travailleurs car elle estime qu'elle constitue le meilleur type de démocratie.
Le membre travailleur de la France a déclaré que la question de l'application de la convention no 87 à Cuba revient périodiquement et qu'en général il s'agit d'un dialogue de sourds. Le gouvernement a réitéré devant la commission ses arguments de toujours, avec quelques variantes. Le contrôle de l'application de la convention no 87 est non seulement normal mais nécessaire. Le gouvernement est néanmoins resté sourd aux demandes claires et précises formulées tant par la commission d'experts que par le Comité de la liberté syndicale. Le pluralisme syndical doit être possible, en fait comme en droit. La situation actuelle est contraire à l'esprit de la convention no 87 et elle rend, de facto, impossible l'accréditation d'un syndicat en dehors des règles établies par le gouvernement, notamment dans le Code du travail. L'exercice de la liberté syndicale existe lorsque les droits et libertés civiques existent aussi. Les gouvernements et les employeurs n'ont pas le droit de faire pression sur les syndicalistes qui doivent pouvoir organiser de manière indépendante et démocratique leurs activités. Il a condamné le fait que des dirigeants syndicaux puissent être arrêtés et condamnés à des peines lourdes sous des prétextes fallacieux.
La Confédération générale des travailleurs de France (CGT) a eu l'occasion d'exprimer à la CTC son inquiétude concernant le climat de répression de plus en plus lourd et la détention depuis mars de trois dirigeants syndicaux. Les détenus doivent être libérés. La CGT défend depuis sa création plusieurs principes dont le refus de la peine capitale en matière politique ou pénale et le refus des peines privatives de libertés en raison de l'exercice d'activités syndicales ou politiques. Les appels à la clémence et à la raison de la part de la CGT sont restés sans écho. On ne peut qu'espérer que, très rapidement, en fait comme en droit, les libertés d'association, d'expression et d'activités syndicales et civiques pourront être exercées sans entrave. La CGT de France est restée solidaire du peuple cubain et s'oppose au blocus. Mais rien ne saurait justifier la négation du droit à la liberté syndicale. Le membre travailleur a demandé à ce que soit envoyée une mission de contacts directs dans le pays et espère que le gouvernement acceptera la coopération du Bureau dans ses travaux de réforme du Code du travail. Il a également exprimé l'espoir que cette réforme prendra en compte les principes énoncés par la convention no 87.
La membre travailleuse de l'Italie a déclaré que la convention no 87 est violée par la loi cubaine en droit et en pratique. Le rapport de la commission d'experts mentionne que la reconnaissance légale d'une seule confédération syndicale constitue une violation de la convention no 87. La CISL a présenté une plainte concernant les lourdes sentences pénitentiaires imposées aux syndicalistes, et le fait que deux agents de sécurité ont infiltré un syndicat indépendant et ont témoigné contre les syndicalistes lors du procès. Parmi les 78 personnes arrêtées et condamnées à de longues périodes d'emprisonnement, on compte plusieurs activistes syndicaux indépendants: Pedro Pablo Alvarez Ramos (CUTC), Iván Hernández Carrillo (CONIC), Carmelo Díaz Fernández (CUTC), Héctor Raúl Valle Hernández (CTDC), Oscar Espinosa Chepe (CUTC) et Nelson Molinet Espino (CTDC).
Une autre forme de violation de la liberté syndicale se reflète dans les pratiques d'emploi des entreprises multinationales établies à Cuba. Il y a actuellement quelque 400 associations économiques impliquant des investisseurs étrangers, avec près de 1,8 milliard en investissements annoncés et réalisés. Les travailleurs qui désirent travailler dans ces entreprises doivent passer le test idéologique prévu par la loi. Le fait que ces travailleurs doivent, pour être autorisés à travailler, être politiquement acceptables constitue une violation évidente de la liberté syndicale. La CISL est profondément préoccupée par ces développements et demande la libération immédiate des activistes indépendants détenus.
Un observateur de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT), parlant avec l'autorisation du bureau de la commission, a indiqué que les derniers événements devraient être ajoutés au rapport de la commission d'experts, notamment la détention de plusieurs "dissidents", parmi lesquels figurent quatre dirigeants d'une organisation de travailleurs affiliée à la CLAT et à la CMT, et leur condamnation à 26, 25, 20 et 16 années de prison. L'accusation se fonde sur les trois arguments suivants: 1) les relations entretenues avec les organisations qui s'opposent à la révolution cubaine, comme la CLAT et la CMT; 2) le maintien de liens avec des fonctionnaires des Etats-Unis; et 3) l'aide financière reçue d'organisations provenant de ce pays. Le deuxième et le troisième arguments sont faux et semblables à ceux utilisés généralement contre ceux qui ont des opinions différentes de celles du gouvernement cubain. Les dirigeants ont reçu une aide financière mais celle-ci provient de la CLAT et de la CNV de Hollande. Il s'est demandé si la liberté d'organisation et d'expression et le pluralisme syndical sont des droits qui peuvent être violés par des gouvernements; si l'on doit demeurer silencieux face à la menace d'être considéré comme des contre-révolutionnaires; si la justice existe sans la liberté; si pour fonctionner une organisation de travailleurs doit se soumettre aveuglément à un gouvernement. Il a exigé que les dirigeants soient libérés et qu'il leur soit permis d'exprimer librement leur différence dans le cadre d'une coexistence civilisée.
Le membre gouvernemental de la République arabe syrienne a pleinement soutenu la déclaration faite par le représentant gouvernemental de Cuba, et souligné que le fait qu'un travailleur soit incarcéré ne signifie pas qu'il est détenu en raison d'activités syndicales. Une attention spéciale doit être apportée afin de vérifier si tel est le cas. Il a suggéré de poursuivre le dialogue avec Cuba, sans toutefois interférer dans les affaires intérieures du pays.
Un autre représentant gouvernemental de Cuba (ministre du Travail et de la Sécurité sociale de Cuba) a exprimé son attachement à la vérité et souligné qu'à Cuba il n'y a pas de violation de la convention no 87. Pour comprendre ce qui est désigné "monopole syndical", il faut revenir aux années 1938 et 1939 quand les travailleurs choisirent la Confédération des travailleurs de Cuba à titre de représentant. Une réforme du Code du travail est en cours. L'orateur a souligné la précieuse coopération de l'OIT qui participe à ce processus en vue de mettre le Code du travail en conformité avec la convention no 87 et les autres conventions. Le débat a été politisé par quelques représentants des travailleurs et des employeurs qui ont mélangé la situation à d'autres thèmes qui, de nos jours, s'utilisent pour discréditer la révolution cubaine et miner sa résistance. Il existe une forte intention de détruire la révolution. Le gouvernement s'est vu obligé d'imposer des mesures punitives aux traîtres de la patrie qui servent les intérêts étrangers. Néanmoins, cette question n'a pas à être examinée devant la présente commission. Les personnes auxquelles il est fait référence furent jugées et condamnées pour avoir tenté de déstabiliser le pays avec l'aide d'une puissance étrangère, violant ainsi les lois cubaines.
L'histoire de Cuba est claire et indiscutable en ce qui a trait à la participation des travailleurs. Il n'existe pas de violation de la convention no 87. Le processus de réforme du Code du travail se fera avec la volonté des travailleurs, convoqués en assemblée, et se discutera au Parlement où l'on expose démocratiquement des positions pour renforcer l'Etat souverain qu'est un Etat socialiste. La présente commission doit avoir confiance et il n'est pas nécessaire d'adopter des mesures d'une autre nature. A cuba, la liberté et la démocratie syndicale existent parce que la révolution cubaine équivaut à la garantie des droits de l'homme du peuple cubain et tous les dirigeants syndicaux cubains représentent légitimement les travailleurs. La commission ne devrait pas se laisser manipuler.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a répondu à certains commentaires faits par le représentant gouvernemental de Cuba et par plusieurs autres orateurs, concernant la nature de la CUTC et l'allégation de son financement par les Etats-Unis. Elle a dit que les allégations sont fausses. La CUTC est une organisation indépendante affiliée à la CMT et à la CLAT, et compte près de 4 000 membres enregistrés, dans 14 provinces. Leurs dirigeants sont harcelés, menacés et arrêtés parce qu'ils ont eu le courage de défier le monopole syndical affirmé par la loi cubaine. La commission d'experts et le Comité de la liberté syndicale ont été clairs et cohérents lorsqu'ils ont lancé un appel au gouvernement pour que celui-ci procède à l'amendement des dispositions de la loi qui établit ce monopole, et afin de garantir la liberté d'association dans la pratique. Le gouvernement cubain a systématiquement ignoré ces demandes. Elle a prié instamment la commission de se concentrer strictement sur les faits du cas.
Le membre travailleur de la France, se référant à l'intervention du ministre du Travail et de la Sécurité sociale de Cuba, a indiqué qu'il est tout à fait inacceptable d'injurier des délégués travailleurs ou autres membres devant la présente commission.
Les membres employeurs ont noté avec étonnement la position adoptée par le membre employeur de Cuba qui a fait l'éloge de la liberté des travailleurs cubains et a ajouté que cette commission n'était pas le forum approprié pour discuter de la valeur d'une révolution. Se référant à la déclaration faite par le représentant gouvernemental, ils ont noté que celui-ci s'est plaint de la politisation de la discussion, et qu'il s'est par la suite livré à un discours politique démagogue. Faisant suite à la déclaration faite par le représentant gouvernemental, à propos de la réforme en cours du Code du travail, ils ont noté qu'aucune copie du projet de loi n'a été soumise à cette commission ou à la commission d'experts. Il s'agit d'une condition minimale pour parvenir à un dialogue constructif et à une coopération. Le représentant gouvernemental a également affirmé que de nouveaux syndicats se constituent. Dans un tel cas, une mission de contacts directs serait utile et d'une grande aide afin de clarifier la situation et favoriser une progression dans la bonne direction. Ils ont demandé au gouvernement de considérer l'acceptation éventuelle d'une telle mission de contacts directs.
Les membres travailleurs ont indiqué que les informations portées à la connaissance de la commission, notamment l'emprisonnement depuis mars dernier de trois syndicalistes en raison de l'exercice de leur activité syndicale, démontrent la pertinence des points soulevés par la commission d'experts depuis plusieurs années, à savoir le monopole syndical existant, en fait comme en droit, et le non-respect des principes de la liberté syndicale. La législation doit être modifiée, les travailleurs devront pouvoir librement choisir leur organisation syndicale et les syndicalistes emprisonnés doivent être immédiatement libérés. Etant donné qu'il s'agit d'une situation de violation du droit à la liberté syndicale qui perdure, une mission de contacts directs devrait être envoyée dans le pays afin de remédier au problème de l'application de la convention no 87, et notamment en ce qui concerne la réforme du Code du travail. Le gouvernement devrait réfléchir à cette proposition.
Le représentant gouvernemental de Cuba, se référant aux demandes des membres travailleurs et employeurs concernant l'envoi d'une mission de contacts directs, a indiqué que Cuba a reçu l'assistance technique de l'OIT à de nombreuses occasions. Des actions de coopération relatives à la modification du Code du travail sont en cours. L'équipe consultative multidisciplinaire du Costa Rica a réalisé plusieurs visites au pays. Cette année, on prévoit la réalisation d'un séminaire sur la révision du Code du travail avec la participation de nombreux juristes, représentants syndicaux et groupes d'intérêt créés dans le pays. Le Code du travail fait actuellement l'objet de consultations avec les travailleurs. L'orateur a indiqué qu'il appréciait la collaboration de l'OIT mais qu'il n'acceptait pas une mission de contacts directs qui visite le pays pour vérifier le respect de la convention. Cuba respecte son obligation d'envoyer des rapports et a toujours informé le Bureau. Cuba accepte la collaboration de l'OIT comme elle l'a fait jusqu'à maintenant.
Les membres travailleurs ont indiqué qu'ils sont totalement d'accord avec les conclusions. Vu l'attitude du gouvernement, ils auraient normalement demandé l'ajout d'un paragraphe spécial dans le rapport sur ce cas. Cependant, vu qu'il n'est pas dans la pratique de la présente commission d'adopter un tel paragraphe lors d'une première discussion, ils ont demandé que le cas figure dans le prochain rapport de la commission d'experts afin qu'il puisse être étudié de nouveau par la Commission de la Conférence, l'année prochaine.
Le membre travailleur de l'Uruguay a exprimé sa dissidence avec les conclusions de la commission car il considère que celles-ci sont plus dures que celles qui ont été adoptées lors de l'examen du cas du Myanmar.
Le représentant gouvernemental de Cuba a rejeté les conclusions dans la mesure où celles-ci ne reflètent pas la réalité et a tenu à ce que son désaccord soit clairement mentionné.
Au cours d'une séance ultérieure de la commission, une autre représentante gouvernementale de Cuba a déclaré qu'elle souhaitait que soit consigné le rejet par son gouvernement du procès-verbal no 4 ainsi que la pratique d'adopter des conclusions qui ne respectent pas la procédure et manquent d'objectivité. Les conclusions de la commission sur l'application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, par Cuba sont déséquilibrées, font référence à des points qui ne sont pas de la compétence de cette commission et ne reflètent pas la diversité des opinions exprimées par les membres de cette commission et par le gouvernement cubain. Le gouvernement ne peut cautionner la pratique de cette commission qui dans ce cas, comme dans d'autres, adopte des conclusions peu élaborées qui ne tiennent compte que des opinions des porte-parole, alors que ces derniers n'ont pas tenu compte de l'avis de plusieurs membres de leur groupe. Il est inacceptable que les conclusions sur le cas cubain n'aient pas fait l'objet de modifications ou d'ajustements compte tenu de la diversité des opinions exprimées par les membres de la commission et par la représentante gouvernementale.
Les représentants gouvernementaux du Venezuela, du Bélarus, de l'Inde et de l'Ethiopie ont souscrit à la déclaration de la représentante gouvernementale de Cuba.
La commission a pris note des informations orales fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. La commission a noté avec préoccupation les commentaires de la commission d'experts sur l'impossibilité du pluralisme syndical. En effet, le Code du travail impose le monopole syndical de la Centrale des travailleurs qui est chargée de représenter les travailleurs du pays. La commission a constaté que le Comité de la liberté syndicale a examiné des cas concernant la non-reconnaissance d'organisations syndicales indépendantes, des menaces, des détentions et des pressions contre les syndicalistes. La commission a souligné que cette situation est incompatible avec les dispositions de la convention no 87. Elle a également souligné l'importance du respect des libertés civiles pour l'exercice des droits syndicaux.
La commission a instamment prié le gouvernement de modifier, dans les plus brefs délais, la législation et la pratique nationales de manière à reconnaître le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix dans un climat de sécurité y compris, s'ils le souhaitent, des organisations indépendantes de la structure établie. La commission a pressé le gouvernement de prendre des mesures immédiates en vue de la libération des syndicalistes détenus et de la reconnaissance des organisations syndicales. La commission a également demandé au gouvernement d'accepter une mission de contacts directs afin qu'elle puisse évaluer la situation in situ et coopérer avec le gouvernement, ainsi qu'avec toutes les organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées pour assurer l'application de la convention tant dans la législation que dans la pratique. La commission a prié le gouvernement d'envoyer un rapport complet pour la prochaine session de la commission d'experts. La commission a exprimé le ferme espoir de pouvoir constater des progrès tangibles dans un futur proche.
Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:
1. En ce qui concerne les commentaires de la commission d'experts qui figurent dans le point a) de l'observation, le gouvernement réitère que le droit des travailleurs de constituer les organisations syndicales de leur choix est garanti par les dispositions de l'article 13 du Code du travail.
En ce qui concerne les commentaires de la commission d'experts sur les conclusions intérimaires du Comité de la liberté syndicale, approuvées par le Conseil d'administration lors de la 254e réunion du comité en novembre 1992, le gouvernement précise qu'il a communiqué sa réponse relative à ces conclusions intérimaires qui ont été modifiées, comme il peut être constaté dans le rapport du Comité de la liberté syndicale soumis au Conseil d'administration lors de sa 256e session en mai 1993. Le gouvernement a joint à sa réponse la lettre datée du 1er avril 1992, envoyée par un citoyen au ministre de la Justice et à laquelle s'est référé le Comité de la liberté syndicale dans ledit dernier rapport. Dans cette lettre, le citoyen en question a abandonné ce qu'il considérait être une demande d'enregistrement d'une organisation syndicale supposée. Afin de préciser cette question, le gouvernement souligne que le ministère de la Justice n'a reçu aucune demande d'enregistrement et de reconnaissance de la part d'une organisation syndicale et que la demande à laquelle s'est référé le Comité de la liberté syndicale n'était qu'une demande d'information à propos de la loi sur les associations.
Lorsque les travailleurs ont estimé utile, pour la défense de leurs intérêts, de constituer des organisations syndicales différentes de celles qui existent déjà, ils ne se sont pas heurtés à des obstacles dans la législation ou dans la pratique et ils n'ont pas dû attendre l'autorisation d'une autorité de l'Etat, conformément à ce que dispose ledit article 13 du Code du travail. Le gouvernement mentionne de nouveau l'exemple, déjà donné antérieurement, de la constitution récente du Syndicat national des travailleurs des sciences, qui regroupe un ensemble de 44 130 membres, 46 bureaux syndicaux, 592 sections syndicales et 3 139 dirigeants de base élus, par voie de scrutin direct et secret, par les travailleurs mêmes du secteur des activités scientifiques. Un congrès, lors duquel un règlement a été adopté, s'est tenu à l'initiative des travailleurs de ce secteur; ces derniers n'ont pas été obligés d'obtenir à cet effet l'autorisation préalable d'une autorité de l'Etat. Le syndicat et ses dirgeants exercent leurs activités conformément à leurs intérêts, sans obstacle, et dans l'autorité et le respect vis-à-vis des travailleurs qui les ont élus.
S'agissant de la mention de la Centrale des travailleurs de Cuba, lorsque le Code du travail se réfère en des termes généraux à la centrale des travailleurs, et non pas en des termes spécifiques -- ce serait le cas s'il mentionnait la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC) --, il ne s'agit pas de l'institution d'un système d'unicité syndicale. Dans le pays, il existe 18 syndicats nationaux de branche. La Centrale des travailleurs de Cuba n'a pas été constituée en vertu d'une loi mais par la volonté des travailleurs, en 1939, et elle correspond à une tradition d'unité du mouvement ouvrier cubain qui a son origine dans le siècle passé. Quelques modifications apportées à la Constitution nationale de la République, dont la commission d'experts a déjà été informée, prouvent la volonté du gouvernement de reconnaître l'autonomie et l'indépendance des organisations syndicales.
2. Pour ce qui est des commentaires qui figurent dans les paragraphes du point b) de l'observation, le gouvernement rappelle que le respect de l'indépendance et de l'autonomie des organisations syndicales est également reconnu par l'article 15 du Code du travail qui dispose que "les syndicats et la centrale des travailleurs à laquelle ils s'affilient volontairement sont régis et exercent leur activité conformément aux principes, statuts et règlements qui sont examinés et approuvés démocratiquement par leurs membres". Un représentant travailleur de Cuba a décrit devant cette commission, lors d'une réunion antérieure, la forme dans laquelle les dirigeants sont élus par les travailleurs, par un scrutin direct et secret, conformément aux règlements et statuts adoptés par les congrès syndicaux. La commission d'experts ne devrait pas formuler à l'attention du gouvernement des observations qui portent sur le contenu des statuts et règlements syndicaux puisque ceux-ci constituent l'expression de la volonté des travailleurs qui est manifestée et arrêtée lors des congrès syndicaux. La commission d'experts devrait respecter cette volonté qui fait partie de la liberté dont jouissent les travailleurs et leurs syndicats qui adoptent leurs propres règlements sans ingérence de la part du gouvernement.
En outre, un représentant gouvernemental a réitéré les informations présentées par le gouvernement concernant le droit des travailleurs de constituer les organisations syndicales de leur choix conformément à l'article 13 du Code du travail. Quant aux conclusions du Comité de liberté syndicale mentionnées par les experts, elle a déclaré qu'elles ont été modifiées à la 286e session du Conseil d'administration et qu'indépendamment de toute interprétation le fait réel et objectif est que l'individu qui faisait la propagande de la CISL n'était pas un syndicaliste et, en plus, elle n'a pas donné suite par écrit à la lettre qui contenait la demande d'information qui avait servi de base à la plainte du CISL.
Les membres travailleurs ont fait remarquer que, dans ce cas, le problème n'est pas que des informations n'ont pas été fournies mais plutôt que trop d'informations ont été fournies sur des points de détail et de nature très similaire à celles fournies depuis des années maintenant. Ils se demandent si des changements ont vraiment été opérés dans ce pays. Ils ont rappelé que la commission d'experts a noté avec intérêt les amendements apportés aux articles 7 et 99 de la Constitution cubaine mais ont recommandé qu'il soit fait davantage. Les amendements constitutionnels ont des implications importantes sur le reste de la législation du travail et le Code du travail, et ceux-ci doivent être révisés et amendés, après consultations avec les syndicats, afin de les mettre en conformité avec les changements de la Constitution et d'enlever toute référence à la centrale unique des travailleurs. Ils ont insisté sur le fait que la question n'est pas de déterminer si le mouvement syndical dans le pays peut se former en une confédération s'il le souhaite, mais bien que le gouvernement doit prendre les mesures nécessaires pour assurer que des syndicats alternatifs puissent se créer. Si le gouvernement a fourni des informations sur la création du syndicat national des travailleurs scientifiques, celles-ci sont insuffisantes pour juger s'il s'agit d'un syndicat indépendant. Ils ont demandé au gouvernement de fournir de plus amples informations à cet égard. Malgré les assurances données par le gouvernement que les travailleurs ont le droit d'établir des organisations de leur choix, ils ont fait remarquer que, lorsque de tels efforts ont été déployés par, par exemple, la Confédération démocratique des travailleurs de Cuba, les personnes concernées ont été harcelées et ont fait l'objet d'arrestation. Il apparaît, dès lors, qu'il n'est pas si facile de créer un syndicat indépendant. Les amendements apportés à la Constitution ne sont pas suffisants pour assurer le droit de créer librement une organisation syndicale indépendante. Des mesures doivent être prises pour garantir ce droit en adaptant la législation de façon appropriée et en prenant des mesures pour assurer son application dans les faits. Ils ont fait remarquer que les discussions sur Cuba ont souvent été trop agressives, de part et d'autre. Les rapports envoyés par le gouvernement à la commission d'experts avaient à la fois un ton agressif et défensif. Les membres travailleurs ont indiqué cependant leur désir d'aider le gouvernement à progresser dans le changement et les a encouragés à prendre d'autres mesures pour que la liberté du mouvement syndical soit assurée. Ils ont exprimé l'espoir de voir des changements en ce sens l'année prochaine et ont signalé que ces changements seraient accueillis favorablement. Ils ont averti cependant que, si les arguments qui seront avancés sont les mêmes que ceux répétés depuis des décennies, il en résulterait un retour aux débats agressifs du passé.
Les membres employeurs ont fait remarquer qu'ils sont quelque peu dubitatifs quant aux progrès réalisés dans ce cas. Les informations écrites fournies par le gouvernement sont sensiblement les mêmes que celles de l'année dernière. Si les amendements constitutionnels sont un pas dans la bonne direction, il semble néanmoins que peu de choses ont changé. La référence à la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC) a été maintenue dans le Code du travail. Ils ont rappelé que ce cas a été discuté par cette commission depuis de nombreuses années et que les petits changements opérés sont loin d'assurer le droit de créer une organisation syndicale de son choix, en pratique. Ils se demandent si un autre syndicat peut être enregistré à Cuba, et ce facilement et sans que des barrières administratives n'empêchent sa création. Ils ont exprimé l'espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour assurer que le monopole du syndicat mandaté par l'Etat prenne fin.
Le membre travailleur du Paraguay a signalé que, depuis de nombreuses années, ce cas se discute dans cette commission et que, chaque année, celle-ci adopte des conclusions demandant au gouvernement des explications. De plus, les observations reçues ne sont jamais satisfaisantes et ne garantissent pas les principes de la liberté syndicale et les droits de l'homme. Il a déclaré que, depuis trente-quatre ans, les droits syndicaux et la conscience des syndicalistes cubains sont violés, étant donné que ceux-ci n'ont pas le droit de constituer ou de s'affilier à une autre organisation que celle que la Centrale des travailleurs de Cuba. Le membre travailleur a indiqué que l'OIT devrait passer à une seconde étape, en abandonnant les discussions sans substance et en entreprenant une action concrète pour faire respecter la liberté syndicale. Les travailleurs cubains doivent avoir le droit de vivre en liberté de même que celle d'élire l'organisation syndicale de leur choix. L'OIT devrait prendre des mesures différentes de celles adoptées jusque-là pour essayer d'obtenir que les droits syndicaux soient respectés à Cuba et que les conventions nos 87 et 98 ne soient plus violées.
Le membre travailleur des Etats-Unis a fait observer qu'il existe trois types de pays qui violent le principe de liberté syndicale. Certains pays permettent aux syndicats d'opérer librement, mais restreignent leurs activités dans certains secteurs tels que l'administration publique ou les industries essentielles. Dans ce cas, les violations sont substantielles, mais elles sont une aberration. Dans d'autres pays, les syndicats peuvent exister, mais tout est mis en oeuvre pour empêcher leurs activités. Ces cas requièrent une attention constante pour que la survie des syndicats ainsi que l'application à ceux-ci de la pleine signification de la liberté syndicale soient assurées. Le cas discuté aujourd'hui tombe sous la troisième catégorie. Il n'est pas autorisé de créer librement des syndicats indépendants et tous les moyens sont utilisés pour supprimer tous ceux qui tentent de le faire. Le gouvernement n'a même pas accusé réception des demandes d'enregistrement de l'Union générale des travailleurs cubains (UGTC) ou du CONCI. La seule organisation autorisée à Cuba est la CTC car ses membres sont choisis par le parti communiste que la CTC reconnaît comme étant l'avant-garde et la plus haute instance de la classe ouvrière. Il a déclaré que la position de l'Etat d'imposer un monopole syndical s'est manifestée par l'arrestation et l'agression physique de dirigeants UGTC à plusieurs occasions, telles que celles de la manifestation contre l'échec de la CTC de représenter les intérêts des travailleurs et de la manifestation du Premier Mai. Il a demandé à la commission de recommander instamment au gouvernement de fournir dans un proche avenir de plus amples informations sur les mesures concrètes prises pour permettre à des syndicats libres de se créer, en ce que c'est la première étape pour leur assurer une participation effective et à part entière dans la société.
Le membre travailleur de Cuba a signalé qu'en ce qui concerne l'indépendance du mouvement syndical et ce qui a été exprimé à cet égard dans le rapport de la commission d'experts, les relations existant entre la Centrale des travailleurs de Cuba et le parti communiste ne compromettent absolument pas la poursuite du mouvement syndical et qu'elles sont conformes à la résolution sur l'indépendance du mouvement syndical adoptée par l'OIT en 1952. Comme il est mentionné dans les statuts de la CTC, celle-ci n'est pas une organisation du parti communiste, ni de l'Etat, et ne reçoit de financement ni de l'un ni de l'autre. Il a indiqué que les membres de la Centrale ont approuvé les statuts, règlements et orientations de travail et élisent leurs dirigeants de façon ouverte et démocratique. De plus, aucun candidat n'est proposé par le parti communiste. Le fait de reconnaître, dans le préambule des statuts de la CTC, le parti communiste comme étant à l'avant-garde de la classe ouvrière ne signifie pas que celui-ci puisse s'ingérer dans les questions internes de la centrale. La relation entre la CTC et le parti communiste est approuvée par les travailleurs démocratiquement et il appartient aux travailleurs de les modifier ou pas. A Cuba, la liberté syndicale et sociale existe depuis trente-quatre ans et la CTC fonde toute son action sur une consultation permanente des travailleurs. La CTC pratique son activité syndicale librement dans plus de 70 000 centres de travail existants. Nous n'avons pas connaissance de la création par les travailleurs d'autres syndicats sauf les informations malveillantes financées par les organisations internationales qui entrent dans le pays dans un but politique.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis, remarquant la place importante accordée à l'assistance technique de l'OIT et le fait que, l'année dernière, cette commission avait instamment recommandé au gouvernement de consulter l'OIT en la matière, a suggéré qu'il pourrait être approprié que le gouvernement discute avec l'OIT des moyens pour régler cette situation.
En réponse aux questions des membres travailleurs, la représentante gouvernementale a déclaré que des changements ont été apportés à la Constitution de la République et qu'ils ont déjà été relevés par la commission d'experts dans ses commentaires. Ces changements expriment la volonté du gouvernement de respecter l'autonomie et l'indépendance des organisations syndicales. Elle a signalé qu'à Cuba les travailleurs, dans l'exercice de leur droit à la liberté d'association, ont adopté la structure syndicale de leur choix. Les modifications de la Constitution témoignent de la volonté du gouvernement. Le Code du travail reflète seulement une tradition de l'unité du mouvement ouvrier. Il existe à Cuba 18 branches syndicales nationales qui ont été intégrées de leur propre volonté dans une centrale syndicale depuis 1939. Cela montre que le gouvernement ne pourrait pas imposer le pluralisme syndical par voie législative, étant donné qu'une telle imposition serait contraire à la convention, comme le serait l'imposition par la même voie d'un système de syndicats unique. L'adoption de l'une ou l'autre forme d'organisation syndicale est une question qui regarde les travailleurs eux-mêmes. La commission d'experts est en mesure d'analyser, à la lumière de la nouvelle Constitution nationale, la position du gouvernement à cet égard. L'obstacle à la création de ce qu'on qualifie ici d'organisations indépendantes ne vient pas de la loi. La CTC n'est pas une organisation partisane ni étatique, comme l'indiquent ses statuts. La difficulté en question est une conséquence du manque de crédibilité de certaines personnes et du fait que les travailleurs n'ont pas confiance dans certains individus qui ne sont pas des syndicalistes et qui se prêtent à des manipulations depuis l'étranger à des fins de propagande politique. Dans aucun centre de travail, les travailleurs n'acceptent de suivre des personnes inconnues et non élues par eux, qui n'agissent pas au nom d'un syndicat et dont les buts n'ont pas de caractère syndical. En ce qui concerne l'assistance technique mentionnée, elle a déclaré que son gouvernement l'avait déjà sollicitée à plusieurs reprises, lorsqu'il l'avait considérée nécessaire et appropriée, et que, chaque fois, une réponse positive du Bureau avait été reçue. Au cas où le gouvernement considère l'assistance technique nécessaire, il la sollicitera, mais seulement par sa propre décision et après avoir essayé de résoudre les problèmes par ses propres solutions.
La commission prend note des informations écrites et orales fournies par le gouvernement. Comme la commission d'experts, cette commission note avec intérêt les modifications apportées à la Constitution nationale. Cependant, elle ne peut que regretter que le gouvernement estime une nouvelle fois qu'il n'est pas en contradiction avec la convention en ce qui concerne l'octroi de l'indépendance aux organisations syndicales. La commission demande instamment au gouvernement de bien vouloir examiner de nouveau sa position en vue de garantir à tous les travailleurs et à tous les employeurs le droit de constituer des organisations professionnelles en dehors de la structure existante si elles le souhaitent. La commission attend du gouvernement des informations détaillées, dans un proche avenir, au sujet des questions évoquées par la commission d'experts. La commission rappelle que l'Organisation internationale du Travail peut fournir une aide au gouvernement si celui-ci le demande.
La commission d'experts fonde son observation sur des critères qu'elle a émis elle-même au sujet de l'unité syndicale et non sur le texte de la convention no 87 qui reconnaît le droit de tous les travailleurs de constituer les organisations syndicales de leur choix, sans que cette convention adopte de critères à l'endroit de l'unité ou du pluralisme syndical. A cet égard, le gouvernement rappelle à la Commission de la Conférence que l'article 13 du Code du travail prévoit que "Tous les travailleurs, qu'ils soient manuels ou intellectuels, ont le droit, sans autorisation préalable, de s'associer volontairement et de constituer des organisations syndicales." La formulation de cet article important correspond à l'article 2 de la convention no 87.
Par ailleurs, d'après le Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale en son paragraphe 223, le comité a indiqué ce qui suit: "Le comité a signalé que la Conférence internationale du Travail, en faisant figurer les termes organisations de leur choix dans la convention no 87, entendait tenir compte du fait que, dans un certain nombre de pays, il existe plusieurs organisations d'employeurs et de travailleurs entre lesquelles les intéressés peuvent choisir ... sans pour autant se prononcer sur la question de savoir si ... pour les travailleurs et les employeurs l'unité dans l'organisation syndicale est ou non préférable au pluralisme syndical."
L'exercice de la liberté syndicale par les travailleurs dans un mouvement syndical unitaire ou pluraliste n'est pas une question qui devrait être reflétée dans les lois, car il serait contraire à la convention no 87 d'inscrire dans la législation une forme ou une autre de structure syndicale, puisque ladite convention fonde la liberté syndicale sur la décision des travailleurs eux-mêmes en ce qui concerne la forme qu'ils entendent choisir pour organiser leur activité, leur structure et leur programme d'action, pour rédiger leurs statuts et leurs règlements administratifs, et pour élire leurs représentants comme ils le souhaitent. C'est précisément ce que prévoit le contenu de l'article 15 du Code du travail.
La commission d'experts affirme, dans le quatrième paragraphe de son observation, que le Code du travail mentionne spécifiquement la Centrale des travailleurs de Cuba. Il semble que la commission d'experts n'ait pas fait une lecture exacte de l'article 15 du Code du travail. La centrale syndicale, qui regroupe 18 syndicats de branches au niveau national à Cuba, aux termes de ses propres statuts, s'intitule "Centrale des travailleurs de Cuba" et s'identifie par le sigle CTC. L'article 15 du Code du travail qui sert de référence à cette affirmation de la commission d'experts dispose expressément de ce qui suit: "Les syndicats et la Centrale des travailleurs à laquelle ils s'affilient volontairement sont régis et exercent leurs activités conformément aux principes, statuts et règlements qui sont examinés et approuvés démocratiquement par leurs membres."
Comme il découle de cette simple lecture, la référence à la Centrale des travailleurs n'identifie pas celle qui s'appelle "la Centrale des travailleurs de Cuba" en vertu de ses propres statuts; à cela s'ajoute que la référence contenue dans l'article 15 à la Centrale des travailleurs n'a pas pour but d'instituer ou de maintenir un système de syndicat unique, mais de mettre en application l'article 3 de la convention no 87.
Le gouvernement se réfère une fois encore au caractère historique de l'unité syndicale dans le mouvement ouvrier de Cuba.
Il n'existe dans la législation du travail de Cuba aucune référence à la structure que doivent adopter les syndicats ni aucune condition à l'exercice de l'activité syndicale. Il s'agit de questions qui relèvent des travailleurs eux-mêmes. L'article 13 du Code du travail est clair: tous les travailleurs ont le droit de constituer les organisations de leur choix, sans autorisation préalable. Cet article précise en son paragraphe 2 la nature de l'activité syndicale en reconnaissant que "les syndicats défendent les intérêts et les droits des travailleurs et s'efforcent d'améliorer leurs conditions de vie et de travail". Cela répond, pour partie, aux commentaires de la CISL qui se réfère à l'impossibilité de créer des organisations syndicales. La législation ne prévoit pas une telle impossibilité. La CISL promeut et défend une prétendue organisation syndicale qu'elle appelle "indépendante", et elle a utilisé un grand nombre de moyens afin de soutenir dans la presse internationale une prétendue organisation syndicale dont ni les travailleurs ni le peuple n'ont eu connaissance, et qui ne dispose d'aucune représentativité auprès des travailleurs. Il n'existe aucun centre de travail à Cuba qui ait organisé un syndicat appartenant à la prétendue centrale syndicale dont la CISL se fait l'écho. L'impossibilité à laquelle se réfère la CISL n'apparaît nulle part dans la législation, sauf dans le fait que les travailleurs eux-mêmes n'ont ni répondu ni apporté un appui à ce qui est évoqué par la CISL, qui prétend imposer ses critères sur la manière dont le syndicalisme devrait être régi dans le pays. Dans ces conditions, les agissements de la CISL constituent une ingérence dans les affaires syndicales visant à diviser le mouvement ouvrier cubain.
La commission d'experts se réfère également et prend note des commentaires de la CISL sur la désignation des dirigeants syndicaux et sur certaines fonctions des syndicats qui apparaissent dans les statuts de la Centrale des travailleurs de Cuba et dans les résolutions que celle-ci a adoptées lors de ses congrès. A cet égard, le gouvernement rappelle que le Code du travail prévoit que les organisations syndicales et la centrale à laquelle ils s'affilient volontairement sont régies et exercent leurs activités conformément aux principes, statuts et règlements qui sont examinés et approuvés démocratiquement par leurs membres, toujours dans le cadre reconnu des activités syndicales contenues dans le code, lequel est la défense des intérêts et des droits des travailleurs et l'amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
Cela signifie que le gouvernement a créé le cadre juridique approprié pour l'exercice de l'activité syndicale, mais que le contenu des statuts des syndicats, la forme de l'élection des dirigeants et les fonctions que les organisations se donnent dans le cadre des résolutions que les congrès ouvriers adoptent sont des questions qui relèvent exclusivement desdites organisations.
Par ailleurs, le gouvernement attire l'attention sur le fait que l'observation relative au contenu des statuts des organisations syndicales va au-delà du champ d'application de la convention no 87 sur la liberté syndicale. Cette convention se limite à reconnaître le droit des organisations de travailleurs et d'employeurs d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leur activité, droit reconnu par le Code du travail et que les organisations existantes à Cuba exercent dans la pratique.
Le gouvernement ne voit pas quelles sont les dispositions de la convention no 87 sur la liberté syndicale sur la base desquelles la CISL ou la commission d'experts peuvent se permettre d'émettre des critiques sur les statuts de quelque centrale que ce soit, quand les lois d'un pays établissent les droits des organisations d'élaborer leurs propres statuts, d'exercer leurs activités conformément aux principes syndicaux et de rédiger leurs règlements qui sont examinés et approuvés démocratiquement par leurs membres pour la défense des intérêts des travailleurs, tels qu'ils sont reconnus dans les articles 13 et 15 du Code du travail.
Si la commission d'experts souhaite demander des éclaircissements sur le contenu des statuts qui ne vont pas au-delà du cadre des activités syndicales, ce n'est précisément pas au gouvernement qu'il convient de les demander et encore moins sous la forme d'une observation, puisqu'il s'agit d'une question étrangère à la convention no 87 et qu'en outre ces statuts ont été élaborés, examinés et approuvés par les organisations syndicales lors des congrès tenus par les travailleurs.
En outre, une représentante gouvernementale, se référant à la réponse écrite de son gouvernement, a souligné que l'article 13 du Code du travail reconnaît à tous les travailleurs, tant manuels qu'intellectuels, le droit de s'associer volontairement et de s'organiser en syndicat, sans aucune autorisation. Toute analyse des articles subséquents du Code du travail doit se faire à partir de cette prémisse, qui se trouve en haut de la section du code dédiée à l'activité syndicale. La mention faite dans l'article 15 du code au sujet de la Centrale des travailleurs n'a pas pour objet d'institutionnaliser un système de syndicat unique. Cette disposition a simplement pour but de satisfaire à l'article 3 de la convention, et elle prévoit que les organisations syndicales agissent en conformité avec les principes, statuts et règlements qui sont discutés et approuvés démocratiquement par leurs membres. Même si les règlements et statuts de la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC) soulèvent certaines interrogations au sein de la commission d'experts, le gouvernement ne peut adopter aucune mesure pour les amender car ils ont été adoptés librement par les travailleurs en congrès, sans aucune intervention de l'Etat.
Les membres travailleurs ont remercié le gouvernement pour avoir fourni des informations écrites et des renseignements aussi complets à la commission. Depuis des années, ils ont tenté, dans le cadre de cette commission, de faire appliquer la convention dans les circonstances qui prévalaient dans les Etats à système de parti unique et de monopole syndical. Il s'avère maintenant que, dans plusieurs de ces pays qui ont maintenu le dialogue, les problèmes deviennent chaque jour moins fréquents. Afin de dissiper tout malentendu, les membres travailleurs ont souligné qu'ils ne suggéraient pas que la législation doive prescrire une forme quelconque de syndicalisme, qu'il s'agisse de monopole ou de pluralisme syndical. Toutefois, la législation devrait énoncer clairement, tant dans les textes que dans la pratique, que les travailleurs peuvent constituer les syndicats de leur choix. Quant à la loi, qui a manifestement créé un malentendu parce qu'elle mentionne nommément la Centrale des travailleurs de Cuba, il serait utile de l'amender afin qu'il n'y ait plus de confusion, tant au sein de la commission d'experts que du peuple cubain. Les membres travailleurs éprouvent de grandes difficultés face à une situation où le Parti dirige à la fois les syndicats et le gouvernement. Quant à l'observation du représentant gouvernemental selon laquelle ni le gouvernement ni la commission d'experts ne devraient examiner les statuts des syndicats, cet argument ne fait pas avancer la discussion puisque le gouvernement est le Parti et le Parti est le mouvement syndical. Les membres travailleurs souhaitent donc que la situation soit modifiée afin qu'il soit possible pour tout syndicat de se constituer à Cuba sans intervention du gouvernement, du Parti ou de qui que ce soit. C'est là un argument légitime puisque la loi en vigueur actuellement à Cuba ne permet pas à des syndicats indépendants de fonctionner librement. Ils ont suggéré au gouvernement de demander l'avis du BIT et de reconsidérer la situation.
Les membres employeurs ont souligné que l'application de la convention à Cuba est une question bien connue, qui a déjà été débattue par cette commission et commentée par la commission d'experts à cinq reprises durant les dix dernières années. La question se résume à savoir si une situation où l'unicité du mouvement syndical est instituée par la législation est compatible avec la convention. Manifestement, une telle situation est incompatible avec la convention si elle est imposée par l'Etat. Par le passé, des gouvernements ont soutenu qu'il n'y a pas incompatibilité avec la convention si les travailleurs eux-mêmes ont demandé l'unité syndicale à un moment donné; dans un tel cas, l'unité syndicale résulterait de la volonté des travailleurs, que l'Etat confirmerait sous une forme quelconque. Les membres employeurs ne sauraient accepter cette position, pas plus que ne l'a acceptée la commission. Le gouvernement présente maintenant de nouveaux arguments, de nature linguistique, soutenant que la convention dispose seulement qu'il doit y avoir liberté de choix en faveur d'un syndicat et, lorsque ce syndicat a été choisi, la convention est respectée: cet argument est manifestement contraire à la lettre et à l'esprit de la convention. La liberté d'établir un syndicat et d'y adhérer ne devrait pas exister seulement à un moment donné dans le temps, mais devrait pouvoir être exercée de manière continue dans le temps. Dans les pays où il existe un système d'unicité syndicale, il peut soudain arriver que le pluralisme soit permis, et il faut donc préserver cette liberté. Le gouvernement utilise un autre argument linguistique, suggérant qu'à Cuba une centrale syndicale n'est pas tout à fait une centrale syndicale comme dans les autres pays où il existe plusieurs organisations qui se trouvent en concurrence. Toutefois, on ne peut s'empêcher de noter que, comme par le passé, il existe toujours à Cuba un système d'unicité syndicale établi par la loi, ce qui est clairement incompatible avec la convention. Les membres employeurs ont dit espérer que le gouvernement ferait peut-être de nouvelles suggestions et garantirait réellement cette liberté dans la loi, de telle sorte que les travailleurs pourront décider librement s'ils veulent se syndiquer et choisir leur syndicat. A l'heure actuelle, toutefois, ce n'est pas le cas et les membres employeurs ne peuvent que le regretter.
Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que, durant toutes ces dernières années, la majorité des membres de cette commission a largement convenu que la convention n'interdit pas l'unicité syndicale, mais qu'il y a violation de la convention lorsque celle-ci résulte, comme dans le présent cas, du fait que le nom d'un seul syndicat est inscrit dans la législation et que les dirigeants syndicaux sont nommés par le Parti communiste. C'est là l'essence du problème. Cette commission a toujours considéré que ce type de législation institutionnalise l'unicité syndicale et que celle-ci ne résulte pas de la volonté des travailleurs.
Le membre travailleur de Cuba a précisé que la Centrale des travailleurs de Cuba a été créée même avant la révolution cubaine et avant que la présente Constitution de la République soit adoptée. Il est tout à fait erroné d'affirmer que les dirigeants syndicaux cubains sont désignés par le Parti communiste; ils sont plus de 300.000 dans le pays, soit environ 10 pour cent des travailleurs, à avoir été choisis comme dirigeants par scrutin secret. Il n'existe pas de syndicat unique à Cuba, mais une centrale qui regroupe 18 syndicats nationaux; il y a plus de 70.000 organisations syndicales dans le pays et toutes les unités de travail, sans exception, ont élu leurs dirigeants. Les travailleurs choisissent leur organisation syndicale, approuvent leurs statuts et adoptent leurs propres décisions librement.
La représentante gouvernementale a rappelé que les travailleurs ont le droit de créer les organisations de leur choix, conformément à l'article 13 du Code du travail, disposition qui sous-tend toute analyse des autres articles de cette section du code. La législation du travail ne contient aucune référence à la structure des syndicats, ni aucune exigence quant à leurs activités: c'est une question qui relève des travailleurs eux-mêmes. La structure, les fonctions et les règlements des syndicats sont adoptés par ces derniers et par la Centrale des travailleurs, réunis en congrès, sans intervention quelconque de la part de l'Etat. C'est pourquoi il n'appartient pas au gouvernement d'émettre des suggestions sur le contenu de ces statuts.
Le membre travailleur des Pays-Bas a demandé ce que le gouvernement et les travailleurs perdraient si la mention de la CTC était retirée de la loi, étant donné que, d'après les déclarations des représentants gouvernementaux, 98 pour cent des travailleurs, voire plus, souhaitent avoir une centrale unique et que le gouvernement déclare s'abstenir de toute intervention dans les affaires internes des syndicats. Il est donc légitime de se demander pourquoi le gouvernement insiste si obstinément pour conserver la mention de la CTC dans la loi, puisqu'il n'y aurait aucun changement en pratique si elle était supprimée.
Les membres travailleurs ont instamment réitéré leur demande au gouvernement pour qu'il reconsidère la situation et qu'il fasse appel à l'assistance du BIT afin que le malentendu qui existe soit dissipé, et que des progrès soient bientôt réalisés à cet égard.
Un autre représentant gouvernemental, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, indique que son gouvernement avait demandé et reçu à plusieurs reprises l'assistance du BIT. Chaque fois que le gouvernement le juge nécessaire, il sollicite une telle aide, mais en tenant compte des besoins et de la réalité du pays et non des critères émis par d'autres. Il est inexact de dire que le Parti communiste désigne les dirigeants syndicaux. Ceux-ci sont proposés et élus librement par les travailleurs. Dans son dernier Congrès, une partie de la direction de la Centrale des travailleurs de Cuba a été renouvelée par la volonté des travailleurs eux-mêmes qui ont le droit de le faire, et la direction actuelle a élu des travailleurs issus de la classe ouvrière, notamment des maçons, des travailleurs du tabac, etc. Cuba est actuellement engagée dans un processus de modification de certains textes, par exemple la résolution no 590 et une série d'amendements à la Constitution. Cependant, pour toute modification concernant la mention de la CTC dans la loi, il appartient aux travailleurs d'en décider; la décision ne peut pas être prise par le gouvernement. Répondant au membre travailleur des Pays-Bas, l'orateur a convenu que le gouvernement et les travailleurs cubains ne perdraient rien si la mention en litige était retirée de la loi, mais il a souligné de nouveau que toute modification devant intervenir en ce sens devrait être discutée avec les travailleurs car la totalité d'entre eux ont participé aux discussions sur la législation du travail ayant abouti au texte du Code du travail, qui mentionne la CTC. Il existe une campagne à l'extérieur du pays qui cherche à diviser le peuple cubain et les travailleurs ne le permettront pas, pas plus qu'ils ne permettront que le monde extérieur leur dise quelle est la forme d'organisation syndicale qu'ils doivent adopter.
Le membre travailleur de Cuba a assuré que dans son pays les organisations syndicales sont indépendantes, et il a demandé que ses réserves au sujet des conclusions de la commission soient notées.
La commission a pris note des informations fournies par le gouvernement sur des points qu'elle a discutés depuis des années. Elle a souligné l'importance de l'existence de syndicats indépendants et, à son regret, s'est estimée dans l'obligation de conclure que de tels syndicats n'existent pas dans le pays. Par conséquent, la commission a demandé au gouvernement de consulter le BIT à propos de cette situation. Elle a exprimé l'espoir que le gouvernement enverra un rapport complet sur ces questions aux organes compétents du BIT et qu'elle sera en mesure de conclure que la situation est en pleine conformité avec la convention, lors d'une de ses prochaines sessions.
Une représentante gouvernementale a estimé que l'article 13 du Code du travail, qui précise que tous les travailleurs tant manuels qu'intellectuels ont le droit, sans autorisation préalable, de s'associer volontairement et de constituer des organisations syndicales, devrait être dûment pris en compte par la commission d'experts. Or celle-ci se réfère à l'article 15 dudit Code qui précise que les syndicats et la centrale des travailleurs à laquelle ceux-ci font partie librement agissent, conformément aux principes, statuts et règlements qui sont discutés et approuvés démocratiquement par leurs membres. Comme on peut le constater, la référence dans cet article à la centrale des travailleurs n'a pas pour objectif d'institutionnaliser ou de maintenir un système de syndicat unique mais bien de garantir, d'une part, que les organisations syndicales soient créées sur une base volontaire et qu'elles soient régies et exercent leurs activités conformément à leurs statuts et, d'autre part, pour que ceux-ci soient approuvés démocratiquement par leurs membres. C'est ainsi que sont consacrés dans l'ordre juridique national les principes énoncés par la convention. S'il existe une centrale des travailleurs de Cuba, ce n'est pas parce que la loi l'impose ni parce qu'il y a dans la législation une interdiction quelconque de créer des organisations syndicales en nombre différent de ce qui existe si telle était la volonté des travailleurs. Le Code du travail ne contient aucune référence à la structure des syndicats; il ne contient pas non plus de dispositions empêchant ou interdisant la constitution de syndicats. La partie du Code du travail relative à l'organisation syndicale est consacrée aux conditions nécessaires pour garantir le libre exercice des activités syndicales. La centrale des travailleurs de Cuba n'est pas une organisation qui exerce le monopole de la représentation syndicale, comme le dit la commission d'experts. La centrale est constituée par un ensemble de syndicats nationaux de branche qui s'articulent à leur tour dans des structures provinciales et municipales. Quatre-vingt-dix-huit pour cent de l'ensemble des travailleurs du pays sont affiliés aux 17 syndicats nationaux de branche, qui compte plus de 70000 sections syndicales pour l'ensemble du pays. Chacun des syndicats nationaux tient ses propres congrès, adopte ses propres statuts et résolutions et élit librement les dirigeants qu'ils choisissent sans intervention étatique sous quelque forme que ce soit. La centrale des travailleurs de Cuba qui existe depuis 1939 - soit bien avant que ne soit adoptée la convention no87 - n'a été créée par aucune loi. Déjà, à la fin du siècle dernier, le mouvement ouvrier avait pour objectif d'unir tous les travailleurs et cette volonté s'est maintenue depuis lors.
En ce qui concerne l'article 61 du décret-loi no 67 relatif à l'organisation de l'administration centrale de l'Etat qui précise que dans l'accomplissement de ses fonctions le comité d'Etat du travail et de la sécurité sociale doit maintenir une collaboration étroite avec la centrale des travailleurs de Cuba, cette disposition - loin de limiter la liberté syndicale - garantit qu'aucune décision relative aux droits des travailleurs ne soit adoptée dans les instances de l'Etat sans consultation préalable des organisations syndicales. Dans la pratique, en effet, ce sont les syndicats de branche qui élaborent les critères nécessaires à la prise de décisions. Si l'on mentionne spécifiquement la centrale des travailleurs c'est parce que celle-ci est en réalité l'organisation qui englobe 98 pour cent des travailleurs du pays. Lorsque cette situation exigera d'être modifiée, ce sont les travailleurs eux-mêmes qui le décideront, et cela sans avoir recours à une loi, car ce serait contraire à la convention. La représentante gouvernementale a rappelé, à cet égard, que la convention ne stipule ni l'unité ni le pluralisme syndical, mais qu'elle se limite à reconnaître et à faire prévaloir la volonté des travailleurs, ainsi que le fait l'article 13 du Code du travail.
Il est significatif que la commission d'experts se soit hâtée de se référer aux commentaires de la CISL sans attendre la réponse du gouvernement, et que la présente commission décide d'inclure cette question dans la liste des cas devant être discutés. Son gouvernement qui est membre fondateur de l'OIT a toujours respecté fidèlement ses obligations découlant de la constitution et des conventions qu'il a ratifiées. Les syndicats cubains exercent toutes les fonctions qui font l'objet des préoccupations de la CISL, parce qu'ils ont acquis eux-mêmes ce droit. Les organisations syndicales dans les différents entreprises, organismes, entités industrielles, agricoles ou services de quelque nature que ce soit participent à tous les niveaux au processus de prise de décisions concernant le domaine social avec l'appui de leurs membres. Elles se préoccupent également à ce que les plans de production soient appliqués et que les travailleurs travaillent avec efficacité, parce qu'elles savent que le fruit de leur activité n'ira pas grossir les comptes en banque des patrons mais que les bénéfices seront investis en prestations sociales pour tous les travailleurs et pour le développement de l'économie dans son ensemble.
Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que la représentante gouvernementale s'était efforcée de faire croire, tout au cours de son intervention, que les travailleurs de son pays sont complètement libres de former, sans aucune contrainte, leurs syndicats sur une base volontaire, conformément à la convention. S'il est vrai que la décision prise librement et volontairement par les travailleurs eux-mêmes de s'organiser en un syndicat unique n'est pas en soi contraire aux exigences de la convention, par contre, celle-ci interdit l'imposition obligatoire par la législation d'un syndicat ainsi que toutes mesures de contrainte, d'intimidation ou d'autres restrictions à la liberté de choisir un syndicat. Or comme la commission d'experts l'a signalé, le fait que les articles 15, 16 et 18 du Code du travail citent nommément la centrale des travailleurs sans mentionner d'autres syndicats constitue par là même l'institutionnalisation du système d'unité syndicale. C'est là le coeur du problème. A cet égard, la présente commission a toujours considéré la mention dans une législation nationale d'un seul syndicat comme constituant une violation du droit des travailleurs de choisir librement et volontairement leurs syndicats, tel que garanti par la convention. Enfin l'orateur a déclaré renoncer à commenter les observations de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) dans la mesure où la commission d'experts en a différé l'examen.
Les membres employeurs sont convenus avec la représentante gouvernementale que la convention ne parle pas de pluralisme ou de monopole syndical. Par contre, la convention exige que les syndicats et les organisations d'employeurs puissent se constituer librement. Or cette possibilité n'existe plus si la législation nationale ne cite nommément qu'un syndicat. Selon la convention, les travailleurs et les employeurs doivent pouvoir prendre leurs décisions et revoir celles-ci en toute liberté. Nul n'objecte à un monopole de fait. Par contre, celui-ci ne saurait être imposé par la loi sans priver les travailleurs de leur droit de décider librement. Ceci vaut également lorsque le monopole s'explique par des raisons historiques. Dans un tel cas, il n'est ni nécessaire ni admissible de le consacrer dans la législation. La situation de monopole n'est pas modifiée par le fait qu'il existe des sections syndicales au niveau de régions ou de branches. La question dont il s'agit ici concerne l'organisation faîtière, et il est clair qu'à ce niveau elle détient un monopole. Si, comme l'ont indiqué le gouvernement dans son rapport et la représentante gouvernementale dans son intervention, le Code du travail autorise la création de nouveaux syndicats, le problème pourrait être facilement résolu en supprimant la référence spécifique à la centrale des travailleurs de Cuba, de manière à lever toute incertitude. Des doutes subsistent toutefois sur le fait de savoir si l'intention réelle du gouvernement est de garantir une telle liberté, sinon il n'y aurait aucune raison de justifier avec un telle pléthore d'arguments la nécessité d'un syndicat unique. Cela montre bien que l'on veut maintenir la situation. Tout en reconnaissant qu'il convenait d'attendre la réponse du gouvernement avant d'examiner les observations de la CISL, les membres employeurs ont constaté que la législation cubaine est clairement en infraction avec la convention.
Le membre travailleur de Cuba a déclaré souscrire pleinement aux déclarations de la représentante gouvernementale de son pays. Après avoir insisté sur le contenu de l'article 13 susmentionné du Code du travail, il a rappelé que, selon l'article 14 dudit code, les travailleurs ont le droit de se réunir, de discuter et d'exprimer librement leur avis sur toutes les questions qui les intéressent. C'est là une pratique habituelle dans son pays. Les syndicats couvrent la totalité des branches de l'économie, et tous les collectifs de travailleurs en font partie. Partout les organisations syndicales sont constituées grâce à la volonté librement exprimée des travailleurs, sans qu'il soit nécessaire de demander une autorisation préalable à un organe quelconque. Les élections des dirigeants syndicaux s'effectuent, dans tous les cas, par vote secret de tous les affiliés. Plus de 70000 organisations syndicales ont ainsi élu plus de 350000 dirigeants syndicaux. Ceux-ci représentent 10 pour cent de tous les travailleurs. Ces chiffres montrent, de manière évidente, la participation des travailleurs cubains au mouvement ouvrier, alors qu'à l'heure actuelle de nombreuses organisations syndicales se sont affaiblies dans le monde sous la pression des gouvernements. A Cuba, il n'y a aucune législation ni aucune convention entre syndicats et employeurs qui exige l'affiliation syndicale. Le travail réalisé depuis toujours par les syndicats et le prestige qu'ils ont gagné par leur lutte relèvent d'une longue tradition en matière d'affiliation syndicale. Les cotisations syndicales sont volontaires et elles ne sont pas prélevées du salaire; chaque travailleur verse au trésorier de la section syndicale de son centre de travail la cotisation fixée pour les affiliés. Les organisations syndicales sont des organisations autofinancées au moyen des cotisations de leurs membres. Elles ne reçoivent aucune subvention de l'Etat, d'un parti, d'une entreprise ou d'une organisation nationale ou internationale. Les syndicats cubains sont indépendants dès leur constitution car ils disposent de leurs propres ressources. Ils ne sont ni des organisations de l'Etat ni des organisations du parti. Ils tiennent leurs propres congrès au cours desquels ils élisent leurs dirigeants nationaux. Ce sont les affiliés et non pas une catégorie spéciale d'entre eux qui proposent les candidats aux postes de dirigeants syndicaux. Sur la base des propositions ainsi faites, on dresse une liste des candidats dans l'ordre où ils sont proposés et on procède à l'élection par vote direct et secret. C'est ainsi que sont élus les dirigeants syndicaux à Cuba. A sa connaissance, il n'y a aucun autre pays où ce type d'élection soit plus démocratique et où il y ait une si grande participation de travailleurs. C'est pourquoi les observations qui ont été faites à cet égard sont inacceptables. Il est également faux de prétendre que la centrale des travailleurs de Cuba exerce des pressions sur les syndicats en vue d'augmenter la productivité et d'imposer une discipline du travail. La seule obligation qui existe au sein des organisations syndicales, c'est le respect des décisions prises à la majorité. Des milliers de dirigeants syndicaux ont participé à l'élaboration des statuts de la centrale des travailleurs, et plus de 2500 délégués élus démocratiquement ont assisté au seizième congrès de 1990.
Le membre travailleur des Etats-Unis a indiqué que la déclaration du membre travailleur de Cuba reflétait exactement ce qui arrive dans un pays qui, comme la commission d'experts l'a souligné, connaît l'institutionnalisation du principe de l'unité syndicale.
Le membre travailleur de l'Uruguay s'est référé à l'expérience de son pays qui connaît l'unité syndicale. Certes, il convient de rechercher le moyen de perfectionner la législation de manière à ne pas institutionnaliser le principe de l'unité syndicale, celle-ci devant être réalisée librement par les travailleurs eux-mêmes. Mais l'expérience de son pays n'en montre pas moins que l'unité syndicale est une vertu et qu'elle constitue une tendance naturelle imposée par la lutte contre ceux qui cherchent à "diviser pour régner". L'unité syndicale ne va pas à l'encontre du pluralisme lorsque, comme dans son pays, elle est créée par la libre volonté des travailleurs sans qu'aucune législation ne les y oblige. Le mouvement syndical des travailleurs cubains a suffisamment de maturité pour accepter cette tendance à l'unité. Il ne s'agit pas d'une caractéristique propre à Cuba ou à l'Uruguay. D'autres pays ont connu la même tendance. Ceci ne signifie pas que les travailleurs soient nécessairement dans l'erreur lorsqu'ils préfèrent le pluralisme syndical, mais les événements relatés dans le cadre du cas de la Colombie montrent que l'unité syndicale peut également s'avérer nécessaire.
Le membre travailleur de l'URSS, se fondant sur l'expérience de son pays, a souligné que le fait que la législation cubaine ne mentionne qu'une centrale syndicale n'empêche nullement les travailleurs cubains de créer d'autres syndicats s'ils le souhaitent. Par ailleurs, il a souscrit pleinement à la déclaration des membres employeurs selon laquelle il convient de différer l'examen des observations de la CISL comme l'a du reste fait la commission d'experts, et cela d'autant plus que nombre d'aspects de ces observations sont sans rapport avec la convention.
Le membre travailleur du Venezuela a fourni des informations détaillées sur le développement libre et démocratique du mouvement syndical dans son pays qui connaît le pluralisme syndical. Il a souligné qu'on ne saurait empêcher ni les travailleurs de créer librement des syndicats de leur choix ni les dirigeants syndicaux de les diriger. Il est essentiel que ces derniers ne soient pas menacés, emprisonnés ou licenciés en raison de leur activité syndicale. Les travailleurs cubains sont responsables de leurs actes, et la centrale des travailleurs de ce pays est libre d'agir comme elle l'entend. Toutefois, en raison du principe de liberté syndicale, il n'est pas admissible qu'une législation de quelque pays que ce soit puisse empêcher les travailleurs de s'organiser librement, d'élire leurs dirigeants et de participer à des réunions internationales. Enfin, il s'est déclaré préoccupé de la destitution de deux dirigeants syndicaux cubains qui ont été remplacés dans leurs fonctions sans qu'aucune explication n'ait été fournie.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a déclaré qu'il est normal que tous les syndicalistes croient en l'unité syndicale et à des élections libres. Tous les syndicats aspirent également à compter le plus grand nombre d'affiliés. Ce sont des objectifs pour lesquels les syndicalistes du monde entier combattent. Par contre, il n'est pas admissible que, pour réaliser ces objectifs, les syndicats recherchent l'assistance de leur gouvernement, cela pourrait servir de précédent à ce dernier pour intervenir dans les affaires des syndicats, ce qui serait fatal au mouvement syndical. Si l'unité est bonne en soi, elle ne doit pas conduire les gouvernements à l'institutionnaliser dans la législation de leur pays. Par ailleurs, le pluralisme n'est pas une fin en soi. Il ne signifie pas qu'il doit y avoir dans chaque pays une douzaine de confédérations, ni même qu'il doive être exercé dans la pratique. Il est par contre essentiel que la loi autorise le pluralisme si les travailleurs le demandent. Il a prié la représentante gouvernementale d'indiquer s'il est vrai que des syndicalistes aient été emprisonnés à Cuba parce qu'ils ont tenté d'instituer des syndicats indépendants; si tel était le cas, la situation serait beaucoup plus grave que celle examinée jusqu'ici.
Le membre travailleur de Cuba a déclaré respecter infiniment le mouvement syndical international. La manière dont les syndicats cubains entretiennent des relations avec les diverses centrales du monde entier atteste de leur solidarité. La centrale de travailleurs cubains s'efforcera toujours de répondre aux questions et demandes de renseignements de n'importe quelle autre centrale syndicale. S'agissant des deux représentants syndicaux cubains, dont la destitution a été alléguée, l'un occupe des responsabilités de premier plan dans une des entreprises les plus importantes de Cuba, l'autre occupe un poste de haut niveau dans un établissement de santé qui entretient des relations avec le monde entier. En conclusion, il a confirmé que les travailleurs cubains sont libres de constituer les syndicats de leur choix, même si jusqu'à présent ils ont choisi la centrale des travailleurs.
Le membre gouvernemental de l'Argentine a déclaré qu'il fallait distinguer entre les droits des travailleurs et ceux des organisations syndicales. Le droit des travailleurs consiste dans celui de choisir librement leurs organisations. Quant aux syndicats, ils doivent avoir le droit de créer des fédérations et des confédérations. Il semble qu'il y ait une certaine confusion due au fait que la législation cubaine reflète la réalité en ne mentionnant que la centrale des travailleurs, bien qu'elle n'interdise pas de constituer d'autres centrales. Il n'y aurait violation de la convention que si les syndicats souhaitaient créer une autre centrale syndicale et qu'une décision du gouvernement le leur interdirait. Or la législation cubaine ne contient aucune interdiction de cette nature mais décrit simplement une situation, la mention de la centrale des travailleurs de Cuba n'étant pas limitative. Il serait naturellement important d'améliorer la législation de manière à éviter toute confusion sur ce point.
Un membre employeur de Cuba s'est référé aux diverses interventions sur la centrale unique des travailleurs de Cuba en précisant que cette question répond à des motivations d'ordre historique. En remontant à l'origine du mouvement syndical cubain, on peut constater clairement que jamais deux organisations n'ont coexisté dans le pays. Il a pris l'exemple de la lutte contre la tyrannie de Batista où les syndicalistes ayant participé à l'opposition ont invoqué la possibilité de créer une organisation syndicale centrale parallèle. Cette question a été soulevée au sein de la Fédération des étudiants universitaires (FEV) de laquelle il était un dirigeant. L'université de La Havane s'était convertie en centre de lutte contre la tyrannie de Batista, cependant on a préféré préserver l'unité du mouvement syndical pour des raisons historiques bien que les dirigeants de la centrale syndicale obéissaient aux intérêts de la tyrannie et aux exploiteurs nationaux et que les dirigeants syndicaux révolutionnaires jouissaient d'un grand prestige et d'un véritable ascendant sur la classe ouvrière cubaine.
Un membre travailleur de la Colombie, tout en déclarant qu'il ne pouvait s'unir au choeur des personnes qui cherchent actuellement à créer une atmosphère en Amérique latine contre Cuba, a manifesté sa préoccupation en constatant le fait que certaines instances internationales puissent également se prêter à ce phénomène. Le monde est las d'invasions et de colonialisme, et actuellement d'autres pays d'Amérique latine risquent de souffrir du même destin. Il y a des exemples récents connus de tous et il faut éviter que Cuba connaisse le sort de Panama ou de Grenade. Il s'est référé à l'intervention d'un membre travailleur qui, la veille, a évoqué que, dans des situations difficiles telles que celles sévissant en Colombie, une tentative d'invasion n'est pas à écarter. Il y a des situations difficiles qui perdurent pendant des années, mais cela ne doit sous aucun prétexte constituer une base à l'intervention d'une puissance jouant un rôle de gendarme international pour imposer ses conditions et son idéologie. L'orateur a lancé un appel aux délégués cubains afin qu'ils ouvrent leurs portes à l'OIT qui est un organisme profondément démocratique, qu'ils facilitent toutes les activités de la commission d'experts ou de toute commission d'enquête; cela empêchera ainsi la possibilité de chercher des excuses à la menace d'une intervention qui pèse sur les pays d'Amérique latine. Les droits des travailleurs ont été conquis par les travailleurs eux-mêmes et ne peuvent être imposés par une quelconque puissance étrangère.
Un membre travailleur du Venezuela a déclaré que, indépendamment de la conception juridique et doctrinaire qui oriente la législation du travail de Cuba, une chose est le Code du travail cubain et une autre l'application des normes internationales du travail. Il est profondément préoccupé par les questions suivantes: i) Comment expliquer la détention de dirigeants syndicaux par le seul fait de ne pas être d'accord avec les pratiques syndicales cubaines? ii) Comment expliquer que les travailleurs cubains en exil aient constitué des organisations syndicales hors de Cuba, toute initiative de cette nature étant condamnée à la répression de l'Etat? iii) Comment se fait-il que plusieurs délégations de travailleurs cubains à l'étranger soient utilisées par les dirigeants syndicaux cubains en quête d'asile? Cela témoigne de l'absence de liberté syndicale à Cuba.
Un membre travailleur de l'Equateur a déclaré qu'il est nécessaire d'attendre que le gouvernement cubain présente un rapport sur ces allégations. En outre, il a souligné que les travailleurs de l'Amérique latine et du tiers monde luttent pour constituer des centrales unitaires de travailleurs. Ce sujet sera, dans les années à venir, d'une importance capitale pour l'OIT puisqu'il s'agit pour eux d'une question de survie contre les agressions toujours plus grandes dont souffrent les travailleurs. L'orateur a déclaré que toute étude concernant Cuba doit être menée sans idées préconçues et de manière impartiale; ainsi donnera-t-elle des résultats reflétant la libre décision des travailleurs. Il a indiqué que la CTC rassemble 98 pour cent des travailleurs de Cuba, et que ces derniers y expriment librement leurs opinions, réclamations et exigences, malgré le blocus dont pâtit le pays. L'intervention du gouvernment dans la vie syndicale se limite tout simplement au dialogue direct avec le chef de la révolution cubaine. Les travailleurs de Cuba se sont donné une organisation qui correspond à leurs intérêts et c'est la voie qu'adopteront les travailleurs du monde.
Un membre travailleur de la Colombie a déclaré que le dialogue qui a lieu au sein de la commission ne doit pas favoriser une atmosphère hostile contre Cuba. Il a souligné que l'OIT ferait mieux de constater la véracité sur la situation des travailleurs cubains que, du point de vue juridique, il n'y a pas d'obstacles lorsqu'il s'agit de se syndiquer librement. Il a félicité les travailleurs cubains pour avoir réussi à constituer une confédération unique, indépendante par ses convictions politiques et idéologiques. Il a indiqué que la Confédération unitaire des travailleurs de Colombie rassemble 80 pour cent des travailleurs syndiqués dans un pays où seulement 7 pour cent de l'ensemble des travailleurs sont syndiqués et où il se produit tous les jours des assassinats de syndicalistes. A ce jour, 480 dirigeants syndicaux en ont été les victimes. L'OIT ne devrait pas soulever de tels problèmes juridiques contre Cuba quand il existe des situations bien pires dans d'autres pays. L'orateur a abondé complètement dans le sens des déclarations du membre travailleur de Cuba.
La représentante gouvernementale de Cuba a réitéré, à propos des opinions émises sur le droit des travailleurs de constituer des organisations, que l'article 1 du Code du travail garantit le droit de tous les travailleurs de s'associer librement et de constituer sans autorisation préalable des organisations. Cela doit être la base de toute analyse juridique afin de déterminer s'il est possible ou non de créer des organisations syndicales dans le pays. Elle a souligné que ceci ne doit pas être régi par la loi puisque ce sont les travailleurs eux-mêmes qui en toute libreté décident de la forme, de la structure et des fonctions de leurs organisations. Par ailleurs, elle a souligné que plusieurs interventions ont fait référence à des rumeurs de syndicalistes emprisonnés et, sur ce point, elle a déclaré qu'il n'y a aucune personne emprisonnée à Cuba pour des raisons syndicales; il est possible qu'il y ait des prisonniers de droit commun dont on dit qu'ils sont des syndicalistes. Elle a déclaré que, si un membre de la commission présente un nom et des détails sur un quelconque syndicaliste détenu, le gourvernement procédera aux investigations nécessaires et soumettra les informations pertinentes.
L'oratrice a également indiqué que Cuba a pris part depuis de nombreuses années aux travaux de la présente commission, a fait preuve de sa volonté de dialogue et de s'acquitter de ses obligations constitutionnelles. Son pays est ouvert au dialogue constructif et à la coopération avec l'OIT dans des conditions de respect mutuel.
La commission a pris bonne note des informations fournies par la représentante gouvernementale et du large débat qui a eu lieu en son sein. Elle a rappelé que, depuis de nombreuses années, la commission d'experts présente des commentaires sur certaines divergences entre la législation nationale et la convention, notamment en ce qui concerne la nécessité de supprimer, sur le plan législatif, les références à la centrale désignée dans la législation comme la "Centrale des travailleurs". La présente commission, de même que la commission d'experts, observe que des commentaires spécifiques de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), alléguant de graves manquements en droit comme en pratique à l'application de la convention, ont été récemment présentés. Elle a exprimé le ferme espoir que le gouvernement prendra rapidement les mesures nécessaires pour supprimer les références à la centrale dans la législation et qu'il répondra de manière détaillée aux commentaires de la CISL dans son prochain rapport, afin de permettre l'année prochaine la poursuite du dialogue avec le gouvernement.
Commentaire précédent
La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 26 août 2009 et des observations de la Confédération nationale indépendante de Cuba (CONIC) (dont le gouvernement conteste le caractère syndical) du 10 août 2009. La commission prend note aussi de la réponse du gouvernement au sujet de ces observations.
Droits syndicaux et libertés publiques
La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour libérer sans délai les syndicalistes et dirigeants syndicaux condamnés à des peines d’emprisonnement de 12 à 26 ans pour trahison et conspiration. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir qu’il déplore qu’il n’ait pas été tenu compte des réponses qu’il a adressées et qu’il réitère ce qu’il a déclaré en d’autres occasions. Le gouvernement souligne qu’il n’y a pas à Cuba de syndicalistes emprisonnés, persécutés ou menacés au motif qu’ils sont syndicalistes, et qu’il n’a pas été confisqué de biens à des organisations syndicales. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait noté que, selon le gouvernement: 1) aucun des condamnés n’était dirigeant syndical, étant donné qu’ils avaient pris la décision de ne pas avoir de relation de travail depuis plusieurs années; 2) ils menaient des activités visant à renverser l’ordre politique, économique et social décidé par le peuple cubain et consacré dans la Constitution; 3) leur responsabilité a été établie pour des actes qualifiés de délits qui visaient à nuire à la souveraineté de la nation; ils ont été sanctionnés conformément à l’article 91 du Code pénal et à la loi no 88 de 1999 de protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba; 4) aucun d’entre eux n’a été jugé ou sanctionné pour avoir exercé ou défendu la liberté d’opinion ou d’expression; 5) tous ont porté atteinte aux droits de l’homme du peuple cubain, en particulier à l’exercice des droits à la libre détermination, au développement et à la paix; 6) actuellement, la plupart des condamnés sont en prison où ils purgent leur peine, mais plusieurs ont bénéficié de mesures «extrapénales» pour des raisons humanitaires; et 7) la dignité humaine et l’intégrité physique et psychique des condamnés ont été respectées rigoureusement, et les détenus ont bénéficié en prison des mesures amples dont jouit l’ensemble de la population carcérale cubaine.
A ce sujet, la commission note avec préoccupation que, dans ses commentaires de 2009, la CONIC fait état des conditions de détention déplorables des syndicalistes qui sont encore détenus (et qui subissent notamment des châtiments physiques, des mauvais traitements et des menaces). Tout en soulignant que le Comité de la liberté syndicale s’est également prononcé sur ces condamnations et a demandé la libération des dirigeants condamnés, la commission répète ses observations précédentes et rappelle que la liberté syndicale n’est qu’un aspect de la liberté d’association en général qui, elle-même, doit s’intégrer dans le vaste complexe des libertés fondamentales de l’homme, interdépendantes et complémentaires les unes des autres. Elle rappelle en outre qu’en 1970 la Conférence internationale du Travail a énuméré de manière explicite les droits fondamentaux qui sont nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, à savoir: a) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; b) la liberté d’opinion et d’expression, et en particulier le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de rechercher, de recevoir et de diffuser, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; c) la liberté de réunion; d) le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartial; et e) le droit à la protection des biens des syndicats. Dans ces conditions, la commission prie instamment le gouvernement de faire le nécessaire pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à de sévères peines d’emprisonnement, pour enquêter sur les faits allégués par la CONIC et, dans le cas où ces faits seraient avérés, pour sanctionner les auteurs.
Par ailleurs, la commission avait demandé au gouvernement d’adresser ses commentaires au sujet des observations formulées par la CSI le 28 août 2007, qui portaient sur d’autres cas concrets de détention de travailleurs de la CONIC, de harcèlements et de menaces d’emprisonnement qui visent des délégués du Syndicat des travailleurs de l’industrie légère (SITIL), et sur la confiscation de matériel et de l’aide humanitaire envoyée de l’étranger au Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC) (dont le gouvernement conteste le caractère syndical). La commission note que la CSI, dans ses dernières observations du 26 août 2009, ajoute que quatre des dirigeants du CUTC qui avaient été condamnés ont été libérés et expatriés, mais que cinq autres sont toujours en prison. La commission note aussi que la CONIC, dans ses commentaires du 10 août 2009, fait état de ce qui suit: 1) la détention, du 18 au 24 février 2009, de 14 membres de la CONIC; 2) la disparition, le 24 février 2009, d’un dirigeant syndical de la CONIC; et 3) les intimidations de l’autorité publique qui visent des dirigeants syndicaux de la CONIC, du Syndicat indépendant «William Le Santé» et du Syndicat indépendant des industries légères, pour qu’ils cessent de participer à des activités syndicales.
La commission note que, à ce sujet, le gouvernement indique que les personnes en question ne sont pas des dirigeants syndicaux et qu’elles n’ont aucune représentativité; les faits qui leur sont reprochés ont été dûment démontrés avec toutes les garanties de procédure établies dans la législation cubaine; ces personnes ont commis des délits qui sont définis dans la législation cubaine et, pour cette raison, elles ont été dûment jugées et sanctionnées par les tribunaux; aucune n’a été poursuivie ou sanctionnée au motif qu’elle exerçait ou défendait des droits syndicaux, et la responsabilité de tous a été démontrée dans des actes qualifiés de délits qui visaient directement à porter atteinte à la souveraineté de la nation. Le gouvernement ajoute que ni le CUTC ni la CONIC sont des organisations syndicales. Il nie que les dirigeants qui ont été libérés aient été expatriés; ils ont été remis en liberté pour des raisons humanitaires et, de leur propre gré, ils sont partis dans d’autres pays. Quant à la communication de la CONIC de 2009, le gouvernement indique qu’il s’agit d’allégations sans fondement qui constituent une manœuvre politique destinée à tromper les syndicalistes des autres pays et à donner une image de division entre les travailleurs cubains, afin de discréditer le mouvement syndical cubain et ses conquêtes. Cette organisation ne réunit pas des travailleurs, ses rares membres ne sont liés par aucune relation de travail et ne représentent aucun secteur des travailleurs. Le gouvernement ajoute qu’il n’y a pas à Cuba de restriction ou d’interdiction de l’exercice des droits syndicaux. Les travailleurs cubains bénéficient de l’un des systèmes les plus complets et rigoureux de protection des droits au travail et de syndicalisation. Le gouvernement indique qu’il fournira de plus amples informations à la commission afin que celle-ci puisse procéder à une évaluation intégrale et impartiale. La commission note qu’il y a des contradictions entre les commentaires de la CSI et la réponse du gouvernement. Dans ces conditions, notant que nombreuses sont les allégations en matière de droits de l’homme et de libertés publiques, la commission demande au gouvernement de communiquer le texte des décisions judiciaires dont il fait mention dans son rapport.
Questions législatives
Dans ses observations précédentes, la commission avait pris note de l’information du gouvernement selon laquelle la révision du Code du travail se poursuivait. La commission avait exprimé l’espoir que la révision du Code du travail parviendrait à son terme dans un proche avenir et que les commentaires qu’elle formule seraient pris en compte. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique ce qui suit: la législation en vigueur est maintenue; la structure et le fonctionnement des organismes de l’administration centrale de l’Etat sont en cours de modification depuis une date récente; et on s’efforce de perfectionner et de rendre plus efficaces les institutions. Le 2 mars 2009, une restructuration importante de plusieurs organismes centraux a eu lieu et l’examen de la structure actuelle et du fonctionnement du gouvernement se poursuit, ce qui, inévitablement, a des répercussions sur le programme législatif du pays. Le gouvernement ajoute que les consultations se poursuivent, ainsi que l’actualisation du projet de Code du travail, conformément à l’orientation des activités actuelles. A cet égard, la commission espère que la révision du Code du travail s’achèvera prochainement et qu’il sera tenu compte des commentaires formulés sur l’application de la convention qui sont examinés ci-après. La commission rappelle au gouvernement qu’il peut bénéficier de l’assistance technique du Bureau. Le gouvernement est prié de communiquer copie du projet de Code du travail en question.
Monopole syndical
Articles 2, 5 et 6 de la convention. Depuis de nombreuses années, la commission souligne qu’il est nécessaire de supprimer, des articles 15 et 16 du Code du travail de 1985, la mention qui est faite de la Centrale des travailleurs de Cuba. La commission note que le gouvernement indique de nouveau que la législation en vigueur et la pratique quotidienne dans tous les centres de travail garantissent le plein exercice de l’activité syndicale et du droit d’association. Selon le gouvernement, la représentativité des travailleurs est exercée à différents niveaux et instances de décision par les syndicats nationaux de branche et par la centrale syndicale qui, comme l’ont décidé les travailleurs eux-mêmes, a été instituée lors de leurs congrès et constitue l’expression de la volonté d’unité du mouvement syndical cubain. L’existence d’une centrale syndicale unitaire n’a pas été imposée par le gouvernement et ne découle d’aucune disposition, sinon de la volonté souveraine des travailleurs cubains. L’application pratique de la convention est garantie par des dispositions juridiques qui établissent que «tous les travailleurs, manuels et intellectuels, ont le droit, sans autorisation préalable, de s’associer volontairement et de constituer des organisations syndicales». Ces droits sont garantis dans la pratique par l’existence de 19 syndicats nationaux de branche dotés de structures municipales et provinciales et présents dans 169 municipalités et 14 provinces, qui réunissent près de 110 000 sections syndicales ou syndicats de base. Il y a dans chaque centre de travail une ou plusieurs sections syndicales. Leurs dirigeants sont élus par les travailleurs. Dans chaque centre de travail, les conventions collectives du travail sont définies par les administrations et l’organisation syndicale et sont adoptées par les travailleurs réunis en assemblées. Au cours de celles-ci, ils peuvent formuler des suggestions et s’exprimer au sujet des questions qui font l’objet de ces conventions. Le gouvernement ajoute que ni le Code du travail en vigueur ni la législation complémentaire n’établissent de restrictions à la création de syndicats. Tous les travailleurs ont le droit de constituer des organisations syndicales sans autorisation préalable et de s’y affilier librement. Le gouvernement répète que l’article 15 du Code du travail reprend pour l’essentiel les dispositions de l’article 3 de la convention. Les statuts, règlements et principes qui régissent l’activité des 19 syndicats nationaux de branche et de la Centrale des travailleurs de Cuba, à laquelle ces syndicats se sont affiliés de leur plein gré, sont examinés et adoptés par les syndicats lors de leurs congrès respectifs. A ce sujet, aucune disposition de la législation ne donne d’indication au sujet de la structure syndicale. Toutefois, la commission doit insister une fois de plus sur le fait que le pluralisme syndical doit être possible dans tous les cas, et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait en se référant à une centrale syndicale spécifique. Même dans le cas où l’unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, la préférence de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie et de s’affilier à l’organisation de leur choix [voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96]. Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de faire le nécessaire pour veiller à ce que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, aient le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. La commission demande aussi au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les articles susmentionnés du Code du travail et d’indiquer dans son prochain rapport toute mesure prise à cet égard.
Article 3. La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle dit qu’il est nécessaire de modifier l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983, article qui confère à la Centrale des travailleurs de Cuba le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que les travailleurs affiliés à chaque syndicat proposent et élisent leurs dirigeants aux différents niveaux, des assemblées de travailleurs, à la base, jusqu’aux congrès respectifs qu’ils organisent périodiquement, dans le respect absolu de la plus stricte démocratie syndicale. Les représentants syndicaux démocratiquement élus par les travailleurs participent, avec d’amples facultés, aux conseils de direction qui prennent les décisions qui les concernent, tant au niveau de l’entreprise que dans les organismes et institutions de l’administration de l’Etat. Le gouvernement ajoute que sont menées actuellement des activités ayant trait à la structure et au fonctionnement de plusieurs organismes de l’administration centrale de l’Etat et à la structure du gouvernement dans son ensemble. La commission exprime le ferme espoir que, dans le cadre des études menées actuellement sur la structure et le fonctionnement de l’administration de l’Etat, le gouvernement modifiera prochainement l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983 afin de garantir le pluralisme syndical, par exemple en remplaçant la mention qui y est faite de la Centrale des travailleurs de Cuba par la mention «organisation la plus représentative».
Droit de grève
Depuis plusieurs années, la commission note que le droit de grève n’est pas reconnu dans la législation et que, dans la pratique, le recours à la grève est interdit. La commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour garantir que nul ne puisse faire l’objet d’une discrimination ou d’un préjudice dans le cadre de son emploi au motif d’avoir exercé pacifiquement le droit de grève. La commission note que le gouvernement réaffirme de nouveau que la législation cubaine n’interdit pas le droit de grève, pas plus qu’elle ne prévoit de sanction pour l’exercice de la grève, et que les organisations syndicales ont pour prérogative de décider de leur action à ce sujet. Si les travailleurs cubains décidaient de faire grève, rien ne pourrait les en empêcher. Le gouvernement ajoute que la revendication par les travailleurs de certains de leurs droits qui, dans beaucoup de pays, conduit à utiliser les mécanismes propres à la grève, est inutile dans la pratique des relations professionnelles à Cuba en raison de l’existence et de l’utilisation d’autres mécanismes plus efficaces pour exercer leurs droits. Les travailleurs utilisent systématiquement ces mécanismes grâce aux formes multiples de leur participation effective et grâce à l’exercice d’un pouvoir réel de décision dans les affaires qui les intéressent, ce qui ne peut pas être considéré comme une restriction ou une interdiction du droit de grève. Dans les différentes formes institutionnalisées de participation des travailleurs et de leurs représentants au règlement de différends et à la prise de décisions, les représentants syndicaux ont d’amples capacités et un mandat étendu. Les travailleurs cubains bénéficient du dialogue social participatif et démocratique à tous les niveaux de la prise de décisions. L’accent a été mis sur la collaboration, et non sur le conflit, ce qui a permis d’améliorer les salaires, les prestations de sécurité sociale, les mesures de sécurité et de santé, entre autres, et d’accroître constamment les qualifications des travailleurs. Les représentants syndicaux participent à tous les processus d’élaboration de la législation du travail et de la sécurité sociale et, très souvent, les projets sont menés en consultation avec les assemblées de travailleurs dans les centres de travail. La commission rappelle que la convention n’exige pas l’adoption de dispositions juridiques qui réglementent le droit de grève, à condition que, dans la pratique, le droit de grève puisse être exercé sans que les organisations et les participants risquent de subir des sanctions. La commission rappelle aussi que presque tous les Etats ont choisi de reconnaître expressément et/ou de réglementer le droit de grève. Par conséquent, la commission invite le gouvernement, afin de garantir la sécurité juridique des travailleurs qui décident de faire grève, d’envisager, dans le cadre de la réforme législative en cours dont le gouvernement fait mention, d’adopter des dispositions reconnaissant expressément le droit de grève, ainsi que les principes fondamentaux exprimés par la commission [voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 136 à 179].
La commission prend note du rapport du gouvernement et de sa réponse au sujet des commentaires formulés par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), du 10 août 2006, lesquels se référaient aux questions législatives et pratiques en cours d’examen et à la détention et à l’emprisonnement de dirigeants syndicaux.
La commission note que le gouvernement indique de nouveau que la révision du Code du travail se poursuit. A cette fin, d’amples consultations sont menées. Elles recouvrent les 19 syndicats nationaux de branche et la Centrale des travailleurs de Cuba. A ce sujet, la commission fait observer que ce processus suit son cours depuis de nombreuses années, sans résultat concret à ce jour. La commission exprime l’espoir que la révision du Code du travail parviendra à son terme dans un proche avenir et que les commentaires qu’elle formule dans les paragraphes suivants à propos de l’application de la convention auront été pris en considération. Rappelant au gouvernement que l’assistance technique du Bureau est à sa disposition, elle le prie de communiquer copie du projet mentionné.
I. Monopole syndical
Articles 2, 5 et 6 de la convention. La commission observe que, depuis de nombreuses années, elle souligne qu’il est nécessaire de supprimer des articles 15 et 16 du Code du travail de 1985 la mention qui y est faite de la Centrale des travailleurs. La commission note que, selon le gouvernement, la législation en vigueur et la pratique quotidienne dans tous les centres de travail garantissent le plein exercice de l’activité syndicale et du droit d’association. D’après le gouvernement, le Code du travail n’interdit pas aux travailleurs de choisir la forme et la structure syndicale qu’ils jugent utiles, et l’article 15 du Code du travail reprend pour l’essentiel les dispositions de l’article 3 de la convention. Les statuts, règlements et principes qui régissent l’activité des 19 syndicats nationaux de branche et de la Centrale des travailleurs de Cuba, à laquelle ces syndicats se sont affiliés de leur plein gré, sont examinés et adoptés par les syndicats lors de leurs congrès respectifs. A ce sujet, aucune disposition de la législation ne donne d’indication au sujet de la structure syndicale. Le gouvernement souligne aussi que la tradition d’unité du mouvement syndical cubain et la libre volonté des travailleurs ont abouti à la création, en 1939, de la Centrale des travailleurs de Cuba. La centrale n’a donc pas été créée en vertu d’une disposition législative. Selon le gouvernement, ni les 19 syndicats de branche ni la Centrale des travailleurs de Cuba, ni les plus de 70 000 sections syndicales qui existent n’ont dû demander l’autorisation d’exercer librement leurs activités dans les centres de travail. La commission doit insister une fois de plus sur le fait que le pluralisme syndical doit être possible dans tous les cas et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait en se référant à une centrale syndicale spécifique. Même dans le cas où l’unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, la préférence de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie et de s’affilier à l’organisation de leur choix (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de faire le nécessaire pour veiller à ce que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, aient le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. La commission demande aussi au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les articles susmentionnés du Code du travail et de l’informer dans son prochain rapport de toute mesure prise à cet égard.
Article 3. La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle dit qu’il est nécessaire de modifier l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983, article qui confère à la centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales. La commission note que le gouvernement réaffirme que cette disposition a été modifiée par le décret-loi no 147 de 1994 et qu’actuellement c’est l’accord no 4085 du 2 juillet 2001 qui s’applique. A ce sujet, la commission constate que le décret-loi no 147 de 1994 n’abroge pas expressément l’article susmentionné, que l’accord no 4085 n’a pas été communiqué par le gouvernement et qu’elle n’en a donc pas pris connaissance. Dans ces conditions, la commission prie instamment le gouvernement de modifier l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983 afin de garantir le pluralisme syndical, par exemple en remplaçant la mention qui y est faite de la Centrale des travailleurs de Cuba par la mention «organisation la plus représentative». La commission demande aussi au gouvernement de communiquer copie de l’accord no 4085 du 2 juillet 2001.
II. Droit de grève
Dans son observation précédente, la commission a noté que le droit de grève n’est pas reconnu dans la législation et que, dans la pratique, le recours à la grève est interdit. Elle avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour garantir que nul ne puisse faire l’objet d’une discrimination ou d’un préjudice dans le cadre de son emploi au motif d’avoir exercé pacifiquement le droit de grève. Elle lui avait aussi demandé de la tenir informée à cet égard. La commission note que le gouvernement réaffirme que la législation cubaine n’interdit pas le droit de grève, pas plus qu’elle ne prévoit de sanctions pour l’exercice de la grève, et que les organisations syndicales ont pour prérogative de décider de leur action à ce sujet. Les travailleurs cubains bénéficient du dialogue social participatif et démocratique à tous les niveaux de la prise de décisions. L’accent est mis sur la collaboration et non sur le conflit, ce qui a permis d’améliorer les salaires, les prestations de sécurité sociale, les mesures de sécurité et de santé, entre autres, et d’accroître constamment les qualifications des travailleurs. Les représentants syndicaux participent à tous les processus d’élaboration de la législation du travail et de la sécurité sociale et, à de multiples occasions, les projets sont menés en consultation avec les assemblées de travailleurs dans les centres de travail. Selon le gouvernement, si jamais les travailleurs cubains décidaient de faire grève, rien ne pourrait les en empêcher. La commission souligne de nouveau que le droit de grève constitue l’un des moyens essentiels dont les travailleurs et leurs organisations disposent pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Elle demande de nouveau au gouvernement de veiller expressément dans la législation à ce que nul ne soit victime de discrimination ou de préjudice dans son emploi au motif d’avoir exercé pacifiquement ce droit.
III. Droits syndicaux et libertés publiques
Condamnation de syndicalistes. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait évoqué la condamnation de dirigeants syndicaux à des peines de douze à vingt-six ans d’emprisonnement pour trahison et conspiration. Elle avait demandé au gouvernement de faire le nécessaire pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à des peines de prison sévères. La commission note que, dans ses commentaires de 2006, la CISL, désormais Confédération syndicale internationale (CSI), a fait mention des faits suivants: 1) la détention, le 10 janvier 2006, de M. Juan Antonio Salazar du Syndicat libre des travailleurs de Cuba qui a été accusé d’avoir proféré des menaces, menaces dont il n’avait aucunement connaissance; et 2) six des sept dirigeants syndicaux indépendants qui ont été condamnés à des peines d’emprisonnement de douze à vingt-six ans sont toujours détenus; pour des raisons de santé, le septième doit purger sa peine à son domicile ou à l’hôpital. A ce sujet, la commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que M. Salazar n’a pas été détenu, qu’il ne représentait aucun secteur des travailleurs cubains, que sans emploi depuis 1995 il avait commis précédemment de nombreux délits de droit commun et qu’il avait été traduit en justice à plusieurs occasions. Le gouvernement ajoute que M. Salazar a quitté le pays le 29 novembre 2005. En ce qui concerne la condamnation de dirigeants syndicaux, la commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) aucun des condamnés n’était dirigeant syndical, étant donné qu’ils avaient pris la décision de ne pas avoir de relation de travail depuis plusieurs années; 2) ils menaient des activités visant à renverser l’ordre politique, économique et social décidé par le peuple cubain et consacré dans la Constitution; 3) leur responsabilité a été établie pour des actes qualifiés de délits qui visaient à nuire à la souveraineté de la nation; ils ont été sanctionnés conformément à l’article 91 du Code pénal et à la loi no 88 de 1999 de protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba; 4) aucun d’entre eux n’a été jugé ou sanctionné pour avoir exercé ou défendu la liberté d’opinion ou d’expression; 5) tous ont porté atteinte aux droits de l’homme du peuple cubain, en particulier à l’exercice des droits à la libre détermination, au développement et à la paix; 6) actuellement, la plupart des condamnés sont en prison où ils purgent leur peine, mais plusieurs ont bénéficié de mesures «extrapénales» pour des raisons humanitaires; et 7) la dignité humaine et l’intégrité physique et psychique des condamnés ont été respectées rigoureusement, et les détenus ont bénéficié en prison des mesures amples dont jouit l’ensemble de la population carcérale cubaine.
La commission note toutefois que le gouvernement fait mention de chefs d’inculpation généraux sans préciser les faits concrets qui ont entraîné la condamnation de ces personnes. Par ailleurs, le Comité de la liberté syndicale a demandé la libération de plusieurs d’entre elles. La commission rappelle à nouveau que la liberté d’association n’est qu’un aspect de la liberté d’association en général qui, elle-même, doit s’intégrer dans le vaste complexe des libertés fondamentales de l’homme, interdépendantes et complémentaires les unes des autres. Elle rappelle en outre qu’en 1970 la Conférence internationale du Travail a énuméré de manière explicite les droits fondamentaux qui sont nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, à savoir: a) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; b) la liberté d’opinion et d’expression, et en particulier le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; c) la liberté de réunion; d) le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartial; et e) le droit à la protection des biens des syndicats. Dans ces conditions, la commission demande de nouveau au gouvernement de faire le nécessaire pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à de sévères peines d’emprisonnement.
Enfin, la commission prend note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 28 août 2007 qui portent sur des questions législatives et pratiques en cours d’examen et sur des cas concrets de détentions de travailleurs de la Confédération ouvrière nationale indépendante (CONIC), de harcèlements et de menaces d’emprisonnement qui visent des délégués du Syndicat des travailleurs de l’industrie légère (SITIL) et de la confiscation de matériel et de l’aide humanitaire envoyée de l’étranger au Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC). La commission demande au gouvernement de communiquer ses observations sur ces cas concrets dans la mesure où sa réponse ne n’y réfère pas spécifiquement.
La commission prend note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) du 10 août 2006 sur l’application de la convention. La commission prie le gouvernement de faire parvenir ses observations sur cette question.
Par ailleurs, dans le cadre du cycle régulier de présentation de rapports et en vue de la session de novembre-décembre 2007, la commission prie le gouvernement de transmettre ses observations sur l’ensemble des questions d’ordre législatif et d’application pratique de la convention soulevées dans la précédente observation (voir observation de 2005, 76e session).
La commission prend note du rapport du gouvernement et des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). Elle prend également note du rapport du Comité de la liberté syndicale concernant le cas no 2258, rapport adopté par le Conseil d’administration à sa session de mars 2005.
La commission observe que le gouvernement réitère que le Code du travail est en voie de révision et que: 1) dans le cadre de cette révision, les commentaires de la commission ne sont pas les seuls à être pris en considération; 2) pratiquement tous les chapitres du Code du travail ont fait l’objet d’une révision et d’un ajustement aux conditions économiques et sociales du pays; 3) les travailleurs, les employeurs, les organismes, les institutions et tous les secteurs impliqués participent aux consultations menées dans le cadre de cette procédure et l’on s’emploie à parvenir à un consensus sur tous les aspects à modifier. La commission observe à ce propos que ledit processus se déroule depuis de nombreuses années sans que l’on soit parvenu, à ce jour, à des résultats concrets. La commission exprime l’espoir que la révision du Code du travail parviendra à son terme dans un proche avenir et que les commentaires qu’elle formule à propos de l’application de la convention auront été pris en considération. Elle rappelle au gouvernement que l’assistance technique du Bureau est à sa disposition et elle le prie de communiquer copie du projet mentionné.
Articles 2, 5 et 6 de la convention. La commission observe qu’elle fait valoir depuis de nombreuses années la nécessité de supprimer des articles 15 et 16 du Code du travail de 1985 la référence à la Centrale des travailleurs. Elle prend note également des commentaires de la CISL relatifs à la reconnaissance de la part du gouvernement d’une centrale syndicale unique, fortement contrôlée par l’Etat et par le Parti communiste, lequel en nomme les dirigeants. Ces mêmes commentaires évoquent également les obstacles entravant la constitution de syndicats indépendants, du fait des restrictions établies par la loi sur les associations. La commission note que le gouvernement affirme de son côté que: 1) l’existence à Cuba d’une centrale syndicale unitaire qui regroupe les 19 syndicats nationaux de branche n’a pas été imposée par le gouvernement et ne résulte pas non plus d’une disposition qui ne procéderait pas de la volonté souveraine des travailleurs cubains; 2) il convient de respecter la décision des travailleurs de maintenir l’unité de leur mouvement syndical en tant que condition déterminante de l’indépendance de la nation et de la continuité de l’exercice du droit de libre détermination; 3) la législation en vigueur (art. 54 de la Constitution de la République et art. 13 et 14 du Code du travail) et la pratique garantissent le plein exercice de l’activité syndicale et la jouissance la plus large du droit de se syndiquer; et 4) il est infondé d’affirmer que la loi sur les associations est utilisée pour faire obstacle à la création de syndicats, considérant que l’article 2, titre I, de ladite loi dispose explicitement que celle-ci n’est pas applicable aux organisations de masse et aux organisations sociales auxquelles se réfère l’article 7 de la Constitution, et considérant en outre que la Constitution en vigueur ne pose pas de restriction de quelque type que ce soit à la libre association des travailleurs ou au déploiement de leurs activités.
La commission insiste une fois de plus sur le fait que le pluralisme syndical doit être possible dans tous les cas et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait en se référant à une centrale syndicale spécifique. Même dans le cas où l’unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, la préférence de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie et de s’affilier à l’organisation de leur choix (voir l’étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). Cela étant, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles du Code du travail susmentionnés, et de l’informer dans son prochain rapport de toute mesure prise à cet égard.
Article 3. La commission rappelle qu’elle se référait dans ses observations antérieures à la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983, qui confère à la Centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales. Elle note que le gouvernement réitère les déclarations contenues dans son rapport précédent et insiste sur le fait que cette disposition a déjà été modifiée. La commission observe à ce propos que le décret-loi no 147 de 1994, que le gouvernement a présenté plusieurs fois comme étant l’instrument modificateur du décret-loi no 67 de 1983: 1) ne fait pas expressément référence, sous sa disposition septième à l’article 61 du décret-loi no 67, à l’effet d’abroger ou de modifier cet article; 2) énonce, sous sa disposition première, qu’«est confirmé le maintien en vigueur en tout ce qui ne s’oppose pas aux dispositions du présent décret-loi, des bases d’organisation et de fonctionnement établies dans … les décrets-lois nos 67 du 19 avril 1983…». Par conséquent, la commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport quelle est la disposition législative par laquelle a été modifié le décret-loi no 67 de 1983 en ce qui concerne le monopole de la Centrale des travailleurs dans la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales.
Droit de grève. Dans sa précédente observation, la commission notait que le droit de grève n’est pas reconnu dans la législation cubaine et que, dans la pratique, le recours à la grève est interdit. Elle avait rappelé à ce propos que le droit de grève est l’un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux et elle avait prié le gouvernement de prendre des dispositions afin de garantir que nul ne puisse faire l’objet d’une discrimination ou d’un préjudice dans le cadre de son emploi à raison de l’exercice pacifique du droit de grève, en le priant de la tenir informée à cet égard. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que: 1) même si le droit de grève est implicite dans la convention, il n’y apparaît pas expressément comme étant établi; 2) la législation en vigueur n’inclut aucune interdiction du droit de grève et les lois pénales ne prévoient aucune sanction réprimant l’exercice de tels droits; 3) la prérogative de décision en la matière appartient aux organisations syndicales; 4) le fait que Cuba est un Etat des ouvriers, des paysans et des autres travailleurs manuels et intellectuels garantit à ceux-ci une participation effective aux décisions et l’exercice d’un pouvoir réel en la matière, ce qui rend sans nécessité l’exercice du droit de grève, puisque car c’est à cela que contribuent l’instauration et le fonctionnement effectif de nombreux mécanismes de solution des conflits du travail, mécanismes dans lesquels les représentants syndicaux exercent d’importants pouvoirs. La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre des dispositions afin de garantir que nul ne puisse faire l’objet de discrimination dans le cadre de son emploi à raison de l’exercice pacifique du droit de grève.
II. Droits syndicaux et libertés publiques. Condamnations de syndicalistes
La commission rappelle qu’elle se référait dans ses précédents commentaires à la condamnation de dirigeants syndicaux à des peines de douze à vingt-six ans pour trahison et conspiration. Elle observe que la CISL a émis des commentaires à propos de ces condamnations et apporte des informations supplémentaires sur les conditions dégradantes de détention auxquelles sont soumises les personnes en question. Elle observe que le Comité de la liberté syndicale a abordé cette question dans le cadre de son dernier examen du cas no 2258, aux termes duquel il a recommandé que le gouvernement prenne des dispositions pour la libération immédiate des syndicalistes emprisonnés et prenne les mesures nécessaires pour garantir que nul ne puisse faire l’objet d’intimidations ou d’une hostilité quelconque en raison de son affiliation syndicale, y compris dans le cas où le syndicat en question n’est pas reconnu par l’Etat. La commission note que, pour sa part, le gouvernement ne reconnaît pas le statut de travailleurs aux dirigeants condamnés, refuse la reconnaissance des organisations syndicales que ces personnes dirigeaient et nie que les condamnations dont elles ont fait l’objet aient un lien quelconque avec leur activité syndicale. S’agissant des conditions de détention, le gouvernement déclare que le système pénitentiaire est en toutes circonstances sous le strict contrôle de l’Etat et de la justice et qu’il a pour mission de protéger les droits des condamnés et des membres de leur famille et de préserver le respect de la légalité.
La commission rappelle à nouveau que la liberté d’association professionnelle n’est qu’un aspect de la liberté d’association en général qui, elle-même, doit s’intégrer dans le vaste complexe des libertés fondamentales de l’homme, interdépendantes et complémentaires les unes des autres. Elle rappelle en outre qu’en 1970 la Conférence internationale du Travail a énuméré de manière explicite les droits fondamentaux qui sont nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, à savoir: a) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; b) la liberté d’opinion et d’expression et en particulier le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; c) la liberté de réunion; d) le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartial; e) le droit à la protection des biens des syndicats (voir l’étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 25). En conséquence, se ralliant pleinement aux recommandations faites par le Comité de la liberté syndicale, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à des peines de prison particulièrement sévères.
La commission prend note des commentaires de la Confédération internationale des syndicales libres (CISL), concernant les questions soulevées lors de son observation précédente, de même que de la réponse du gouvernement à cet égard.
La commission examinera ces questions ainsi que tous les autres points soulevés concernant l’application de la convention (voir observation 2003, 74e session) dans le cadre du cycle régulier des rapports en 2005.
La commission prend note du rapport du gouvernement, des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et de la Confédération mondiale du travail (CMT) et du débat ayant eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes. Elle prend également note du rapport du Comité de la liberté syndicale sur le cas no 2258, rapport adoptéà sa session de novembre 2003.
Articles 2, 5 et 6 de la convention. S’agissant de la nécessité de supprimer du Code du travail de 1985 la référence à la Centrale des travailleurs (art. 15 et 16), la commission souligne une fois de plus que le pluralisme doit rester possible dans tous les cas et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait; même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96).
La commission prend note, de même, des commentaires de la CISL relatifs à l’affiliation obligatoire de tous les travailleurs aussi bien à la Confédération des travailleurs cubains (CTC) qu’au Parti communiste. Elle note également que le gouvernement nie catégoriquement qu’il existe dans la législation une obligation de s’affilier à la CTC et souligne que les travailleurs le font volontairement. La commission rappelle que, conformément à la résolution de 1952 concernant l’indépendance du mouvement syndical, l’objectif fondamental et permanent du mouvement syndical est le progrès économique et social des travailleurs et que, à ces fins, il est indispensable de préserver, dans chaque pays, la liberté et l’indépendance du mouvement syndical; les gouvernements ne devraient pas chercher à transformer le mouvement syndical en un instrument politique qu’ils utiliseraient pour atteindre leurs objectifs politiques ni, non plus, essayer de s’immiscer dans les fonctions normales d’un syndicat en prenant prétexte de ses rapports librement établis avec un parti politique. La commission prie le gouvernement de garantir la liberté d’affiliation des travailleurs, conformément au principe énoncé ci-avant.
Article 3 de la convention. S’agissant de la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983, qui confère à la Centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales, la commission prend note une fois de plus de l’observation du gouvernement selon laquelle ledit décret aurait été modifié par effet de la septième disposition du décret-loi no 147 de 1994. Comme elle l’a fait dans une observation antérieure, la commission relève à cet égard que ledit décret: 1) ne fait pas expressément référence à l’article 61 du décret-loi no 67 dans le sens de l’abrogation ou de la modification de cet article; et 2) dispose, sous sa disposition première: «restent en vigueur toutes les dispositions qui ne sont pas contraires au présent décret-loi, ni aux principes d’organisation et de fonctionnement fixé par … les décrets-lois no 67 du 19 avril 1983 …». En conséquence, la commission prie une fois de plus instamment le gouvernement de modifier cette disposition, de manière à garantir la possibilité du pluralisme syndical en envisageant, par exemple, de remplacer la référence à la Centrale des travailleurs par «l’organisation la plus représentative».
La commission note en outre que, selon les informations communiquées par le gouvernement, ces aspects sont actuellement étudiés dans le cadre de la révision du Code du travail, ce dernier instrument devant être soumis à des consultations, à commencer par les assemblées de travailleurs. Ainsi, une fois achevé le processus de collecte et d’analyse des critères préconisés par les travailleurs, le projet sera réajusté et, à ce stade, l’assistance technique du Bureau sera sollicitée, après quoi le projet sera soumis à la ratification du Parlement. La commission constate que ce processus est en cours depuis de nombreuses années. Elle exprime une fois de plus le ferme espoir que ce projet sera approuvé dans un très proche avenir et qu’il tiendra compte du principe du pluralisme syndical. Elle prie le gouvernement de communiquer copie au Bureau dudit projet de révision.
Droit de grève. La commission prend note des commentaires de la CISL selon lesquels le droit de grève n’est pas reconnu dans la législation cubaine et, dans la pratique, le recours à la grève est interdit. La commission prend note également des informations du gouvernement selon lesquelles la législation ne réglemente pas les grèves, non plus qu’elle ne les limite ni ne les interdit, mais il n’est pas nécessaire aux travailleurs de recourir à cette forme d’action parce que les organisations syndicales représentatives sont garanties d’être entendues dans toutes les instances, dans les entreprises et auprès des pouvoirs publics, dès lors que les décisions à prendre concernent des intérêts des travailleurs. La commission rappelle que le droit de grève est l’un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Elle prie le gouvernement de prendre des dispositions afin de garantir que nul ne puisse faire l’objet de discrimination dans le cadre de son emploi à raison de l’exercice pacifique du droit de grève, et de la tenir informée à cet égard.
II. La commission note que la CISL et la CMT, dans leurs commentaires, la Commission de l’application des normes ainsi que le Comité de la liberté syndicale (dans le cas no 2258), abordent trois points: la non-reconnaissance d’organisations syndicales indépendantes, en particulier du Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC); les menaces, arrestations et condamnations à de lourdes peines d’emprisonnement - de dix à vingt-six ans - dont les dirigeants syndicaux du CUTC ont fait l’objet pour des activités syndicales pourtant licites; et enfin la confiscation de biens syndicaux. Parallèlement, la commission prend note des commentaires du gouvernement selon lesquels la CUTC n’est rien de plus qu’un petit groupe de personnes n’ayant jamais mené d’activités syndicales sur quelque lieu de travail que ce soit, qui entretiennent des rapports avec des organisations syndicales internationales, auxquelles elles ont d’ailleurs communiqué des informations fausses. Toujours selon le gouvernement, ces prétendus dirigeants syndicaux n’ont pas été condamnés à raison d’activités syndicales, ils ont été condamnés par les tribunaux nationaux, conformément à la législation en vigueur, pour des délits punis par le Code pénal cubain depuis une date antérieure aux faits reprochés, et ce dans le respect des garanties de procédure prévues par la Constitution. Nonobstant, la commission fait siennes les conclusions adoptées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2258, aux termes desquelles certaines des charges ou certains des antécédents évoqués par le gouvernement sont trop larges ou n’ont pas nécessairement un caractère délictuel et peuvent être assimilés à des activités syndicales légitimes, et elle signale, comme l’a fait le comité, que l’arrestation et la condamnation de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des faits en rapport avec des activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une violation grave des libertés publiques en général et des libertés syndicales en particulier. De plus, la commission rappelle que la liberté d’association professionnelle n’est qu’un aspect de la liberté d’association en général qui, elle-même, doit s’intégrer dans le vaste complexe des libertés fondamentales, libertés interdépendantes et complémentaires les unes des autres. Elle rappelle que, dans une résolution adoptée en 1970, la Conférence a énuméré explicitement les droits fondamentaux nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, notamment: a) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; b) la liberté d’opinion et d’expression et, en particulier, le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, recevoir et répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; c) la liberté de réunion; d) le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartial; e) le droit à la protection des biens des syndicats (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 25).
La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour qu’il soit garanti, dans la législation comme en pratique, que les travailleurs ont le droit de constituer des organisations de leur choix, conformément à ce que prévoit la convention, que ces organisations soient dûment reconnues et que les travailleurs qui s’y affilient ne soient pas l’objet de menaces, mesures d’arrestation et autres persécutions mais puissent exercer leurs activités syndicales sans ingérence du gouvernement. La commission insiste fermement pour que le gouvernement prenne les mesures nécessaires afin que les dirigeants syndicaux emprisonnés dont il est question dans les commentaires de la CISL et dans les conclusions du Comité de la liberté syndicale soient libérés sans délai.
La commission prend note du rapport du gouvernement et des commentaires formulés par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). La commission prie le gouvernement de lui faire parvenir, dans son prochain mémoire, ses observations sur les commentaires de la CISL.
La commission rappelle que ses précédents commentaires portaient sur: 1) la nécessité de supprimer dans le Code du travail de 1985 (art. 15 et 16) la référence à la «Centrale des travailleurs»; 2) la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983 (art. 61) qui confère à ladite centrale le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales; et 3) la recommandation du Comité de la liberté syndicale demandant au gouvernement que certaines organisations syndicales soient reconnues.
1. Pour ce qui est de la question du monopole syndical, la commission constate que, selon l’information du gouvernement, cette question est à l’étude dans le cadre du projet de révision du Code du travail.
Articles 2, 5 et 6 de la convention. S’agissant de la nécessité de supprimer du Code du travail de 1985 la référence à la Centrale des travailleurs, la commission souligne une fois de plus que le pluralisme doit rester possible dans tous les cas et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait; même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 96).
Article 3. Quant à la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983, qui confère à la Centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales, la commission prie instamment le gouvernement de modifier ladite disposition de telle sorte que la possibilité du pluralisme syndical soit garantie, par exemple en remplaçant la référence à la Centrale des travailleurs par la mention de l’«organisation la plus représentative».
La commission exprime à nouveau le ferme espoir que le projet de révision du Code du travail sera approuvé dans un proche avenir et qu’il tiendra compte des dispositions de la convention. Elle prie le gouvernement de faire parvenir une copie de ce projet de révision au Bureau.
2. En ce qui concerne les recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1961 (voir 328e rapport, juin 2002), demandant au gouvernement de reconnaître ce Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC) et de garantir le libre exercice des activités légitimes de cette organisation, dans un climat exempt de menaces, d’intimidation et de pressions, la commission note que le gouvernement répète les observations déjà formulées sur le cas no 1961, selon lesquelles l’exercice par cette organisation d’une quelconque activité syndicale n’ayant pas été prouvé, il est impossible d’attribuer une représentativité syndicale à des personnes qui ne dirigent ni ne représentent aucun groupe de travailleurs dans aucun lieu de travail du pays. La commission rappelle que la possibilité, en fait comme en droit, de constituer des organisations est le premier des droits syndicaux et le préalable indispensable sans lequel les autres garanties des conventions nos 87 et 98 resteraient lettre morte (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 44). Elle exprime donc l’espoir que les mesures nécessaires seront prises afin que ce droit soit garanti à tous les travailleurs, dans la loi et dans la pratique.
La commission prend note du rapport du gouvernement et rappelle que ses précédents commentaires portaient sur: 1) la nécessité de supprimer, dans le Code du travail de 1985 (art. 15 et 16), la référence à la «Centrale des travailleurs»; 2) la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983 (art. 61), qui confère à ladite centrale le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales; et 3) diverses recommandations du Comité de la liberté syndicale demandant au gouvernement de faire en sorte que la législation permette la reconnaissance de certaines organisations syndicales.
1. Articles 2, 5 et 6 de la convention. S’agissant de la nécessité de supprimer du Code du travail de 1985 la référence à la Centrale des travailleurs, la commission note que le gouvernement déclare une fois de plus que ce point est à l’étude dans le cadre du projet de révision du Code du travail, projet qui fait l’objet de consultations avec les partenaires sociaux. La commission regrette que, malgré ces affirmations réitérées, le projet en question n’a toujours pas été approuvé. Elle souligne, comme elle l’a fait à diverses occasions, que la convention no 87 implique que le pluralisme reste possible dans tous les cas. La loi ne devrait donc pas institutionnaliser un monopole de fait; même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 76). En conséquence, la commission exprime le ferme espoir que le projet susmentionné de révision du Code du travail sera approuvé dans un proche avenir et qu’il tiendra compte du principe exposé ci-dessus.
2. Article 3. Quant à la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983, qui confère à la Centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales, la commission note que, selon le gouvernement, le décret en question a été modifié par la sixième disposition du décret-loi no 147 de 1994. Sur ce point, la commission fait observer que: 1) ce décret ne fait pas référence expresse à l’article 61 du décret-loi no 67 en énonçant son abrogation ou bien sa modification; 2) qu’il dispose sous son premier article que «restent en vigueur toutes les dispositions qui ne sont pas contraires au présent décret-loi, aux bases structurelles et fonctionnelles établies dans … le décret-loi no 67 du 19 avril 1983 …». La commission note également que le gouvernement déclare que l’accord no 2820 de 1995 est actuellement en vigueur et que ce texte porte approbation des fonctions du ministère du Travail et de la Sécurité sociale (anciennement comité d’Etat au travail et à la sécurité sociale). La commission relève cependant que, dans la disposition finale dudit accord, il est fait référence à nouveau à la Centrale des travailleurs de Cuba. Elle prie donc à nouveau instamment le gouvernement de modifier ladite disposition de telle sorte que la possibilité du pluralisme syndical soit garantie, par exemple en remplaçant la référence à la Centrale des travailleurs par la mention de «l’organisation la plus représentative».
3. En ce qui concerne les recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1961 (voir 320e rapport, mars 2000), dans lequel ce comité demandait au gouvernement de faire en sorte que la législation permette la reconnaissance du Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC), la commission note que le gouvernement affirme qu’en réalité il n’existe pas de telle organisation syndicale et que les dirigeants syndicaux mentionnés n’ont pas étéélus. La commission rappelle que la possibilité, en fait comme en droit, de constituer des organisations, constitue le premier des droits syndicaux, le préalable indispensable sans lequel les autres garanties des conventions nos 87 et 98 resteraient lettre morte (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 44). Elle exprime donc l’espoir que les mesures nécessaires seront prises afin que ce droit soit garanti à tous les travailleurs, en droit comme dans la pratique.
La commission prend note du rapport du gouvernement. La commission prend également note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale en ce qui concerne les cas nos 1628, 1805 et 1961 (voir les 305e, 308eet 320erapports du comité, de novembre 1996, novembre 1997 et mars 2000, respectivement).
La commission rappelle que ses commentaires précédents portaient sur la nécessité: 1) de supprimer, dans le Code du travail de 1985 (art. 15 et 16), la référence à la «Centrale des travailleurs»; et 2) de modifier le décret-loi no 67 de 1983 (art. 61) qui confère à la centrale le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales.
En ce qui concerne la nécessité de supprimer la référence, dans le Code du travail, à la Centrale des travailleurs, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle c’est l’un des points qui est en cours d’examen dans le cadre des travaux de révision du code; à cette fin, ont été constitués des groupes de travail qui réunissent des représentants d’organismes, d’entreprises, des syndicats eux-mêmes et de la Centrale des travailleurs de Cuba. Un premier avant-projet est en cours d’élaboration. A ce sujet, la commission regrette que la révision du code, qui est annoncée depuis plusieurs années, n’ait pas encore abouti. La commission souligne que, en application des articles 2, 5 et 6 de la convention, qui consacrent le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, et le droit des organisations de travailleurs de constituer des fédérations et des confédérations, la constitution de plusieurs centrales syndicales devrait être possible. Dans ces conditions, la commission veut encore exprimer l’espoir que, prochainement, les modifications nécessaires seront apportées au Code du travail et elle prie le gouvernement de l’informer dans son prochain rapport de toute mesure adoptée à cet égard.
A propos de la nécessité de modifier le décret-loi no 67 de 1983 (art. 61) qui confère à la Centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales, la commission rappelle que, en vertu de l’article 3 de la convention, les organisations de travailleurs ont le droit d’organiser librement leur activité et de formuler leur programme d’action. Par conséquent, les organisations les plus représentatives, qu’elles soient ou non des centrales syndicales, devraient être en mesure de représenter leurs affiliés afin de défendre leurs intérêts professionnels devant les instances gouvernementales. La commission demande instamment au gouvernement de prendre des mesures pour modifier le décret-loi en question et de l’informer dans son prochain rapport de toute évolution à ce sujet.
Enfin, la commission observe que: 1) dans le cas no 1628, le Comité de la liberté syndicale a déploré que l’Union syndicale des travailleurs de Cuba (USTC) n’ait pas été reconnue juridiquement par les autorités, et il a insisté pour que cette organisation soit enregistrée et puisse fonctionner pleinement et sans discrimination; 2) dans le cas no 1805, le Comité de la liberté syndicale a demandé au gouvernement d’assurer que la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC) fonctionne librement et de veiller à ce que les autorités s’abstiennent de toute intervention tendant à restreindre les droits fondamentaux de cette organisation qui sont reconnus dans la convention no 87; et 3) dans le cas no 1961, le Comité de la liberté syndicale a constaté que le Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC), qui se considère comme une organisation syndicale indépendante, a été constitué il y a plus de quatre ans et demi mais que le gouvernement se refuse toujours à le reconnaître. Le comité a demandé au gouvernement de s’assurer que la législation permette, dans son application effective, la reconnaissance d’organisations de travailleurs telles que le CUTC. A cet égard, la commission partage les recommandations formulées par le comité en ce qui concerne les cas susmentionnés.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2001.]
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport ainsi que des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration dans le cas no 1805 (voir 308e rapport, novembre 1997, paragr. 225 à 240). Elle rappelle que ses précédents commentaires portaient sur la nécessité de supprimer du Code du travail de 1985 (art. 15 et 16) la référence à "la Centrale des travailleurs", de même que sur le décret-loi no 67 de 1983 (art. 61), qui confère à ladite centrale le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales.
La commission prend note des observations du gouvernement, notamment de sa volonté de reconnaître l'autonomie des organisations syndicales, décision qui a permis de saisir le Parlement de projets de loi qui ont ensuite été adoptés. Le gouvernement indique également que les groupes constitués pour procéder à une révision thématique du Code du travail poursuivent leurs travaux en concertation avec les différents secteurs de l'économie, les entreprises et les syndicats.
La commission ne peut que relever que le Comité de la liberté syndicale a été saisi de plaintes concernant le refus de reconnaître d'autres organisations syndicales et la détention momentanée de leurs dirigeants (cas nos 1628 et 1805, examinés respectivement en novembre 1992 et novembre 1997). Elle insiste sur la nécessité de supprimer de la législation du travail la référence expresse à "la Centrale des travailleurs", afin que tous les travailleurs puissent librement, en droit comme en pratique, constituer, en dehors de la structure établie par la loi, les syndicats de leur choix et s'y affilier, comme le prévoit l'article 2 de la convention.
La commission réitère à l'adresse du gouvernement son souhait d'être tenu informé de tout progrès réalisé en la matière.
La commission prend note du rapport du gouvernement et rappelle que ses observations antérieures portaient sur:
- la nécessité de supprimer, du Code du travail et des autres textes législatifs pertinents, toute mention de la "Centrale des travailleurs"; et
- l'ingérence du Parti communiste de Cuba dans l'élection des dirigeants syndicaux.
Au sujet des questions soulevées, la commission prend dûment note des observations du gouvernement, et en particulier de son désir de reconnaître au quotidien l'autonomie et l'indépendance des organisations syndicales, comme le montrent les modifications apportées en 1992 à l'article 7 de la Constitution, et le nombre de lois qui ont été adoptées ou modifiées à l'initiative des travailleurs et de leurs syndicats, suite aux discussions menées en toute indépendance à leurs congrès.
Le gouvernement ajoute qu'il n'existe pas, dans la législation en vigueur, de disposition prescrivant le contenu des règlements et des statuts syndicaux, ou les modes d'élection des dirigeants, aspects qui relèvent exclusivement des organisations syndicales, ainsi qu'il ressort de l'article 15 du Code du travail. Les statuts, les règlements et les résolutions qu'elles adoptent, ainsi que leur contenu, la structure, les principes et le régime des relations, sont discutés et approuvés en toute indépendance aux congrès des organisations syndicales concernées.
La commission prend aussi dûment note du fait que, comme l'a indiqué le gouvernement, le Code du travail devra être soumis à un processus de révision et d'actualisation qui permettra de l'adapter aux nouvelles conditions socio-économiques. La révision de la législation du travail fait partie d'un ensemble de transformations en cours dans le pays, parmi lesquelles il convient de citer la politique d'ouverture aux investissements étrangers, malgré les obstacles que présentent à cet égard les répercussions concomitantes sur le système de relations du travail. Ce sera l'occasion d'analyser, en consultation avec les travailleurs, les questions posées par la commission d'experts.
La commission insiste pour que, compte tenu du contexte unipartite et de l'existence d'une seule centrale syndicale, le gouvernement garantisse dans la législation et dans la pratique le droit qu'ont tous les travailleurs de constituer librement des organisations professionnelles indépendantes, aussi bien au niveau de la base qu'au niveau central, y compris hors de toute structure syndicale existante, s'ils le souhaitent.
La commission demande au gouvernement de faire en sorte que, à l'occasion de la révision prévue de la législation du travail, la référence expresse à "la Centrale des travailleurs", expression qui devrait figurer au pluriel et en lettres minuscules, ainsi que l'a suggéré la commission, soit supprimée du Code du travail et des autres textes législatifs.
La commission demande à nouveau au gouvernement de la tenir informée de tout progrès accompli à cet égard.
La commission prend note du rapport du gouvernement, des discussions ayant eu lieu devant la Commission de la Conférence, en 1993, ainsi que de la décision du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1628 (292e rapport, paragr. 21 (mars 1994)).
La commission rappelle que ses observations antérieures portaient sur:
-- la nécessité de supprimer, du Code du travail et des autres textes législatifs pertinents, toute mention de la "Centrale des travailleurs"; et
-- l'ingérence du Parti communiste de Cuba dans l'élection des dirigeants syndicaux.
S'agissant de la nécessité de supprimer du Code du travail et des autres textes législatifs pertinents la mention de la "Centrale des travailleurs", la commission prend note des indications contenues dans le rapport du gouvernement selon lesquelles, à partir des réformes de la Constitution et en application des dispositions du décret-loi no 147 de 1994, il sera nécessaire de réviser la législation du travail afin de l'adapter aux nouvelles conditions socio-économiques.
La commission insiste sur le fait que les réformes constitutionnelles ont des incidences appréciables sur le reste de la législation du travail, en conséquence elle espère que dans un proche avenir le Code du travail et les autres textes législatifs pertinents seront mis en conformité avec les réformes de la Constitution, et que toute référence à la "Centrale des travailleurs" sera supprimée.
S'agissant des relations entre la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC) et le Parti communiste, et aux ingérences incriminées du Parti communiste de Cuba dans l'élection des dirigeants syndicaux, la commission prend dûment note des observations exprimées par un membre travailleur de Cuba à la Commission de la Conférence, selon lesquelles les relations existantes entre la CTC et le Parti communiste ne compromettent pas la continuité du mouvement syndical, du fait que ce sont les affiliés de la centrale qui en adoptent les statuts, règlements et orientations, et qui élisent ses dirigeants de manière ouverte et démocratique, et qu'il n'y a pas de candidat proposé par le Parti communiste. Ce membre travailleur a déclaré que les rapports entre la CTC et le Parti communiste sont approuvés par les travailleurs de manière démocratique et qu'il n'appartient qu'à ces derniers d'en décider autrement.
Néanmoins, la commission réitère qu'une situation de parti unique et de centrale unique pourrait favoriser dans la pratique des ingérences extérieures préjudiciables à l'autonomie syndicale.
La commission prie le gouvernement de garantir dans la législation et dans la pratique le droit pour les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, de constituer sans autorisation préalable des organisations de leur choix, hors de toute structure syndicale existante s'ils le désirent (article 2 de la convention), ainsi que d'élire librement leurs représentants (article 3 de la convention).
La commission prie une fois de plus le gouvernement de la tenir informée de tout progrès à cet égard.
La commission a pris note du rapport du gouvernement, des débats devant la Commission de la Conférence en 1992, ainsi que des conclusions intérimaires formulées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1628 (284e rapport, adopté par le Conseil d'administration à sa 254e session (novembre 1992)).
a) Depuis de nombreuses années, la commission insiste sur la nécessité de supprimer de la législation la mention de la Centrale des travailleurs afin de garantir pleinement le droit des travailleurs et de leurs organisations de constituer les organisations de leur choix (articles 2 et 5 de la convention), en particulier au niveau de la centrale syndicale.
La commission prend note des observations formulées par un membre gouvernemental à la Commission de la Conférence et confirmées par le rapport du gouvernement, selon lesquelles le droit de constituer des organisations ou de s'y affilier est reconnu par la législation (art. 13 du Code du travail) et dans la pratique pour tous les secteurs d'activité, la Constitution nationale (à son article 54) garantissant aux travailleurs le droit de réunion, de manifestation et d'association. Nonobstant, la commission constate qu'à sa réunion de novembre 1992 le Comité de la liberté syndicale a examiné les déclarations de la Confédération internationale des syndicats libres concernant l'absence de réponse, de la part du ministère de la Justice, à la demande d'enregistrement et de reconnaissance de la personnalité juridique de l'Union générale des travailleurs de Cuba (UGTC); le comité, invoquant l'article 2 de la convention, a prié le gouvernement de se prononcer sans retard sur cette question et a souligné que le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix implique, en particulier, la possibilité effective de créer, dans un climat de pleine sécurité, des organisations indépendantes aussi bien de celles qui existent déjà que de tout parti politique (voir 284e rapport, cas no 1628 (Cuba), paragr. 1011 et 1029).
La commission prend note avec intérêt des modifications apportées à la Constitution nationale, au titre desquelles la mention de la Centrale des travailleurs de Cuba à l'article 7 a disparu pour faire place à une disposition plus générale selon laquelle l'Etat socialiste cubain reconnaît et encourage les organisations de masse et les organisations sociales apparues au cours du processus historique des luttes du peuple, ainsi que l'abrogation de l'article 99, conférant le droit au secrétaire général de la Centrale des travailleurs de participer aux sessions du Conseil des ministres. De même, la commission prend note des informations du gouvernement selon lesquelles les modifications de la Constitution nationale ont des incidences notables sur un ensemble de législations en vigueur - notamment sur le Code du travail -, lesquelles devront être étudiées et modifiées pour être en harmonie avec la Constitution, une fois menées à bien les consultations nécessaires avec les organisations syndicales.
En conséquence, la commission exprime le ferme espoir que l'ensemble de la législation syndicale soit mis en harmonie avec la récente réforme de la Constitution et, concrètement, que soient modifiés le Code du travail et les autres textes de loi dans un proche avenir, de manière à en supprimer les références à une centrale unique des travailleurs. De même, tenant dûment compte des conclusions du Comité de la liberté syndicale, la commission espère que sera pleinement garanti dans la pratique le droit des travailleurs de constituer, s'ils le désirent, en toute liberté et dans un climat de complète sécurité, des organisations syndicales indépendantes de celles qui existent déjà et de tout parti politique, conformément à l'article 2 de la convention. La commission prie le gouvernement de la tenir informée de tout développement à cet égard.
b) Dans ses précédentes observations, la commission avait également évoqué les commentaires formulés par la Confédération internationale des syndicats libres à propos du choix des dirigeants syndicaux par le Parti communiste et non par les travailleurs. Sur ce point, un membre du gouvernement a informé la Commission de la Conférence, en 1992, que, lors du renouvellement récent d'une partie de la direction de la Centrale des travailleurs de Cuba, des travailleurs issus de la classe ouvrière ont été élus. De même, selon le rapport du gouvernement, n'importe quel travailleur peut poser sa candidature et être élu comme dirigeant syndical dès le début du processus des relations du travail.
En prenant dûment note de ces informations, la commission rappelle que, bien qu'il soit dit dans le préambule des statuts de la CTC que cette organisation syndicale ne fait pas partie intégrante de l'appareil d'Etat et que ni elle-même ni les syndicats ne sont des organisations du parti, la CTC et les syndicats reconnaissent ouvertement et consciemment la prééminence du parti en tant qu'avant-garde et organe supérieur de la classe ouvrière, faisant leur et se conformant à la politique du parti et exerçant leurs activités conformément aux principes du centralisme démocratique.
La commission rappelle le paragraphe 5 de la résolution sur l'indépendance du mouvement syndical, adopté par la Conférence internationale du Travail en 1952, qui dispose: "Lorsque les syndicats décident, en se conformant aux lois et usages en vigueur dans leurs pays respectifs et à la volonté de leurs membres, d'établir des relations avec des partis politiques ou d'entreprendre une action politique conforme à la Constitution pour favoriser la réalisation de leurs objectifs économiques et sociaux, ces relations ou cette action politique ne doivent pas être de nature à compromettre la continuité du mouvement syndical ou de ses fonctions sociales et économiques, quel que soient les changements politiques qui peuvent survenir dans le pays."
La commission considère que, dans le contexte d'un parti unique et de centrale syndicale unique, lorsque les statuts de cette dernière proclament comme objectif de suivre la politique du parti, ce système favorise l'immixtion dans les affaires syndicales et dans l'élection des dirigeants syndicaux, contrairement à ce que dispose l'article 3 de la convention. De ce fait, la commission prie le gouvernement de l'informer de tout développement en ce qui concerne les relations entre le Parti communiste de Cuba et la Centrale des travailleurs de Cuba.
La commission a pris note des rapports du gouvernement et des informations communiquées par une représentante gouvernementale à la Commission de la Conférence en 1991, ainsi que des observations formulées par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) dans sa communication du 31 janvier 1991. Elle a également pris note des observations communiquées par la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC) sur les observations antérieures de la commission et sur les commentaires de la CISL.
Dans ses observations antérieures, la commission avait indiqué que la mention expresse de la Centrale des travailleurs de Cuba dans le Code du travail (notamment dans ses articles 15 et 16) était en contradiction avec la convention.
Dans son rapport, le gouvernement rappelle une nouvelle fois que l'article 13 du Code du travail reste pleinement en vigueur; aux termes de cet article "tous les travailleurs, tant manuels qu'intellectuels, ont le droit de s'associer volontairement et de former des organisations syndicales sans autorisation préalable". Le gouvernement indique que, en vertu de ce texte, 98 pour cent des travailleurs ont ainsi décidé de se grouper en syndicats de branche fédérés au sein de la CTC et que les textes juridiques mentionnant celle-ci, loin de limiter la liberté syndicale, avaient pour objet de garantir qu'aucune décision administrative relative aux droits des travailleurs ne soit adoptée sans consultation des organisations syndicales. Selon le gouvernement, ces organisations agissent et exercent leurs droits conformément aux principes, statuts et règlements démocratiquement débattus et approuvés par leurs membres.
Tout en prenant note des déclarations du gouvernement, la commission rappelle qu'en mentionnant spécifiquement la "Centrale des travailleurs" de Cuba divers articles du Code du travail consacrent au niveau central le principe de l'unicité syndicale dans la législation. Aussi la commission souligne-t-elle une nouvelle fois que, dans son Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective, elle avait précisé que, même dans le cas d'un monopole de fait, conséquence d'un regroupement de tous les travailleurs, la législation ne doit pas institutionnaliser cette situation de fait en citant nommément, par exemple, la centrale unique, et ceci même s'il s'agissait là d'une revendication de l'organisation syndicale existante. En effet, même dans le cas où, à un moment donné de la vie sociale d'un pays, une unification du mouvement syndical a eu les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent cependant pouvoir sauvegarder, pour l'avenir, le libre choix de créer, s'ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure syndicale établie.
La commission note que les commentaires de la CISL portent sur les points suivants:
- impossibilité de créer des organisations syndicales indépendantes; - désignation de dirigeants syndicaux par le Parti communiste et non par les travailleurs;
- parmi les fonctions assignées au syndicat, augmentation de la production et de la productivité du travail;
- imposition d'une discipline du travail et pressions exercées sur les travailleurs pour leur faire exécuter des tâches à titre "volontaire".
La commission note avec regret que le rapport du gouvernement ne mentionne pas spécifiquement ces commentaires. En revanche, en ce qui concerne la désignation des dirigeants syndicaux, la CTC signale dans un document annexé au rapport que la désignation des candidats au comité national est parfaitement démocratique et ne comporte ni pressions ni campagnes en faveur d'un candidat ou d'un autre. Durant l'organisation du XVIe Congrès ouvrier qui a eu lieu en janvier 1990, les listes des candidatures à ce comité, qui compte 195 membres au total, ont rassemblé plus de 800 candidats proposés par les organismes intermédiaires, après que le comité organisateur national, conjointement avec tous les secrétaires généraux des syndicats, eut élaboré un avant-projet de candidatures qu'il a présenté aux délégations provinciales formées de tous les délégués élus pour participer au congrès. Dans ces réunions, chaque délégué avait le droit de s'opposer, arguments à l'appui, à la candidature de toute personne qu'il ne souhaitait pas voir figurer sur la liste des candidats ou de proposer une autre personne à condition de ne pas modifier le chiffre total de 195 membres. Cela ne signifiait pas que le résultat était prévu d'avance, puisque les délégués disposaient de deux possibilités pour exprimer leur choix: lors de la présentation de l'avant-projet de candidatures à la délégation de leur province et lors de l'élection du congrès lui-même.
En ce qui concerne les fonctions des syndicats liées à l'augmentation de la production et de la productivité du travail, à l'imposition d'une discipline du travail et aux pressions exercées sur les travailleurs pour leur faire exécuter des tâches à titre "volontaire", la CTC déclare que, dans un Etat ouvrier et paysan, il faut tenir compte du fait que servir les travailleurs est l'objectif principal et que, par conséquent, l'augmentation de la production et de la productivité améliore le bien-être des travailleurs et du peuple, puisque les travailleurs se sont libérés de l'exploitation et que tous leurs efforts se traduisent par la création d'équipements contribuant au développement du pays.
La commission observe également que, aux termes du préambule des statuts de la CTC, bien que l'organisation syndicale ne fasse pas partie de l'appareil de l'Etat et que la centrale et les syndicats ne soient pas des organisations du Parti, les statuts admettent ouvertement et consciemment l'autorité supérieure de ce Parti - considéré comme l'avant-garde et l'organisation suprême de la classe ouvrière -, reconnaissent, approuvent et suivent la politique du Parti et agissent conformément aux principes du centralisme démocratique.
Toujours aux termes du préambule, les tâches des syndicats nationaux sont les suivantes: organiser et développer le travail volontaire, comme pierre angulaire de l'éducation communiste des travailleurs; élever constamment le niveau de conscience de classe socialiste des travailleurs par un renforcement de la discipline du travail favorisant l'augmentation de la production et l'amélioration constante de la productivité du travail; organiser l'émulation socialiste entre les travailleurs.
A ce sujet, la commission considère que l'énumération de ces tâches dans les statuts ne permet pas à l'organisation de conduire ses activités librement vis-à-vis des pouvoirs publics. En outre, la consécration, par la législation, de la CTC comme organisation unique au niveau central ne permet pas aux travailleurs de constituer des organisations de conception syndicale différente indépendantes des pouvoirs publics ou de s'y affilier contrairement aux articles 2, 3, 5 et 6 de la convention.
La commision souhaite également rappeler à cet égard le paragraphe 5 de la résolution concernant l'indépendance du mouvement syndical adoptée par la Conférence internationale du Travail en 1952: "lorsque les syndicats décident, en se conformant aux lois et usages en vigueur dans leurs pays respectifs et à la volonté de leurs membres, d'établir des relations avec des partis politiques ou d'entreprendre une action politique conforme à la Constitution pour favoriser la réalisation de leurs objectifs économiques et sociaux, ces relations ou cette action politique ne doivent pas être de nature à compromettre la continuité du mouvement syndical ou de ses fonctions sociales et économiques, quels que soient les changements politiques qui peuvent survenir dans le pays".
La commission demande donc de nouveau au gouvernement de lui faire connaître les mesures qu'il entend adopter pour supprimer dans la législation les nombreuses références précises à une organisation syndicale unique désignée sous le nom de "Centrale des travailleurs", de façon à permettre réellement aux travailleurs de constituer des organisations de leur choix pleinement indépendantes des pouvoirs publics et de s'y affilier, conformément à l'article 2 de la convention. La commission demande au gouvernement de lui communiquer des informations à ce sujet.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 79e session.]
La commission a pris note du rapport du gouvernement et des opinions de la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC) sur les commentaires antérieurs de la commission. De plus, la commission note les commentaires formulés par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur l'application de la convention.
Dans son observation antérieure, la commission avait relevé que le Code du travail, entré en vigueur en 1985, continue à mentionner expressément la Centrale des travailleurs de Cuba (notamment en son article 15) et que le décret-loi no 67, du 19 avril 1983, confère à cette centrale le monopole de la représentation des travailleurs du pays auprès du Comité d'Etat du travail et de la sécurité sociale du ministère du Travail (art. 61).
Dans son rapport, le gouvernement réitère ses déclarations sur le caractère historique et la volonté d'unité syndicale du mouvement ouvrier cubain, antérieurs à toute loi, ainsi que la consécration des principes de la convention dans la législation cubaine par la reconnaissance de la réalité historique du syndicalisme à Cuba, qui se renouvelle et se renforce dans les congrès ouvriers qui se réunissent tous les cinq ans. Le gouvernement ajoute que, pour permettre aux travailleurs qui le souhaitent de créer des syndicats de leur choix en dehors de la structure syndicale en place, l'article 13 du Code du travail dispose que "tous les travailleurs, tant manuels qu'intellectuels, ont le droit, sans autorisation préalable, de s'associer volontairement et de constituer des organisations syndicales".
La CTC déclare pour sa part que, tant elle que les syndicats nationaux existants, réunissent en fait 98 pour cent des travailleurs du pays et sont financés exclusivement par les cotisations syndicales volontaires que les travailleurs paient directement et personnellement. La CTC ajoute que les travailleurs sont satisfaits de la gestion de la CTC et des syndicats et continuent de soutenir leur mouvement syndical.
La CTC expose en détail l'intervention massive des travailleurs avant et pendant son XVIe congrès (janvier 1990), qui a adopté des modifications de ses statuts. Enfin, elle fait remarquer que, le jour où ils ne se sentiront pas défendus et représentés par la centrale des travailleurs et ses syndicats, les travailleurs se donneront les syndicats qu'ils souhaitent ou qu'ils décident de créer et que rien ne les empêche de le faire.
Prenant note de ces déclarations, notamment sur l'évolution et la pratique du mouvement syndical à Cuba, ainsi que des déclarations antérieures du gouvernement sur le rôle important des travailleurs dans la prise de décisions à tous les niveaux, la commission ne peut que rappeler, une fois de plus, que la législation nationale, aux articles 15, 16 et 18 du Code du travail, en citant nommément la "centrale des travailleurs", consacre par là même le système d'unicité syndicale dans la loi.
La commission rappelle que le paragraphe 137 de son Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective précise que, même dans le cas d'un monopole de fait, conséquence d'un regroupement de tous les travailleurs, la législation ne devrait pas institutionnaliser cette situation de fait en mentionnant, par exemple, de manière expresse, la centrale unique. Même dans le cas où, à un moment donné de la vie sociale d'un pays, une unification du mouvement syndical a eu les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent cependant pouvoir sauvegarder pour l'avenir le libre choix de créer, s'ils le souhaitent, des organisations syndicales en dehors de la structure syndicale établie.
En conséquence, la commission prie de nouveau le gouvernement de bien vouloir indiquer les mesures qu'il envisage de prendre pour supprimer dans sa législation les nombreuses références à une seule centrale unique désignée dans la législation comme la "centrale des travailleurs", et pour permettre aux travailleurs qui le désirent de créer les organisations syndicales de leur choix en dehors de la structure syndicale existante.
De plus, dans une communication du 31 janvier 1991, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) présente des commentaires sur l'application de la convention concernant l'unicité syndicale, de l'impossibilité de créer des organisations syndicales indépendantes, le choix des dirigeants syndicaux par le Parti communiste et non par les travailleurs, et les fonctions assignées au syndicat qui doivent faire augmenter le rendement des travailleurs et imposer la discipline du travail. La commission demande au gouvernement de bien vouloir répondre à ces commentaires.
Etant donné que le gouvernement n'a pas encore eu le temps de répondre aux commentaires de la CISL, la commission traitera ces questions spécifiques lors de sa prochaine réunion, après avoir pris connaissance des observations du gouvernement.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1991.]
Dans son observation précédente, la commission avait relevé que le Code du travail, entré en vigueur en 1985, continue à mentionner expressément la Centrale des travailleurs de Cuba (notamment en son article 15) et que le décret-loi no 67 du 19 avril 1983 confère à cette centrale le monopole de la représentation des travailleurs du pays auprès du Comité d'Etat du travail et de la sécurité sociale du ministère du Travail (art. 61).
Dans son rapport, le gouvernement signale que l'article 15 du Code du travail ne mentionne pas nommément la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC), telle qu'elle est désignée à l'article 1er de ses statuts. L'article 15 du Code du travail ne saurait être compris hors d'un contexte général qui s'exprime dans cette disposition juridique elle-même car la mention de la Centrale des travailleurs n'implique pas l'institutionnalisation de la Centrale des travailleurs de Cuba (CTC), non plus que la création ou le maintien d'un régime syndical unitaire. Le gouvernement affirme dans son rapport que l'expression "centrale des travailleurs" à cet article, loin de chercher à institutionnaliser ou maintenir un "monopole syndical", pour reprendre les termes de la commission d'experts, réaffirme et met en vigueur, dans le cadre de l'ordre juridique cubain, un principe reconnu à l'article 3 de la convention. Le gouvernement répète une fois de plus que la volonté d'unité du mouvement syndical ne découle pas de la loi mais constitue un fait historique renforcé et consolidé par les travailleurs eux-mêmes au cours de leurs combats révolutionnaires et syndicaux, qui s'est manifesté dès les premiers congrès ouvriers à la fin du siècle dernier, antérieurement à toute législation et à la convention no 87.
Dans son rapport, le gouvernement déclare que l'article 61 du décret-loi no 67 de 1983, s'il est examiné isolément, ne donne pas la mesure de l'amplitude des formes de participation des travailleurs au processus de prise de décisions à tous les niveaux, que stimule et protège l'ensemble de la législation du travail. Dans la pratique, telle qu'elle est protégée et stimulée par les multiples dispositions du Code du travail et de la législation qui le complète, les directions et départements divers qui accomplissent les fonctions du Comité d'Etat du travail et de la sécurité sociale consultent les syndicats nationaux au cours du processus de prise de décisions lorsque les intérêts des travailleurs sont en jeu. La Centrale des travailleurs de Cuba (CTC), qui groupe 17 syndicats nationaux, n'est pas une association exclusive et limitée, comme on le laisse entendre en la qualifiant de "monopole syndical". D'autre part, la CTC et les 17 syndicats nationaux de branche se subdivisent en comités provinciaux et municipaux et en 58.569 sections syndicales et 2.576 bureaux syndicaux au total, groupant 98 pour cent des travailleurs de l'ensemble du pays.
La commission, prenant note à nouveau des déclarations qui précèdent, notamment sur l'évolution et la pratique du mouvement syndical à Cuba, ne peut que rappeler que la législation nationale, aux articles 15, 16 et 18 du Code du travail, cite nommément la "Centrale des travailleurs" au singulier, consacrant par-là même le système d'unicité syndicale dans la loi.
La commission rappelle que le paragraphe 137 de son Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective précise que, même dans le cas d'un monopole de fait, conséquence d'un regroupement de tous les travailleurs, la législation ne devrait pas institutionnaliser une telle situation. Même dans le cas où, à un moment donné de la vie sociale d'un pays, une unification du mouvement syndical a eu les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent cependant pouvoir sauvegarder pour l'avenir le libre choix de créer, s'ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure syndicale établie.
En conséquence, la commission prie de nouveau le gouvernement de bien vouloir indiquer les mesures qu'il envisage pour supprimer dans sa législation les nombreuses références à une seule centrale unique désignée dans la législation comme la "Centrale des travailleurs" et pour permettre aux travailleurs qui le désirent de créer les syndicats de leur choix en dehors de la structure syndicale existante.